Hydro-Québec c. Churchill Falls (Labrador) Corporation Ltd. |
2016 QCCS 3746 |
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JC00C9 |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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N°: |
500-17-078217-133 |
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DATE : |
Le 8 novembre 2016 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : L’HONORABLE MARTIN CASTONGUAY, J.C.S. |
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HYDRO-QUÉBEC |
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Demanderesse |
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c. |
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CHURCHILL FALLS (LABRADOR) CORPORATION LIMITED |
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Défenderesse |
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JUGEMENT RECTIFICATIF |
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[1] CONSIDÉRANT que le jugement dans cette affaire fut rendu le 8 août 2016;
[2] CONSIDÉRANT que le 18 août 2016, les avocats d’Hydro-Québec indiquaient au Tribunal par courriel avoir constaté un certain nombre de coquilles;
[3] CONSIDÉRANT qu’en raison de la période estivale le soussigné n’a été informé du courriel des avocats d’Hydro-Québec une fois qu’une inscription en appel fut produite;
[4] CONSIDÉRANT que toutes les parties impliquées sont d’accord à ce que par jugement rectificatif, ces coquilles soient corrigées;
[5] CONSIDÉRANT que ces coquilles et/ou leur correction n’affectent en rien le dispositif du jugement;
[6] CONSIDÉRANT l’arrêt de la Cour d’appel, Droit de la Famille - 2455 [1996] R.D.F. 472 C.A.;
[7] CONSIDÉRANT qu’il est approprié de procéder à la correction des coquilles apparaissant aux paragraphes 10-15-24-42-77-82-102-108-118-131-160-217-230-282-298-308-362-371-372-429-468-473-523-542-565-566-597-605-620-623-637-675-693-713-736-740-742-780-811-823-870-884-899-902-908-913-954-1024-1028-1045-1054-1081-1137;
[8] CONSIDÉRANT l’article 338 du Code de procédure civile;
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[9] RECTIFIE les coquilles apparaissant aux paragraphes 10-15-24-42-77-82-102-108-118-131-160-217-230-282-298-308-362-371-372-429-468-473-523-542-565-566-597-605-620-623-637-675-693-713-736-740-742-780-811-823-870-884-899-902-908-913-954-1024-1028-1045-1054-1081-1137;
[10] LE TOUT SANS FRAIS de justice.
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__________________________________ Martin Castonguay, j.c.s. |
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Hydro-Québec c. Churchill Falls (Labrador) Corporation Ltd. |
2016 QCCS 3746 |
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COUR SUPÉRIEURE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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N°: |
500-17-078217-133 |
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DATE : |
Le 8 novembre 2016 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : |
L’HONORABLE |
MARTIN CASTONGUAY, J.C.S. |
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HYDRO-QUÉBEC |
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Demanderesse |
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c. |
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CHURCHILL FALLS (LABRADOR) CORPORATION LIMITED |
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Défenderesse |
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JUGEMENT RECTIFIÉ |
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II. LES PROTAGONISTES D’INTÉRÊT
D) NEWFOUNDLAND AND LABRADOR HYDRO (NLH)
III. SITUATION DES PARTIES À UNE ÉPOQUE CONTEMPORAINE AUX NÉGOCIATIONS..
A) LA PROVINCE DE QUÉBEC ET HYDRO-QUÉBEC
V. BREF RÉSUMÉ DE LA POSITION DES PARTIES
VI. CIRCONSTANCES ENTOURANT LA CONCLUSION DU CONTRAT DU 12 MAI 1969
B) HISTORIQUE DES NÉGOCIATIONS
C) NÉGOCIATIONS MENANT À LA SIGNATURE DU CONTRAT DU 12 MAI 1969
3) CLAUSE DE FLEXIBILITÉ OPÉRATIONNELLE
VII. RELATION ENTRE LES PARTIES ENTRE LE 12 MAI 1969 ET 1998
B) LES DEMANDES DE TERRE-NEUVE ET LES JUGEMENTS
C) NOUVELLES RONDES DE NÉGOCIATIONS
VIII. EXPLOITATION DE LA CENTRALE ET TRANSMISSION DE L’ÉNERGIE
A) INTERACTION ENTRE H.Q. ET CF(L)Co
B) NOUVELLE RÉALITÉ DANS LA TRANSMISSION DE L’ÉNERGIE
· RAPPORT BODELL : Continuous Energy : an overview of Contemporaneous Industry context
· RAPPORT PFEIFENBERGER : CF(L)Co’s Sales of « Interruptible » Power.
ANNEXE III - Questions en litiges tels que proposées par les parties
[1] Depuis le 12 mai 1969, Hydro-Québec (ci-après désignée « H.Q. ») et Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited (ci-après désignée « CF(L) Co ») sont liées par un contrat désigné sous le vocable « Power Contract ». Or, celui-ci vient à terme le 1er septembre 2016 et de nouvelles dispositions contenues à l’Annexe III du contrat du 12 mai 1969 doivent entrer en vigueur à cette même date et régir les parties pour une période supplémentaire de 25 ans.
[2] Les parties ne s’entendent pas sur la portée de certaines dispositions de cette Annexe III allant jusqu’à la qualifier différemment. Ainsi, pour CF(L)Co, il s’agit d’un « Renewal contract » tandis que pour H.Q., il s’agit plutôt d’un « Renewed Contract ». La différence est d’importance.
[3] En effet, une des questions en litige est de déterminer s’il s’agit de deux contrats distincts ou encore faisant partie de ce que H.Q. qualifie d’ensemble contractuel.
[4] Cela étant, et vu que la présente décision est rédigée dans la langue française, le Tribunal désignera l’Annexe III comme étant le « Contrat renouvelé » et le contrat du 12 mai 1969 comme étant le « Contrat principal ».
[5] Outre l’interprétation du contrat renouvelé, H.Q. soulève certaines divergences d’opinion quant à la portée du Contrat principal ainsi que du Contrat Renouvelé en rapport à de nouvelles pratiques d’affaires mise de l’avant par CF(L)Co, pratiques qui si elles étaient minimalement envisageables en 1969, sont maintenant devenues monnaie courante dans le marché de l’énergie et ce, en fonction des avancées technologiques ainsi que des changements et assouplissements réglementaires ayant eu cours en Amérique du Nord.
[6] Ainsi, H.Q. demande au Tribunal de prononcer un jugement de nature déclaratoire visant à clarifier ses rapports contractuels avec CF(L)Co.
[7] Cette demande s’articule autour de deux grands thèmes. Il y a lieu, dès maintenant de reproduire les conclusions amendées recherchées par H.Q. :
« ACCUEILLIR la requête introductive d’instance en jugement déclaratoire d’Hydro-Québec.
DÉCLARER qu’aux termes de l’Annexe III (Contrat renouvelé) du contrat intervenu le 12 mai 1969 (Contrat) entre Churchill Falls (Labrador) Corporation (CF(L)Co) et Hydro-Québec, Hydro-Québec jouit du droit exclusif d’acheter toute la puissance disponible et toute l’énergie produite à la centrale du Haut Churchill, telle que définie à l’article 1.1 du Contrat original et du Contrat renouvelé (à la définition de « Plant ») et telle qu’entretenue conformément aux articles 4.2.4 du Contrat original et 4.1.4 du Contrat renouvelé (Centrale), à l’exception de la puissance et de l’énergie associées :
i Au bloc de 225 MW qui était réservé à CF(L)Co pour satisfaire ses obligations envers Twin Falls Power Corporation Limited jusqu’au 31 décembre 2014 et qui, sous réserve des conditions énoncées dans le « Shareholders’ Agreement » intervenues entre Newfoundland & Labrador Hydro (NHL), Hydro-Québec et CF(L)Co le 18 juin 1999, pourra être vendu par CFLCo pour distribution et consommation au Labrador Ouest à compter du 1er janvier 2015 (Bloc Twinco); et;
ii au bloc de 300 MW réservé à CF(L)Co pour vente à une tierce partie en vue d’une consommation d’énergie hors Québec (Bloc de 300 MW).
DÉCLARER que les droits conférés à Hydro-Québec en vertu de l’article 4.1.1 du Contrat renouvelé, y compris son droit de programmation et de planification de la puissance et de l’énergie, ne sont d’aucune manière limités, circonscrits ou restreints, sur une base mensuelle, à l’achat de blocs assujettis à un plafond dont la quantité serait établie sur la base de la notion de « Continuous Energy » prévue au Contrat renouvelé, et qu’ils peuvent être exercés à l’égard de toute la puissance disponible et toute l’énergie produite à la Centrale, à l’exclusion de la puissance et de l’énergie associées au Bloc de 300 MW et au Bloc Twinco.
DÉCLARER qu’aux termes du Contrat renouvelé, Hydro-Québec n’est pas contrainte de limiter ses demandes de livraison d’énergie à des blocs assujettis à un plafond mensuel dont la quantité serait établie sur la base de la notion de « Continuous Energy » prévue au Contrat renouvelé.
DÉCLARER qu’aux termes du Contrat renouvelé, CF(L)Co a l’obligation de livrer à Hydro-Québec, sur demande de celle-ci, toute la puissance disponible et toute l’énergie produite à la Centrale, à l’exception de la puissance et de l’énergie associées au Bloc Twinco et le Bloc de 300 MW.
DÉCLARER que tant que le Contrat sera en vigueur, soit jusqu’au 31 août 2041, CF(L)Co ne jouira d’aucun droit sur aucune quantité de puissance et d’énergie produite à la Centrale, à l’exception de la puissance et de l’énergie associées au Bloc de 300 MW et du Bloc Twinco.
DÉCLARER que tant que le Contrat sera en vigueur, soit jusqu’au 31 août 2041, CF(L)Co ne pourra vendre à une tierce partie, y compris NLH, une quelconque quantité de puissance et d’énergie excédant les quantités associées au Bloc de 300 MW, et ce, sans égard au fait que lesdites ventes interviennent sur une base ferme ou prétendument « interruptible ».
[8] Évidemment, CF(L)Co, conteste les prétentions de H.Q.. Le Tribunal reproduit les trois (3) principales conclusions de sa contestation :
« DECLARE that under the terms of the Renewal Contract, the right of Hydro-Quebec to request and receive energy each month during the term of that contract is limited to the amount of Continuous Energy as defined under the said Renewal Contract, subject to the Minimum and Firm Capacity limits.
DECLARE that in addition to the 300 MW of Recapture and in addition to the Twinco block, CF(L)Co is entitled under the Power Contract and the Renewal Contract to use the Churchill Falls power plant’s available capacity to increase the rate of delivery of energy to third parties, provided that by so doing it continues to make available to Hydro-Quebec its requested power and energy scheduled in accordance with the terms and conditions of the contracts.
DECLARE that, as owner and operator of the Churchill Falls power plant and holder of the hydraulic rights, CF(L)Co is entitled to operate the Churchill Falls plant as it deems appropriate and is entitled to derive revenues where possible from selling all electricity products that have not been specifically sold to Hydro-Quebec or third parties under the terms of a contract, provided that CF(L)Co fulfills its contractual obligations to Hydro-Quebec and third parties. »
[9] Ainsi, sommairement résumés, les points en litige sont les suivants :
- En vertu du contrat renouvelé, H.Q. a-t-elle droit à toute la puissance et l’énergie produite par la Centrale Churchill Falls tout en jouissant de la même flexibilité qu’elle a connue pendant la période du Contrat principal.
- CF(L)Co a-t-elle le droit d’effectuer des ventes « interruptibles » à des tiers à même de l’énergie et de la puissance non requise par H.Q. et cela pour une puissance excédant le rappel de 300 MW[1].
[10] Les relations entre H.Q. et CF(L)Co s’étendent sur quelque cinq décennies et ont été ponctuées de nombreux recours devant les tribunaux. En voici brossée à grands traits la nomenclature.
- Recours ayant trait au rappel par la province de Terre-Neuve-et-Labrador[2] de quelque 800 MW à partir de la production de la centrale de Churchill Falls et ce, tant devant les tribunaux de Terre-Neuve que ceux du Québec.
- Renvoi à la Cour d’appel de Terre-Neuve quant à l’application de la Loi « Upper Churchill Water Reversion Act » adoptée par la province de Terre-Neuve, lequel renvoi fit l’objet ultimement d’une décision de la Cour suprême.
- Recours par CF(L)Co visant une demande de modification des modalités de prix du contrat. Le jugement de la Cour supérieure du Québec rejetant les prétentions de CF(L)Co fut maintenu par la Cour d’appel du Québec le 1er août 2016.
[11] Ainsi, si certains de ces jugements rendus au fil des ans peuvent éclairer le Tribunal, l’analyse à laquelle il doit s’astreindre vise un pan de la scène qui n’a été dévoilé que de façon liminaire dans les recours antérieurs, sauf jusqu’à un certain point dans le dernier recours.
[12] Pour répondre aux questions soulevées dans la présente affaire, le Tribunal devra aborder un volet historique entourant la négociation et conclusion du Contrat principal et du Contrat renouvelé. Sera également couverte la relation entre les parties postconclusion des contrats jusqu’à ce jour incluant les divers recours judiciaires entrepris de part et d’autre. Vu que cette relation s’étend sur cinquante ans, elle devra être analysée à travers le prisme de l’évolution technologique, réglementaire ainsi que celle des marchés.
[13] Le Tribunal se propose d’aborder la présente affaire de la façon suivante. Ainsi, une fois les parties présentées et le contexte exposé, et pour bien comprendre la preuve administrée devant le Tribunal, nous brosserons à grands traits la position des parties avant d’aborder celle-ci. Ainsi, la présente décision sera livrée à l’aide des chapitres suivants :
· LES PROTAGONISTES D’INTÉRÊT.
· SITUATION DES PARTIES À UNE ÉPOQUE CONTEMPORAINE AUX NÉGOCIATIONS.
· LE PROJET CHURCHILL FALLS.
· BREF RÉSUMÉ DE LA POSITION DES PARTIES.
· CIRCONSTANCES ENTOURANT LA CONCLUSION DU CONTRAT DU 12 MAI 1969.
A) |
Préambule |
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B) |
Historique des négociations
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i) |
Négociations menant à la signature de la lettre d’intention |
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Première ronde |
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Deuxième ronde |
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Ronde finale |
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ii) |
Négociations à compter de la lettre d’intention du 12 mai 1969 y compris ses annexes (Contrat renouvelé) |
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· RELATIONS ENTRE LES PARTIES ENTRE LE 12 MAI 1969 ET 1998.
· EXPLOITATION DE LA CENTRALE ET TRANSMISSION DE L’ÉNERGIE.
· EXPERTISES.
· POSITION DES PARTIES.
· QUESTIONS EN LITIGE.
· ANALYSE.
[14] Bien que certains chapitres du présent jugement puissent paraître redondants au vu des décisions antérieures, ils demeurent essentiels à la compréhension des présentes puisqu’ils font partie du syllogisme menant aux conclusions des présentes.
[15] L’ancêtre d’Hydro-Québec, la Commission hydroélectrique du Québec, mandataire de l’État, fut créée à l’aide d’une loi provinciale en avril 1944[3]. Ce nom sera utilisé jusqu’en 1978 alors qu’elle sera alors désignée sous son appellation actuelle d’H.Q.[4]
[16] À l’époque de sa création, le marché principal de H.Q. se limitait à la région Montréalaise puisque celle-ci prenait charge de la « Montreal Light and Power Company » laquelle produisait alors 4 000 MW principalement grâce à la Centrale des Cèdres soit une Centrale dite « au fil de l’eau »[5].
[17] En 1963, au cœur de la révolution tranquille, s’effectue la nationalisation de l’électricité grâce aux achats de la presque totalité des producteurs privés d’électricité se trouvant sur le territoire du Québec.
[18] Au terme de cette nationalisation, la production d’H.Q. passe à quelque 6 000 MW.
[19] Mentionnons que l’un des producteurs achetés par la Commission à l’époque de la nationalisation était la Shawinigan Light and Power Company dont la filiale Shawinigan Engineering Limited était actionnaire à hauteur de 20 % de la compagnie maintenant connue sous le nom de CF(L)Co.
[20] À titre indicatif, le projet de Centrale Churchill Falls envisagé au début des années 1960 prévoyait une puissance de quelque 5423 MW, soit presque l’équivalent à lui seul de l’ensemble de la production d’électricité disséminée sur le territoire du Québec.
[21] Au fil des années, H.Q. fut l’artisan de nombreux autres projets dont les plus connus sont, Manicouagan et La Grande.
[22] La plupart de ces projets dont Churchill Falls sont des Centrales munies de réservoirs contrairement aux Centrales dites au fil de l’eau dont l’apport en eau dépend de la force du courant de la rivière ou du fleuve. Les caractéristiques de ce type de Centrales avec réservoirs sont au cœur du débat.
[23] En 1997, le marché de l’électricité américain vit un changement structurel profond en ce que nos voisins du Sud adoptent une règlementation visant à ouvrir l’ensemble des réseaux de transmission d’électricité de façon à favoriser le transport de l’électricité. Ainsi, les réseaux de transmission jusqu’alors propriété d’entités indépendantes, devront être mis à la disposition d’autres utilisateurs[6].
[24] C’est à dessein que le Tribunal emploie le terme « utilisateurs » parce que, comme nous le verrons plus loin, si au début de cette minirévolution, cet accès était destiné aux producteurs, nombre d’autres joueurs de l’industrie, grâce aux innovations technologiques se sont greffés aux utilisateurs originaux.
[25] Cette révolution commerciale au sud de la frontière amènera H.Q. à effectuer des changements importants à son modèle d’affaires : sont ainsi créées à compter de 2001 les divisions suivantes :
1. H.Q. Production (ci-après désignée « H.Q.P. »). Cette division gère le Parc de Centrales et agit à titre de grossiste pour les ventes hors Québec.
2. H.Q. Trans Énergie (ci-après désignée « H.Q.T. »). Cette division gère le transport de l’énergie produite jusqu’à sa destination finale que ce soit pour l’exportation ou pour la consommation locale.
3. H.Q. Distribution (ci-après désignée « H.Q.D.). Cette division distribue l’électricité localement tant au niveau industriel, commercial et résidentiel.
4. H.Q. Équipement (ci-après désignée « H.Q.E.). Cette division effectue les divers travaux requis par H.Q. que ce soit pour la réalisation ou pour l’entretien des ouvrages tant au niveau production que transmission.
[26] H.Q. procède à une planification de son Parc de centrales et Réseau de transmission sur des périodes de 10 ou 20 ans, en fonction de l’accroissement de la demande.
[27] Depuis 1963, le Parc d’Hydro-Québec a évolué. Ainsi, le rapport annuel 2014 de H.Q. [7] nous apprend qu’il est constitué entre autres de la façon suivante.
62 centrales Hydro-électriques
pour une puissance totale de = 36 100 MW
25 centrales thermiques
pour une puissance totale de = 543 MW
= 36 643 MW
Au chapitre des autres sources se trouve
La Centrale Churchill Falls pour une puissance de 5 428 MW
[28] Le Parc de Centrales de H.Q. notamment celles dotées de réservoirs n’est pas uniforme tant pour la capacité des réservoirs que pour l’apport en eau. En effet, le climat variant grandement d’une région du Québec à l’autre, il coule de source que le niveau de précipitations que ce soit en neige ou en pluie, ne sera pas le même, pour une Centrale située au Nord-Ouest de la province telle La Grande par rapport à une Centrale située au Nord Est de la province telle Manic.
[29] Ainsi, si la Centrale de Churchill Falls une fois complétée représentait presque la moitié de la production de H.Q. au début des années 1970, son apport en 2014 fléchissait à quelque 15 % de la production de H.Q.
[30] Au même titre que H.Q. est devenue actionnaire de CF(L)Co par l’entremise de Shawinigan Engineering Limited, au début des années 1960, il y a lieu de s’intéresser à l’autre actionnaire de contrôle soit Brinco dont certains de ses administrateurs ont joué un rôle déterminant dans le projet Churchill Falls.
[31] Ainsi, Brinco fut incorporée le 17 avril 1953 et les principaux actionnaires sont les suivants :
· |
N.M. Rotschild & Sons |
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Anglo-American Corporation of South Africa |
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Anglo-Newfoundland Development Company Limited |
· |
The Bowater Paper Corporation Limited |
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The English Electric Company Limited |
· |
Frobisher Limited (sa participation fut éventuellement cédée à la Compagnie Financière de Suez) |
· |
Rio Tinto Company Limited[8] |
L’actionnariat de Brinco varie au fil des années. Voici certains faits marquants.
1963 |
Souscription par Rio Algom Mines Limited de 185 000 actions de Brinco. |
1968 |
Thornwood Investments Limited dont l’actionnaire majoritaire est Rio Tinto-Zinc Corporation Limited et le minoritaire Bethlehem Steel Corporation est créée et achète toutes les actions jusqu’alors détenues par Rio Algom Mines Limited devenant par le fait même l’actionnaire de contrôle de Brinco. |
[32] Un extrait d’un “Quick Reference Summary” en date du 9 juin 1964 publié par “The Financial Post Corporation Service” résume bien l’importance qu’a joué Brinco dans le développement de la Centrale Churchill Falls.
« In 1958, the Company transferred its rights to develop the Upper Hamilton River[9], including Hamilton Falls, to a new company, Hamilton Falls corporation limited, in which it had an 80 % interest. The remaining 20 % was owned by Shawinigan Water and Power, which was acquired by the Province of Quebec (Hydro-Québec)[10].
[33] En 1974, les actions de Brinco au sein de CF(L)Co soit 65,8 % sont acquises par Newfoundland Industrial Development Corporation[11] pour la somme de 160 millions de dollars lesquelles seront ultimement cédées à Newfoundland Labrador Hydro à l’automne 1975.
[34] CF(L)Co est créée par Brinco le 31 janvier 1958, qui détient alors la totalité des actions de CF(L)Co[12].
[35] L’objectif visé par CF(L)Co est le développement hydroélectrique du fleuve Churchill situé au Labrador.
[36] Le 8 octobre 1958, Shawinigan Engineering Company Limited acquiert 20 % des actions de CF(L)Co[13].
[37] Comme nous l’avons vu, en mars 1963 la Commission hydroélectrique du Québec acquiert la mère de Shawinigan Engineering Company Limited et devient donc actionnaire de CF(L)Co à hauteur du même 20 % des actions détenues par celle-ci.
[38] À compter de 1963 jusqu’en 1975 plusieurs émissions d’actions ou ventes d’actions interviendront. Les plus pertinentes à la présente affaire sont les suivantes :
- Novembre 1968 : Émission d’un million d’actions de CF(L)Co à Hydro-Québec portant la participation de celle-ci à 34,2 %[14].
- Juin 1974 : Acquisition par Newfoundland Industrial Development Corporation des actions jusqu’alors détenues par Brinco au sein de CF(L)Co ainsi que les droits de celle-ci au développement du Fleuve Churchill[15].
- 1975 : Transfert par Newfoundland Industrial Development Corporation à Newfoundland Labrador Hydro des actions détenues par celle-ci au sein de CF(L)Co[16].
[39] Au final et suite à d’autres transactions, l’actionnariat de CF(L)Co est réparti de la façon suivante depuis novembre 1975.
NLH : 65,8 %
H.Q. : 34,2 %
[40] Actuellement, le conseil d’administration de CF(L)Co comporte huit (8) postes, six (6) de ceux-ci étant des représentants de NLH et deux (2) d’H.Q.
[41] NLH est une créature de la province de Terre-Neuve constituée en 1975. Celle-ci était, jusqu’à tout récemment le bras énergétique de la province.
[42] Dès sa création, NLH se voit transférer par la Newfoundland Industrial Development Corporation les actions que celle-ci détenait dans CF(L)Co pour ainsi obtenir 65,8 % des actions ordinaires de celle-ci.
[43] NLH sur l’Ile de Terre-Neuve est un producteur d’électricité et exploite plusieurs centrales produisant au total 950 mégawatts[17].
[44] NLH dessert directement des clients industriels ainsi que des consommateurs dans les régions éloignées de l’Ile. Quant aux grands centres, l’électricité produite par NLH est vendue à un distributeur indépendant soit Newfoundland Power[18] qui en assure la distribution.
[45] NLH détient également des lignes de transmission dans la portion Labrador de la province notamment deux lignes de 230 000 volts (230 KV) alimentant l’ouest du Labrador, une ligne de 138 KV alimentant Goose Bay[19].
[46] En date des présentes, il n’existe aucune ligne de transmission entre le Labrador et l’Ile de Terre-Neuve. Toutefois, cette situation changera à compter de 2017 alors que sera complétée une ligne de 900 MW reliant par voie sous-marine le Labrador et l’Ile de Terre-Neuve.
[47] Cette ligne de 900 MW qui reliera Churchill Falls à la Centrale Muskat Falls, servira à alimenter non seulement une portion de l’Ile mais servira également à l’exportation d’énergie vers la Nouvelle-Écosse ainsi que la Nouvelle-Angleterre[20].
[48] NLH est soumise à l’autorité du « Public Utilities Board of Newfoundland ».
[49] Nalcor Energy est une société de la Couronne de la province de Terre-Neuve créée en 2007[21]-[22].
[50] De fait, la création de cette entité est le fruit d’un groupe de travail en vue de doter la province de Terre-Neuve d’un bras énergétique consolidé[23].
[51] Nalcor à compter de sa création devient la compagnie mère de NLH. Elle chapeautera également la « Oil and Gas Corporation of Newfoundland and Labrador » en plus d’assurer le développement du potentiel électrique du Bas Churchill[24].
[52] Les administrateurs de NLH en vertu de la Loi ayant créé Nalcor sont devenus automatiquement des administrateurs de Nalcor.
[53] Nalcor comporte actuellement 6 lignes d’affaires. Ce sont les suivantes[25] :
- NLH
- Churchill Falls
- Oil and Gas
- Lower Churchill Project
- Bull Arm Fabrication
- Energy Marketing
[54] La dernière de ces lignes d’affaires soit Energy Marketing a amené Nalcor à l’incorporer séparément sous le nom de Nalcor Energy Marketing Corporation (NEMC). Voici comment Monsieur Edmund Martin en décrit les activités[26] :
« And our sixth line of business is Energy Marketing which has also recently become a separate company. And this Energy Marketing arm currently sells the recall energy from Churchill Falls, which is sold to Newfoundland & Labrador Hydro, this Energy Marketing company actually handles the direct sales of that electricity currently through Québec with an open access transmission arrangement that we have, Energy Marketing has, and they sell it directly into the markets.
The vision for this company obviously Your Honour, is as Muskrat Falls comes online, there’s significant excess energy that is not needed for the province. Gull Island would be another addition obviously. And the longer-term plan is to have this group also handle the marketing of the oil and gas from the Oil and Gas division over time.
[55] De fait, NEMC deviendra en 2015 l’agent de NLH sur le marché américain de l’électricité à titre de « purchasing-selling entity » en particulier sur les marchés de New York et de la Nouvelle-Angleterre et Pennsylvania New jersey Maryland[27] cette dernière étant connue sous le vocable PJM.
[56] Voilà ce qui conclut une très brève présentation des principaux protagonistes impliqués dans la présente affaire.
[57] Il est important pour la suite des choses, de brosser un tableau de la situation respective des parties à l’époque des négociations.
[58] Au début des années 60, la population du Québec est de quelques 5 250 000 habitants[28] dont 25 % en région rurale contre 75 % dans les villes[29]. Le produit intérieur brut du Québec représente 26 %[30] du total canadien..
[59] En 1962, la Commission hydroélectrique du Québec exploite neuf (9) centrales produisant quelque 3 675 MW [31].
[60] La presque totalité de cette production est le fait de centrales dites au fil de l’eau.
[61] Toujours en 1962, les centrales Manic 5 et 2 sont en voie de construction. Une fois complétées, elles généreront quelque 2 296 MW supplémentaires. Ces centrales sont munies de réservoirs[32].
[62] En 1962, H.Q. a également trois (3) projets en cours, soit Manic 3, Outardes 58 et Outardes 45[33]. Une fois réalisés, ceux-ci produiront une puissance supplémentaire de 2 250 MW. Ces centrales sont également dotées de réservoirs[34].
[63] Le transport de l’électricité des complexes Manic-Outardes se fera à l’aide de lignes de 735 KV dont la technologie fut développée à l’interne chez H.Q.[35]
[64] En 1963, au cœur de la révolution tranquille, H.Q. dans le cadre de la nationalisation de l’électricité, achète et paie plus de 90 % des actions des producteurs indépendants suivants :
- La Compagnie d’électricité Shawinigan.
- Southern Canada Power Company Limited.
- Compagnie Québec Power.
- Compagnie d’électricité Gatineau.
- La Compagnie de Pouvoir du Bas St-Laurent.
- Compagnie électrique du Saguenay.
- Northern Québec Power Company Limited[36].
[65] L’ajout de la puissance de ces divers producteurs porte la capacité totale de H.Q. à 6 382 MW[37].
[66] En 1965, les premiers groupes générateurs de Manic 2 entrent en service ainsi que les premières lignes de transport de 735 KV. Ainsi, à la fin de l’année 1965, la puissance totale dont dispose H.Q. est de 7 349 MW alors que les projets Manic 5 et Outardes sont toujours en construction[38].
[67] En 1967, la production totale de H.Q. est de 8 178 MW[39].
[68] À cette époque, H.Q. prévoyait une croissance exponentielle de ses besoins les établissant à 16 125 MW pour l’année 1978[40].
[69] Toutefois, le rapport annuel de H.Q. pour l’année 1967 fait état d’un bond dans l’accroissement annuel en ces termes :
« La consommation de la clientèle québécoise s’est accrue de 8.8 %, un taux dont le maintien ramènerait de dix à huit ans la période traditionnelle du doublement des besoins. »[41]
[70] En résumé, à la fin de l’année 1967 alors que les négociations quant au projet Churchill Falls sont en cours, H.Q. voit ses besoins augmenter considérablement alors qu’une bonne partie de la puissance dont elle jouit provient de Centrales au fil de l’eau tandis que celles dotées de réservoirs (Manic, Outardes …) sont en voie de complétion, quelques unités étant cependant fonctionnelles. Par ailleurs, une première ligne de transmission de 735 KV est déjà en service à partir du complexe de Manicouagan.
[71] Le Dominion de Terre-Neuve devient une province au sein de la Confédération canadienne le 1er avril 1949. Au début des années 60, le moteur de son économie est l’industrie de la pêche et sa population est de 457 000 âmes répartie presque également entre les villes et la campagne[42].
[72] Le produit intérieur brut de Terre-Neuve représente 1,26 %[43] de l’ensemble canadien, elle est toutefois au premier rang canadien quant aux emplois reliés à l’industrie de la pêche[44].
[73] Les deux décennies suivant l’entrée de Terre-Neuve dans la Confédération canadienne sont témoins d’une transformation profonde de cette industrie passant d’une approche familiale ou artisanale à une production de masse à l’aide d’usines de transformation.
[74] La province de Terre-Neuve était alors dirigée par un premier ministre libéral soit Joseph R. Smallwood. Celui-ci est convaincu de l’immense potentiel énergétique du fleuve Churchill.
[75] C’est suite à l’intervention de J.R. Smallwood auprès de Winston Churchill en 1952 que fut créée, par un groupe d’investisseurs la British Newfoundland Corporation Limited (Brinco) le 17 avril 1953.
[76] Dans les semaines qui ont suivi son incorporation, Brinco se voit concéder, par la Loi « The Government-British Newfoudland Corporation - N.M. Rothchild and Sons (confirmation of agreement) Act » l’option d’obtenir les droits exclusifs « to harness and make use of all or any of the rivers, streams, waterways and watersheds in Newfoundland and Labrador including the Hamilton river …»[45]
[77] L’adoption de cette Loi conduira à une entente dès le 21 mai 1953 en vertu de laquelle Brinco, en échange d’investissements de 1 250 000,00 $ par tranche de cinq (5) ans sur une période de 20 ans consacrés à l’exploration et développement des ressources naturelles, obtenait une option quant aux droits hydro-électriques pour une période de 99 ans renouvelable[46].
[78] Le 30 juin 1958, Brinco constitue CF(L)Co et transfère à celle-ci les droits octroyés par cette Loi et l’entente du 21 mai 1953. On apprend de ce transfert que Brinco avait déjà engagé des frais d’exploration pour la somme de 5 477 371,48[47] soit l’équivalent de 45 000 000,00 en dollars 2015[48].
[79] Le 26 mai 1960, CF(L)Co exerce l’option, quant aux droits hydro-électriques prévus à l’entente du 21 mai 1953[49].
[80] À la même date, soit le 26 mai 1960, CF(L)Co, informe le premier ministre de Terre-Neuve qu’elle entreprendra sous peu la construction d’une centrale par l’entremise d’une filiale soit Twin Falls Corporation Limited dont elle contrôle 2/3 de l’actionnariat. Cette centrale a pour fonction de répondre aux besoins énergétiques de diverses mines exploitées dans la portion ouest du Labrador.
[81] Le 13 mars 1961, Terre-Neuve adoptait la Loi « Hamilton Falls Power Corporation Limited (lease) Act » en vue de conclure un bail et effectivement un bail de 99 ans fut conclu entre CF(L)Co et la province de Terre-Neuve, lequel bail est renouvelable pour une période supplémentaire de 99 ans[50].
[82] Le bail entre CF(L)Co et la province de Terre-Neuve prévoit le paiement par CF(L)Co de royautés sur la vente de l’électricité pouvant être générée par le fleuve Hamilton[51].
[83] Ainsi, en 1961 (CF(L)Co détenait les droits sur le Fleuve Hamilton et avait engagé entre 1953 et 1958 quelque 5 millions et demi de dollars en frais d’exploration et développement. Par ailleurs, elle avait entrepris la construction de la Centrale de Twin Falls.
[84] À cette époque, aucun lien de transmission électrique n’existait entre le Labrador et l’Ile de Terre-neuve.
[85] Au moment de sa conception et de son élaboration, la centrale de Churchill Falls est unique en son genre en Amérique que ce soit par sa taille, ses capacités ou encore par son situs et même son financement, il y a donc lieu d’en dresser les principales caractéristiques.
[86] D’entrée de jeu, le Tribunal tient à préciser que le présent chapitre tire sa source principalement dans le « Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited - First Mortgage Bonds Series A - Offering Memerandum (ci-après « O.M. »)[52] ainsi que le « Technical Abstract and Engineers’ evaluation » préparé par la firme ACRES et daté du 23 avril 1968[53]. Par contre, comme nous le verrons plus tard, la plupart des données qu’elles soient financières, techniques, etc., seront quelque peu différentes une fois le projet complété.
[87] Il y a lieu, cependant, de préciser que la durée de vie de semblables ouvrages est considérable. Ainsi, Monsieur Claude Dubé, ingénieur retraité de H.Q. précise celle-ci de la façon suivante[54].
Barrage et digues |
= |
120 ans |
Canaux de dérivation |
= |
100 ans |
Turbines / Groupes alternateurs |
= |
50 à 60 ans |
[88] De même, la valeur résiduelle de ces mêmes ouvrages est considérable. Ainsi, Monsieur Thierry Vandal, se basant sur la méthode des coûts évalue la Centrale de Churchill Falls à quelques 20 milliards de dollars en 2015[55].
[89] Cela étant, cette description du projet tel qu’il était envisagé est essentiel à la compréhension des négociations puisque certains changements au résultat final ont entraîné des modifications au processus de négociation ayant mené au contrat entre les parties.
[90] La centrale est située dans la portion ouest du Labrador à environ 200 km à l’est des villes de Labrador City et Wabush lesquelles marquent la frontière ouest entre le Labrador et le Québec[56].
[91] Churchill Falls possède deux grands réservoirs de même que deux biefs lesquels couvrent une superficie de quelque 600 km carrés et ont une capacité de quelque 26 milliards de kilowattheures.
[92] Le réservoir le plus à l’ouest est connu sous le nom de Ossokmanuan et le deuxième sous le nom de Smallwood.
[93] L’apport en eau à la Centrale à partir de ces réservoirs est contrôlé par un ouvrage identifié comme le « Lobstick Control Structure ».
[94] Fait à noter et qui a une incidence sur l’exploitation de la Centrale est que l’eau, en provenance des réservoirs une fois qu’elle a franchi l’ouvrage Lobstick mettra trois (3) jours pour se rendre à la Centrale afin d’y être turbinée.
[95] Autre particularité, est la topographie du site en ce que les réservoirs sont situés sur un plateau plus élevé que le fleuve Churchill permettant ainsi une hauteur de chute optimale. Voici comment Acres décrit le site[57] :
« The central Labrador plateau on which the drainage basin of the Upper Churchill River lies has an elevation of between 1,300 and 1,900 feet above sea level. The surface of the plateau has only minor relief, with few hills rising to more than 500 feet above the general plateau level. Vegetation is sparse, but some of the land is covered by low spruce forest and there are extensive areas of boulder field and generally shallow muskeg.
The area is characterized by numerous large and small lakes and extensive areas of swamp, and has a random drainage pattern with few well-defined streams. Over 20 per cent of the basin is covered by water and the volume of natural storage is high.
Runoff from the plateau is mainly concentrated in the Churchill, Unknown and Naskaupi Rivers, of which the most important is the Churchill. Flowing from Sandgirt and Lobstick Lakes, it falls in a series of rapids and a great waterfall, the Churchill Falls, to its preglacial channel over 1,000 feet below the plateau, as shown on Plate 3. »
[96] Cette particularité est à ce point importante qu’elle fait l’objet du passage suivant dans l’O.M.[58] :
« An unusual feature of the Churchill Falls development is that power output is independent of reservoir drawdown, since the forebay elevation remains relatively constant (variation is under five feet) under any conditions of reservoir storage upstream of the control structures. Therefore the gross head on the turbines and the resultant power output capability of the plant is relatively constant. Generally, on river development schemes with large dams, any drawdown of the upstream reservoir significantly reduces hydraulic head on the plant and lowers the generating capacity of the installations. Significant operating advantages accrue when a plant may be operated at any storage level without power output being materially affected. »
( Nos soulignés )
[97] Voici les principales conclusions de la firme Acres telles que reproduites à l’O.M. :
1. The Project can be constructed and will be capable of performing as required and expected. The firm capacity at the delivery point will be 4,431,500 kilowatts after providing for station service, townsite loads, electrical losses and local loads of 225,000 kilowatts.
2. A sufficient long-term average flow of water will be available to provide an average energy output of 34.5 billion kilowatt hours per annum at the generator terminals when the capacity at the delivery point is allowed to vary between firm capacity and 2,500,000 kilowatts. Under these conditions, the Project will be physically capable of providing an average energy output of 31.8 billion kilowatt hours at the delivery point.
If the plant is operated between the above limits of deliverable capacity in such a manner as to produce an average energy delivery of less than 31.8 billion kilowatt hours per annum, an amount of water will be spilled, equivalent to the reduction in delivered energy.
3. The Construction Cost Estimate as defined of $563,306,000, plus the addition of a provision for escalation at 4.5 per cent compounded annually, is adequate to complete the Project, and provides a sufficient allowance for possible increases in cost of labour, material and services during the scheduled period of construction.
4. The Project can be constructed within the schedule proposed, so as to have initial power available as planned in 1972, and all eleven units completed and operable by 1976.[59]
[98] Tel que déjà mentionné, la Centrale se trouve à quelque 1 200 km de Montréal. Or, les coûts reliés à la construction de lignes de transmission de 735 KV étaient estimés à l’O.M. à 72 284 000.00 et ce, uniquement pour la portion située sur le territoire de Terre-Neuve, H.Q. devant assumer les coûts des lignes de transmission sur quelque 1 000 km soit de la frontière Labrador/Québec jusqu’à Montréal.
[99] D’autres particularités financières apparaissent à l’O.M. Ainsi, les principales sources de financement externes étaient les suivantes :
- First Mortgage Bonds - 590 millions
- Bank Loan - 100 millions
- General Mortgage Bonds - 100 millions[60]
[100] Ainsi, H.Q. s’était engagée à acheter la totalité des unités restantes de l’émission « General Mortgage Bonds » advenant qu’il en reste après que les autres actionnaires se soient prévalus de leurs options. L’engagement de H.Q. était donc pour un potentiel de 100 millions de dollars[61].
[101] Par ailleurs, tel qu’il apparaît à l’O.M., H.Q. s’engageait à rendre disponibles les fonds nécessaires à la complétion de la Centrale advenant que le financement soit insuffisant. Voici l’extrait pertinent.
« However, Hydro-Quebec has agreed that, once CF(L)Co has obtained or arranged to obtain a minimum of 700 million (expressed in Canadian dollars) to construct and bring the Project into operation it will provide without limitation as to total amount any funds additional to the then available funds of CF(L)Co which may be required to complete the project. »[62]
[102] De plus, toujours selon le O.M., H.Q. s’engageait à :
1. Combler les manques de liquidité de CF(L)Co[63].
2. Obligation par H.Q. de réparer ou remplacer la totalité du projet en cas de destruction[64].
3. Assumation du risque relatif à la fluctuation des taux de change[65].
4. Assumation par H.Q. d’une augmentation des taux d’intérêt tant sur les First Mortgage Bonds (au-delà de 51/2 % annuellement) et sur tout autre obligation de CF(L)Co (au-delà de 6 % annuellement)[66].
[103] Dans la présente affaire une des avenues incontournables que doit prendre le Tribunal consiste en l’interprétation de contrats négociés et signés en 1969.
[104] Évidemment, le Tribunal s’attardera sur l’aspect des négociations et le résultat de celles-ci, quant aux enjeux soulevés par les présentes.
[105] Il devient donc important de situer dès maintenant le lecteur quant aux positions respectives des parties.
[106] Tel que mentionné précédemment, cet exposé est brossé dès maintenant et à grands traits pour permettre au lecteur une bonne compréhension de la preuve administrée devant le Tribunal ainsi que son traitement aux présentes. Le Tribunal abordera de nouveau et plus en détail cette fois, la position des parties une fois terminé l’exposé de l’ensemble de la preuve.
[107] Dans un premier temps, H.Q. avance que le contrat principal et le contrat renouvelé ainsi que le contrat nommé Churchill Falls Guaranteed Winter availability Contract (GWAC) en vigueur le 1er novembre 1998 ne forment qu’un seul ensemble contractuel.
[108] Selon H.Q. le contrat principal lui conférait le droit d’acheter la quasi-totalité de la puissance et l’énergie y associée des quelque 5428 MW produits par la Centrale.
[109] Ce droit à la puissance, H.Q. le fait reposer en grande partie à la clause intitulée « Operationnal flexibility » (clause de flexibilité opérationnelle) que l’on retrouve tant au contrat principal qu’au contrat renouvelé.
[110] En effet, selon H.Q. cette flexibilité pluriannuelle et saisonnière lui permettait de requérir plus de puissance de la Centrale lors des pointes hivernales et moins l’été alors que la demande diminue.
[111] H.Q. se plaint que CF(L)Co, ayant annoncé ses couleurs, interprète le contrat renouvelé d’une façon telle que la seule flexibilité qu’elle conservera sera intramensuelle. H.Q. qualifie cette interprétation par CF(L)Co de théorie des blocs.
[112] La position d’H.Q. à ce sujet est bien résumée à la requête :
« 142. Par conséquent, CF(L)Co a tort de prétendre que les droits d’Hydro-Québec aux termes du Contrat renouvelé sont limités à l’achat de blocs d’énergie assujettis à un plafond mensuel dont la quantité serait établie sur la base de la notion de « Continuous Energy ».
[113] Par ailleurs, H.Q. ayant constaté que CF(L)Co procède depuis quelques années à des ventes de puissance et d’énergie, qualifiées dans le jargon du milieu de ventes interruptibles, avance que celle-ci n’en a pas le droit en vertu des ententes contractuelles existantes et à venir.
[114] Voici comme H.Q. s’exprime sur ce sujet bien précis :
« 158. CF(L)Co ne jouit pas du droit, à quelque moment que ce soit pendant la durée du Contrat original ou du Contrat renouvelé, de vendre à une tierce partie, que ce soit sur une base ferme ou prétendument « interruptible », une quelconque quantité de puissance excédant la Limite de 300 MW, puisque toute quantité de puissance excédant la Limite de 300 MW est dévolue exclusivement à Hydro-Québec en vertu du Contrat original et du Contrat renouvelé. »
[115] CF(L)Co soutient que c’est à bon droit qu’elle peut appliquer à compter du 1er septembre 2016 ce qu’H.Q. qualifie de théorie des Blocs.
[116] En effet, selon elle, le contrat renouvelé doit être interprété distinctement du contrat principal puisqu’en son article 3.2 il y est précisé entre autres :
« The renewed Power Contract shall be that set forth in Schedule III hereof, which shall come into force automatically without any further signature being required.
Any or all articles or sections of this Power Contract other than this section 3.2 as well any or all undertakings or promises not specifically contained in Schedule III shall have no force and effect …” »
[117] Or le contrat renouvelé en son objet précise que :
« Hydro-Quebec agrees to purchase from CF(L)Co and CF(L)Co agrees to sell to Hydro-Quebec each month the continuous energy and the firm capacity …»[67]
[118] Or, la définition de “continuous energy” telle que prévue au contrat renouvelé provient d’un calcul mathématique établi sur une base mensuelle lequel prend sa source sur divers ajustements ayant eu cours pendant toute la durée du Contrat principal et qui ont permis d’établir un « Annual Energy Base » final.
[119] Selon CF(L)Co, cette interprétation bien qu’elle modifie la flexibilité dont jouissait H.Q. ne la lui fait pas perdre entièrement.
[120] En ce qui a trait aux ventes interruptibles CF(L)Co précise qu’en vertu de l’article 5.2 du contrat renouvelé, son obligation de vendre à H.Q. se limite aux réquisitions en ce sens formulées par H.Q. et que si celle-ci ne fait pas cette demande rien ne l’empêche de faire des ventes dites interruptibles à des tiers puisque selon le principe même sous-jacent à ce type de ventes, elle peut l’interrompre et rediriger l’électricité vers H.Q. dès que celle-ci en fait la demande.
[121] Bien que CF(L)Co soutienne que le Contrat renouvelé ne contienne aucune ambiguïté, il revient au Tribunal d’établir dans un premier temps si semblable ambiguïté existe ou non.
[122] Afin de répondre à cette première question, le Tribunal doit nécessairement procéder à l’analyse des circonstances ayant entouré la négociation et conclusion du Contrat principal et renouvelé puisque conclus en même temps.
[123] Dès lors, le volet, que le Tribunal qualifie d’historique des négociations, s’impose.
[124] Les discussions entre BRINCO et H.Q. se sont amorcées au début des années 60 et n’ont pas été continues, cessant et reprenant au fil des ans.
[125] Le présent chapitre se veut un condensé des négociations ayant mené dans un premier temps à la signature de la Lettre d’intention le 13 octobre 1966 et dans un second temps au contrat du 12 mai 1969.
[126] Nécessairement, le Tribunal abordera l’évolution des positions de chacune des parties quant à des points et clauses bien précis. Ainsi, volontairement, le Tribunal omettra certains pans des négociations lesquels furent liminaires aux questions en litige et qui ne feraient qu’alourdir cet aspect de la preuve déjà fort dense.
[127] Afin d’assurer la fluidité du texte, il est de mise d’expliquer et préciser certains points.
[128] Certains termes utilisés par les négociateurs pour décrire ou quantifier la puissance et l’énergie ou encore pour décrire certains concepts l’ont toujours été dans la langue anglaise. Ces mêmes termes ont fait l’objet d’expertises où là encore, les auteurs s’exprimaient dans la langue anglaise. Ainsi, bien que cela puisse affecter la fluidité du texte, le Tribunal référera à ces termes dans la langue anglaise.
[129] Par ailleurs, certains concepts seront mis de l’avant au fil des négociations. Ceux-ci se doivent d’être expliqués. Encore une fois pour assurer la fluidité du texte, le Tribunal exposera dès maintenant ces concepts lesquels sont facilement compréhensibles. Ce sont les suivants.
· Take or pay
· Le Bloc Twinco
· Le Bloc « Rappel »
· Split Tarif
TAKE OR PAY
[130] Ce concept est à l’avantage de l’exploitant de la Centrale, étant assuré d’un revenu que l’acheteur prenne livraison ou non de l’énergie.
[131] Comme nous le verrons plus loin, ce concept requis par CF(L)Co était dicté par des considérations financières liées au rendement et garanties recherchés par les investisseurs du projet.
LE BLOC TWINCO
[132] Comme nous l’avons vu, à l’occasion de la description de la situation de Terre-Neuve, Brinco avant même de commencer ses négociations avec H.Q. avait entrepris la construction de la Centrale de Twin Falls.
[133] La production de cette centrale visait à combler les besoins énergétiques du Labrador Ouest, où était principalement située l’exploitation minière alors en cours.
[134] Le projet Churchill Falls, en raison de la dérivation de certains plans d’eau a fait en sorte que la Centrale Twin Falls ne pouvait plus rencontrer ses obligations contractuelles envers ses clients de l’ouest du Labrador.
[135] Dès lors, et cela n’a jamais fait l’objet de grands débats entre les parties, il a été convenu qu’une partie de la production de Churchill Falls serait réservée pour rencontrer les besoins des clients de la Centrale Twin Falls de là l’expression Bloc Twinco.[68]
LE BLOC « RAPPEL »
[136] CF(L)Co voulait être en mesure de s’approprier une partie de la production de la Centrale pour les besoins de Terre-Neuve.[69]
[137] Même si aucune ligne de transmission ne reliait le Labrador à l’Île de Terre-Neuve à cette époque, celle-ci a toujours été dans les plans. D'ailleurs, nous verrons que le Premier Ministre de Terre-Neuve l’Honorable J. Smallwood tentera de s’immiscer dans cet aspect de la négociation et ce en dépit du fait que CF(L)Co détenait les droits sur le développement du fleuve Churchill.
[138] La quantité de MW vouée au Rappel de même que le texte utilisé pour le consacrer ainsi que le changement de vocation de ce Rappel revêtra au fil des années une importance capitale et donnera lieu à au moins un recours entre la Province de Terre-Neuve et CF(L)Co.
SPLIT TARIF
[139] Ce concept dans le cadre du « Take or Pay » introduit au niveau du paiement deux composantes soit fixe et variable.
Fixe |
= |
66,67 % de l’Annual Energy Base pour un mois donné. |
Variable |
= |
33,33 % de l’Énergie effectivement livrée à H.Q. incluant les déversements. |
[140] La particularité de la composante fixe est bien décrite à la requête de H.Q. que le Tribunal reproduit.
« 60. L’engagement de payer la Composante fixe à CF(L)Co signifie qu’Hydro-Québec a accepté d’assumer, en vertu du Contrat original, une partie significative des risques liés aux fluctuations de l’hydraulicité des réservoirs de la Centrale, étant donné qu’elle s’est engagée à effectuer un paiement lié à de l’énergie dont CF(L)Co ne pouvait pas garantir la livraison. »
[141] Cela étant, certains objectifs, recherchés par les parties, à une époque ou une autre, seront également traités puisqu’ayant une influence certaine sur la vision globale des parties face à cette aventure.
[142] Ainsi, à titre d’exemple, nous verrons que la possibilité d’exporter de l’électricité par H.Q. vers les États-Unis a longtemps été une considération essentielle pour celle-ci. Évidemment, lorsque H.Q. a réalisé que cette considération s’avérait impossible à court ou moyen terme cela a amené celle-ci à reconsidérer sa vision et perception du projet Churchill Falls.
[143] Les négociations ayant mené à la signature de la Lettre d’intention se sont déroulées en trois temps. Une première ronde (« La Première Ronde ») de quelques mois en 1961 suivie d’une seconde s’écoulant de mars 1963 à juillet 1964 (« La Deuxième Ronde ») et finalement la dernière ayant eu cours de mars 1965 jusqu’à la signature de la Lettre d’intention du 13 octobre 1966 (« La Ronde Finale »).
[144] Même si les deux premières rondes n’ont pas été couronnées de succès, le Tribunal se doit d’aborder certains sujets qui y ont été traités puisque ceux-ci font partie intégrante de l’évolution des parties vers l’accord du 13 octobre 1966.
[145] Il va sans dire, qu’en raison de l’écoulement du temps, la preuve entourant cette période en est une strictement documentaire.
[146] Le 18 février 1961 se tient une rencontre à l’Hôtel Windsor à Montréal à laquelle participera le premier ministre de l’époque l’Honorable Jean Lesage de même que Messieurs Marler, Grenville-Smith et Southam. Ces deux derniers étant respectivement administrateur et directeur général de Brinco[70].
[147] Il s’agit alors d’une discussion fort préliminaire, les notes préparées par M. Southam nous apprennent ce qui suit :
- La discussion tourne autour du projet Churchill Falls en rapport avec les besoins du Québec et avec toile de fond, le développement en cours de Manicouagan-Outardes.
- Il y est établi que le financement prévu pour Churchill Falls pourrait être privé et que le Québec pourrait y voir un avantage.
- Cela étant, à cette époque, le projet Manicouagan-Outardes est déjà en marche et il ne semble pas être question de le suspendre.
- Il y est également question d’exporter de l’électricité vers l’Ontario, cependant, le premier ministre Lesage n’y voit pas d’intérêt à court terme.
- Le premier ministre Lesage invite Messieurs Southam et Grenville-Smith à rencontrer le Président d’Hydro-Québec Monsieur Jean Lessard[71].
[148] Effectivement, une rencontre s’est tenue avec Monsieur Lessard, lequel a suggéré une rencontre impliquant des ingénieurs d’Hydro-Québec.
[149] Cette rencontre eut lieu le 6 mars 1961. Les notes reflétant celle-ci, préparées par Monsieur Morgan-Grenville, révèlent que les discussions sont d’ordre générales. De fait, ces notes démontrent que les représentants d’Hydro-Québec même s’ils n’ont qu’une vague idée du projet, jettent les bases de leurs besoins et de ce que devrait contenir une offre formelle de la part de CF(L)Co[72].
[150] À l’occasion de cette rencontre, il semblait évident pour les participants que la quantité d’électricité pouvant être générée à Churchill Falls dépasserait largement les besoins d’H.Q. pour la ville de Sept-Îles et ses industries et qu’en conséquence,
« Power would, therefore be integrated into the Hydro-Quebec system which needs something in excess of 250 000 h.p. of new power each year …»[73]
[151] Cette rencontre donnera lieu à une offre formelle le 23 mars 1961 de CF(L)Co à H.Q. Celle-ci encore une fois très préliminaire contient les éléments suivants, tout en précisant que des discussions et amendements pourront avoir lieu.
-
Quantité d’énergie :
1 000 000 h.p. « to be continuously available »
-
Terme :
25 ans à compter du 15 octobre 1965
-
Prix :
Le prix considéré pour le 1er million de chevaux-vapeur était de
23.00 du cheval-vapeur ou 3.5 Mill[74]
par KWH.
Le prix du second million de chevaux-vapeur était de 2.6 Mill du KWH[75].
[152] Le 15 mai 1961, H.Q. avise CF(L)Co qu’elle n’entend pas donner suite à l’offre du 23 mars 1961 puisqu’elle désire compléter le développement de Manicouagan-Outardes. Cela étant, H.Q. ne ferme pas la porte à d’éventuelles discussions en ces termes :
« The Commission has decided that, under present economic conditions, it is preferable to go ahead with the development of its own hydraulic ressources on the Manicouagan River. This would, therefore, relegate to a later date the import of energy from Hamilton Falls, if it is still available.
Our Planning Committee is aware of the amount of power that could be made available to Quebec from this source of supply; they are requested to keep that in mind and to signal any economic advantages that could be gained therefrom by Hydro-Quebec at any future date »[76].
( Souligné dans le texte original )
[153] Comme nous l’avons vu, H.Q. prévoit alors la mise en opération de la première phase de Manicouagan-Outardes pour 1965[77].
[154] En mars 1963, parallèlement à la nationalisation de l’électricité au Québec, les discussions reprennent entre les représentants de H.Q., Brinco et H.G. Acres firme d’ingénieurs retenue par CF(L)Co pour la conseiller sur les aspects techniques du harnachement du fleuve Churchill.
[155] Cette nouvelle ronde de négociation est la résultante d’une décision des autorités fédérales canadiennes de permettre l’exportation d’électricité aux États-Unis de même que l’intérêt démontré par Consolidated Edison de l’État de New York pour acheter l’excédent de la production de Churchill Falls, sur une base interruptible, une fois les besoins d’Hydro-Québec comblés[78].
[156] Ce dernier aspect constitue alors la toile de fond entourant la deuxième ronde de négociation. Ainsi, la plupart des documents cités par le Tribunal contiendront des références à cette possibilité sans que le Tribunal ne s’y attarde sauf si cela peut jeter de la lumière sur les points en litige.
[157] Un mémo fut préparé par J.R. Hango d’H.Q. concernant une rencontre tenue le 4 mars 1963 qu’il qualifie d’exploratoire[79].
[158] Ce mémo traite principalement de la transmission de l’énergie à travers le Québec, vers les États-Unis. Cependant, on y apprend que le développement de Churchill Falls nécessitera des emprunts de l’ordre de 500 millions de dollars dont 75 % proviendront des États-Unis et 25 % du Canada. Par ailleurs, et pour les fins de ce financement, une entente de 25 ans avec Consolidated Edison était nécessaire[80].
[159] Même si les « Considérants » notés au mémo de Monsieur Hango ont été revisités lors d’une deuxième réunion impliquant H.Q., Brinco et Acres tenue le 14 mars 1963, il ressort des notes de cette rencontre que Acres avait le mandat d’évaluer les items suivants :
a) Cost of generation
b) Cost of transmission
c) Amount of power required by Hydro-Quebec and the timing of its requirements[81]
[160] Par ailleurs, Monsieur Clinch de Acres y va du commentaire suivant ayant trait aux ventes éventuelles à Consolidated Edison et qui est pertinent aux présentes. Le Tribunal en reproduit l’extrait suivant :
« Mr. Clinch said that there may be advantages to all parties concerned in adjusting the load factors so as to take advantage of seasonal differences between the Hydro-Quebec and the Con Edison load patterns and in order to ensure that only the necessary amount of storage is provided at Hamilton Falls. »[82]
[161] Ainsi déjà, même CF(L)Co est consciente d’une nécessité d’harmonisation entre Churchill Falls (les réservoirs) et les besoins de H.Q. en vue de l’exportation.
[162] Un autre mémo, celui-là préparé par les bons soins d’un représentant de Brinco traite sensiblement des mêmes sujets à savoir, les lignes de transmission disponibles en vue de l’exportation de même que les besoins futurs d’H.Q.
[163] Bref, la rencontre du 4 mars 1963 dite exploratoire s’articule autour des besoins d’H.Q., des lignes de transmission en vue de l’exportation, ainsi que du coût du projet.
[164] Une nouvelle rencontre se tient le 14 mars 1963 entre des représentants de Brinco, Acres et H.Q. L’introduction des notes colligées lors de cette rencontre est révélateur. Elle se lit comme suit :
« This meeting was apparently called for the purpose of reviewing future procedure. »[83]
[165] Encore une fois, on y discute des lignes de transmission. Deux constatations sont d’importance :
a) Acres fournira dans quelques semaines « the maximum generating capacity from Hamilton Falls ».
b) En plus de la ligne de transmission 700 KV déjà prévue, trois nouvelles lignes de 700 KV seront nécessaires de Churchill Falls jusqu’à Manicouagan-Outardes[84].
[166] Le Tribunal juge utile de reprendre dans son intégralité le paragraphe 6 du compte-rendu de cette réunion puisque selon CF(L)Co, cet extrait serait révélateur du niveau de connaissance de certains termes utilisés par les parties notamment la notion de « Firm Energy ».
« Apparently, Acres & Co. will not be able to produce an estimate of the firm annual energy generation of Hamilton Falls Generating Station until the end of May. Until this information is available, it will not be possible to estimate definitely the cost per kwh for transmission from the Newfoundland-Quebec boundary to the Quebec-State of New-York boundary. »
[167] Toujours dans cette même veine, on apprend d’une lettre du 31 juillet 1963 de Monsieur Clinch de Acres adressée à CF(L)Co qu’était considérée une tarification pour deux niveaux d’énergie en vue d’un futur contrat avec H.Q. soit un prix pour « the guaranteed minimum energy output » et un prix moindre pour la « secondary energy » ou encore l’énergie excédentaire à celle faisant l’objet d’une garantie[85].
[168] À compter du mois d’août 1963, H.Q. et CF(L)Co entrent dans la phase préparatoire en vue de produire une lettre d’intention. Ainsi, plusieurs projets seront préparés par CF(L)Co certains transmis à H.Q. d’autres pas[86].
[169] Le résultat final étant que ce sera le projet du 30 août 1963 qui sera formellement soumis à H.Q. le 3 septembre 1963[87].
[170] Cela étant, il est utile de préciser qu’un sentiment d’urgence habitait les parties puisque le projet de lettre d’intention devait être soumis à l’occasion d’une réunion de la Commission Hydro Électrique devant se tenir le 11 septembre.
[171] Plusieurs sujets d’intérêt se retrouvent à ces projets de lettres d’intention. Ce sont les suivants :
- Quantité d’énergie vendue et garantie de livraison.
- La notion de « Take or Pay ».
- Le Bloc Twinco et les besoins locaux.
- Le Bloc « Rappel »[88] pour les besoins de la Province de Terre-Neuve.
[172] La question entourant la quantité d’énergie et la garantie de livraison était la plus importante et la plus difficile à répondre pour les parties puisque le développement des Chutes Churchill étant au stade de projet, la quantité d’énergie dépendait du nombre d’unités turbine/générateur installés ainsi que de l’alimentation de ces unités en eau provenant des réservoirs, bref, bien que déterminable par des calculs et projections, les parties nageaient en eaux incertaines quant au résultat final. Par ailleurs, H.Q. désirait obtenir des garanties de livraison quant à l’énergie produite.
[173] À compter de maintenant les notions d’énergie, capacité et puissance, prennent leur importance dans l’historique des négociations. Il y a lieu de référer le lecteur au lexique pour une bonne compréhension de la suite, en précisant qu’au début des années 60, les gens de l’industrie électrique utilisaient les termes capacité et puissance (Capacity, Power) pour exprimer le taux de livraison de l’énergie.
[174] Finalement, H.Q. soumettra le 5 septembre 1963 à CF(L)Co son propre projet de lettre d’intention laquelle contient des changements, certains mineurs d’autres majeurs[89]. On constate à la version préparée par H.Q. que la notion « Take or Pay » est remplacée par l’expression « According to general conditions outlined hereunder ».
[175] Second changement important par rapport au projet soumis par CF(L) Co est le fait que H.Q. remplace les termes utilisés par CF(L)Co de « Primary Energy »[90] par le terme « The remaining part of firm dependable power and energy to be available… »[91].
[176] Au-delà de ces textes finaux, il est certes intéressant de considérer les divers comptes-rendus des réunions tenus entre H.Q. et CF(L)Co ou encore à l’interne pour chacune des parties, au cours des mois d’août et septembre 1963.
[177] De fait, selon les notes de Monsieur Morgan-Grenville quant à la réunion du 22 août 1963, celui-ci aurait expliqué à M. De Guise leur vision du concept « Take or Pay » en convenant qu’il valait mieux laisser cette discussion à leurs supérieurs immédiats[92].
[178] Le 23 août 1963 la définition quant à la garantie de livraison est résumée par Monsieur Morgan-Grenville en ces termes[93].
« It was evident that further discussion was needed to establish clearly the concepts of firm capacity and firm energy. HQ were inclined to take the view that all energy which was not firm according to their definition should be regarded as secondary. »
( Nos soulignés )
[179] Par ailleurs lors de la réunion du 3 septembre 1963 tenue à l’occasion du dépôt de projet de lettre d’intention préparée par CF(L)Co, Monsieur De Guise suggère qu’on laisse la notion « Take or Pay » être négociée à un niveau supérieur[94].
[180] La réunion du 6 septembre 1963 touche beaucoup plus de sujets qui feront l’objet de discussions ultérieures. Ce sont les suivants :
- Changements apportés par H.Q. au projet du 30 août 1963 de CF(L)Co reflété par le projet de lettre d’intention de H.Q. du 5 septembre 1963.
- Ajout possible d’une unité additionnelle.
- Pénalité en cas de défaut de livraison.
- Limites à la possibilité de Rappel.
- Durée du contrat.
- Clauses de renouvellement[95].
[181] Les parties poursuivront leurs discussions dès le 9 septembre.
[182] Le 30 septembre 1963 Monsieur Kirwan-Taylor de Brinco rédigeait un rapport faisant le bilan du développement de Churchill Falls à divers niveaux dont les négociations avec H.Q. Encore une fois les mêmes concepts déjà relatés sont abordés[96].
[183] Finalement, une nouvelle proposition de lettre d’intention sera déposée par CF(L)Co à l’occasion d’une rencontre tenue le 1er octobre 1963[97]. Des notes reflétant cette rencontre ont été colligées par l’avocat externe de CF(L)Co Maître Culver[98].
[184] Cette nouvelle proposition réintroduit le concept de « Take or Pay », et introduit le concept de deux tarifs soit un prix pour la quantité d’énergie sur laquelle les parties se sont entendues et un autre prix quant à l’énergie additionnelle ou excédentaire.
[185] Pour la première fois cette proposition contient un tableau établissant les dates de mise en service des unités ainsi que l’énergie y associée.
[186] Il s’agit d’un point tournant dans ces négociations, ce projet apparaissant beaucoup plus complet que ce qu’envisagé auparavant.
[187] Certains des commentaires tenus par les participants lors de cette rencontre méritent d’être reproduits. Ce sont les suivants.
« Mr. Morgan-Greenville then discussed the concept of sale, mentioning that the price had not as yet been settled and that this would be worked out between Messrs. Winters and Lessard subject, however, to the obtaining of a check estimate on the cost of the project. Mr. Morgan-Grenville stated that discussions to date had been with a view to a straight kwh charge but that now Brinco was thinking in terms of a split tariff.[99]
(…)
Mr. de Guise referred to his counter proposal given to us after a study of our draft of 3 September 1963, and he stressed that Hydro-Quebec had definite load commitments and he wished to be able to depend on certain amounts of power to meet these commitments.[100]
(…)
Mr. de Guise asked that the Twin Falls set up be explained and clarified and Mr. Clinch did this, pointing out that it would be about 2½ times as efficient to use the present Twill Falls water through the HFPCo plant.[101]
(…)
Mr. Farnham stated that he would like to see a further column added to the table entitled “Firm Power” but he was eventually dissuaded from this.[102]
(…)
Mr. de Guise again stated that Hydro needs firm power and that there must be spare capacity to cover outages. He mentioned that the Manic 2 projects was built to provide a capacity of four units but that Hydro had put in five. Mr. Farnham again emphasized that their practice was to consider one unit firm for each two installed.[103]
(…)
Messrs. De Guise, Lemieux and Farnham then objected more or less vehemently to the take or pay concept on the ground that Hydro took the whole risk while it had no control over the design and construction of the plant. Mr. Farnham said the situation would be different if Hydro was building a plant of its own and stated that Hydro would want to supervise the whole design and construction program. Mr. de Guise put it another way: Hydro pays for the whole thing but HFPCo spends the money in a manner over which Hydro has no control.[104]
Mr. Mulholland then outlined the take or pay clause, explaining that this sort of provision was necessary (in the opinion of counsel) in order that HFPCo’s bonds would be “adequately secured” within the meaning of the New York State Life Insurance law requirements for legal investments. Mr. Lemieux had a number of sarcastic comments to make along the lines of Hydro-Quebec having to pay even if the whole plant was blown up. Mr. Lemieux asked what percentage of the plant cost was to be covered by U.S. pay bonds.[105]
[… Mr. Kirwan-Taylor then brought the discussion around to the question of Newfoundland power. (…)
From Hydro’s point of view they had to consider the fact that they had built a vast transmission system and did not wish to have too much recaptured and he pointed out that there were various alternatives. …] »[106]
( Nos soulignés )
[188] De ces notes, il apparaît assez clairement qu’à ce stade les parties sont loin d’une entente.
[189] Les négociations se poursuivent.
[190] Il est utile de préciser qu’en novembre 1963, Monsieur McParland qui devient alors un des négociateurs de CF(L)Co se voit remettre un lexique datant de 1961 intitulé « Glossary of Electric Utility Terms » accompagné d’une lettre de Monsieur Hobson de CF(L)Co insistant sur trois termes soit[107] :
- Firm Power
- Load Factor
- Capacity Factor
[191] Le 25 novembre, Monsieur Winters de Brinco écrit à M. Jean-Claude Lessard d’H.Q. pour lui indiquer que CF(L)Co est prête à aller de l’avant sur la base du projet de lettre d’intention du 7 octobre 1963 avec quelques changements dont la durée du contrat et la tarification des prix associés à l’énergie livrée[108].
[192] Est joint à cette lettre du 25 novembre 1963 le projet de lettre d’intention du 7 octobre 1963 ainsi qu’une annexe A expliquant la vision de CF(L)Co du concept de « Take or Pay ». Voici un extrait qui résume bien les caractéristiques de ce type de contrat.
« The proposed power contract between Hydro-Quebec and HFPCo would contain certain provisions usually described as take-or-pay provisions. These provisons would entail on the part of Hydro-Quebec an obligation, first, to pay for capacity and energy for which it had contracted and which was delivered or made available by HFPCo, and second, regardless of whether or not HFPCo delivers or makes available the capacity or energy contracted for, to continue to make payments to HFPCo of a certain stipulated minimum amount. »[109]
[193] H.Q. a produit un mémo émanant de Monsieur De Guise lequel serait contemporain à la lettre du 25 novembre 1963[110].
[194] De ce mémo, l’on constate que la question de quantité d’énergie et puissance disponible n’est toujours pas résolue mais que cela devient un sujet épineux et ce, en regard des négociations entre H.Q. et Consolidated Edison. Par ailleurs, le principe du « Take or Pay » semble être accepté puisque H.Q. est consciente qu’il s’agit-là d’un élément clé pour obtenir le financement.
[195] Il est également réitéré que la limite maximale à être allouée à titre de Rappel ne doit pas dépasser 15 % de la capacité de la Centrale en raison de l’investissement considérable d’H.Q. dans les lignes de transmission entre Churchill Falls et Montréal. (Le chiffre avancé à cette époque était de 500 millions de dollars).
[196] Le 2 décembre 1963, Monsieur De Guise fait part formellement de ses préoccupations à Monsieur Lessard, les principales étant les suivantes :
- Débit d’eau disponible pour le Fleuve Churchill.
- Problèmes d’exploitation.
- Prix de l’électricité.
- Risques de part et d’autre.
- Tarification.
-
Diverses généralités comprenant :
• Marge de puissance en disponibilité immédiate (spinning reserve).
• Conditions du « Take or Pay »[111].
[197] L’impression générale de cette lettre démontre que la préoccupation principale de Monsieur De Guise est d’ordre financier, la question coût ou tarification se révélant dans la plupart des points soulevés.
[198] Un nouveau projet de lettre d’intention préparé par CF(L)Co est transmis à H.Q. le 7 janvier 1964, celui-ci précise certains points des projets précédents notamment quant au tableau introduit la première fois à l’occasion du dépôt du projet de lettre d’intention du 1er octobre 1963. En effet, ce nouveau tableau comportant 6 colonnes fait état de deux types de données, ce sont :
- Firm Capacity and Associated Energy.
- Spare Capacity and Associated Energy.
[199] Le 28 janvier 1964, Monsieur Lessard d’H.Q. écrit à Monsieur Winters de Brinco pour préciser qu’H.Q. n’est pas en mesure d’aller de l’avant pour trois raisons :
- Tarification.
- H.Q. n’a toujours pas reçu le rapport du Comité formé par le premier ministre quant aux aspects financiers du projet.
- Les négociations avec Consolidated Edison sont au point mort[112].
[200] À la même époque, Monsieur De Guise fait part à l’interne, d’importantes réserves, qu’il entretient sur l’ensemble du projet[113]. L’éloignement de la Centrale de même que le fait qu’H.Q. doive retarder d’autres projets pèsent lourd dans son raisonnement.
[201] Le 10 mars 1964, à la suite de rapports et d’études fournis par Acres, Monsieur Winters fait parvenir une lettre à Monsieur Lessard précisant « We have prepared an energy formula … » laquelle est intégrée à un nouveau projet de lettre d’intention daté du 9 mars 1964 joint à cette lettre.
[202] Le Tribunal juge utile de reproduire intégralement cette formule.
« 9. The term « firm capacity » for the purposes hereof shall mean the aggregate capacity of all generating units installed at any given time less one unit, the capacity of which shall for such purposes be termed « spare capacity ». The amounts of firm capacity and spare capacity which can be made available at the agreed point of delivery are as given in Columns 3 and 4 respectively of the Table on the following page.
The term “continuous energy” for the purposes hereof shall mean the energy which can be made available continuously at the agreed point of delivery, subject only to forced outages at the station in excess of one unit, up to but not exceeding 105 percent of the estimated amounts given in Column 5 of the Table.
The term “excess energy” for the purposes hereof shall mean all energy other than continuous energy as defined above which can be made available at the agreed point of delivery from time to time or continuously whether from operation of the units at dates earlier than those given in Column 1 of the Table, or from increased water availability, or from improved efficiency of plant and equipment.
10. Subject to the provisions of Clause 13, HFPCo proposes to sell to Hydro-Quebec and Hydro-Quebec proposes to purchase from HFPCo all continuous energy and all excess energy. »[114]
( Nos soulignés )
[203] En d’autres termes, CF(L)Co entend vendre à H.Q. la totalité de la production de la Centrale.
[204] Il n’y aura pas de suite à ce nouveau projet de lettre d’intention les parties ne s’entendant pas sur un élément essentiel soit le prix de l’énergie vendue.
[205] Pendant que CF(L)Co revenait à la charge en baissant le prix demandé, H.Q. quant à elle préparait un nouveau projet de lettre d’intention modifiant sensiblement la « energy formula » élaborée par CF(L)Co la réduisant à sa plus simple expression. Le Tribunal la reproduit :
« 10. Subject to the provisions of Clause 14, HFPCo proposes to sell to Hydro-Quebec and Hydro-Quebec proposes to purchase from HFPC0 all continuous energy and all energy from spare unit when available, according to schedule previously outlined. »
[206] De plus dans ce projet, on constate sous la rubrique “Dispatching” que dans les faits la Centrale et sa production seront contrôlées par H.Q. à un point tel, que ce projet prévoit que H.Q. devra payer en cas de déversement.
[207] S’agissant d’un nouveau concept, il y a lieu encore une fois d’ouvrir une parenthèse.
[208] La matière première pour le fonctionnement des turbines générant l’électricité est l’eau. À cet égard, nous verrons plus loin que la capacité des réservoirs est traduite en énergie pour les fins des contrats visant la production et la vente d’électricité.
[209] Ainsi, lorsqu’une partie gère la production d’électricité, elle gère nécessairement les réservoirs. De là, si cette partie gère mal les réservoirs, il peut y avoir déversement (spilling) lequel est quantifiable en énergie gaspillée et par le fait même en dollars.
[210] Bref, H.Q. désirant gérer la production, il devenait normal qu’elle prenne charge des risques inhérents dont les déversements.
[211] Fermons la parenthèse.
[212] Selon CF(L)Co le projet préparé par H.Q. ne lui aurait jamais été transmis probablement en raison de l’achoppement des négociations.
[213] Quoiqu’il en soit et en dépit de la lettre de Monsieur Lessard du 28 janvier 1964 et à la suite de nouveaux rapports préparés par Acres pour le bénéfice de CF(L)Co, celle-ci déposera le 5 juin 1964 à Hydro-Québec un document intitulé « Submission by Hamilton Falls Corporation ». Ce document se veut un réquisitoire d’un point de vue financier en faveur du projet.
[214] Le 8 juin 1964, le comité formé par le premier ministre Lesage soumettait son rapport sur l’ensemble du projet. Voici le contexte du rapport.
« Nous avons donc consacré nos efforts à établir les facteurs déterminatifs du prix auquel toute la production des chutes Hamilton, à l’exception d’une faible quantité d’énergie destinée à être consommée à Terre-Neuve, devrait être achetée par Hydro-Québec. »
[215] Ce document[115] jette de la lumière sur des divergences d’opinions et des préoccupations que le Comité présente au premier ministre Lesage.
Divergences : |
· |
Le comité estime le coût du projet à 635 millions plutôt que les 697 millions avancé par CFL(L)Co. |
|
· |
Le comité manifeste son désaccord quant au rendement exigé par CF(L)Co. |
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Préoccupations : |
· |
Éloignement du projet et les risques inhérents. |
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· |
Le fardeau que représente le concept « Take or Pay ». |
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· |
Garantie de livraison que le comité fixe à un minimum de 32 milliards kwh. |
[216] Cela étant le comité y voit également des avantages lesquels sont principalement liés à un éventuel contrat avec Consolidated Edison.
[217] Quoi qu’il en soit, le 8 juillet 1964, le premier ministre Lesage annonçait qu’une entente pour le développement de Churchill Falls s’avérait impossible mettant ainsi fin publiquement à la deuxième ronde de négociations.
[218] Le Tribunal retient de cette deuxième ronde, que si le projet se raffine, il y a encore beaucoup de sources de divergences. Cela étant, le point à retenir est que la motivation principale d’H.Q. lors de la deuxième ronde était liée à un contrat potentiel d’exportation d’électricité vers les États-Unis. Par ailleurs, le concept « Take or Pay » même si accepté en bout de ligne, a fait l’objet de négociations intenses et sérieuses.
[219] Les parties reprennent leurs négociations au printemps 1965.
[220] Le 1er mai 1965, Monsieur Winters alors président du conseil de CF(L)Co transmet une lettre à H.Q. contenant deux propositions lesquelles si elles prévoient que H.Q. sera le principal client, laissent entrevoir la possibilité pour CF(L)Co d’exporter de l’électricité ailleurs au Canada et vers les États-Unis[116]. Ainsi, ces deux propositions générales sont plutôt axées sur la transmission de cette énergie.
[221] Cette lettre fait également directement référence à ce qui avait été négocié lors de la deuxième ronde de négociation tout en précisant que les coûts du projet seraient supérieurs à ce qui avait été discuté, un an auparavant et que le terme du contrat pouvait être supérieur à 40 ans.
[222] Le 20 mai 1965 un projet de lettre d’intention portant la date du 19 mai 1965 est transmis par CF(L)Co à H.Q.[117]
[223] Effectivement, le projet de lettre d’intention du 19 mai 1965 comporte beaucoup de similitudes avec le projet du 9 mars 1964[118]. Les plus importantes sont les suivantes.
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· |
Quantité d’énergie sensiblement la même. |
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· |
L’exportation à Consolidated Edison est encore envisagée. |
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· |
Conditions « Take or Pay ». |
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· |
Les termes « Firm Capacity », « Continuous energy » et « Excess Energy » ont la même définition. |
En revanche le prix suggéré pour la « Continuous Energy » est revu à la baisse tandis que celui de « L’Excess Energy » est revu à la hausse. Fait notable également CF(L)Co quantifie à 300 mw le « rappel » pour les besoins locaux de la province de Terre-Neuve lequel pourra être exercé sujet à un préavis de 3 ans[119]. Par ailleurs, ce projet évalue à environ 34 milliards de kwh la capacité de production de la Centrale.
[224] Le 21 mai 1965, Monsieur McParland écrit à Monsieur Lessard afin de préciser entre autres que la production annuelle disponible pour Hydro-Québec serait d’environ 32 milliards kwh. Il est à noter qu’il s’agit là d’une réponse à une des préoccupations soulevées par le Comité créé par le premier ministre Lesage dans son rapport du 8 juin 1964.
[225] Le 8 juin 1965, Monsieur Lessard transmettait son projet de lettre d’intention datée du 31 mai 1965 à CF(L)Co[120]. Celle-ci comprend une condition suspensive relative à l’obtention par H.Q. d’un contrat d’exportation lequel devait générer des revenus annuels minimum de 31 000 000 $ US.
[226] Les définitions de « Firm Capacity », « Continuous Energy » et « Excess Energy » sont à peu de choses près les mêmes. Cela étant, le concept « Spare Capacity » absent jusqu’alors dans les divers projets est introduit et décrit comme suit.
« spare capacity » The amounts of firm capacity and spare capacity which can be made available in the opinion of HFPCo are as given in Columns 3 and 4 respectively of the Table Article 9.0. »[121]
[227] Le tableau auquel fait référence ce projet est inclus à la lettre d’intention et comporte les colonnes suivantes.
Column1 |
Column 2 |
Column 3 |
Column 4 |
Column 5 |
|
Units |
Firm Capacity |
Spare Capacity |
Continuous Energy |
Date |
Installed |
(KW) |
(KW) |
(Millions of KW Per Month) |
[228] La clause 10 de ce projet est également d’intérêt, il y a lieu de la reproduire.
10.0 Sale and Purchase of Continuous and Excess Energy
Subject to the provisions of Article 14 HFPCo will sell to Hydro-Quebec and Hydro-Quebec will purchase from HFPCo all continuous energy and all excess energy.
10.1 Hydro-Quebec will purchase such energy from HFPCo on a “take-or-pay” basis, at the respective rates stipulated in Article 11, and will pay for all such energy made available by HFPCo, whether or not taken by Hydro-Quebec, in accordance with the provisions of Articles 15.0 and 15.1.
[229] Encore une fois, force est de constater, que les parties envisageaient alors la vente de toute la production de la Centrale.
[230] Autre point d’intérêt toujours selon le projet d’H.Q., il y est précisé que CF(L)Co estime la capacité de production à 34 milliards KWH annuellement dont 32.2 milliards KWH seraient disponibles pour H.Q.[122]
[231] À ce stade, l’intention d’H.Q. est claire, elle désire acheter la totalité de la production de la Centrale, moins les blocs réservés, ce qu’elle estime à un minimum de 32.2 milliards KWH.
[232] Par ailleurs, la durée du contrat envisagée par H.Q. est de 44 ans à compter de la date de la première livraison commerciale à partir de la Centrale.
[233] Même si CF(L)Co indique que le projet de lettre d’intention, dans son ensemble lui semble acceptable d’autres négociations seront menées.
[234] Ainsi, H.Q. soumet à CF(L)Co un nouveau projet de lettre d’intention celui-là daté du 15 juin 1965.
[235] Celui-ci contient une modification à la définition de « Continuous Energy ». Il est utile de la reproduire.
« The term « continuous energy », for the purposes hereof, shall mean all energy which can be made available on a monthly basis at the agreed point of delivery, from all generating units commissioned less one unit up to, but not exceeding, 105% of the corresponding amounts of energy shown in Column 5 of the Table Article 9, and subject to the provisions of Article 8.1 (a) below. »[123]
[236] Le 12 juillet 1965, Monsieur Winters de Brinco écrit au premier ministre Lesage pour l’informer que selon eux, l’exportation d’énergie vers les États-Unis n’est pas essentielle pour la viabilité du projet[124]. Rappelons qu’il s’agissait là d’une condition imposée par H.Q.
[237] Cela étant et pour palier à ce manque à gagner Monsieur Winters plaide pour une augmentation du prix de l’énergie ainsi que pour des garanties accrues de la part d’H.Q. notamment quant aux fluctuations du taux de change. En effet, partie des obligations servant au financement étant destinées au marché américain, le service de la dette se trouvait dès lors affecté par le taux de change.
[238] Il s’agit là d’une demande et changement de cap majeur que CF(L)Co requiert de H.Q.
[239] Concurremment, soit le 12 juillet 1965, H.Q. transmet un nouveau projet de lettre d’intention[125].
[240] Il est intéressant de noter que celui-ci contient toujours la condition suspensive quant à l’exportation d’électricité vers les États-Unis. D’ailleurs, la clause « Take or Pay » est également sujette à des conditions directement liées à l’exportation.
[241] Par ailleurs et même s’il s’est écoulé à peine un mois depuis la transmission du projet de lettre d’intention précédent[126], H.Q. procède à une nouvelle modification de la définition de « Continuous Energy » en éliminant les mots « which can be made available on a monthly basis » ainsi la nouvelle définition se lit comme suit.
« The term « continuous energy » for the purposes hereof shall mean all energy made available at the agreed point of delivery, from all generating units commissioned less one unit, up to but not exceeding 105% of the corresponding amounts of energy shown in column 5 of the Table Article 9, and subject to the provisions of Article 8.1(a) below. »
[242] Le 29 juillet 1965, Monsieur Winters écrit à Monsieur Lessard pour lui indiquer qu’ils ont un accord de principe quant au dernier projet soumis par H.Q. sujet à un accord sur le prix de l’électricité et quant à certains points[127].
[243] Ces points à régler selon CF(L)Co se révèlent des minutes de son conseil d’administration tenu à la même date soit le 29 juillet 1965[128].
[244] Cela étant, puisque rien de la preuve documentaire ne rapporte la teneur des discussions quant aux points à régler, il faut s’en tenir au nouveau projet émanant de H.Q. Celui-ci daté du 1er octobre 1965 ne contient pas de changements significatifs par rapport au précédent projet du 12 juillet 1965.
[245] De fait, la preuve documentaire après cette date ne rapporte que des négociations quant au prix de l’électricité et plus particulièrement pendant la période de construction de la Centrale.
[246] En décembre 1965, Monsieur Winters informe ses collègues du conseil d’administration de CF(L)Co qu’il démissionne de ses fonctions, en date du 17 décembre 1965 et sera remplacé par Monsieur Henry Borden à titre de président du conseil tant de Brinco que de CF(L)Co[129].
[247] À l’occasion de cette même réunion du conseil d’administration de CF(L)Co, Monsieur Lessard d’H.Q. qui en fait également partie indique que H.Q. demandera incessamment au gouvernement du Québec d’avancer des fonds de l’ordre de 4 000 000,00 $ à CF(L)Co pour permettre le début de certains travaux sur le site de la Centrale. Quant au projet de lettre d’intention, il indique qu’il pourrait être signé sous peu, mais concurremment à une entente avec des clients potentiels en vue d’exportation aux États-Unis.
[248] Sur ce point, H.Q. produit un projet de lettre d’intention datée du 9 décembre 1965 devant la lier à Consolidated Edison Company of New York et Niagara Mohawk Power Corporation[130].
[249] Celle-ci fait état d’une vente par H.Q. de 10,5 milliards de KWH par année pour une période de 25 ans à un taux de transmission de 1 500 MW le tout correspondant à de la « « Scheduled delivery energy », et advenant qu’il y ait des surplus d’énergie disponibles, les acheteurs manifestaient déjà leur intérêt à s’en porter acquéreur.
[250] Le 17 décembre 1965, H.Q. transmet à CF(L)Co un nouveau projet de lettre d’intention, celui-là en date du 13 décembre 1965. Celle-ci contient un léger changement à la définition de « Continuous Energy » pour préciser en début de paragraphe « After the completion of ten units, the term « Continuous energy » for the purposes hereof shall mean all energy made available … »[131].
[251] La clause 10 prévoyant l’achat par H.Q. de « all continuous energy and all excess energy » dans une formule « Take or Pay » demeure inchangée si ce n’est qu’une nouvelle numérotation de clauses de référence.
[252] À compter du début 1966, certains changements fondamentaux surviendront.
[253] En effet, le 28 janvier 1966, l’avocat des acheteurs américains potentiels informe Monsieur De Guise que le projet d’achat est en péril suite à une décision défavorable d’une Cour d’appel américaine quant à une station de pompage envisagée par les acheteurs américains, station à laquelle était destinée l’électricité achetée de H.Q.[132]
[254] Cela étant, le 22 février 1966 Monsieur Lessard écrit au premier ministre Lesage demandant à celui-ci l’autorisation de signer la lettre d’entente jointe à la lettre[133].
[255] Pour convaincre le premier ministre Lesage, Monsieur Lessard fait état du prix avantageux consenti à H.Q. par CF(L)Co et le fait que la réalisation de la Centrale n’aurait pas d’impact majeur et direct sur les finances d’H.Q. Par ailleurs, même si Monsieur Lessard sait que le projet d’exportation est compromis, il représente qu’une décision finale pourrait prendre de 4 à 8 mois quant à la station de pompage. Cela étant, un paragraphe de cette lettre marque un changement majeur de la part d’H.Q., le Tribunal le reproduit[134].
« Dans le cas où l’Hydro-Québec ne parviendrait pas à vendre aux Etats-Unis une partie de l’énergie ainsi achetée, il lui reste la possibilité d’utiliser elle-même la totalité de l’énergie produite et l’étude de cette possibilité se poursuit activement. De toute façon, la lettre-entente ci-jointe ne lie aucunement l’Hydro-Québec au cas où celle-ci ne trouverait pas de clients américains et devient périmée à l’expiration d’une période de douze mois. »
[256] De fait, l’étude dont parle Monsieur Lessard sera produite par Monsieur Joseph Bourbeau le 16 mars 1966[135].
[257] Il s’agit d’une étude détaillée mettant en relief quatre possibilités de séquence où est considéré l’ordre d’intégration du système d’H.Q. des centrales Manicouagan 3 et 5, des Chutes Churchill ainsi que des centrales de pointe.
[258] M. Bourbeau tout en favorisant la séquence de mise en service suivante : 65-07-30 : M5, Chutes Churchill, centrales de pointe et M3 conclut son rapport de la façon suivante[136].
« De quelle façon, l’Hydro-Québec peut-elle prendre toute cette énergie pour son propre réseau. Le rapport démontre qu’il vaut mieux que les Chutes Churchill aménagent leurs groupes de façon à répondre à la demande de pointe du réseau. »
[259] CF(L)Co soumettra à H.Q. un nouveau projet de lettre d’intention le 17 avril 1966[137]. Celui-ci, outre le fait que la condition relative à l’exportation est supprimée, compte peu ou pas de changements quant au fond.
[260] En raison de soubresauts politiques notamment la défaite du gouvernement Lesage le 5 juin 1966 aux mains de l’Union Nationale de Daniel Johnson, la signature de la lettre d’entente s’en trouvera reportée, puisque le nouveau gouvernement exigera certaines modifications d’ordre politique à la lettre d’intention lesquelles ne sont pas pertinentes aux fins des présentes.
[261] Par la lettre datée du 21 juin 1966, H.Q. est formellement avisée par la « Power Authority of the State of New York » qu’elle n’entend pas contracter pour l’achat d’électricité ouvrant la porte cependant à la possibilité d’acheter du « surplus energy » quand celle-ci deviendra disponible[138].
[262] En juillet 1966, le gouvernement Johnson n’ayant toujours pas donné son aval, Monsieur Lessard écrit à deux reprises au premier ministre Johnson soit les 6 et 22 juillet 1966[139].
[263] Autant la lettre du 6 juillet est succincte autant celle du 22 juillet va en profondeur plaidant les avantages reliés au projet Churchill Falls.
[264] Jusqu’en septembre 1966, il y aura un va et vient entre H.Q. et le Premier ministre Johnson pour le convaincre d’aller de l’avant avec le projet.
[265] Finalement, la lettre d’intention est signée le 13 octobre 1966[140].
[266] Quelques constatations s’imposent quant à la ronde finale de négociations.
[267] Autant CF(L)Co fut active dans la préparation et soumission de projets de lettres d’intention dans la deuxième ronde de négociations autant H.Q. le fut pendant la ronde finale soumettant quatre projets à CF(L)Co.
[268] Il est utile, à ce stade, de reprendre les grands principes sur lesquels les parties se sont entendues au niveau de la lettre d’intention. À ce titre, le Tribunal procédera à un condensé quant à l’ensemble de la lettre d’intention.
1) |
CF(L)Co vendra et H.Q. achètera toute l’énergie produite par la Centrale (art.1). |
2) |
La capacité des réservoirs est établie à 1 115 milliards de pieds cubes (art.3.2). |
3) |
La capacité ou la puissance de la Centrale sera de 4 500 MW avec 10 groupes de production (art.3.1). |
4) |
L’énergie pouvant être produite est estimée à 34 milliards de KWH dont 32.2 milliards de KWH sera rendu disponible à H.Q. |
5) |
Les termes « Firm Capacity » « Continuous Energy » et « Excess Energy » sont définis (art.7). |
6) |
Le principe des Blocs réservés pour Twinco et Rappel est accepté, ce dernier étant limité à 300 MW (art. 3.3 et 10). |
7) |
Toute l’énergie produite « Continuous and Excess », sauf les Blocs, sera vendue à H.Q. sur la base de « Take or Pay » (art. 15 et 24). |
8) |
Les prix de « Continuous Energy » ainsi que de l’ « Excess Energy » sont fixés pour la durée du terme (art. 16 et 17). |
9) |
Il est convenu que H.Q. pourra demander à CF(L)Co d’opérer à un minimum de capacité moyennant certaines compensations financières de même qu’elle pourra demander à ce que CF(L)Co opère au maximum de sa capacité (art. 8 c) et d)). |
10) |
Même si la tarification de l’énergie vendue est fixée, les parties reconnaisse que le coût final du projet peut varier et donc ouvrent la porte à une modification de cette tarification (art. 18 et 19). |
11) |
Le terme du contrat est pour une période de 40 ans accompagné d’une possibilité de renouvellement pour une période indéfinie et ce, pour des conditions à être négociées. CF(L)Co puisant un argumentaire de cette clause il convient de la reproduire (art. 11). « 11.1 Renewal of the Contract Hydro-Quebec shall have the right to renew the definitive power contract for a further term of years from its expiry date, upon such terms and conditions as to quantity and price as may then be mutually agreed. It will also be given right of first refusal prior to any contract that CFLCo may then be willing to sign with a third party for power consumption within Quebec. » |
12) |
Abandon par H.Q. de la condition suspensive visant l’exportation d’électricité vers les États-Unis. |
13) |
H.Q. s’engage jusqu’à hauteur de 100 millions de dollars, à combler le dépassement de coûts de la construction de la Centrale. |
[269] Cette période de négociations, remplie d’effervescence, s’étendra du début 1967 jusqu’en juillet 1968 les parties animées d’un sentiment d’urgence puisque les travaux sur le site ont débuté à peine 15 jours suivant la signature de la lettre d’intention.
[270] Des sommes importantes pour l’époque doivent être avancées. Dès lors, la conclusion du contrat, entre CF(L)Co et H.Q., essentiel au financement, devient prioritaire.
[271] Si les parties, au début de cette période, s’appuyaient sur la lettre d’intention quant à la forme, l’apparition et l’élaboration de nouveaux concepts de part et d’autre ont fait en sorte de changer radicalement la facture du contrat par rapport à la lettre d’intention.
[272] Quelques mots sur les équipes de négociation en présence s’imposent.
[273] Ainsi en février 1967 Robert A. Boyd, directeur général d’H.Q. écrit à Monsieur McParland pour désigner l’équipe de négociateurs d’H.Q. Ce seront :
H.B. Abbott-Smith |
Directeur |
T.O. Evans |
Assistant technique au directeur général |
André Gadbois |
Avocat senior à l’interne[141] |
[274] Le 10 mars 1967, Monsieur McParland devenu président de CF(L)Co désigne les personnes suivantes pour les représenter lors des négociations :
C.T. Manning |
Vice-président et secrétaire |
John Tennant |
Avocat externe de la CF(L)Co |
Ron Clinch |
Ingénieur au sein de la firme Acres |
[275] Cela étant, par leurs lettres respectives, Messieurs Boyd et McParland conviennent que les points majeurs du contrat en devenir, demeureront leur responsabilité.
[276] Par ailleurs, autre événement majeur est le fait que le 12 février 1968, H.Q. mandate la firme d’ingénieurs américaine EBASCO Services Incorporated (ci-après désignée « EBASCO ») pour l’assister dans la suite des négociations. Le mandat confié est d’intérêt, il y a lieu d’en reproduire les modalités[142].
«1) |
Compare Letter of Intent of October 13, 1966 with latest revision of proposed formal contract. Point out and discuss particular clauses of contrat act which bind Hydro-Quebec beyond what was agreed upon through Letter of Intent. |
2) |
What clauses are incorporated in the formal contract which bind Hydro-Quebec beyond what would normally be expected in a contract of this type and magnitude? |
3) |
What clauses in the contract impose upon Hydro-Quebec obligations which were not provided for in the Letter of Intent and which are not usually necessary to finance a project of this type? |
4) |
What additional protective clauses should be incorporated in format contract which would better serve the interests of Hydro-Quebec? |
5) |
What conditions in the Letter of Intent could profitably be modified at the request of Hydro-Quebec in exchange for concessions which may be required for financing purposes and were not covered in the letter of Intent? » |
[277] La décision d’embaucher Ebasco marque un changement important dans la vision que H.Q. quant à ses futures relations contractuelles avec CF(L)Co. Ainsi, la facture même du mandat ouvre la porte à des changements fondamentaux par rapport à la lettre d’intention.
[278] C’est sans soute en raison de la présence d’Ebasco que furent élaborés et mis de l’avant de nouveaux concepts ou idées, tantôt par CF(L)Co tantôt par H.Q. et tantôt collectivement. Ce sont les suivants :
· Split Tariff.
· Annual Energy Base.
· Claude de flexibilité opérationnelle.
· Clause de renouvellement.
[279] Avant de les aborder, rappelons à grands traits la situation et/ou motivation de chacun des deux protagonistes.
CF(L)Co : • Elle a besoin de conclure un contrat avec H.Q. aux fins d’obtenir un financement.
• À court, moyen et peut-être long terme, le seul client de CF(L)Co sera H.Q.
H.Q. : • Les possibilités d’exportation de l’énergie produite et achetée de CF(L)Co à court et moyen terme sont nulles. Elle doit donc intégrer, la production de la Centrale à son réseau.
• H.Q. a pris des engagements financiers considérables en vue du financement et de la construction de la Centrale.
[280] Ainsi, une des nouveautés en regard de la lettre d’intention sera une modification importante à la tarification. Ainsi, le 21 juin 1967, Monsieur McParland écrit ce qui suit :
« It also appeared desirable to split the tariff so that two-thirds would be payable on a kilowatt per year demand basis and the remaining one-third on an energy basis. »[143]
[281] Le 5 juillet 1967, Monsieur McParland transmet formellement et directement à Monsieur Boyd sa proposition qu’il qualifie de “Comprehensive tariff package”[144]. Cette communication directe entre Messieurs McParland et Boyd s’explique par le fait qu’il s’agit là d’une demande de changement majeure par rapport à la lettre d’intention.
[282] Cette proposition tient sur quelque 25 pages et constitue une dérogation majeure au contenu de la lettre d’intention. Sans procéder à l’analyse de tous et chacun des éléments, le Tribunal juge utile d’en réciter les chapitres afin de démontrer l’ampleur du changement structurel désiré par CF(L)Co.
1. Underlying assumptions.
2. Comments on capital cost variations.
3. Base tariff and adjustments.
4. Sample tariff calculations.
5. Tariff comparisons to letter of intent.
6. Peaking arrangements.
7. Method of adjustment for escalation.
8. Notes on split tariff.
9. Comments on the signification of tariff package.
10. Some comments on the alternative for Hydro-Quebec to the Churchill Falls development.
11. Table illustrating changes in overrun guarantee with capital cost changes.
[283] Le chapitre 10 de la proposition démontre l’importance du changement structurel CF(L)Co prenant soin de préparer elle-même une étude de cas pour le bénéfice d’H.Q. et lui démontrer qu’en dépit de ses demandes, H.Q. y trouve quand même son compte.
[284] Par ailleurs, voici comment est défini le « Split tariff » :
« The tariff which applies at any time will be split on a demand-energy basis in the ratio of 2 :1. Two-thirds, or the demand charge, will be a fixed amount converted to a KW demand charge (on the 31.2 base) and will be defined as a KW per year charge to be paid on a monthly basis. The second portion of the charge will be a KWHr energy charge, as metered. »[145]
[285] La proposition du 5 juillet 1967, quant au "tariff package", n’ayant pas reçu un accueil favorable de la part de H.Q. une nouvelle proposition fut discutée par le conseil d’administration de CF(L)Co le 26 juillet 1967[146]. Celle-ci ayant eu l’aval informel de Messieurs De Guise et Boyd elle fit l’objet d’une proposition formelle le 4 août 1967 dans une lettre adressée à Monsieur Boyd[147].
[286] Il y a lieu d’en établir les grandes lignes pertinentes à la présente affaire soit en les résumant soit en citant des extraits :
1. Amount of capacity :
Elle est fixée à 4 500 MW sur la base de 10 groupes dont un sera en réserve (spinning reserve).
2. Peaking availability :
Accorder 750 MW de capacité supplémentaire à H.Q. par l’ajout d’un onzième groupe. 500 MW des 750 MW disponibles en tout temps pour H.Q. et 250 MW sur demande pour une période de 20 heures par semaine entre novembre et mars[148].
3. Total energy :
L’énergie de base annuelle est établie à 31.2 milliards de KWH.
4. Method of payment :
« To eliminate complex corrections to power billings for the cost of peaking, the detail of monthly payment clauses in the power contract will stipulate a split of 2 :1 in the tariff; with 66.7 % of the applicable mill rate per KWHr calculated as a fixed amount on a KW demand or capacity basis, and 33.3 % of the mill rate calculated on an energy consumed or KWHr basis. »
5. Excess energy :
« To ensure reasonable and efficient water management CFLCo will provide three month forecasts in advance of each quarter for the energy which will be made available. Such forecasts would be within ± 10 % of one-quarter of the annual energy base of 31.2 BKWHr. Under such circumstances, CFLCo would waive the right to 105 % of energy estimates at prime energy rates, since such an arrangement would be difficult to implement with peaking. Hydro-Quebec would obtain all energy in excess of the annual base at 33.3% of the mill rate in force at the time such excess energy was supplied. Continuous and excess energy definitions and related provisions will cease to be applicable. »
6. Method of operation :
Les réserves d’eau sont établies à 1100 BCF et H.Q. pourra céduler les livraisons en fonction de son système.
7. Adjustment in base energy :
Un ajustement à l’évaluation de l’énergie de base annuelle pourra être requis par les parties à intervalles réguliers (entre 5 et 10 ans).
« Such an adjusted energy level will then become the base energy for the ensuing period and the fixed demand payment, under the split demand-energy tariff…»
8. Charge for peaking :
Des frais seront facturés pour les 750 MW additionnels sur une base 2 pour 1 capacité-énergie.
( Nos soulignés )
[287] Le 10 août 1967, H.Q. sous la plume de Monsieur Lessard fait une contre-proposition à CF(L)Co laquelle ne traite que du onzième groupe à être ajouté et ce, quant à son coût et quant à la capacité y associée et du fait que les termes de la lettre d’intention doivent demeurer inchangés.
[288] Le 21 août 1967, CF(L)Co acceptera formellement la proposition de H.Q. datée du 4 août 1967 quant au onzième groupe[149].
[289] Parallèlement à ces discussions le 14 août 1967, la firme Acres fournira à CF(L)Co son rapport d’ingénierie nécessaire pour la préparation d’un prospectus en vue du financement du projet.
[290] Le 17 août 1967, une rencontre au sommet aura lieu entre Messieurs Boyd et De Guise d’H.Q. et Messieurs McParland et Lambert de CF(L)Co et le 22 août 1967 M. Boyd couchera sur papier les points ayant été réglés[150].
[291] On apprend de ces notes[151] que le principe du split tariff est maintenant accepté sujet à certaines clarifications. Par ailleurs, les définitions de « Firm capacity, continuous energy and penalty for continuous energy default » sont abandonnées en raison de l’application du split tariff[152].
[292] Ainsi, le titre de la colonne 6 de l’article 14 de la lettre d’intention représentant un tableau est modifié de « Continuous energy » à « Firm energy ».
[293] L’introduction du concept de « Annual Energy Base » est une conséquence directe du « Split Tariff ». Étant donné son importance quant aux prétentions de chacune des parties et pour la suite des choses, il y a lieu de reproduire dès maintenant sa définition telle qu’elle apparaît maintenant au Contrat principal :
« Annual Energy Base" means 31.50 billion kilowatthours per year or, in the event of an adjustment pursuant to Section 6.7 or to Article IX hereof, the number of kilowatthours per year established as a result of such adjustment, calculated to the nearest 1/100 of a billion kilowatthours. »[153]
[294] Par contre, le 4 août 1967[154], l’Annual Energy Base de départ avait été fixé, aux fins de négociations, à 31.2 milliards de KWH.
[295] Rappelons que cet estimé a évolué au fil des négociations quant à la lettre d’intention. Par ailleurs, la valeur initiale de l’Annual Energy Base, fut établie par les parties suite au rapport intitulé « Churchill Falls Power Project-Engineering Report » préparé par Acres Canadian Bechtel en vue de l’émission du prospectus pour le financement du projet[155]. Le Tribunal reviendra sur la preuve ayant entouré la fixation de l’Annual Energy Base pour le Contrat principal, à l’occasion de son analyse des expertises, plus particulièrement celle de Monsieur Lapuerta.
[296] Une rencontre des négociateurs tenue le 3 novembre 1967 fait état des ententes suivantes quant à l’ « Annual Energy Base »[156].
- |
Crédit consenti à H.Q. pour de l’énergie payée mais non livrée, sous réserve qu’il n’y ait pas de déversement. |
- |
L’annual Energy Base initial après la mise en marche de dix groupes est fixé à 31.5 milliards KWH. |
- |
Maximum-minimum dans l’ajustement de « Annual Energy Base » fixé à 3.33 %. |
- |
La période de ces ajustements est fixée pour la première à huit ans, suivant la mise en service de la Centrale, et par la suite à quatre ans d’intervalle.
|
[297] Un autre changement fondamental interviendra, celui-là tirant sans doute son origine par le désir d’H.Q. d’obtenir une certaine flexibilité au niveau des livraisons. Il se révèle dans un premier temps de la section « Peaking availability » contenue à la proposition du 4 août 1967 alors qu’il est proposé d’accorder à H.Q. de la puissance supplémentaire en hiver.
[298] Notons que dans les premiers projets de contrat notamment celui du 19 septembre 1967, H.Q. devait prendre possession et acheter l’énergie rendue disponible par CF(L)Co telle qu’établie par celle-ci à l’aide de prévisions trimestrielles. Voici le texte pertinent :
« 3. Sale and Purchase of Energy.
Subject to the provisions hereof, CFLCo shall sell and make available to Hydro-Quebec at the Delivery Point and Hydro-Quebec will purchase, and take delivery of, from CFLCo:
(a) prior to the Completion Date, the energy available on and after each Delivery Date from each installed stage of construction (provided that Hydro-Quebec need not purchase energy in any period in excess of that denoted in column ____ of Schedule II hereof, or by any agreed adjustment thereto, as intend to be available for such period); and
(b) in each quarterly period on and after Completion Date, the Forecast Quarterly Supply;
all at the applicable prices set forth in clause 5 hereof.
At least one month prior to the Completion Date and at least one month prior to the beginning of each third month after the Completion Date CFLCo shall furnish to Hydro-Quebec a written forecast of the Forecast Quarterly Supply for the next ensuing three months. The Forecast Quarterly Supply shall not exceed 110 % nor be less than 90 % of one-fourth of the Annual Energy Base. »[157]
[299] Notons que la facture de ce texte diffère sensiblement de l’article 6.2 du contrat principal celui-ci contenant la mention :
« such power and energy as Hydro-Québec may request… »[158]
alors que le texte de septembre 1967 prévoit qu’il incombe à CF(L)Co de transmettre à H.Q. ses prévisions de disponibilité d’énergie.
[300] Ce projet contient, au chapitre de la tarification, un prix inférieur, pour l’énergie en surplus des prévisions fournies par CF(L)Co en ces termes :
« … contemplated by the forecast concerned, the excess shall be billed and paid for… »[159]
[301] Monsieur Raymond Fournier de H.Q. avait écrit à son supérieur Monsieur Bourbeau pour lui faire part de sa préoccupation quant à l’obligation par H.Q. de prendre livraison des quantités d’énergies planifiées par CF(L)Co, le tout en rapport avec l’exploitation d’H.Q. de l’ensemble de son réseau. En voici un extrait révélateur.
« Nous avons vu que l’interprétation de la clause no.3 du contrat préliminaire Hydro-Québec/CF(L)Co peut entraîner des difficultés d’exploitation du réseau de l’Hydro-Québec, aussi bien à court terme qu’à long terme. L’exploitation des réservoirs de façon économique en sera ainsi entravée. En plus, la planification des centrales futures doit tenir compte des installations existantes, et le manque de flexibilité dans l’exploitation de la Centrale la plus importante du réseau peut entraîner le choix d’un programme d’investissement qui ne serait pas optimal. »[160]
( Nos soulignés )
[302] Un sommaire des discussions tenues le 24 octobre fut préparé par Monsieur Tennant de CF(L)Co[161] le 25 octobre 1967. Les principaux points traitent des coûts du projet, du désir d’H.Q. d’obtenir des crédits pour de l’énergie payée dont elle n’avait pas nécessairement besoin. Le point le plus important est qu’H.Q. semble se distancier du principe de prévisions de livraisons fournies par CF(L)Co.
« It now transpires that Hydro-Québec will be furnishing advance schedules of their proposed take or firm capacity but subject to the right to make emergency demands »[162].
[303] Cette insatisfaction donnera lieu à des projets de compromis dont la création d’une banque d’énergie notamment dans le projet de contrat transmis le 16 novembre 1967, le tout en ces termes.
« Should in any such three-month period after the Completion Date, Hydro-Quebec not have received or taken from CFLCo at least the Forecast Quarterly Supply, Hydro-Quebec shall nonetheless pay CFLCo for the entire Forecast Quarterly Supply but :
(a) Hydro-Quebec shall then be entitled to receive free from CFLCo, at any time during the six months next following the end of such three month period, such part of the number of kilowatthours of energy which corresponds to that part not delivered of said Forecast Quarterly Supply as Hydro-Quebec may request within the period. »[163]
[304] En gros, cette clause équivalait à un crédit futur en énergie, quant à la quantité d’icelle payée, mais non reçue par H.Q.
[305] En dépit de ce compromis, H.Q. veut plus. La suite des négociations culminera avec l’acceptation par CF(L)Co du contrôle par H.Q. des réservoirs. En regard du changement de cap important, le Tribunal juge utile de reprendre la note (non datée) dans son intégralité[164] :
« Hydro-Quebec have expressed their wish to be able to request CFLCo to operate the Churchill Falls installations without the restriction of ±10% on energy forecasting.
In requesting that this be done to improve the integration of this facility into their overall system, Hydro-Quebec have recognized that CFLCo should not suffer any loss of revenue which would have been available to CFLCo under the previous concepts of quarterly energy forecasting when CFLCo had the responsibility for reservoir management.
Since the above principles are consistent with the basic concept of Plant operation and the underlying concepts of the Power Contract, CFLCo would propose to meet Hydro-Quebec’s request by the arrangements outlined under (A), subject to Hydro-Quebec agreeing the protections for CFLCo outlined under (B).
Section A - Operating Considerations
1) Hydro-Quebec may request at any time that the Plant be operated anywhere within the limits of minimum capacity and firm capacity.
2) Hydro-Quebec will pay for energy taken during the month and for the equivalent energy represented by water spilled in the month, providing such spill did not occur because CFLCo was unable to supply power (eg: penalty under Article X).
3) Hydro-Quebec may therefore request CFLCo to operate the Plant in such a manner that the reservoir will be at such level as, in the judgment of Hydro-Quebec, best matches their overall system capacity and system requirements.
Section B - Protections to CFLCo
In operating as outlined above, CFLCo needs the following protections:
(a) A waiver of the penalty clause applying because of a shortage of water, except if such shortage of water results from the failure of any of CFLCo’s impounding structures.
(b) Relief from the bonus shares on the debt service and expense advances if CFLCo requires such advances (i) as a result of a shortage of water other than a shortage caused by the failure of any of CFLCo’s impounding structures; or (ii) as the result of Hydro-Quebec paying for less that 7.1 billion kilowatthours in any three month period.
(c) In any month where debt service and expense charges are incurred for either of the two reasons outlined in (b) above, such month shall not be counted as one of the thirty-six months of advances referred to in the voting trust.
(d) That the prior obligations to Twinco as defined in the Power Contract shall be respected, and that Hydro-Quebec shall not ask CFLCo to operate the Plant in a manner which prevents this.
(e) That Hydro-Quebec shall not request CFLCo to operate the Plant in such a manner that CFLCo cannot enjoy the rights to power and energy under the recapture clause.
COMMENTS: -
The following simplifications can be achieved:
1) Eliminate all reference to Quarterly Energy Forecasts, and operation thereunder.
2) Eliminate all reference to Deferred Energy Entitlement.
3) Avoid necessity of reference to Advance Energy.
4) Delete reference to pricing excess energy after Effective Date.
5) Treat adjustments of energy base separate from retroactive payment adjustments for experience different from assumed base. »
( Nos soulignés )
[306] Cette note démontre qu’en dépit de l’abandon par CF(L)Co du contrôle de ses réservoirs, celle-ci a requis et obtenu des compensations qui lui étaient satisfaisantes.
[307] Une de celles-ci consistera en l’obligation par H.Q. d’assumer les conséquences financières de tout déversement causé par son opération des réservoirs. Voici un commentaire du 23 avril 1968 d’Ebasco sur ce sujet.
« Article IV - Construction And Operation Of the Plant
Page 11 Under 4.2.1 Hydro-Quebec is assigned the responsibility of operating the reservoir and must bear any losses due to reservoir mismanagement i.e. CFL Co suffers no penalty for lack of water and H.Q. pays for water spilled as though it had been converted to energy, to accept this responsibility H.Q. should review the reservoir operation in relation to its other resources to assure its feasibility. »[165]
[308] C’est ainsi que le 19 avril 1968 apparait la clause de flexibilité opérationnelle laquelle fut reprise dans son intégralité dans le contrat principal, certaines sous-sections dont celle traitant du « operating manual » étant ajoutées à la version finale.
[309] Finalement, un dernier changement majeur interviendra au niveau de la clause de renouvellement.
[310] Rappelons qu’à compter du début des négociations, la clause de renouvellement n’était abordée que de façon liminaire, celle-ci étant des plus succincte.
[311] Cela étant, à compter des négociations quant au contrat principal, si la forme utilisée s’était quelque peu alourdie, le fond demeurait sensiblement le même.
[312] Le 26 février 1968 marque également le début des préoccupations, à tout le moins de la part de CF(L)Co quant au renouvellement du contrat.
[313] Or, au printemps 1968 la situation financière du projet avait changé notamment quant aux coûts.
[314] En effet, des notes manuscrites[166] de Monsieur Manning ont été produites. Dans celles-ci, il étudie la possibilité d’un tarif fixe et ce, en fonction de divers facteurs tels les coûts d’opération et les royautés à être versées à la province de Terre-Neuve.
[315] Le 1er mars 1968 se tiendra une rencontre portant sur le projet de contrat et son renouvellement au cours de laquelle H.Q. formulera ses demandes. Un compte-rendu de cette rencontre fut produit[167].
[316] De ces notes, il faut retenir la demande d’H.Q. quant au renouvellement en vue d’obtenir un tarif fixe pour les 25 prochaines années[168].
[317] Monsieur Manning dans ses notes manuscrites indique que pour H.Q. le renouvellement aux conditions énoncées par celle-ci, constituait « A do or die condition »[169].
[318] Il s’agit là d’un changement de cap majeur. En effet, rappelons que H.Q. avait accepté le concept de « Split Tariff » sur la base d’un souci de rentabilité pour CF(L)Co primordial pour attirer les investisseurs nécessaires au financement du projet.
[319] Or, les parties étaient conscientes qu’à l’expiration du contrat principal la totalité de la dette due aux investisseurs serait entièrement remboursée.
[320] Le Tribunal se permet d’avancer dans le temps jusqu’au compte-rendu d’une réunion des administrateurs de CF(L)Co et Brinco tenue le 10 avril 1968 dans laquelle est clairement exposée la position de H.Q. quant au renouvellement. En voici un extrait[170] :
« Hydro-Quebec wished to be able to project a lower mil rate than the present draft of the contract permitted. Due to increased costs and escalation the effect of the present term of 44 years from first delivery or 40 years from completion indicated an average mill rate considerably in excess of that contemplated in 1966. Accordingly, they had requested a 25 year extension of the contract on a flat mill rate basis suggested at two mills per kilowatthour. They wished this to be in the form of an option. This would produce a gross revenue of $60-65 million per annum. There would be no debt outstanding. Should CFLCo attempt to qualify the rate by the addition of escalators or make any provision for its tax position, the purpose of the extension would be defeated. Although the Churchill project was marginally more attractive then nuclear power today, it was conceivable that it would not be in 40 years’ time. It was obvious that a commitment on the extension was preferable to an option and it also appeared desirable to endeavour to have the mill rate expressed in either U.S. or Canadian funds at the option of CFLCo in order to afford the greatest protection against serious devaluation of the Canadian dollar. The meeting authorized the negotiating team to conclude an arrangement with Hydro-Quebec for an extension, by way of option to them, of the term of the contract of 25 years at two mills per kilowatthour on the condition that they exercised such option at least ten years before termination of the contract and preferably much sooner. It was also felt desirable to endeavour to secure for CFLCo the option to have the price payable in either Canadian or U.S. dollars if this was achievable. »
( Nos soulignés )
[321] Il est intéressant de noter que CF(L)Co était consciente du fait que l’énergie nucléaire, alors à ses balbutiements, pourrait s’avérer plus économique que l’énergie hydroélectrique, quelques décennies plus tard, de là sa propension à accepter un compromis.
[322] Vu la divergence entre les protagonistes à qualifier le Contrat renouvelé, soit de « Renewed » ou encore « Renewal » il est intéressant de noter que les administrateurs de CF(L)Co et Brinco, dans le cadre de cette citation du compte rendu de leur conseil d’administration ont utilisé le terme « Extension » pour décrire le renouvellement à pas moins de quatre reprises.
[323] Cette proposition d’H.Q. sera acceptée et adoptée à l’occasion d’une réunion conjointe du conseil d’administration de Brinco et CF(L)Co tenue le 14 mai 1968. En voici l’extrait pertinent.
« (i) Renewal of the Contract - The negociating team had been authorized to accord an option to renew the contract for an additional twenty-five years at a flat 2 mill rate per kilowatthour but had been requested to try to make this option exercisable at least ten years prior to termination of the contract and to secure, if possible, for CFLCo the option to have the price payable in either Canadian or U.S. dollars.
As reflected in the present draft of the Power Contract, Hydro-Quebec had agreed to make a firm commitment to renew. Hydro-Quebec had insisted, however, that the price be 2 mills payable in Canadian dollars. »
[324] Le 3 juin 1968, H.Q. approuvait le contrat principal et renouvelé conditionnellement à son acceptation par les instances politiques québécoises. Parallèlement, le conseil d’administration de CF(L)Co ratifie le contrat principal et renouvelé qu’avait approuvé son comité exécutif.
[325] Par ailleurs à l’automne 1968, Morgan Stanley and Co. ainsi que Wood Gundy Securities Limited procèdent à l’émission du prospectus visant le financement du projet alors que celui-ci est déjà en voie de construction. Voici les montants de financement envisagés :
First Mortgage Bonds - Series A $ 500 million (United States)*
- Series B $ 50 million (Canadian)
General Mortgage Bonds - $ 100 million (Canadian)
(fully subordinated to the
First Mortgage Bonds)
__________
* Equivalent to approximately $ 549 million Canadian.[171]
[326] Il y a lieu de rappeler que Brinco et CF(L)Co agissaient alors comme promoteurs du projet. Voici les remarques contenues au rapport final d’Ebasco datées du 28 mars 1968[172] :
« As we understand the basic interest of the CFL promoters it is to obtain a return upon their investment in the project commensurate with the funds and effort which they put into its development. Each entrepreneur has his own standards as to what would be a fair return and also how to measure it. Presumably the Submission dated June 4, 1964 to HQ represented the earnings level which would be acceptable to the promoters. The equity money to be invested was $60,000,000. and in all subsequent discussions and planning it is believed that this $60,000,000 still represents a commitment which is desirable and necessary.
This submission was predicated upon a price per kwh of 2.75 mills. It was unsatisfactory to HQ and negotiations were suspended. They were renewed when, in 1966, the Province of Newfoundland offered the tax rebate concession for 40 years. The promised rebate enabled CFL and HQ to agree on an average price of 2.45 mills per kwh as the Base Rate for continuous energy which, in turn, was set at 31.5 billion kwh per year. »
[327] En juillet 1968, le conseil des ministres du Québec approuve le contrat principal et renouvelé lequel sera signé quelque 10 mois plus tard soit le 12 mai 1969.
[328] Juillet 1968, marque également le dépôt par Ebasco de son rapport final sur le contrat principal et renouvelé.
[329] Comme nous l’avons vu précédemment, les travaux d’aménagement et de construction de la Centrale ont débuté au lendemain de la signature de la lettre d’intention et se poursuivront jusqu’au 1er septembre 1976 alors que le onzième et dernier groupe sera mis en service.
[330] À compter de 1976 jusqu’en 1998 plusieurs événements marqueront les relations entre les parties. Ceux-ci revêtent une importance certaine quant aux problèmes à être tranchés par le Tribunal.
[331] Ces évènements s’articulent autour de deux axes, ce sont les suivants :
· Les demandes de Terre-Neuve et les recours judiciaires afférents à ces demandes.
· Les diverses négociations entre les parties visant à résoudre les difficultés financières de CF(L)Co.
[332] Rappelons que la situation de l’actionnariat de CF(L)Co est tributaire d’une décision politique de Terre-Neuve. Ainsi, à compter de 1974, la province indique son désir de racheter les actions jusqu’alors détenues par Brinco au sein de CF(L)Co. Le tout sera complété la même année Terre-Neuve payant la somme de 160 millions pour acquérir 65,8 % des actions de CF(L)Co jusqu’alors détenues par Brinco[173] lesquelles sont transférées à une créature de Terre-Neuve soit Newfoundland Development Corporation pour être ultimement cédées en 1975 à NLH.
[333] Ainsi, à compter de 1976, les relations entre les parties seront teintées par les diverses demandes formulées par Terre-Neuve visant entre autre le Rappel.
[334] Quant à ce point précis, il y a lieu de faire un bref retour dans le passé.
[335] En effet, entre la conclusion de la lettre d’intention et le contrat principal soit le 26 avril 1967, le premier ministre de Terre-Neuve, l’honorable Joseph P. Smallwood écrit à Monsieur McParland pour lui faire part de son insatisfaction quant au contenu de la lettre d’intention établissant à 300 MW la limite du Rappel pour les besoins de Terre-Neuve, lui demandant du même souffle d’obtenir un minimum de 500 MW[174].
[336] Voici un extrait de la réponse négative de Monsieur McParland au premier ministre Smallwood datée du 1er juin 1967.
« Concerning a possible increase in the amount of recapture, I entirely agree with your view that at the present stage this would throw serious obstacles into our final negociations, especially because, as a result of rising costs, the transmission economics to Montreal have less latitude than before. »
[337] Dès le 6 janvier 1976, NLH demande à H.Q. de lui fournir 600 MW supplémentaires à ce que prévu contractuellement et ce, à compter du 1er janvier 1982[175]. Selon les termes de la lettre, ces 600 MW seraient en surplus de ce que convenu contractuellement portant ainsi à 900 MW les demandes de Terre-Neuve.
[338] La réponse d’H.Q. est négative et ce, en raison des besoins énergétiques du Québec arguant qu’elle ne peut se passer de la puissance requise par NLH[176].
[339] Les négociations montent à un niveau supérieur comme en fait foi la lettre du Premier Ministre de Terre-Neuve, l’honorable Frank Moores datée du 18 mai 1976 et adressée au Premier Ministre du Québec, l’honorable Robert Bourassa[177].
[340] Cette lettre nous apprend plusieurs choses, ce sont les suivantes :
1) |
Terre-Neuve envisageait le développement du site Gull Island pour ses propres besoins énergétiques mais avait dû laisser tomber temporairement ce projet. |
2) |
M. Moores s’élève contre la proposition du ministre Cournoyer de modifier les frontières du Labrador de telle façon que les Chutes Churchill deviennent en territoire québécois en échange d’une hausse des prix pour l’énergie de Churchill Falls. |
3) |
M. Moores réitère sa demande de 800 MW pour le 1er janvier 1982 et menace H.Q. de poursuites en cas de réponse négative. |
[341] La réponse du Premier Ministre Bourassa datée du 25 mai 1976 même si elle est négative invite néanmoins Terre-Neuve à la négociation[178].
[342] Le 6 août 1976, Terre-Neuve adopte un arrêt en Conseil exigeant que CF(L)Co cède un bloc de 800 MW à partir de la Centrale pour les besoins énergétiques de la Province[179].
[343] CF(L)Co refuse de se plier à la demande de Terre-Neuve puisque ce faisant elle créerait un défaut technique en vertu du financement obligataire[180].
[344] Le 13 septembre 1976, le procureur général de Terre-Neuve intente une action contre CF(L)Co et H.Q. devant les tribunaux terre-neuviens en vue d’obtenir les 800 MW qu’elle réclame[181]. Voici le paragraphe clé de son argumentaire apparaissant à son « amended statement of claim » de même que les conclusions pertinentes de sa demande :
« 26. Further in the alternative, the Plaintiff says the Second Defendant was at all times aware or should have been aware that, notwithstanding the provisions of the Power Contract, upon the request of the Government, the First Defendant would be obligated under the Lease to give priority to the consumers of electricty in the Province of Newfoundland, and by reason thereof it was or ought to have been the understanding of the First Defendant and the Second Defendant that there is an implied term of the Power Contract that the obligation on the part of the First Defendant as contained in the Power Contract to deliver to the Second Defendant hydro-electric power and energy would be subject at all times to the obligation of the First Defendant, as set forth in paragraph (e) of Clause 2 of Part I of the Lease, to give, upon the request of the Government, priority to the consumers of electricity in the Province of Newfoundland. The Plaintiff repeats the allegations contained in paragraphs 6 and 7 hereof.[182]
(…)
AND THE PLAINTIFF CLAIMS
(a) a declaration that the Plaintiff is entitled by virtue of paragraph (e)- of Clause 2 of Part I of the Lease to make the request for eight hundred (800) megawatts of electric power as set forth in the Order-in-Council;
(b) a declaration that the Plaintiff, by reason of the Financial Agreement, is not prevented or prohibited from commencing this action;
(c) a declaration that by virtue of Part I of the Lease and Section 3 and 4 of the Act the First Defendant is obliged to comply with the request set forth in the Order-in-Council; »[183]
[345] Le 27 mai 1977, H.Q. intente son propre recours en jugement déclaratoire devant la Cour Supérieure du Québec visant à contrer l’offensive de Terre-Neuve[184]. En voici les conclusions pertinentes.
« DIRE et DÉCLARER qu’en vertu du contrat R-1 seules les Cours du district judiciaire de Montréal, sous réserve du droit d’appel à la Cour Suprême du Canada, ont juridiction pour adjuger sur tout litige entre les parties en vertu de ce contrat;
DIRE et DÉCLARER qu’en vertu du contrat R-1 la requérante a l’obligation d’acheter et l’intimée l’obligation de vendre et livrer à la requérante toute la puissance et toute l’énergie électriques que peut générer la centrale hydroélectrique actuelle opérée par l’intimée aux chutes Churchill sur la rivière Churchill et ce, conformément aux dispositions des paragraphes 2.1, 6.2, 6.4 et 6.6 du contrat pièce R-1;
DIRE et DÉCLARER que le défaut par l’intimée de vendre et de livrer à la requérante toute la puissance et l’énergie électriques que peut générer la centrale hydroélectrique actuelle opérée par l’intimée aux chutes Churchill sur la rivière Churchill conformément à la conclusion précédente constituerait un bris de contrat en vertu du contrat R-1; »
[346] Le 17 décembre 1980, avant que ne soit entendue la cause mue devant les tribunaux terre-neuviens quant au rappel de 800 MW, la province de Terre-Neuve adopte la loi intitulée « The Upper Churchill Water Rights Reversion Act »[185].
[347] Cette loi vise essentiellement à rapatrier à la province, les droits initialement consentis à Brinco et cédés à CF(L)Co lui permettant d’exploiter le fleuve Churchill. Voici le libellé de l’article 3 de cette loi.
« Purpose of Act
3. The purpose of this Act is to provide for the reversion to the province of unencumbered ownership and control in relation to certain water within the province. »
[348] Le 10 février 1981, Terre-Neuve saisit la Cour suprême de Terre-Neuve, division d’appel d’un renvoi portant sur la validité de cette Loi.
[349] À compter de 1982, les jugements dans ces différentes causes se succèdent.
[350] Ainsi, le 5 mars 1982 la division d’appel de la Cour suprême de Terre-Neuve déclare le « Reversion Act » valide[186].
[351] Cette décision fut portée en appel devant la Cour suprême du Canada laquelle rend jugement le 3 mai 1984, accueillant l’appel formé à l’encontre du jugement de la division d’appel de la Cour suprême de Terre-Neuve et déclarant le « Reversion Act » ultra vires de la législature de Terre-Neuve.
[352] Le Tribunal juge utile de s’arrêter sur quelques extraits de ce jugement. En effet, partie de l’argumentaire d’H.Q. repris dans sa procédure introductive d’instance repose à plusieurs reprises sur une phrase tirée de ce jugement. Le Tribunal la cite :
« Aux termes de ce contrat, CFLCo a convenu de fournir, et Hydro-Québec d’acquérir pratiquement toute l’énergie produite aux chutes Churchill ».[187]
[353] Cette citation est reproduite aux procédures d’H.Q. à plusieurs reprises[188].
[354] Il est intéressant de noter que la suite immédiate de cette phrase contient une erreur lorsque la Cour suprême poursuit en disant :
« Aux termes de ce contrat, CFLCo a convenu de fournir, et Hydro-Québec d’acquérir pratiquement toute l’énergie produite aux chutes Churchill pendant une période de quarante ans; le contrat pourrait être renouvelé, au choix d’Hydro-Québec, pour une durée supplémentaire de vingt-cinq ans.»
[355] À la décharge de la Cour suprême, celle-ci n’avait pas à se pencher sur les tenants et aboutissants du contrat renouvelé et elle ne jouissait certainement pas de la véritable montagne de preuve documentaire entourant la négociation et la conclusion du Contrat principal et renouvelé.
[356] Cela étant, il s’agit de la seule citation en ce sens de cet arrêt de la Cour suprême. D’autres propos d’ailleurs également en obiter dictum, sont plus nuancés alors que la Cour suprême réfère spécifiquement au contrat :
« Dès l’entrée en vigueur de la Reversion Act, le droit d’Hydro-Québec de recevoir l’électricité conformément aux conditions du contrat d’énergie serait effectivement aboli. Même si le débit et le prix de l’électricité distribuée au Québec demeuraient les mêmes après l’entrée en vigueur de la Loi, cela relèverait d’un privilège plutôt que d’un droit exécutoire. À mon avis, tout cela entraîne une seule conclusion : la Reversion Act est une tentative déguisée de modifier le contrat d’énergie et de porter atteinte au droit d’Hydro-Québec de recevoir une quantité d’électricité convenue à un prix convenu. »[189]
On a dit peu de choses à cet égard au cours des plaidoiries et il appert qu’on a présumé tout au long de l’affaire que les droits d’Hydro-Québec étaient situés au Québec. Il est vrai, évidemment, qu’Hydro-Québec a le droit en vertu du contrat d’énergie de prendre livraison au Québec de l’énergie hydro-électrique et de l’écouler au Québec ou ailleurs à son choix. »[190]
( Nos soulignés )
[357] Quoi qu'il en soit, la Cour suprême a accueilli l’appel et a déclaré le « Reversion Act » ultra vires puisque selon elle, il affectait des droits extra territoriaux à la province de Terre-Neuve.
[358] Le recours intenté devant la Cour suprême de Terre-Neuve quant au rappel de 800 MW fut également rejeté par le juge Goodridge le 13 juin 1983[191] principalement pour la raison suivante :
« 1274 The basic reasons upon which the Government fails may be listed as follows :
1275 Firstly, the proviso is interpreted to mean that upon the request of the Government the Newfoundland consumer shall be given by CFLCo a right of first refusal to purchase all energy that becomes available for sale and is not then otherwise committed when it is feasible and economic for CFLCo to supply such power and for the Newfoundland consumer to purchase such power. In that connection the power which has been committed for sale to Hydro-Quebec is not available for sale to another customer. The right of first refusal which is extended upon the request of the Government is exercisable only in respect of the power in excess of that already committed and at the present time there is very little, if any, of that. (See Part 15.) »
( Nos soulignés )
[359] Parallèlement le 4 août 1983, le juge Jules Beauregard de la Cour supérieure du Québec[192] accueille le recours d’H.Q. en ces termes :
« DÉCLARE qu’en vertu du contrat d’énergie R-1, la requérante a l’obligation d’acheter et l’intimée l’obligation de vendre et livrer à la requérante toute la puissance, toute l’énergie électrique que peut générer la centrale hydroélectrique actuelle opérée par l’intimée aux Chutes Churchill sur la rivière Churchill, et ce, conformément aux dispositions des paragraphes 2.1, 6.2, 6.4 et 6.6 du contrat Pièce R-1.
DÉCLARE que le défaut par l’intimée de vendre et de livrer à la requérante toute la puissance et l’énergie que peut générer la centrale hydroélectrique actuelle, opérée par l’intimée aux Chutes Churchill sur la rivière Churchill, conformément à la conclusion précédente, constitue un bris de contrat et un défaut en regard du contrat d’énergie (R-1); »
[360] Les appels des jugements Goodridge et Beauregard logés par Terre-Neuve seront rejetés par les Cours d’appel des juridictions pertinentes[193].
[361] H.Q. a produit dans le présent dossier le Factum de CF(L)Co devant la Cour suprême quant à l’appel du jugement de la Cour d’appel du Québec maintenant la décision du juge Beauregard. En voici un extrait sur lequel H.Q. a attiré l’attention du Tribunal :
« Secondly, it is obvious that failure by CFLCo to supply all the electricity it generates to Hydro-Québec is an event of default under the contract, this obligation being the very essence of the Power Contract. One must conclude therefore, that there is no difficulty whatsoever between the parties, be it in fact or law. »[194]
[362] La Cour suprême du Canada rejette le pourvoi de Terre-Neuve quant au dossier Rappel 800 MW mû devant les tribunaux de Terre-Neuve le 9 juin 1988[195] et à la même date rejette également le recours dans le dossier mû devant les tribunaux du Québec puisque devenu sans objet[196].
[363] Cela clôt la première partie de bras de fer entre les parties. Il y en aura une seconde beaucoup plus tard laquelle donnera lieu au jugement du juge Joël Silcoff prononcé le 24 juillet 2014[197].
[364] Le juge Silcoff aux paragraphes 6 et 7 de son jugement reprend les conclusions de CF(L)Co dans le recours de celle-ci et que les parties ont désigné sous le vocable « Good Faith Case ». Le Tribunal les reproduit :
« [6] Accordingly, for the reasons more fully described in the Motion, CFLCo asks the Court to:
DECLARE that in the circumstances of this case the civil law principle of good faith in all its forms, including without limitation abuse of rights, the “spirit of justice” and “fair play” requires modification for the future of the contract price set out in the Power Contract entered into between Plaintiff and Defendant so as to provide a fair and equitable purchase price to Plaintiff;
DECLARE that, in all the circumstances, a fair and equitable purchase price to the Plaintiff requires as a minimum that for the future the commercial value of the power generated by the Churchill Falls project be shared between CFLCo and Hydro-Québec in a reasonable manner consistent with the current realities and the continued existence of the Power Contract and in consequence;
ORDER that the pricing terms of the Power Contract be modified as of November 30, 2009 so as to provide that the mill rate payable by Hydro-Québec to CFLCo in each calendar year for energy purchased from CFLCo shall equal the sum of the following:
[emphasis added]
in accordance with a formula more fully described.
[7] Subsidiarily, CFLCo asks that the Court:
ORDER that the Power Contract be resiliated with effect six (6) months from the date of judgment. »[198]
[365] Le juge Silcoff identifie la principale question en litige de la façon suivante :
« [273] The questions in issue in these proceedings can be summaried [sic] in the following manner:
(1) In the circumstances giving rise to the negotiation and signature of the Power Contract and in light of the events occurring subsequent thereto, in refusing to renegotiate the pricing structure for the future, is Hydro-Québec in breach of its civil law duties of good faith and cooperation and that of exercising its contractual rights in a reasonable manner?
(2) In the affirmative, can the Court intervene in order to grant what it considers appropriate equitable relief?
( … ) »[199]
[366] Le juge Silcoff y va de son analyse de cette question et conclut de la façon suivante :
« [551] CFLCo has failed to satisfy the Court that, in the context of the nature and equilibrium of the relationship and the legitimate expectations of the parties as reflected in the Power Contract, by refusing to renegotiate the pricing terms of the Power Contract, Hydro-Québec has breached its civil law duty of contractual good faith, cooperation and the reasonable exercise of its rights.
[552] CFLCo would have the Court conclude that the “true nature of the relationship”, to which it frequently refers, is that of « ...a long-term, interdependent relationship that would require a tremendous level of cooperation, trust and compromise, based on an equitable sharing of risks and benefits. »[427] [emphasis added].
[553] This latter characterization is not supported by the evidence or, at best, requires the Court to disregard the clear language and binding force of the Power Contract as negotiated between the parties by their own free will.
[554] Referring elsewhere to the « true nature of the relationship »[428] , CFLCo would seem to infer and have the Court accept that because the nature of the relationship was previously otherwise crystallized or defined in the Letter of Intent or elsewhere other than in the Power Contract, it is accordingly entitled to an equitable sharing of the alleged « windfall profits » earned by Hydro-Québec.
[555] Such inference is not supported by the evidence. Neither the Letter of Intent nor any other reference by counsel to some nebulous source of this allegedly « interdependent relationship » defines the true nature and conditions of the contractual relationship between the parties.
[556] It is solely to the Power Contract and, to the extent of any ambiguity, to the evidence regarding negotiations preceding its signature that the Court must direct its attention in order to identify the true nature and equilibrium of the relationship, the risks and benefits assumed thereunder and the rights and obligations of the respective parties.
[557] CFLCo is clearly not satisfied with the nature and equilibrium of the relationship freely negotiated and defined in the Power Contract. Along with the Government of Newfoundland, it has complained for some time of the allegedly « inequitable sharing of risks and benefits ».
[558] It seeks to have the Court decree and impose a new equilibrium, not in any way founded on the terms of the existing Power Contract but rather reflected in a new contract, more favourable to its objectives and to those historically sought by the Government of Newfoundland. »[200]
[367] CF(L)Co s’est pourvue en appel de la décision du juge Silcoff.
[368] Alors que la présente affaire était en délibéré la Cour d’appel, le 1er août 2016, rejetait l’appel de CF(L)Co.
[369] Ce dossier, outre la question de la bonne foi, traitait de l’imprévisibilité laquelle faisait en sorte que CF(L)Co se trouvait nettement désavantagée.
[370] Un pan important de la preuve administrée par le juge Silcoff avait trait aux négociations entourant l’ensemble du contrat et évidemment la tarification.
[371] La Cour d’appel s’y attarde. Voici certains constats d’intérêt pour la présente affaire :
« [79] Le juge de première instance a tiré des conclusions au sujet de la manière dont le prix de l’énergie a été fixé par les parties et des raisons qui y ont présidé. Son appréciation de la preuve documentaire et testimoniale, en particulier, des témoignages des experts, l’a amené à conclure que l’intimée a accepté d’assumer la majorité des risques financiers pour permettre à l’appelante de financer par dette la construction de la centrale, sans que cette dernière subisse une dilution de son capital-actions. Celle-ci est, depuis le remboursement de sa dette en 2010, propriétaire d’une centrale de grande valeur - elle est estimée à environ 20 milliards de dollars par M. Thierry Vandal - et dont la longue durée de vie lui permettra, pendant encore plusieurs décennies, à l’expiration du contrat en 2041, de vendre l’énergie produite au prix du marché. En contrepartie d’engagements financiers très substantiels et indispensables pour l’obtention de prêts, l’intimée a obtenu la garantie de prix stables et prédéterminés ainsi qu’une protection contre l’inflation des frais d’exploitation.
[91] L’appelante ne parvient pas à ébranler l’une des conclusions factuelles les plus importantes du juge de première instance, soit que dans le contexte de cet équilibre contractuel initial, le risque lié à la variation du prix de l’énergie était supporté par l’intimée. Deux éléments factuels indiquent que le contrat a alloué ce risque à l’intimée : 1- la nécessité pour l’appelante de conclure un contrat comprenant une clause « prendre ou payer » et les explications fournies par les deux experts, y compris celui de l’appelante, au sujet de l’incapacité de l’appelante de supporter le risque de la variation de prix et 2- l’importance pour l’intimée de convenir de prix fixes.
[92] La nécessité de conclure un contrat contenant une clause de type « prendre ou payer » atteste que l’appelante n’était pas en mesure de supporter le risque lié à la variation de la valeur de l’électricité sur le marché. Cette clause prévoit l’achat par l’intimée de presque toute l’énergie produite par la centrale, garantissant ainsi à l’appelante les revenus suffisants pour rembourser sa dette.
[95] La clause « prendre ou payer » traduit donc le refus de l’appelante de supporter le risque lié à la variation de la valeur de l’énergie et son incapacité d’obtenir le financement si elle avait voulu le supporter. »[201]
( Nos soulignés )
( Références omises )
[372] Finalement, fait intéressant à noter, la Cour d’appel relate à sa décision que les parties ont déjà, en cours de contrat, négocié de nouvelles ententes avantageuses de part et d’autre.[202] De même, qu’elle semble inviter les parties à la négociation.[203]
[373] En dépit de ces joutes judiciaires, les parties sur le terrain continuent de collaborer et mieux, de se parler.
[374] Cette collaboration de même que certaines interventions politiques provoqueront d’autres rondes de négociations.
[375] Il y aura trois nouvelles rondes de négociations entre H.Q. et CF(L)Co soit de 1989 à 1992 ainsi que de 1995-1996 et finalement en 1998. Le Tribunal s’attardera brièvement aux deux premières rondes puisque la conclusion du contrat dit « Guaranteed Winter Availability Contract » (GWAC) est tributaire de celles-ci.
[376] La preuve entourant ces deux rondes de négociations est non seulement documentaire mais également le fait de Monsieur Claude Dubé, ingénieur et haut dirigeant, maintenant retraité d’H.Q. qui à 76 ans bien sonné a témoigné dans cette affaire pendant deux jours avec un aplomb remarquable.
[377] Le témoignage de Monsieur Dubé est d’importance puisqu’il fut à l’emploi de H.Q. de 1963 à décembre 1996 dans des secteurs hautement pertinents au présent litige. Un résumé de son parcours professionnel s’impose.
· Il entre au service de H.Q. en 1963, et se joint à la direction planification réseau. Il en devient le chef en 1969 et occupera ce poste jusqu’en 1971.
· À compter de 1971, il devient adjoint au directeur de la planification à long terme.
· De 1975 à 1976, il est chef de service, équipement de production.
· À compter de 1976, il devient adjoint à la direction de la planification jusqu’en 1980 alors qu’il est promu directeur. Son titre est modifié en 1981 pour devenir vice-président planification, les responsabilités demeurant les mêmes.
· En 1984, changement de cap, il devient vice-président tarification clientèle industrielle, poste qu’il occupera jusqu’en 1987.
· Après avoir œuvré pour une filiale de H.Q. entre 1987 et 1989, il revient dans le giron de celle-ci pour devenir en 1989 vice-président corporatif et en 1992 vice-président marchés externes jusqu’à sa retraite en 1996[204].
[378] Monsieur Dubé bien qu’impliqué dans les nouvelles rondes de négociations a également témoigné quant à certains aspects historiques et techniques entourant l’exploitation par H.Q. de son réseau, que ce soit au niveau production ou transmission. Le Tribunal reviendra plus loin sur ce volet de la preuve.
[379] Revenons donc à ces rondes de négociations.
[380] La première soit celle de 1989 à 1992 a pour toile de fond la viabilité financière de CF(L)Co. H.Q. ayant une obligation contractuelle de combler tout déficit de liquidité engendré par l’exploitation de la Centrale, elle y a un intérêt certain.
[381] Un point important à souligner est le fait que CF(L)Co était tenue au versement de dividendes à ses actionnaires ou encore de royautés à Terre-Neuve et ce, même si elle se privait de fonds qui éventuellement seraient requis que ce soit au niveau immobilisations ou entretien de la Centrale[205].
[382] Monsieur Dubé situe le cadre de la négociation de 1989 en deux parties, ce sont les suivants :
1) |
Achat de puissance et énergie en provenance de nouvelles centrales soit Muskrat Falls et Gull Island à être situées dans la portion du fleuve Churchill nommée Bas Churchill comparativement à la Centrale de CF(L)Co située dans le Haut Churchill. |
2) |
Discussion sur les moyens d’assurer la viabilité financière de CF(L)Co[206]. |
[383] Rappelons que la possibilité de l’établissement d’une centrale à Gull Island avait déjà été évoquée en 1976 par le premier ministre Moores dans la lettre qu’il avait transmise au premier ministre Bourassa[207].
[384] Quant à la viabilité financière, voici la constatation à laquelle en venait le comité de négociation dans son rapport du 12 décembre 1988 :
« This « Reference Case » shows that in the absence of changes in the financial arrrangements which presently govern the operation of the Corporation, CF(L)Co will experience cash difficulty in the year 2000 from which it will be unable to recover unless Clause 12.4 of the Power Contract and the provisions of the Voting Trust Agreement of October 28, 1968 would apply. »[208]
[385] Voici les remarques préliminaires quant aux solutions envisagées :
« It was clear from the results of this initial analysis that for CF(L)Co to remain financially viable and stable over the long term, one or more of the following factors must change:
(a) expenditures must decline significantly;
(b) revenues must be increased significantly; or
(c) dividends must be severely restricted. »[209]
Il faut noter que l’horizon envisagé par les équipes de négociation se limitait à 2016.
[386] Ces négociations amèneront le comité à produire trois scénarios dans un rapport daté du 28 janvier 1991 alors que l’horizon considéré sur le sujet de la santé financière de CF(L)Co s’étend jusqu’en 2041[210].
[387] Ce rapport nous apprend l’existence d’une convention d’exploitation[211] signée le 1er novembre 1990[212], il s’agit en fait de l’ancêtre du GWAC. Voici comment Monsieur Dubé la résume sommairement :
« C’était une entente entre exploitants par laquelle Hydro-Québec avait acheté la garantie de disponibilité des 11 groupes en période de pointe, en payant une certaine somme pour cette garantie-là, et aussi en s’assurant que l’inventaire de pièces de rechange soit augmenté et maintenu par CF(L)Co. »[213]
[388] Cette convention d’exploitation arrivait à terme le 31 décembre 1996. La problématique des pièces de rechange telle qu’exprimée par Monsieur Dubé est une composante importante de cette convention, puisque les acquisitions à être effectuées par CF(L)Co se chiffraient à 4 950 000,00 $ pendant le premier terme du contrat et à 10 880 410,00 $ pour le deuxième terme[214].
[389] Quant aux scénarios envisagés, ils seront affinés dans la deuxième version de ce rapport celui-là daté du 12 février 1991[215].
[390] Un peu plus tard soit le 9 mai 1991, H.Q. soumettra une offre à CF(L)Co visant entre autres les points suivants :
- |
« Guaranteed Winter Availability Contract ». |
- |
Convention unanime d’actionnaires. |
- |
Achat de puissance et d’énergie à partir de centrales situées dans le Bas Churchill[216]. |
[391] Quant au « Guaranteed Winter Availability Contract » il s’agit en fait d’un Operating Agreement amélioré. En effet, on y apprend que la puissance recherchée par H.Q. était de 856 MW pour la période de cinq (5) mois d’hiver et que le terme du contrat envisagé s’étendait du 1er novembre 1994 jusqu’au 31 mars 2041.
[392] Un projet de contrat GWAC était joint à cette proposition. Le Tribunal juge utile de reproduire l’un des considérants de même que l’objet du contrat :
« WHEREAS that power contract also provides that whenever additional capacity can, in the opinion of CF(L)Co, be made available, such capacity shall also be made available to HYDRO-QUÉBEC on request;
OBJECT :
During the existence of this present contract, CF(L)Co agrees to guarantee maximum availability of all eleven (11) generating units of the Plant necessary to provide the Additional Availability each year during the Availability Period and HYDRO-QUÉBEC agrees in consideration thereof to pay to CF(L)Co the monetary consideration provided for in Article V hereof. »[217]
( Nos soulignés )
[393] CF(L)Co répondra à la proposition de H.Q. le 31 mai 1991. En voici un extrait ayant trait à l’achat de puissance et d’énergie à partir de centrales situées dans le bas Churchill.
« As I pointed out at the meeting, there is no difference between the last 25 years of the Upper Churchill contract (i.e. from 2016 to 2041) and the 30 years contract we are negotiating with you for power and energy from the Lower Churchill. In both cases, Hydro-Quebec will have a contractual right to blocks of power and energy and we will have a contractual obligation to supply. Failure by either party to live up to the contracts would be subject to the laws governing such matters. Therefore, neither side requires any special covenants covering what are normal commercial dealings.
At was further pointed out at the May 28, 1991 meeting, Hydro-Quebec made it absolutely clear at the start of our negotiations that it was not prepared to consider any changes to the existing Hydro-Quebec/CF(L)Co contract, nor the wheeling of power across Quebec. We accepted these pre-conditions. I am sure you will appreciate that we have an equal reticence in these negotiations to do anything which might be construed as confirming or improving for Hydro-Quebec’s benefit, the existing arrangements. »[218]
[394] Monsieur Dubé qui était présent à la réunion, à laquelle la lettre du 31 mai 1991 réfère, précise sa vision des “Blocks” de la façon suivante :
« Non des blocs c’est une expression qui veut dire des quantités, ça ne veut pas dire des quantités fixes et égales, des quantités. »[219]
[395] Cela nous amène à traiter d’autres notions historiques telles que comprises par H.Q. à l’époque où Monsieur Dubé y oeuvrait. Ce sont les notions de « Bundle », de ventes interruptibles et d’énergie excédentaire.
[396] Monsieur Dubé dans son témoignage précise qu’à l’époque les notions de puissance et d’énergie étaient considérées en « Bundle » ou en paquet.[220]
[397] Par ailleurs, voici comment il décrit les ventes interruptibles dans les années 1960 :
« R. Puissance, énergie, oui, c’est toujours regroupé. Oui, il y avait des ventes interruptibles dans les années 60.
Q. Voilà, ça m’intéresse. Donc, est-ce que vous pouvez expliquer au Tribunal qu’est-ce qu’il y avait comme ventes interruptibles dans les années 60 ?
R. C’est des quantités de puissance et d’énergie qui étaient offertes à rabais principalement à de grandes industries, moyennant qu’il était possible de les interrompre sur préavis.
Q. Puis, je vais même aller plus loin puis vous suggérer que, en plus des grandes industries, Hydro-Québec avait fait de tels arrangements avec sa voisine Hydro-Ontario. Est-ce que vous avez souvenir de ça ?
R. Oui. Pour deux raisons. La première, c’est que, pour avoir un permis de l’Office national de l’énergie, il fallait toujours faire la démonstration que l’énergie exportée était au-delà des besoins canadiens. En plus de ça, quand on vendait des surplus d’énergie, on ne pouvait pas connaître longtemps à l’avance la durée de ces surplus-là et quels événements il était possible d’intervenir. Donc, de part et d’autre, dans ces ententes contractuelles là, on convenait que c’étaient des ventes interruptibles, mais moyennant préavis. Donc, ça pouvait être de plusieurs années, de plusieurs mois, de plusieurs jours. »[221]
[398] Quant à l’énergie excédentaire, voici comment Monsieur Dubé la décrit :
« Q. Pouvez-vous expliquer au Tribunal qu’est-ce qu’on entend par énergie excédentaire ou son équivalent anglophone « excess energy » ?
R. C’est de l’énergie qui se situe au-delà des besoins d’Hydro-Québec et qu’il est impossible de stocker. Normalement, il y a toujours de grandes variations dans les apports hydroélectriques, hydrauliques plutôt. Et quand il y a des surplus temporaires, on tente autant que possible à les stocker, ce qui n’est possible si les réservoirs sont pleins à pleine capacité, ce serait déversé. Donc, au lieu de déverser, si on peut trouver un client pour le prendre, on va le faire. »[222]
[399] Nous verrons au chapitre des expertises que CF(L)Co, a une toute autre interprétation de ce que constitue l’énergie excédentaire.
[400] Fermons cette brève parenthèse historique et revenons aux négociations.
[401] En dépit des efforts des négociateurs, aucune entente n’interviendra entre les parties à la suite de cette ronde de négociations, le tout se terminant en queue de poisson en 1992 selon les dires de Monsieur Dubé. Celui-ci rejette le blâme de cet échec sur le gouvernement de Terre-Neuve[223].
[402] Voyons maintenant la seconde ronde de négociations celle-là tenue en 1995-1996.
[403] Celles-ci sont réinitiées à l’instigation de Monsieur Claude Dubé et de Monsieur Dave Mercer, président et directeur général de CF(L)Co alors que tous deux sont membres du conseil d’administration de CF(L)Co.
[404] Ceux-ci sont une fois de plus inquiets quant à la stabilité financière de CF(L)Co puisque la convention d’exploitation, source de revenus appréciables pour CF(L)Co arrive à échéance le 31 décembre 1996[224].
[405] Le 7 juillet 1995, Monsieur Andrew Grant que Monsieur Dubé décrit dans son témoignage comme étant le « Chief Financial officer » de CF(L)Co signe un mémo adressé à Messieurs Mercer et Dubé[225]. Ce mémo nous apprend que l’entente entre CF(L)Co et Twinco se terminait le 31 décembre 2014 et qu’après cette date, l’énergie rendue disponible serait vendue à des tiers au même prix que celui facturé à H.Q.
[406] Le 5 septembre 1995, Monsieur Mercer transmet sous deux (2) plis séparés à Monsieur Claude Dubé, cinq (5) projections financières qui selon lui assureraient la viabilité financière de CF(L)Co. Le premier envoi considère un horizon financier s’étendant jusqu’en 2016[226] alors que le second envisageait celui-ci jusqu’en 2041[227].
[407] La lettre couverture réfère à sa page deux (2) à ce que Monsieur Mercer qualifie de « very thick computer outputs » lesquels font partie intégrante des projections soumises[228].
[408] Il ressort de ce document, que les seules ventes à des tiers pouvant survenir, le seraient à l’expiration du contrat liant CF(L)Co à Twinco dont le terme expire en 2014. Ainsi, à compter de 2015 apparaît une nouvelle rubrique intitulée « other customers » exposant des revenus potentiels de l’ordre de 4 676 000,00 $[229].
[409] Cela étant, d’autres avenues ont été considérées par les équipes de négociateurs en vue d’augmenter les revenus de CF(L)Co. Celles-ci allaient de l’amélioration de l’équipement pour en augmenter la productivité, en passant par un mode de paiement par H.Q. modifié et connu sous le vocable « Front loading ».
[410] Monsieur Dubé relate par ailleurs qu’il n’y a jamais eu de discussion, à l’occasion de cette ronde de négociation, sur la notion ou définition de « Continuous Energy » quant au contrat renouvelé[230].
[411] Finalement, H.Q. considérant que les négociations étaient arrivées à terme, déposera le 8 octobre 1996 une offre à CF(L)Co[231].
[412] Ce document couvre les cinq (5) points suivants.
1) Shareholder’s agreement.
2) Operating agreement.
3) Requests for maintenance.
4) Open Access.
5) Guaranteed Winter Availability Contract.
[413] À la lumière de ces rubriques, nous pouvons cerner trois (3) grands thèmes, ce sont les suivants.
- |
Convention d’actionnaires. |
- |
Convention d’exploitation transformée en GWAC. |
- |
« Open access ». |
[414] Même s’il n’y aura pas de suite immédiate à cette proposition, elle constitue néanmoins le fondement de diverses ententes qui interviendront en 1998.
[415] Il convient de reproduire intégralement la section traitant de l’ « open access » et de s’y arrêter.
« 4. Open access :
To allow CF(L)Co :
· |
to recall the remaining approx. 130MW starting in November 1997 instead of the 3 years delay. |
· |
to wheel the related capacity and energy through Hydro-Québec’s system |
· |
at the open access tariff that shall be effective from time to time according to FERC’s rules[232] |
· |
to market the recall outside of Québec (subject to FERC approval of Hydro-Québec’s filing for open access) in the market(s) of its choice. |
· |
The transmission losses over Hydro-Québec system are at the seller’s expense (i.e. CF(L)Co) |
· |
HQ offers to market that power for CF(L)Co, at a fee to be negociated. |
· |
Preferred dividends and royalties payable to Newfoundland are calculated on the additional revenues in accordance with the current practices. |
· |
HQ requests non-discriminatory access to Labrador&Newfoundland (reciprocity). »[233] |
( Nos soulignés )
[416] Un bref aparté s’impose dès maintenant.
[417] Nous avons vu en introduction que l’« Open Access » est la résultante d’une modification structurelle fondamentale, chez nos voisins du Sud visant à ouvrir au marché, l’ensemble des réseaux de transmission d’électricité.
[418] Messieurs Sylvain Clermont, chef commercialisation des services de transport et Pierre Paquet, directeur contrôle des mouvements d’énergie, tous deux de H.Q.T.[234] ont témoigné pour expliquer la structure réglementaire entourant l’« Open Access » ainsi que son application sur le terrain, par H.Q..
[419] Voyons dès maintenant l’ossature de cette structure réglementaire. L’organisme américain à l’origine de ce changement et qui le chapeaute est le Federal Energy Regulatory Commission (FERC).
[420] Le « Final Rule » du 16 février 2007[235] à son introduction explique en termes concis cette révolution introduite au milieu des années 1990 en voici un extrait :
« I. Introduction
1. This Final Rule addresses and remedies opportunities for undue discrimination under the pro forma Open Access Transmission Tariff (OATT) adopted in 1996 by Order No. 8881. This landmark rulemaking fostered greater competition in wholesale power markets by reducing barriers to entry in the provision of transmission service. In the ten years since Order No. 888, (…) »
Références omises
[421] Le final order fait référence aux exploitants de réseaux de services publics faisant partie du North American Electric Reliability Corporation (NERC) de même que le « pro forma » Open Access Transmission Tariff (OAH).
[422] Monsieur Clermont précise que HQT fait partie de l’un des huit (8) conseils régionaux de la NERC à savoir le « North East Power coordinating Council » (NPCC).
[423] Celui-ci précise également que les tarifs et conditions des services de transport d’Hydro-Québec[236] s’inspirent du OATT pro forma adopté par la FERC. Cela étant, ce tarif doit être approuvé par la Régie de l’Énergie.
[424] Nous verrons plus en détail dans un chapitre subséquent l’impact de cette réglementation sur le point 2 de la proposition du 8 octobre 1996 de HQ « to wheel the related capacity and energy through Hydro-Québec’s system ».[237]
( Nos soulignés )
[425] Fermons l’aparté pour le moment.
[426] 1998 constituera une année charnière dans les relations entre H.Q. et CF(L)Co.
[427] Monsieur Thierry Vandal attribue ces négociations et ententes à des discussions ayant eu cours à l’occasion d’une tournée asiatique de représentants du monde politique et d’affaires du Québec et du Canada tels l’Honorable Jean Chrétien, premier ministre du Canada, l’Honorable Lucien Bouchard, premier ministre du Québec, l’Honorable Brian Tobin, premier ministre de Terre-Neuve, Monsieur André Caillé, président de H.Q. ainsi que des représentants de NLH.
[428] Selon Monsieur Vandal, le cœur de la discussion entre CF(L)Co et H.Q. provoquée par les instances politiques, tournait autour du développement du Bas Churchill[238].
[429] Les négociateurs seront pour H.Q. Thierry Vandal et Marie-José Nadeau tandis que CF(L)Co sera représentée par son président-directeur général, Monsieur Bill Wells[239] lequel sera assisté d’un haut fonctionnaire de Terre-Neuve, Monsieur Fred Way.
[430] Des ententes ancillaires au développement du Bas Churchill interviendront rapidement sans doute en raison d’une réelle volonté politique. Ces ententes porteront sur les points suivants.
1) Bloc Twinco
2) Rappel de 300 MW
3) GWAC
4) Convention d’actionnaires
[431] Voyons chacune de ces ententes.
[432] Comme nous l’avons vu précédemment, le Bloc Twinco de 225 MW avait été ségrégationné dès le début des négociations afin de garantir les besoins énergétiques des clients de la Centrale Twin Falls[240].
[433] Cela étant, cette obligation se terminait le 31 décembre 2014 et dès lors, selon Monsieur Vandal, par l’effet de « Basculement » ce bloc de 225 MW devenait disponible pour H.Q. à compter du 1er janvier 2015.
[434] Dans le cadre des quatre (4) ententes intervenues en 1998, H.Q. a accepté que le Bloc de 225 MW précédemment réservé pour les besoins des clients de Twin Falls, ne fasse pas partie de la puissance et énergie pouvant être mis à la disposition de H.Q. au prix convenu dans le contrat principal mais pouvait plutôt faire l’objet de revente à des tiers le tout à un prix commercialement acceptable.
[435] Cette entente quant au Bloc Twinco s’est cristallisée dans la convention d’actionnaires et plus particulièrement ses articles 3.6.1 et 3.6.2 que le Tribunal reproduit :
« 3.6.2 HQ waives any right HQ may have under the Power Contract or otherwise to claim the Twinco Power upon termination of the Twinco Sublease.
3.6.2 Upon the termination of the Twinco Sublease, CF(L)Co will make available at the delivery point at which the Twinco Power is being delivered at the date of this Agreement, the Twinco Power for distribution and consumption in Labrador West to N&LH or any other company which replaces N&LH as the distributor of hydro-electric energy in Labrador West (either being the « Distributor ») for a price expressed in cash, inclusive of all transmission charges and on terms and conditions which are in each case commercially reasonable based on the fact that the Twinco Power is to be distributed and consumed in Labrador West, as decided by a majority of directors of CF(L)Co entitled to vote thereon under the provisions of the Act and providing for the conditions specified in section 3.6.3 (the « Twinco Power Agreement »)[241]. »
[436] Aux termes de l’article 6.6 du contrat principal, il est prévu que CF(L)Co peut rappeler jusqu’à 300 MW aux fins de revente à l’extérieur de la province de Québec en donnant un préavis écrit de trois (3) ans à cet effet.
[437] En 1998, quelque 170 MW avaient déjà été rappelés par CF(L)Co.
[438] À preuve le 1er septembre 1976, un contrat intervient entre CF(L)Co et NLH lequel s’il traite principalement de la vente du Bloc Twinco, comporte des dispositions quant à la vente par CF(L)Co à NLH de toute partie du Bloc de 300 MW ayant fait l’objet du « Rappel »[242].
[439] Le 9 mars 1998 intervient un contrat intitulé « Notice of Recapture and Waiver »[243].
[440] Ce contrat fort simple constate que CF(L)Co donne le préavis prévu à l’article 6.6 du contrat principal quant à ce qui n’avait pas encore été rappelé soit très exactement 130.7 MW et dans un deuxième temps, H.Q. renonce au préavis écrit de trois (3) ans concédant dès lors le droit de CF(L)Co dans les 130,7 MW n’ayant pas encore fait l’objet du Rappel.
[441] Dans les faits, à compter de cette date le 300 MW objet du Rappel était vendu par CF(L)Co au prix stipulé au contrat principal à NLH qui elle-même en revendait une partie à H.Q. au prix du marché, ce qui selon Monsieur Vandal l’était à un prix dix (10) fois plus élevé que ce que prévu au Contrat principal[244].
[442] De fait, à la même date soit le 9 mars 1998 intervenait un contrat entre CF(L)Co et NLH en vertu duquel CF(L)Co vendait à NLH 300 MW. Ce contrat valable jusqu’au 31 août 2041 établissait le prix du KWH en fonction du contrat principal entre H.Q. et CF(L)Co[245].
[443] Également, à la même date est intervenu un contrat entre NLH et H.Q. en vertu duquel NLH s’engageait à vendre et H.Q. acheter une portion des 300 MW ayant fait l’objet du « Rappel » le tout au prix de 2,39 ¢ du KWH. Certains des considérants sont d’importance. Ils se lisent comme suit :
« WHEREAS, pursuant to an agreement dated March 9, 1998 between the Intervenant and N&LH (the”N&LH PPA”), the Intervenant has agreed to sell to N&LH, and N&LH has agreed to purchase, all of such recaptured quantity of power and energy;
WHEREAS N&LH utilizes a portion of the total recaptured quantity for sales in Labrador (the “Labrador Load”), the amount of which may vary from time to time;
WHEREAS, while this Contract is in effect, N&LH agrees not to use any portion of the said recaptured quantity for sales outside Labrador except quantities sold to HQ; and »[246]
( Nos soulignés )
[444] Le contrat initial en vigueur à compter du 9 mars 1998 mais signé les 14 et 25 septembre 1998 était d’une durée de trois (3) ans soit jusqu’au 8 mars 2001.
[445] Ce contrat fut renouvelé une première fois le 19 février 2001 jusqu’au 31 mars 2004[247] et une seconde fois le 31 mars 2004 pour s’étendre jusqu’au 1er avril 2009[248].
[446] Le contrat entre NLH et H.Q. ne sera pas renouvelé après le 1er avril 2009 et la suite des choses quant au Rappel de 300 MW sera traitée dans le prochain chapitre[249].
[447] Comme nous l’avons vu précédemment, en 1990 les parties avaient mis en place une convention d’exploitation visant à garantir à H.Q., moyennant compensation, de la puissance supplémentaire pendant les périodes de pointe, notamment en hiver.
[448] Rappelons que le « Firm Capacity » avait été établi à deux (2) niveaux dans le contrat principal à savoir :
Du mois d’octobre au mois de mai = 4382 MW
Pour les mois de juin à septembre = 4163 MW[250]
[449] Selon Monsieur Vandal, le fait pour H.Q. de consentir à payer pour de la puissance additionnelle au-delà de la « Firm Capacity » tire son origine dans le texte de l’article 6.4 du contrat principal, le Tribunal reproduit le premier paragraphe de cet article :
« Firm Capacity
The Firm Capacity shall be available at all times when Hydro-Quebec has requested it. In addition whenever additional capacity can, in the opinion of CFLCo. be made available, such capacity shall also be available to Hydro-Quebec on request. »
( Nos soulignés )
[450] Voici les commentaires de Monsieur Vandal à ce sujet dans le cadre de son témoignage :
« R. Parce que comme la disposition contractuelle l’indique, la mise à la disposition d’Hydro-Québec de cette puissance additionnelle au-delà de la puissance ferme, est sujette à l’opinion de CF(L)Co quant à sa disponibilité. Alors, ce qu’on a voulu faire avec le GWAC, c’est essentiellement de lever cette contrainte-là ou ce qualificatif-là en retirant la disposition par laquelle la puissance additionnelle, cette puissance additionnelle là était sujette à l’opinion de CF(L)Co quant à sa disponibilité. Le GWAC ce qu’il fait, c’est qu’il nous donne une garantie qui n’est pas sujette à l’opinion de CF(L)Co quant à sa disponibilité pour de la puissance ferme, pour une quantité de puissance de 682 mégawatts qui nous permet à ce moment-là de programmer cette puissance-là et, en programmant la puissance, de faire produire de l’énergie en période d’hiver, à partir du mois de novembre jusqu’au mois de mars, une énergie qu’on aurait sinon reçue en période d’été, parce qu’en période d’été il y aurait eu la capacité disponible. »[251]
( Nos soulignés )
[451] Daniel Garant, membre de l’équipe de négociateur de H.Q. en 1998 révèle dans son témoignage un pan important de la motivation tant de H.Q. que de CF(L)Co entourant la conclusion du GWAC. Le Tribunal reproduit la portion pertinente de son témoignage :
« R. O.K.. En vertu du Power Contract, Hydro-Québec avait droit à toute la quantité de puissance et d’énergie de la centrale, moins le bloc de TwinCo, moins le « recapture » dont on vient de parler. Il y avait, il y a toujours dans le Power Contract un terme qu’on appelle « Firm Capacity » qui décrivait la capacité qui était garantie en mégawatts à Hydro-Québec.
La centrale pouvait, à certains moments donnés, produire plus que cette « Firm Capacity ». Historiquement, ça a toujours été rendu disponible à Hydro-Québec en vertu du Power Contract.
Les gens de Terre-Neuve nous disaient que, au fur et à mesure que le temps passait, ils nous rendaient cette capacité disponible sans compensation, parce que ça ne donnait pas de revenu supplémentaire de faire ça, et qu’à terme, on pouvait anticiper qu’on n’aurait plus cette capacité disponible additionnelle qui nous serait fournie, parce que ce n’était pas du « Firm Capacity ».
Le contexte du GWAC c’était de renforcer, c’était de créer une garantie pour cette capacité-là en payant pour s’assurer que la centrale de Churchill Falls nous fournissait cette capacité de puissance qui était disponible et qui n’était pas garantie. On voulait la garantir. »
LA COUR :
Q. Si je comprends bien, c’était au-delà de la « Firm Capacity »?
R. Oui, en fait, quand vous construisez une centrale hydroélectrique, vous avez une capacité du groupe turbine-alternateur, mais vous ne pouvez pas garantir que tout est disponible en même temps. Donc, dans le contrat vous mettez un pourcentage plus bas, mais cette capacité additionnelle là elle existe à certains moments donnés, dépendant des cédules d’entretien et autres.
Donc, nous, ce qu’on voulait, c’est pour la période d’hiver, obtenir cette capacité additionnelle là, la garantir. On l’avait déjà en vertu du contrat, mais ce n’était pas garanti. »[252]
( Nos soulignés )
[452] Le contrat GWAC[253] même s’il fut signé en juin 1999 était rétroactif puisque les obligations respectives de chacune des parties furent rencontrées à compter de novembre 1998.[254]
[453] La résolution de CF(L)Co du 18 mai 1999, autorisant la signature du GWAC de même que la convention d’actionnaires fait état, par ailleurs, que ce contrat assurera la viabilité financière de CF(L)Co jusqu’en 2041[255].
[454] Il y a lieu de préciser certaines des conditions de ce contrat.
[455] La garantie de puissance, mise à la disposition de H.Q. est de 682 MW en sus de la capacité ferme prévue au contrat principal pour la période hivernale soit 4382 MW donc pour un total de 5064 MW[256].
[456] La période de mise en disponibilité de cette capacité de 682 MW soit la « Availability Period » est la période hivernale soit du 1er novembre jusqu’au 31 mars[257].
[457] Le terme du contrat est du 1er novembre 1998 jusqu’en 2041[258].
[458] Monsieur Vandal est catégorique, sur le fait qu’à l’occasion de la négociation du GWAC, il n’a jamais été question d’en scinder son terme soit une période avant le 1er septembre 2016, et une seconde période à partir de cette date pour les 25 prochaines années, avec pour toile de fond un quelconque plafond à compter de 2016[259].
[459] L’article 4 du contrat prévoit que H.Q. doit indiquer à CF(L)Co ses besoins en terme de capacité au moins sept (7) jours à l’avance, celles-ci étant accompagnées d’un estimé de ses besoins pour les trois (3) semaines suivant cette première période de sept (7) jours. Par ailleurs, l’article 4.2.3 permet à H.Q. de modifier ses demandes dans l’heure, le tout aux conditions suivantes :
« 4.2.3 In addition, HQ may modify its capacity requirements during each hour of the Availability Period. In such event, CF(L)Co shall use commercially reasonable efforts to meet these new capacity requirements and, if CF(L)Co can do so, such modified request shall be considered as revising such seven day schedule to the extent set forth in the modified request. »[260]
[460] Nous verrons plus loin que cette programmation est presque conforme au guide d’interconnexion[261] adopté par les parties conformément au Contrat principal, à l’exception du fait que les changements de dernière minute en vertu du GWAC n’ont pas à être justifiés par un motif grave ou une urgence.
[461] Quant à la compensation à être versée par H.Q. elle apparaît à l’annexe B du contrat. On y constate que le prix de départ du KW était de 5,00 $ en 1998-1999 lequel était augmenté de 5,00 $ annuellement pour atteindre 50,00 $ en 2007-2008 par la suite les parties ont appliqué une indexation annuelle constante de 1,0 % jusqu’à la fin du terme en 2041[262].
[462] Selon Monsieur Vandal, la considération totale versée depuis 1998 et à être versée jusqu’en 2041 à CF(L)Co en vertu du GWAC s’élève à près de 1 milliard 500 millions de dollars[263].
[463] Quant au prix que consent de payer H.Q. pour le GWAC, un extrait de témoignage de Monsieur Vandal, est une fois de plus pertinent :
« Q. L’interprétation du Contrat renouvelé qui est proposée par CF(L)Co dans cette cause, avec ces limites mensuelles en énergie, aurait-elle une incidence sur les bénéfices que tire Hydro-Québec du GWAC ?
R. Oui, tout à fait, il y aurait une incidence majeure. Je le mentionnais, cette interprétation-là, vient dénaturer le GWAC, tel qu’on l’a établi, tel qu’on en a convenu. Et l’incidence serait de limiter la capacité pour Hydro-Québec de programmer ces 682 mégawatts-là en payant pour les mégawatts rendus disponibles pour produire de l’énergie. Si l’énergie elle-même est limitée, on se trouverait à payer pour des mégawatts disponibles, sans être capable d’en tirer un avantage. Autrement dit, on nous dirait : « La machine est là, les machines sont là, elles sont disponibles, vous payez, mais par ailleurs, vous avez atteint la limite de l’eau que vous êtes capable de faire passer dans la machine. » Alors, ça viendrait dénaturer profondément le fonctionnement de ce GWAC-là.
Q. Si l’on tient compte de la limite mensuelle en énergie que CF(L)Co voudrait voir s’appliquer à compter de la saison 2016-2017, y aurait-il un impact sur le nombre d’heures par mois pendant lesquels Hydro-Québec pourrait tirer profit du GWAC ? Et le cas échéant, comment peut-on établir cela ?
R. Selon… il y a des scénarios qu’on a regardés. Selon une simulation de ce fonctionnement-là, qui est celui de la partie terre-neuvienne, évoquée par la partie terre-neuvienne, sur une année de référence comme l’année 2013, donc l’année récente 2013, il y aurait entre 25 et 35 % des heures durant lesquelles on n’aurait plus la capacité d’utiliser le GWAC parce qu’on aurait atteint la limite de l’énergie qui aurait été plafonnée selon l’interprétation de la partie terre-neuvienne. »[264]
( Nos soulignés )
[464] La position de Monsieur Vandal quant au GWAC de 1998 est partagée par Monsieur Dubé, alors qu’il s’exprimait en rapport avec la proposition de 1996 pour ce même concept de GWAC :
« reformuler la question pour monsieur Dubé.
Q. Quelle est l’incidence d’un changement sur les droits de programmation d’Hydro-Québec en lien avec le GWAC qui faisait l’objet des discussions en 96 ?
R. Bien, je remettais [sic] en question la pertinence du GWAC et, si cette question-là n’avait pas été éclaircie, moi, pour un, j’aurais retiré la proposition concernant le GWAC.
Q. Et pourquoi ?
R. Parce que ça perdait son sens et la valeur commerciale du GWAC était loin d’être la même. »[265]
[465] Le GWAC est en vigueur depuis novembre 1998. L’utilisation qu’a faite H.Q. de cette capacité est particulièrement bien démontrée à l’aide de certains graphiques[266].
[466] Ces graphiques démontrent clairement une utilisation accrue de puissance pendant les mois d’hiver, puissance qui diminue pendant les mois d’été.
[467] La preuve a révélé, que pour des raisons évidentes, l’entretien des groupes ou encore des lignes de transmission s’effectue l’été. Encore une fois, nous reviendrons plus en détail sur ce point dans un prochain chapitre.
[468] La convention d’actionnaires[267] comme nous l’avons vu précédemment fut approuvée par le conseil d’administration de CF(L)Co le 18 mai 1999 et est datée du 18 juin 1999 et a pour terme le 31 août 2041[268].
[469] Outre la question du Bloc Twinco déjà traitée, le principal accomplissement de cette convention s’articule autour de la création d’un fonds de réserve visant à assurer le financement d’immobilisations.
[470] L’absence de ce fonds jusqu’alors constituait une préoccupation majeure pour H.Q.
[471] Il est utile de rappeler qu’à l’occasion du contrat d’exploitation du 11 novembre 1990 (l’ancêtre du GWAC) CF(L)Co s’engageait à « fournir et maintenir une réserve suffisante de pièces de rechange et d’appareils »[269].
[472] Il faut cependant noter à cette convention que toute dépense de capital de plus de cinq (5) millions entraînant une variation du budget de l’ordre de dix (10) millions nécessite une majorité du conseil d’administration mais avec la particularité qu’elle devra être approuvée par au moins un des représentants désignés par NLH et H.Q.[270]
[473] D’autres sujets de préoccupation seront réglés par cette convention tels que les dividendes, la gouvernance, etc. Eu égard que ces sujets ont peu ou pas d’impact sur la présente décision, sauf peut-être et de façon bien générale les dividendes, le Tribunal n’a pas l’intention de s’y arrêter.
[474] Le présent chapitre est essentiel pour une bonne compréhension du prochain lequel sera consacré aux expertises, donc à l’aspect plus technique de la preuve.
[475] Le Tribunal l’abordera à l’aide de trois sections. Ce sont les suivantes.
A) Interaction entre H.Q. et CF(L)Co quant à l’exploitation de la Centrale que ce soit au niveau de la production, de l’entretien et des communications en général.
B) Nouvelle réalité dans la transmission de l’énergie provenant de la Centrale que ce soit en fonction du « Open Access » ou encore des modifications contractuelles intervenues entre les parties.
C) Événements entourant la prise de conscience par H.Q. de l’existence de ventes dites interruptibles ainsi que de la position de CF(L)Co quant à l’interprétation du contrat renouvelé.
[476] Les premières livraisons d’électricité eurent lieu à compter du 1er mai 1972[271].
[477] La Centrale fut pleinement opérationnelle c’est-à-dire, le 11e groupe installé et fonctionnel à compter du 1er septembre 1976[272].
[478] Il est utile pour le présent chapitre de reproduire l’Annexe II du contrat principal.
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[479] À la colonne 7 de cette annexe, on remarque qu’à compter d’avril 1976 avec dix (10) groupes installés le total de KWH est de 2625 millions. Ce chiffre demeure le même avec 11 groupes. Le 11e groupe devant assurer la relève en période d’entretien. Transposé annuellement cette quantité mensuelle représente 31.5 terrawattheures ou 31.5 milliards de KWH soit l’AEB initial.
[480] Rappelons que le onzième groupe pouvait être utilisé à titre de réserve tournante donc, capable d’atteindre son plein régime en très peu de temps. Rappelons également que l’eau utilisée pour la réserve tournante était comptabilisée, devenant ainsi une composante de l’AEB.
[481] Le « load factor » de la centrale est de 82 % comparativement à une moyenne de 67 % pour l’ensemble des centrales du parc de H.Q.
[482] Ce 82 % constitue le facteur d’utilisation de 11 groupes pour produire la même énergie que pourraient produire 8 ou 9 groupes tournant à plein régime.
[483] Par ailleurs, autre particularité propre à la Centrale Churchill Falls est le fait que bien que la puissance prévue à la cédule II du contrat principal[273] était de 5170 MW pour 11 groupes, la réalité est qu’une fois installés ceux-ci produisaient une puissance réelle de 5428 MW[274].
[484] Il est utile de préciser que sur le terrain, les communications visant l’exploitation de la Centrale entre H.Q. et CF(L)Co sont bonnes.
[485] Ces communications sont régies par un manuel d’opération appelé le Guide d’interconnexion[275] créé en vertu de l’article 4.2.8 du contrat principal.
[486] Le préambule du guide précise que :
« Les dispositions du « GUIDE DE L’INTERCONNEXION CF(L)Co/HYDRO-QUÉBEC-SECTION A », dont l’objet est défini au paragraphe 1 intitulé « INTRODUCTION », sont sujettes aux termes du contrat intervenu le 12 mai 1969 entre Commission hydro-électrique de Québec et Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited, lesquels ont préséance sur elles. Ces dispositions peuvent, sous la même réserve, être modifiées par décision du Comité d’exploitation CF(L)Co/HYDRO-QUÉBEC. »
[487] Le guide prévoit entre autres la création d’un comité d’exploitation composé de quatre (4) délégués soit deux (2) pour H.Q. et deux (2) pour CF(L)Co.
[488] Voici en résumé « les principaux chefs de préoccupation du comité d’exploitation » tels qu’énoncés au guide.
- Interconnexion des réseaux électriques des parties
- Entretien et modifications des équipements
- Prévisions concernant les charges et gestion des réservoirs hydrauliques
- Toute autre considération afférente aux échanges de puissance et énergie visés par le contrat
[489] Ce guide est exhaustif et se veut entre autres, un miroir du contrat principal mais dans son aspect technique cette fois.
[490] Ainsi sont traitées la responsabilité des déversements, la réserve tournante, la gestion des réservoirs, etc.
[491] Plus particulièrement, le guide aborde la question de la planification. Le Tribunal juge utile de reproduire intégralement l’article 6.2 du guide établissant les principes de base.
« 6.2 Principe de base
Tout en respectant les dispositions et les limites prévues au contrat, il est avantageux pour les deux parties d’optimiser l’emploi de leurs ressources hydrauliques respectives en vue de maintenir une situation la plus équilibrée possible entre les réservoirs d’Hydro-Québec et ceux de CF(L)Co. Afin d’assurer cet équilibre à l’intérieur de chaque période considérée, Hydro-Québec a recours à ses modèles informatiques pour optimiser la production hydro-électrique des deux parties en tenant compte des engagements de CF(L)Co à l’égard de Twinco et des livraisons de l’énergie pour rappel à Newfoundland and Labrador Hydro.
Par conséquent, la production optimale de CF(L)Coi est prise en considération dans l’ordonnancement de ses livraisons à Hydro-Québec. »
[492] Il existe quatre (4) horizons de planification, ils sont désignés de la façon suivante au guide.
- Planification annuelle (article 6.3)
- Programmation hebdomadaire (article 6.4)
- Programmation journalière (article 6.5)
- Programmation horaire (article 6.6)
[493] La planification annuelle est soumise par H.Q. quatre (4) fois par année civile pour les douze (12) prochains mois, découpée à l’échelle hebdomadaire. Ce plan tient compte de l’état des réservoirs de même que les programmes d’entretien envisagés sur les deux (2) réseaux des parties.
[494] La programmation hebdomadaire établit un programme horaire des besoins en puissance de H.Q. pour la semaine suivante et est transmise à CF(L)Co au plus tard le mercredi de la semaine précédente à 16:00 heures. Chaque transmission de ce programme est accompagnée d’une estimation par H.Q. de ses besoins pour les trois (3) semaines subséquentes. À 15:00 heures le jeudi CF(L)Co doit aviser H.Q. si le programme demandé peut être appliqué. Par ailleurs, chaque partie peut apporter un changement au programme, mais est tenue d’en aviser promptement l’autre partie.
[495] La programmation journalière transmise chaque jour avant 14:00 heures par H.Q. se veut soit une confirmation ou une révision du programme hebdomadaire. Cela étant, s’il y a révision H.Q. confirme qu’elle fera tout en son pouvoir pour aviser CF(L)Co au moins 72 heures à l’avance, en raison des délais hydrologiques entre le régulateur Lobstick et la centrale. Par ailleurs, dans l’heure suivant l’envoi du programme journalier, H.Q. et CF(L)Co s’entendent sur le programme horaire du lendemain et des jours suivants.
[496] La programmation horaire est faite en temps réel entre le répartiteur du centre de conduite du réseau (C.C.R.) d’Hydro-Québec et l’opérateur de CF(L)Co lesquels s’emploient à respecter la programmation journalière. Toutefois, « [l]es programmes horaires fixés par le programme journalier ne sont modifiés qu’en raison de motifs graves ou de situation d’urgence »[276].
[497] Monsieur Hugo Sansoucy, chef stratégie et caractérisation chez H.Q., est également un des deux délégués au sein du comité d’exploitation quant à la centrale de Churchill Falls. Il a témoigné, entre autres, quant à l’exploitation de la centrale en conjonction avec le parc d’H.Q.
[498] Celui-ci fait état des contraintes auxquelles est soumise H.Q. dans l’élaboration de ses programmes. Ce sont les suivantes :
- Variabilité des apports en eau
- Hauteur de chute particulière et rendement à Churchill Falls
- Entretien - production et transport
[499] L’eau constitue la matière première d’une centrale. Or, celle-ci peut varier d’une année à l’autre selon les précipitations que ce soit en pluie ou en neige. Ainsi, à l’aide d’un tableau[277] il démontre que si les premières années (1976-1984) ont été riches en apports, la période suivante (1985-1996) fut négative. Selon Monsieur Sansoucy, la richesse ou la faiblesse de ces apports influe la programmation de H.Q.
[500] Il y a lieu d’ouvrir une brève parenthèse pour aborder la question des déversements ou « Spills » dans le contrat principal, lesquels sont assumés par H.Q. puisqu’exerçant le contrôle des réservoirs.
[501] La preuve quant aux déversements révèle que les plus importants de ceux-ci se sont produits au tout début de l’exploitation de la Centrale alors que les réservoirs étaient pleins[278] couplé avec de forts apports en eau (précipitations) pendant la période se situant entre 1976 et 1981[279].
[502] Suite au déversement de l’été 1981 seulement trois (3) autres déversements eurent lieu soit en 1992, 1997 et finalement 2005. Selon la preuve ces déversements furent causés par la perte temporaire de capacité de transmission occasionnée par des bris d’équipements faisant en sorte que la production de la Centrale a dû être réduite[280].
[503] Si l’eau gaspillée à la suite d’un déversement est comptabilisée, l’eau utilisée, le cas échéant pour la réserve tournante, l’est également comme s’il s’agissait d’un déversement étant dès lors intégré à l’AEB.[281]
[504] Par ailleurs, Monsieur Sanscoucy nous apprend que dans les faits H.Q., selon sa documentation interne n’aurait jamais demandé ou obtenu depuis 1976 de la réserve tournante.[282]
[505] Autre élément considéré par H.Q. est le fait qu’en raison de la constance de la hauteur de chute de la centrale Churchill Falls, celle-ci offre un rendement supérieur l’hiver comparativement aux autres centrales du parc d’H.Q.
[506] Dernière contrainte est l’entretien des équipements de la centrale ou des lignes de transmission, lequel s’effectue plus particulièrement en période estivale.
[507] La période pendant laquelle l’entretien est effectué, est confirmée par Monsieur Chad Wiseman directeur de la production à la centrale de Churchill Falls.
[508] Celui-ci précise que chacun des 11 groupes (turbine/alternateur) doit être retiré de la production aux fins d’entretien, à chaque année. Ainsi en 2015 ont été retirés de la production deux groupes pendant les mois d’avril et mai, trois groupes pendant le mois de juin, trois groupes pendant une semaine en juillet et deux groupes pendant trois semaines en juillet. Par ailleurs, en 2014 la situation était relativement similaire en termes de groupes retirés pour l’entretien.[283]
[509] Selon H.Q., l’entretien des groupes notamment en raison de leur nombre l’été, tout comme celui des lignes de transmission, affecte la capacité de CF(L)Co à lui fournir ce que celle-ci qualifie de « Continuous Energy » pendant la période estivale.
[510] Bref, pendant des années soit jusqu’en 2009, la collaboration sur le terrain s’est avérée excellente. Cela étant, avant d’aborder la situation post-2009, il faut dès maintenant s’attarder à la preuve entourant la transmission de l’énergie.
[511] Précisons d’emblée que la pertinence de cette partie de la preuve relève de la question des ventes interruptibles.
[512] En 1972 lors des premières livraisons d’énergie de même qu’à compter de la pleine production de la Centrale, la situation de la transmission de l’énergie est relativement simple.
[513] Nous avons vu que celle-ci est assurée par trois (3) lignes de transmission de 735 KV à partir de la Centrale.
[514] La portion Labrador de ces lignes de 735 KV est la propriété de CF(L)Co et à partir de la frontière avec le Québec, propriété de H.Q.T.
[515] Le poste montagnais immédiatement au sud de la frontière québécoise assure le mesurage des quantités d’énergie provenant de la Centrale sur chacune des trois (3) lignes de transmission. Il s’agit là du premier poste en sol québécois, toutefois celui-ci ne représente pas le point de livraison défini au contrat principal[284] lequel est un point géographique.
[516] Jusqu’en 2009, le seul client de l’énergie provenant de la Centrale et transmise sur les lignes de transmission de 735 KV était H.Q. Rappelons en effet qu’outre les achats entre H.Q. et CF(L)Co, H.Q. achetait de NLH partie du rappel de 300 MW inutilisés dans la province de Terre-Neuve. Bref, tout ce qui transitait sur les lignes de 735 KV en provenant de la Centrale était destiné à H.Q.
[517] Cette situation a changé en 2009 alors que le contexte réglementaire entourant le concept « Open Access » prend son importance. Il y a lieu d’y revenir de façon plus approfondie.
[518] Nous avons vu précédemment et très brièvement le contexte américain de l’ « Open Access »[285], voyons maintenant ses impacts sur la situation de H.Q. et CF(L)Co.
[519] Précisons dès maintenant que CF(L)Co ne fait partie ni du NERC ni du NPCC contrairement à H.Q. Cela étant NLH est enregistrée au sein de ces organismes comme « Purchasing-selling entity »[286].
[520] Il existe en Amérique du Nord, quatre (4) interconnexions reconnues soumises à des normes de fiabilité, ce sont les suivantes.
- Texas
- Ouest
- Est
- Québec (incluant le Labrador)
[521] Le contrôle de fiabilité est assuré par H.Q. aux termes d’une décision de la Régie de l’Énergie[287] (ci-après désignée « la Régie ») rendue le 14 août 2007. Il y a lieu de reproduire la mise en contexte de cette décision laquelle constitue un excellent résumé de la situation.
« 2. MISE EN CONTEXTE DE LA DEMANDE
Dans sa preuve, le Transporteur mentionne que le 14 août 2003, une panne majeure survient dans le Nord-est américain mettant ainsi en évidence l’importance d’assurer la fiabilité des réseaux de transport d’électricité. Cette panne a privé d’électricité environ 50 millions de personnes et a occasionné des pertes économiques très importantes, évaluées entre quatre et dix milliards de dollars américains aux États-Unis et plus de deux milliards de dollars canadiens au Canada. À la suite de cette panne, un groupe de travail Canada - États-Unis est mis sur pied afin de revoir le fonctionnement du régime encadrant la fiabilité et de raffermir les obligations des transporteurs en Amérique du Nord. Plusieurs recommandations sont alors émises par le groupe de travail, dont la mise en place de normes de fiabilité obligatoires pour le transport de l’électricité applicables à l’ensemble de l’Amérique du Nord. Autant au Québec, au Canada qu’aux États-Unis, il est envisagé que ce nouveau régime, caractérisé par sa nature obligatoire, remplace l’ancien régime volontaire en place, dont celui coordonné par le NERC depuis 1968 et auquel le Transporteur participait jusqu’alors.
Le gouvernement du Québec, dans sa nouvelle stratégie énergétique2, reconnaît l’importance des questions liées à la fiabilité du transport de l’électricité et confirme les intentions du gouvernement à l’égard de la mise en place de normes de fiabilité obligatoires pour le transport d’électricité. Il y est également indiqué que le gouvernement compte doter la Régie des pouvoirs nécessaires à l’application des normes obligatoires au Québec.
Le 13 décembre 2006, le gouvernement du Québec fait suite à sa stratégie énergétique et adopte le Projet de loi 52 (ci-après « Loi 463 ») qui confère notamment à la Régie de nouveaux pouvoirs de surveillance de l’application des normes obligatoires de fiabilité des réseaux de transport, dont celui de désigner le coordonnateur de la fiabilité au Québec.
La présente demande constitue donc la première étape de la mise en place du nouveau régime de normes de fiabilité obligatoires au Québec. »
( Nos soulignés )
( Références omises )
[522] Le coordonnateur de la fiabilité assure diverses fonctions ce sont les suivantes.
1) « Balancing Authority » ou Responsable de l’équilibrage.
2) « Transmission Operator » ou Exploitant de réseau de transport.
3) « Interchange Authority » ou Responsable des échanges.
[523] Le Tribunal utilise les termes anglais puisque ceux-ci sont définis au « Glossary of terms used in NERC Reliability standards »[288].
[524] Par ailleurs, H.Q.T. est inscrite auprès de la NERC quant à ces trois fonctions[289] le tout confirmé par une décision en ce sens de la Régie de juin 2015[290].
[525] Toujours à l’occasion de cette décision, la Régie a adopté un lexique français dans lequel elle définit ces fonctions[291].
Terme |
Acronyme |
Définition |
Responsable de l’équilibrage |
BA |
Entité responsable qui intègre d’avance les plans de ressources, maintient l’équilibre charge-échange-production à l’intérieur d’une zone d’équilibrage, et soutient en temps réel la fréquence de l’Interconnexion. (Balancing Authority) Source : Glossaire des termes en usage dans les normes de fiabilité (NERC) |
Exploitant de réseau de transport |
TOP |
Entité qui est responsable de la fiabilité de son réseau de transport « local » et qui exploite ou dirige l’exploitation des installations de transport. (Transmission Operator) Source : Glossaire des termes en usage dans les normes de fiabilité (NERC) |
Responsable des échanges |
IA |
Entité responsable qui autorise la mise en œuvre de programmes d’échange équilibrés et valides entre des zones d’équilibrage, et veille à la communication de l’information sur les échanges pour les besoins de l’évaluation de la fiabilité. (Interchange Authority) Source : Glossaire des termes en usage dans les normes de fiabilité (NERC) |
[526] Monsieur Pierre Paquet est la personne désignée au sein de H.Q.T. pour assurer le rôle de coordonnateur de la fiabilité. Il a témoigné sur ces trois (3) fonctions que le Tribunal résume de la façon suivante.
Responsable de l’équilibrage : Doit s’assurer d’avoir les ressources suffisantes en énergie pour combler les besoins. À l’occasion, il peut donner des instructions au C.C.R. d’augmenter la production de centrales et couper d’autres[292].
Exploitant de Réseau de Transport : Est responsable de l’ensemble des lignes de transport dont les trois (3) lignes 735 KV et ce, à partir de la Centrale même si la portion située au Labrador appartient à CF(L)Co. Cette responsabilité comprend le retrait d’une ou plusieurs lignes aux fins d’entretien.[293]
Responsable des échanges : S’assure de la fiabilité du réseau H.Q. et des réseaux voisins avec qui il y aura des échanges ou encore d’avoir les ressources nécessaires pour combler les besoins tant d’H.Q. que les ententes d’exportation.[294]
[527] Il convient de préciser que la Régie, dans une décision du 11 mai 2010 a qualifié la Centrale Churchill Falls de la façon suivante et ce, en rapport aux fonctions du coordonnateur de fiabilité.
« 248. Le fait qu’HQT contrôle les mouvements d’énergie en provenance de la Centrale CF fait l’objet d’une preuve non contredite de la part du témoin Rioux d’HQT114, qui a notamment expliqué ce qui suit :
· La Centrale CF est considérée comme une ressource désignée et traitée quotidiennement comme telle;
· Cette centrale fait partie de la zone de réglage du Québec et est considérée on system;
· HQT a accès à l’électricité de la Centrale CF pour alimenter la charge locale en tout temps, à hauteur de la puissance demandée;
· Au plan des opérations, il est convenu entre les parties que la direction, la programmation, le contrôle sécurité et le balancing authority sont toutes des fonctions assumées par HQT. »[295]
( Références omises )
[528] C’est à dessein que le Tribunal a utilisé l’expression « a qualifié » dans le paragraphe précédent puisque dans une décision du 29 mars 2012 la même Régie précisait ce qui suit.
« [57] La Régie rappelle que les normes qu’elle adopte dans l’exercice de sa compétence ne peuvent avoir une portée extraterritoriale. Leur application est strictement limitée aux installations situées en territoire québécois. La Régie rappelle également que le Coordonnateur reconnaissait, lors de l’audience, qu’il n’y a aucune norme de fiabilité qui s’applique aux installations de CF(L)Co :
La preuve déposée au dossier également démontre qu’il n’y a aucune norme de fiabilité qui s’applique à la Centrale CF(L)Co, tel que clairement indiqué dans sa preuve, à la pièce notamment HQCMÉ-3, Document 3.2, soit les réponses du coordonnateur de la fiabilité à la demande de renseignements numéro 3 de Newfoundland and Labrador.
[58] La Régie rappelle que le Registre révisé à la suite de la Décision dresse la liste des éléments en lien avec chacune des entités visées par les normes « afin de circonscrire adéquatement l’applicabilité des normes au Québec ».
[59] Toutefois, comme NLH, la Régie constate que certaines installations qui ne sont pas situées au Québec figurent au Registre, sans qu’il n’y soit précisé qu’elles ne sont pas visées par les normes de fiabilité.
[60] Par ailleurs, pour les lignes de transport L7051, L7052 et L7052 situées en grande partie au Labrador, aucune mention spécifique ne précise que les normes de fiabilité ne s’appliquent que sur la portion québécoise des lignes.
[61] À cet égard, la Régie note que le Coordonnateur a modifié le Registre déposé le 20 décembre 2011 afin de supprimer toute mention se rapportant à des installations dont une partie seulement est située au Québec, plutôt que d’apporter à l’annexe B du Registre ladite mention, tel que convenu avec NLH lors de leur entretien du 19 janvier 2012. Le Coordonnateur justifie sa démarche par le fait que cette précision portant sur les portions d’installations situées au Québec n’a fait l’objet d’aucune prescription par la Régie dans la Décision.
[62] La Régie estime que cette précision relative aux installations, dont une partie seulement est située au Québec, est, de toute évidence, nécessaire afin de lever toute ambiguïté pouvant encore subsister à ce stade. Par conséquent, la Régie demande au Coordonnateur d’inclure de nouveau ces précisions relatives aux installations visées, puisqu’elles sont pertinentes.
[63] De plus, la Régie demande au Coordonnateur de supprimer du Registre toutes les installations qui ne sont pas situées au Québec. »[296]
( Nos soulignés )
( En gras dans la décision )
( Références omises )
[529] Bref, les normes de fiabilité s’appliquent à H.Q. ou H.Q.T. dans son exploitation. Ainsi, le contrat liant H.Q. à CF(L)Co fait partie de cette exploitation et ce, même si les installations de CF(L)Co se sont pas soumises à la Régie. Toutefois, l’exploitation contractuelle qu’en fait H.Q. est quant à elle, soumise aux normes de la Régie.
[530] Le fait pour H.Q.T. d’être responsable de l’équilibrage l’a amené à préparer deux documents soit le « Guide des pratiques d’affaires pour les services de transport d’Hydro-Québec TransÉnergie »[297] (ci-après « GSTHQ »). De même qu’un « Tarifs et conditions des services de transport d’Hydro-Québec » (ci-après « Tarif-Transport H.Q. ») lequel s’inspire largement de l’ « Open Access Transmision Tarif » ou OATT développé par la Federal Energy Regulatory Commission. Précisons que le tarif de H.Q. doit et a été approuvé par la Régie contrairement au GSTHQ.
[531] Revenons aux fonctions de Monsieur Paquet.
[532] Celui-ci explique qu’en vertu de ses fonctions de responsable de l’équilibrage, il doit conserver une marge de sécurité soit une disponibilité de puissance pour faire face aux imprévus.
[533] Le Tribunal reproduit un long extrait de son témoignage dans lequel, il explique les tenants et aboutissants de cette disponibilité de puissance :
« Q. Alors, de marge de manœuvre de 3000 mégawatts. Alors, je vais vous faire préciser, Monsieur le Juge, le 3000… pas Monsieur le Juge, monsieur Paquet - je vais vous faire préciser qu’est-ce que ce 3000 mégawatts ?
R. Bon. Donc, en fait, la réserve sur le réseau, la réserve requise, elle est tout d’abord d’une fois et demie la pire contingence qu’on peut survenir en production. Alors, une fois la pire contingence, plus la moitié de la deuxième pire contingence. Une contingence ça veut dire un bris, le bris de production le plus important. Ce bris de production le plus important constitue un transformateur à la centrale de Churchill Falls, donc, qui représente deux groupes, 1000 mégawatts. Alors, une fois, plus la moitié de la deuxième contingence, la deuxième pire contingence c’est aussi le bris d’un transformateur, donc, c’est 1500 mégawatts. Alors, je dois disposer en tout temps, en temps réel, d’au moins 1500 mégawatts de réserve. Ça, c’est le minimum pour l’exploitation fiable du réseau.[298]
[…]
Me SOPHIE MELCHERS :
Q. La deuxième pire contingence ?
R. La deuxième pire contingence est également un transformateur à la centrale Churchill Falls, donc, la moitié de la deuxième pire contingence est toujours le même transformateur ou un autre transformateur à la centrale Churchill, d’où le 1500 mégawatts.
Q. Et pourquoi vous ne prenez pas, pour suivre dans la veine que Monsieur le Juge a explorée, un groupe à Manic ou un groupe à LG-2 afin d’établir le nombre de mégawatts minimum de réserve ?
R. Parce que les groupes sont de puissance inférieure ou que la configuration peut faire en sorte qu’on n’en perde qu’un parce que ce sont des groupes qui sont radiaux sur un seul transformateur, par exemple.[299]
[…]
Me SOPHIE MELCHERS :
On va vous la trouver.
Q. Peut-être juste une précision, Monsieur le Juge a dit un groupe à Churchill Falls c’est 1000 mégawatts; vous, vous avez parlé de transformateur.
R. Tout à fait.
Q. Peut-être juste expliquer la différence ?
R. Oui. En fait, de la façon dont la configuration de la centrale est faite, un transformateur est raccordé à deux groupes donc de 500 mégawatts chacun. La perte du transformateur est la pire contingence.
Q. Donc, ce n’est pas la perte du groupe, mais c’est la perte du transformateur …
R. Tout à fait,
Q. … qui lui relie deux groupes ?
R. Tout à fait.
Q. Et, donc, ça, c’est votre réserve minimale en temps réel qui équivaut à 1500 mégawatts. Et pourquoi la veille pour le lendemain la réserve minimale est-elle, elle, de 3000 mégawatts ?
R. Bon. Donc, la veille pour le lendemain on doit protéger davantage que la réserve minimale qui est une situation dans laquelle on ne souhaite jamais se retrouver, donc, on va se prendre ce qu’on appelle une provision pour aléas. Alors, on doit quand même disposer sur l’ensemble du réseau une provision de 1500 mégawatts additionnels de disponibles en puissance et acheminables sur l’ensemble du réseau pour faire face aux différents aléas.[300]
[…]
Q. Et pour revenir dans ce cas-là à ma question, je suis désolée, je vous ai amené sur une piste avec le mot « programmer » est-ce que la disponibilité en puissance à Churchill Falls est prise en compte dans l’établissement de vos réserves et disponibilités en puissance générale ?
R. Tout à fait. Elle fait partie, tout comme toutes les autres centrales sur l’ensemble du parc, elle fait partie de la disponibilité en puissance de l’ensemble des ressources.[301] »
[534] Par ailleurs, le 5 juin 2013 intervenait un contrat entre H.Q.P, et H.Q.D. dont l’Annexe A est intitulée.
« Description des services nécessaires et généralement reconnus pour assurer la sécurité et la fiabilité de l’approvisionnement patrimonial1 »
et précise ce qui suit au niveau du maintien de réserves :
« 4. Maintien des réserves
Rendre disponible une quantité maximale de service de réserve normale de 1 500 MW de ressources mobilisables en 30 minutes dont 1 000 MW sont mobilisables en 10 minutes, cette dernière quantité incluant 250 MW en réserve tournante. Les ressources en réserve doivent pouvoir rendre disponible de l’électricité pour une heure lorsque mobilisés.
Rendre disponible une réserve de stabilité correspondant à 3 % de la puissance synchronisée, jusqu’à un maximum de 1 000 MW. Cette dernière doit être répartie parmi les groupes turbines-alternateurs synchronisés au réseau et est incluse dans la réserve normale de 1 500 MW. »[302]
( Références omises )
[535] Selon Monsieur Sansoucy, ce contrat fut rendu nécessaire en raison des exigences du « Tarif-conditions H.Q. »[303].
[536] Nous verrons plus tard que la question de réserve de puissance est pertinente à la présente affaire.
[537] Comme nous l’avons vu, H.Q.T. utilise également le GSTHQ.
[538] Le GSTHQ s’inspire notamment du « North American Energy Standard Board ».
[539] Le GSTHQ couvre l’ensemble des activités de transport ou transmission de l’énergie, on y précise entre autres comment devenir client et les types et classes de transport offerts.
[540] Au niveau des classes de transport, il en existe plusieurs. Aux fins des présentes, nous retiendrons les principales soit « Ferme » et « Non Ferme ». Il existe également ce que le guide qualifie de « Transport de Passage » défini comme suit.
« 4.3 Transport de passage
Le transport de passage est le service par lequel le Transporteur reçoit une quantité d’énergie à un point de service et livre simultanément la même quantité d’énergie, déduction faite des pertes, à un autre point de service. L’énergie transportée provient d’une source de production dans un réseau voisin, qui la livre au POR, et est destinée à un autre réseau voisin, qui en prend livraison au POD. Par exemple, un échange entre l’Ontario et la Nouvelle-Angleterre pourrait passer par le chemin ON-NE. »[304]
[541] La distinction entre « Ferme » et « Non Ferme » est d’importance puisque le transport « Ferme » aura priorité sur le « Non Ferme » si d’aventure le coordonnateur de fiabilité devait, pour toutes sortes de raison, notamment des pannes de production ou de transmission, réduire les livraisons de puissance et d’énergie, à partir d’une Centrale donnée.
[542] C’est donc en fonction de ce cadre réglementaire que H.Q. gère la transmission des exportations auxquelles procède NLH à compter de 2009.
[543] Précisons dès maintenant, puisqu’encore une fois important pour la suite des choses, le cadre commercial et technique utilisé par NLH, pour ses exportations.
[544] Ainsi, à la fin de l’entente entre NLH et H.Q. portant sur la vente de partie du Rappel de 300 MW, intervenaient quatre (4) contrats de transmission entre H.Q.T. et NLH pour 265 MW que cette dernière vendait à Massena, New York[305] et ce, pour la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2014.
[545] Précisons que dans chacun des quatre (4) contrats liant H.Q. à NLH était précisé que la zone de réglage, gérée par le responsable de l’équilibrage, est celle du Québec[306]. Ainsi, NLH était non seulement consciente de ce fait, mais s’y soumettait.
[546] Aux fins de ces exportations, NLH vendait la portion inutilisée du rappel de 300 MW à une entité indépendante connue sous le nom de Emera Energy, celle-ci la revendant à des clients américains[307] puisqu’étant une « purchasing-selling entity » sur le marché américain.
[547] Cette association entre NLH et Emera se poursuivra jusqu’au 1er avril 2015 alors que Nalcor Energy Marketing Corporation ou NEMC également une « purchasing-selling entity » devenait le nouvel agent de NLH[308].
[548] Le GSTHQ prévoit également la création d’un chemin de transport, lequel fut créé en 2009, lorsque NLH a cessé de vendre le Rappel 300 MW à H.Q. pour le vendre à des tiers, le chemin est identifié sous le vocable LAB-HQT 0/5150. Le chiffre 0 indiquant qu’il n’existe aucune capacité d’exportation vers le Labrador tandis que le chiffre 5150 signifie la capacité d’importation à partir du Labrador soit 5150 MW.
[549] HQT dans le contexte de son offre de services de transport utilise un outil de commercialisation informatique connu sous le nom de « Open Access Same Time Information System » ou sous son acronyme OASIS. Celui-ci nous apprend que la répartition de la capacité d’importation de 5150 MW est la suivante.
· 4885 MW pour les besoins de H.Q.[309]
· 265 MW pour NLH en vertu de 4 contrats de transport distincts.
[550] Le transport des 4885 MW pour les besoins d’H.Q. de même que les 265 MW de NLH est assuré sur une base « Ferme » c’est-à-dire que celles-ci ont priorité sur le « Non Ferme ».
[551] La façon d’initier une transmission est prévue au GSTHQ, le client doit déposer sa programmation au moyen d’étiquettes soit « normal » ou « dynamique » à l’intérieur d’une plage donnée avant le début du service[310]. Cela étant, le transport de l’électricité peut être classé en « Ferme » ou « Non Ferme », quant à cette dernière catégorie, celle-ci doit tenir compte si la capacité de la programmation résiduelle de la réservation associée est suffisante[311].
[552] Jusqu’en mai 2015, il n’existait que deux types d’étiquettes soit « Normal » et « Dynamique », nous verrons plus loin les circonstances entourant la création du troisième type d’étiquette dit de « Puissance ».
[553] Monsieur Robert Henderson actuellement à l’emploi de Nalcor Energy était en 2009 à l’emploi de NLH à titre de « Manager Systems Operations » et ce, depuis 1995.
[554] Monsieur Henderson indique au Tribunal qu’à compter du 9 mars 1998 jusqu’au 31 mars 2009, il n’a jamais été envisagé par CF(L)Co de vendre de la puissance à NLH au-delà du rappel de 300 MW, c’est-à-dire une portion inutilisée par H.Q. afin que CF(L)Co procède à des ventes interruptibles[312].
[555] De fait, la première livraison de puissance à NLH au-delà de la limite de 300 MW aurait été effectuée en avril 2009. Monsieur Henderson précisant qu’il ne s’agissait pas de ventes mais plutôt de livraisons[313].
[556] Tant Monsieur Henderson que Monsieur Martin révèlent que la volonté d’explorer le domaine de ventes interruptibles est attribuable à un groupe de travail au sein de Nalcor et créé peu de temps après l’arrivée en poste de Monsieur Martin en 2005 au sein de NLH et CF(L)Co.
[557] Cependant, il faut noter qu’un contrat datant du 1er septembre 1976 entre CF(L)Co et NLH fait spécifiquement référence à la possibilité pour CF(L)Co de vendre à NLH ce qu’elle décrit comme « Interruptible Energy » de la façon suivante.
« 501. CFLCO agrees to deliver to Hydro up to and including 31 December 2014 interruptible Energy from its generating facilities resulting from underutilization of Energy reserved for its existing obligations when, in the sole discretion of CFLCo, it can be made available, and the price of such Energy shall be determined in the manner prescribed in Clause 5.02. »[314]
[558] Selon Monsieur Henderson entre août 2011 et novembre 2011, à l’instigation de NEMC débute une période de tests visant la livraison d’énergie interruptible, quant à la portion inutilisée par H.Q. de l’énergie ferme ( Firm Energy ) et pouvant aller au-delà de la limite de 300 MW du Rappel.
[559] Monsieur Wiseman, quant à lui situe cette période de rôdage plutôt en 2012. Cela étant, quelle que soit cette période d’essai, la résultante est que jusqu’à l’été 2015 CF(L)Co procédait à des ventes interruptibles.
[560] De fait, CF(L)Co vendait à NLH la portion inutilisée par H.Q. de sa production. Rappelons qu’en vertu du contrat principal H.Q. peut requérir toute la capacité ferme (en tenant compte du GWAC pendant les mois d’hiver) mais n’est pas tenue de le faire. Voici comment s’exprime Monsieur Henderson à ce sujet :
« A. That’s right, it would have been utilizing the capacity in the Churchill Falls generation facility that Hydro-Québec wasn’t utilizing at the time. So, CF(L)Co were able to offer that for that pilot project. »[315]
[561] Pour la suite des choses, il est utile de rappeler une partie de l’argumentaire des deux parties quant aux ventes interruptibles.
CF(L)Co : |
Soutient qu’elle peut utiliser la production non utilisée par H.Q. aux fins d’exportation puisque si cette dernière fait une demande de dernière minute, elle peut cesser de vendre à N LH et ainsi rencontrer ses obligations envers H.Q. |
H.Q. : |
Soutient qu’elle a droit à toute la puissance et l’énergie en vertu du contrat principal et que si elle faisait une demande de dernière minute CF(L)Co ne serait pas en mesure de la rencontrer en raison des contraintes réglementaires en vigueur sur le marché américain ainsi qu’en raison de la méthode de transmission de cette énergie soit le « transport de passage ». |
[562] Qu’en est-il ?
[563] Il est admis que CF(L)Co ne fait pas partie du NERC.
[564] NLH revend depuis le 1er avril 2015 ce que les parties qualifient d’interruptible à NEMC, et celle-ci est un « purchasing-selling entity » dûment autorisée à transiger sur les marchés américains.
[565] Monsieur Vennes précise que pour transiger aux États-Unis, l’agent ou le courtier doit obtenir une licence de la FERC, ce faisant il peut devenir un « Participant Agreement » lui permettant de vendre ou acheter de l’électricité dans un marché précis tel les marchés de New York, Nouvelle-Angleterre ou PJM[316].
[566] Ainsi, à l’aide de diverses étiquettes[317] provenant du système OASIS, il est en mesure d’établir que NLH par le biais de son agent NEMC est présente sur les marchés suivants.
· Ontario
· New York
· Nouvelle-Angleterre
· Nouveau Brunswick[318]
· P.J.M.
· Nouvelle-Écosse
[567] Ces mêmes étiquettes nous apprennent qu’aux fins du FERC, la zone de contrôle applicable est celle de l’interconnexion du Québec (incluant le Labrador).
[568] Or, les règles de ces marchés américains prévoient des délais limites au-delà desquels une livraison ne peut être annulée ou stoppée, connus dans l’industrie sous le vocable « délais de verrouillage ». Monsieur Yannick Vennes de H.Q. coordonnateur des activités de conformité en matière de commercialisation d’électricité dans les marchés voisins au sein de H.Q. a témoigné sur ce sujet.
[569] Pour l’ensemble de l’Amérique du Nord, la norme NERC établit à 20 minutes minimum la période de verrouillage avant la transmission d’électricité. Ainsi, même si le vendeur ou l’acheteur désirait unilatéralement arrêter la transaction 15 ou 19 minutes avant le début de celle-ci, il ne le pourrait pas.
[570] Cela étant, les marchés locaux peuvent avoir une période de verrouillage plus longue. Voici celles des marchés où NLH est présente.
· Ontario = 30 minutes[319]
· Nouveau-Brunswick = 30 minutes[320]
· New York = 45 minutes[321]
· Nouvelle-Angleterre = 60 minutes[322]
· Nouvelle-Écosse = 30 minutes[323]
· P.J.M. = 60 minutes[324]
[571] En mars 2012, H.Q. entretenant certains doutes, adresse à CF(L)Co une demande d’information portant sur le Rappel de 300 MW notamment pour s’informer si une quantité supérieure à cette limite aurait été vendue à NLH[325].
[572] Divers échanges auront lieu suite à cette lettre, notamment avec Monsieur Cyril Penton de Nalcor, malheureusement, ceux-ci n’aboutiront pas et H.Q. n’obtiendra pas directement l’information requise que ce soit de CF(L)Co ou Nalcor.
[573] À la fin juillet 2012, par l’entremise d’OASIS, H.Q. réalise que NLH effectue des livraisons anormalement élevées[326].
[574] Diverses correspondances sont alors échangées entre H.Q. et CF(L)Co, notamment celle du 1er août 2012 de Monsieur Wiseman alors qu’il confirme la position de CF(L)Co qu’elle peut vendre de la puissance sous forme interruptible en autant que les demandes de H.Q. soient rencontrées.
[575] H.Q. pour étayer sa preuve de ventes par NLH au-delà des 300 MW du rappel a utilisé un document émanant de H.Q.T. soit le « Interchange Transaction System » lequel collige les livraisons effectuées par NLH sur ces marchés d’exportation[327].
[576] Précisons que la preuve révèle que NLH pour les transmissions de puissance et d’énergie au-delà de 265 MW utilise le service de H.Q.T. de classe « Non Ferme ».
[577] H.Q. a également produit une compilation des livraisons effectuées par CF(L)Co à NLH entre le 18 avril 2009 et le 29 novembre 2014[328]. Cette compilation a été remise à l’expert Johannes Pfeifenberger qui a établi qu’à au moins 37 occasions, CF(L)Co n’a pas été en mesure de respecter des demandes (amendées la plupart du temps) formulées par H.Q.[329]
[578] Monsieur Sansoucy a longuement témoigné quant à un des 37 événements à savoir celui du 8 juillet 2013 alors que H.Q. a vu son programme amputé pendant que CF(L)Co livrait 427 MW à NLH.
[579] Cela étant, Monsieur Sansoucy convient que le programme de H.Q. avait été modifié la veille du 8 juillet 2013 à 22 heures pour le faire passer de 2650 MW à 3200 MW[330].
[580] Le Tribunal reviendra sur la quantité de ventes interruptibles effectuées par CF(L)Co dans le prochain chapitre traitant des expertises.
[581] Avant de clore cet aspect de la preuve, il y a lieu de rappeler un fait et d’en établir un autre.
[582] La transmission des ventes interruptibles se fait par H.Q.T. sur le principe du « Wheel Through » ou transport de passage lequel se fait à la seconde près. Ainsi, la livraison le 8 juillet 2013 par NLH de 427 MW commence à une heure précise sur le réseau de H.Q.T. et au même moment H.Q.T. livre la même quantité de puissance et d’énergie à l’interconnexion concernée.
[583] Dans le cas du 8 juillet 2013, la livraison a effectivement été effectuée. Par contre, si en cours de livraison CF(L)Co pour une quelconque raison n’avait pas été en mesure de la poursuivre, elle aurait quand même continué, la puissance et l’énergie provenant dès lors non pas de CF(L)Co mais plutôt du réseau de H.Q.P.
[584] Voici comment Monsieur Clermont s’exprime à ce sujet :
« LA COUR :
Q. J’essaie de transposer avec le cas de NLH. Donc, si NLH doit fournir 53, un contrat à 53 mégawatts, pour une raison que j’ignore ce n’est que 48, il en manque cinq. Ça veut dire que vous devez, à cause que l’étiquette était faite pour 53, vous devez, à même la chambre de compensation - appelons-la la chambre de compensation - vous allez puiser dans les réserves du réseau de production pour aller donner les cinq ?
R. Oui.
Q. Bon, j’ai compris. »[331]
[585] La responsabilité pour semblable situation est prévue au tarif depuis 2012 au titre d’un service complémentaire connu sous le nom de « Service de compensation d’écart de réception » lequel prévoit à l’Annexe IV du tarif, les modalités d’application de ce service, notamment les frais pouvant être facturés[332].
[586] Monsieur Clermont apporte cependant un bémol à l’applicabilité de ce service en ce que, si plusieurs entités, transitent en même temps, H.Q.T. peut difficilement trouver le fautif pour ainsi le facturer. Voici comment il s’exprime à ce sujet :
« LA COUR :
Q. Sur LAB-HQT vous avez dit il y a seulement trois utilisateurs ?
R. Oui.
Q. NLH, Nalcor puis HQD ?
R. Oui.
Q. DCR ou HQP, c’est ça ?
R. Hum-hum.
Q. Et vous n’avez pas un rapport, le rapport qui est disponible à minuit le lendemain où vous voyez exactement ce qui a été programmé par chacun des utilisateurs ?
R. Oui, vous voyez donc ce qui a été programmé. Maintenant, en temps réel, vous avez mesuré ce qui a été …
Q. Ça, vous n’avez pas de données là-dessus ?
R. Oui, on a effectivement la mesure. Mais prenons pour acquis que la somme des trois programmes, des trois personnes, si j’additionne le programme de NLH, le programme de NEMC et le programme de HQP, disons que ça donnait 3000, je peux mesurer. Et si je mesure 2995, il y a cinq mégawatts qui étaient prévus, programmés, qui n’ont pas été livrés. Lequel des trois est responsable du cinq ?
Q. Ça, vous n’avez aucun moyen …
R. Aucun moyen objectif et vérifiable d’attribuer à un client qui est le responsable de l’écart. Et, donc, la Régie avait dit : « Dans le cas où vous n’arrivez pas par des moyens objectifs et mesurables à déterminer quel client, donc, à qui vous allez envoyer la facture, bien, le service ne pourra pas s’appliquer dans ces cas-là. »[333]
[587] Pour appuyer son point, Monsieur Clermont précise que H.Q. ne facture annuellement que quelque 50 000,00 $ à titre de frais d’écart de réception, sur des revenus totaux de 3,6 milliards.
[588] Quant à cet aspect, CF(L)Co rétorque qu’elle peut facilement fournir à H.Q. l’information pertinente pour déterminer qui serait responsable de « l’écart de réception ».
[589] Au printemps de 2015, alors que le présent dossier était mû devant les tribunaux, une modification fut apportée au GSTHQ notamment au niveau des étiquettes lui permettant de mettre en place un programme de puissance lequel fait en sorte d’éliminer toute possibilité par NLH de transiter sur les lignes de transmission pour les ventes interruptibles celle-ci étant limitée aux seuls 265 MW. Voici comment Monsieur Clermont explique cette décision :
« R. Non. Ce qui est arrivé, en fait, on va distinguer quelques périodes dans le temps, si vous permettez, puis je vais faire ça de façon très brève. Jusqu’à l’été 2014, HQD, ne faisait pas de programmes comme on en a parlé. Je l’ai abordé dans mon témoignage un peu plus tôt ce matin. Il se sont mis à en faire en 2014, où ils ont programmé l’énergie qui devait alimenter la charge locale. En mai de cette année, ils se sont mis à programmer également de la réserve qu’ils offraient au coordonnateur de la fiabilité. Qu’on la programme avec une étiquette de type puissance ou qu’on la programme avec un autre type d’étiquette, la réalité est que maintenant, vous avez raison, les programmes qui sont soumis par nos clients sont égaux aux réservations et font en sorte qu’il ne reste plus de capacité résiduelle. Mais ce n’est pas l’utilisation de l’étiquette proprement dite, c’est l’idée que les programmes totalisent la même chose que la capacité disponible. »[334]
[590] La preuve révèle que la réserve de puissance depuis mai 2015 est systématiquement puisée auprès de Churchill Falls. Pour justifier ce fait, Monsieur Paquet explique que pour la réserve de puissance, c’est le producteur soit H.Q.P. qui désigne les centrales d’où proviendra cette réserve. Voici ses mots exacts.
« Donc, je regarde où en priorité le producteur établit que je dois aller chercher de la production additionnelle pour satisfaire les besoins. Les étiquettes n’ont pas de lien à ce moment-là. Je regarde … et lui fixe ces priorités-là en fonction de ses propres intérêts. »[335]
[591] Notons qu’aucune preuve n’a été fournie par H.Q. quant à la période précédant mai 2015 quant à deux points précis.
A) Si dans les faits H.Q. appliquait sa politique de réserve, et si oui;
B) De quelles centrales provenait cette réserve avant mai 2015.
[592] Quoi qu'il en soit, le 1er décembre 2015, NLH ainsi que NEMC déposaient une plainte auprès de la Régie laquelle conclut entre autres :
« 121. The Complainants request that HWT act in compliance with its OATT and Guide. More precisely, they ask that HQT i) stop accepting and recognizing the standby capacity tags submitted by HQP, for itself or for the benefit of HQD, ii) allow and re-instate the assignment of PBNs, and iii) cease to curtail or refuse access to firm and non-firm transmission services over the LAB-HQT path and to prevent access to the neighbouring markets namely the NYISO market as it has been doing since May 26th, 2015. »[336]
[593] Quant à cette plainte, les parties conviennent que la Régie possède une juridiction exclusive et ce, à l’exclusion des tribunaux de droit commun.
[594] Abordons maintenant la question de l’interprétation donnée par CF(L)Co à la “Continuous Energy”.
[595] Mentionnons tout d’abord que la date à laquelle CF(L)Co aurait annoncé clairement sa position à H.Q. quant à l’interprétation du contrat renouvelé qu’elle privilégiait, a fait l’objet d’une preuve contradictoire.
[596] Ainsi, Monsieur Oral Burry alors qu’il était membre du comité d’exploitation a déposé une feuille contenant ses notes manuscrites d’une réunion tenue le 9 décembre 2008 aux bureaux de H.Q. à Montréal. Ces notes contiennent une mention qu’une discussion eut lieu entre les membres du comité quant à la notion de « Continuous Energy »[337].
[597] Monsieur Burry relate que ce point et la perception qu’avait CF(L)Co de l’allocation mensuelle que représente la « Continuous Energy » avaient été soulevés par Monsieur Andrew MacNeil. Il précise que Josée Chatel lui aurait indiqué que H.Q. n’avait pas la même perception du contrat renouvelé.
[598] Faisons maintenant un saut dans le temps pour arriver à 2012.
[599] Comme nous l’avons vu, le guide d’interconnexion prévoit une planification annuelle. Cela étant, H.Q. transmet également des plans quinquennaux.
[600] Le 4 juin 2012, H.Q. transmettait à CF(L)Co un plan quinquennal couvrant la période de juin 2012 à mai 2017[338].
[601] Le 7 juin 2012 s’est tenu une réunion du comité d’exploitation. Monsieur Sansoucy a participé à cette réunion. Le Tribunal reproduit un extrait des minutes de cette réunion lequel traduit les positions des parties à propos du contrat renouvelé :
« 3. Update on the Hydrology Report and Forecast
[ … ]
CF(L)Co stated that it does not agree with the forecasted monthly imports after August 2016. According to CF(L)Co’s interpretation of the Renewed Power Contract (effective from September 1st, 2016), CF(L)Co has to sell the Continuous Energy to Hydro-Québec and the Continuous Energy is defined as monthly fixed blocks of energy based on the Annual Energy Base effective during the renewed power contract period.
HQP will take a close look at this interpretation since in its opinion, there is no difference between the Power Contract and Renewed Power Contract regarding energy imports in terms of quantities. HQP mentioned that the Continuous Energy, which is based on the AEB, is a concept used mainly for billing purposes under the RPC. »[339]
[602] Ainsi, selon l’interprétation de CF(L)Co la quantité d’énergie disponible pour H.Q. à compter du 1er septembre 2016, est basée sur l’AEB final et répartie mensuellement plus ou moins également dépendant du nombre de jours dans le mois.
[603] CF(L)Co depuis juin 2012 n’a pas changé sa position d’où les présentes procédures.
[604] Évidemment, en raison de cette interprétation, le calcul de l’AEB peut avoir un impact pour les deux parties.
[605] Ainsi, plus le résultat est à la baisse par rapport à l’AEB initial, plus CF(L)Co dispose d’énergie et puissance destinées soit à la consommation locale soit à l’exportation. Évidemment, l’inverse est aussi vrai et H.Q. dispose de moins d’énergie.
[606] Nous avons vu que contractuellement, la révision de l’AEB s’effectuait pour la première fois après huit ans d’exploitation et par la suite à tous les quatre (4) ans.
[607] Le contrat renouvelé ne prévoit pas d’ajustement de l’AEB, donc le dernier ajustement revêt une importance capitale pour les parties, notamment en raison de l’interprétation que donne CF(L)Co au contrat renouvelé.
[608] Le 27 juin 2013, Monsieur Jean Matte écrivait à Monsieur MacIssac[340] pour lui faire part de son désaccord avec le calcul proposé par Monsieur Wiseman établissant l’AEB à 28.79 TWH puisque selon lui, le calcul devait être fait en appliquant strictement les dispositions de l’article 9.2 du contrat principal.
[609] Cela étant, Monsieur Sansoucy dans son témoignage admet que les calculs précédents avaient été faits selon la méthode mise de l’avant par CF(L)Co. Voici comment il explique cette situation.
« R. Alors, on a voulu appliquer le 9.2 parce que c’était la méthode qui reflétait le mieux l’expérience cumulée depuis le « effective date », à notre avis, et la méthode qui avait été utilisée par les parties précédemment était plus ou moins applicable depuis le rappel complet du « Recapture » par CF(L)Co. »[341]
[610] Monsieur Sansoucy résume l’application de l’article 9.2 du contrat principal à l’aide de la pièce HQ-DEM-13/19.
[611] Monsieur Sansoucy démontre également les propositions de CF(L)Co et H.Q. quant à l’ajustement de l’AEB à l’aide du graphique produit sous HQ-DEM-14.
[612] Essentiellement, la différence entre les deux calculs est le fait pour CF(L)Co de soustraire le rappel de 300 MW du calcul et pour H.Q. au contraire de l’inclure[342].
[613] Cela étant, et suite à une question en ce sens du Tribunal, les parties ont convenu que la méthode de calcul de l’AEB final, que ce soit selon celle préconisée par H.Q. ou par CF(L)Co ne constitue pas une des questions à être tranchée par le Tribunal[343].
[614] Monsieur Edmund Martin, président et chef de l’exploitation de CF(L)Co et LNH depuis le 22 juillet 2005 a témoigné hors Cour et in facie, il apporte un éclairage utile sur la séquence des événements tant qu’à l’interprétation du contrat renouvelé que pour les ventes interruptibles.
[615] Précisons par ailleurs que Monsieur Martin tout comme son vis-à-vis à une certaine époque Monsieur Vandal ont livré des témoignages remarquables exposant leur vision des sujets en litige. Bien qu’à certaines occasions, ceux-ci s’approchaient plus de la plaidoirie, que d’un exposé de faits, il n’en demeure pas moins que leur témoignage s’est avéré fort utile au Tribunal.
[616] Ainsi, dès son arrivée en 2005 au sein de CF(L)Co et NLH, Monsieur Martin est impliqué dans l’élaboration du plan énergétique développé par la province de Terre-Neuve en 2007 intitulé « Focusing our Energy ». La mise en application de ce plan entraînera la création de Nalcor Energy.
[617] Monsieur Martin expose que dès son entrée en poste, il a cherché à identifier des sources de revenus supplémentaires, nécessaires selon lui, pour assurer la pérennité des installations de CF(L)Co.
[618] En 2009, survient un événement marquant.
[619] Le 10 novembre 2009, Nalcor et CF(L)Co déposaient auprès du « Public Utility Board » de Terre-Neuve ou PUB une demande en vue d’établir les droits de Nalcor et CF(L)Co quant au développement du fleuve Churchill[344].
[620] Dans les pièces soumises en support de cette demande se trouve l’interprétation que font Nalcor et CF(L)Co de la puissance et énergie disponibles à H.Q. en vertu du contrat renouvelé :
« As a result, HQ will be entitled to essentially equal amounts of energy during each month after renewal. However, HQ will remain entitled to schedule the hourly deliveries of its monthly entitlement of Continuous Energy at any time during the month. »[345]
[621] Monsieur Martin précise également qu’en vertu de l’interprétation du contrat renouvelé par CF(L)Co, H.Q. perd tout contrôle sur les réservoirs, ceux-ci étant assumés par CF(L)Co[346].
[622] Du même souffle, il précise ce qui suit :
« A. Well, to the extent that a party controls the Reservoir and that introduces risk in fulfilling terms of a contract, then the party controlling the Reservoir should generally, you know, bear the implications of that. »[347]
[623] Dans son interprétation du contrat renouvelé, Monsieur Martin convient que si pour une raison quelconque, tel le manque d’eau dans les réservoirs, CF(L)Co n’était pas en mesure de fournir l’énergie et la puissance prévues mensuellement, H.Q. aurait quand même l’obligation de payer cette énergie et puissance non livrées.
[624] Par ailleurs quant à l’hydrologie, il convient d’aborder le projet de Muskrat Falls qui comme nous l’avons vu est dans les cartons de la province de Terre-Neuve depuis des années.
[625] Ce projet est en voie de réalisation. Parallèlement, une ligne de transmission de Churchill Falls à Muskrat Falls ainsi qu’une ligne de transmission sous-marine reliera à compter de 2017 le Labrador à l’Ile de Terre-Neuve. Celle-ci sera également reliée par voie sous-marine à la Nouvelle-Écosse et à partir de là rejoindra le Nouveau-Brunswick par voie terrestre pour finalement se raccorder au marché de la Nouvelle-Angleterre[348].
[626] Monsieur Martin précise que pour avoir accès au marché américain et en raison d’organisations telles que NERC et NPCC, le bras énergétique de Terre-Neuve est à reconfigurer l’aspect technique de son système électrique de même que pour la province, son cadre législatif.
[627] Bref, Muskrat Falls constitue un projet important pour le développement énergétique de la province de Terre-Neuve tant pour sa consommation locale que pour l’exportation.
[628] Précisons que la Centrale de Muskrat Falls située dans le Bas Churchill est également alimentée par le Fleuve Churchill. Ainsi l’opération de la Centrale de Churchill Falls située dans le Haut Churchill notamment quant à ses réservoirs peut avoir un impact sur la ou les centrales situées dans le Bas Churchill dont Muskrat Falls.
[629] La nature de cet impact et quelle entité en bénéficierait a fait l’objet d’un échange musclé entre les avocats de H.Q. et Monsieur Martin lors de l’interrogatoire hors Cour du 5 février 2015[349].
[630] En effet, l’une des prétentions de H.Q. ou plutôt un des scénarios mis de l’avant par celle-ci est qu’il est possible qu’à l’occasion d’une faible année d’apports d’eau, CF(L)Co ne soit pas en mesure de rencontrer ce qu’elle définit comme « Continuous Energy » et ce, même en période estivale alors que le paiement par H.Q. est garanti. De là, le scénario voulant que CF(L)Co puisse vouloir avantager l’apport en eau de la Centrale de Muskrat Falls au détriment de H.Q.
[631] Voici donc la réponse de Monsieur Martin au terme de cet échange :
« THE WITNESS :
So, it’s similar, you know, it provides certainty of one of the inputs to management of the river. So, the Newfoundland and Labrador legislation ensures that all operators on the river, any river in the province, are instructed to work together to maximize the value of the river, within the confines of existing arrangements. So, to the extent that there is certainty from one of the inputs in that river, certainty has value. »[350]
[632] Plus loin dans cet interrogatoire et se référant à un document intitulé : « Nalcor Energy 2014 Annual General Meeting Questions and Answers »[351], survient l’échange suivant :
« A. And the question is again ? I’m sorry.
Q.808 I’m asking you to confirm that the sentence I am reading means that in order for Muskrat Falls to achieve its full potential of producing the measures that are here, you have projected the seasonal pattern of demands of Hydro-Québec under the original 1969 Contract ?
A. That’s correct.
Q.809 And if the Renewal Contract means what you say it means, then more confidence will be derived in Nalcor’s water management arrangements ? That’s what this means, correct ?
[…]
Q.810 Well, they’re your statements and they come one after the other. So, I’m assuming that they have some link.
A. Well, you shouldn’t assume that, that’s what I’m telling you. There’s two statements there and you’re making a direct link that I don’t see. It’s two statements. One is that there’s, as you mentioned, the full potential of producing the 824 and the 4.9 if Hydro-Québec continued, if that sequence was continued, the seasonal pattern of demands of the first 40 years. So, that’s a statement that the full potential of producing the 824 and 4.9 would be there. End of sentence. I went on here, it says :
« The language of the Renewal Contract for the last 25 years of the Churchill Falls contract, with respect to the demands which Hydro-Quebec can make upon CF(L)Co, is more advantageous, compared with the original 1969 Contract and inspires confidence in Nalcor’s water management arrangements. »
I’ve already indicated that certainty is the value that I’m referring to there in terms of the flow in the river.
Q.811 And your position, as I understand it, is that there is more certainty under your interpretation of the Renewed Power Contract than there was during the first 40 years, correct ?
A. That’s correct. »[352]
( Nos soulignés )
[633] Ce qu’il faut retenir de cet échange est que bien que la Centrale Muskrat Falls puisse rencontrer ses objectifs de production si les réservoirs ou encore le Fleuve Churchill sont exploités de la même façon que les 40 dernières années, Monsieur Martin est d’avis que l’application de l’interprétation du contrat renouvelé garantirait jusqu’à un certain point (dépendant des apports évidemment) une stabilité dans la production de Muskrat Falls.
[634] Passons maintenant aux ventes interruptibles.
[635] En 2011, Monsieur Martin est informé par deux dirigeants de NLH, Messieurs Kieley et Jones, de la possibilité de faire des ventes interruptibles à même la portion inutilisée par H.Q. Cela étant, il admet avoir été mis au courant qu’il y avait eu des livraisons d’électricité par ventes interruptibles depuis 2009.
[636] Monsieur Martin définit les ventes interruptibles en trois tranches. Voici un extrait de son témoignage :
« A. When I look at the contracted amounts of capacity are in three tranches : one contracted amount of capacity is with recapture, one contracted amount is with what we call TwinCo Block, and one tranche is a tranche that is contracted to Hydro-Québec. So, the interruptible arrangements are, you know, linked to the Hydro-Québec Block. And in the Hydro-Québec Block, in the Power contract, in the Renewed Contract, the contracted right to Hydro-Québec is to request capacity and we will provide it. And we do, and we will. If they don’t request it, Hydro-Québec doesn’t request it, therefore, it’s not Hydro-Québec’s contracted right to have it. It’s available. It’s a product that is there for the moment in time, if we don’t use it, it’s gone. [ … ] »[353]
( Nos soulignés )
[637] Fait à noter, quant aux ventes interruptibles pour les années 2013-2014, le revenu que procurent celles-ci est partagé entre NLH qui les commercialise et CF(L)Co qui produit l’énergie, dans la proportion approximative suivante :
CF(L)Co = 8,5 %
NLH = 92,5 %
[638] Monsieur Martin justifie cet écart en raison de l’indemnité qu’a consenti le 1er mai 2012 NLH à CF(L)Co en regard de tous recours que pourrait avoir H.Q.[354], et visant à contester la légalité de ces ventes.
[639] Le Tribunal traitera ce chapitre en deux sections. Soit les expertises traitant de l’interprétation de Continuous Energy et celles traitant des ventes interruptibles.
CONTINUOUS ENERGY
CF(L)Co |
- |
Expert Witness Report on Industry Practises in Power Contracts as pertaining to the dispute between Hydro-Québec and CF(L)Co. Par Robert Kendall[355]. |
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- |
Continuous Energy : an overview of Contemporaneous Industry context. Par Tanya Bodell[356]. |
H.Q. |
- |
An Economic and Financial Analysis of the Renewed Power Contract between Hydro-Québec and Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited. Par Carlos Lapuerta[357]. |
VENTES INTERRUPTIBLES
CF(L)Co |
- |
Interruptible Power and overview of industry context and CF(L)Co’s ability to sell. Par Tanya Bodell[358] |
H.Q. |
- |
CF(L)Co’s Sales of “Interruptible” Power. Par Johannes P. Pfeifenberger[359] |
[640] Suite à des voir-dire sur les qualifications d’expert de Madame Bodell, Messieurs Kendall, Lapuerta et Pfeifenberger, le Tribunal a sur-le-champ qualifié Messieurs Lapuerta et Pfeifenberger à titre d’expert mais a réservé sa décision quant à Madame Bodell[360] et Monsieur Kendall.
[641] Il y a donc lieu de traiter la question de qualification dès maintenant.
[642] Un survol des critères que nos tribunaux requièrent des experts s’impose dans les circonstances. Le Tribunal les résume ainsi.
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- |
Connaissance du domaine d’expertise |
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- |
Impartialité - objectivité |
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- |
Crédibilité |
CONNAISSANCE DU DOMAINE D’EXPERTISE
[643] Il s’agit là d’une vérité de La Palice. Cela étant, la connaissance du domaine d’expertise ne se mesure pas par le nombre de diplômes, ainsi une connaissance approfondie d’un domaine particulier peut conférer à son détenteur la qualité d’expert et ce, même s’il n’est pas bardé de nombreux diplômes.
[644] Le contraire est aussi vrai, un expert peut avoir une vaste connaissance d’une sphère d’activité donnée sans avoir une connaissance pointue de certains éléments constituant cette sphère. Ainsi, à titre d’exemple, un expert en commerce électronique ne sera pas nécessairement, ni automatiquement, un expert en informatique.
[645] Bref, l’expert devra établir avoir des connaissances approfondies sur le ou les sujets faisant l’objet de son rapport.
IMPARTIALITÉ - OBJECTIVITÉ
[646] L’impartialité ou encore l’objectivité fonde son assise sur le devoir qu’a l’expert d’éclairer le Tribunal et non pas d’agir comme un avocat plaidant la cause de son client.
[647] L’impartialité est malheureusement une qualité que semblent occulter bon nombre d’experts. Cette impartialité se manifeste, entre autres, lorsque l’expert n’hésite pas à dévoiler tous les faits, même si certains d’entre eux, n’épousent pas nécessairement la position de leur commettant.
[648] L’impartialité ou encore le manque de celle-ci peut également se mesurer à l’aune de la distanciation de l’expert par rapport à son commettant.
[649] Voici un passage d’une décision du juge André Roy, lequel reprenait à son compte certains commentaires du juge Crête dans l’affaire Fortin c. Compagnie d’assurance Wellington, CS Montréal, no 500-05-024245-969, 7 mars 2000.
« [75] Traitant du rôle et de la nécessaire objectivité d’un expert, le juge Crête écrivait :
« Le rôle d’un expert, même payé par l’une des deux parties, est d’aider le tribunal à mieux comprendre le caractère technique d’un problème et non pas de défendre, coûte que coûte, la thèse de celui qui retient ses services. L’expert doit garder le détachement et l’objectivité qui, en dernière analyse, rendront sa position défendable, crédible et convaincante.
[…]
… Contrairement à ce qu’il semble penser, le rôle d’un expert n’est pas de défendre la thèse de celui qui retient ses services, de « travailler pour la victime ».
L’expert doit faire preuve d’objectivité et de désintéressement.
L’expert doit être impartial. Son rôle est d’éclairer le tribunal et non d’être l’avocat d’une partie.
Un expert éclaire le tribunal sur ses constatations, les hypothèses plausibles et les conclusions qu’on devrait en tirer. Il ne peut pas feindre d’ignorer ou de faire des faits pertinents au débat, sous prétexte que cela pourrait « fausser son jugement » ou l’amener à une conclusion qui risquerait d’être défavorable à la partie qui a retenu ses services. Bref, l’expert ne doit jamais être inféodé à son client. »[361]
(Références omises)
CRÉDIBILITÉ
[650] La crédibilité d’un témoin expert s’apprécie à deux niveaux soit à l’occasion de son témoignage devant la Cour ainsi que dans le cadre de la préparation de son rapport.
[651] Lors de son témoignage, le Tribunal pourra apprécier la crédibilité de l’expert en fonction de son comportement, de ses réponses, son cheminement intellectuel et la vraisemblance de ses propos.
[652] Cela étant, tout aussi important pour la crédibilité de l’expert, tient dans le fond et la forme de son rapport.
[653] À ce titre, le Tribunal tiendra compte du sérieux de la démarche de l’expert dans la cueillette de données, du lien de celles-ci avec son opinion et finalement de l’impartialité démontrée dans son rapport[362].
[654] Appliquons ces principes à la situation de Monsieur Kendall et Madame Bodell.
MONSIEUR ROBERT KENDALL
[655] Voici les champs d’expertise auxquels CF(L)Co demandait que soit reconnu Monsieur Kendall[363].
Mr. Robert Kendall is an expert on electric utility industry practice in the context of power contracts, including commercial arrangements undertaken in the electricity industry for both regulated and competitive markets. His expertise includes the administration, development, evaluation and the negotiation of power contracts for the purchase and sale of electricity products, and for transmission services.[364] |
[656] La situation de Monsieur Kendall et son rapport est problématique à plusieurs niveaux.
[657] La première source de préoccupation du Tribunal réside dans le fait que Monsieur Kendall, ingénieur de formation, a complété des études en droit pendant sa carrière laquelle s’est déroulée presque essentiellement de 1968 à 1998 en Californie à savoir pour le compte de la « Southern California Edison ». Par la suite, Monsieur Kendall est devenu consultant.
[658] Il a été établi que Monsieur Kendall a effectivement géré et négocié des contrats de vente/achat d’électricité principalement pour la région de Los Angeles, Californie. Or, dans cette région, la seule centrale possédant un réservoir qui pourrait s’apparenter aux centrales québécoises ou celle de Churchill Falls est celle du Hoover Dam, dont la construction fut financée par l’état fédéral américain. C’est donc dire que le contexte est fort différent de la situation sous étude. Par ailleurs, il est également utile de noter que seulement 5,5 % de l’électricité consommée en Californie provient de l’hydroélectricité[365].
[659] Cela étant, le Tribunal était prêt à considérer tout comme Madame Bodell, certains pans de son expertise, mais malheureusement le fond et la forme de son rapport ont affecté irrémédiablement sa crédibilité.
[660] Ainsi, Monsieur Kendall, contrairement à la coutume n’a pas joint à son rapport la liste des documents consultés mais a plutôt choisi de faire l’affirmation générale suivante que le Tribunal reproduit.
« C. Documents Reviewed
15. The findings and opinions contained in this report are based on a review of the Contracts, other relevant contracts such as the Letter of Intent and the GWAC, the pleadings in the litigation and the exhibits appended thereto, the documents communicated by the parties pursuant to the pre-discovery and discovery process, the hydropower-based power purchase agreements from a number of utilities discussed herein, documents and information on the Hydro-Québec Web site, reliability rules for Québec and neighboring provinces and states, decisions in previous litigations related to the Power Contract and records of production of the Plant. In addition, I toured the Plant in May 2015 and had the opportunity to talk with the Plant operating personnel. »[366]
[661] Cette absence de liste a donné lieu à l’échange suivant intervenu dès le début de son contre-interrogatoire.
« Q. And could you tell us what they were ?
A. These were documents that were generally related to the drafts of the various contracts, the LOI or the Power Contract. So these might have been letters, memos, board minutes, things of that nature that really related to items in these draft contracts.
Q. Does that list, Mr. Kendall, include memoranda ?
A. I’m not sure how you’re defining memoranda.
Q. Well, internal CF(L)Co or Brinco memo, for example, relating to the exchange of drafts ?
A. There were some internal documents, yes, that were part of that, that related to again contract drafts. I think the common thread was the documents related to drafts of these various contracts.
Q. I’m going to ask you, sir, and to my colleagues, if you could provide us with a list and copies of documents that you reviewed for the purposes of your report which have not been disclosed to the Plaintiff in the discovery process. »[367]
( Nos soulignés )
[662] De fait, ce n’est qu’à la deuxième journée de son témoignage que Monsieur Kendall a produit une liste des documents[368] qu’il aurait consultés en vue de la préparation de son rapport.
[663] Par ailleurs, dans le cadre de son contre-interrogatoire, il n’a pu répondre à un certain nombre de questions faute d’avoir consulté le document sur lequel reposait la question :
« Q. Mr. Kendall, can you tell us if you can recall any particular documents that you reviewed which related to the negotiation of the Renewed Power Contract, not the earlier ones, but the ones … any documents relating to that period of time when the terms of the Renewed Contract were being discussed between the parties ?
A. There were very few documents that related to that. For example, there was a Board … I think it’s an exhibit in this case, so …
Q. I think you’re referring to Exhibit P-8, the Joint Executive Committee meeting ?
A. I believe that’s correct, yes.
Q. Okay.
A. There may have been … I believe there were maybe a couple of other documents related to the renewal.
Q. Can you recall what they were ?
A. No, I can’t, standing here right now.
Q. Perhaps tomorrow we’ll see if they are in your list.
Did you review the engineering report which was prepared by Acres Canadian Bechtel and of which we have seen some of the plates date from December 1967 ?
A. I did look at that report. I didn’t study it, but I have seen it, and I did a cursory read of it.
Q. And was that cursory read something you did before you signed your report ?
A. I’m not sure of the timing.
Q. So, it could have been something that you looked at …
A. It could have been … »[369]
( Nos soulignés )
[664] Aussi, et peut-être en raison de sa formation juridique, il lui arrive de dépasser le cadre de son mandat qu’il établit de la façon suivante.
« 11. I was asked by Stikeman Elliott LLP to provide an independent review and assessment, in light of my experience and knowledge of electric utility industry practices, including my experience related to power contract matters, of some of the issues in dispute between Hydro-Québec and CF(L)Co concerning the May 12, 1969 Power Contract between Hydro-Québec and CF(L)Co (the « Power Contract »), Schedule III of the Power Contract (The « Renewal Contract », and collectively the « Contract » (…) »
[665] Ainsi, au paragraphe 13 de son rapport, il porte le jugement suivant :
« Hydro-Québec’s interpretation, on the contrary, is in my view, incompatible with the terms of the Contracts and industry practices and the documents described in Paragraph 15 of this report. »[370]
( Nos soulignés )
[666] Inutile de préciser que l’interprétation des termes d’un contrat, à l’occasion d’un débat contradictoire sur ceux-ci, est uniquement l’apanage du Tribunal.
[667] La même constatation vaut pour les conclusions de Monsieur Kendall quant à l’absence dans le contrat renouvelé de l’équivalent de l’article 6.2 du contrat principal, alors que Monsieur Kendall pose un jugement en se justifiant des « Industry Practices ». Voici l’échange en cause :
« Q. So, you’re interpreting the contract, are you not ?
A. I’m looking at the … what was done in the Contract, what was taken out, what was added in and applying industry practice to that, to come up with my conclusions that I had. I’m not trying to interpret the Contract, that’s up to the Court to do.
Q. Well, let’s pause on that statement, Mr. Kendall. You’ve mentioned 6.2 a number of times today. And you say what you’re doing is not interpreting the Contract because you’re infusing industry practice into your analysis. Where do you see industry practice coming into play and what you’ve just told the court with regard to 6.2 ?
A. The fact that it was removed and that a provision like 6.2 is interpreted in the industry practice as providing virtually complete operating flexibility to the buyer. And the removal of that, I’m trying to give meaning in the industry to why, in the industry, would we remove a provision like that if it wasn’t to signal, to provide that there’s less operational flexibility ? »[371]
[668] Clairement, le fait d’abandonner une clause du Contrat principal dans le Contrat renouvelé, ne peut être interprété comme le fait Monsieur Kendall en rapport avec les « Industry Practice ».
[669] Ces deux exemples sont révélateurs du manque d’objectivité de Monsieur Kendall.
[670] Monsieur Kendall dans son rapport produit moult contrats principalement dans le marché du sud-ouest américain qui selon lui seraient conséquents avec l’interprétation de CF(L)Co quant au concept de « Continuous Energy » dans un contexte de Blocs mensuels d’énergie. Cela étant, à son rapport, il omet de signaler un fait important. Encore une fois, le Tribunal reproduit l’échange :
« A. It’s different. I wouldn’t say it’s totally different, no. You can have annual blocks, you can have monthly blocks like we have here. So they can be in different timeframes.
Q. Yes, but you’ve not found a single contract with equal fixed monthly blocks of energy 12 months of the year, have you ?
A. No, I have not. »[372]
[671] Dans son rapport, Monsieur Kendall, critique partie du rapport de Monsieur Lapuerta qui rappelons-le est basé sur des principes économiques, en citant un extrait d’un site internet, traitant du sujet « Economic efficiency » pour discréditer cet aspect du rapport Lapuerta alors qu’il ne s’agit pas de son champ d’expertise[373].
[672] Pour terminer l’ensemble de l’œuvre, Monsieur Kendall au paragraphe 54 de son rapport établit les pratiques contractuelles en matière de contrat d’électricité en cinq (5) catégories, celles-ci se voulant des chapitres de son rapport. Or, le Tribunal a eu du mal à se référer à ces chapitres puisque les titres de ceux-ci dans le corps du rapport sont sensiblement différents de la nomenclature apparaissant audit paragraphe 54.
[673] Ainsi, la cinquième catégorie au paragraphe 54 est identifiée de la façon suivante :
« v) using generations resources to match the buyer’s system needs. »
Or, le chapitre correspondant dans le rapport est intitulé :
« Use of the Plant as a base Load Plant. »
et n’est constitué que de quatre (4) paragraphes lesquels occultent totalement le désir depuis 1960, ainsi que l’intégration dans les faits par H.Q. de la production de la Centrale de Churchill Falls à l’ensembe de son réseau.
[674] Le Tribunal considère qu’il s’agit d’une omission majeure avec pour unique but de supporter la position de CF(L)Co.
[675] Le Tribunal conclut qu’en dépit d’une expertise certaine de Monsieur Kendall dans les contrats visant la vente/achat d’électricité, la facture de son rapport démontre un manque de d’impartialité et d’objectivité le tout entachant irrémédiablement sa crédibilité.
MADAME TANYA BODELL
[676] Quant à celle-ci, voici les champs d’expertise auxquels CF(L)Co désirait que soit reconnue Madame Bodell.
Ms. Tanya Bodel is an expert on commercial arrangements undertaken in the electricity industry for both regulated and competitive markets, as well as an expert on the design of wholesale and retail energy markets and rules surrounding these markets. Her expertise includes assessments of said markets, as well as the evaluation of financial and physical energy transactions, transmission and distribution assets and the analysis of power purchase and sale agreements[374]. |
[677] Madame Bodell au début de son rapport sur le « Continuous Energy » établit son mandat en deux volets, ce sont les suivants :
« a) Provide an analysis of the custom and usage of the term "continuous energy” contemporaneous to the negotiation and signing of the Power Contract and the Renewal Contract1 (together referred to as “the Contracts”) between Churchill Falls (Labrador) Corporation (CF(L)Co) and Québec Hydro-electric Commission (“Hydro-Québec”); and
b) Examine the underpinnings of the Annual Energy Base, which is the basis for Continuous Energy as defined in the Renewal Contract, to understand how it relates to industry context and the intent of the parties regarding the interpretation of Continuous Energy. »[375]
( Références omises )
[678] Les réserves qu’entretenait le Tribunal quant à Madame tiennent au fait qu’elle se livre à certaines analyses dans son rapport notamment quant au deuxième volet qui selon le Tribunal, devraient plutôt être l’œuvre d’un ingénieur et non pas la détentrice d’une maîtrise en administration des affaires et ce, même si son expérience professionnelle a toujours gravité dans le secteur énergétique.
[679] Lorsque Madame Bodell « examine the underpinnings of the Annual Energy Base … to understand how it relates to industry context … » elle s’aventure dans un terrain tout à fait inconnu pour deux raisons :
1) |
L’interprétation de la façon de calculer l’AEB relève du Tribunal puisque prévu contractuellement à l’article IX du Contrat principal. |
2) |
Les tenants et aboutissants de l’établissement de l’AEB initial, lequel constituait en quelque sorte la base de ce calcul est le résultat de l’application de divers principes physiques et mathématiques par des ingénieurs qualifiés. Ainsi, Madame Bodell n’a pas les qualifications requises pour interpréter l’application de ces principes par les ingénieurs, pour arriver à l’opinion que ceux-ci ont toujours considérés qu’il y aurait de l’énergie excédentaire. |
[680] Si son champ d’expertise lui permet d’émettre une opinion sur les pratiques quant à l’utilisation du terme « Continuous Energy » depuis les années 60, le Tribunal estime que la portion décrite au paragraphe 5 b) ne relève pas de son champ d’expertise.
[681] En conséquence de ce qui précède, le Tribunal, tiendra compte du rapport de Madame Bodell uniquement quant au premier volet, soit celui traitant de l’utilisation de l’expression « Continuous Energy » à une époque contemporaine à la signature du Contrat principal.
[682] Abordons maintenant les expertises.
[683] Madame Bodell procède en deux étapes. La première visant à démontrer ce qu’est le concept « Continuous Energy » et depuis quand il a cours. La deuxième visant à faire le lien entre ce concept et l’ « Annual Energy Base ».
[684] L’essentiel du rapport de Madame Bodell vise à démontrer que le concept de « Firm Energy » équivaut à ce que CF(L)Co interprète comme étant le « Continuous Energy » et que dès lors l’énergie produite au-delà de la « Firm Energy » devient de « l’Excess Energy » non prévue au contrat renouvelé.
[685] Pour en arriver à cette démonstration, elle établit un lien entre des caractéristiques de divers produits électriques utilisés au fil du temps que ce soit dans des contrats, des études et des livres, pour en arriver à la conclusion que la « Continuous Energy » est en fait de la « Firm Energy ».
[686] Son interprétation va beaucoup plus loin puisqu’une fois qu’elle a établi le parallèle entre « Firm Energy » et « Continuous Energy », elle affirme que les discussions ayant eu cours entre H.Q. et CF(L)Co quant à différents produits non nécessairement identifiés comme « Firm Energy » mais qui pourraient s’apparenter à celle-ci, fait en sorte, selon elle, d’avaliser le fait que le concept de « Continuous Energy » en soit un qui ait eu cours à compter des années 60. Le Tribunal reproduit certains paragraphes de son rapport lesquels illustrent son raisonnement :
« 51. Both « continuous energy » and « excess energy » are concepts used in the industry at the time of the drafting of the contract and were known to the negotiators, preparers, and signers of the contractual arrangements surrounding Churchill Falls.
54. Documents and minutes from meetings taking place in the early 1960’s indicate early introduction of the concept of continuous energy by CF(L)Co and Hydro-Québec during negotiations.
55. Initially, the parties defined three different types of energy products that could be produced from the hydroelecric facility : "Guaranteed Energy” (later termed “Assured Energy”), “Probable Additional Energy” and “Excess Energy. »[376]
( Références omises )
[687] Cela étant, elle précise cependant ce qui suit :
« 11. Although these products may have different names from one contract to the next and within contemporaneous documents, the concept of firm versus nonfirm energy and firm versus nonfirm power generally holds (see Appendix C).
( … )
17. Many of the terms or definitions from one discipline would be used in the context of another to the point where there were a number of different names for what effectively was the same type of electricity product. Differences in terminology between power contracts continue today. Thus, terms related to economic concepts such as firm or nonfirm products could end up in engineering textbooks, and an engineering term such as primary, secondary or continuous energy may appear in a commercial contract. »[377]
( Références omises )
[688] Ainsi à titre d’exemple, elle cite un extrait de ce qu’elle qualifie de rapport mais en en fait tiré d’un livre datant de 1960 intitulé « Energy in the Americain Economy, 1850-1975 its history and prospects » sans préciser que cette citation s’appliquait à des centrales dites au fil de l’eau. En voici le texte :
« … there is at any site a minimum flow below which the stream normally can be expected not to fall. The power capability that this flow and the available head represent is termed the “continuous power” or “prime power” that can or could be produced at that site. The principal function of a storage reservoir for power purposes is usually to increase the minimum flow, hence the continuous power level. »[378]
[689] Toutefois, il est intéressant de noter qu’immédiatement après cette citation, le même volume aborde le sujet suivant « Terminology of Hydropower Resources » et dans lequel les auteurs y vont de l’affirmation suivante :
« The rationale and methodology of estimating hydropower resources have received a good deal of attention in recent years, especially under the aegis of the World Power Conference. Interest has been stimulated in improving and standardizing concepts and measurement techniques. As a result, there is currently coming into acceptance outside the United States a standard terminology in defining and measuring hydropower resources.3 The reason for the lack of enthusiasm for the subject in the United States does not appear in the literature but is obviously related to the difference of its energy position from that of most other countries. »[379]
( Références omises )
( Nos soulignés )
[690] Ainsi, les mêmes auteurs cités par Madame Bodell soulignent l’émergence en 1960 d’une standardisation des concepts et instruments de mesure dans le domaine de l’hydroélectricité. Bref, nous sommes loin d’un usage reconnu et constant.
[691] Ainsi, à l’aide de son analyse elle en vient à la conclusion suivante.
« 36. Although the term “continuous energy” is not used as an explicit term in the contracts I have reviewed, energy that is [sic] can be made continuously available is equated to “firm energy” and “primary energy.” In contrast, “nonfirm energy,” “secondary energy” and “interruptible energy” are equated with excess energy, consistent with industry phraseology and language of the parties negotiating the Letter of Intent, Power Contract and Renewal Contract, as described in the next section. »[380]
[692] La phraséologie à laquelle se réfère Madame Bodell au paragraphe 36 de son rapport se révèle de projets ou contrats dans lesquels sont abordés les concepts de « Firm and Secondary Energy »[381] et un troisième (3) dans lequel on parle plutôt de « Basic Energy » et « Additional Energy »[382]
[693] Par ailleurs, dans le cadre de son contre-interrogatoire, Madame Bodell convient que les deux manuels de génie électrique qu’elle a consultés en vue de la préparation de son rapport n’utilisent pas l’expression « Continuous Energy » comme telle, laquelle est le fruit de son interprétation. En voici l’extrait :
« A. It is correct that the hydroelectric engineering textbooks that we looked for and found do not use the term “continuous energy” in a defined format. However, there was another important aspect of those hydroelectric engineering textbooks which was helpful to us in understanding how the parties may have been using these terms. And that was the fact that primary energy, which is defined as a block of energy, can be increased with reservoir storage. And when looking at the Clinch and McParland calculations, it was very helpful to note that that was a similar calculation that they had made. »[383]
[694] Le même constat vaut pour le paragraphe 21 de son rapport lorsqu’elle indique « … and continuous energy was defined as the amount of energy available at minimum hydrological conditions ». Voici l’extrait pertinent :
« Q. Where was it defined ?
A. I see.
Q. Where do we find that definition in the textbooks, Ms. Bodell ?
A. That is not defined in the textbooks. »[384]
[695] Force est de constater, qu’encore une fois l’utilisation de l’expression « was defined » est incorrecte, puisqu’il s’agit là de son interprétation.
[696] Par ailleurs, Madame Bodell convient que le « Glossary of Electric Utility terms », transmis par Monsieur McParland à Monsieur Hobson de CF(L)Co le 14 novembre 1963[385] ne contient pas de définition de « Continuous Energy »[386].
[697] Le Tribunal retient de cette partie du rapport Bodell traitant d’auteurs et autres contrats que celle-ci fait un lien entre différents produits électriques pour établir son opinion que « Firm Energy » équivaut à « Continuous Energy ». Par ailleurs, il ressort que le terme « Continuous Energy » n’était ni utilisé ni défini par ces auteurs ou contrats.
[698] Par la suite, Madame Bodell s’attaque aux rapports d’ingénierie préparés dans le cadre du projet de Churchill Falls pour soutenir sa thèse.
[699] Toujours pour établir le lien entre "Continuous Energy" et "Firm Energy", Madame Bodell procède à une analyse approfondie du rapport de l’ingénieur Clinch de la firme Acres préparé en 1964[387].
[700] Pour les fins de cette analyse, Madame Bodell y va d’un tableau dans lequel elle attribue à Monsieur Clinch des définitions de classe d’énergie soit « Firm Energy », « Additionnal Firm Energy » et « Excess Energy »[388]. Or, celles-ci présentées, comme verbatim ne le sont pas en réalité.
[701] Grâce à ce tableau, Madame Bodell conclut que le « Firm Energy » dont parlait Monsieur Clinch était en fait de la « Continuous Energy ».
[702] Poussant plus loin, elle y va de l’analyse de notes et de calculs préparés également en 1964, par Monsieur Donald MacParland, vice-président ingénierie de CF(L)Co et commente les chiffres établis par celui-ci.
[703] Même si le Tribunal a décidé que Madame Bodell n’avait pas l’expertise voulue pour traiter du volet B) de son rapport certains commentaires s’imposent quant au lien qu’elle fait entre les volets A) et B) pour soutenir la position de CF(L)Co.
[704] Ainsi, au paragraphe 66 de son rapport Madame Bodell à l’aide des chiffres apparaissant aux notes de Monsieur MacParland établit à 9 % l’énergie additionnelle disponible ou encore 2.9 térawattsheures. Le tout selon madame Bodell, démontrant que l’ « Excess Energy » était envisagée par CF(L)Co dans le cadre de négociations et que son corollaire était que le « Firm Energy » représentait ce que les parties envisageaient pour la définition de « Continuous Energy » prévue au contrat renouvelé.
[705] Par la suite, Madame Bodell y va de son analyse des termes soit utilisés, soit répétés dans la lettre d’intention, le contrat principal et le contrat renouvelé, pour noter que le terme "Excess Energy" n’apparaît pas dans le contrat renouvelé.
[706] Elle procède également à commenter le fait que dans le cadre des négociations la valeur de l’"Annual Energy Base" a été ajustée à la baisse, ce qui lui fait dire :
« 95. As illustrated in Figure 5, the starting point for the Annual Energy Base is not and never was intended to be an estimate of the average energy that could be produced by the plant. The estimate of continuous energy set in the Letter of Intent at 32.2 TWh per year reduced to 31.5 TWh per year to be the Initial Annual Energy Base under the Power Contract reflects the amount that the parties were willing to consider firm for purposes of capacity payments.
114. An additional factor which demonstrates that the AEB was not meant to constitute an average of the energy that can be produced by the plant is the starting value for the Annual Energy Base, which was initially calculated at 32.2 TWh per year and finally set at 31.5 TWh per year, at the time representing firm energy that CF(L)Co could provide on a continuous basis, not an annual average of available energy. Considering the provision of the Power Contract which prevents increases or decreases to the Annual Energy Base in excess of 3 1/3 % compared to the value previously in effect, it is obvious that the parties did not intend the Annual Energy Base to be a true average. »
( Références omises )
[707] Ainsi, partant du principe que l’ « Excess Energy » n’était pas mentionné au Contrat renouvelé et que l’AEB initial avait été revu à la baisse entre les négociations et la conclusion du contrat, implique nécessairement que les parties ont considéré qu’il y aurait de l’énergie excédentaire laquelle ne ferait pas partie de la « Continuous Energy ».
[708] Madame Bodell procède également à l’analyse des prétentions de chacune des parties quant au calcul du “Final Annual Energy Base” pour conclure de la façon suivante :
« 116. Hence, actual numbers show that the Annual Energy Base is not equal to, but rather lower than the average energy that can be made available from the plant to Hydro-Québec on an annual basis according to 40 years of hydrological flows and operations.
118. As provided for in the Power Contract and as proposed by Hydro-Québec in 2012, the Final Annual Energy Base can be no more than the original estimate of the amount of energy that could be made continuously available to Hydro-Québec less recaptured energy. Therefore, at the very least, the Final Annual Energy Base cannot and will not include excess energy above the maximum limit defined in the Power Contract. »
( Nos soulignés )
[709] Bref, selon Madame Bodell, même si le terme « Continuous Energy » n’était pas utilisé à une époque contemporaine à la conclusion du contrat principal et renouvelé, divers documents que ce soit des livres, rapports, contrats, lui permettent d’inférer que « Continuous Energy » équivaut à « Firm Energy » et donc ne comprend pas l’ « Excess Energy » et que le « Final Annual Energy Base » sur lequel se base CF(L)Co pour établir la quantité d’énergie pour équivaloir à la « Continuous Energy », ne doit pas inclure l’ « Excess Energy ».
[710] Nous verrons que Monsieur Lapuerta a une toute autre conception de l’AEB tant initial que final.
[711] Voici comment Monsieur Lapuerta définit son mandat.
« I have been asked by Norton Rose Fulbright Canada LLP on behalf of Hydro-Québec to provide an economic and financial analysis of the long-term power contract signed on May 12, 1969 by Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited (CF(L)Co) and the Commission hydroélectrique de Québec (Hydro-Québec) (the Contract), with a particular focus on Schedule III, known as the Renewed Power Contract, which comes into force on September 1, 2016, and expires on August 31, 2041 (the Renewal Period). I have focused the analysis on matters that can provide insight into the different interpretations of the Renewed Power Contract put forth by Hydro-Québec and CF(L)Co. »[389]
[712] Monsieur Lapuerta insiste que l’analyse économique et financière tant du contrat principal que renouvelé est essentielle en raison du caractère unique du financement privé de ce projet tant pour Brinco à titre d’investisseur que pour H.Q. à titre de coparticipant et de principal client[390].
[713] D’ailleurs, l’approche économique apparaît la plus appropriée au Tribunal, puisque ce sont des considérations d’affaires qui ont mené à la prise de décisions tant dans le Contrat principal que renouvelé.
[714] Monsieur Lapuerta explique que d’un point de vue économique, la décision de H.Q. d’investir dans le projet Churchill Falls plutôt que dans des centrales à bâtir sur le territoire québécois était basée sur la capacité de production de cette Centrale, lui permettant d’accroître la flexibilité de son réseau.
[715] En effet, selon Monsieur Lapuerta, même en tenant compte du Bloc Twinco ainsi que du Bloc Rappel, la quantité d’énergie consacrée à H.Q. demeurait considérable.
[716] Monsieur Lapuerta insiste sur les concessions d’ordre financier auxquelles a consenti H.Q. en vue de la réalisation du projet qu’il associe à ce qu’il qualifie de « Volume Risk ». Voici ses commentaires à ce sujet.
« A. For the first 40 years, my report describes the take or pay commitment which is part of the volume risk, as two thirds, one third, while also recognizing that there were provisions that would kick in after the beginning of eight years and then once every four years to allow refunds or payments going from one side to another to address variations in the output of the plant relative to Annual Energy Base. Volume risk in the first 40 years was also addressed by such issues as the completion guarantee which was a commitment by Hydro-Québec to ensure the solvency of the project, to make sure that it would be constructed, despite costs overruns and there are also … there’s also provision for Hydro-Québec to rebuild the facility in the event of force majeure. And so that also is a way of addressing volume risk. Those provisions allocated risk to Hydro-Québec. And then, over the last 25 years in the Renewed Power Contract, the volume risk is 100 % with Hydro-Québec, except for plant deficiency in which CF(L)Co bears volume risk. I should say there’s also an exception for plant deficiency in the first 40 years. »[391]
[717] Autre élément qu’il considère est le facteur d’utilisation de la Centrale qu’il évalue à 82 % de ses capacités, pourcentage conséquent pour un acheteur unique qui veut jouir d’une certaine flexibilité. D’ailleurs, il décrit la Centrale de Churchill Falls comme étant un « Flexible Base load Plant »[392].
[718] Monsieur Lapuerta met beaucoup d’emphase sur cette flexibilité qui fait l’objet de quatre (4) sections dans son expertise soit.
· The Value of Seasonal Flexibility.
· The Seasonal Flexibility of Churchill Falls.
· Multi-Annual Flexibility.
· The alleged sacrifice of Seasonal and Multi-Annual Flexibility.
[719] Sans surprise, Monsieur Lapuerta situe la plus forte demande en électricité, pendant les jours de semaine en période hivernale et la plus faible durant l’été.
[720] Cette réalité du nord-est américain fait en sorte que les centrales munies de réservoirs profitent de la période printanière pour remplir ceux-ci en vue de la prochaine saison et profitent de la période estivale pour procéder à l’entretien des groupes.
[721] Monsieur Lapuerta explique que la plupart des centrales du Parc de H.Q. ont des hauteurs de chute variables lesquelles font en sorte qu’à la fin de l’hiver alors que les réservoirs sont à leurs plus bas niveaux, l’efficacité de la Centrale s’en trouve diminuée puisque nécessitant plus d’eau pour générer la même énergie[393].
[722] C’est là qu’entre en ligne de compte la Centrale Churchill Falls. En effet, celle-ci, en raison de ses vastes réservoirs et de sa situation topographique, a la caractéristique somme toute unique, de conserver à l’année longue une hauteur de chute constante, allouant une production particulièrement efficace.
[723] Monsieur Lapuerta estime que cette particularité de la Centrale, connue avant même sa construction, représentait un atout financier pour H.Q. puisqu’en période de forte demande, elle pouvait utiliser l’énergie provenant de cette centrale en lieu et place de Centrales, dites de pointe, telles que des centrales thermiques beaucoup plus dispendieuses à exploiter.
[724] Voici un extrait du rapport Lapuerta, traitant de l’intégration de la Centrale Churchill Falls à l’ensemble du Parc d’H.Q. sous l’angle de la flexibilité :
« 61. The memo further said "they [Hydro-Québec] feel our plant should be fully integrated into their own system". Here, “the system” is the set of all power stations owned directly by Hydro-Québec, and “integrating” refers to the ability to co-ordinate the operation of Churchill Falls with all other power stations in the Hydro-Québec portfolio, so that Hydro-Québec could make the most efficient decisions concerning which power stations to operate at which times of year. Integrating Churchill Falls into their system meant that Hydro-Québec could use the seasonal flexibility of Churchill Falls to reduce its reliance on hydro-electric facilities that became less efficient as their reservoir levels depleted in winter. »
[725] Monsieur Lapuerta, à l’aide d’un schéma[394] démontre que H.Q. jouissait d’une flexibilité pluriannuelle grâce à la Centrale Churchill Falls, c’est-à-dire qu’elle y puisait plus d’énergie lors des années fortes en apports d’eau et moins d’énergie pour les années faibles.
[726] Selon Monsieur Lapuerta, H.Q. en exploitant les réservoirs sur une base pluriannuelle, évite ainsi les risques de déversement[395].
[727] Finalement, au chapitre de la flexibilité, Monsieur Lapuerta s’attaque au principe mis de l’avant par CF(L)Co à l’effet que selon son interprétation H.Q. jouirait tout de même de flexibilité, mais intramensuelle.
[728] Rappelons que selon l’interprétation de CF(L)Co de « Continuous Energy », les livraisons d’énergie et de puissance à H.Q. représentent le « Final Annual Energy Base » réparti de façon presque égale sur les 12 mois de l’année[396].
[729] Rappelons également qu’en vertu de l’interprétation de CF(L)Co, les livraisons de puissance en vertu du GWAC seraient également affectées et seraient sujettes à la flexibilité intramensuelle.
[730] Pour ce faire, il aborde les grands thèmes suivants.
- Inefficacité économique du scénario de CF(L)Co.
- Les arguments d’efficacité économique proposés par CF(L)Co.
- Les négociations ayant eu cours entre les parties.
[731] Dans un premier temps, Monsieur Lapuerta expose qu’il serait non rentable pour CF(L)Co de vendre uniquement à H.Q. dans le mode « Continuous Energy » tel qu’elle le propose que dès lors il est logique de penser que CF(L)Co se servira de la capacité résiduelle ou excédentaire de la Centrale pour vendre énergie et puissance à des tiers.
[732] Rappelons que Madame Bodell dans son rapport, et au-delà de l’utilisation du terme « Continuous Energy » a longuement disserté et fait le lien entre ce concept et son pendant, soit de l’énergie excédentaire.
[733] C’est là que le bât blesse selon lui.
[734] Il expose que les ventes à des tiers pourraient porter CF(L)Co à gérer ses réservoirs autrement. Ainsi, si CF(L)Co augmentait sa production pour satisfaire ses nouveaux clients et que l’apport d’eau soit en deçà des moyennes, il est possible que CF(L)Co ne soit pas en mesure de livrer la « Continuous Energy » tel qu’elle la définit elle-même, alors que H.Q. en vertu du contrat renouvelé assume 100 % du risque lié à l’hydrologie.
[735] En effet, Monsieur Lapuerta démontre que le manque d’eau ne constitue pas une déficience, au sens du contrat principal ou du contrat renouvelé. Or, une déficience est sujette à compensation par CF(L)Co.
[736] À ce stade, le Tribunal tient à faire le pont entre le calcul de l’AEB final et la possibilité de ventes à des tiers. Ainsi, le calcul de CF(L)Co est inférieur à celui de H.Q., c’est donc dire moins d’énergie et de puissance vendues à H.Q. au tarif établi en 1969 et plus d’énergie et de puissance vouées à l’exportation au tarif d’aujourd’hui. De là, un intérêt financier évident pour CF(L)Co.
[737] Monsieur Lapuerta affirme également que le changement du risque supporté par H.Q. entre le contrat principal prévoyant un « tarif » 2/3 fixe et 1/3 selon les livraisons et le contrat renouvelé passant au mode 100 % « Take or Pay », est incompatible avec l’approche économique envisagée par les négociateurs. Voici un extrait de son témoignage lequel résume bien sa pensée quant au risque lié à l’hydrologie :
« A. Yes, so during the first 40 years, the way the contract was, is efficient in the sense that the party who controls the reservoir is the one that bears the risk of insufficient water. And so if Hydro-Québec were to manage the reservoir in a way that was inefficient, Hydro-Québec itself would bear the costs. Now, that alignment of risk and control no longer occurs under the CF(L)Co interpretation of the Renewed Power Contract. Under the CF(L)Co interpretation, CF(L)Co would control the reservoir level but would not bear the risk of insufficient water. »[397]
[738] Par ailleurs, Monsieur Lapuerta considère également inefficace économiquement pour CF(L)Co la théorie de la flexibilité intramensuelle mise de l’avant par celle-ci puisque sa mise en application, spécialement pendant les mois d’hiver, impliquerait des mises en marche et mises à l’arrêt fréquents des groupes de production et ce, de façon abrupte le tout pouvant entraîner une usure prématurée de l’équipement.
[739] Monsieur Lapuerta considère également inefficace pour CF(L)Co la perte de flexibilité pluriannuelle dont jouit actuellement H.Q., puisque la gestion des livraisons que devrait effectuer H.Q. augmenterait les risques de déversement à l’occasion de périodes riches en apports d’eau.
[740] Finalement, quant au chapitre de la flexibilité, il conclut qu’un changement drastique entre l’exploitation pendant les 40 premières années, et celle des 25 années suivantes tel que suggéré par CF(L)Co n’est pas la façon efficace d’exploiter une Centrale munie de réservoirs telle Churchill Falls.
[741] Monsieur Lapuerta aborde également quelques incohérences dans les relations contractuelles existantes entre H.Q. et CF(L)Co si l’interprétation de CF(L)Co était retenue. Ainsi, partie de l’article traitant de la flexibilité opérationnelle consentie à H.Q. que l’on retrouve tant dans le contrat principal que le contrat renouvelé, notamment quant à l’information relative à l’hydrologie devant être transmise à H.Q., perd tout son sens[398].
[742] Quant à l’impact de l’interprétation de CF(L)Co sur le GWAC, Monsieur Lapuerta tient les propos suivants insistant sur le fait que rien dans la documentation consultée entourant la négociation et conclusion de celui-ci entre les parties, n’indique un changement fondamental à compter du 1er septembre 2016 :
« A. Yes. So, under the CF(L)Co interpretation, the GWAC can no longer do what I described as pulling summer generation into the winter where it’s more valuable. What it would continue to do, or what it would begin to do, would be to allow Hydro-Québec within a winter month to pull generation from the less-valuable off-peak periods of the winter month into the peak periods that have the most value within that same winter month, but it would no longer be bringing summer energy into the winter.
Q. Did you see anything in the GWAC which in any way reflects a switch in the regime from before August 31st, 2016 to afterwards ?
A. I have seen nothing in the GWAC agreement itself or in the negotiating documents leading up to the agreement that would suggest a significant change in its function on the commencement of the Renewed Power Contract. »[399]
[743] Monsieur Lapuerta commente également l’augmentation constante du tarif associé au GWAC :
« […] And furthermore, the CF(L)Co interpretation of the Renewed Power Contract implies a significant reduction in the value of the GWAC after 2016. And before a buyer and seller would agree a price schedule for the GWAC that involved constant percentage increases over time, they would have… they would analyze the implied decrease in value by the CF(L)Co interpretation and you would have seen either a refusal to have the 1 % increase or at least a negociation in which Hydro-Québec would have sought a decrease in the price of the GWAC after 2016 to reflect its reduction in value. »[400]
[744] Monsieur Lapuerta quand il aborde le concept même du « Continuous Energy » basé sur l’AEB final, manifeste son profond désaccord avec l’opinion de Madame Bodell à l’effet qu’il s’agit là de la « Firm Energy », sans plus :
« Q. If you apply any of the definitions of firm energy, the concept of firm energy and its various descriptions that Ms. Bodell uses in her report, can you describe the final Annual Energy Base as being made up entirely of firm energy ?
A. No, no, she describes firm energy as the amount that the facility can produce under the worst year on record. We have the engineering study which anticipated that the worst year, over 40 years, would be only 26 terawatt-hours, and then we also have the actual experience which shows indeed that a year arose under which the average annual … the output of the plant was only 26 terawatt-hours. »[401]
[745] Précisons dès maintenant l’essence des conclusions auxquelles il arrive quant à l’AEB final et sur lequel repose le quantum du « Continuous Energy » mis de l’avant par CF(L)Co. Voici ce qu’il dit :
« A. It reflects the average potential of the plant to produce energy as informed by the hydrological conditions over the previous 40 years.
Q. Is there any certainty that the plant will be able to produce all of this final Annual Energy Base in every year going forward ?
A. No, no, in fact, the expectation would be that it would produce … if there would be dry years in which it would produce less than that, going forward, and if it sought to operate the plant, if the parties sought to operate the plant, giving constant amounts of energy every month, then the average long-term output of the plant would even be lower that suggested by the accumulated experience over the previous 40 years, because the system of operating the plant over the previous 40 years was calculated to maximize the average energy output. By a regime of operating under fixed monthly quantities, it would be calculated to incur greater spill and therefore reduce the average annual output of the plant. »[402]
[746] Pour supporter cette assertion, Monsieur Lapuerta a longuement témoigné sur une partie du rapport de la firme Acres intitulé « Technical Abstract and Enginners Evaluation »[403], notamment le graphique numéro 32 lequel avait été préparé en vue de l’émission des obligations sous l’égide de la firme Morgan Stanley (OM).
[747] L’intérêt du graphique numéro 32 est qu’il fait voir comment les ingénieurs sont arrivés à une première évaluation de 31,9 milliards de KWH en tenant compte tant des années riches en apports d’eau que des années pauvres.
[748] Par ailleurs, Monsieur Lapuerta à l’occasion de son témoignage et à l’aide de ce même rapport ainsi que de l’O.M., explique comment l’AEB initial a été fixé à 31.5 alors que l’évaluation des ingénieurs était de 31,9 milliards de KWH.[404]
[749] Ainsi, selon lui, la réduction de l’évaluation des ingénieurs, était relativement arbitraire et fondée sur la prémisse qu’il s’agissait avant tout d’un estimé.
[750] Ce graphique, selon Monsieur Lapuerta fait la démonstration patente que l’AEB n’a jamais été envisagée uniquement comme de « Firm Energy », puisque les années de faible hydrologie y apparaissant, n’auraient même pas permis de rencontrer les niveaux de « Firm Energy » sur lesquels les parties se sont entendues lors de la conclusion du contrat principal.
[751] Il résume d’ailleurs fort bien son opinion dans l’extrait suivant :
« A. Yes. So, the average ability to generate electricity is a broad term that encompasses all types of electricity whether we call it firm or non-firm. Now, the concept of firm electricity is just part of the electricity that the facility can produce. So, it’s less … it’s less than the average total output of the plant, it’s inherently less because some of the output of the plant is variable depending on hydrological conditions.
Q. So, if I understand you correctly, you’re saying that the amount of firm energy a plant can produce is less than the average annual ?
A. Yes, yes. The final Annual Energy Base just includes the total without screening out anything that may have been called excess over the first 40 years, everything is included. There’s no express limitation to firm. »[405]
( Nos soulignés )
[752] Finalement, Monsieur Lapuerta commentant les divers contrats de vente d’électricité mis de l’avant tant par Madame Bodell que Monsieur Kendall, y va de l’assertion suivante :
« A. So, the contracts provided by Mr. Kendall and Ms. Bodell show that parties define flexibility in their long-term power contracts, and they also show that there’s no contract that they have provided that shows a shift in the flexibility terms over the course of a long-term contract of the nature that is being proposed or is involved in the CF(L)Co interpretation of the Renewed Power Contract. So, it is … I would have expected if the flexibility ranges were to change so significantly, that you would see something more explicit in the Renewed Power Contract. »[406]
( Nos soulignés )
[753] Monsieur Lapuerta conclut son rapport avec cinq (5) affirmations que le Tribunal résume librement de la façon suivante.
· |
Tant le contrat principal que le contrat renouvelé prévoyaient que la presque totalité de la production de Churchill Falls serait achetée par H.Q., celle-ci cependant, assumant 100 % du « Volume Risk » pour les 25 dernières années. |
· |
La Centrale, par ses caractéristiques a permis à H.Q. de jouir d’une flexibilité pendant les 40 premières années et que l’interprétation que fait maintenant CF(L)Co de ses obligations pour les 25 prochaines années, rendrait inefficace l’exploitation de celle-ci, ce que les parties n’ont certainement pas désiré à l’époque. |
· |
Le fait pour CF(L)Co de vendre à des tiers l’énergie résiduelle ou excédentaire si son concept était mis en application, pourrait l’empêcher de rencontrer ses obligations envers H.Q. notamment en période de faible hydrologie. |
· |
Rien dans la documentation traitant de la négociation du contrat principal et du contrat renouvelé ne laisse même entrevoir que les parties ont considéré un changement aussi drastique pour les 25 dernières années du contrat. |
· |
L’interprétation de CF(L)Co qu’énergie et puissance étaient considérées comme des produits séparés dans les années 60 est erronnée, puisque ceux-ci sont plutôt le résultat de la déréglementation qu’a connu le Marché Nord-Américain à la fin des années 90[407]. |
[754] L’expertise de Monsieur Pfeifenberger porte sur les ventes dites interruptibles. Voici comment il définit l’essentiel de son mandat :
« 4. I have been asked by Norton Rose Fulbright Canada LLP on behalf of Hydro-Québec to provide an independent economic and industry-practices analysis concerning the sale of "interruptible power" by Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited (“CF(L)Co”) above and beyond the 300 MW recapture block provided in the May 12, 1969 agreement between Québec Hydro-Electric Commission (“Hydro-Québec”) and CF(L)Co (the “Power Contract”, including its Schedule III, known as the “Renewed Power Contract”). »[408]
[755] Monsieur Pfeifenberger prend pour acquis, ce qui n’est pas nié d’ailleurs, que CF(L)Co procède à des ventes interruptibles au-delà du rappel de 300 MW en faveur de NLH, lesquelles sont destinées à l’exportation sur le marché américain.
[756] Monsieur Pfeifenberger à l’occasion de son témoignage définit de la façon suivante les deux grands axes de son rapport.
· |
Le Rappel de 300 MW voué à l’exportation est-il un maximum ? |
· |
Les ventes interruptibles le sont-elles vraiment c’est-à-dire peuvent-elles être interrompues en temps utile pour donner accès à H.Q. à la capacité qu’il peut requérir en vertu du contrat ? |
[757] Nécessairement, l’analyse de ce second point sous-entend que la transaction interruptible dépasse la limite de 300 MW rappelée et est destinée à l’exportation.
LE RAPPEL DE 300 MW EST-IL UN MAXIMUM
[758] Monsieur Pfeifenberger soutient que la terminologie utilisée tant à l’article 6.6 du contrat principal que celui du contrat renouvelé à son article 5.4 soit « in the aggregate shall not exceed 300 MW during the term of the contract » signifie qu’il s’agit d’une limite absolue ou maximale puisqu’à l’époque de leurs négociations les notions de puissance et d’énergie étaient étroitement liées. Le Tribunal juge utile de reprendre le paragraphe 32 de son expertise :
« 32. Given these definitions, industry participants in the 1960s at the time of the contract signing (as well as today) would have understood that specifying any limits to the delivery of "power and energy” meant limiting both the maximum MW rate at which power is transferred as well as the total MWh of delivered energy. Because the Power Contract defines Recapture as “withholding from the power and energy agreed to be sold” to Hydro-Québec,44 any industry participant in the 1960s (as well as today) would have reasonably concluded that the recapture provisions of the Power Contract were meant to limit both the power and energy that CF(L)Co could withhold from contractual commitments to Hydro-Québec. »[409]
( Références omises )
[759] Qui plus est, selon lui, le fait que les négociateurs de l’époque aient cru bon de tenir compte du « load factor » de la Centrale tout en établissant un maximum de 2 362 milliards de kilowattheures fait en sorte qu’il s’agit bel et bien d’un maximum. En effet, l’article 6.6 du contrat principal précise « for a maximum withholding of 2 362 billions kilowatt hours per year » alors que l’article 5.4 du contrat renouvelé l’exprime de la façon suivante « for a maximum withholding thereunder and hereunder of 2362 billions kilowatt hours per year … »[410].
[760] Pour supporter son opinion, il invoque certains termes utilisés dans un mémoire que CF(L)Co avait déposé en février 1973 auprès d’un comité sur l’énergie mis en place par le gouvernement de Terre-Neuve[411].
[761] Monsieur Pfeifenberger dans son témoignage se réfère également au témoignage de Monsieur Henderson à l’effet que le 300 MW constitue un maximum absolu, le Tribunal juge utile de reproduire la portion pertinente de celui-ci :
« Q. And you will confirm to the Court that, if you take 300 megawatts and you apply the load factor of 90 %, and you multiply it by the number of hours in a year, it will give you the quantity of energy of 2.362 billion kilowatthours per year ?
A. Not precisely.
Q. No ?
A. No. And I can’t explain why there’s a difference, but I think it’s maybe 2.3652.
Q. So, the last decimal is rounded off for some reason ?
A. For some reason, it was, and it … anyway, I’m not sure why, but anyway. I know it’s a fact because we had to deal with this in the other agreements.
Q. And the price payable by NLH to CF(L)Co tracks the price of the Power Contract between CF(L)Co and Hydro-Québec ?
A. That’s correct.
Q. And the Recall PSA expires on August 31, 2041 which corresponds to the end date of the Power Contract between Hydro-Québec and CF(L)Co ?
A. That’s correct.
Q. And again, Mr. Henderson, in this March 1998 version of the Recall PSA, there is no provision contemplating the sale by CF(L)Co to NLH of interruptible power ?
A. That’s correct.
Q. And, in fact, you confirmed during your testimony back in May of 2015 that you could not recall that the possibility of NLH purchasing interruptible power from CF(L)Co over and above the 300 megawatts even ever came up during those negotiations ?
A. That’s correct.”[412]
[762] Finalement, Monsieur Pfeifenberger explique que si CF(L)Co pouvait dépasser cette limite de 300 MW cela équivaudrait à plus de flexibilité pour celle-ci et moins pour H.Q.
[763] Il s’agit là de l’essentiel de l’argumentaire de Monsieur Pfeifenberger quant à la limite de 300 MW que l’on retrouve aux paragraphes 30 à 39 de son rapport.
LES VENTES INTERRUPTIBLES LE SONT-ELLES VRAIMENT
[764] Monsieur Pfeifenberger établit trois (3) conditions qui selon lui sont essentielles pour qualifier les ventes d’électricité d’interruptibles, le Tribunal les résume librement de la façon suivante.
1. |
Les ventes de NLH destinées à des clients autres que H.Q. devraient jouir d’une priorité inférieure à celle-ci incluant les périodes où la capacité de production de la Centrale est limitée. |
2. |
CF(L)Co devrait avoir la possibilité d’interrompre ses ventes à NLH en tout temps si H.Q. requiert des livraisons. |
3. |
NLH elle-même devrait être en mesure d’interrompre ses ventes à des tiers si celles-ci sont le fruit des ventes interruptibles par CF(L)Co.[413] |
[765] Cela étant, Monsieur Pfeifenberger convient que le manuel d’opération de CF(L)Co[414] établit les priorités de livraison de celle-ci dans l’ordre suivant.
· Twinco (225 MW) |
· NLH Recapture Energy (300 MW) |
· Hydro-Québec Production (3863.5 MW in the summer, 4082.6 MW non-summer, plus 682 MW during GWAC) |
· NLH interruptible power |
[766] Ainsi, selon son manuel d’exploitation CF(L)Co semble rencontrer la première prémisse posée par Monsieur Pfeifenberger.
[767] Toutefois, Monsieur Pfeifenberger apporte le bémol suivant, le Tribunal cite :
« A. What I saw from the schedule and power-flow data was that, if there was a problem at the Churchill Falls plant that made it impossible for CF(L) Co to deliver both interruptible power to NLH and firm sales to Hydro-Québec, it curtailed the firm sales to Hydro-Québec before changing sales to NLH of interruptible power.
Q. We will look at examples of that in a moment. What does the handbook provide or contemplate in terms of the ability for Hydro-Québec to change its schedules ?
A. Reading the Operations Handbook, from an industry practice perspective, it recognizes that Hydro-Québec can change its schedules in real time and during the delivery hour, and it lays out actions that are supposed to be taken if CF(L)Co needed to accommodate such a real-time or within-hour scheduling change by Hydro-Québec. »[415]
[768] En fait, la difficulté soulevée par Monsieur Pfeifenberger proviendrait d’un changement dans l’heure effectué par H.Q. tel qu’il apparaît à l’occasion de son contre-interrogatoire :
« Q. But because of these provisions, you would agree with me, we’ve talked about lock-down periods and the market rules that, under the contract, Hydro-Québec, has its own lock-down period because of that and cannot change its daily schedule after 14 :00 the day before except in emergency cases. Correct ?
A. I disagree. It says it can change its schedules in real time for major reasons and emergency conditions. And major reasons, I would think, would include energy needed from reserves. »[416]
[769] Basé sur la prémisse qu’il établit, Monsieur Pfeifenberger procède à l’aide de sa figure 5 à l’étude de situations pendant lesquelles CF(L)Co a livré des quantités d’énergie et de puissance à NLH, en excès du Rappel de 300 MW et a réduit les livraisons de H.Q. en conséquence.[417]
[770] Il faut noter, que Monsieur Pfeifenberger dans son témoignage a précisé que les 13 exemples de la figure 5 originale de son rapport sont le fruit d’une compilation de quelque 800 heures pendant lesquelles les ventes interruptibles dépassaient la limite de 300 MW et où un problème fut rencontré à la Centrale.
[771] En effet, les problèmes de la Centrale constatés par l’inscription « Plant Capacity Change » étaient causés soit par une panne soit par une surutilisation des équipements provoquant une surchauffe des stators[418].
[772] Il faut également noter que les 13 exemples originaux sont concentrés sur huit (8) journées spécifiques quant aux 24 autres exemples apparaissant à la figure 5 révisée ceux-ci sont concentrés sur 11 jours.
[773] Par la suite, Monsieur Pfeifenberger témoignera longuement sur ces divers exemples, à l’aide d’un cahier boudiné reprenant des extraits de diverses pièces déjà produites.
[774] Pour l’ensemble de ces exemples, le Tribunal retient les faits suivants.
· Ceux-ci sont d’une courte durée variant d’une heure à quelques heures. |
· La plupart du temps la réduction de livraison vers H.Q. le fut à la demande de CF(L)Co invoquant un « Plant Capacity Change », alors qu’effectivement, la Centrale rencontrait un problème soit en raison d’une panne ou d’une surutilisation des équipements. |
· Pendant la période visée, les exportations de NLH étaient supérieures à 300 MW. |
[775] Monsieur Pfeifenberger explique que CF(L)Co a favorisé NLH lorsque la Centrale a rencontré des problèmes techniques au détriment de H.Q. et ce, en raison des périodes de verrouillage qu’elle devait respecter auprès de ses clients américains faisant en sorte que NLH ne pouvait interrompre ses exportations.
[776] Selon lui, H.Q. devrait avoir accès à la capacité de la Centrale et ce, même si elle ne l’a pas requise au départ. Voici un extrait qui résume sa pensée :
« A. Yes. So as you use part of the operating reserve to make up for the shortcoming that you’ve just experienced, you need to supplement the operating reserves. So, you need to have spare capacity available elsewhere on the system to get back to the minimum reserve requirement that is the absolute minimum that every operator needs to keep. So, you need spare capacity on the system to keep the system reliable and you need to basically have more spare capacity so you can maintain the operating reserves after a reliability event. »[419]
[777] Généralement, Monsieur Pfeifenberger affirme que les ventes interruptibles affectent la flexibilité consentie à H.Q. puisque si celle-ci a décidé de ne pas utiliser la pleine capacité de la Centrale pour elle-même exporter sur les marchés voisins, c’est justement pour préserver l’ensemble de ses réservoirs y compris ceux de Churchill Falls, notamment au printemps et à l’été alors qu’il se remplissent.
[778] Ceci dit, à l’occasion du contre-interrogatoire, il admet que les ventes dites interruptibles dans leurs quantités actuelles affectent peu les réservoirs à long terme.
« Q. I didn’t put my question very well. What’s the long-term impact on the reservoir about flexibility ?
A. The long-term impact on the reservoir is likely going to be small. It’s more about the short-term impact about the availability of the firm capacity. »[420]
[779] Finalement, Monsieur Pfeifenberger met beaucoup d’emphase sur le fait que le marché nord-américain où NLH exporte, en raison des règles entourant le verrouillage des commandes ne permettent pas à celle-ci d’interrompre en tout temps une livraison. Pour ce faire, il réfère aux différents marchés de NLH tel, New York, Nouvelle-Angleterre, Ontario, Nouveau-Brunswick et leurs périodes de verrouillage respectives.[421]
[780] Voici ses conclusions quant à la possibilité d’interrompre les ventes interruptibles :
« 80. The available data and industry practices also document that CF(L)Co’s sales to NLH cannot generally be interrupted at any time to preserve Hydro-Québec’s contractual rights under the Power Contract, for two important reasons. First, CF(L)Co lacks the physical (and apparently contractual) ability to interrupt or curtail its sales to NLH at any time. Second, NLH lacks the ability to immediately interrupt or curtail the vast majority its purchases from CF(L)Co, which are transmitted through Québec and exported by NLH to neighboring power markets. The market rules applicable to the transmission and export of this power do not allow for the interruption and curtailment of such schedules on short notice. Rather, such transmission and export schedules are locked-in between 30 and 120 minutes prior to a delivery hour, and generally cannot be interrupted or curtailed based on a buyer’s or seller’s contractual circumstances. »[422]
[781] Voici comment madame Bodell décrit son mandat :
« a) Analyze industry practices concerning interruptible power trades prior to the signing of the Power Contract and Renewal Contract through today; and
b) Assess the ability of CF(L)Co to sell interruptible power to third parties while abiding by its contractual obligations concerning the sale of Firm Capacity and associated energy produced from the Churchill Falls hydroelectric generating station (“Churchill Falls”). »[423]
Industry Practises Prior to signing of the Power Contract and Renewal Contract.
[782] Si le corps de son rapport parle peu de ce qui avait court dans l’industrie au sujet des ventes interruptibles, elle s’épanche un plus sur ce sujet dans son témoignage.
[783] En effet, elle réfère au « Glossary of Electric Utility terms » datant de 1961 lequel contient la définition suivante :
« Interruptible : Power made available under agreements which permit curtailment or cessation of delivery by supplier. »[424]
[784] Madame Bodell réfère également à un procès-verbal d’une réunion de négociations entre Brinco et H.Q. tenue le 14 mars 1963 à l’occasion de laquelle avait été spécifiquement discutée la vente d’électricité interruptible à Consolidated Edison (New York)[425].
[785] Madame Bodell relate également que H.Q. procédait déjà dans les années 1960 à des ventes interruptibles vers l’Ontario et dans les années 1980 vers le Vermont[426].
[786] Madame Bodell fait également état de ventes interruptibles dans les années 50 à partir de Centrales américaines mais destinées cette fois à des clients industriels[427].
[787] Bref, Madame Bodell est d’opinion qu’il s’agit d’un produit reconnu dans l’industrie depuis les années 50. Elle avance même que, puisque la possibilité de ventes interruptibles entre H.Q. et Consolidated Edison avait été évoquée en 1963, par le fait même la possibilité de ventes interruptibles directement par CF(L)Co avait été envisagée.
[788] Finalement, Madame Bodell fait état de la capacité de la Centrale à l’aide d’un graphique démontrant la capacité inutilisée pendant la période d’avril 2013 à avril 2015 précisant que celle-ci peut atteindre 2 000 MW pendant la période estivale[428].
[789] Ce graphique sert à démontrer, évidemment sans tenir compte des ententes contractuelles, que tout en tenant compte des livraisons requises par H.Q., la Centrale jouit au fil des années d’une capacité résiduelle importante.
CF(L)Co can meet its contractual obligations for Firm Capacity.
[790] Madame Bodell est d’opinion que CF(L)Co même en procédant à des ventes interruptibles, peut honorer ses obligations envers H.Q.
[791] Dans un premier temps, elle précise que si CF(L)Co n’est pas soumis à NERC, elle agit tout de même comme « Transmission operator » et qu’à ce titre, elle a l’obligation de « manage plant schedules and power flows into Québec. »[429]
[792] Ainsi, selon Madame Bodell, le fait que les commandes sont fournies par H.Q. d’avance, permet à CF(L)Co de planifier ses ventes interruptibles en conséquence.
[793] À ce titre, elle place beaucoup d’emphase sur le fait que les commandes d’H.Q. sont faites au moins une semaine à l’avance. Cela étant, elle convient que les commandes peuvent être modifiées à l’intérieur d’un très court laps de temps, en cas d’urgence.
[794] Quant à ce dernier point, Madame Bodell a préparé un tableau démontrant l’interrelation entre les demandes de livraison préparées par NLH pour ses ventes interruptibles et les commandes de H.Q. Voici comment elle s’exprime sur le sujet :
« 73. One way in which CF(L)Co minimizes the potential need for curtailment is by notifying its interruptible power customer of potential availability (i.e., unused capacity) after Hydro-Québec has submitted its week-ahead and day-ahead schedules, taking into account generation availability. This information is updated in real-time, allowing customers to adjust their schedules for interruptible power and thus proactively mitigate impending physical curtailments.
( Figure 3 omise )
74. As shown in Figure 3, around 95 percent of the time, NLH orders are scheduled after Hydro-Québec has submitted its final schedule. This behaviour is consistent with dispatch that places a higher priority on firm capacity requests and adjusts interruptible power sales as required to abide by its lower priority status. »[430]
[795] Madame Bodell convient que dans certains cas, rares selon elle, et ce, en raison des périodes de verrouillage propres au marché desservi par NLH, le flux d’énergie même s’il était coupé à la Centrale continuerait d’être livrée mais cette fois provenant du réseau de H.Q. À ce sujet, elle souligne que les diverses ententes contractuelles existantes permettraient de compenser semblable situation. Voici l’extrait pertinent :
« 99. As both interruptible power and Hydro-Quebec’s firm power currently flow on the same transmission line to the Quebec-Labrador Delivery Point, « curtailment » is simply a reallocation of power flows and accounting, which is accomplished by informing both the interruptible power client and Hydro-Quebec that the appropriate portion of the power is being reallocated and now belongs to Hydro-Quebec. It is then the responsibility of those parties to arrange or modify transmission service for the newly scheduled amounts and/or settle with the transmission operator for imbalance charges or fees associated with delivery failures. »[431]
( Nos soulignés )
[796] Par ailleurs, Madame Bodell critique l’assertion de Monsieur Pfeifenberger que le rappel de 300 MW soit une limite maximale puisque selon elle :
« The recapture provision is not a limitation on CF(L)Co’s rights but rather an assurance that the 300 MW of recapture will have priority over Hydro-Québec’s allotment of Firm Capacity. … »
[797] En résumé, Madame Bodell est d’opinion que la limite de Rappel fixé à 300 MW n’est pas un maximum et que partant de cette prémisse, CF(L)Co connaissant les demandes de livraison de H.Q. au moins une semaine à l’avance, est en mesure de planifier ses ventes interruptibles en conséquence.
[798] Madame Bodell, citant le nombre de cas isolés et la durée relativement courte de ces événements, minimise l’importance des périodes au cours desquelles CF(L)Co n’a pas été en mesure de répondre aux demandes de H.Q. puisqu’elle ne pouvait interrompre les ventes de NLH destinées à l’exportation.
[799] Comme nous l’avons vu, H.Q. soulève deux situations qui selon elle sont problématiques. La première a trait à l’interprétation que fait CF(L)Co de la puissance et l’énergie disponible à H.Q. en vertu du contrat renouvelé soit à compter du 1er septembre 2016. La deuxième a trait aux ventes dites interruptibles effectuées par CF(L)Co depuis quelques années déjà et que celle-ci entend continuer pour l’avenir.
INTERPRÉTATION DU CONTRAT RENOUVELÉ QUANT À L’ÉNERGIE ET LA PUISSANCE DISPONIBLE À H.Q. À COMPTER DU 1ER SEPTEMBRE 2016.
[800] H.Q. soutient que le Contrat principal, le Contrat renouvelé ainsi que le GWAC constituent un ensemble contractuel lequel doit dès lors être interprété collectivement.
[801] Ainsi, selon H.Q., l’interprétation que fait CF(L)Co de l’expression « Continuous Energy » n’a jamais été considérée ni même envisagée lors des négociations et conclusion de cet ensemble contractuel.
[802] H.Q. avance qu’une des considérations essentielles dans sa décision d’investir dans le projet Churchill Falls était l’intégration de cette Centrale à son Parc existant, de là le fait que l’on retrouve tant dans le Contrat principal que dans le Contrat renouvelé la clause de flexibilité opérationnelle. Selon H.Q., les risques financiers importants et hors du commun auxquels elle a consenti pour la réalisation de ce projet s’en veut la preuve.
[803] H.Q. s’élève contre la position de CF(L)Co et plaide que celle-ci ne représente ni la volonté des parties telle que constatée aux contrats, ni même sa façon de se comporter notamment et entre autres, eu égard à la conclusion du GWAC en 1998.
[804] Cette flexibilité se voulait saisonnière et pluriannuelle, lui permettant d’importer en hiver de la puissance inutilisée en été alors que l’interprétation que donne CF(L)Co à la notion de « Continuous Energy », fait en sorte que cette flexibilité n’est plus qu’intramensuelle.
[805] Qui plus est, selon H.Q., l’interprétation que fait CF(L)Co du « Continuous Energy » fait en sorte que le GWAC devient dénué de sens. Dans la même veine, l’augmentation de la compensation payée par H.Q. à CF(L)Co dans le cadre du GWAC entre 2016 et 2041 ne cadre pas d’un point de vue financier avec l’interprétation que fait CF(L)Co de « Continuous Energy » et constitue un autre indice de l’interprétation que les parties ont donnée aux droits des parties.
[806] Selon H.Q. l’utilisation du terme « Continuous Energy » au Contrat renouvelé par rapport à l’article 2.1 du Contrat principal n’a pas la portée ou encore la restriction que CF(L)Co propose.
[807] Ainsi, la formule de « Continuous Energy » ne constitue qu’une formule de paiement quant à l’énergie et la puissance disponible à H.Q. résultant de l’AEB final lequel représente le résultat concret de 40 ans d’exploitation de la Centrale, pendant laquelle période à peu près toutes les conditions hydrologiques se sont manifestées.
[808] À preuve selon H.Q., est l’abandon dans le contrat renouvelé du concept « split tarif » lequel faisait supporter une partie du risque à CF(L)Co, ce qui n’est plus le cas dans le contrat renouvelé, H.Q. assumant la totalité du risque.
[809] Autre indice, est le fait, que toujours selon CF(L)Co, celle-ci à compter du 1er septembre 2016 assumera la gestion des réservoirs, sans en assumer les risques ce qui serait contraire aux usages dans l’industrie de l’hydroélectricité.
[810] Plus encore, H.Q. avance qu’en période de faibles apports en eau et en raison des périodes d’entretien normalement effectuées à l’été, tant pour les groupes que pour le réseau de transmission[432], il serait techniquement possible, et encore plus probable si CF(L)Co vend à des tiers, que celle-ci ne soit même pas en mesure de lui livrer la « Continuous Energy » pendant cette période estivale.
VENTES INTERRUPTIBLES
[811] H.Q. soutient qu’elle a droit tant en vertu du Contrat principal que du Contrat renouvelé à toute la puissance et l’énergie produite par la Centrale moins évidemment les Blocs Réservés.
[812] Quant à la limite de 300 MW elle soutient qu’il s’agit là d’un maximum de puissance et d’un maximum en énergie de 2362 térawattheures, qui ne peut être dépassé, ce que CF(L)Co fait systématiquement en raison des exportations auxquelles se livre NLH.
[813] H.Q. avance que même si elle ne requiert pas toute la puissance disponible, celle-ci ne peut être vendue à des tiers, puisque celle-ci lui appartient et que le fait de ne pas l’utiliser, constitue un pan de sa stratégie dans la gestion de son Parc, notamment quant aux réservoirs de ses diverses centrales.
[814] H.Q. soutient également que les ventes interruptibles effectuées par CF(L)Co ne sont pas vraiment interruptibles et ce, en raison des règles de verrouillage sur les marchés que dessert NEMC agent de NLH acheteur de CF(L)Co pour cette énergie et puissance.
[815] Voyons maintenant la position de CF(L)Co face à ces deux mêmes situations.
INTERPRÉTATION DU CONTRAT RENOUVELÉ QUANT À L’ÉNERGIE ET LA PUISSANCE DISPONIBLE À H.Q. À COMPTER DU 1ER SEPTEMBRE 2016.
[816] Dès le départ, CF(L)Co voit la situation d’un tout autre œil puisqu’elle propose au Tribunal d’interpréter le Contrat renouvelé comme un contrat individuel donc à l’opposé d’un ensemble contractuel comme le suggère H.Q.
[817] Pour ce faire, CF(L)Co s’appuie sur les termes clairs de l’article 3.2 du contrat renouvelé lequel précise à son 3e paragraphe.
« Any or all articles or sections of this Power Contract, other than this section 3.2, as well as any or all undertakings or promises not specifically contained in Schedule III shall have no force and effect beyond the expiry date hereof and shall not thereafter be binding upon the parties to the Renewed Power Contract. »
[818] Poursuivant dans cette veine, CF(L)Co soutient que le Contrat renouvelé ne révèle aucune ambiguïté donnant ouverture à son interprétation.
[819] CF(L)Co avance que c’est à dessein que les négociateurs ont choisi d’utiliser l’expression « Continuous Energy » liée à la définition de « Firm Capacity » pour désigner ce à quoi aurait droit H.Q. à compter du 1er septembre 2016.
[820] Selon CF(L)Co, ce compromis résulte du fait que H.Q. jouit d’un prix préférentiel pour l’énergie produite par Churchill Falls pour les 25 années du Contrat renouvelé.
[821] CF(L)Co, met beaucoup d’emphase sur l’abandon de la clause 6.2 du Contrat principal, dans le cadre du Contrat renouvelé. Le Tribunal reproduit les paragraphes pertinents du plan d’argumentation de CF(L)Co sur ce sujet :
« 110. Section 6.2 of the Power Contract reads as follows :
« 6.2 Sale and Purchase of Power and Energy
CFLCo shall deliver to Hydro-Quebec at the Delivery Point such power and energy as Hydro-Quebec may request, subject to the provisions of Sections 4.2 and 4.3.
Hydro-Quebec, in purchasing power and energy hereunder, shall have no obligation to purchase, prior to the Effective Date, during any stage of construction, energy in excess of that contemplated by Column 6 of Schedule II as intended to be then available. »
(our emphasis)
Ø Power Contract, Exhibit P-1, p.14.
111. It is important to note that Hydro-Quebec itself relied on Section 6.2 of the Power Contract in the context of the 1982 Quebec Declaratory Judgment Case to support the proposition that it was entitled, under the terms of that contract, to request the delivery of all of the power and energy that can be generated by the Plant.
Ø Amended Motion for Declaratory Judgment filed by Hydro-Quebec dated November 18, 1982, Exhibit D-18, p. 22-23.
Ø For more details on the Declaratory Judgment and earlier proceedings, please refer to CF(L)Co’s Comprehensive and Contextual Analysis of the Evidence Part III.
112. Given the fact that s. 6.2 of the Power Contract was not reproduced in the Renewal Contract, Hydro-Quebec has no claim to request or take delivery of energy which is not specifically provided for under the definition of Continuous Energy and the ambit of s. 7.1 of the RC. »
[822] Ainsi CF(L)Co appuie également son argumentaire sur le fait qu’en vertu du Contrat renouvelé plusieurs autres dispositions ou concepts du Contrat principal ont été abandonnés. Ce sont les suivantes :
Art. 4.2.6 |
- |
Le droit à la réserve tournante. |
Art. 4.6 |
- |
L’établissement des responsabilités en cas de déversement. |
|
- |
Définitions de « Basic Contract Demand » et « Applicable Base Rate ». |
[823] Ainsi, CF(L)Co, pour étayer sa position quant à la définition de « Continuous Energy », soutient que l’abandon de la réserve tournante dans le Contrat renouvelé est un indice de plus voulant que les parties n’aient jamais considérées l’ « Excess Energy » comme faisant partie de la « Continuous Energy ».
[824] Évidemment sur ce sujet, CFf(L)Co s’appuie sur les conclusions du rapport Bodell traitant de la « Continuous Energy », assimilant celle-ci uniquement à la « Firm Energy ».
[825] Pour ce qui est de la clause de flexibilité opérationnelle, CF(L)Co soutient que H.Q. jouit toujours de celle-ci même si elle est diminuée passant de saisonnière et pluriannuelle à intramensuelle.
VENTES INTERRUPTIBLES
[826] CL(L)Co avance, avec force, que seulement elle, et non H.Q. est propriétaire des produits d’électricité générés par la Centrale.
[827] Subsidiairement, tout en reconnaissant ses engagements contractuels envers H.Q. elle soutient qu’en aucun temps n’a-t-elle accordé à celle-ci, l’exclusivité quant à l’ensemble de sa production.
[828] Plus spécifiquement, et dans cette veine, CF(L)Co soutient que la limite de 300 MW prévue au contrat principal, n’a pas pour objet de limiter ses droits mais plutôt ceux de H.Q.
[829] Qui plus est, le concept de ventes interruptibles, a cours dans l’industrie depuis des décennies, et il s’agit là d’une méthode de commercialisation également utilisée par H.Q.
[830] Quant aux ventes interruptibles qu’elle effectue, elle avance ne pas être tenue par les diverses règles concernant la fiabilité des réseaux et l’équilibrage puisque ses installations en vertu de décisions de la Régie ne sont pas visées par les normes de fiabilité pas plus que celles-ci ne s’appliquent à elle.
[831] CF(L)Co soutient également que ses ventes interruptibles au-delà de la limite de 300 MW n’affectent en rien le respect de ses obligations contractuelles envers H.Q. en rappelant que la programmation de celle-ci est soumise 14 jours à l’avance et qu’un changement de dernière minute ne peut être demandé que pour des motifs graves ou une situation d’urgence.
[832] Qui plus est, dans les rares cas où l’interruption des ventes ne peut être effectuée en raison des périodes de verrouillage sur les marchés desservis, H.Q. peut être compensée monétairement en vertu du « service de compensation d’écart de réception ».
[833] La preuve administrée devant le Tribunal fut considérable et concentrée sur une période de 26 jours, les plaidoiries quant à elles s’étirant sur quatre (4) jours.
[834] La maîtrise des avocats à présenter cette preuve fut remarquable de part et d’autre.
[835] Confronté à cette preuve monumentale, que le Tribunal qualifiera de mixte puisque traitant de deux sujets précis lesquels s’entrecroisaient, l’a amené à suggérer aux parties à lui soumettre ce qu’elles considéraient, chacune, les questions précises que le Tribunal devrait trancher pour résoudre le présent litige.
[836] Dire que les parties ont répondu à cet appel avec enthousiasme relèverait de l’euphémisme. Cela étant, cet exercice s’est avéré plus qu’utile dans l’élaboration que fait le Tribunal des questions en litige, le tout permettant de couvrir au niveau de l’analyse la totalité des préoccupations respectives des parties. Le Tribunal reproduit en annexe les questions en litige telles qu’élaborées tant par H.Q. que par CF(L)Co.
[837] Voici donc les questions en litige telles qu’élaborées par le Tribunal.
GÉNÉRALEMENT
A) |
Le Contrat principal, le Contrat renouvelé et le GWAC constituent-ils un ensemble contractuel ? |
B) |
Le cas échéant, l’ensemble contractuel est-il ambigu donnant ainsi ouverture au présent recours ? |
QUANT À L’INTERPRÉTATION DE « CONTINUOUS ENERGY »
C) |
Eu égard à la réponse aux questions précédentes, et tenant compte des dispositions du Code civil du Québec traitant de l’interprétation des contrats ou toute autre loi applicable, de même que la preuve administrée, quelle interprétation doit adopter le Tribunal, celle de CF(L)Co en totalité ou en partie ou bien celle de H.Q. ? |
QUANT AUX VENTES INTERRUPTIBLES
D) |
Le fait qu’il n’y ait pas actuellement de ventes interruptibles en raison de gestes posés par H.Q. fait-il obstacle au prononcé d’un jugement déclaratoire ? |
E) |
Eu égard à la conclusion à laquelle en vient le Tribunal sur la question traitant de la « Continuous Energy » quel en est l’impact sur les ventes interruptibles ? |
A) |
Le Contrat principal, le Contrat renouvelé et le GWAC constituent-ils un ensemble contractuel ? |
[838] Voici ce qu’allègue H.Q. à ses procédures :
« 13. Hydo-Québec et CF(L)Co sont parties à trois principaux contrats qui régissent leurs relations, y compris en regard de l’exploitation de la Centrale, et qui expirent tous le 31 août 2041. Ces trois contrats se complètent et forment un ensemble contractuel. »
[839] Les trois contrats auxquels H.Q. réfère sont le Contrat principal, le Contrat renouvelé et le GWAC.
[840] La position de H.Q. évoluera puisque dans sa plaidoirie, elle invoquera l’unicité du Contrat principal et du Contrat renouvelé sans traiter du GWAC s’appuyant entre autres sur la clause 1.5 du Contrat renouvelé qui se lit comme suit :
« 1.5 Schedule
Schedule I of the original power contract, which contract is hereby renewed, is an integral part of this contract. »
[841] Quant à l’unicité, H.Q. invoque que le seul changement contenu au Contrat renouvelé automatiquement, relève du prix de l’énergie et que dès lors le Tribunal doit interpréter le Contrat principal et renouvelé comme un seul contrat.
[842] Vu les conclusions auxquelles en vient le Tribunal quant à la qualification des trois (3) contrats de l’ensemble contractuel allégué, le résultat quant à l’interprétation du Contrat principal et du Contrat renouvelé ne s’en trouvera pas affecté, indépendamment de ce que maintenant plaidé par H.Q..
[843] Voici pourquoi.
LE DROIT
[844] La notion d’ensemble contractuel qui jusqu’à tout récemment n’était évoquée que du bout des lèvres par la jurisprudence a été définie tant par les auteurs que par la jurisprudence.
[845] La Cour d’appel dans l’arrêt Les Billards Dooly’s inc. s’est longuement attardée sur cette question. En voici un long extrait.
« [58] Comme l’énonce l’art. 1425 C.c.Q., dans l’interprétation d’un contrat, on doit rechercher « […] la commune intention des parties plutôt que de s’arrêter au sens littéral des termes utilisés ». L’art. 1426 C.c.Q. ajoute qu’il faut tenir compte de la nature du contrat, des circonstances dans lesquelles il a été conclu et de l’interprétation que les parties lui ont déjà donnée.
[59] En l’espèce, le juge ignore l’ensemble contractuel dans lequel s’inscrivent les contrats de franchise. Cela le mène à adopter une lecture désincarnée de leur clause sur la durée des contrats de franchise.
[60] En réalité, il faut lire les cinq contrats ensemble pour en dégager l’intention des parties en date du 3 septembre 2003. En effet, il s’agit de contrats concomitants et interdépendants, destinés à réaliser une opération globale et précisant le cercle contractuel de cette dernière. La cause de tous et chacun d’eux est commune; la raison de leur signature est de donner effet à l’ensemble des engagements convenus par les parties. Ces contrats constituent dès lors un ensemble contractuel indivisible.
[61] Tel que le soulignent Jean-Louis Baudouin et Pierre-Gabriel Jobin, Les obligations, 7e éd., par Pierre-Gabriel Jobin et Nathalie Vézina, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2013, au par. 490, la notion d’indivisibilité contractuelle est maintenant bien reçue en France en présence de plusieurs contrats « interdépendants », qu’ils soient concurrents ou successifs, mais traduisant une même opération.
[62] En fait, la Cour de cassation n’hésite plus à inférer des conséquences juridiques de l’économie générale d’un ensemble de contrats interdépendants. La haute instance a ainsi reconnu que l’indivisibilité contractuelle tacite pouvait l’emporter sur une clause de divisibilité expresse (Cour de cassation, Ch. Mixte, 17 Mai 2013, arrêts n° 275 (11-22.768) et 276 (11-22.927), et qu’une clause contractuelle en contradiction avec l’économie générale de l’opération visée par les parties était sans effet (Cour de cassation, Ch. Commerciale, 24 avril 2007, pourvoi n° 06-12.442 et, 15 février 2000, pourvoi n7-19.793). Elle a aussi précisé que la cause « objective » d’un contrat pouvait se situer au-delà de celui-ci, dans l’opération globale composée d’un ensemble de contrats « formant un tout indivisible » (Cour de cassation, Ch. Civile 3e, 3 mars 1993, pourvoi n°91-15.613, Bull. III, n°28). Conséquence logique de l’indivisibilité, la Cour de cassation a statué que l’anéantissement d’un contrat pouvait entraîner la caducité des autres contrats appartenant au même groupe contractuel (Cour de cassation, Ch. Civile 1re, 4 avril 2006, pourvoi n°02-18.277, Bull. civ. I, n°190; Cour de cassation, Ch. Commerciale, 5 juin 2007, pourvoi n°04-20.380, Bull. IV, n°156).
[63] Rien ne s’oppose dans le Code civil du Québec à l’adoption de ces mêmes principes (Pierre-Gabriel Jobin, « Comment résoudre le casse-tête d’un groupe de contrats », (2012) 46 R.J.T. 9; Baudouin et Jobin, Les obligations, précité, par. 488-490). Au contraire, les articles 1425 et 1426 C.c.Q. nous invitent à le faire afin de donner plein effet à la volonté des parties; d’ailleurs, c’est ce qui fit la Cour, sans trop élaborer, dans Domtar c. Grantech, J.E. 2002-1256, par. 39 et suiv.
[64] En l’espèce, une analyse des contrats signés concurremment le 3 septembre 2003 révèle leur interdépendance. »[433]
( Nos soulignés )
[846] Ainsi, la Cour d’appel a épousé la théorie de la Cause développée par l’auteur Pierre-Gabriel Jobin que le Tribunal reproduit.
« 490 - Piste de solution. La cause - Les notions classiques, telle la cause, ont été conçues pour des contrats autonomes, vivant en vases clos. Peuvent-elles servir dans le contexte d’un engagement qui n’est qu’un des rouages d’un ensemble ? Au départ, l’obstacle à l’établissement de liens entre les composantes d’un ensemble contractuel est le principe de l’effet relatif du contrat, « excepté dans les cas prévus par la loi » (art. 1440 C.c.Q.). Pour contourner cet obstacle en dehors des cas prévus par la loi, des juges et auteurs français ont d’abord eu recours à la notion classique de cause : chaque contrat ayant comme objectif la réalisation de l’opération globale, si celle-ci est impossible ou si, en cours de réalisation, elle cesse d’être possible, alors toutes les composantes peuvent être annulées pour défaut ou, selon le cas, disparition de sa cause260. Cette initiative comportait des imperfections (lors de leur formation, chaque contrat composant l’ensemble a une cause qui lui est propre), mais c’est le fait qu’elle soit tombée au milieu d’une vive controverse sur la résurgence de la cause261 qui a entraîné sa chute.
Aussi, jurisprudence et doctrine françaises ont-elles développé récemment une nouvelle notion, soit celle d’interdépendance entre les contrats composant l’ensemble262 : quand cette interdépendance est compromise (un des contrats de l’ensemble n’étant pas exécuté, par exemple), il convient de résoudre, résilier ou même déclarer caduc chacun des contrats - une application nouvelle mais justifiée de la caducité263. Prudemment, afin d’éviter de trop affecter la force obligatoire des contrats et pour ne pas tromper les attentes légitimes d’un cocontractant, le droit français exige que celui-ci, lors de la formation de son engagement, ait su ou aurait dû savoir que le contrat faisait partie d’un ensemble contractuel, ce qui permet de conclure qu’il y a tacitement consenti264. La présomption de connaissance, fondée sur les circonstances, peut jouer un rôle important ici. Ainsi, un critère subjectif est venu s’ajouter au critère objectif de l’interdépendance265.
Ce courant jurisprudentiel peut aller loin266. Ainsi, une fois établi le lien entre les composantes d’un ensemble, le tribunal français privera d’effets la clause expresse d’une des conventions stipulant que celle-ci est indépendante de tout autre contrat pouvant avoir des liens avec lui - une application du principe français de cohérence267.
Cette interdépendance, nécessaire à la formation et tout au long de l’exécution du contrat, nous semble rejoindre la notion renouvelée de la cause, préconisée par un auteur français268. Il ne s’agit pas ici du concept juridique classique, qui sanctionne les intentions illégales d’une partie (art. 1410, 1411 C.c.Q.) ou l’interdépendance entre les obligations d’un même accord. On est plutôt en présence d’un sens large, tiré du langage commun, de la cause, voulant dire la raison d’être de l’engagement du point de vue de l’économie du contrat. Ou, si l’on veut, d’une extension du sens objectif de la cause des obligations réciproques d’un contrat, vers l’interdépendance entre les obligations de contrats distincts formant un ensemble contractuel indivisible. »[434]
[…]
( Nos soulignés )
(Références omises)
[847] Ainsi, le Tribunal doit considérer si les trois (3) contrats décrits par H.Q. soit le Contrat principal, le Contrat renouvelé et le GWAC ont comme objectif la réalisation d’une opération globale.
APPLICATION DU DROIT AUX FAITS
[848] Identifions en quoi consiste l’opération globale.
[849] Celle-ci vise la construction d’une centrale électrique laquelle fournira à H.Q. des produits électriques soit puissance et énergie.
[850] Le financement de la Centrale est au cœur de cette opération. Évidemment, les sommes engagées tant pour la Centrale que pour les lignes de transmission sont considérables et ont un lien direct avec la durée de vie de la Centrale qui, rappelons le, varie entre 100 et 120 ans pour les ouvrages et entre 50 à 60 ans pour les équipements[435].
[851] Par voie de conséquence, la durée du contrat de fourniture d’électricité est tributaire de ces paramètres.
[852] On constate que la durée du contrat suggérée à 25 ans lors de la toute première ronde de négociations en 1961 évolue au fil de celles-ci de telle sorte que lorsque la lettre d’intention est signée le terme est fixé à 40 ans plus une période de renouvellement alors indéfinie[436].
[853] Quant à cette période de renouvellement, elle fut établie en avril 1968 à une période de 25 ans et ce, en raison de l’augmentation des coûts du projet[437].
[854] Le Tribunal constate qu’il existe une connexité entre la construction du projet, le coût de celui-ci, ainsi que la durée du contrat de fourniture de l’électricité.
[855] Ainsi, la « réalisation de l’opération globale » est à deux volets soit la construction de la Centrale dans un premier temps et la fourniture de produits d’électricité dans un deuxième temps.
[856] Les coûts engagés à l’occasion de la réalisation du premier volet soit la Centrale et les lignes de transmission ont eu une influence directe sur le deuxième volet, les parties établissent la durée de fourniture des produits d’électricité à 65 ans.
[857] Les composantes de l’aspect construction et financement sont présentes dans le Contrat Principal mais disparaissent dans le Contrat renouvelé pour la simple et bonne raison qu’à compter de 2016, non seulement ce qui a trait à la construction devient inutile, mais également les sommes obtenues pour le financement du projet sont complètement remboursées de là, la décision d’avoir deux contrats, le second étant incorporé au premier et qui, rappelons le, entre en vigueur automatiquement le 1er septembre 2016.
[858] Il faut noter par ailleurs et c’est au cœur des prétentions de H.Q. que la clause de flexibilité opérationnelle est présente tant dans le Contrat principal que le Contrat renouvelé.
[859] L’ensemble de ces éléments permet au Tribunal de conclure que le Contrat principal ainsi que le Contrat renouvelé constituent un ensemble contractuel indivisible.
[860] La situation du GWAC est différente.
[861] Nous avons vu que le GWAC a été précédé de ce que les parties qualifiaient de convention d’exploitation à compter du début des années 1990, or celle-ci était selon les termes employés par Monsieur Dubé une « garantie de disponibilité des 11 groupes en période de pointe »[438].
[862] Le GWAC est une continuité de cette convention et vise également une garantie de puissance en période de pointe soit la saison hivernale.
[863] Même si certains qualifient ce type d’entente de « Pure Capacity Product », le Tribunal considère plutôt que la réalité est qu’il s’agit d’une garantie d’un taux de transmission plus élevé que le « Firm Capacity » pour l’énergie livrée à partir de la Centrale.
[864] Bien que le GWAC corresponde en partie à ce que Monsieur Dubé qualifiait de « Bundle », il s’en écarte sensiblement.
[865] D’ailleurs, rappelons que la ronde de négociations ayant amené à la conclusion du GWAC avait comme toile de fond le développement du Bas Churchill, le GWAC ne constituant qu’un ancillaire[439].
[866] Peut-on relier le GWAC à l’ensemble contractuel que constituent le Contrat principal et le Contrat renouvelé? Le Tribunal estime que non puisqu’on ne peut vraiment parler de la réalisation d’une opération globale, cette capacité accrue pendant la période hivernale, même si elle avait été considérée de façon liminaire, n’a jamais été retenue lors de la conclusion du Contrat principal et renouvelé[440].
[867] Bref, l’ensemble contractuel se limite au Contrat principal et au Contrat renouvelé. Cela étant et comme nous le verrons plus loin, le GWAC ne perd pas son importance pour autant.
B) |
L’ENSEMBLE CONTRACTUEL est-il ambigu donnant ainsi ouverture au présent recours ? |
LE DROIT
[868] Il est acquis que pour donner ouverture à l’interprétation d’un contrat, une ambiguïté doit être présente sur partie de celui-ci. Le texte suivant des auteurs Baudouin et Jobin maintes fois cités résume bien l’état du droit :
« 413 - Nécessité d’une ambiguïté - Face à un contrat clair, le rôle du juge en est un d’application plutôt que d’interprétation. La différence entre application et interprétation n’est pas que sémantique : le processus d’application vise l’adéquation d’une norme juridique définie à une situation factuelle donnée, alors que l’interprétation vise à définir la portée de la norme juridique avant de pouvoir l’appliquer. Il est donc nécessaire qu’il y ait une ambiguïté ou un doute raisonnable sur le sens à donner aux termes de la convention pour enclencher le processus interprétatif; comme il a été décidé maintes et maintes fois, en l’absence d’une telle ambiguïté, le tribunal ne pourrait, sous prétexte de rechercher cette intention, dénaturer un texte clair15. Il devra s’en tenir à une application de ce qui est littéralement exprimé, tenant pour acquis que le texte reflète fidèlement l’intention des parties. L’exigence préalable d’une ambiguïté, selon l’heureuse formule de deux auteurs, « joue le rôle de rempart » contre le risque d’une interprétation qui écarterait la volonté réelle des parties et bouleverserait l’économie de leur convention16.
La soi-disant clarté peut toutefois être trompeuse. Replacés dans le contexte des autres stipulations de la convention ou celui des circonstances de sa conclusion, les termes apparemment limpides d’une stipulation peuvent se révéler ambigus et contredire l’économie du contrat, la véritable intention des parties. La règle de non-intervention du tribunal devant des mots clairs ne constitue qu’une présomption simple17. Ainsi, la qualification formelle donnée par les parties à leur contrat (vente, louage, crédit-bail) ou à certains aspects de celui-ci ne doit pas empêcher le tribunal de vérifier si cette qualification correspond bien aux effets recherchés, comme on l’a vu18. Par exemple, ce n’est pas parce que les parties ont intitulé leur convention « ventes » ou « louage », que le juge est tenu ipso facto d’appliquer les règles propres à ces contrats, s’il appert des stipulations et des circonstances que c’est un autre type de contrat que les parties ont véritablement voulu conclure.
L’ambiguïté peut provenir des termes mêmes de la convention : un mot ayant plusieurs acceptions, une construction de phrase erronée ou une contradiction entre certaines clauses du contrat en sont des exemples. Les cas de figure varient à l’infini19.[441]
[ … ] . »
( Nos soulignés )
( Références omises )
[869] Par ailleurs, le fait pour le Tribunal de déterminer dans un premier temps s’il existe une ambiguïté avant de la résoudre, bien que paradoxal, relève de sa discrétion une fois les parties entendues et la preuve administrée, chaque cas en étant un d’espèce.
[870] Qu’en est-il de cette prémisse lorsqu’en présence d’un ensemble contractuel indivisible ?
[871] Encore une fois, l’auteur Pierre-Gabriel Jobin nous éclaire de ses pensées sur ce sujet :
« Un point semble assez bien acquis : pour l’interprétation d’une clause ambiguë d’une des composantes du groupe, les juges prennent en compte sa place dans l’ensemble et la teneur des autres composantes18. D’ailleurs, sa place dans l’article 1426 du Code leur commande expressément de considérer « l’ensemble des circonstances » dans lesquelles s’est formée la convention devant être interprétée. »[442]
( Nos soulignés )
( Référence omise )
[872] Ainsi, pour déterminer l’existence d’une ambiguïté, celle-ci devra être constatée à travers le prisme de l’ensemble contractuel et non pas seulement une de ses composantes.
APPLICATION DU DROIT AUX FAITS
CONTINUOUS ENERGY
[873] Dans le cas présent, l’ambiguïté se révèle de la présence de la clause de flexibilité opérationnelle tant dans le Contrat principal que dans le Contrat renouvelé.
[874] Plus particulièrement, la présence de cette clause dans le Contrat renouvelé couplée à la définition de « Continuous Energy » qui elle ne se retrouvait pas au Contrat principal crée une réelle ambiguïté, permettant dès lors au Tribunal de procéder à l’interprétation des clauses en litige.
VENTES INTERRUPTIBLES
[875] La situation des ventes interruptibles est différente. En effet, si à l’époque des négociations, le concept existait, ce n’est qu’à compter de l’assouplissement des règles visant la transmission des produits électriques que ce marché s’est développé.
[876] Ainsi, l’ambiguïté s’articule autour du fait suivant. En fonction de l’article 6.6. du Contrat principal et 5.4 du Contrat renouvelé, CF(L)Co peut-elle vendre à des tiers, de l’énergie et de la puissance, non requise par H.Q., et dépasser à l’occasion de ces ventes, la limite du Rappel de 300 MW ? Autrement formulé H.Q. a-t-elle droit à toute la puissance et énergie pouvant être produite par la Centrale ?
C) |
tenant compte des dispositions du Code civil du Québec traitant de l’interprétation des contrats OU TOUTE AUTRE LOI APPLICABLE, de même que DE la preuve administrée, quelle INTERPRÉTATION DU CONTRAT RENOUVELÉ DOIT adopter le Tribunal, celle de CF(L)Co EN TOUT OU EN PARTIE ou celle de H.Q. |
[877] Avant d’aborder cette question qui est au cœur du litige, il y a lieu de décider si cette interprétation doit se faire en fonction des dispositions du Code civil du Bas-Canada en vigueur dans les années 1960 ou en fonction du Code civil du Québec actuellement en vigueur puisqu’une composante essentielle de l’interprétation gravite autour des négociations ayant conduit à la conclusion de l’ensemble contractuel.
[878] Cette problématique qui n’en est pas une en fait, a été abordée par H.Q. dans son plan d’argumentation.
[879] Eu égard que le Tribunal est en accord avec le cheminement intellectuel et la conclusion à laquelle en vient H.Q. tant sur le droit applicable que sur les principes d’interprétation applicables en l’espèce, et afin de ne pas réinventer la roue, le Tribunal rendant à César ce qui appartient à César, reproduit intégralement les paragraphes 598 à 610 du plan d’argumentation de H.Q. :
a) L’interprétation des contrats et le droit transitoire
« 598. Toutefois, en ce qui concerne les situations contractuelles en cours lors de l’entrée en vigueur du C.c.Q. le 1er janvier 1994, le législateur a opté, à certains égards, pour la survie de l’ancienne loi, soit le C.c.B.-C. Ainsi, l’article 4 LARCC dispose que :
4. Dans les situations juridiques contractuelles en cours lors de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, la loi ancienne survit lorsqu’il s’agit de recourir à des règles supplétives pour déterminer la portée et l’étendue des droits et obligations des parties, de même que les effets du contrat.
Cependant, les dispositions de la loi nouvelle s’appliquent à l’exercice des droits et à l’exécution des obligations, à leur preuve, leur transmission, leur mutation ou leur extinction.
599. Le Contrat, y compris son Annexe III (le Contrat renouvelé), a été formé en 1969 sous l’autorité du C.c.B.-C. Il produira ses effets jusqu’en 2041. Il s’agit donc d’une situation contractuelle en cours lors de l’entrée en vigueur du C.c.Q. Selon le texte du premier alinéa de l’article 4 LARCC, ce sont donc les dispositions et le droit en vigueur sous le C.c.B.-C. qui régissent l’interprétation du Contrat, y compris le Contrat renouvelé.
600. Dans ses commentaires, le ministre de la Justice explique comme suit le choix législatif en faveur de la survie de l’ancienne loi en matière d’interprétation contractuelle pour les situations en cours lors de l’entrée en vigueur du C.c.Q. :
Le premier alinéa introduit, à l’égard de ces situations contractuelles, la règle de la survie de la loi supplétive ancienne pour tout ce qui concerne la détermination des droits et obligations des parties contractantes, ou celle des effets ou conséquences juridiques de leur convention.
C’est dire que chaque fois qu’il s’agira, en raison du silence des parties ou d’une ambiguïté dans l’expression de leur volonté de s’en remettre à la loi pour définir le contenu et les effets d’un contrat conclu avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi mais toujours existant à ce moment, c’est à la loi ancienne, en vigueur au jour de la conclusion du contrat, qu’il faudra recourir, même si les faits qui appellent cette définition sont postérieurs à l’entrée en vigueur de la loi nouvelle.
Cette règle constitue une exception au principe, autrement applicable de l’effet immédiat de la loi nouvelle sur les situations juridiques en cours qu’énonce l’article 3. Elle veut tenir compte du fait que les parties contractantes ont conclu leur entente sur la base du droit supplétif en vigueur lors de la formation du contrat, et qu’elles ont même pu, bien souvent, demeurer volontairement silencieuses sur certains aspect de leur entente pour se soumettre globalement à ce droit supplétif.
Ø Ministère de la Justice, Commentaires du ministre de la Justice : Le Code civil du Québec - Un mouvement de société, t. III (Québec: Gouvernement du Québec, 1993), p. 7-8, CAHQ, vol. 1, onglet 8.
601. Les professeurs Côté et Jutras expriment comme suit le principe de la survie de l’ancienne loi en matière d’interprétation d’un contrat conclu avant le 1er janvier 1994 :
[E]n principe, lorsqu’il s’agit de préciser le contenu obligationnel d’un contrat antérieur, il faut avoir recours aux règles supplétives en vigueur au moment de sa formation. […] [L]es règles supplétives du nouveau code portant sur l’interprétation des contrats, les modalités des obligations contractuelles, la vente de la chose d’autrui ou la charge des risques, ne s’appliquent pas aux contrats antérieurs. En un mot, la détermination des droits et obligations des parties à un contrat antérieur doit procéder à partir de la loi ancienne.
Ø P.-A. Côté et D. Jutras, « Le droit transitoire relatif à la réforme du Code civil » dans La réforme du code civil, t. III (Sainte-Foy (Québec), Presses de l’Université Laval, 1993), para. 176 (p. 999-1000), CAHQ, vol. 1, onglet 1.
602. La jurisprudence est au même effet. Ainsi, dans l’affaire L’archevêque & Rivest Limitée c. Commission scolaire le Gardeur, la Cour supérieure explique que selon l’article 4 LARCC, c’est au droit en vigueur au moment de la conclusion d’un contrat qu’il faut recourir. Par conséquent :
Puisque le contrat est intervenu avant l’entrée du Code civil du Québec, les règles d’interprétation des contrats applicables sont celles édictées aux articles 1013 à 1021 du C.c.B.-C.
Ø L’archevêque & Rivest Limitée c. Commission scolaire le Gardeur, EYB 2007-124456 (C.S.), para. 23; voir aussi le para. 26, CAHQ, vol. 2, onglet 26;
Ø Voir aussi : Langevin c. Gestion François Cousineau inc., J.E. 2000-2 (C.A.), p. 7 et 9, CAHQ, vol. 2, onglet 27; et
Ø Bernèche c. Diioia, 2008 QCCA 595, para. 12, CAHQ, vol. 1, onglet 13;
b) Les mêmes principes régissent l’interprétation des contrats sous le Code civil du Bas-Canada et le Code civil du Québec
603. Le fait que l’interprétation du Contrat soit régie par le C.c.B.-C. ne porte pas à conséquence en l’espèce car les principes applicables sous l’ancien code et le nouveau sont les mêmes.
604. Le C.c.B.-C. prévoyait aux articles 1013 à 1021 une série de principes qui devaient guider le Tribunal dans l’interprétation contractuelle :
1013. Lorsque la commune intention des parties dans un contrat est douteuse, elle doit être déterminée par interprétation plutôt que par le sens littéral des termes du contrat.
1014. Lorsqu’une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l’entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet, que dans le sens avec lequel elle n’en pourrait avoir aucun.
1015. Les termes susceptibles de deux sens doivent être pris dans le sens qui convient le plus à la matière du contrat.
1016. Ce qui est ambigu s’interprète par ce qui est d’usage dans le pays où le contrat est passé.
1017. On doit suppléer dans le contrat les clauses qui y sont d’usage, quoiqu’elles n’y soient pas exprimées.
1018. Toutes les clauses d’un contrat s’interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l’acte entier.
1019. Dans le doute le contrat s’interprète contre celui qui a stipulé, et en faveur de celui qui a contracté l’obligation.
1020. Quelque généraux que soient les termes dans lesquels un contrat est exprimé, ils ne comprennent que les choses sur lesquelles il parait que les parties se sont proposé de contracter.
1021. Lorsque les parties, pour écarter le doute, si un cas particulier serait compris dans le contrat, ont fait des dispositions pour tel cas, les termes généraux du contrat ne sont pas pour cette raison restreints au seul cas ainsi exprimé.
605. Il en est de même des articles 1425 à 1432 C.c.Q. :
1425. Dans l’interprétation du contrat, on doit rechercher quelle a été la commune intention des parties plutôt que de s’arrêter au sens littéral des termes utilisés.
1426. On tient compte, dans l’interprétation du contrat, de sa nature, des circonstances dans lesquelles il a été conclu, de l’interprétation que les parties lui ont déjà donnée ou qu’il peut avoir reçue, ainsi que des usages.
1427. Les clauses s’interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l’ensemble du contrat.
1428. Une clause s’entend dans le sens qui lui confère quelque effet plutôt que dans celui qui n’en produit aucun.
1429. Les termes susceptibles de deux sens doivent être pris dans le sens qui convient le plus à la matière du contrat.
1430. La clause destinée à écarter tout doute sur l’application du contrat à un cas particulier ne restreint pas la portée du contrat par ailleurs conçu en termes généraux.
1431. Les clauses d’un contrat, même si elles sont énoncées en termes généraux, comprennent seulement ce sur quoi il paraît que les parties se sont proposé de contracter.
1432. Dans le doute, le contrat s’interprète en faveur de celui qui a contracté l’obligation et contre celui qui l’a stipulée. Dans tous les cas, il s’interprète en faveur de l’adhérent ou du consommateur.
606. Les articles 1013 C.c.B.-C. et 1425 C.c.Q. identifient l’objectif de l’interprétation contractuelle, soit la recherche de la commune intention des parties au moment de la formation du contrat. Cet objectif s’impose à l’interprète et constitue le fondement théorique des autres dispositions des deux codes portant sur l’interprétation des contrats.
607. En effet, les articles 1014 s. C.c.B.-C. et 1426 s. C.c.Q. sont des outils ou des « guides » pour parvenir à établir cette intention commune702. Elles sont mises à la disposition de l’interprète mais ne s’imposent pas à lui.
Ø D. Lluelles et B. Moore, Droit des obligations, 2e éd. (Montréal : Thémis, 2012), no 1587, p. 875, CAHQ, vol. 1, onglet 7.
608. Les articles 1427 à 1431 C.c.Q. représentent des arguments interprétatifs référant au texte du contrat, que ce soit à sa cohérence interne (art. 1427 à 1429 C.c.Q.) ou à des présomptions de volonté fondées sur l’existence d’une stipulation contractuelle (art. 1430 et 1431 C.c.Q.). Ces mêmes règles interprétatives existaient sous l’ancien code :
Code civil du Québec |
Disposition équivalente du Code civil du Bas-Canada |
Art. 1427 |
Art. 1018 |
Art. 1428 |
Art. 1014 |
Art. 1429 |
Art. 1015 |
Art. 1430 |
Art. 1021 |
Art. 1431 |
Art. 1020 |
609. Si l’article 1426 C.c.Q. ne trouve pas d’équivalent dans le texte de l’ancien code, il est bien reconnu que cette disposition ne modifie pas le droit et qu’elle n’est qu’une codification du droit prétorien. Ainsi, même si certains des éléments mentionnés à cet article ne se retrouvaient pas dans la lettre de l’ancien code, la jurisprudence les avait reconnus.
Ø P.-G. Jobin et N. Vézina, Les obligations, 7e éd. (Cowansville (Qué.) : Yvon Blais, 2013, p. 500, CAHQ, vol. 1, onglet 5.
610. Bref, tant sous le C.c.B.-C. que sous le C.c.Q., le rôle du Tribunal en l’espèce consiste à identifier l’intention commune des parties au moment de la formation du Contrat et les outils pour y parvenir sont les mêmes. »
( Nos soulignés aux paragraphes 599 et 609 de la citation )
[880] Bref, que ce soit sous le Code civil du Bas-Canada ou le Code civil du Québec, les principes de base de l’interprétation des contrats demeurent les mêmes tels qu’élaborés ci-après.
LE DROIT APPLICABLE
[881] Tel que relaté dans la citation précédente, le droit applicable fut codifié afin de refléter l’ancien droit et les dicta jurisprudentiels, les principaux articles étant 1425, 1426 et 1428 C.c.Q., le Tribunal les reproduit :
1425. Dans l'interprétation du contrat, on doit rechercher quelle a été la commune intention des parties plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes utilisés.
1426. On tient compte, dans l'interprétation du contrat, de sa nature, des circonstances dans lesquelles il a été conclu, de l'interprétation que les parties lui ont déjà donnée ou qu'il peut avoir reçue, ainsi que des usages.
1428. Une clause s'entend dans le sens qui lui confère quelque effet plutôt que dans celui qui n'en produit aucun.
[882] Ainsi, l’article 1426 établit quatre critères aux fins d’interprétation, ce sont les suivants.
- |
La nature du contrat. |
- |
Les circonstances de sa conclusion. |
- |
L’interprétation donnée par les parties |
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Les usages |
[883] Le Tribunal considère qu’un autre élément doit être considéré soit celui de l’identité des contractants et leur motivation en rapport au projet commun. En effet, dans des projets complexes à plusieurs volets, la motivation d’une des parties sur un seul de ces volets, peut servir à expliquer les tenants et aboutissants des autres.
NATURE DU CONTRAT
[884] La nature du contrat est abordée de façon liminaire par les auteurs et la jurisprudence puisque, et c’est souvent le cas, assez évidente. Ainsi, un contrat nommé telle la vente ou un contrat d’adhésion emportera des règles qui en faciliteront son interprétation
[885] Qualifier la nature d’un contrat est tout aussi important lorsqu’il s’agit d’un contrat mixte ou innommé.
[886] Dans la présente affaire, l’ensemble contractuel possède toutes les caractéristiques d’un contrat mixte soit un volet entreprise en coparticipation ainsi qu’un volet vente.
[887] La définition d’entreprise est codifiée, on la retrouve au troisième paragraphe de l’article 1525 du C.c.Q. ainsi libellé :
« Constitue l'exploitation d'une entreprise l'exercice, par une ou plusieurs personnes, d'une activité économique organisée, qu'elle soit ou non à caractère commercial, consistant dans la production ou la réalisation de biens, leur administration ou leur aliénation, ou dans la prestation de services. »
[888] Dans la présente affaire, l’aspect construction de la Centrale tout comme son exploitation pendant les 40 premières années alors que dans les faits, H.Q., contrôle le niveau des réservoirs en interaction avec son propre parc de production, constitue l’entreprise.
[889] L’identité des contractants, leur lien ou absence de lien est d’importance dans la qualification du projet.
[890] À cela, il faut ajouter un élément à l’équation et non le moindre, puisque H.Q., à l’époque des négociations, est coactionnaire de CF(L)Co à hauteur de 34,2 % avec Brinco, alors détentrice de 65,8 % des actions[443].
[891] Ainsi, quant à l’aspect entreprise de l’ensemble commercial, le Tribunal devra tenir compte des attentes raisonnables de chacun des actionnaires.
[892] Bien que cet aspect n’ait pas été plaidé par les parties, il peut s’inscrire dans le contexte des circonstances entourant la conclusion du contrat que nous aborderons plus loin. En effet, l’approche d’un contrat par des parties non liées est certes différente de celle envisagée par des parties liées dans leur actionnariat.
[893] Si la vocation de H.Q. est constante depuis sa création, ce n’est pas le cas pour l’actionnaire de contrôle de CF(L)Co. Ainsi, lors des négociations ayant mené à la conclusion de l’ensemble contractuel, Brinco était le promoteur du projet, et à cette époque, celle-ci n’avait certes pas la même vision de l’aventure commune que son successeur à compter de 1975 NLH, qui était, jusqu’à tout récemment, le bras énergétique de la province de Terre-Neuve.
LES CIRCONSTANCES ENTOURANT SA CONCLUSION
LE DROIT
[894] Les tribunaux et les auteurs ont cherché à définir le terme « circonstances ».
[895] De façon générale, tous s’accordent pour dire que ces circonstances comprennent les documents périphériques au contrat tel offre préalable, projet de contrat, etc.[444]
[896] Les auteurs Baudouin et Jobin vont plus loin dans ce qu’ils qualifient de contexte commercial :
« 415 - Raisonnabilité - Mis à part les principes d’intention commune, d’équité et de bonne foi, les tribunaux interprètent parfois les contrats ambigus à la lumière d’un autre principe, complémentaire à vrai dire, soit celui de la raisonnabilité. Tel que mentionné précédemment, le juge ne peut se permettre, sous prétexte d’interpréter, de réécrire le contrat de façon à ce qu’il produise des effets contraires à ce qui y a clairement été stipulé. Mais il lui arrive de plus en plus souvent de faire une lecture des clauses obscures qui soit à la fois raisonnable et compatible avec la convention32; de deux interprétations, il écartera celle qui lui paraît déraisonnable car elle mènerait à un résultat incongru, illogique par rapport à l’objectif des parties, ou carrément absurde. L’objectif poursuivi par les parties en concluant le contrat joue un rôle de plus en plus important dans l’exercice d’interprétation33. Dans la même veine, la recherche d’un sens raisonnable est souvent effectuée par référence au contexte commercial ou autre entourant la formation du contrat34. La Cour suprême n’a-t-elle pas enseigné qu’il fallait rejeter une interprétation littérale entraînant un résultat irréaliste, que n’auraient pas envisagé les parties dans le contexte commercial dans lequel la convention a été conclue; et n’a-t-elle pas affirmé que, de deux interprétations, il fallait préférer la plus raisonnable, celle qui produira un « résultat équitable (fair) »35 ? Dans ses règles d’interprétation, le Code ne mentionne pas la raisonnabilité; aussi, les juges y font-ils appel en invoquant souvent la recherche de l’intention commune des parties36.
Cette approche rejoint la prise en compte des circonstances entourant la formation du contrat (art. 1426 C.c.Q.), dont il sera question dans un instant. Il n’est pas sans intérêt de noter que le Projet de réforme du droit des contrats du Code civil français, dispose justement que « [à] défaut de déceler la commune intention des parties, le contrat s’interprète selon le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation »37; on retrouve la même disposition dans les Principes d’UNIDROIT à peu de choses près38. Cette règle, relativement nouvelle, enrichit le régime d’interprétation du contrat. Elle doit cependant être utilisée avec discernement, voire avec modération : elle ne doit pas mener à l’arbitraire du juge. »[445]
(Nos soulignés)
[897] Le Tribunal retient de ces textes que non seulement, la partie documentaire et/ou périphérique d’un contrat fait partie des circonstances mais aussi, en appliquant le test de la raisonnabilité, l’intention commune.
[898] Dans la présente affaire, pour des raisons évidentes aucun des acteurs ayant participé aux négociations n’a témoigné. Ainsi la recherche de l’intention commune dans l’ensemble contractuel en cause, somme toute assez unique, passe par l’identité des acteurs en présence, le contexte socio-économique et politique ainsi que les documents périphériques.
APPLICATION DU DROIT AUX FAITS
[899] En 1958, Brinco se voit octroyer par Terre-Neuve les droits sur le fleuve Churchill pour une première période de 99 ans renouvelable à son expiration pour une seconde période de 99 ans.
[900] Le fait de confier le développement du Fleuve Churchill à une entreprise privée n’est pas étonnant puisque le poids démographique et économique de Terre-Neuve ne justifiait pas le développement public de cette ressource[446].
[901] La pierre angulaire de ce projet en est le financement tant pour Brinco que pour H.Q.
[902] Rappelons qu’aux termes du Prospectus, la Centrale était financée à presque 100 %. Cela étant, les risques financiers tels manque de liquidité, destruction de l’ouvrage, taux de change, variation du taux d’intérêt, etc. étaient supportés par l’actionnaire minoritaire en l’occurrence H.Q. et ce, pour les 40 premières années du contrat.
[903] S’il est normal, en certaines circonstances, pour un actionnaire plus fortuné, de supporter une plus grande partie des risques financiers d’une coentreprise, il n’en reste pas moins qu’il s’agit là pour un actionnaire minoritaire, d’une situation exceptionnelle. Même si la preuve est liminaire sur l’importance que pouvait accorder H.Q. au fait d’être actionnaire de CF(L)Co, il n’en reste pas moins que H.Q. a toujours eu des membres de sa haute direction sur le conseil d’administration de CF(L)Co. Dès lors, il est raisonnable de penser que H.Q. voyait le projet comme une aventure commune, avec un partenaire qui devrait nécessairement tenir compte de ses attentes.
[904] Bref, bien que peu rentable, le projet ne comportait à toutes fins pratiques, aucun risque pour l’actionnaire de contrôle.
[905] Rapidement dans l’équation, Brinco a décidé de développer le plein potentiel du Haut Churchill. Cette production à l’époque représentait à elle seule la presque totalité de la production de H.Q. pour le Québec dont la population à cette époque est 12 fois supérieure à celle de Terre-Neuve.
[906] Inutile de dire que cette production était destinée au Québec puisqu’à cette époque aucune ligne de transmission ne relie le Labrador à l’Île de Terre-Neuve, bien que cette situation soit en voie de changer.
[907] Brinco devait conclure un contrat de vente d’électricité avec H.Q. si elle voulait obtenir le financement requis pour la construction de la Centrale.
[908] Évidemment, H.Q. a requis et obtenu des concessions importantes au niveau de la tarification. Cela étant, comme nous le verrons, dans le cadre des négociations, elle-même en a consenties notamment quant au « Take or Pay » et « Split Tarif ».
[909] Quel était donc le but recherché par l’actionnaire de contrôle de CF(L)Co ?
[910] La réponse est à deux volets, ce sont les suivants.
· Rendement sur un investissement de 60 millions de dollars.
· Valeur résiduelle de la Centrale à l’expiration de 65 ans.
[911] Le retour sur un investissement de 60 millions pour Brinco, ressort du rapport final d’Ebasco[447] dans lequel il est précisé que Brinco quantifiait à 60 millions son investissement et désirait un rendement en conséquence.
[912] Comment expliquer cette attente alors que la valeur de l’ouvrage frise un milliard de dollars. La réponse ne peut que se situer dans la valeur résiduelle de celui-ci une fois la dette remboursée.
[913] Bien que la valeur résiduelle de l’ouvrage n’ait jamais été évoquée, il est inconcevable de penser que le promoteur du projet, Brinco, n’en ait pas été conscient. Ainsi, le fait pour Brinco d’obtenir les droits sur le fleuve Churchill pour deux périodes de 99 ans démontre sa vision à long terme, son corollaire étant nécessairement la valeur de l’ouvrage une fois la dette remboursée.
[914] Brinco a obtenu les droits sur le fleuve Churchill en 1953 en contrepartie de l’obligation d’investir 1 250 000,00 $ par tranches de cinq (5) ans. Or, en 1974 soit 21 ans plus tard, Terre-Neuve achetait 4 989 330 actions de CF(L)Co détenues par Brinco pour la somme de 160 000 000,00 $ millions[448] de dollars. Le rendement est plus qu’intéressant surtout si l’on considère qu’à peine six ans plut tôt, Brinco évaluait son investissement à 60 millions.
[915] Que dire de la valeur résiduelle en 2015 que Monsieur Vandal évalue à 20 milliards de dollars[449].
[916] On peut certes présumer que Brinco alors contrôlée par des industriels était bien au fait de l’importance de la valeur résiduelle de l’ouvrage.
[917] Attardons-nous maintenant aux négociations comme telles.
[918] Nous avons vu que les négociations entourant la conclusion de l’ensemble contractuel se sont déroulées entre février 1961 et juillet 1968 bien que le contrat soit signé quelques dix (10) mois plus tard, soit le 12 mai 1969[450].
[919] La première ronde de quelques mois à peine ne servira qu’à mettre la table pour les rondes futures. Cela étant, l’on constate que H.Q. dans un premier temps en mettant fin aux négociations, fait le choix stratégique de développer son propre parc en l’occurrence le projet Manicouagan[451].
[920] Ce choix se veut la première manifestation par H.Q. de l’importance qu’elle accorde à son Parc par rapport au projet.
[921] La seconde ronde tenue de mars 1963 à juillet 1964 affine les positions de chacun.
[922] La notion de « Take or Pay » sera longuement discutée et fera l’objet d’un va-et-vient entre les négociateurs. Ainsi si H.Q. s’y oppose fermement au début[452] elle finira par l’accepter puisqu’essentielle au financement.
[923] Sont également discutés et acquis d’autres principes soit le Bloc Twinco et le Bloc Rappel bien que la quantité de celui-ci ne soit pas encore fixée.
[924] La preuve documentaire démontre certaines préoccupations de la part de H.Q., les principales sont :
- L’exportation vers New York.
- La quantité d’énergie disponible et la garantie de livraison.
[925] Nous verrons plus loin que devant l’impossibilité d’exporter vers les États-Unis, H.Q. décidera tout de même d’aller de l’avant avec le projet.
[926] Cela laisse donc la question de quantité d’énergie et garantie de livraison.
[927] À l’occasion de cette seconde ronde de négociation, le projet, à tout le moins son côté technique, en est à ses premiers balbutiements. Ainsi en 1963, Acres convient qu’elle n’est toujours pas en mesure d’évaluer la quantité de « Firm Energy »[453].
[928] Autre point d’importance est l’utilisation par les négociateurs d’une terminologie qui n’est pas constante.
[929] Rappelons qu’à l’occasion de la première ronde, la quantité d’énergie était évoquée en chevaux-vapeur, elle le sera également à quelques occasions pendant la seconde ronde.
[930] Pendant celle-ci, plusieurs vocables relatifs à la puissance et l’énergie seront utilisés. Notons les suivants :
- Firm annual energy generation.
- Guaranteed minimum energy output.
- Secondary energy.
- Primary energy.
- Firm capacity and associated energy.
- Spare capacity and associated energy, etc.
[931] De toute évidence, les négociateurs de CF(L)Co réalisent qu’existe une certaine inconstance dans la terminologie utilisée puisque Monsieur McParland se voit remettre en novembre 1963, le lexique intitulé « Glossary of Electric Utility Terms »[454].
[932] Ce lexique [455] contient une foule de définitions des plus diverses dont « Firm Energy », « Primary Energy » « Secondary Energy ». Cela étant, sous le vocable « Energy » n’apparaît aucune définition de « Continuous ».
[933] Cette réalité est constatée par l’experte de CF(L)Co dans son rapport portant sur la « Continuous Energy » puisque pour conclure à l’existence du concept « Continuous Energy » elle doit nécessairement l’associer à celui de « Firm Energy »[456].
[934] Madame Bodell admettra d’ailleurs dans le cadre de son contre-interrogatoire que le terme « Continuous Energy » à cette époque, n’est défini nulle part[457] dans les ouvrages techniques.
[935] Cette dernière dans son expertise, prend bien soin, de dissocier « Continuous Energy » de l’énergie excédentaire pour conclure que selon elle, celle-ci n’a jamais été considérée par les parties comme étant disponible pour H.Q. dans les 25 années du Contrat renouvelé.
[936] En fait, le terme « Continuous Energy » sera abordé dans une lettre de Monsieur Winters de Acres à Monsieur Lessard de H.Q. en mars 1964 à laquelle il n’y aura pas de suite[458].
[937] Le Tribunal constate qu’à l’issue de cette deuxième ronde, si certains concepts sont acquis tel que « Take or Pay », « Bloc Twinco », « Bloc Rappel », reste toujours sur la table la quantité exacte d’énergie disponible pour H.Q.
[938] Le Tribunal constate également que la terminologie utilisée pour décrire la puissance et l’énergie dans le cadre de la lettre d’intention envisagée varie grandement au fil des mois et selon l’auteur.
[939] Par ailleurs, H.Q. réalisant que l’exportation de produits électriques vers les États-Unis devient problématique, envisage un contrôle complet de la production de la Centrale, ce contrôle passant par celui des réservoirs[459].
[940] Passons maintenant à la ronde finale.
[941] Ce qui fut acquis à l’occasion de la seconde ronde de négociation ne sera pas remis en question, le premier projet de lettre d’intention du 19 mai 1965 ressemble beaucoup au projet transmis par Monsieur Winters en mars 1964. On y retrouve également la notion de « Continuous Energy ».
[942] En juin 1965, H.Q. soumet à CF(L)Co, deux projets de lettre d’intention dans lesquels elle définit « Continuous Energy ». La première contient la mention suivante « shall mean all energy which can be made available on a monthly basis », alors que la seconde élimine la notion de « monthly basis » pour se lire comme suit : « shall mean all energy made available at the agreed point of delivery »[460].
[943] Or, toujours en juin 1965, le projet échangé entre les parties prévoyait à sa clause 10 l’achat par H.Q. de toute l’énergie disponible de la Centrale, soit la « Continuous Energy » et l’énergie excédentaire.
[944] Bref, le terme « Continuous Energy » lorsque conjugué avec l’ensemble des clauses des projets de lettre d’intention signifiait toute l’énergie produite à la Centrale.
[945] Cette simple constatation, contredit l’opinion de Madame Bodell, à l’effet que CFL(Co) entendait se réserver l’énergie excédentaire.
[946] En fait, le terme « Continuous Energy » sera utilisé par les parties dans le cadre de la lettre d’intention pour désigner ce qui sera disponible pour H.Q. pendant la phase construction et mise en marche des unités[461].
[947] S’affinera également la quantité d’énergie disponible pour H.Q. celle-ci variant de 34 milliards de KWH à 32.2 milliards de KWH.
[948] Au début de 1966, H.Q. apprend que son plan d’exportation vers les États-Unis est définitivement compromis mais décide tout de même d’aller de l’avant avec le projet. Dès lors, l’intégration complète de Churchill Falls au réseau de H.Q. est analysée de façon détaillée[462].
[949] L’intégration de Churchill Falls à son réseau a toujours été présente pour H.Q. Toutefois, le fait de ne plus avoir de possibilités d’exportation place cette intégration en tête des priorités de H.Q.
[950] La lettre d’intention est signée le 3 octobre 1966.
[951] Ces trois premières rondes jettent la lumière sur l’évolution du cheminement de chaque partie.
[952] Ainsi, pour CF(L)Co, outre les Blocs Twinco et Rappel, l’emphase est mise sur des considérations directement liées au financement du projet soit le « Take or Pay ».
[953] Quant à H.Q. une fois qu’elle aura digéré les demandes de CF(L)Co, ses considérations seront plus techniques et en lien avec la compromission des exportations vers les États-Unis. Ainsi, celles-ci s’articulent autour des pôles suivants.
- Quantité d’énergie disponible et à quel prix.
- Intégration de Churchill Falls à l’ensemble de son réseau.
- Terme du contrat alors établi à 40 ans[463].
[954] Reste la négociation finale et la plus importante puisque témoin de changements de cap importants, à telle enseigne qu’une des toutes premières clauses du Contrat principal est la suivante.
« 1.7 Letter of intent
The letter of Intent executed between the parties hereto under date of October 13, 1966 is hereby fully superseded and replaced. »
[955] Le premier changement important est la question du « Split Tarif » lequel s’il est intégré au contrat principal n’est pas présent au contrat renouvelé.
[956] Ainsi, en vertu du « Split Tarif » H.Q. assume le risque lié à l’hydrologie. Cela étant, la contrepartie est le fait pour H.Q. d’obtenir le contrôle des réservoirs.
[957] D’ailleurs, l’expert Lapuerta met, à juste titre, beaucoup d’emphase sur le risque lié à l’hydrologie, ainsi qu’à la gestion des réservoirs.
[958] Le Tribunal estime qu’au-delà de la clause de flexibilité opérationnelle contenue tant dans le Contrat principal que le Contrat renouvelé, le traitement de la clause « Split Tarif » est révélateur de l’intention des parties.
[959] Lorsque le principe du « Split Tarif » sera accepté par H.Q., la notion de « Continuous Energy » est abandonnée et on introduit alors le concept d’ « Annual Energy Base »[464].
[960] Autre modification importante est l’identité de la partie qui contrôle les livraisons d’électricité. Ainsi, dans un premier temps CF(L)Co devait transmettre à H.Q. une évaluation de ses disponibilités d’énergie, celle-ci devant s’en contenter[465].
[961] Cette situation ne satisfait pas H.Q. notamment quant à l’intégration de Churchill Falls à son Parc existant et futur[466].
[962] Ce changement sera accepté par CF(L)Co cédant ainsi le contrôle des réservoirs à H.Q. moyennant certaines assurances consenties à CF(L)Co notamment :
« Hydro-Québec have recognized that CF(L)Co should not suffer any loss of revenue which would have been available to CFL(Co under the previous concepts ».[467]
[963] D’ailleurs, ce changement de cap important entraînera l’introduction de la clause de flexibilité opérationnelle.
[964] Finalement sera négociée la clause de renouvellement qui jusqu’alors n’avait été abordée que du bout des lèvres.
[965] Les principales considérations évoquées par H.Q. sont le prix et la durée de ce renouvellement.
[966] Le Tribunal constate qu’aucun autre changement dans les divers concepts élaborés et acceptés par les parties prenantes au Contrat principal ne sont alors remis en cause[468].
[967] De fait, la clause de flexibilité opérationnelle se retrouve dans le Contrat principal et le Contrat renouvelé.
[968] Tel que mentionné plus tôt, l’expert Lapuerta est d’opinion que le concept de « Split Tariff » entraînant la prise de contrôle des réservoirs par H.Q. est conséquent avec l’approche que celui qui contrôle les réservoirs doit supporter le risque[469].
[969] Il est intéressant de noter que Monsieur Martin partage l’opinion de Monsieur Lapuerta sur ce sujet[470].
[970] Or, en vertu de l’interprétation que fait CF(L)Co du Contrat renouvelé celle-ci reprend le contrôle des réservoirs puisqu’en vertu des 40 premières années d’exploitation de la Centrale et par le calcul de l’AEB les parties sont en mesure de connaître très exactement la capacité de production de la Centrale, et c’est cette capacité constatée à l’AEB final que doit payer H.Q. qu’elle en prenne livraison ou non et qu’elle soit disponible ou non.
[971] Monsieur Lapuerta quant à l’AEB précise qu’il s’agit là d’une moyenne sur 40 années d’exploitation ce qui ne veut pas nécessairement dire que dans une année donnée, les apports d’eau seront suffisants pour même rencontrer l’interprétation que fait CF(L)Co de « Continuous Energy ».
[972] Dans un tel cas, le risque serait entièrement assumé par H.Q. selon Monsieur Martin, celle-ci devant payer pour de l’énergie qu’elle n’aurait pas reçue[471].
[973] H.Q. soulève que si elle a consenti à payer en dépit des risques reliés à l’hydrologie, elle n’a jamais consenti à payer pour de l’énergie dont elle n’obtiendrait pas livraison, soit en raison de ventes à des tiers, soit en raison de l’entretien des groupes ou du réseau de transmission[472].
[974] La preuve administrée devant le Tribunal démontre-t-elle que l’interprétation que fait maintenant CF(L)Co de l’expression « Continuous Energy » dans le Contrat renouvelé ait été envisagée par les parties lors des négociations ayant mené à la conclusion de l’ensemble contractuel ?
[975] Le Tribunal est d’avis que non. Voici pourquoi.
[976] Il s’agit d’un projet unique et négocié sur une période s’étalant sur huit (8) années.
[977] Pendant ces huit (8) années, la preuve démontre que les parties ont utilisé plusieurs vocables différents pour décrire soit la capacité soit l’énergie. De fait, pendant la courte période de temps où fut utilisée l’expression « Continuous Energy » et ce, avant l’introduction des concepts « Split Tariff » et « Annual Energy Base », celle-ci désignait toute la production de la Centrale.
[978] Le principal argument de CF(L)Co repose sur l’expertise de Madame Bodell lorsque celle-ci assimile la « Firm Energy » à la « Continuous Energy » et son corollaire voulant que CF(L)Co se soit dès lors, réservée la propriété de l’énergie excédentaire.
[979] Or, malgré cette opinion de Madame Bodell un fait incontournable demeure, en effet rien dans la preuve documentaire ne vient supporter cette affirmation.
[980] Au contraire, si l’on tient compte de la dette énorme liée au projet comment CF(L)Co aurait-elle pu justifier auprès de ses créanciers le fait de conserver de l’énergie excédentaire pour le futur ?
[981] La réalité est que toute la production envisagée de la Centrale était vendue que ce soit à H.Q. ou par le biais des Blocs Réservés.
[982] Que veut donc dire « Continuous Energy » alors ?
[983] Rappelons tout d’abord qu’à l’époque des négociations pendant laquelle était utilisé le terme « Continuous Energy » celui-ci était couplé avec l’énergie excédentaire faisant en sorte que H.Q. s’engageait à acheter et CFL(Co) à vendre la totalité de la production de la Centrale moins les Blocs Réservés.
[984] De fait, pendant les quarante premières années de l’ensemble contractuel, il s’agit exactement de ce qui s’est produit. Ainsi, CF(L)Co vendait et H.Q. achetait selon la formule « Take or Pay » la totalité de la production de la Centrale moins les Blocs Réservés.
[985] Le Tribunal retient l’interprétation de Monsieur Lapuerta, quant à la signification et l’utilisation du terme « Continuous Energy » au Contrat renouvelé, certes la plus logique dans les circonstances.
[986] En effet, l’application des clauses « Split Tariff » et « Annual Energy Base» qui ont amenés à l’abandon de l’expression « Continuous Energy » fait en sorte que pendant les premières quarante années de l’ensemble contractuel, H.Q. supportait les risques liés à l’hydrologie, la contrepartie étant qu’elle contrôlait alors les réservoirs.
[987] Une fois cette première période écoulée, le tarif pour l’énergie devient fixe pour les vingt-cinq prochaines années. Cette réalité couplée avec le fait que H.Q. est toujours soumise à la condition « Take or Pay » rend plus que vraisemblable que les parties aient voulu s’assurer, en mesurant la première période de quarante ans, de la capacité réelle de production de la Centrale.
[988] Pour la suite des choses soit les vingt-cinq prochaines années, les parties connaissant la production exacte de la Centrale tant pour les bonnes que les mauvaises années, abandonnent le « Split Tariff », H.Q. devenant tributaire du plein paiement de cette production, au taux convenu. L’utilisation du terme « Continuous Energy » peut dès lors se comprendre surtout que la dernière définition utilisée par les parties est la suivante « shall mean all energy made available at the agreed point of delivery »[473].
[989] Par ailleurs, rien dans la preuve, laquelle est hautement documentée, ne démontre que les parties aient envisagé un changement aussi drastique tel que celui proposé par CF(L)Co, pour les vingt-cinq dernières années de l’ensemble contractuel.
[990] Au contraire d’un changement drastique que penser de l’utilisation répétée du terme « Extension » à l’occasion d’une réunion du conseil d’administration portant presque uniquement sur le renouvellement du Contrat principal[474].
[991] Voici d’ailleurs la définition de « Extension » au Oxford Dictionnary of English[475].
« A part that is added to something to enlarge or prolong it (…)
An application of an existing system or activity to a new area (…) ».
[992] Rappelons que selon CF(L)Co, H.Q. jouit tout de même d’une certaine flexibilité intramensuelle pour gérer la limite de l’AEB final divisé en tranches mensuelles. Au-delà de cette limite mensuelle et si H.Q. veut plus de puissance et d’énergie, elle doit payer. Parallèlement, et c’est surtout vrai pour la période estivale, si H.Q. consomme moins que l’AEB final, toujours divisé par douze, elle doit tout de même payer.
[993] Cette avenue maintenant envisagée par CF(L)Co ne se révèle pas des négociations et discussions mises en preuve.
[994] Au contraire de ce mutisme, apparaît tant au Contrat principal que renouvelé, la clause de flexibilité opérationnelle.
[995] Cette flexibilité opérationnelle est décrite par H.Q. et son expert Monsieur Lapuerta comme étant pluriannuelle et plurisaisonnière. La première permettant à H.Q. de gérer les apports d’eau quant à l’ensemble de son réseau et la seconde, lui permettant d’importer en période de pointe de l’énergie et puissance inutilisée notamment pendant la période estivale.
[996] Cette flexibilité recherchée par H.Q. est longuement documentée tant dans les écrits émanant de Brinco ou CF(L)Co à l’époque que ceux de H.Q.
[997] Par ailleurs, on ne peut s’empêcher de remarquer que le dernier alinéa de la clause de flexibilité opérationnelle, contenue aux deux contrats de l’ensemble contractuel, traite de rapports que doit fournir H.Q. quant à l’hydrologie lesquels perdent tout leur sens si les parties avaient eu l’intention d’apporter un changement aussi drastique comme le soutient CF(L)Co.
[998] Ainsi, comme l’indiquait Monsieur Sansoucy dans son témoignage les apports d’eau annuels, en pluie ou en neige peuvent être fort différents pour les réservoirs de La Grande, Manicouagan et Churchill Falls[476].
[999] Cette question d’interdépendance entre deux centrales n’est pas unique à H.Q. Rappelons le témoignage de Monsieur Martin sur la pertinence de la gestion des réservoirs de Churchill Falls dans le Haut Churchill, pour la stabilité de la Centrale Muskrat Falls celle-ci située dans le Bas Churchill.
[1000] Bref, le Tribunal conclut que l’ensemble de la preuve ne démontre pas que les négociateurs aient voulu donner le sens que suggère CF(L)Co à la notion de « Continuous Energy » puisqu’à la seule occasion où cette expression fut utilisée, outre la période de construction, elle signifiait toute la production de la Centrale.
[1001] De plus, l’interprétation de CF(L)Co ne cadre pas avec l’ensemble contractuel considéré et négocié par les parties et que celle-ci constituerait un virage drastique que ne révèle pas la preuve administrée devant le Tribunal.
[1002] Voyons maintenant le troisième critère mentionné à l’article 1426 C.c.Q. soit l’interprétation qu’ont fait les parties du contrat pendant son exécution.
INTERPRÉTATION DONNÉE PAR LES PARTIES
LE DROIT
[1003] Bien qu’il s’agisse essentiellement d’une question de fait, le Tribunal considère particulièrement pertinente quant à l’état du droit, une citation de l’auteur François Gendron :
« L’exécution du contrat, précise Demolombe, « c’est l’interprétation vivante et animée; c’est en quelque sorte l’aveu de la partie333 ». La Cour d’appel, dans l’arrêt Richer c. La Mutuelle du Canada334, comme jadis dans l’arrêt Perras c. Grace335, s’en remet ici à une décision de la Cour de cassation française :
Lorsque les actes présentent quelque incertitude, explique la Cour de cassation, l’interprète le plus sûr en est l’exécution volontaire, formelle et réitérée que leur ont donnée les parties intéressées, qui se rendent ainsi non recevables à méconnaître ensuite leur propre fait. »[477]
( Nos soulignés )
( Références omises)
[1004] Il s’agit là du principe général devant guider le Tribunal. Cela étant, certains faits particuliers à la présente affaire font en sorte qu’à l’occasion de l’analyse des faits, le Tribunal reviendra sur certains concepts abordés par nos tribunaux.
APPLICATION DU DROIT AUX FAITS
[1005] H.Q. a prouvé un certain nombre de faits qui selon elle, supportent sa position dont notamment le fait que ce n’est que vers 2008 ou 2009 que CF(L)Co a développé son interprétation du Contrat renouvelé ayant provoqué les présentes procédures[478].
[1006] Sur ce sujet bien précis, H.Q. cite l’arrêt Sobeys Québec c. Coopérative des consommateurs de Ste-Foy[479].
« Ce n’est qu’à l’instigation de ses vérificateurs qu’elle commencera à contester le fait que l’on n’ait pas déduit la TINR du loyer à pourcentage, ce qui est bien tardif dans les circonstances. On peut d’ailleurs parler ici d’une sorte d’opportunisme, [la sous-locatrice] saisissant l’occasion de contestation que lui offre le libellé du Sous-bail […], dont elle réalise à ce moment-là qu’il ne contient pas la « clause TINR » à laquelle elle a pourtant consenti mais qui a été malencontreusement omise. »
[1007] H.Q. cite également l’arrêt Richer c. La Mutuelle du Canada, Compagnie d’assurance sur la vie[480] déjà citée par l’auteur Gendron, pour supporter ce qu’elle qualifie « d’opportunisme ».
[1008] Si, la constatation des faits par la Cour d’appel dans l’arrêt Sobeys l’a amenée à qualifier une prétention d’opportuniste, il faut bien se rendre à l’évidence qu’il s’agissait là d’une situation particulière et qui résultait d’un oubli dans un sous-bail.
[1009] C’est loin d’être le cas dans la présente affaire. Toutefois, la période à laquelle est élaborée une nouvelle théorie, quant à l’interprétation d’un contrat, est l’un des éléments sur lesquels doit reposer l’appréciation du Tribunal.
[1010] Par ailleurs, cette même période à laquelle fut élaborée une nouvelle théorie est révélateur de l’état d’esprit d’un cocontractant pendant la période précédant son ébauche.
[1011] En effet, l’interprétation d’un contrat par une ou des parties, se traduit par leurs comportements.
[1012] Qui plus est, cette nouvelle théorie ne peut avoir pour effet d’annihiler le comportement d’une partie antérieurement à cette « révélation » lequel a certainement créé des attentes légitimes de la part de son cocontractant.
[1013] À cet égard rappelons, entre autres, les négociations de 1995-1996 alors que Monsieur Mercer de CF(L)Co transmet le 5 septembre 1995 à Monsieur Dubé des projections financières qui s’étendent jusqu’en 2041 sans que ne soit abordé la notion de « Continuous Energy » telle qu’actuellement mise de l’avant par CF(L)Co[481].
[1014] Également révélateur est le fait qu’un contrat intervenu entre CF(L)Co et NLH le 9 mars 1998, parallèlement à la conclusion du GWAC et portant sur le Rappel de 300 MW, est valable jusqu’au 31 août 2041 soit exactement le terme du Contrat renouvelé[482].
[1015] En fait, l’ensemble de la preuve quant au comportement des parties, jusqu’en 2007 démontre qu’ils considéraient l’ensemble contractuel comme un tout, dont le terme est 2041.
[1016] En fait, toute la preuve, tend vers cette interprétation sauf quant à un document isolé, à l’occasion de la ronde de négociation de 1989 à 1992 et sur lequel CF(L)Co met beaucoup d’emphase[483].
[1017] Le simple énoncé que « to do anything which might be construed as confirming or improving for Hydro-Québec’s benefit, the existing arrangments » ne peut à lui seul, contredire l’ensemble du comportement de CF(L)Co pendant l’exécution du Contrat principal.
[1018] Dans la présente affaire, au-delà de ces constatations et au-delà des déclarations contenues aux états financiers de CF(L)Co année après année, l’élément le plus important est la conclusion du GWAC en 1998 qui enchâsse définitivement les droits de H.Q. si ce n’était pas déjà fait.
[1019] Le GWAC dont la fin du terme correspond à la fin du contrat renouvelé est certes révélateur de la flexibilité recherchée par H.Q.
[1020] Rappelons que le GWAC avait été précédé du Contrat d’exploitation dont les caractéristiques ressemblaient beaucoup à ceux du GWAC[484].
[1021] D’ailleurs, comme nous l’avons vu, même dans le cadre des négociations entre la Lettre d’intention et la conclusion du Contrat principal, l’idée de puissance accrue pendant les mois d’hiver avait été abordée par les négociateurs[485].
[1022] Or, le prix payé par H.Q. pour la puissance accrue en vertu du GWAC, croît d’année en année jusqu’en 2041.
[1023] Les témoins ordinaires de même que l’expert Lapuerta sont unanimes pour dire que H.Q. n’aurait pas consenti à ce contrat et surtout à ses modalités, s’ils avaient connu l’interprétation que voulait donner CF(L)Co à la notion de « Continuous Energy » à compter du 1er septembre 2016.
[1024] En effet, même en jouissant d’une flexibilité que les parties qualifient d’intramensuelle, la gestion du GWAC telle que les parties l’ont faite depuis 1998 deviendrait impossible. Ainsi, H.Q. devrait choisir des plages spécifiques tant journalières qu’horaires pour ne pas dépasser la limite de ce que CF(L)Co conçoit comme étant disponible pour H.Q.
[1025] Rappelons également la déclaration de Monsieur Vandal, laquelle illustre parfaitement la situation du GWAC face à l’interprétation de CF(L)Co :
« […] Si l’énergie elle-même est limitée, on se trouverait à payer pour des mégawatts disponibles, sans être capable d’en tirer un avantage […] ».[486]
[1026] Clairement, cette situation n’a jamais été envisagée en 1998, ni même évoquée.
[1027] Il est acquis également que le GWAC n’est pas à sens unique, CF(L)Co y trouvant son compte puisque ce contrat rapportera environ un milliard cinq cents millions à celle-ci entre 1998 et 2041.
[1028] Le Tribunal ne peut que marquer son étonnement que l’interprétation faite par CF(L)Co et qui pourrait affecter de façon importante l’application du GWAC n’ait pas été dénoncée immédiatement celui-ci étant en cours d’exécution.
[1029] En dépit du témoignage de Monsieur Burry, le Tribunal conclut que ce n’est qu’en juin 2012 lors de la discussion sur le plan quinquennal incluant l’année 2016-2017 que H.Q. a officiellement été informée de l’avenue qu’entendait prendre CF(L)Co à compter du 1er septembre 2016.[487]
[1030] La preuve, les témoignages convainquent le Tribunal que jusqu’à l’élaboration de sa nouvelle interprétation, CF(L)Co a toujours agi, quant à l’aspect flexibilité comme si le contrat renouvelé était simplement une suite dans le temps de ce que les parties ont mis en pratique pendant les quarante premières années de l’ensemble contractuel.
[1031] Ce constat constitue à toutes fins pratiques « l’aveu de la partie » tel qu’élaboré par l’auteur français Demolombe et repris par l’auteur François Gendron.
LES USAGES
LE DROIT
[1032] S’agissant encore une fois d’une question de fait, voici ce que les auteurs Baudouin et Jobin nous enseignent :
« La pertinence d’un usage pour déterminer l’intention des parties repose sur une présomption : la volonté commune des parties à la convention est inférée de celle qu’ont habituellement des parties qui ont conclu un contrat semblable (par exemple le paiement d’une commission, à pourcentage, à l’agent ou au courtier dont les services avaient été retenus pour la vente d’un immeuble). Bien entendu, le tribunal privilégiera, dans la mesure du possible, des facteurs plus propres au cas d’espèce quand il y en a. Il est en effet tout à fait possible que des parties bien informées aient justement voulu ne pas se conformer aux usages et aient désiré une entente atypique. On se rappellera enfin qu’en pratique, il y a assez souvent chevauchement ou confusion entre l’interprétation selon les usages et l’interprétation conforme à la matière du contrat.
Le Code civil du Bas-Canada n’ignorait pas les usages (dont justement en matière d’interprétation du contrat66, de même que pour déterminer les obligations implicites67). »[488]
( Nos soulignés )
( Références omises )
[1033] Les auteurs Baudouin et Jobin réfèrent dans l’extrait précédent au terme « usage » mentionné à l’article 1016 C.c.B.-C. lequel fut repris par le législateur à l’article 1426 C.c.Q.
[1034] Il importe donc de définir le terme « usage ». Voici comment, il est défini dans le dictionnaire :
« Pratique que l’ancienneté ou la fréquence rend normale, dans une société. »[489]
[1035] Par ailleurs, l’auteur Hubert Reid le définit comme suit :
« 2. Pratique courante dans un milieu déterminé ou dans une profession à laquelle des personnes adhèrent sans que celle-ci repose sur des fondements juridiques. Ex. Les usages du Palais, les usages commerciaux. »[490]
APPLICATION DU DROIT AUX FAITS
[1036] La preuve d’usage fut celle principalement de CF(L)Co par le truchement des expertises de Madame Bodell et de Monsieur Kendall.
[1037] Cette preuve tentait de démontrer que soit l’expression « Continuous Energy » était connue et utilisée dans l’industrie électrique soit que la vente de blocs de puissance et d’énergie était également monnaie courante.
[1038] Quant aux blocs d’énergie et puissance, bien que le Tribunal n’ait pas retenu l’opinion de Monsieur Kendall celui-ci rapporte tout de même l’existence de certains contrats, en fait trois, dont deux de ceux-ci sont pour des quantités d’énergie négligeables comparés à la production de Churchill Falls[491].
[1039] Madame Bodell quant à elle a concentré son rapport pour conclure que « Continuous Energy » équivalait à « Firm Energy » et que dès lors H.Q. n’avait pas droit à ce qu’elle qualifie d’Excess Energy ou énergie excédentaire.
[1040] Comme le Tribunal l’a souligné au chapitre de la preuve quant à l’expertise de madame Bodell, celle-ci procède par extrapolation pour conclure que le concept de « Continuous Energy » était ancré et reconnu dans l’industrie électrique à l’époque de la conclusion de l’ensemble contractuel.
[1041] Tenter de prouver un usage par extrapolation produit exactement l’effet inverse.
[1042] Un usage, par définition, est quelque chose de reconnu, bien ancré, utilisé régulièrement dont la preuve est relativement facile à établir.
[1043] Tenter de prouver l’usage de blocs à l’aide de deux ou trois contrats ou encore la notion de « Continuous Energy » par extrapolation ne satisfait pas le degré de preuve requis pour établir un usage constant.
[1044] Le Tribunal conclut que CF(L)Co n’a pas prouvé que l’utilisation de l’expression « Continuous Energy » ou encore la vente d’énergie et de puissance en blocs constituaient un usage à l’époque de la négociation et conclusion de l’ensemble contractuel.
[1045] Le Tribunal conclut que la preuve relative aux critères d’interprétation des contrats, eu égard à la nature particulière de l’ensemble contractuel en cause, ne permet pas d’établir qu’à l’occasion des circonstances de sa conclusion, des usages, et l’interprétation qu’en ont faite les parties, tant CF(L)Co que H.Q. aient envisagés l’interprétation actuelle que fait CF(L)Co du terme « Continuous Energy ». Au contraire, la preuve démontre une intention de continuité entre le Contrat principal et le Contrat renouvelé.
[1046] Il y a lieu maintenant de traiter de certaines sous-questions exposées par CF(L)Co dans les projets de questions en litige que le Tribunal a joints en annexe à la présente décision.
SOUS-QUESTIONS
[1047] En fait, ces sous-questions s’articulent autour de l’énergie excédentaire CF(L)Co arguant, haut et fort, que si le Tribunal retenait l’interprétation de H.Q. celle-ci obtiendrait cette énergie excédentaire gratuitement.
[1048] Voici les commentaires de CF(L)Co sur ce sujet dans son plan d’argumentation :
« 269. Contrary to the Letter of Intent, which expressly provided for the sale of Excess Energy at a lower price than Continuous Energy, and the Power Contract which amounted to its sale at 1/3 of the price, the Renewal Contract only provides for the sale of Continuous Energy. It is silent on energy in excess of Continuous Energy. The Renewal Contract does not provide that CF(L)Co must make such energy available to Hydro-Quebec, nor does it provide for a price or even for the gratuity of such energy, as Hydro-Quebec implies. »
[1049] Ainsi, en raison de l’interprétation que donne le Tribunal à l’ensemble contractuel et tenant compte notamment du « Split Tariff » applicable uniquement pendant la période de financement de l’ouvrage, la seule explication plausible à l’utilisation du terme « Continuous Energy » était pour conférer à CF(L)Co une stabilité de revenus et d’entrées de fonds pour la deuxième période de cet ensemble contractuel soit à compter du 1er septembre 2016.
[1050] Un large pan de la preuve, que ce soit par des témoins idoines ou experts s’est concentré sur le concept de l’ « Annual Energy Base ».
[1051] Sur cette question, le Tribunal retient l’opinion de l’expert Lapuerta à l’effet que bien que celle-ci constitue une moyenne, elle représente tout de même l’ensemble de l’énergie produite par la Centrale.
[1052] Ainsi, par le passé l’ « Annual Energy Base » tenait compte de ce que les parties qualifiaient d’énergie excédentaire.
[1053] Il n’est donc pas question pour H.Q. d’obtenir de l’énergie excédentaire gratuitement, l’AEB final fixant la limite de ce que H.Q. a droit annuellement et pour laquelle elle doit payer. Le fait, pour un mois donné, mis à part la situation du GWAC, de requérir et d’obtenir de l’énergie excédentaire ne modifie pas le résultat annuel final.
[1054] Ainsi, H.Q. est en droit de requérir et d’obtenir au terme de l’article 5.2 du Contrat renouvelé toute la capacité ferme prévue et ce, en tout temps. De plus, elle a droit à la capacité additionnelle et celle prévue au GWAC selon les termes et conditions prévus à ce contrat.
[1055] Toujours en vertu de l’article 5.2 du Contrat renouvelé, CF(L)Co dans son appréciation de la disponibilité de la capacité supplémentaire à la capacité ferme que pourrait requérir H.Q., devra faire preuve de bonne foi.
[1056] CF(L)Co demande, ce qu’il adviendra de la réserve tournante vu l’absence de clause à ce sujet dans le Contrat renouvelé.
[1057] La preuve révèle que l’eau utilisée pour la réserve tournante est assimilée à un déversement aux fins du calcul de l’AEB.[492]
[1058] Ainsi, si dans le passé, il y a eu utilisation de la réserve tournante, ce que dément Monsieur Sanscoucy, l’eau utilisée ferait donc partie intégrante de l’AEB final. Cette preuve n’a pas été contredite par CF(L)Co.
[1059] Ainsi, forte d’une expérience de quarante ans H.Q. sachant que si elle avait utilisé la réserve tournante celle-ci aurait été comptabilisée, l’inclusion d’une clause de réserve tournante dans le Contrat renouvelé devenait inutile.
[1060] Une autre sous-question de CF(L)Co consiste à demander au Tribunal de déterminer, qui pourrait bénéficier de la puissance et l’énergie si à l’aide d’améliorations aux équipements de la Centrale, la production de celle-ci était augmentée.
[1061] La preuve a révélé que par le passé, cette question d’amélioration des équipements a été abordée par les parties, même si elles ne se sont jamais matérialisées.
[1062] Ici on demande au Tribunal de se prononcer sur une hypothèse laquelle, en raison du fait que les parties sont coactionnaires et soumises à une Convention d’actionnaires, est sujette aux droits des parties, dans le principe même d’effectuer des améliorations.
[1063] Aucune représentation n’ayant été soumise au Tribunal par H.Q. quant au droit intrinsèque de CF(L)Co de procéder à des améliorations ou non, il devient hasardeux pour le Tribunal de se prononcer sur ce point précis.
[1064] D’ailleurs, sur ce sujet rappelons qu’en vertu de la convention d’actionnaires que toute dépense de capital de plus de cinq (5) millions doit être approuvé par la majorité du conseil d’administration et par au moins un de ses membres désignés par NLH et H.Q.[493]
[1065] Bref, le Tribunal n’entend pas se prononcer quant à cette sous-question posée par CF(L)Co,
CONCLUSION
[1066] Le Tribunal conclut que l’interprétation actuelle de « Continuous Energy » que fait CF(L)Co n’a jamais été envisagée par les parties depuis le début des négociations et ce, jusqu’à ce que CF(L)Co ne développe cette théorie vers les années 2008-2009.[494]
[1067] En effet, cette expression, lorsque considérée à l’occasion des négociations pour l’ensemble du terme du contrat, et non pas la période de construction, signifiait toute l’énergie soit ferme et excédentaire.
[1068] D’ailleurs, cette constatation est logique financièrement en regard de la dette contractée pour ce projet. Comment CF(L)Co aurait-elle pu justifier à ses créanciers vouloir conserver de l’énergie excédentaire pour le futur sans la monnayer immédiatement. Poser la question c’est y répondre.
[1069] L’abandon de ce terme est le fruit d’un nouveau compromis consenti par H.Q. lors de l’introduction du « Split Tariff ».
[1070] En contrepartie de ce compromis, H.Q. a obtenue contrôle des réservoirs, l’ajout de la clause de flexibilité opérationnelle et l’introduction de la clause établissant l’« Annual Energy Base ».
[1071] L’AEB tenait compte de toute la production de la Centrale incluant les déversements ainsi que l’utilisation de la réserve tournante s’il en est.
[1072] L’AEB tenait également compte des années riches ou pauvres en termes d’hydrologie.
[1073] L’AEB final représente donc la moyenne de l’ensemble des quarante premières années d’exploitation de la Centrale et ce, dans toutes les conditions imaginables.
[1074] Ainsi, l’AEB final incluant toute l’énergie disponible à la Centrale, l’utilisation de ce calcul couplé avec le terme « Continuous Energy » ne confère autre chose à CF(L)Co qu’une stabilité de paiement mensuelle.
[1075] Le Tribunal conclut que l’ensemble contractuel ne visait qu’une modification de la tarification ainsi qu’à la formule de paiement et non pas de restreindre les droits conférés à H.Q. en vertu de la clause de flexibilité opérationnelle.
[1076] De plus, la conclusion du GWAC son terme et ses modalités confirment que jusqu’à l’élaboration de sa nouvelle interprétation CF(L)Co tout comme H.Q. voyaient le Contrat renouvelé comme une continuité du Contrat principal.
[1077] Bref, le Tribunal conclut que les droits de H.Q. quant à la programmation, planification de la puissance et de l’énergie ne sont pas limités, circonscrits ou restreints sur une base mensuelle, à l’achat de blocs assujettis à un plafond dont la quantité serait établie sur la base de la notion de « Continuous Energy » prévue au contrat renouvelé, à l’exclusion de la puissance et énergie associées aux Blocs Réservés.
VENTES INTERRUPTIBLES
[1078] Le droit encadrant les principes d’interprétation à être appliqués par le Tribunal ayant déjà été exposé, ne sera pas repris quant à la question de ventes interruptibles, le Tribunal passant directement à l’application du droit aux faits.
D) |
LE FAIT QU’IL N’Y AIT PAS ACTUELLEMENT DE VENTES INTERRUPTIBLES EN RAISON DE GESTES POSÉS PAR h.q. FAIT-IL OBSTACLE AU PRONONCÉ D’UN JUGEMENT DÉCLARATOIRE. |
[1079] Nous avons vu que depuis l’introduction d’une étiquette de puissance ayant pour effet de bloquer la transmission non ferme de ventes effectuées par NEMC sur le marché de l’exportation, le problème des ventes interruptibles ne se pose plus pour le moment[495].
[1080] L’ancien article 453 C.p.c. et le nouvel article 142 C.p.c. ont une chose en commun soit la solution d’une difficulté réelle.
[1081] La preuve révèle que les ventes interruptibles ou du moins des livraisons, ont existé entre 2009 et 2015.
[1082] Suite à la programmation systématique d’une étiquette de puissance par H.Q., au printemps 2015 pour, selon ses dires s’assurer d’une réserve, la transmission de ventes interruptibles ne peut plus s’effectuer sur les lignes de 735 KV propriétés de H.Q.T.
[1083] CF(L)Co a saisi la Régie de l’énergie d’une plainte à ce sujet, or celle-ci a compétence exclusive. Ainsi, advenant le rejet de la plainte de CF(L)Co, aucune transmission de ventes interruptibles ne pourrait s’effectuer sur les lignes appartenant à H.Q.T.
[1084] Cela étant, la preuve a démontré qu’une nouvelle voie de transmission sera complétée en 2017, celle-ci partant de Churchill Falls jusqu’à Muskrat Falls. Or, à partir de cette centrale une ligne de transmission terrestre et sous-marine permettra la transmission de puissance et d’énergie à partir de Churchill Falls jusqu’au marché du Nord-Est américain sans utiliser les lignes de transmission de H.Q.T.
[1085] Ainsi, quelque soit la décision de la Régie de l’énergie et dès que la nouvelle ligne de transmission sera opérationnelle en 2017 selon la preuve, la difficulté réelle ayant eu cours entre 2009 et 2015, resurgira.
[1086] L’essence même du Code de procédure civile en vigueur depuis le 1er janvier 2016 vise entre autres « l’application juste, simple, proportionnée et économique de la procédure et l’exercice des droits des parties dans un esprit de coopération et d’équilibre … »
[1087] Le fait d’avoir engagé le débat sans divulguer au Tribunal la situation factuelle existante depuis mai 2015 quant à la transmission ou plutôt l’absence de transmission de ventes interruptibles n’est pas un exemple de coopération avec le système judiciaire de la part de H.Q.
[1088] Cela étant, le Tribunal a eu l’occasion d’exprimer ses sentiments face à cette situation à toutes les parties intéressées et il n’est pas utile de revenir là-dessus.
[1089] Le Tribunal conclut qu’en raison de l’imminence du rétablissement des ventes interruptibles et pour une utilisation efficace des ressources judiciaires, il y a lieu de trancher cette difficulté dès maintenant.
E) |
Eu égard à la conclusion à laquelle en vient Tribunal sur la question traitant de la « Continuous Energy », quel en est l’impact sur les ventes interruptibles ? |
[1090] Le Tribunal a formulé la question en litige de la présente façon puisqu’intimement liée à la première question traitant de « Continuous Energy ».
[1091] D’ailleurs, CF(L)Co à son plan d’argumentation clame haut et fort que H.Q. n’a droit qu’à la « Continuous Energy », telle qu’elle l’interprète. Voici le paragraphe pertinent :
« 112. Given the fact that s. 6.2 of the Power Contract was not reproduced in the Renewal Contract, Hydro-Quebec has no claim to request or take delivery of energy which is not specifically provided for under the definition of Continuous Energy and the ambit of s. 7.1 of the RC. »
[1092] Dans la présente affaire, le Rappel ou encore la preuve entourant les ventes interruptibles s’est transposée uniquement en termes de puissance (MW). Toutefois, il est utile de rappeler encore une fois que la puissance sert à livrer l’énergie.
[1093] D’ailleurs, il faut préciser que pour la question des ventes interruptibles CF(L)Co, tente dans son argumentaire de ségrégationner la puissance par rapport à l’énergie.
[1094] Évidemment, la décision du Tribunal quant à la composition de l’AEB final a un impact majeur sur cette question.
[1095] Cela étant, avant de répondre à la question en litige un certain nombre de constatations s’imposent. Celles-ci s’articulent dans un premier temps autour de la position de H.Q. à l’effet que les jugements antérieurs ont consacré son droit à toute la production de la Centrale et dans un deuxième temps quant à la qualification qu’ont fait les experts du Rappel par rapport à la réalité des ventes interruptibles telle que pratiquée par CF(L)Co.
LES JUGEMENTS ANTÉRIEURS
[1096] Bien que le Tribunal ait conclu qu’effectivement H.Q. a droit contractuellement à toute l’énergie et la puissance provenant de la Centrale, moins les Blocs réservés, il est important de distinguer la présente affaire du contexte factuel ayant entouré les jugements antérieurs.
[1097] Nous avons vu que H.Q. met beaucoup d’emphase sur certains extraits des jugements antérieurs, notamment la décision de la Cour suprême dans la cause traitant du Reversion Act.
[1098] Rappelons la citation en cause de la Cour suprême :
« Aux termes de ce contrat, CF(L)Co a convenu de fournir et Hydro-Québec d’acquérir pratiquement toute l’énergie produite aux chutes Churchill ».
[1099] Par ailleurs, dans sa décision du 13 juin 1983 portant sur le Rappel de 800 MW, le juge Goodridge de la Cour suprême de Terre-Neuve écrivait ce qui suit :
« 1275 Firstly, the proviso is interpreted to mean that upon the request of the Government the Newfoundland consumer shall be given by CFLCo a right of first refusal to purchase all energy that becomes available for sale and is not then otherwise committed when it is feasible and economic for CFLCo to supply such power and for the Newfoundland consumer to purchase such power. In that connection the power which has been committed for sale to Hydro-Quebec is not available for sale to another customer. The right of first refusal which is extended upon the request of the Government is exercisable only in respect of the power in excess of that already committed and at the present time there is very little, if any, of that. (See Part 15.). »
( Nos soulignés )
[1100] En fait, H.Q. voudrait que le Tribunal fasse siens ces divers commentaires, lesquels jouissent de la présomption simple de vérité quant à des constats factuels.
[1101] Voici les commentaires de l’auteur Léo Ducharme sur les présomptions simples :
« 554. La présomption simple a comme deuxième fonction de rendre certain un fait inconnu et souvent difficile à établir directement. Mais la certitude de ce fait, lorsqu’il s’agit des présomptions simples, n’est que relative. Elle est relative en ce sens qu’il est toujours possible à l’adversaire de détruire cette certitude par une preuve contraire. C’est ce qu’énonce le deuxième alinéa de l’article 2847 C.c.Q. en ces termes : « [c]elle qui concerne des faits présumés est simple et peut être repoussée par une preuve contraire ».
555. Il ne faudrait pas croire cependant que toutes les présomptions simples ont la même force probante. En effet, si la vérité du fait présumé est toujours relative, il n’en demeure pas moins que cette relativité comporte divers degrés. Le fait présumé est plus ou moins certain suivant que la preuve contraire est plus ou moins facile à faire. Aussi, entre un fait présumé vrai parce que probable et un fait présumé vrai parce que dans l’opinion du législateur il doit être tenu pour absolument certain, comme dans le cas de la présomption de l’autorité de la chose jugée, il y a une infinité de degrés. Il en découle que de diviser les présomptions en deux catégories étanches, comme le Code le fait, ne rend pas exactement compte de la réalité. »[496]
( Nos soulignés )
[1102] Dans l’arrêt de la Cour d’appel Air Canada, la juge Marie-France Bich établit, à juste titre d’ailleurs, une distinction entre cette présomption simple et un obiter dictum.
« [70] Cet avis n'a pas la portée de la présomption simple dont parlent parfois la doctrine et la jurisprudence pour décrire l'effet rattaché aux constats factuels posés par un jugement n'ayant pas l'effet de la chose jugée sur un autre litige50, ou alors cette présomption a été réfutée en l'instance. Il s'agit d'un fait ordinaire dont le juge de première instance pouvait tenir compte51, sans doute, et sur lequel il s'est d'ailleurs penché. On ne saurait toutefois, pour des raisons évidentes52, en faire un élément concluant, puisque - et cela est capital - le contexte du litige dont le juge est ici saisi n'est pas le même, pas plus que la question à débattre53. On contestait en effet devant le juge Newbould la délégation des activités de maintenance lourde d'Air Canada à Aveos : or, Aveos n'existe plus et les activités qui lui étaient confiées le sont maintenant à d'autres, qui, pour une large part, exercent à l'extérieur des régions de Montréal et de Winnipeg (et plus exactement à l'extérieur même du Canada). C'est de ce plus récent état de fait que l'on discute devant la Cour supérieure du Québec et sur lequel statue le jugement dont appel. En 2011, le juge Newbould pouvait bien, en obiter, opiner qu'Air Canada se conformait à la Loi en sous-traitant ses activités de maintenance lourde à Aveos (qui opérait dans les mêmes lieux) ou qu'Air Canada se livrait encore, à cette époque, à des activités de maintenance lourde à même sa maintenance en ligne, mais ce constat ne lie en rien le juge de l'espèce qui statue, en 2013, en fonction de la preuve administrée devant lui sur une tout autre cause d'action. »[497]
( Références omises )
( Nos soulignés )
[1103] Il est acquis que la décision de la Cour suprême dans la cause portant sur le Reversion Act était centrée sur un tout autre problème que celui actuellement sous étude. D’ailleurs, c’est à dessein, que le Tribunal a relevé une erreur factuelle dans cet arrêt, justement pour démontrer qu’il ne s’agissait pas là, de la question en litige.
[1104] En fait, la Cour suprême, voulait-elle par cette expression tenir compte uniquement des Blocs Réservés ou encore d’une possible énergie excédentaire soit tel que plaidé actuellement par CF(L)Co ? Le Tribunal en doute fortement puisqu’il ne s’agissait pas de l’essentiel de ce débat.
[1105] Le Tribunal conclut que les commentaires de la Cour suprême dans l’arrêt portant sur le Reversion Act, ne constituent que des obiter dictum ne pouvant lier le Tribunal, sur ce que dit ou ne dit pas, l’ensemble contractuel liant CF(L)Co et H.Q. quant à la quantité d’énergie et de puissance à laquelle a droit cette dernière.
[1106] Quant à la décision du juge Goodridge dans la cause du Rappel de 800 MW, notamment son paragraphe 1275, il ne s’agit pas d’un constat factuel mais bien de sa décision dans l’interprétation du contrat. Encore une fois, bien qu’utile, cette décision ne saurait lier le Tribunal.
[1107] Le jugement du juge Silcoff de la Cour supérieure, confirmé par la Cour d’appel, que les parties identifient comme le « Good faith case » portait sur le désir de CF(L)Co de voir renégocier la tarification rétroactivement à 2009.
[1108] Dans cette affaire, toute la négociation entourant la conclusion de l’ensemble contractuel est analysée. Cet aspect s’apparente à notre situation.
[1109] On y fait grand état des risques financiers auxquels a consenti H.Q. en retour d’une tarification avantageuse. L’absence de ces mêmes risques pour CF(L)Co laquelle est propriétaire d’un ouvrage d’une valeur de 20 milliards de dollars selon la preuve.
[1110] La Cour d’appel s’attarde sur la clause « Take or Pay » essentielle pour le financement et conclut : « Cette clause prévoit l’achat par l’intimée de presque toute l’énergie produite par la Centrale garantissant ainsi à l’appelante les revenus suffisants pour rembourser sa dette ».[498]
[1111] Ce constat lié au financement essentiel au projet contredit la prétention de CF(L)Co que lors des négociations, elle entendait se réserver de l’énergie excédentaire.
QUALIFICATIONS DES EXPERTS DES VENTES INTERRUPTIBLES
[1112] Premier constat.
[1113] Tout d’abord, mentionnons que le Tribunal fait sienne l’opinion de l’expert Bodell à l’effet que le concept de ventes interruptibles existait à l’époque des négociations ayant mené à la conclusion de l’ensemble contractuel.
[1114] H.Q. à cette époque envisageait des ventes interruptibles à des fins d’exportation.
[1115] Par ailleurs dès le 1er septembre 1976, CF(L)Co concluait un contrat avec NLH prévoyant de la vente de « Interruptible Energy from its generating facilities resulting from underutilization of Energy reserved for its existing obligations […][499].
[1116] Cela étant même si ce concept était connu et peut-être envisagé par H.Q. nulle part dans la preuve administrée à l’occasion des négociations, ressort-il que ce concept pouvait être mis en place par CF(L)Co en vue de possibles exportations à des clients autres que H.Q.[500].
[1117] Au contraire, rappelons que pendant la ronde de négociations de 1995-1996 alors qu’était discuté la viabilité financière de CF(L)Co pour l’horizon s’étendaient jusqu’en 2041, les seules ventes à des tiers considérées par CF(L)Co, le serait pour des clients intéressés à l’énergie et la puissance du Bloc Twinco, et ce, à compter de son terme en 2014[501].
[1118] Cela étant, la preuve révèle que le mécanisme des ventes interruptibles tel que connu dans les années 60 est fort différent de ce qui a cours maintenant.[502]
[1119] De fait, c’est l’émergence d’un nouveau marché avec l’introduction du « Open Access » qui a provoqué l’éclosion de cette idée chez CF(L)Co.
[1120] Une particularité intrinsèque à la réalité des ventes interruptibles actuelles est l’élément puissance puisque la livraison d’énergie ne s’effectuant que pendant un court laps de temps le taux de livraison ou la puissance doit nécessairement être en conséquence.
[1121] Cette combinaison de facteurs fait en sorte que le produit « ventes interruptibles » des années 2000 est tout à fait différent de celui qui était connu de l’industrie hydroélectrique des années 1960.
[1122] Bref, les ventes interruptibles tel qu’on les pratique aujourd’hui n’ont jamais été envisagées par CF(L)Co ou H.Q. dans le cadre des négociations ayant mené à la conclusion de l’ensemble contractuel.
[1123] Reste la proposition mise de l’avant à l’effet que CF(L)Co a toujours voulu conserver de la puissance et de l’énergie pour la revendre à des tiers que ce soit pendant les premières quarante années ou pendant la totalité du terme de l’ensemble contractuel.
[1124] L’approche de l’experte Bodell décortiquant le calcul de l’AEB ne convainc pas le Tribunal. Celle-ci analysant diverses études réalisées par des ingénieurs en vient à la conclusion que CF(L)Co a toujours voulu se conserver une marge de manœuvre. Le hic est que celle-ci n’est pas ingénieure et elle transpose une idée à des calculs auxquels elle n’a pas contribué. L’adage est bien connu, on peut faire dire ce que l’on veut à des chiffres.
[1125] Le problème pour CF(L )Co est qu’elle ne peut relier ces chiffres ou ce potentiel à une intention existante à l’époque des négociations puisque les ventes interruptibles que peut et veut faire maintenant CF(L)Co n’étaient même pas envisageables en 1960.
[1126] Par ailleurs, les exemples de conflits entre les demandes de H.Q. et les livraisons par CF(L)Co, causés par les ventes interruptibles nous démontrent que celles-ci ne durent que quelques heures tout au plus a contrario de ce qui avait cours dans les années 1960. Ainsi, l’incident du 8 juillet 2013 n’aura duré qu’une heure soit de 15:00 heures à 16:00 heures[503]. De plus, à titre d’exemple, les deux incidents du 9 avril 2014 n’auront également duré qu’une heure[504].
[1127] D’ailleurs, même si Madame Bodell ainsi que les témoins idoines de CF(L)Co minimisent la quantité d’énergie et puissance vendue à des tiers de façon interruptible il n’en demeure pas moins que la preuve démontre de façon claire et prépondérante qu’à de nombreuses occasions celles-ci ont été faites au détriment de H.Q.[505]
[1128] D'aucuns diront que les situations démontrées au Tribunal ont été causées par des changements de dernière minute par H.Q. à sa programmation, et que ceux-ci ne peuvent être effectués que pour des motifs graves et sérieux[506].
[1129] Bien qu’aucune preuve n’ait démontré que dans ces cas précis, le changement de la programmation résultait de circonstances graves, il n’en demeure pas moins que par le passé, CF(L)Co a toujours collaboré à ces changements de dernière minute.
[1130] Qui plus est, si des circonstances graves et sérieuses surgissaient, la démonstration est faite que CF(L)Co ne pourrait interrompre ses livraisons à NLH et qu’en conséquence elle ne pourrait satisfaire les demandes urgentes de H.Q.
[1131] Il est également troublant de constater que les rapports, à l’occasion de ces incidents, imputent, la plupart du temps, le défaut par CF(L)Co d’honorer ses obligations envers H.Q. à des « Plant Capacity Change » et que dans ces cas, systématiquement les livraisons de CF(L)Co à NLH étaient priorisées[507].
[1132] Rappelons la réalité des périodes de verrouillage sur le marché américain, qui dans les faits, empêche NLH ou CF(L)Co d’interrompre ses exportations pour combler les besoins de H.Q.
[1133] Deuxième constat.
[1134] L’expert Pfeifenberger est d’opinion qu’il ne peut y avoir de ventes interruptibles puisque le Rappel est un maximum lequel ne peut être dépassé et que le fait par CF(L)Co de procéder à des ventes interruptibles constitue dans la réalité un dépassement du Rappel.
[1135] Le Tribunal ne partage pas cette assertion, puisque dans les faits il ne s’agit pas d’un dépassement du maximum du Rappel mais plutôt de l’utilisation d’une partie inutilisée par H.Q. de l’énergie et de la puissance auxquelles elle a droit, laquelle utilisation a pour effet de provoquer un dépassement temporaire du maximum.
[1136] Voici d’ailleurs ce que plaide CF(L)Co à ce sujet dans son plan d’argumentation :
« 389. In the present case, CF(L)Co has specifically acknowledged and indicated to Hydro-Quebec that while it did sell in the past, and intends to continue to sell power on an interruptible basis above 300 MW to NLH, it never intends to exceed on a monthly basis the maximum amount of energy associated with the 300 MW block of power i.e. 196 GWh per month (or 2.362 TWh per year) under the Power Contract. Similarly, under the Renewal Contract, CF(L)Co intends to fully supply Hydro-Quebec with the entirety of the energy it is entitled to, i.e. the Continuous Energy, whether or not it sells interruptible power to NLH.
( … )
396. Given Hydro-Quebec’s priority call on power up to the Firm Capacity level, before the interruptible power is sold to NLH, CF(L)Co must first make it available to Hydro-Quebec. Hydro-Quebec must then decide whether or not to request it in accordance with the Power Contract. It is only then, when the power is not requested by Hydro-Quebec that it can be sold to a third party such as NLH. Again, because this power is sold on an interruptible basis, it remains available to Hydro-Quebec should it require it at a later point, the whole in accordance with the scheduling procedure set up in the Power Contract and the Interchange Manual, which CF(L)Co wil continue to respect, whether or not it sells interruptible power to NLH. »[508]
( Nos soulignés )
[1137] CF(L)Co veut pouvoir vendre à des tiers la portion à laquelle aurait droit H.Q., mais qu’elle n’a pas commandée, soit en vertu de son interprétation de « Continuous Energy » soit en vertu du premier paragraphe de l’article 5.2 du Contrat renouvelé.
[1138] Ainsi, le Tribunal ayant conclu que « Continuous Energy » correspond à toute l’énergie produite par la Centrale (sauf les Blocs Réservés) même excédentaire telle qu’établie par une expérience de 40 ans et constatée par l’AEB final et que celle-ci doit être payée par H.Q. en vertu de son obligation « Take or Pay », la réponse à la question en litige est relativement simple.
[1139] En effet, CF(L)Co ne peut vendre à des tiers ce qu’elle a déjà vendu à H.Q.
[1140] Le commentaire du juge Goodrige dans la cause du Rappel de 800 MW est pertinent même si le contexte était différent, lorsqu’il déclare :
« In that connection the power which has been committed for sale to Hydro-Quebec is not available for sale to another customer ».
[1141] Le Tribunal conclut que CF(L)Co n’a aucun droit sur la puissance et l’énergie produite à la Centrale sauf quant à la puissance associée au Bloc de 300 MW (Rappel) et le Bloc Twinco (225 MW) et pour plus de précisions CF(L)Co ne détient aucun droit sur la puissance et l’énergie inutilisée par H.Q. mais à laquelle elle aurait droit puisque payée.
LES DÉPENS
[1142] Les frais de justice sont réclamés par H.Q. à ses procédures.
[1143] Inutile de préciser que depuis le 1er janvier 2016 les « dépens » soit les frais de justice n’ont plus la même signification pour les parties en termes d’honoraires judiciaires mais conservent leur importance en matière de débours engagés notamment pour les frais d’expertise.
[1144] Le Tribunal accorde les frais de justice à H.Q. mais limite les frais d’expertise à ceux de Monsieur Carlos Lapuerta uniquement.
[1145] Celle-ci fut d’une grande utilité pour le Tribunal et abordait la problématique de façon globale et non pas de façon ciblée comme Madame Bodell à l’aide de ses deux rapports et même celui de Monsieur Pfeifenberger.
[1146] Quant au rapport de Monsieur Pfeifenberger, le seul élément d’expertise selon le Tribunal était de déterminer si la limite de 300 MW du Rappel était un maximum. Or cet aspect de son rapport n’est constitué que de 10 paragraphes. Quant au second aspect de celui-ci soit l’interruptibilité des ventes, outre une compilation d’exemples, la preuve aurait pu être présentée par des témoins idoines. Rappelons les témoignages de Monsieur Sansoucy sur l’incident du 8 juillet 2013 et celui de Monsieur Clermont sur les périodes de verrouillage.
[1147] Ainsi, le Tribunal n’accordera pas les frais d’expertise quant au rapport Pfeifenberger.
REMERCIEMENTS
[1148] Le Tribunal a déjà fait état tant à l’audience que dans le présent jugement de son appréciation du travail des avocats. Si ceux-ci ont pu œuvrer dans un environnement leur permettant une prestation sans faille c’est en grande partie grâce au personnel de soutien de leurs cabinets respectifs mais également grâce à celui de la Cour. Le Tribunal tient à remercier les greffiers, Monsieur Michel Deshaies ainsi que Madame Nelia Fils, Madame Francine Vallières, huissière-audiencière. Sans oublier le travail de Madame Denise Turcot, sténographe officielle de même que celui des interprètes dont l’identité est malheureusement inconnue du Tribunal.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[1149] ACCUEILLE la requête pour jugement déclaratoire d’Hydro-Québec.
[1150] DÉCLARE qu’aux termes de l’Annexe III (Contrat renouvelé) du contrat intervenu le 12 mai 1969 entre Churchill Falls (Labrador) Corporation (CF(L)Co) et Hydro-Québec, Hydro-Québec jouit du droit exclusif d’acheter toute la puissance disponible et toute l’énergie produite à la centrale du Haut Churchill, telle que définie à l’article 1.1 du Contrat original et du Contrat renouvelé (à la définition de « Plant ») et telle qu’entretenue conformément aux articles 4.2.4 du Contrat original et 4.1.4 du Contrat renouvelé (Centrale), à l’exception de la puissance et de l’énergie associées :
i Au bloc de 225 MW qui était réservé à CF(L)Co pour satisfaire ses obligations envers Twin Falls Power Corporation Limited jusqu’au 31 décembre 2014 et qui, sous réserve des conditions énoncées dans le « Shareholders’ Agreement » intervenues entre Newfoundland & Labrador Hydro (NHL), Hydro-Québec et CF(L)Co le 18 juin 1999, pourra être vendu par CFLCo pour distribution et consommation au Labrador Ouest à compter du 1er janvier 2015 (Bloc Twinco); et;
ii au bloc de 300 MW réservé à CF(L)Co pour vente à une tierce partie en vue d’une consommation d’énergie hors Québec (Bloc de 300 MW).
[1151] DÉCLARE que les droits conférés à Hydro-Québec en vertu de l’article 4.1.1 du Contrat renouvelé, y compris son droit de programmation et de planification de la puissance et de l’énergie, ne sont d’aucune manière limités, circonscrits ou restreints, sur une base mensuelle, à l’achat de blocs assujettis à un plafond dont la quantité serait établie sur la base de la notion de « Continuous Energy » prévue au Contrat renouvelé, et qu’ils peuvent être exercés à l’égard de toute la puissance disponible et toute l’énergie produite à la Centrale, à l’exclusion de la puissance et de l’énergie associées au Bloc de 300 MW et au Bloc Twinco.
[1152] DÉCLARE qu’aux termes du Contrat renouvelé, Hydro-Québec n’est pas contrainte de limiter ses demandes de livraison d’énergie à des blocs assujettis à un plafond mensuel dont la quantité serait établie sur la base de la notion de « Continuous Energy » prévue au Contrat renouvelé.
[1153] DÉCLARE qu’aux termes du Contrat renouvelé, CF(L)Co a l’obligation de livrer à Hydro-Québec, sur demande de celle-ci, toute la puissance disponible et toute l’énergie produite à la Centrale, à l’exception de la puissance et de l’énergie associées au Bloc Twinco et le Bloc de 300 MW.
[1154] DÉCLARE que jusqu’au 31 août 2041, CF(L)Co ne jouira d’aucun droit sur aucune quantité de puissance et d’énergie produite à la Centrale, à l’exception de la puissance et de l’énergie associées au Bloc de 300 MW et du Bloc Twinco.
[1155] DÉCLARE que jusqu’au 31 août 2041, CF(L)Co ne pourra vendre à une tierce partie, y compris NLH, une quelconque quantité de puissance et d’énergie excédant les quantités associées au Bloc de 300 MW, et ce, sans égard au fait que lesdites ventes interviennent sur une base ferme ou prétendument « interruptible ».
[1156] REJETTE la contestation de Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited.
[1157] LE TOUT avec les frais de justice en faveur d’Hydro-Québec incluant les frais reliés à l’expertise et la présence à la Cour de Monsieur Carlos Lapuerta uniquement.
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__________________________________ Martin Castonguay, j.c.s. |
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Dates d’audience : |
Les 16, 19, 20, 21, 22, 26, 28, 29 et 30 octobre 2015; Les 4, 5, 9, 10, 12, 13, 18, 19, 23, 24, 26 et 30 novembre 2015; Les 1er, 2, 3, 7, 8, 14, 15, 16, 17 et 18 décembre 2015. |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
COUR supÉrieure |
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NO : 500-17-078217-133 |
Demanderesse - c. - CHURCHILL FALLS (LABRADOR) CORPORATION LIMITED Défenderesse |
Lexique / Glossary of Defined terms |
Action des 800 MW / Recall Case |
Action intentée par le Procureur général de Terre-Neuve contre Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited et la Commission hydroélectrique de Québec (Hydro-Québec), devant la Cour suprême de Terre-Neuve, en date du 13 septembre 1976, dans le dossier 1976 no. 812, pour faire déclarer que le paragraphe (e) de la Clause 2 de la partie I du Bail de 1961 lui permettait de faire la demande pour les 800 MW requis par l’arrêté en conseil du 6 août 1976. Les pièces pertinentes sont P-26, P-26A, P-70 et P-237. *** Action brought by the Attorney General of Newfoundland against Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited and the Quebec Hydroelectric Commission (Hydro-Québec) before the Supreme Court of Newfoundland, on September 13, 1976, in file 1976 no. 812, seeking a declaration that Clause 2, subsection (e), of Part I of the 1961 Lease allowed the Attorney General to make the demand for the 800 MW requested by the August 6, 1976 Order in Council. The relevant Exhibits are P-26, P-26A, P-70 and P-237. |
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Bail de 1961 / 1961 Lease |
Bail entre la province de Terre-Neuve-et-Labrador et Hamilton Falls (Power) Corporation Limited, en date du 16 mai 1961. La pièce pertinente est D-8. *** Lease between the Province of Newfoundland and Labrador and Hamilton Falls (Power) Corporation Limited, dated May 16, 1961. The relevant Exhibit is D-8. |
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Bloc de 300 MW / Recall Block |
Un bloc d’au plus 300 MW que CF(L)Co a le droit de rappeler aux termes de l’article 6.6 du Contrat et de l’article 5.4 du Contrat renouvelé, sur préavis écrit d’au moins trois ans à Hydro Québec, et que CF(L)Co ne peut vendre que pour consommation en dehors du Québec. La pièce pertinente est P-1. *** A block of 300 MW at most, which CF(L)Co has the right to recall under Section 6.6 of the Power Contract and Section 5.4 of the Renewed Power Contract / Renewal Contract upon written notice of at least three years to Hydro-Québec, and which CF(L)Co may sell for consumption only outside of Quebec. The relevant Exhibit is P-1. |
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Bloc patrimonial ou électricité patrimoniale / Heritage Pool |
Volume maximal annuel de 165 térawattheures dont Hydro-Québec doit assurer l’approvisionnement pour le marché québécois depuis l’adoption, en 2000 et 2001, de la Loi modifiant la Loi sur la Régie de l’énergie et d’autres dispositions législatives, d’amendements à la Loi sur Hydro-Québec et du Décret 1277-2001. *** Maximum annual volume of 165 terawatt-hours, the supply of which must be assured by Hydro-Québec to the Quebec market since the enactment of the Act amending the Act respecting the Régie de l’énergie and other legislative provisions in 2000 and 2001, and of amendments to the Act respecting Hydro-Québec and the Decree 1277-2001. |
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Bloc Twinco / Twinco Block |
Un bloc de 225 MW réservé à CF(L)Co pour satisfaire ses « existing obligations to supply power and energy in respect of the Twin Falls Power Corporation Limited loads » aux termes de l’article 4.2.2 du Contrat original et 4.1.2 du Contrat renouvelé, et qui, aux termes de l’article 3.6 de la Convention d’actionnaires, est destiné à être rendu disponible pour distribution et consommation au Labrador Ouest. Les pièces pertinentes sont P-1 et P-3C. ***
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A block of 225 MW reserved for CF(L)Co to satisfy its “existing obligations to supply power and energy in respect of the Twin Falls Power Corporation Limited loads” under Section 4.2.2 of the Power Contract and 4.2.1 of the Renewed Power Contract / Renewal Contract which block, pursuant to Section 3.6 of the Shareholders’ Agreement, is to be made available for distribution and consumption in Labrador West. The relevant Exhibits are P-1 and P-3C. |
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Bond Offering Memorandum |
« Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited - First Mortgage Bonds - Series A & B - Offering Memorandum » préparé par Morgan Stanley & Co., révision en date du 7 octobre 1968. Il s’agit de la pièce D-29. *** “Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited - First Mortgage Bonds - Series A & B - Offering Memorandum” prepared by Morgan Stanley & Co., October 7, 1968 revision. This is Exhibit D-29. |
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Brinco |
British Newfoundland Corporation Limited, une société de droit terre-neuvien, constituée en 1953. Les actionnaires sont alors les suivants : N. M. Rothschild & Sons, Anglo American Corporation of South Africa, Anglo-Newfoundland Development Company Limited, The Bowater Paper Corporation Limited, The English Electric Company Limited, Frobisher Limited et Rio Tinto Company Limited. À l’époque de l’incorporation de CF(L)Co en octobre 1958, les actions de CF(L)Co étaient détenues à hauteur de 80 % par Brinco, ce consortium formé d’investisseurs privés, et de 20 % par une filiale de la Shawinigan Water and Power Company. *** British Newfoundland Corporation Limited, a company incorporated under the laws of Newfoundland and Labrador in 1953. The shareholders at the time of incorporation were: N. M. Rothschild & Sons, Anglo American Corporation of South Africa, Anglo-Newfoundland Development Company Limited, The Bowater Paper Corporation Limited, The English Electric Company Limited, Frobisher Limited, and Rio Tinto Company Limited. At the time of the incorporation of CF(L)Co in October 1958, CF(L)Co’s shares were owned by Brinco (80%), this consortium of foreign investors, and by a subsidiary of Shawinigan Water and Power Company (20%). |
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Capacité de transfert disponible ou/or Available Transfer Capability ou/or ATC |
Mesure de la capacité de transfert résiduelle du réseau physique de transport permettant d’assurer une activité commerciale en sus des utilisations déjà convenues. Elle est définie comme étant la capacité totale de transfert (TTC), moins les engagements de transport en vigueur (ETC) (incluant le service de détail à la clientèle), moins la marge de partage de capacité (CBM), moins la marge de fiabilité de transport (TRM), plus les capacités réoffertes et les transits inverses. Les pièces pertinentes sont P-366/220, P-345, art. 15.2 et Appendice C et P-310. *** A measure of the transfer capability remaining in the physical transmission network for further commercial activity over and above already committed uses. It is defined as Total Transfer Capability less Existing Transmission Commitments (including retail customer service), less a Capacity Benefit Margin, less a Transmission Reliability Margin, plus Postbacks, plus counterflows. The relevant Exhibits are P-366/220, P-345, art. 15.2 and Attachment C and P-310. |
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-Centre de conduite du réseau ou/or Control Center ou/or CCR |
Lieu où s’effectue la conduite du réseau de transport principal et où s’exercent, en temps réel, les fonctions de coordonnateur de la fiabilité, responsable de l’équilibrage, exploitant du réseau de transport et responsable des échanges. La pièce pertinente est P-366/270. *** Site where are hosted computer systems, applications, systems and devices critical for meeting Main Transmission System reliability criteria such as stability limits, frequency, voltage, reserves and SPS that allow data acquisition, monitoring and control of more than one geographically distinct facility and at least two facilities of the Main Transmission System. The control center allows the Reliability Coordinator, Balancing Authority, Transmission Operator or Interchange Authority to fulfill its real time responsibilities. The relevant Exhibit is P-366/270. |
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CF(L)Co ou/or Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited |
Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited, une société de droit fédéral, constituée le 31 janvier 1958, anciennement connue sous le nom de Hamilton Falls Power Corporation. Ses actions ordinaires sont actuellement détenues à 65,8 % par NLH et à 34,2 % par Hydro Québec. *** Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited, a company incorporated under federal law on January 31, 1958, formerly known as the Hamilton Falls Power Corporation. Its common shares are currently held by NLH (65.8%) and by Hydro-Québec (34.2%). |
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Clause de renouvellement / Renewal Clause |
Article 3.2 du Contrat. La pièce pertinente est P-1. *** Article 3.2 of the Contract. The relevant Exhibit is P-1. |
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Commission hydroélectrique de Québec ou Hydro-Québec ou HQ / Quebec Hydro-Electric Commission or Hydro-Québec or HQ |
Créée le 14 avril 1944 par la Loi établissant la Commission hydroélectrique de Québec, S.Q. 1944, chapitre 22. La Commission hydroélectrique de Québec pouvait aussi être appelée Hydro-Québec, aux termes de l’article 4 de cette loi. À compter du 1er octobre 1978, la personne morale est désignée sous le seul nom d’Hydro-Québec (voir Hydro-Québec). *** Created on April 14, 1944 by the Act establishing the Hydro-Electric Commission of Quebec, S.Q. 1944, chapter 22. The Hydro-Electric Commission could also be called Hydro-Québec pursuant to Article 4 of this Act. As of October 1, 1978, the legal entity is only designated as Hydro-Québec (see Hydro-Québec). |
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Complexe Manic-Outardes |
Un développement hydroélectrique d’Hydro-Québec sur les rivières Manicouagan et Outardes, au Québec. *** A hydroelectric development of Hydro-Québec on the Manicouagan and Outardes rivers in Quebec. |
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Consolidated Edison Company of New York, Inc. ou/or ConEd |
Consolidated Edison Company of New York, Inc. La pièce pertinente est P-137. / The relevant Exhibit is P-137. |
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Contrat / Contract or Power Contract |
Contrat entre CF(L)Co et la Commission hydroélectrique de Québec, signé le 12 mai 1969. Il s’agit de la pièce P-1. *** Contract between CF(L)Co and the Quebec Hydro-Electric Commission, signed on May 12, 1969. This is Exhibit P-1. |
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Contrat Renouvelé ou/or Renewed Power Contract (selon Hydro-Québec) ou/or Renewal Contract (selon CF(L)Co) |
Cédule III du Contrat signé le 12 mai 1969, entrant en vigueur le 1er septembre 2016 et se terminant le 31 août 2041. Il s’agit de la Pièce P-1. *** Schedule III of the Power Contract, signed on May 12, 1969, coming into force on September 1, 2016 and terminating on August 31, 2041. This is Exhibit P-1. |
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Convention d’actionnaires / Shareholders’ Agreement |
Convention entre actionnaires entre NLH, Hydro-Québec et CF(L)Co, intervenue en date du 18 juin 1999. Il s’agit de la pièce P-3C. *** Shareholders’ agreement between NLH, Hydro-Québec and CF(L)Co, dated June 18, 1999. This is Exhibit P-3C. |
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Convention d’exploitation / Operating Agreement |
Convention d’exploitation concernant la Centrale Churchill Falls intervenue entre HQ et CF(L)Co, en date du 1er novembre 1990 / du 14 janvier 1991, amendé par une première Convention supplémentaire en date du 30 juin 1993 et une deuxième Convention supplémentaire en date du 1er janvier 1994. Il s’agit de la pièce P-248C. *** Operating Agreement between HQ and CF(L)Co regarding the Churchill Falls power plant, dated November 1, 1990 / January 14, 1991, amended by a Supplemental Agreement dated June 30, 1993 and the Second Supplemental Agreement dated January 1, 1994. This is Exhibit P-248C. |
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Coordonnateur de la fiabilité ou/or Reliability Coordinator ou/or RC |
Tel que défini par NERC, l’entité qui a le plus haut pouvoir de décision pour assurer la fiabilité de l’exploitation du système de production-transport d’électricité, et qui dispose pour ce faire d’une vue de la zone étendue de ce système et a les outils, les processus et les procédures nécessaires, de même que le pouvoir, pour empêcher, ou du moins atténuer, les situations d’exploitation d’urgence apparaissant dans l’analyse des conditions d’exploitation du lendemain aussi bien que dans l’exploitation en temps réel. Le coordonnateur de la fiabilité dispose de l’information d’une portée suffisamment large pour pouvoir calculer les limites d’exploitation pour la fiabilité de l’Interconnexion, limites qui peuvent être basées sur les paramètres d’exploitation des réseaux de transport qu’aucun exploitant de réseau de transport n’est en mesure d’appréhender. Les pièces pertinentes sont P-351/71 et P-366/289. *** |
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Coordonnateur de la fiabilité ou/or Reliability Coordinator ou/or RC |
As defined by NERC, the entity that is the highest level of authority who is responsible for the reliable operation of the Bulk Electric System, has the Wide Area view of the Bulk Electric System, and has the operating tools, processes and procedures, including the authority to prevent or mitigate emergency operating situations in both next-day analysis and real-time operations. The Reliability Coordinator has the purview that is broad enough to enable the calculation of Interconnection Reliability Operating Limits, which may be based on the operating parameters of transmission systems beyond any Transmission Operator’s vision. The relevant Exhibits are P-351/71 and P-366/289. |
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Emera ou/or Emera Inc. |
Emera Inc., une entreprise privée d’énergie ayant son siège social en Nouvelle-Écosse. *** Emera Inc., a private energy corporation who has its head office in Nova Scotia. |
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Énergie électrique / Electric energy |
Produit de la puissance d’une centrale par le temps pendant lequel cette puissance est utilisée ou produite; ce produit s’exprime en wattheure (Wh) et multiples de wattheure. Le Contrat contient une définition du terme « energy » à l’article 1.1 (P-1/6). *** A product of the power of a power plant multiplied by the time during which this power is used or produced; this product is expressed in watthours (Wh) and multiples thereof. The Contract contains a definition of the term « energy » at article 1.1 (P-1/6). |
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EPCA |
Electrical Power Control Act, S.N.L. 1994, ch. E-5.1. |
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Exploitant de réseau de transport ou/or Transmission Operator ou/or TOP |
Tel que défini par NERC, entité qui est responsable de la fiabilité de son réseau de transport « local » et qui exploite ou dirige l’exploitation des installations de transport. Les pièces pertinentes sont P-351/89 et P-366/295. *** As defined by NERC, the entity responsible for the reliability of its "local" transmission system, and that operates or directs the operations of the transmission facilities. The relevant Exhibits are P-351/89 and P-366/295. |
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Federal Energy Regulatory Commission ou/or FERC |
La Federal Energy Regulatory Commission, l’agence de réglementation de l’énergie du gouvernement fédéral américain. La pièce pertinente est D-192. *** The Federal Energy Regulatory Commission, the regulatory energy agency of the U.S. Federal Government. The relevant Exhibit is D-192. |
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Hamilton Falls Power Corporation ou/or HFPCo |
Hamilton Falls Power Corporation, une société de droit fédéral, constituée le 31 janvier 1958. Suite à un changement de dénomination sociale en 1965, la société devient Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited (voir CF(L)Co). *** Hamilton Falls Power Corporation, a company incorporated under federal law on January 31, 1958. Following a corporate name change in 1965, the company becomes Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited (see CF(L)Co). |
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Guaranteed Winter Availability Contract ou/or GWAC |
« Churchill Falls Guaranteed Winter Availability Contract » intervenu entre HQ et CF(L)Co, en date 18 juin 1999 avec effet rétroactif au 1er novembre 1998 et amendement en date du 29 mars 2000. Il s’agit de la pièce P-2C. *** “Churchill Falls Guaranteed Winter Availability Contract” between HQ and CF(L)Co, signed on June 18, 1999 and with retroactive effect to November 1, 1998, and amendment dated March 29, 2000. This is Exhibit P-2C. |
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Guide des pratiques d’affaires pour les services de transport d’Hydro-Québec TransÉnergie GSTHQ |
Il s’agit de la pièce P-338.
This is Exhibit P-338. |
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Hydro-Québec ou/or HQ |
Société mandataire de l’État de la province du Québec créée le 14 avril 1944 sous le nom de Commission hydroélectrique de Québec. Actionnaire de CF(L)Co détenant actuellement 34,2 % des actions ordinaires et 1 action privilégiée de catégorie « B ». *** State agent corporation of the Province of Quebec created on April 14, 1944, under the name of the Quebec Hydro-Electric Commission. Shareholder of CF(L)Co, currently holding 34.2% of its common shares and 1 preferred Class “B” share. |
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Hydro-Québec Distribution ou/or HQD |
Hydro-Québec dans ses activités de distribution d’électricité. *** Hydro-Québec in its distribution activities. |
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Hydro-Québec Production ou/or HQP |
Hydro-Québec dans ses activités de production d’électricité. *** Hydro-Québec in its generation activities. |
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Hydro-Québec TransÉnergie ou/or HQT ou/or le Transporteur |
Hydro-Québec dans ses activités de transport d’électricité. *** Hydro-Québec in its transmission activities. |
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IESO |
Independent Electricity System Operator (Ontario). |
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ISO-NE |
Independent System Operator New England |
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ITS |
Interchange Transactions Scheduler |
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Lettre d’intention / Letter of Intent ou/or LOI |
Lettre d’intention - Base d’un contrat définitif d’énergie, intervenue entre CF(L)Co et la Commission hydroélectrique de Québec, en date du 13 octobre 1966. Il s’agit des pièces P-4 (version française) et D-12 (version anglaise). *** Letter of Intent - The basis for a definitive Power Contract between CF(L)Co and the Quebec Hydro-Electric Commission, dated October 13, 1966. These are Exhibits P-4 (French version) and D-12 (English version). |
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Loi-Bail / Lease Act |
Loi intitulée « An Act to Authorize the Lieutenant-Governor in Council to Execute and Deliver an Indenture Leasing Certain Water Powers in Labrador to Hamilton Falls Power Corporation Limited and to Make Provision Respecting Other Matters Connected Therewith », en date du 13 mars 1961 avec, en annexe, le bail signé, daté du 16 mai 1961. La pièce pertinente est D-8. Une version ultérieure et amendée est disponible à la pièce P-221. *** An Act entitled « An Act to Authorize the Lieutenant-Governor in Council to Execute and Deliver an Indenture Leasing Certain Water Powers in Labrador to Hamilton Falls Power Corporation Limited and to Make Provision Respecting Other Matters Connected Therewith », dated March 13, 1961, and the signed lease, dated May 16, 1961, appended thereto. The relevant Exhibit is D-8. A subsequent and amended version is available at Exhibit P-221. |
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Mill : |
Millième partie d’une unité. Dans le présent litige, un mill fait référence à un millième d’un dollar. 1 mill = 1/10 de cent ou 0,1 cent ou 0,001 $ Selon la définition de l’article 1.1 1) du Contrat : Mill : 1/1000 de dollar en monnaie légale du Canada. *** A thousandth of a unit. In the context of the present litigation, one mill refers to a thousandth of a dollar. 1 mill = 1/10 of a cent or 0.1 cent or $0.001 Pursuant to the definition of Article 1.1 1) of the Power Contract: Mill: means 1/1000 of a dollar in lawful money of Canada. |
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NAESB |
North American Energy Standards Board. |
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Nalcor ou/or Nalcor Energy |
Nalcor Energy, un agent de la Couronne de la province de Terre-Neuve-et-Labrador, qui a été créé en 2007 par la Energy Corporation Act, S.N.L. 2007, chapitre E-11.01. *** Nalcor Energy, a Crown agent of the province of Newfoundland and Labrador, which was created in 2007 by the Energy Corporation Act, S.N.L. 2007, chapter E-11.01. |
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Nalcor Energy Marketing Corporation ou/or NEMC |
Nalcor Energy Marketing Corporation, une filiale à part entière de Nalcor Energy, qui a été créée le 24 mars 2014. Les pièces pertinentes sont P-290/440 et P-EM-1 (confidentielle). *** Nalcor Energy Marketing Corporation, a wholly-owned subsidiary of Nalcor Energy, which was incorporated on March 24, 2014. The relevant Exhibits are P-290/440 and P-EM-1 (confidential). |
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New England Power Pool ou/or NEPOOL |
Le « New England Power Pool », établi en 1971 et formé par des participants au marché des six États de la Nouvelle-Angleterre (Connecticut, Maine, Massachussetts, New Hampshire, Rhode Island et Vermont). La pièce pertinente est D-212. *** The New England Power Pool established in 1971 and made up of the market participants from the six New England states (Connecticut, Maine, Massachussetts, New Hampshire, Rhode Island et Vermont). The relevant Exhibit is D-212. |
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Newfoundland and Labrador Hydro ou/or NLH |
Newfoundland and Labrador Hydro, un agent de la Couronne de la province de Terre-Neuve-et-Labrador, constituée en 1975, filiale à part entière de Nalcor Energy et actionnaire de CF(L)Co détenant 65,8 % des actions ordinaires, 1 action privilégiée de catégorie « A » et 1 action privilégiée de catégorie « C ». *** Newfoundland and Labrador Hydro, a Crown agent of the Province of Newfoundland and Labrador, incorporated in 1975, a wholly-owned subsidiary of Nalcor Energy and a shareholder of CF(L)Co holding 65.8% of its common shares, 1 preferred Class “A” share and 1 preferred Class “C” share. |
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North American Electric Reliability Corporation ou/or NERC |
La « North American Electric Reliability Corporation », un organisme sans but lucratif formé en 2006 et dont le prédécesseur était le « National Electric Reliability Council » mis en place en 1968 pour veiller à la fiabilité et suffisance des systèmes de transport de l’électricité en Amérique du Nord. Les pièces pertinentes sont P-301, P-351, P-352, P-365, D-202 et D-216. *** The North American Electric Reliability Corporation is a non-profit organization formed in 2006 whose predecessor was the National Electric Reliability Council established in 1968 to ensure the reliability and adequacy of electricity transmission systems in North America. The relevant Exhibits are P-301, P-351, P-352, P-365, D-202 and D-216. |
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Northeast Power Coordinating Council ou/or NPCC |
Le « Northeast Power Coordinating Council », un organisme sans but lucratif nord-américain formé en 1966 pour promouvoir l’exploitation fiable et efficace des principaux réseaux d’électricité interconnectés du nord-est de l’Amérique du Nord. Le NPCC comprend les six États de la Nouvelle-Angleterre, l’État de New York, l’Ontario, le Québec, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick. *** The Northeast Power Coordinating Council is a North American non-profit organization established in 1966, responsible for promoting and improving the reliability of the international, interconnected bulk power system in Northeastern North America. The NPCC includes the state of New York, the sixth states of New England, Ontario, Quebec, Nova Scotia and New Brunswick. |
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NYISO |
New York Independent System Operator |
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OATT |
Open Access Transmission Tariff |
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Office national de l’énergie ou/or ONÉ National Energy Board ou/or NEB |
L’Office national de l’énergie est un organisme fédéral indépendant créé en 1959 par une loi du Parlement du Canada pour réglementer les aspects internationaux et interprovinciaux des secteurs du pétrole, du gaz et de l’électricité. La raison d’être de l’ONÉ est de réglementer, dans l’intérêt public canadien, les pipelines, la mise en valeur des ressources énergétiques et le commerce de l’énergie. *** The National Energy Board is an independent federal agency established in 1959 by the Parliament of Canada to regulate international and interprovincial aspects of the oil, gas and electric utility industries. The purpose of the NEB is to regulate pipelines, energy development and trade in the Canadian public interest. |
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Open Access Same-Time Information System ou/or OASIS |
Le système d’information et de réservation prévu à la partie 37 des règlements de la FERC, 18 C.F.R. (1996) et conforme aux décisions, ordonnances et règlements de la Régie de l’énergie. La pièce pertinente est P-345/15. *** The information and reservation system contained in Part 37 of the FERC regulations, 18 C.F.R. (1996) and consistent with Régie de l’énergie decisions, orders and regulations. The relevant Exhibit is P-345/15. |
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Principal Agreement |
« Agreement for Exploration and Development of Newfoundland and Labrador » intervenu entre Terre-Neuve, Brinco et N. M. Rothschild, en date du 21 mai 1953. Les pièces pertinentes sont D-4 et D-5. *** « Agreement for Exploration and Development of Newfoundland and Labrador » between Newfoundland, Brinco and N. M. Rothschild, dated May 21, 1953. The relevant Exhibits are D-4 and D-5. |
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Prospectus de Morgan Stanley Offering Memorandum O.M. |
Prospectus en vue d’une émission obligatoire. Il s’agit de la pièce D-29. First Mortgage Bonds This is Exhibit D-29. |
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PSA |
Purchase and Sale Agreement |
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Premier PSA / First PSA : |
« Purchase and Sale Agreement » intervenu entre Hydro-Québec, NLH et CF(L)Co, en date du 9 mars 1998. Il s’agit de la pièce P-31C. *** « Purchase and Sale Agreement » between Hydro-Québec, NLH and CF(L)Co, dated March 9, 1998. This is Exhibit P-31C. |
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Deuxième PSA / Second PSA : |
« Amended and Restated Purchase and Sale Agreement » intervenu entre Hydro-Québec, NLH et CF(L)Co, en date du 19 février 2001 avec une entrée en vigueur suivant l’expiration du Premier PSA. Il s’agit de la pièce P-32C. *** « Amended and Restated Purchase and Sale Agreement » between Hydro-Québec, NLH and CF(L)Co, dated February 19, 2001 with entry into force upon the expiry of the First PSA. This is Exhibit P-32C. |
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Troisième PSA / Third PSA : |
« Purchase and Sale Agreement » intervenu entre Hydro-Québec, NLH et CF(L)Co, en date du 31 mars 2004 avec une entrée en vigueur à l’expiration du Deuxième PSA. Il s’agit de la pièce P-33C. *** « Purchase and Sale Agreement » between Hydro-Québec, NLH and CF(L)Co, dated March 31, 2004 with entry into force upon the expiry of the Second PSA. This is Exhibit P-33C. |
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PUB |
Board of Commissioners of Public Utilities de la province de Terre-Neuve-et-Labrador / of the Province of Newfoundland and Labrador. |
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Puissance / Power |
Le taux de livraison de l’énergie électrique mesuré à un point donné; exprimée en kilowatts et ses multiples. *** As defined in the Contract, the rate at which energy is transferred at any point measured in kilowatts and multiples thereof. |
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PURPA |
Public Utility Regulatory Policies Act of 1978, 16 USC ch. 46. Il s’agit de la pièce D-180. / This is Exhibit D-180. |
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Recall PSA |
Entente intervenue entre CF(L)Co et NLH en date du 9 mars 1998 (P-30), amendée le 1er avril 2009, le 1er mai 2012 et le 26 mai 2015 (D-40) et se terminant le 31 août 2041. Il s’agit des pièces P-30 et D-40. *** Agreement between CF(L)Co and NLH, dated March 9, 1998, amended on April 1, 2009, on May 1, 2012 and on May 26, 2015 and terminating on August 31, 2041. These are Exhibits P-30 and D-40. |
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Réglage automatique de la production ou/or Automatic Generation Control ou/or AGC |
Tel que défini par NERC, équipement qui règle automatiquement la production dans une zone d’équilibrage à partir d’un endroit central de façon à maintenir le programme d’échange du responsable de l’équilibrage ainsi que la compensation en fréquence. L’AGC peut aussi comprendre la remise automatique d’échanges involontaires et la correction de l’écart de temps. Les pièces pertinentes sont P-351/8 et P-366/246. *** As defined by NERC, equipment that automatically adjusts generation in a Control Balancing Authority Area from a central location to maintain the Balancing Authority's interchange schedule plus Frequency Bias. AGC may also accommodate automatic inadvertent payback and time error correction. The relevant Exhibits are P-351/8 and P-366/246. |
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Renvoi sur la Reversion Act / Reference on the Reversion Act |
Renvoi à la Cour suprême de Terre-Neuve, Division d’appel, conformément à The Judicature Act, R.S.N. 1970, chapitre 187, article 6 et modifications, relativement à The Upper Churchill Water Rights Reversion Act, S.N. 1980, chapitre 40, adressé par le Procureur général de la province de Terre-Neuve-et-Labrador, en date du 10 février 1981. Les pièces pertinentes sont P-9, P-243 et D-37. *** Reference to the Supreme Court of Newfoundland, Appellate Division, pursuant to The Judicature Act, RSN 1970, chapter 187, section 6 and amendments, with respect to The Upper Churchill Water Rights Reversion Act, SN 1980, Chapter 40, submitted by the Attorney General of the Province of Newfoundland and Labrador, on February 10, 1981. The relevant Exhibits are P-9, P-243 and D-37. |
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Responsable de l’équilibrage ou/or Balancing authority ou/or BA |
Tel que défini par NERC, entité responsable qui intègre d’avance les plans de ressources, maintient l’équilibre charge-échange-production à l’intérieur d’une zone d’équilibrage, et soutient en temps réel la fréquence de l’Interconnexion. Les pièces pertinentes sont P-351/10 et P-366/266. *** As defined by NERC, the responsible entity that integrates resource plans ahead of time, maintains load-interchange-generation balance within a Balancing Authority Area, and supports Interconnection frequency in real time. The relevant Exhibits are P-351/10 and P-366/266. |
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Responsable des échanges ou/or Interchange Authority ou/or IA |
Tel que défini par NERC, entité responsable qui autorise la mise en œuvre de programmes d’échange équilibrés et valides entre des zones d’équilibrage, et veille à la communication de l’information sur les échanges pour les besoins de l’évaluation de la fiabilité. Les pièces pertinentes sont P-351/43 et P-366/250. *** As defined by NERC, the responsible entity that authorizes implementation of valid and balanced Interchange Schedules between Balancing Authority Areas, and ensures communication of Interchange information for reliability assessment purposes. The relevant Exhibits are P-351/43 and P-366/250. |
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Reversion Act |
The Upper Churchill Water Rights Reversion Act, S.N. 1980, ch. 40. |
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RPTC |
Rejet de production et télédélestage de charges *** Generation Rejection & Remote Load Shedding |
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Twinco ou/or Twin Falls Power Corporation Limited |
Twin Falls Power Corporation Limited, une compagnie dont CF(L)Co détient 33,3 % des actions ordinaires et est l’actionnaire de contrôle. *** Twin Falls Power Corporation Limited, a corporation of which CF(L)Co holds 33.3% of the common shares and is the controlling shareholder. |
Unités de mesure de l’électricité / Electricity Units
Puissance / |
Symbole / Symbol |
Multiples |
Équivalence |
watt |
W |
1 |
|
kilowatt |
kW |
1 000 = 103 |
1 Watt *1 000 |
mégawatt |
MW |
1 000 000 = 106 |
1 Watt * 1 000 000 ou/or |
gigawatt |
GW |
1 000 000 000 = 109 |
1 Watt * 1 000 000 000 ou/or |
térawatt |
TW |
1 000 000 000 000 = 1012 |
1 Watt * 1 000 000 000 000 ou/or |
|
|
|
|
Énergie / Energy |
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|
|
wattheure |
Wh |
1 |
|
kilowattheure |
kWh |
1 000 = 103 |
1 Wh *1 000 |
mégawattheure |
MWh |
1 000 000 = 106 |
1 Wh *1 000 000 ou |
gigawattheure |
GWh |
1 000 000 000 = 109 |
1 Wh * 1 000 000 000 ou/or |
térawattheure |
TWh |
1 000 000 000 000 = 1012 |
1 Wh * 1 000 000 000 000 ou/or |
CANADA |
|
|
|
PROVINCE DE QUÉBEC |
COUR SUPÉRIEURE |
DISTRICT DE MONTRÉAL |
|
|
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No 500-17-078217-133
|
HYDRO-QUÉBEC Demanderesse c. CHURCHILL FALLS (LABRADOR) CORPORATION LIMITED Défenderesse
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CHRONOLOGIE - CHURCHILL FALLS[509]
CHURCHILL FALLS TIME LINE[510]
DATE |
ÉVÉNEMENT |
14 avril 1944 / April 14, 1944 |
Création de la Commission hydroélectrique de Québec. *** Creation of the Commission hydroélectrique de Québec. |
31 mars 1949 / March 31, 1949 |
Terre-Neuve se joint à la Confédération canadienne. *** Newfoundland joins the Canadian Confederation. |
Août 1952 / August 1952 |
Le premier ministre de Terre-Neuve, Joseph R. Smallwood, se rend en Grande-Bretagne dans le but d’inciter des investisseurs à participer à l’exploration et l’exploitation des ressources naturelles de Terre-Neuve-et-Labrador, incluant le potentiel hydroélectrique des chutes (Chutes Hamilton) de la rivière Hamilton (renommée en 1965 en l’honneur du feu premier ministre anglais, Winston Churchill). *** Newfoundland Premier Joseph R. Smallwood travels to Great Britain in an effort to entice investors to help explore and develop Newfoundland & Labrador’s natural resources, including the hydroelectric potential of the 245-foot Grand Falls (aka Hamilton Falls) of the Hamilton River (renamed Churchill River in 1965 to honour deceased British Prime Minister, Winston Churchill). |
17 avril 1953 / April 17, 1953 |
Constitution en société de Brinco (P-81 et D-3). *** Incorporation of Brinco (P-81 and D-3). |
20 mai 1953 / May 20, 1953 |
Terre-Neuve adopte la loi intitulée The Government - British Newfoundland Corporation Limited - N.M. Rothschild & Sons (Confirmation of Agreement) Act, 1953 qui approuve une convention accordant une option à Brinco aux fins de la mise en valeur des ressources hydroélectriques, forestières et minérales du Labrador (D-4). *** Newfoundland adopts The Government - British Newfoundland Corporation Limited - N.M. Rothschild & Sons (Confirmation of Agreement) Act, 1953 approving an agreement granting an option to Brinco to develop the hydro-electric, timber and mineral resources of Labrador (D-4). |
21 mai 1953 / May 21, 1953 |
Terre-Neuve, Brinco et N.M. Rothschild & Sons signent l’« Agreement for Exploration and Development of Newfoundland and Labrador » (le « Principal Agreement ») (D-5). *** Newfoundland, Brinco and N.M. Rothschild & Sons execute the “Agreement for Exploration and Development of Newfoundland and Labrador” (the “Principal Agreement”) (D-5). |
31 janvier 1958 / January 31, 1958 |
Constitution en société de la filiale de Brinco, HFPCo (renommée CF(L)Co le 1er octobre 1965).[511] *** Incorporation of Brinco’s subsidiary HFPCo (renamed CF(L)Co on October 1, 1965).[512] |
30 juin 1958 / June 30, 1958 |
Brinco cède à CF(L)Co ses droits en regard du potentiel hydraulique du Haut Churchill (D-6). *** Brinco assigns to CF(L)Co its water power rights in respect to the water power potential of the Upper Churchill River (D-6). |
8 octobre 1958 / October 8, 1958 |
La Shawinigan Engineering Company Limited (« Shawinigan Engineering ») acquiert une participation de 20 % dans CF(L)Co moyennant 2,25 M$ (P-82). *** The Shawinigan Engineering Company Limited (“Shawinigan Engineering”) purchases a 20% share in CF(L)Co for $2.25 million (P-82). |
26 mai 1960 / May 26, 1960 |
CF(L)Co exerce son option conformément à l’article 9 du Principal Agreement et s’engage à mettre en valeur les ressources hydroélectriques du Haut Churchill (D-7). *** CF(L)Co exercises its option pursuant to s. 9 of the Principal Agreement and undertakes to develop the hydro-electric resources of the Upper Churchill River (D-7). |
22 juin 1960 / June 22, 1960 |
Suite au décès du premier ministre du Québec Maurice Duplessis en septembre 1959, les Libéraux de Jean Lesage sont élus au pouvoir. *** Following the death of Quebec Premier Maurice Duplessis in September of 1959, Jean Lesage’s Liberals come to power in Quebec. |
March 6, 1961 |
Brinco rencontre des représentants de HQ (P-84). *** Brinco meets with HQ representatives (P-84). |
13 mars 1961 / March 13, 1961 |
Terre-Neuve adopte la loi intitulée The Hamilton Falls Power Corporation Limited (Lease) Act, 1961 (la « Loi-Bail ») et le Bail de 1961 entre Terre-Neuve et CF(L)Co, d’une durée de 99 ans, renouvelable pour 99 ans, prend effet le 16 mai 1961[513] (D-8). *** Newfoundland adopts The Hamilton Falls Power Corporation Limited (Lease) Act, 1961 (the “Lease Act”) and the 99-year 1961 Lease between Newfoundland and CF(L)Co, renewable for 99 years, comes into effect on May 16, 1961[514] (D-8). |
23 mars 1961 / March 23, 1961 |
Brinco présente une offre à HQ (D-9). *** Brinco presents an offer to HQ (D-9). |
15 mai 1961 / May 15, 1961 |
HQ rejette l’offre de Brinco, indiquant que dans les conditions économiques actuelles, il était préférable d’aller de l’avant avec le développement de ses propres ressources hydrauliques sur la rivière Manicouagan (D-10). *** HQ rejects Brinco’s offer, asserting that “under present economic conditions, it is preferable to go ahead with the development of its own hydraulic resources on the Manicouagan River” (D-10). |
16 mai 1961 / May 16, 1961 |
Le Bail de 1961 entre Terre-Neuve et CF(L)Co prend effet. *** The 1961 Lease between Newfoundland and CF(L)Co comes into effect. |
Mars 1963 / March 1963 |
Des discussions ont cours entre Brinco et HQ. *** Discussions take place between Brinco and HQ. |
29 avril 1963 / April 29, 1963 |
Brinco, HQ et ConEd émettent un communiqué de presse conjoint confirmant l’intérêt de ConEd à acheter d’HQ à la frontière internationale toute l’énergie qui soit économiquement disponible en provenance de Hamilton Falls après que les besoins canadiens eurent été satisfaits (P-88). *** Brinco, HQ and ConEd issue a joint press release confirming ConEd’s interest in purchasing “from HQ at the international border of as much power as may be economically available from Hamilton Falls after Canadian requirements have been met” (P-88). |
Mai 1963 / May 1963 |
Ce qu’on a communément appelé la « nationalisation de l’électricité » au Québec est achevée : HQ fait l’acquisition des actions de la presque totalité des compagnies privées d’électricité au Québec. L’acquisition comprend Shawinigan Water and Power, la société mère de Shawinigan Engineering qui détenait 20 % des actions ordinaires de CF(L)Co depuis 1958, de sorte que HQ devient un actionnaire (indirect) de CF(L)Co à hauteur de 20 %. *** Quebec’s “nationalization” of the electricity sector is completed as HQ acquires the shares of substantially all the private power companies in Québec. The acquisition includes Shawinigan Water and Power, the parent company of Shawinigan Engineering which held 20% of the CF(L)Co common shares since 1958, and HQ becomes an (indirect) 20% shareholder of CF(L)Co. |
8 octobre 1963 / October 8, 1963 |
Le Ministre fédéral du Commerce et du Développement, l’honorable Mitchell Sharp, émet un énoncé de politique énergétique nationale dans lequel il confirme une nouvelle politique se rapportant à l’exportation d’électricité qui, pour la première fois, permet des contrats d’exportation à long terme d’au plus 25 ans dans la mesure où l’énergie vendue est en surplus aux besoins canadiens (P-99). *** Federal Minister of Trade and Commerce, the Honourable Mitchell Sharp, issues a “Statement of National Power Policy” in which he confirms a new policy with respect to the export of electricity which for the first time allows long-term export contracts of up to 25 years, provided that the energy sold is surplus to Canadian requirements (P-99). |
Juillet 1964 / July 1964 |
Les négociations entre Brinco et HQ sont interrompues (P-129). *** Negotiations break down between Brinco and HQ (P-129). |
Printemps 1965 / Spring 1965 |
Les négociations reprennent entre Brinco and HQ. *** Talks resume between Brinco and HQ. |
9 décembre 1965 / December 9, 1965 |
ConEd et Niagara Mohawk remettent un projet de lettre d’intention à HQ visant l’achat de 10,5 milliards de kilowattheures d’énergie électrique de HQ à la frontière internationale, pour une période de 25 ans commençant en 1971, au prix de 4 mills US par kWh (P-137/1). *** ConEd and Niagara Mohawk provide a draft Letter of Intent to HQ for the purchase of “10.5 billion kilowatt hours of electric energy from Hydro-Quebec at the International Boundary”, for a period of 25 years starting in 1971, at the price of 4 mills US per kWh (P-137/1). |
December 1965 - early February 1966 |
La « Court of Appeals » de l’État de New York annule le permis accordé par la Federal Power Commission visant la construction d’une usine à réserve pompée à Storm King Mountain près du fleuve Hudson. *** The New York State Court of Appeals rescinds ConEd’s Federal Power Commission license to build a pumped storage facility at Storm King Mountain along the Hudson River . |
28 janvier 1966 / January 28, 1966 |
ConEd et Niagara Mohawk remettent un projet de lettre d’intention à HQ visant l’achat de 10,5 milliards de kilowattheures d’énergie électrique d’Hydro Québec à la frontière internationale, pour une période de 25 ans, au prix de 4 mills US par kWh (P-137/7). Aucune date de début n’est indiquée. *** ConEd and Niagara Mohawk provide a draft Letter of Intent to HQ for the purchase of “10.5 billion kilowatt hours of electric energy from Hydro-Quebec at the International Boundary”, for a period of 25 years, at the price of 4 mills US per kWh (P-137/7). No starting date is indicated. |
5 juin 1966 / June 5, 1966 |
Le gouvernement Lesage est défait par l’Union nationale de Daniel Johnson. *** The Lesage Government in Quebec falls to Daniel Johnson’s Union Nationale. |
13 octobre 1966 / October 13, 1966 |
HQ et CF(L)Co signent la Lettre d’intention (P-4 en français et D-12 en anglais). *** HQ and CF(L)Co sign the Letter of Intent (P-4 in French and D-12 in English). |
Printemps 1967 / Spring 1967 |
Les négociations relatives au Contrat débutent entre CF(L)Co/Brinco et HQ. *** Negotiations with respect to Power Contract between CF(L)Co/Brinco and HQ begin. |
3 juin 1968 / June 3, 1968 |
HQ adopte une résolution approuvant le projet de Contrat (P-207). *** HQ adopts a resolution approving the draft Power Contract (P-207). |
13 juin 1968 / June 13, 1968 |
CF(L)Co adopte une résolution ratifiant la décision de son comité exécutif du 14 mai 1968 d’approuver le projet de Contrat (P-209). *** CF(L)Co adopts a resolution ratifying its executive committee’s decision of May 14, 1968, approving the draft Power Contract (P-209). |
10 juillet 1968 / July 10, 1968 |
Le gouvernement du Québec adopte l’arrêté en conseil no 2100 autorisant HQ à conclure le Contrat avec CF(L)Co (D-120). *** Quebec adopts Order in Council No. 2100 authorizing HQ to enter into the Power Contract with CF(L)Co (D-120). |
25 juillet 1968 / July 25, 1968 |
HQ injecte 15 M$ dans le capital de CF(L)Co en contrepartie d’actions ordinaires et s’engage à souscrire des obligations portant hypothèque générale de CF(L)Co d’un capital de 100 M$ (P-214). *** HQ contributes $15 million in equity to CF(L)Co in return for common shares and undertakes to subscribe to General Mortgage Bonds of an amount of $100 million (P-214). |
Octobre 1968 / October 1968 |
Morgan Stanley émet un Offering Memorandum visant les obligations de CF(L)Co et les courtiers de CF(L)Co mettent en vente les obligations portant première hypothèque sur les marchés américain (500 millions de dollars américains) et canadien (50 millions de dollars) (D-29). *** Morgan Stanley issues CF(L)Co’s Bond Offering Memorandum and CF(L)Co’s brokers offered the First Mortgage Bonds for sale on the US (US $500 million) and Canadian ($50 million) markets in October 1968 (D-29). |
18 et 22 novembre 1968 / November 18 and 22, 1968 |
CF(L)Co offre des obligations portant hypothèque générale d’un capital de 100 M$ aux fins d’achat exclusif par HQ (P-218). HQ confirme son acceptation de l’offre visant l’achat d’obligations portant hypothèque générale de CF(L)Co d’un capital de 100 M$ (P-219). *** CF(L)Co offers for purchase by HQ alone General Mortgage Bonds in the amount of $100 million (P-218). HQ confirms its acceptance of the offer to purchase CF(L)Co General Mortgage Bonds in the amount of $100 million (P-219). |
12 mai 1969 / May 12, 1969 |
Les arrangements financiers étant en place, CF(L)Co et HQ signent le Contrat (P-1). *** With financial arrangements finally in place, CF(L)Co and HQ execute the Power Contract (P-1). |
Novembre 1971 / November 1971 |
Les premières livraisons à HQ d’énergie en provenance de Churchill Falls surviennent, quatre mois et demi en avance sur l’échéancier. *** The first Churchill Falls power is delivered to HQ, some four and a half months ahead of schedule. |
18 janvier 1972 / January 18, 1972 |
Le gouvernement libéral de Terre-Neuve dirigé par M. Smallwood est remplacé par un gouvernement progressiste-conservateur dirigé par Frank D. Moores. *** Smallwood’s Liberal Government in Newfoundland falls to Frank D. Moores’ Progressive Conservatives. |
16 juin 1972 / June 16, 1972 |
Cérémonie d’ouverture de la centrale de Churchill Falls. *** Opening ceremony of Churchill Falls plant. |
4 juin 1974 / June 4, 1974 |
La Newfoundland Industrial Development Corporation fait l’acquisition, moyennant 160 M$, de la totalité de la participation en actions de CF(L)Co et de son affiliée, la Gull Island Power Company, détenue par Brinco, ainsi que les droits hydrauliques et hydroélectriques de Brinco aux termes du Principal Agreement (P-227). *** Newfoundland Industrial Development Corporation acquires for $160 Million all of Brinco’s shares in CF(L)Co and its affiliate, the Gull Island Power Company, together with Brinco’s hydraulic and hydro-electric rights under the Principal Agreement (P-227). |
7 novembre 1975 / November 7, 1975 |
La Newfoundland Industrial Development Corporation transfère ses actions de CF(L)Co à NLH. *** Newfoundland Industrial Development Corporation transfers its shares in CF(L)Co to NLH. |
6 janvier 1976 / January 6, 1976 |
NLH demande à HQ de livrer à Terre-Neuve-et-Labrador un bloc additionnel de 600 MW en provenance du Haut Churchill à compter du 1er janvier 1982 (P-228/2). *** NLH requests HQ to supply Newfoundland & Labrador with 600 MW of additional energy from the Upper Churchill commencing January 1, 1982 (P-228/2). |
30 janvier 1976 / January 30, 1976 |
HQ rejette la demande de NLH, déclarant que bien qu’HQ n’ait pas d’objection à fournir de la puissance et de l’énergie à NLH à long terme à compter du 1er janvier 1982, il est pratiquement impossible pour HQ de faire face à une réduction de 600 MW de sa capacité de production sans considérer de possibles modifications à sa planification ou à son programme de construction (P-228/4). *** HQ rejects NLH’s request, asserting that “While Hydro-Québec has no opposition to supply power and energy to Newfoundland and Labrador Hydro on a long-term basis starting January 1, 1982, it is practically impossible for us to face a reduction of 600 MW from our generation capacity without considering a possible modification in our planning and/or our construction program” (P-228/4). |
18 mai 1976 / May 18, 1976 |
Le premier ministre Frank Moores demande au premier ministre Robert Bourassa « an additional 800 megawatts of power by 1982, without prejudice to any other rights we have, and at the same costs as are paid by Hydro-Quebec... » (P-228/5 à 9). *** Premier Frank Moores requests Premier Robert Bourassa “an additional 800 megawatts of power by 1982, without prejudice to any other rights we have, and at the same costs as are paid by Hydro-Quebec...” (P-228/5 à 9). |
25 mai 1976 / May 25, 1976 |
Le premier ministre Robert Bourassa répond que la réclamation de Terre-Neuve semble non fondée, mais qu’il est disposé à examiner toute proposition raisonnable (P-228/10). *** Premier Robert Bourassa responds that Newfoundland’s claim appears unfounded but that it is willing to consider any reasonable proposal (P-228/10). |
6 août 1976 / August 6, 1976 |
Le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador adopte l’arrêté en conseil no 1001-’76 exigeant, conformément au Bail de 1961, que CF(L)Co livre à NLH « a total of 800 MW of electrical power generated from the waters of the Upper Churchill Watershed » à compter du 1er octobre 1983 (P-231). *** Newfoundland & Labrador adopts Order in Council No. 1001-’76 requesting, pursuant to the 1961 Lease, that CF(L)Co supply to NLH a total of 800 MW of power generated from the waters of the Upper Churchill Watershed commencing on October 1, 1983 (P-231). |
31 août 1976 / August 31, 1976 |
CF(L)Co répond qu’elle ne peut, compte tenu de ses obligations aux termes du Contrat et du Deed of Trust and Mortgage Securing First Mortgage Bonds, donner suite à la demande du 6 août 1976 (P-70). *** CF(L)Co responds that, in light of its obligations under the Power Contract and the Deed of Trust and Mortgage Securing First Mortgage Bonds, it cannot comply with the August 6, 1976 request (P-70). |
1er septembre 1976 / September 1, 1976 |
La centrale de Churchill Falls est mise en service à pleine capacité. Il s’agit de la « Effective Date » aux termes du Contrat. *** Churchill Plant is fully commissioned. This is the “Effective Date” under the Contract. |
1er septembre 1976 / September 1, 1976 |
CF(L)Co et NLH concluent une entente relative au Bloc de 300 MW et au Bloc Twinco (P-29). *** CF(L)Co and NLH enter into an agreement relating to the Recall Block and to the Twinco Block (P-29). |
13 septembre 1976 / September 13, 1976 |
Le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador intente le Recall Case (P-237). *** The Government of Newfoundland & Labrador institutes the Recall Case (P-237). |
27 mai 1977 / May 27, 1977 |
HQ intente en parallèle une requête en jugement déclaratoire contre CF(L)Co dans la province de Québec relativement à l’obligation de CF(L)Co de vendre et de livrer de l’énergie à HQ en vertu du Contrat (D-18). *** HQ brings a parallel action against CF(L)Co in the province of Quebec seeking declaratory relief in relation to CF(L)Co’s obligation to sell and supply power to HQ under the Power Contract (D-18) (the “Declaratory Judgment Case”). |
17 décembre 1980 / December 17, 1980 |
Le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador adopte la loi intitulée The Upper Churchill Water Rights Reversion Act (la « Reversion Act »). *** Newfoundland & Labrador adopts The Upper Churchill Water Rights Reversion Act (the “Reversion Act”). |
10 février 1981 / February 10, 1981 |
Le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador renvoie la Reversion Act à la Cour d’appel de Terre-Neuve pour qu’elle se prononce sur sa validité constitutionnelle (le « Renvoi sur la Reversion Act »). *** Newfoundland & Labrador refers the Reversion Act to the Newfoundland Court of Appeal to pronounce on its constitutional validity (the “Reference on the Reversion Act”). |
5 mars 1982 / March 5, 1982 |
La Cour d’appel de Terre-Neuve déclare que la Reversion Act est intra vires du pouvoir de la législature de Terre-Neuve. HQ interjette subséquemment appel de la décision auprès de la Cour suprême du Canada (P-243). *** The Newfoundland Court of Appeal declares the Reversion Act intra vires of the Newfoundland Legislature. HQ subsequently appeals the decision to the Supreme Court of Canada (P-243). |
13 juin 1983 / June 13, 1983 |
La Cour suprême de Terre-Neuve rejette le Recall Case. Le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador interjette subséquemment appel de la décision auprès de la Cour d’appel de Terre-Neuve (P-26). *** The Newfoundland Supreme Court dismisses the Recall Case. Newfoundland & Labrador subsequently appeals the decision to the Newfoundland Court of Appeal (P-26). |
4 août 1983 / August 4, 1983 |
La Cour supérieure du Québec accueille la requête en jugement déclaratoire de HQ. CF(L)Co interjette appel de la décision à la Cour d’appel du Québec par la suite (P-38). *** The Quebec Superior Court grants HQ’s Motion for Declaratory Judgment. CF(L)Co subsequently appeals the decision to the Quebec Court of Appeal (P-38). |
3 mai 1984 / May 3, 1984 |
La Cour suprême du Canada déclare que la Reversion Act est ultra vires du pouvoir de la législature de Terre-Neuve (P-9). *** The Supreme Court of Canada declares the Reversion Act ultra vires of the Newfoundland Legislature (P-9). |
18 février 1985 / February 18, 1985 |
La Cour d’appel du Québec rejette l’appel interjeté par CF(L)Co à l’égard de la décision de la Cour supérieure du Québec sur la Requête en jugement déclaratoire de HQ au sujet du Contrat. CF(L)Co interjette ensuite appel de la décision devant la Cour suprême du Canada (P-38/58). *** The Quebec Court of Appeal dismisses CF(L)Co’s appeal of the Superior Court’s decision on HQ’s Motion for Declaratory Judgment regarding the Power Contract. CF(L)Co subsequently appeals the decision to the Supreme Court of Canada (P-38/58). |
25 octobre 1985 / October 25, 1985 |
La Cour d’appel de Terre-Neuve rejette l’appel interjeté par Terre-Neuve-et-Labrador à l’égard du jugement du tribunal inférieur dans la cause relative au rappel. Terre-Neuve-et-Labrador interjette ensuite appel de la décision devant la Cour suprême du Canada (P-26A/1). *** The Newfoundland Court of Appeal dismisses Newfoundland & Labrador’s appeal of the lower Court’s decision in the Recall Case. Newfoundland & Labrador subsequently appeals the decision to the Supreme Court of Canada (P-26A/1). |
9 juin 1988 / June 9, 1988 |
La Cour suprême du Canada rejette le pourvoi de Terre-Neuve-et-Labrador à l’égard du jugement du tribunal inférieur dans le Recall Case. Le même jour, eu égard à sa décision dans la cause relative au rappel, la Cour suprême du Canada déclare théorique le pourvoi de CF(L)Co concernant la Requête en jugement déclaratoire de HQ (P-26A/10). *** The Supreme Court of Canada dismisses Newfoundland & Labrador’s appeal of the lower Court’s decision in the Recall Case. On the same day, and in light of its decision in the Recall Case, the Supreme Court of Canada declares CF(L)Co’s appeal regarding HQ’s Motion for Declaratory Judgment to be moot (P-26A/10). |
1989-1992 / 1989-1992 |
NLH et HQ entament une période de négociations axées principalement sur le développement du Bas-Churchill et la viabilité financière à long terme de CF(L)Co. *** NLH and HQ undertake a round of negotiations focusing primarily on the development of the Lower Churchill and the long term financial viability of CF(L)Co. |
1er novembre 1990 - 14 janvier 1991 / November 1st, 1990 - January 14, 1991 |
HQ et CF(L)Co concluent la Convention d’exploitation (P-248C et P-281). *** HQ and CF(L)Co enter into the Operating Agreement (P-248C et P-281). |
1995-1996 / 1995-1996 |
CF(L)Co et HQ entreprennent une nouvelle période de négociations portant principalement sur la viabilité financière à long terme de CF(L)Co. *** CF(L)Co and HQ undertake a new round of negotiations focusing primarily on the long-term financial viability of CF(L)Co. |
10 mai 1996 / May 10, 1996 |
La U.S. Federal Energy Regulatory Commission (FERC) adopte l’ordonnance 888, laquelle entre en vigueur le 1er janvier 1997. *** The US Federal Energy Regulatory Commission (FERC) adopts Order 888, which comes into force on January 1, 1997. |
11 décembre 1996 / December 11, 1996 |
HQ adopte le Règlement 652 sur les conditions et tarifs du service de transport en gros de l’électricité, qui a été approuvé par le gouvernement du Québec aux termes du Décret no 1559-96 (P-263). *** HQ adopts By-Law 652 on the conditions and tariffs for wholesale transport of electricity, which is approved by the Government of Quebec by way of Order-in-Council No. 1559-96 (P-263). |
Mai 1997 / May 1997 |
HQ crée la division Hydro-Québec TransÉnergie et rend son réseau de transport accessible à tous les intervenants sur les marchés nord-américains. *** HQ creates Hydro-Québec TransÉnergie and implements an open access transmission tariff. |
9 mars 1998 / March 9, 1998 |
Les premiers ministres de Terre-Neuve-et-Labrador et du Québec publient une Déclaration conjointe annonçant le cadre de référence devant guider la suite des négociations au sujet du développement du réseau de Churchill River et des projets connexes au Québec (P-270). À la même époque, des hauts dirigeants de HQ et de NLH s’échangent un résumé des pourparlers qui ont eu lieu jusque-là, lesquels couvrent également le rappel de 130 MW, le GWAC et la Convention entre actionnaires (P-272). *** The Premiers of Newfoundland & Labrador and Quebec issue a Joint Statement announcing the framework for further negotiations regarding development of the Churchill River system and related projects in Quebec (P-270). At the same time, executives from HQ and NLH exchange a summary of the discussions held thus far, which also covers the 130 MW recall, the GWAC and the Shareholders Agreement (P-272). |
14 septembre 1998 / September 14, 1998 |
CF(L)Co et HQ s’entendent sur les dispositions d’un Notice of Recapture and Waiver, avec effet rétroactif au 9 mars 1998, aux termes duquel CF(L)Co donne à HQ un avis écrit formel de son intention de rappeler immédiatement la portion du Bloc de 300 MW qui n’a toujours pas été récupérée depuis la conclusion du Contrat (130,7 MW) et HQ renonce à son droit à un préavis de trois ans (D-1). *** CF(L)Co and HQ agree to the terms of a Notice of Recapture and Waiver, with retroactive effect to March 9, 1998, whereby CF(L)Co gives HQ formal notice of its intention to immediately recall the portion of the 300 MW Recall Block that had yet to be recalled since entering into the Power Contract (130.7 MW) (D-1). |
25 septembre 1998 / September 25, 1998 |
CF(L)Co conclut un contrat d’achat et de vente avec NLH (« Recall PSA »), également avec effet rétroactif au 9 mars 1998, aux termes duquel CF(L)Co convient de vendre à NLH l’énergie correspondant au Bloc de rappel de 300 MW aux mêmes prix que ceux prévus dans le Contrat, et ce, jusqu’en 2041 (P-30). Le Recall PSA remplace une convention entre ces mêmes parties, en date du 1er septembre 1976 (P-29). ***
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25 septembre 1998 / September 25, 1998 |
CF(L)Co enters into a Purchase and Sale Agreement with NLH (the “Recall PSA”), also with retroactive effect to March 9, 1998, pursuant to which CF(L)Co agrees to sell to NLH the energy corresponding to the 300 MW Recall Block at the same prices as those stipulated in the Power Contract, up until 2041 (P-30). The Recall PSA replaces an agreement between those two parties, dated September 1, 1976 (P-29). |
Décembre 1998 / December 1998 |
NLH conclut le Premier PSA avec HQ, également avec effet rétroactif au 9 mars 1998, aux termes duquel NLH vend à HQ, au prix de 2,39 ¢ le kWh, le surplus du Bloc de 300 MW qui n’est pas utilisé à ce moment-là par NLH au Labrador[515] (P-31C). *** NLH enters into the First PSA with HQ, also with retroactive effect to March 9, 1998, pursuant to which NLH sells to HQ, at the price of 2.39¢ per kWh, all surplus energy from the 300 MW Recall Block not then used by NLH in Labrador[516] (P-31C). |
18 juin 1999 / June 18, 1999 |
CF(L)Co et HQ concluent le GWAC, avec effet rétroactif au 1er novembre 1998 et d’une durée expirant en 2041[517], et HQ, NLH et CF(L)Co concluent la Convention entre actionnaires avec effet rétroactif au 1er novembre 1998 et d’une durée expirant au plus tard le 31 août 2041 (P-2C et P-3C). *** CF(L)Co and HQ enter into the GWAC, with retroactive effect to November 1, 1998 and a term expiring in 2041[518] and HQ, NLH and CF(L)Co enter into a Shareholders’ Agreement with retroactive effect to November 1, 1998 with a term expiring at the latest on August 31, 2041 (P-2C and P-3C). |
19 février 2001 / February 19, 2001 |
HQ et NLH concluent le Deuxième PSA, d’une durée de 3 ans (P-32C). *** HQ and NLH enter into the Second PSA, which has a 3-year term (P-32C). |
31 mars 2004 / March 31, 2004 |
HQ et NLH concluent le Troisième PSA, d’une durée de 5 ans (P-33C). *** HQ and NLH enter into the Second PSA, which has a 5-year term (P-33C). |
20 mars 2009 / March 20, 2009 |
HQT et NLH concluent 4 conventions pour le service de transport ferme à long terme de point à point — LAB-MASS 106 MW, LAB-MASS 53 MW (#1), LAB-MASS 53 MW (#2) et LAB-MASS 53 MW (#3) (P-294). *** HQT and NLH enter into 4 service agreements for firm long-term point-to-point transmission service — LAB-MASS 106 MW, LAB-MASS 53 MW (#1), LAB-MASS 53 MW (#2) et LAB-MASS 53 MW (#3) (P-294). |
2 avril 2009 / April 2, 2009 |
Annonce de la province de Terre-Neuve-et-Labrador intitulée « Historic Arrangement Sees Newfoundland and Labrador Wheel Upper Churchill Power through Quebec to North American Markets » (P-295) *** Announcement by the province of Newfoundland and Labrador that NLH will wheel Churchill Falls power through Québec (P-295). |
23 février 2010 / February 23, 2010 |
CF(L)Co intente un recours contre HQ dans le dossier 500-17-056518-106. *** CF(L)Co institutes proceedings against HQ in file 500-17-056518-106 (the “Good Faith Case”). |
December 15, 2010 |
La dette reliée au projet de Churchill Falls est pleinement remboursée. *** The debt relating to the Churchill Falls project is completely reimbursed. |
1er mai 2012 / May 1, 2012 |
Le Recall PSA est amendé (D-40). *** The Recall PSA is amended (D-40). |
9 mai 2013 / May 9, 2013 |
Les 4 conventions pour le service de transport ferme à long terme de point à point entre HQT et NLH sont renouvelées pour une période de 10 ans — LAB-MASS 106 MW, LAB-MASS 53 MW (#1), LAB-MASS 53 MW (#2) et LAB-MASS 53 MW (#3) (P-294). *** The 4 service agreements for firm long-term point-to-point transmission service between HQT and NLH are renewed for a ten-year period — LAB-MASS 106 MW, LAB-MASS 53 MW (#1), LAB-MASS 53 MW (#2) et LAB-MASS 53 MW (#3) (P-294). |
22 juillet 2013 / July 22, 2013 |
HQ intente le présent recours contre CF(L)Co. *** HQ institutes the present proceedings against CF(L)Co. |
24 juillet 2014 / July 24, 2014 |
La Cour supérieure du Québec rejette le recours de CF(L)Co dans le dossier 500-17-056518-106. CF(L)Co interjette appel de ce jugement à la Cour d’appel du Québec par la suite. *** The Quebec Superior Court dismisses CF(L)Co’s proceedings in file 500-17-056518-106. CF(L)Co subsequently appeals this judgment to the Quebec Court of Appeal. |
5 décembre 2014 / December 5, 2014 |
CF(L)Co et NLH concluent le Twinco Power Purchase Agreement (P-339). *** CF(L)Co and NLH enter into the Twinco Power Purchase Agreement (P-339 |
31 décembre 2014 / December 31, 2014 |
Les obligations de CF(L)Co relatives au Bloc Twinco prennent fin. *** The obligations of CF(L)Co relating to the Twinco Block expire. |
26 mai 2015 / May 26, 2015 |
Le Recall PSA est réamendé (D-40). *** Le Recall PSA is re-amended (D-40). |
1er octobre 2015 / October 1, 2015 |
NLH et NEMC concluent une entente (EM-1). *** NLH and NEMC enter into an agreement (EM-1). |
September 1, 2016 |
Le Contrat renouvelé entre en vigueur. *** The Renewed Power Contract (according to HQ) or Renewal Contract (according to CF(L)Co) comes into effect. |
August 31, 2041 |
Le Contrat renouvelé expire. *** The Renewed Power Contract (according to HQ) or Renewal Contract (according to CF(L)Co) expires. |
CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
COUR supérieure |
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No 500-17-078217-133
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HYDRO-QUÉBEC Demanderesse c. CHURCHILL FALLS (LABRADOR) CORPORATION LIMITED Défenderesse
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Liste
préparée par Hydro-Québec
des questions de fait et de droit en litige en l'instance
I. Questions communes aux deux enjeux
1. Le Contrat original[519] et le Contrat renouvelé constituent-ils un seul et même acte juridique et, le cas échéant, les règles d’interprétation des contrats doivent-elles être appliquées au Contrat envisagé comme un tout?
3. Aux termes du Contrat, Hydro-Québec jouit-elle du droit exclusif d’acheter toute la puissance disponible et toute l’énergie produite à la Centrale[520], à l’exception de la puissance et de l’énergie associées au Bloc Twinco et au Bloc de 300 MW, et ce pendant une période de 65 ans? Cette question pourrait amener le Tribunal à considérer la sous-question suivante :
4. Les positions défendues en l’instance par CF(L)Co en regard des deux enjeux sont-elles compatibles avec l’interprétation donnée par les parties au Contrat dans les ententes intervenues subséquemment au Contrat, y compris le GWAC (pièce P-2), le « Notice of Recapture and Waiver » (pièce D-1), le « Purchase and Sales Agreement » (pièce P-31C), le « Amended and Restated Purchase and Sales Agreement » (pièce P-32C) et le « Purchase and Sales Agreement » (pièce P-33C)?
5. Quoi qu’il en soit du sort des objections à la preuve soulevées par Hydro-Québec[521], la preuve d’experts offerte par CF(L)Co établit-elle les « usages » allégués par CF(L)Co dans sa Défense suivant les exigences du droit du Québec pour la preuve d’un usage?
I. Questions relatives au premier enjeu
6. La preuve établit-elle que la commune intention des parties[522], en ce qui concerne le renouvellement du Contrat original, était de prolonger automatiquement ce dernier pour une période de 25 ans (« a 25 year extension of the contract », pièce P-8)? Cette question pourrait amener le Tribunal à considérer les sous-questions suivantes :
II. Questions relatives au deuxième enjeu
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Montréal, le 8 février 2016 |
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NORTON ROSE FULBRIGHT CANADA |
Objections à la preuve soulevées par Hydro-Québec et prises
sous réserve pendant le procès
10.2 Objection à la recevabilité en preuve :
2.1 du rapport de M. Kendall;
2.2 du rapport de Mme Bodell intitulé « Continuous Energy: An Overview of Contemporaneous Industry Context »;
2.3 des portions soulignées en jaune dans la version du rapport de Mme Bodell intitulé « Interruptible Power: An Overview of Industry Context and CF(L)Co’s Ability to Sell » jointe au document intitulé « Notes à l’appui de l’objection d’Hydro-Québec à la qualification de T. Bodell comme témoin expert, et à l’admissibilité en preuve de son rapport intitulé « Continuous Energy: An Overview of Contemporaneous Industry Context » et à la demande de rejet de certaines sections de son rapport « Interruptible Power: An Overview of Industry Context and CF(L)Co’s Ability to Sell ».
2.4 des contrats invoqués par M. Kendall et Mme Bodell; et
2.5 de la pièce D-21, pour les motifs exposés dans la lettre d’Hydro-Québec en date du 14 août 2015 (pièce P-399).
CANADA |
SUPERIOR COURT |
PROVINCE OF QUEBEC |
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NO: 500-17-078217-133 |
Plaintiff |
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v.
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Defendant |
At the request of the Court, CF(L)Co has identified questions underlying the main issues in these proceedings, pursuant to the conclusions sought by CF(L)Co in its Defense. To that end, we have reproduced the conclusions sought by CF(L)Co in its Defense and listed additional sub-questions that relate to each of these conclusions, with CF(L)Co’s proposed answer. As requested, no arguments in support of these answers are provided herein and CF(L)Co refers the Court to its written and oral pleadings in that regard.
* * *
DECLARE that, as owner and operator of the Churchill Falls power plant and holder of the hydraulic rights, CF(L)Co is entitled to operate the Churchill Falls plant as it deems appropriate and is entitled to derive revenues where possible from selling all electricity products that have not been specifically sold to Hydro-Quebec or third parties under the terms of a contract, provided that CF(L)Co fulfills its contractual obligations to Hydro-Quebec and third parties.
1. Q. Does CF(L)Co own any and all supplementary capacity, power and/or energy that can be generated by the Churchill Falls Plant by reason of improvements it makes to the Plant or any related facilities or by reason of new installations (such as Lobstick) ?
A. Yes.
2. Q. Does this apply to all types of improvements or only to improvements outside the scope of normal maintenance of the Plant as defined in Hydro-Quebec’s amended conclusions ?
A. Yes, it applies to all types of improvements. CF(L)Co owns any supplementary capacity, power and/or energy that can be produced by the Plant no matter whether the improvement results from maintenance or other improvements to the facilities.
3. Q. Is Hydro-Quebec entitled to Spinning Reserves under the Renewal Contract despite the fact that section 4.2.6 of the Power Contract or its equivalent does not appear in the Renewal Contract?
A. No.
DECLARE that under the terms of the Renewal Contract, the right of Hydro-Quebec to request and receive energy each month during the term of that contract is limited to the amount of Continuous Energy as defined under the said Renewal Contract, subject to the Minimum and Firm Capacity limits.
4. Q. Is the quantity of energy that must be made available to Hydro-Quebec under the Renewal Contract limited to a quantity of energy defined as Continuous Energy, which excludes Excess Energy ?
A. Yes
5. Q. Is this quantity a fixed monthly block?
A. Yes. Continuous Energy under the Renewal Contract is a fixed monthly block of energy without any possibility of banking.
DECLARE that in addition to the 300 MW of Recapture and in addition to the Twinco block, CF(L)Co is entitled under the Power Contract and the Renewal Contract to use the Churchill Falls power plant’s available capacity to increase the rate of delivery of energy to third parties, provided that by so doing it continues to make available to Hydro-Quebec its requested power and energy scheduled in accordance with the terms and conditions of the contracts.
6. Q. Is Hydro-Quebec entitled under the Power Contract and the Renewal Contract to reserve capacity (spinning or non-spinning) without scheduling or requesting actual deliveries of power and energy under the terms of said contracts?
A. No
7. Q. Should the current market rules invoked by Hydro-Quebec be taken into consideration to determine the rights of CF(L)Co to sell interruptible power?
A. No.
8. Q. If the Court concludes that said rules should be taken into consideration, which is denied, are these market rules an impediment to CF(L)Co's rights to sell interruptible power?
A. No
9. Q. If the Court concludes that these market rules are an impediment to CF(L)Co's rights to sell interruptible power, which is denied, is CF(L)Co nevertheless entitled under the Power Contract and the Renewal Contract to sell interruptible power in Labrador or in markets where such market rule restrictions are not an impediment?
A. Yes
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MONTREAL, February 8, 2016
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Stikeman Elliott LLP Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited |
[1] Le Tribunal invite le lecteur à consulter dès maintenant le lexique reproduit à l’Annexe I quant aux termes utilisés pour désigner des unités de puissance ou d’énergie électrique.
[2] Il s’agit du nom et de l’épellation exacte de cette province, toutefois pour alléger le texte le Tribunal la désignera sous le vocable Terre-Neuve uniquement.
[3] Loi établissant la Commission hydroélectrique de Québec S.Q., 1944, chap. 22.
[4] Le Tribunal référera à la Commission hydroélectrique du Québec sous son nom actuel d’Hydro-Québec sauf si le contexte historique exige que le Tribunal l’identifie sous son vocable d’origine.
[5] Connue en langue anglaise sous le nom « Run of the River ».
[6] Pour décrire ce concept, les américains utilisent le terme « Open Access ».
[7] Pièce P-52 A.6, (2014) /118.
[8] Pièce P-81.
[9] En 1965, le nom du Fleuve Hamilton fut changé pour Churchill se voulant ainsi un hommage posthume à l’ancien Premier Ministre Britannique Winston Churchill. Ainsi, le nom initial de CF(L)Co qui était Hamilton Falls Power Corporation fut également modifié en conséquence. Sauf pour des cas bien précis et en raison de considérations historiques, le Tribunal référera au Fleuve Hamilton et à Hamilton Falls Power Corporation sous leur nouveau vocable.
[10] Pièce P-125 /2, avant-dernier paragraphe, colonne gauche.
[11] Pièce P-227.
[12] Pièce D-29, p. 6.
[13] Pièce P-82.
[14] Pièce P-219.
[15] Pièce P-305 /7.
[16] Id.
[17] Pièce P-350.
[18] Id.
[19] Notes sténographiques de Chad Wiseman, 23 novembre 2015, p. 96-97 et 112-113.
[20] Pièce D-221.
[21] ENERGI Corporation Act S.N.L., 2007, chap. E-11.01.
[22] Interrogatoire hors de Cour de Edmund Martin du 4 février 2015, Pièce P-381 /57.
[23] Id. /34.
[24] Pièce P-289.
[25] Pièce P-290, (2014) /382-385.
[26] Notes sténographiques de Edmund Martin, 18 novembre 2015, p. 71, lignes 3 à 23.
[27] Notes sténographiques de Robert Henderson, 5 novembre 2015, p. 132, lignes 20 à 25, p. 133, lignes 1 à 9.
[28] Statistique Canada, Recensement du Canada (1851 à 1971) et Estimations démographiques (1971 à 2015 : septembre 2015), adapté par l’Institut de la statistique du Québec.
[29] Association canadienne-française pour l’avancement des sciences, Politique et Économie, 1986, p. 51.
[30] Association canadienne-française pour l’avancement des sciences, Politique et Économie, 1986, p. 70.
[31] Pièce P-52 A.1, (1962) /13.
[32] Id.
[33] Le nom de Outardes 38 fut changé pour Outarde 3 et Outardes 45 pour Outarde 4, témoignage C. Dubé, 28 octobre 2015, p. 42, lignes 2, 3 et 4.
[34] Pièce P-52 A.1, (1962) /20.
[35] Pièce P-52 A.1, (1962) /21.
[36] Pièce P-52 A.2, (1963) /13.
[37] Id. /51.
[38] P-52 A.3, (1965) /10 /55.
[39] D-29, p. 15. On constatera que le chiffre a été arrondi à 8 179 MW.
[40] Id., p. 16.
[41] P-52 A.4, (1967) /7.
[42] Government of Newfoundland and Labrador, Historical Statistics of Newfoundland and Labrador, October 1970, Table A-11.
[43] Government of Newfoundland and Labrador, Historical Statistics of Newfoundland and Labrador, October 1970, Table F-1.
[44] Statistique Canada, Statistiques historiques du Canada, 2e éd., 1983, N38-48.
[45] Pièce D-4, art. 9.
[46] Pièce D-5, art. 1 et 9.
[47] Pièce D-6.
[48] Banque du Canada - feuille de calcul de l’inflation.
[49] Par. 160 de la défense de CF(L)Co admis par H.Q.
[50] Pièce D-8, le contrat de bail produit n’est pas signé mais a fait l’objet d’une admission de la part de H.Q.
[51] Id., p. 16. du bail.
[52] Pièce D-29.
[53] Pièce P-198, il est à noter que selon les parties cette pièce serait l’Annexe F de l’O.M., annexe qui n’était pas jointe à la pièce D-29.
[54] Notes sténographiques de Claude Dubé, 28 octobre 2015, p. 82, lignes 2 à 17.
[55] Notes sténographiques de Thierry Vandal, 19 octobre 2015, p. 120, lignes 15 à 25, p. 121, lignes 1 à 3.
[56] Pièce D-231.
[57] Pièce P-198/39, Engineering Report, p. 5.
[58] Pièce D-29, p. 28.
[59] Id., p. 26-27.
[60] Id., p. 48, voir note 1 relative au Bank Loan.
[61] Id., p. 49 et 50.
[62] Id., p. 55, cet engagement se retrouvera au contrat du 12 mai 1969.
[63] Id., p. 57, rubrique : Debt services requirement.
[64] Id., p. 58, rubrique : Restauration of plant.
[65] Id., p. 59, rubrique : Assumption of risk on foreign exchange.
[66] Id., p. 59, rubrique : Interest adjustment payments.
[67] Pièce P-1/51, clause 2.1.
[68] À l’occasion, le Tribunal pourra référer aux Blocs Twinco et Rappel collectivement sous le vocable « Les Blocs réservés ».
[69] Id.
[70] Pièce D-43.
[71] Id.
[72] Pièce P-84, par. 12. Par ailleurs à cette époque, les ingénieurs utilisaient la notion de chevaux-vapeur (Horse Power) pour décrire la puissance.
[73] Id., par. 21.
[74] Mill était une unité de mesure monétaire utilisée dans l’industrie électrique à cette époque.
[75] Pièce D-9.
[76] Pièce D-10.
[77] Pièce P-52A.1, (1962) /20.
[78] Pièce D-48, « Considérants ».
[79] Id., p. 2.
[80] Id., par. 6, p. 3.
[81] Pièce D-49, p. 3.
[82] Id., p.4.
[83] Pièce D-50.
[84] Id., par. 5 et 7. À noter que les lignes de 700 KV discutées à l’époque deviendront les lignes actuelles de 735 KV.
[85] Pièce D-52, p. 3.
[86] Pièce D-55, Projet du 8 août 1963; pièce D-56, Projet du 12 août 1963; Pièce D-59, Projet du 16 août 1963; pièce D-60, Projet du 21 août 1963; Pièce D-63, Projet du 29 août 1963; pièce D-64, Projet du 30 août 1963.
[87] Pièce D-64.
[88] À compter de maintenant le Tribunal l’identifiera sous le vocable le Bloc Rappel.
[89] Pièce P-061.
[90] Pièce D-64, art. 8.
[91] Pièce P-61, art. 4.
[92] Pièce P-91.
[93] Pièce D-61.
[94] Pièce D-65, point 3.
[95] Pièce P-062
[96] Pièce P-102.
[97] Pièce P-101.
[98] Pièce P-63.
[99] Pièce P-63/1.
[100] Pièce P-63/2, 4e paragraphe.
[101] Id., 6e paragraphe.
[102] Id., 8e paragraphe.
[103] Pièce P-63/4, 2e paragraphe.
[104] Id., 3e paragraphe.
[105] Pièce P-63/5, 3e paragraphe.
[106] Pièce P-63/6, 1er paragraphe.
[107] Pièce P-83.
[108] Pièce P-108.
[109] Id., Annexe A à la lettre d’intention /23.
[110] Pièce P-109, le mémo en question n’est pas daté.
[111] Pièce P-110.
[112] Pièce P-113.
[113] Pièce P-114.
[114] Pièce P-117.
[115] Pièce P-124 /1.
[116] Pièce D-74.
[117] Pièce P-64.
[118] Pièce P-117.
[119] Pièce P-64, art. 14.1
[120] Pièce D-75.
[121] Id. p. 6.
[122] Id., clause 4.4.
[123] Pièce D-78, p. 7.
[124] Pièce D-80.
[125] Pièce D-81.
[126] Pièce D-75.
[127] Pièce P-132.
[128] Pièce P-133.
[129] Pièce P-136 /2 de fait la démission de M. Winters est due à son accession au Conseil des ministres du gouvernement Pearson.
[130] Pièce P-137.
[131] Pièce P-138/9, clause 8.1.
[132] Pièce P-137.
[133] Pièce P-141, la pièce contient uniquement la lettre et non le projet mentionné à celle-ci.
[134] Pièce P-141/2.
[135] Pièce P-142.
[136] Pièce P-142/6, M signifie Manicouagan.
[137] Pièce P-143.
[138] Pièce P-145.
[139] Pièces D-90 et D-91.
[140] Pièce D-12.
[141] Pièce D-99.
[142] Pièce D-110.
[143] Pièce P-49/6.
[144] Pièce P-158.
[145] Pièce P-158/7, art. 1.7.
[146] Pièce P-50.
[147] Pièce P-160.
[148] C’est la première fois qu’il est question entre les parties de puissance ou capacité supplémentaire pendant la période hivernale.
[149] Pièce P-40/3.
[150] Pièce P-161.
[151] Id., à noter que les articles de ce mémo réfèrent aux numéros d’articles de la lettre d’intention.
[152] Id., article 7.
[153] Pièce P-1/8.
[154] Pièce P-160/2.
[155] Pièce P-198/134.
[156] Pièce P-55/3/4.
[157] Pièce P-5/8.
[158] Pièce P-1/19.
[159] Pièce P-5, art. 5 c).
[160] Pièce P-54/4.
[161] Pièce P-166.
[162] Id., /2(g).
[163] Pièce P-56/14.
[164] Pièce P-7.
[165] Pièce D-24, note du 23 avril 1968, p. 2.
[166] Pièce P-185.
[167] Pièce D-113.
[168] Id., page 3.
[169] Id., notes manuscrites. Cette expression n’est pas reprise dans le compte-rendu.
[170] Pièce P-8/5.
[171] Pièce D-29, p. 4.
[172] Pièce D-24, Appendix B.
[173] Pièce P-321/5.
[174] Pièce P-65.
[175] Pièce P-228/2.
[176] Pièce P-228/3.
[177] Pièce P-228/5.
[178] Pièce P-228/10.
[179] Pièce P-231.
[180] Pièce P-70/2.
[181] Pièce P-237/45.
[182] Pièce P-237/9/10.
[183] Pièce P-237/11/12 « the Lease » mentionné aux conclusions réfère aux droits conférés à CF(L)Co quant au développement du Fleuve Churchill par la législature de Terre-Neuve.
[184] Pièce D-18, pages 10 et 11.
[185] 1980 (T.-N.), c. 40.
[186] Pièce P-243.
[187] Pièce P-9, [1984] 1 S.C.R., p. 305.
[188] Requête introductive d’instance aux par. 47, 52, 54, 109, 161, 170 et 187.
[189] Pièce P-9, [1984] 1 S.C.R., p. 333.
[190] Id., p. 334.
[191] Pièce P-26.
[192] Pièce P-38.
[193] Pièces P-38/58 et P-26 A/1.
[194] Pièce P-236/22.
[195] Pièce P-26 A/10.
[196] Pièce P-38/88.
[197] Pièce P-336.
[198] Pièce : P-336/7, par. 6 et 7.
[199] Pièce : P-336/76, par. 273.
[200] Pièce : P-336/159/160 aux par. 551 à 558.
[201] Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited c. Hydro-Québec, 2016 QCCA 1229, par. 79, 91, 92 et 95.
[202] Id. par. 157.
[203] Id. par. 154.
[204] Notes sténographiques de Claude Dubé, 28 octobre 2015, p. 8 à 24.
[205] Pièce P-247/40.
[206] Notes sténographiques de Claude Dubé, 29 octobre 2015, p. 260.
[207] Pièce P-228/5.
[208] Pièce P-247/10.
[209] Id.
[210] Pièce P-249.
[211] En anglais « operating agreement ».
[212] Pièce P-248C.
[213] Notes sténographiques de Claude Dubé, 29 octobre 2015, p. 275, lignes 13 à 20.
[214] Pièce P-248C/30 à 33.
[215] Pièce P-249/16.
[216] Pièce P-250.
[217] Pièce P-250/11 et /13.
[218] Pièce D-141, p. 3 à 4.
[219] Notes sténographiques de Claude Dubé, 29 octobre 2015, p. 296, lignes 7 à 10.
[220] C’est le terme anglais « Bundle » qui fut utilisé par M. Dubé le 29 octobre, pages 298 et 299. D’après le dictionnaire Le Robert et Collins, le terme « Bundle » se traduit par « paquet, botte, liasse … ».
[221] Notes sténographiques de Claude Dubé, 30 octobre 2015, p. 91, lignes 4 à 25, p. 92, lignes 1 à 13.
[222] Notes sténographiques de Claude Dubé, 30 octobre 2015, p. 93, lignes 9 à 24.
[223] Notes sténographiques de Claude Dubé, 29 octobre 2015, p. 303.
[224] Pièce P-253/1, point 2 et notes sténographiques de Claude Dubé, 30 octobre 2015, p. 7, lignes 16 à 23.
[225] Pièce P-253.
[226] Pièce P-254.
[227] Pièce P-255.
[228] Pièce P-254/4.
[229] Pièce P-256/11.
[230] Notes sténographiques de Claude Dubé, 30 octobre 2015, p. 38.
[231] Pièce P-259.
[232] FERC désigne un organisme américain le Federal Energy Regulatory Commission.
[233] Pièce P-259.
[234] Pièce P-367.
[235] Pièce D-192, Order no. 890.
[236] Pièce P-345.
[237] Pièce P-259.
[238] Notes sténographiques de Thierry Vandal, 20 octobre 2015, p. 45, lignes 5 à 25 et p. 46, lignes 1 à 15.
[239] Également président directeur général de NLH.
[240] Pièce P-1/13, art. 4.2.2, contrat principal.
[241] Pièce P-3C/16., articles 3.6.1 et 3.6.2.
[242] Pièce P-29.
[243] Pièce D-1 : Sur la pièce comme telle apparaît le chiffre D-54 étant la cote donnée à ce document dans un autre dossier ayant impliqué les mêmes parties. Cela était tel qu’il appert de la liste de pièces de la défenderesse. Ce contrat est bel et bien la pièce D-1.
[244] Notes sténographiques de Thierry Vandal, 19 octobre 2015, p. 204, lignes 1 à 21 et P-292C.
[245] Pièce P-30, art. 2 - Terme, art. 3 - Quantité, art. 4 - Prix.
[246] Pièce P-31C/1 : à noter que l’intervenant au contrat est CF(L)Co.
[247] Pièce P-32C/3, art. 5.3.
[248] Pièce P-33C/2, art. 3.
[249] Pièce HQ-DEM-5, schéma récapitulatif des diverses ententes quant au Bloc 300 MW de 1976 à 2015.
[250] Pièce P-1/8, définition de « Firm Capacity ».
[251] Notes sténographiques de Thierry Vandal, 20 octobre 2015, p. 14 lignes 18 à 25 et p. 15, lignes 1 à 19.
[252] Notes sténographiques de Daniel Garant, 28 octobre 2015, p. 216, lignes 10 à 25, p. 217, lignes 1 à 25 et p. 218, lignes 1 à 11.
[253] Pièce P-2C.
[254] Notes sténographiques de Thierry Vandal, 20 octobre 2015, p. 16, lignes 21 à 25 et p. 17, lignes 1 à 10.
[255] Pièce P-36/60.
[256] Pièce P-2C/1, dernier « Considérant ».
[257] Pièce P-2C/2, art. 1.2.2.
[258] Pièce P-2C/12, art. 17.
[259] Notes sténographiques de Thierry Vandal, 20 octobre 2015, p. 25 et 26.
[260] Pièce P-2C/5.
[261] Pièce P-17.
[262] Notes sténographies de Thierry Vandal, 20 otobre 2015, p. 25, lignes 12 à 19.
[263] Id., p. 52, lignes 19 à 25 et p. 53, lignes 1 à 4.
[264]Id., p. 27, lignes 16 à 25, p. 28, lignes 1 à 25, p. 29, lignes 1 à 11.
[265] Notes sténographiques de Claude Dubé, 30 octobre 2015, p. 81, lignes 8 à 21
[266] Pièces HQ-DEM-16/1 et 2, HQ-DEM-18/1 et HQ-DEM-15/4.
[267] Pièce P-3C.
[268] Pièce P-3C/30, art. 12.
[269] Pièce P-248C/8, art. 2.2.2.
[270] Pièce P-3C/15, art. 3.4 et 3.4.2.
[271] Pièce P-35.04 (1972)/5 et 15.
[272] Pièce P-35.08 (1976)/9.
[273] Pièce P-1/48.
[274] Notes sténographiques de Hugo Sansoucy, 21 octobre 2015, p. 112, lignes 21 à 25.
[275] Pièce P-17.
[276] Pièce P-17/32, art. 6.6.
[277] H.Q. DEM-11, compilé à partir de P-362.
[278] Le témoin explique que par la suite les réservoirs n’ont plus jamais été pleins.
[279] Pièce P-355.
[280] Déversement 1992 : P-252, Déversement 1997 : P-267, Déversement 2005 : P-283.
[281] Notes sténographiques de Hugo Sansoucy, 21 octobre 2015, p. 153, lignes 2 à 25, p. 154, lignes 1 à 22.
[282] Notes sténographiques de Hugo Sansoucy, 21 octobre 2015, p. 157, lignes 13 à 23.
[283] Notes sténographiques de Chad Wiseman, 24 novembre 2015, p. 18, lignes 1 à 16, p. 21, lignes 9 à 25, p., 22, 23, 24 et 25, p. 26, lignes 1 à 9.
[284] Pièce P-332/39.
[285] Par. 418 à 425 du présent jugement.
[286] Notes sténographiques de Sylvain Clermont, 29 octobre 2015, p. 54, lignes 1 à 14.
[287] Pièce P-303/19.
[288] Pièce P-351.
[289] Pièce P-365/5.
[290] Pièce P-366/32/36.
[291] Pièce P-366/232/249/250.
[292] Notes sténographiques de Pierre Paquet, 4 novembre 2015, p. 73, 74 et 75.
[293] Id., p. 57.
[294] Id., p. 123, lignes 20 à 25 et p. 124, 125 et 126.
[295] Pièce P-329/185, par. 248.
[296] Pièce D-219, par. 57 à 63.
[297] Pièce P-338.
[298] Notes sténographiques de Pierre Paquet, 4 novembre 2015, p. 91, lignes 22 à 25 et p. 92.
[299] Id., p. 95, lignes 10 à 25 et p. 96, lignes 1 à 4.
[300] Id., p. 97, lignes 8 à 25 et p. 98, lignes 1 à 17.
[301] Id., p. 103, lignes 21 à 25 et p. 104, lignes 1 à 8.
[302] Pièce P-325/19.
[303] Notes sténographiques de Hugo Sansoucy, 22 octobre 2015, p. 275, lignes 9 à 18.
[304] Pièce P-338/14.
[305] Pièce P-294.
[306] Pièce P-294/6/13/20/27.
[307] Notes sténographiques de Robert Henderson, 5 novembre 2015, p. 129, lignes 11 à 16.
[308] Le Tribunal invite le lecteur à se référer à la présentation de Nalcor au chapitre des protagonistes.
[309] Cette information apparaît sur OASIS sous le vocable QCRD pour Québec-Ressources désignées.
[310] Pièce P-338/32/33.
[311] Pièce P-338/9/10.
[312] Notes sténographiques de Robert Henderson, 5 novembre 2015, p. 128, lignes 11 à 17.
[313] Id., p. 138, lignes 19 à 25 et p. 139, lignes 1 à 20.
[314] Pièce P-29/8. art. 5.01.
[315] Notes sénographiques de Robert Henderson, 5 novembre 2015, p. 155, lignes 10 à 15.
[316] Acronyme pour Pensylvania, New Jersey, Maryland.
[317] Pièce P-319, diverses étiquettes couvrant la période du mois d’août 2012 à avril 2014.
[318] En ce qui a trait au Nouveau-Brunswick, il s’agit d’un marché bilatéral contrairement aux autres marchés dits « organisés ».
[319] Pièce P-76/22.
[320] Pièce P-76/91.
[321] Pièce P-76/185.
[322] Pièce P-76/235.
[323] Pièce P-374/405.
[324] Pièce P-376/112.
[325] Pièce P-313/1.
[326] Pièce P-293 : bilan sous forme électronique des livraisons effectuées par NLH du 1er avril 2009 au 30 avril 2012.
[327] Pièce P-19 : rapport électronique des livraisons effectuées par NLH sur certains réseaux voisins. La portion papier de cette pièce couvre les diverses livraisons effectuées par NLH le 1er septembre 2012.
[328] Pièce P-75.
[329] Pièce P-80/21, rapport Pfeifenberger, figure 5.
[330] Pièce P-326/3/11/13.
[331] Notes sténographiques de Sylvain Clermont, 29 octobre 2015, p. 142, lignes 12 à 25.
[332] Pièce P-345/21/23 et P-345/118, (Annexe IV).
[333] Notes sténographiques de Sylvain Clermont, 29 octobre 2015, p. 145, lignes 13 à 25 et p. 146, lignes 1 à 22.
[334] Id., p. 205, lignes 11 à 25 et p. 206, lignes 1 à 12.
[335] Notes sténographiques de Pierre Paquet, 4 novembre 2015, p. 112, lignes 14 à 21.
[336] Pièce P-409/15.
[337] Pièce D-145.
[338] Pièce P-12.
[339] Pièce P-12/10.
[340] Pièce D-149.
[341] Notes sténographiques de Hugo Sansoucy, 21 octobre 2015, p. 179, lignes 7 à 14.
[342] Id., p. 196, lignes 10 à 25 et p. 197, lignes 1 à 4.
[343] Voir entre autres l’Annexe III où chacun des protagonistes a soumis au Tribunal sa compréhension des questions en litige.
[344] Pièce P-11.
[345] Pièce P-11/42.
[346] Interrogatoire hors de cour de Edmund Martin, 5 février 2015, (la première page des notes sténographiques porte la date du 4 février 2015) p. 381/408, lignes 20 à 25.
[347] Id., p. 381/408, lignes 14 à 19.
[348] Pièce D-221.
[349] Interrogatoire hors de cour de Edmund Martin, 5 février 2015, p. 381/420 à 430.
[350] Interrogatoire hors de cour de Edmund Martin, 5 février 2015, p. 381/428, lignes 1 à 12.
[351] Ce document était coté EM-16 dans le cadre de l’interrogatoire.
[352] Interrogatoire hors de cour de Edmund Martin, 5 février 2015, p. 381/433, lignes 8 à 22; P-381/434, lignes 16 à 25; P-381/435, lignes 1 à 25; P-381/436, lignes 1 à 4.
[353] Interrogatoire hors de cour de Edmund Martin, 5 février 2015, p. 381/465, lignes 22 à 25 et p. 381/466, lignes 1 à 15.
[354] Pièce D-40, p. 3, article H.
[355] Pièce D-153.
[356] Pièce D-155.
[357] Pièce P-79.
[358] Pièce D-154.
[359] Pièce P-80.
[360] Uniquement quant à l’expertise sur le Continuous Energy, le Tribunal n’ayant en aucune hésitation à la qualifier d’experte quant à son rapport traitant des ventes interruptibles.
[361] Cie d’assurances St-Paul/St-Paul Fire & Marine Insurance Co. c. SNC Lavalin inc., 2009 QCCS 56, par.75.
[362] Marois c. Provencher, 2009 QCCS, par. 144.
[363] Tel que décrit à la déclaration commune de dossier complet réamendée datée du 18 septembre 2015, p. 60 et 61.
[364] Déclaration commune de dossier complet réamendée, p. 60.
[365] Notes sténographiques de Robert Kendell, 30 novembre 2015, p. 87, ligne 25 et p. 88, lignes 1 à 23.
[366] Pièce D-153, p. 3.
[367] Notes sténographiques de Robert Kendall, 30 novembre 2015, p. 230, lignes 22 à 25 et p. 231, lignes 1 à 22.
[368] Pièce D-239.
[369] Notes sténographiques de Robert Kendall, 30 novembre 2015, p. 233, lignes 22 à 25, p. 234, lignes 1 à 25 et p. 235, lignes 1 à 7.
[370] Pièce D-153, rapport Kendall, p. 3, par. 13.
[371] Notes sténographiques de Robert Kendall, 1er décembre 2015, p. 139, lignes 18 à 25 et p. 140, lignes 1 à 21.
[372] Id., p. 116, lignes 12 à 20.
[373] Pièce D-153, rapport Kendall, p. 29, paragraphe 118.
[374] Déclaration commune de dossier complet, p. 61.
[375] Pièce D-155, rapport Bodell, p. 2, par. 5.
[376] Pièce D-155, rapport Bodell, p. 17 et 18.
[377] Pièce D-155, rapport Bodell, p. 6 et 8.
[378] Id., par. 27.
[379] Pièce P-392, p. 440.
[380] Pièce D-155, rapport Bodell, p. 12, par. 36.
[381] Id., p. 13, section 3.3.1 Hoover Dam, p. 13 à 15, section 3.3.2 Power authority of the State of New York.
[382] Id., p. 15, section 3.3.3 Parker-Davis Project.
[383] Notes sténographiques de Tanya Bodell, 3 décembre 2015, p. 136, lignes 7 à 21.
[384] Id., p. 139, lignes 9 à 13.
[385] Pièce P-83.
[386] Notes sténographiques de Tanya Bodell, 3 décembre 2015, p. 161.
[387] Pièce D-155, rapport Bodell, p. 19.
[388] Id., p. 19, par. 60.
[389] Pièce P-79/5, rapport Lapuerta, par. 6.
[390] Notes sténographiques de Carlos Lapuerta, 9 novembre 2015, p. 17 et 18.
[391] Notes sténographiques de Carlos Lapuerta, 9 novembre 2015, p. 94, lignes 12 à 25 et p. 95, lignes 1 à 17.
[392] Id., p. 155, lignes 5 à 11.
[393] Le Tribunal réfère le lecteur à la pièce H.Q. DEM-12 laquelle démontre très bien le phénomène de la hauteur de chute.
[394] Pièce P-79/28, rapport Lapuerta, figure 5.
[395] Id., p. 25, par. 69.
[396] En fait, il y aurait une légère variation dépendant du nombre de jours dans un mois donné. La pièce H.Q. DEM-18/3 constitue un exemple de cette flexibilité intramensuelle alors que les livraisons d’énergie maximum se feraient en semaine de jour alors que la nuit et les fins de semaine, seulement la capacité minimum serait disponible pour H.Q.
[397] Notes sténographiques de Carlos Lapuerta, 9 novembre 2015, p. 58, lignes 19 à 25 et p. 59, lignes 1 à 8.
[398] Pièce P-1, art. 4.2.1, contrat principal et art. 4.1.1, contrat renouvelé.
[399] Notes sténographiques de Carlos Lapuerta, 9 novembre 2015, p. 203, lignes 16 à 25 et p. 204, lignes 1 à 13.
[400] Id., p. 62, lignes 23 à 25 et p. 63, lignes 1 à 12.
[401] Id., p. 153, lignes 4 à 19.
[402] Id., p. 152, lignes 2 à 25 et p. 153, lignes 1 à 3.
[403] Pièce P-198.
[404] Notes sténographes de Carlos Lapuerta, 9 novembre 2015, p. 112, lignes 17 à 25, p. 113 à 119, p. 120, lignes 1 à 7.
[405] Notes sténographiques de Carlos Lapuerta, préc., p. 102, lignes 20 à 25 et p. 103, lignes 1 à 15.
[406] Id., p. 198, lignes 5 à 19.
[407] Pièce P-79/55/56, rapport Lapuerta, par. 159 à 163.
[408] Pièce P-80/4, rapport Pfeifenberger, par. 4.
[409] Pièce P-80/16, rapport Pfeifenberger, par. 32.
[410] Pièce P-80/17, rapport Pfeifenberger, par. 35 et 36.
[411] Pièce P-80/18, rapport Pfeifenberger, par. 37 et P-41/106, Mémoire de CF(L)Co.
[412] Notes sténographiques de Robert Henderson, 5 novembre 2015, p. 123, lignes 6 à 25 et p. 124, lignes 11 à 18.
[413] Pièce P-80/19, rapport Pfeifenberger, par. 41.
[414] Pièce D-39.
[415] Notes sténographiques de Johannes Pfeifenberger, 13 novembre 2015, p. 44, lignes 21 à 25 et p. 45, lignes 1 à 16.
[416] Id., p. 146, lignes 6 à 19.
[417] La figure 5 de son rapport contenait initialement 13 exemples (Pièce P-80/21). À l’audition, Monsieur Pfeifenberger a produit une figure 5 révisée celle-là comptant 37 exemples (Pièce P-80A).
[418] Notes sténographiques de Johannes Pfeifenberger, 13 novembre 2015, p. 62, lignes 12 à 2e, p. 65, lignes 14 à 25, p. 81, lignes 22 à 25 et p. 82, lignes 1 à 19.
[419] Notes sténographiques de Johannes Pfeifenberger, 13 novembre 2015, p. 94, lignes 1 à 14.
[420] Id., page 153, lignes 8 à 14.
[421] Pièce P-80/28/29/30, rapport Pfeifenberger, par. 68 à 74.
[422] Pièce P-80/32, rapport Pfeifenberger, par. 80.
[423] Pièce D-154, rapport Bodell, p. 2, par. 5 a) et b).
[424] Pièce P-83/34.
[425] Pièce D-50, par. 1.
[426] Pièce D-154, p. 8, par. 22 à 24.
[427] Pièce D-154, p.10 à 13.
[428] Pièce D-154, p. 6 à 7, par. 18 et figure I.
[429] Pièce D-154, p. 22, par. 64 et p. 23, par. 68.
[430] Le tableau figure 3 de Madame Bodell fut critiqué par Monsieur Pfeifenberger ce qui a amené Madame Bodell à produire un nouveau tableau et pièces afférentes sous la cote D-220. Les variations critiquées somme toutes mineures, n’affectent pas l’image globale que doit se faire le Tribunal.
[431] Pièce D-154, rapport Bodell, p. 35, par. 112.
[432] Par. 508 à 510 du présent jugement.
[433] Billards Dooly’s inc. c. Entreprises Prébour ltée, 2014 QCCA 842, par. 58 à 64.
[434] Jean-Louis BAUDOUIN et Pierre-Gabriel JOBIN, Les Obligations, 7e éd., par. P.-G. JOBIN et Nathalie VÉZINA, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2013, p. 586-587, par. 490.
[435] Par. 87 du présent jugement.
[436] Par. 151 et 269 du présent jugement.
[437] Par. 314 à 317 du présent jugement.
[438] Par. 388 du présent jugement.
[439] Par. 429 et 431 du présent jugement.
[440] Par. 287 (Peaking availability) du présent jugement.
[441] Jean-Louis BAUDOUIN et Pierre-Gabriel JOBIN, Les Obligations, 7e éd., par. P.-G. JOBIN et Nathalie VÉZINA, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2013, p. 491-492, par. 413.
[442] [2012] 46, R.J.T. 9.
[443] Par. 39 du présent jugement.
[444] Voir Didier LLUELLES et Benoit MOORE, Droit des obligations, 2e éd., Montréal, Éditions Thémis, 2012, p. 885-886, par. 1602; Vidéotron ltée c. Rogers Wireless Partnership, 2009 QCCS 996, par. 40; Jean-Louis BAUDOUIN et Pierre-Gabriel JOBIN, Les Obligations, 7e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, par. 418.
[445] Jean-Louis BAUDOUIN et Pierre-Gabriel JOBIN, Les Obligations, 7e éd., par. P.-G. JOBIN et Nathalie VÉZINA, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2013, p. 495-496.
[446] Par. 71 et 72 du présent jugement.
[447] Par. 327 du présent jugement.
[448] Pièce P-227.
[449] Par. 88 du présent jugement.
[450] Par. 135 et 314 du présent jugement.
[451] Par. 152 du présent jugement.
[452] Par. 174 à 189 et 193 à 195 du présent jugement.
[453] Par. 172 du présent jugement.
[454] Par. 191 du présent jugement.
[455] Pièce P-83.
[456] Par. 687 du présent jugement.
[457] Par. 694 du présent jugement.
[458] Par. 203 du présent jugement.
[459] Par. 207 à 210 du présent jugement.
[460] Par. 236 et 242 du présent jugement.
[461] Pièces P-4/11 et P-4/13, clause 18.
[462] Par. 257 à 260 du présent jugement.
[463] Par. 269 du présent jugement.
[464] Par. 292 à 294 du présent jugement.
[465] Par. 300 du présent jugement.
[466] Par. 306 du présent jugement.
[467] Par. 306 à 308 du présent jugement.
[468] Par. 321 du présent jugement.
[469] Par. 737 du présent jugement.
[470] Par. 623 du présent jugement.
[471] Par. 624 du présent jugement.
[472] Par. 507 à 509 du présent jugement.
[473] Par. 236 et 242 du présent jugement.
[474] Par. 321 et 323 du présent jugement.
[475] Oxford Dictionnary of English, third Edition, 2010.
[476] Interrogatoire de Hugo Sansoucy, 21 octobre 2015, pages 30 à 36.
[477] François, GENDRON, L’Interprétation des contrats, 2e édition, Montréal, Wilson & Lafleur Ltée, 2016, p.114.
[478] Par. 597, 598 et 620, 621 du présent jugement.
[479] 2005 QCCA 1172, par. 97.
[480] 1987 R.J.Q. 1703 (C.A.).
[481] Par. 407 du présent jugement.
[482] Pièce P-30.
[483] Par. 394 du présent jugement.
[484] Par. 388 du présent jugement.
[485] Par. 287 du présent jugement.
[486] Par. 463 du présent jugement.
[487] Par. 602 du présent jugement.
[488] Jean-Louis BAUDOUIN et Pierre-Gabriel JOBIN, Les Obligations, 7e éd., par. P.-G. JOBIN et Nathalie VÉZINA, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2013, p. 503, par. 419.
[489] Le Nouveau Petit Robert de la langue française, Nouvelle édition millésime 2008, Éditions Le Robert, p. 2662 et 2663.
[490] Hubert REID, Dictionnaire de droit québécois et canadien, 4e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2016, p. 610.
[491] Pièce D-153 rapport Kendall, p. 16, par. 73.
[492] Par. 504 du présent jugement.
[493] Par. 473 du présent jugement et P-3C/15, art. 3.4 et 3.4.2.
[494] Par. 620 et 621 du présent jugement.
[495] Par. 590 à 593 du présent jugement.
[496] Léo, DUCHARME, Précis de la preuve, 6e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2005, p. 222.
[497] Air Canada c. Québec, 2015 QCCA 1789, par. 70.
[498] Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited c. Hydro-Québec, 2016 QCCA 1229, par. 92.
[499] Pièce P-29/8, art. 5.01.
[500] Notes sténographiques de Claude Dubé, 29 octobre 2015, p. 257, lignes 22 à 25, p. 258, lignes 1 et 2.
[501] Par. 403 du présent jugement.
[502] Par. 398 du présent jugement.
[503] Pièce P-80A/7 Revised figure 5, rapport Pfeinfenberger et P-75/170.
[504] Pièce P-80A/7 Revised figure 5, rapport Pfeinfenberger et P75/214/215.
[505] Pièce P-80A/7 Revised figure 5, rapport Pfeinfenberger et par. ? à ? du présent jugement.
[506] Par. 767 du présent jugement.
[507] Par. 767 à 769 du présent jugement.
[508] Outline of argument of CF(L)Co, p. 80, par. 389 et p. 81, par. 396.
[509] Afin de faciliter la lecture et d’économiser l’espace, la présente chronologie utilise, dans la mesure du possible, des abréviations et des termes définis dans le Glossaire (« Lexique ») dont les parties ont convenu et qu’elles ont déposé conjointement.
[510] For ease of reference and economy of space, where possible this Time Line uses abbreviations and defined terms as they appear in the Glossary of Terms (“Lexique”) agreed upon and filed jointly by the parties.
[511] Afin de faciliter la lecture, HFPCo et CF(L)Co seront ci-après appelées uniquement CF(L)Co.
[512] For ease of reference hereinafter, HFPCo and CF(L)Co will be referred to solely as CF(L)Co.
[513] La Loi-Bail et le Bail de 1961 ont été amendés par des lois subséquentes datées du 29 mars 1963, du 10 juin 1964, du 25 avril 1967, du 28 mai 1968, du 9 mai 1969 et du 18 juin 1970. À une exception près, le Bail a été modifié au moyen de conventions supplémentaires dont le modèle était joint à chacune de ces lois modificatrices. L’exception se rapporte à la loi datée du 29 mars 1963, qui amendait le Bail sans convention prévue par la loi. Fait particulièrement important, le 10 juin 1964, Terre-Neuve a adopté la loi intitulée The Government - British Newfoundland Corporation Limited - N.M. Rothschild & Sons (Supplemental Agreement) Act, 1964 dans l’objectif de transférer, de Brinco à CF(L)Co, l’obligation contenue dans le Principal Agreement, la Loi-Bail et le Bail de 1961 visant le paiement à Terre-Neuve d’un loyer annuel équivalant à 8 % des profits nets de Brinco et de ses affiliées (pièce P-126). Le même jour, Terre-Neuve a adopté la loi intitulée The Hamilton Falls Power Corporation Limited (Lease) (Amendment) Act, 1964 aux termes de laquelle la Loi-Bail et le Bail de 1961 ont été amendés afin d’exclure la fourniture d’hydroélectricité produite à Churchill Falls à HQ de l’application de la loi intitulée The Public Utilities Act. Une version consolidée de la loi intitulée The Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited (Lease) Act, 1961 figure à la pièce P-221.
[514] The Lease Act and the 1961 Lease were amended by subsequent Acts dated March 29, 1963, June 10, 1964, April 25, 1967, May 28, 1968, May 9, 1969, and June 18, 1970. With one exception, the Lease was amended by supplemental agreements the forms of which were attached to each of these amending Acts. The exception was the Act dated March 29, 1963, which amended the Lease without any statutory agreement. Of particular significance, on June 10, 1964, Newfoundland adopted The Government - British Newfoundland Corporation Limited - N.M. Rothschild & Sons (Supplemental Agreement) Act, 1964 with a view to transferring from Brinco to CF(L)Co the obligation contained in the Principal Agreement, the Lease Act and the 1961 Lease to pay to Newfoundland an annual rent equivalent to 8% of the net profits of Brinco and its affiliates (Exhibit P-126). On the same day, Newfoundland adopted The Hamilton Falls Power Corporation Limited (Lease) (Amendment) Act, 1964 pursuant to which the Lease Act and the 1961 Lease were amended to exclude the supply of hydroelectric power developed at Churchill Falls to HQ from application of The Public Utilities Act. A consolidated version of The Churchill Falls (Labrador) Corporation Limited (Lease) Act, 1961 is found at Exhibit P-221.
[515] Ce premier PSA entre NLH et HQ a expiré le 8 mars 2001. Il a été successivement remplacé par un Amended and Restated Purchase and Sale Agreement daté du 19 février 2001 (pièce P-32C) et par un Purchase and Sale Agreement ultérieur daté du 31 mars 2004 (pièce P-33C) qui a expiré le 31 mars 2009. NLH n’a ni renouvelé ni remplacé ce dernier PSA lorsque ce dernier a expiré le 31 mars 2009 (pièce P-72).
[516] This first PSA between NLH and HQ expired on March 8, 2001. It was subsequently replaced by an Amended and Restated Purchase and Sale Agreement dated February 19, 2001 (Exhibit P-32C) and a subsequent Purchase and Sale Agreement dated March 31, 2004 (Exhibit P-33C) which expired on March 31, 2009. NLH did not renew nor replace this last PSA when it came to term on March 31, 2009 (Exhibit P-72).
[517] Le GWAC a été ensuite modifié le 29 mars 2000 pour corriger une omission involontaire dans le texte original. La modification est également incluse dans la pièce P-2C/17.
[518] The GWAC was subsequently amended on March 29, 2000 to correct an inadvertent omission in the original text. The amendment is also included in Exhibit P-2C/17.
[519] Les expressions définies qui sont utilisées dans le présent document ont le sens qui leur est donné dans la Requête introductive d’instance d’Hydro-Québec.
[520] « Centrale » s’entend de la manière définie à la définition du mot « Plant » à l’article 1.1 du Contrat original et du Contrat renouvelé, telle que la Centrale est entretenue conformément aux articles 4.2.4 du Contrat original et 4.1.4 du Contrat renouvelé, et à l’article 4 de la Convention entre actionnaires
[521] Une énumération de ces objections apparaît en annexe à la présente liste.
[522] Cette expression réfère à la commune intention des parties au moment de la conclusion du Contrat, telle que reflétée par ses termes et, le cas échéant, telle que déterminée en tenant compte de la nature du Contrat, des circonstances dans lesquelles il a été conclu, de l’interprétation que les parties lui ont déjà donnée ou qu’il a reçue (y compris dans les jugements antérieurs s’étant prononcés sur le Contrat), ainsi que des usages légalement prouvés
AVIS :
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