Payeur et Syndicat des travailleuses et travailleurs CPRCN CSN |
2008 QCCLP 5364 |
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[1] Le 21 avril 2008, monsieur Yvon Payeur, le travailleur, dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 18 mars 2008 à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST maintient celle qu’elle a initialement rendue le 6 décembre 2007 et déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais pour le remplacement ou la réparation de ses lunettes solaires.
[3] Une audience se tient à Baie-Comeau le 10 juillet 2008 en présence du travailleur et d’une représentante de l’employeur le « Syndicat des travailleurs et travailleuses du CPRCN CSN ». Le 20 mai 2008, l’avocat de la CSST a informé la Commission des lésions professionnelles qu’il ne serait pas présent à l’audience.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[4] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a droit au remboursement du coût d’achat de nouvelles lunettes solaires pour remplacer celles endommagées lors de l’accident du travail subi le 5 novembre 2007.
L’AVIS DES MEMBRES
[5] Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales sont d’avis que le travailleur a droit au remboursement des frais pour le remplacement de ses lunettes solaires. Ils retiennent que les lunettes solaires peuvent être considérées comme un vêtement au sens de l’article 112 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi), puisqu’elles couvrent une partie du corps humain et le protègent, d’autant plus que le travailleur est photo phobique. De plus, le travailleur remplit les autres conditions de cette disposition.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[6] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur a droit au remboursement du coût d’achat de nouvelles lunettes solaires pour remplacer celles endommagées lors de l’accident du travail subi le 5 novembre 2007.
[7] L’article 112 de la loi prévoit ce qui suit :
112. Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit, sur production de pièces justificatives, à une indemnité maximale de :
1° 300 $ pour le nettoyage, la réparation ou le remplacement des vêtements endommagés par suite d'un accident du travail;
2° 300 $ par année pour les dommages causés à ses vêtements par une prothèse ou une orthèse au sens de la Loi sur les laboratoires médicaux, la conservation des organes, des tissus, des gamètes et des embryons et la disposition des cadavres (chapitre L-0.2) dont le port est rendu nécessaire en raison d'une lésion professionnelle.
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1985, c. 6, a. 112; 2001, c. 60, a. 166.
[8] La preuve démontre que le travailleur est agent de relations humaines pour le Centre de Protection et de réadaptation pour la Côte-Nord. Il est également président de son syndicat pour sa région. Le 5 novembre 2007, il est libéré syndicalement par son employeur pour se rendre à une réunion. Il s’y rend en voiture accompagné de deux autres collègues. C’est une de ses collègues qui conduit. Ils sont alors victimes d’un accident de la route à la suite d’un impact violent avec un autre véhicule.
[9] Le 6 décembre 2007, la CSST rend une décision par laquelle elle reconnaît que le travailleur a subi un accident du travail qui a entraîné des diagnostics de contusions thoracique et lombaire et de contusion à l’épaule droite. Dans le cadre de cet accident, le travailleur a brisé ses lunettes solaires.
[10] Le travailleur réclame le remboursement du coût d’achat de nouvelles lunettes solaires pour remplacer celles qu’il a brisées lors de cet accident. Il indique qu’il est photo phobique et qu’il doit toujours porter des lunettes solaires pour les activités extérieures. Il soumet une recommandation de son optométriste pour appuyer cette affirmation. De plus, à l’audience, le travailleur déclare qu’il est atteint d’un diabète de type II, ce qui rend ses yeux plus vulnérables. Il doit donc prendre des précautions particulières pour ne pas endommager ses yeux, notamment en portant des lunettes solaires de qualité.
[11] Le travailleur a également déposé à la CSST la facture de ses lunettes achetées le 23 août 2006 qui ont été brisées lors de l’accident. Le montant s’élève à 250,69 $. Il indique à la CSST que, aujourd’hui, le coût d’achat de nouvelles lunettes équivalentes s’élève à 265,50 $.
[12] L’article 112 prévoit qu’un travailleur victime d’une lésion professionnelle a droit, sur production de pièces justificatives, à une indemnité maximale de 300 $ pour le nettoyage, la réparation ou le remplacement des vêtements endommagés par suite d’une lésion professionnelle.
[13] Dans le présent cas, il n’est pas contesté que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 5 novembre 2007 et que ses lunettes ont été endommagées par suite de cet accident. Il reste à déterminer si des lunettes solaires peuvent constituer un « vêtement » au sens de cette disposition.
[14] Comme l’a déjà fait la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Poitras et Sear’s Canada inc.[2], en l’absence d’une définition à la loi, il y a lieu de s’en remettre au sens usuel du mot « vêtement » tel qu’on le retrouve dans les dictionnaires courants. Le Petit Robert[3] définit ainsi le mot « vêtement » :
« 1o Didact. objets fabriqués pour couvrir le corps humain, le cacher, le protéger, le parer (coiffure, chaussures, linge, habit et divers accessoires).
[…]
2o Cour. LES VÊTEMENTS : ensemble des objets servant à couvrir le corps humain; habillement (comprenant le linge mais non les chaussures).
[…]
3o Fig. Ce qui couvre, cache, pare, protège…
[15] Le Petit Larousse[4] le définit ainsi :
1. Tout ce qui sert à couvrir le corps humain pour le protéger, le parer; pièce de l’habillement; habit.
[16] La Commission des lésions professionnelles estime que le mot « vêtement » inclut les lunettes solaires puisqu’elles servent à couvrir une partie du corps humain et que, dans le présent cas, elles ont pour fonction de protéger les yeux particulièrement sensibles du travailleur.
[17] Pour ces raisons, la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur a droit au remboursement du coût d’achat de nouvelles lunettes solaires pour remplacer celles endommagées lors de l’accident du travail survenu le 5 novembre 2007, jusqu’à concurrence du montant de 300 $ prévu à la loi et sur présentation des pièces justificatives appropriées.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête de monsieur Yvon Payeur, le travailleur;
INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 18 mars 2008 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement du coût d’achat de nouvelles lunettes solaires pour remplacer celles endommagées lors de l’accident du travail subi le 5 novembre 2007.
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Me Monique Lamarre |
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Commissaire |
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Me René Fréchette |
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PANNETON LESSARD |
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Représentant de la partie intervenante |
AVIS :
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