Décision

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Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Strauber) c. Garderie éducative Le Futur de l'enfant inc.

2008 QCTDP 25

JA 0692

 
 TRIBUNAL DES DROITS DE LA PERSONNE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

Montréal

 

 

 

N° :

500-53-000255-073

 

 

 

DATE :

2 octobre  2008

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

 Pierre E. Audet

 

AVEC L'ASSISTANCE DES ASSESSEURS : Me Taya di Pietro

                                                                           Me Yeong-Gin Jean Yoon

                                                                             

 

 

COMMISSION DES DROITS DE LA PERSONNE ET DES DROITS DE LA JEUNESSE, organisme public constitué en vertu de la Charte des droits et libertés de la personne (L.R.Q., c. C-12), ayant son siège au 360, rue Saint-Jacques Ouest, Montréal (Québec) H2Y 1P5, agissant en faveur de madame DANIELA STRAUBER

Partie demanderesse

c.

GARDERIE ÉDUCATIVE  LE FUTUR DE L’ENFANT INC. et  EVANGELIA KALOGRIAS

Parties défenderesses

-et-

DANIELA STRAUBER, résidant et domiciliée au […], Victoria, Colombie-Britannique

Partie victime et plaignante devant la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse

 

 

 

JUGEMENT

 

 

[1]         Le Tribunal des droits de la personne (ci-après le Tribunal) est saisi de la demande introductive d’instance amendée par laquelle la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (ci-après, la Commission), agissant au nom de la plaignante, madame Daniela Strauber (ci-après selon le contexte, la plaignante ou madame Strauber), allègue que la Garderie éducative le Futur de l’enfant inc. et madame Evangelia Kalogrias (ci-après, les défenderesses) ont porté atteinte au droit de la plaignante d’être traitée en toute égalité, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la religion en lui refusant, dans le cadre de son emploi, de respecter leur obligation d’accommodement raisonnable, soit de prendre les moyens pour octroyer à la plaignante deux jours de congé non rémunérés lors du Nouvel An juif d’une part et d’autre part, en la congédiant en raison de son absence lors de ce congé, le tout en contravention des articles 3, 10 et 16 de la Charte des droits et libertés de la personne[1] (ci-après,  la Charte).

[2]         La Commission allègue également que les défenderesses ont, par la même occasion, compromis le droit de la plaignante à la sauvegarde de sa dignité, sans exclusion ou distinction fondée sur sa religion, contrairement aux articles 4 et 10 de la Charte.

[3]         Par sa demande introductive d’instance amendée et par son mémoire ré-amendé, la Commission demande au Tribunal:

DE CONDAMNER solidairement les défenderesses à verser à la plaignante la somme de huit mille cinquante-neuf dollars et vingt sous (8 059,20 $), répartie comme suit:

a)    la somme de deux mille cinquante-neuf dollars et vingt sous (2 059,20 $), à titre de dommages matériels pour la perte de salaire encourue;

b)    la somme de six mille dollars (6 000,00 $) à titre de dommages moraux.

LE TOUT avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. depuis la signification de la proposition de mesures de redressement, soit le 4 octobre 2006, ainsi que les entiers dépens.

[4]         De façon préliminaire, les défenderesses présentent une requête en rejet d’action en vertu des articles 20 et 46 du Code de procédure civile[2] ( ci-après, le C.p.c.) et de l’article 113 de la Charte au motif que le délai de 29 mois entre le dépôt de la plainte, le 21 octobre 2004, et la demande introductive d’instance, le 27 mars 2006, dans un dossier sans aucune complexité est déraisonnable et constitue un abus de procédure justifiant le rejet de cette dernière présentée par la Commission au nom de la plaignante, madame Strauber.

[5]         Sur le mérite de la demande principale, les défenderesses allèguent qu’elles ont fait tous les efforts raisonnables pour accommoder madame Strauber afin qu’elle puisse pratiquer sa religion d'une part et, d'autre part, elles n’ont jamais mis fin à l’emploi de cette dernière. En fait, plaident-elles, c’est plutôt la plaignante qui a décidé, de son propre gré, de quitter son emploi en donnant un préavis de deux semaines.

1.    LE MOYEN PRÉLIMINAIRE RELATIF À LA REQUÊTE EN REJET D’ACTION

[6]         Il y lieu dans un premier temps de statuer sur le moyen préliminaire en rejet de la demande présentée par les défenderesses.

[7]         Les défenderesses soutiennent en substance que le délai de 29 mois écoulé entre le dépôt de la plainte auprès de la Commission, le 21 octobre 2004, et  celui du dépôt au greffe du Tribunal de la demande introductive d’instance, le 27 mars 2006, et ce, dans «un dossier sans aucune complexité», est déraisonnable et constitue d'emblée un abus de procédure lequel, dans sa foulée, doit entraîner le rejet de cette dernière. Le délai écoulé en lui-même est la seule cause du préjudice qu'elles auraient subi en l'espèce.   

[8]         Elles soutiennent que tant la nature du litige que son objet ne peuvent justifier les délais excessifs pour traiter la plainte de madame Strauber avant l'introduction de la présente demande devant le Tribunal. Qui plus est, en aucun temps, elles n’ont contribué à la prolongation de ces délais.

[9]         Pour appuyer leur moyen préliminaire en rejet, les défenderesses invoquent les décisions rendues par le Tribunal dans les affaires suivantes:  Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Centre de la petite enfance Les Pandamis (Gardeurois),[3]; MCCCUC Housing Corporation Residents Association c. Vokey[4] et Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Ville de Montréal (Service de police)[5].

[10]        De son côté, tout en se référant à la même jurisprudence, la Commission plaide que la requête ne saurait être recevable en droit. En l’espèce, elle plaide en particulier qu’elle n'est pas restée inactive, bien au contraire. 

[11]        Au cours des 23 mois de l’enquête, soit entre le dépôt de la plainte, le 21 octobre 2004 et l’envoi de la proposition de mesures de redressement en date du 3 octobre 2006, huit ou neuf communications ont été effectuées entre les parties et plusieurs actions ont été prises, notamment, l’envoi de lettres, des rencontres des témoins pour la cueillette des informations pertinentes et la transmission de l’exposé factuel au Tribunal et aux défenderesses.

[12]        De même, au cours des six mois suivant l’envoi de la proposition de mesures de redressement du 3 octobre 2006, les parties ont communiqué à plusieurs reprises dans le but de tenter de régler hors cour le litige qui les oppose. 

[13]        Pour la Commission, il est manifeste que le seul écoulement de temps ne saurait justifier le rejet de la demande introductive d’instance présentée en l'instance, tel que l'a d’ailleurs statué le Tribunal dans l'affaire Pandamis [6].De même, l’écoulement du temps à lui seul et les inconvénients habituels à une demande en justice qu’une partie en défense peut subir, en temps et en argent, sont des conséquences inéluctables pour permettre à la victime et en son nom la Commission, de présenter au Tribunal une preuve «pleine et entière».

[14]        Au surplus, ajoute la Commission, les défenderesses n’ont subi aucun préjudice résultant ou découlant du délai couru dans le traitement de la plainte.

[15]        Pour les motifs ci-après mentionnés, le Tribunal rejette le moyen préliminaire des défenderesses.

[16]        D'emblée, il convient une fois de plus de rappeler que le rejet d’une demande introductive d’instance en raison d'un délai déraisonnable «constitue une situation exceptionnelle et que le seul écoulement du temps ne pourrait constituer, en soi, un motif pour accueillir un telle demande en irrecevabilité.[7]

[17]        Comme l’a établi la Cour suprême dans l’affaire Blencoe[8], plusieurs facteurs doivent être pris en considération lorsqu’il s’agit de déterminer si un délai est devenu excessif et s’il est susceptible de violer les règles de justice naturelles:

La question de savoir si un délai est devenu excessif dépend de la nature de l’affaire et de sa complexité, des faits et des questions en litige, de l’objet et de la nature des procédures, de la question de savoir si la personne visée par les procédures a contribué ou renoncé au délai, et d’autres circonstances de l’affaire. Comme nous l’avons vu, la question de savoir si un délai est excessif et s’il est susceptible de heurter le sens de l’équité de la collectivité dépend non pas uniquement de la longueur de ce délai, mais de facteurs contextuels, dont la nature des différents droits en jeu dans les procédures.[9]

[18]        De plus, le délai doit être manifestement inacceptable et avoir causé un préjudice important pour constituer un abus de procédure[10]

[19]        Dans l’affaire Pandamis[11], le Tribunal, en accueillant la demande de rejet de l’introductive, a précisé notamment qu’il fallait faire non seulement la preuve que le délai était inacceptable mais que la partie en défense recherchée en responsabilité subissait un préjudice.

[20]        À la lumière de ces préceptes et compte tenu de la situation factuelle prise dans son ensemble, le Tribunal ne peut conclure que le délai écoulé dans le présent dossier, soit 29 mois, puisse heurter le sens de la justice et déconsidérer le système de protection des droits de la personne ou avoir un impact préjudiciable sur l’équité de l’instance.

[21]        En effet, le Tribunal constate par la chronologie des communications entre les parties et les interventions menées pendant l’enquête soit, entre le moment du dépôt de la plainte auprès de la Commission en date du 21 octobre 2004 et la proposition de mesures de redressement, le 28 septembre 2006[12], le dossier de la plaignante n’est pas demeuré inactif à la Commission.

[22]        Au cours des cinq premiers mois suivant le dépôt de la plainte le 21 octobre 2004, plusieurs communications ont eu lieu entre les parties. Des lettres, des actes de procédure, notamment la transmission de la version des faits des défenderesses, la réponse de la plaignante et l’envoi de la réponse des défenderesses du 15 mars 2005, en sont des illustrations.

[23]        Entre l’envoi par les défenderesses de leur version des faits, le 15 mars 2004 et la transmission par la Commission de son exposé factuel le 5 mai 2005, il s’est écoulé environ 14 mois, à l’intérieur desquels l’enquêteur a obtenu des déclarations de quatre témoins.

[24]        Quatre mois plus tard, après l’obtention d’un avis juridique, la proposition de mesures de redressement est adoptée le 28 septembre 2006 et envoyée par la suite le 3 octobre 2006.

[25]        Il s’est écoulé six mois entre la date de la transmission de la proposition de mesures de redressement, soit entre le 3 octobre 2006 et le 27 mars 2007, date à laquelle la Commission dépose la demande introductive d’instance au Tribunal. Durant cette période, les parties ont entamé des négociations en vue de régler leur litige et les parties ont communiqué entre elles environs à dix reprises, soit par voie de lettres ou par téléphone.

[26]        Le Tribunal rappelle que dans l’affaire Pandamis[13], un délai de cinquante-sept (57) mois s’était écoulé entre le dépôt de la plainte à la Commission et la demande introduite au Tribunal. Plus encore, il y avait eu absence complète de communication entre les parties pendant une période de quarante-trois (43) mois, soit depuis le moment où la défenderesse a reçu l’exposé factuel de la Commission.

[27]        En l’espèce, les défenderesses n’ont offert aucune preuve de préjudice et, tel que l'a statué le Tribunal à quelques reprises, le seul écoulement du temps ne saurait justifier en soi un motif suffisant pour accueillir une demande en irrecevabilité comme celle présentée par les défenderesses.

[28]        Pour ces motifs, le moyen préliminaire en irrecevabilité doit être rejeté.

 

2.    LES FAITS SUR LA DEMANDE PRINCIPALE

Le témoignage de madame Strauber

[29]        La plaignante, madame Daniella Strauber, d’origine Roumaine, est une personne de confession juive. Au moment des événements, elle est éducatrice auprès des jeunes enfants au sein de la garderie opérée par les défenderesses.

[30]        La défenderesse, Garderie éducative le futur de l’enfant inc. (ci-après, la garderie), est une entreprise de garde privée soumise à la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l’enfance[14]. Depuis 1994, elle a comme activité principale la garde et l’éducation des enfants de dix-huit mois à quatre ans.

[31]        La co-défenderesse, madame Evangelia Kalogrias, est la propriétaire de la garderie et en assume la direction générale. À ce titre, elle exécute l’ensemble des tâches administratives de la garderie, la comptabilité, le recrutement et la gestion du personnel, notamment. 

[32]        La plaignante, madame Strauber,  a été embauchée le 24 novembre 2003 à titre d’éducatrice temporaire, en remplacement d’une autre éducatrice en congé de maternité, pour s’occuper d’un groupe d’enfant de deux ans. Aucun contrat de travail écrit n’a été signé entre les parties avant le 18 février 2004[15], seulement après avoir terminé une période de probation et après vérification de ses antécédents professionnels (références). Son contrat de travail devait se terminer le 18 octobre 2004.

[33]        Madame Strauber témoigne à l’audience que vers la fin du mois d’août 2004, lors d’une réunion du personnel, elle a demandé à la directrice, madame Kalogrias,  un congé sans solde de deux jours consécutifs, les 16 et 17 septembre 2004, afin de célébrer le Nouvel An juif, le  «Rosh Hashanah». Il lui importe de célébrer cette fête juive et ainsi manifester sa foi dans l’Être divin. En conformité avec les règles prescrites à cet égard, il lui est interdit entre autres choses, de travailler, d’allumer ou d’éteindre l’électricité, de circuler en automobile pendant les deux premiers jours de cette fête laquelle se prolonge pendant dix jours.

[34]        Durant toute sa vie, elle n’a jamais travaillé pendant ces deux premiers jours de la fête et même en Roumaine, son pays d’origine où elle devait cacher sa foi pour la religion juive, elle n’a jamais travaillé.

[35]        À l'audience, elle exprime sa détermination à respecter ses croyances religieuses: “For me, not to be able to celebrate this holiday was not even a matter of talking”.

[36]        Lors de la demande de congé de madame Strauber, une autre éducatrice responsable d'un groupe d'enfants du même âge, madame Mery Benoualid, formule le souhait de pouvoir bénéficier d'un congé sans solde de deux jours pour les mêmes raisons.

[37]        La défenderesse Kalogrias répond qu’elle va y penser. Une réponse va suivre aussitôt que possible.

[38]        En fait, vendredi le 10 septembre 2004, madame Kalogrias informe madame Strauber et l’autre employée, madame Benoualid, qu’elle ne peut leur accorder les deux journées demandées compte tenu qu'elles sont toutes deux éducatrices pour le même groupe d’âge et pour les mêmes journées de congé. Elle ne peut compter sur des  éducatrices substituts en nombre suffisant. Elle peut toutefois leur octroyer à chacune d’elle qu’une seule journée de congé, à leur choix. Elle demande en conséquence aux deux éducatrices de choisir l’une ou l’autre de ces journées, le jeudi 16 septembre ou le vendredi 17 septembre 2004.

[39]        La proposition de madame Kalogrias surprend madame Strauber. Elle déclare à l'audience qu'elle s'est sentie confuse. Elle en discute avec son conjoint pendant toute la fin de semaine, puis, décide de revenir à la charge auprès de madame Kalogrias pour requérir à nouveau les deux journées de congé pour se conformer à sa pratique religieuse.

[40]        Lundi, le 13 septembre 2004, madame Strauber se présente au bureau de la défenderesse Kalogrias. Elle lui demande des explications concernant sa décision de ne lui accorder qu’une seule journée de congé. Lors de la même conversation, elle explique à nouveau qu'elle est tenue par sa religion de prendre congé ces deux journées et non une seule, tout en précisant que de toute façon, elle ne pourra pas se présenter au travail.

[41]         À l'audience, elle réitère les propos qu'elle déclare avoir tenus à madame Kalogrias ce jour-là: « I know you told me Friday that you cannot give me those two days , this is what I have to do, I have to take those two days, it is out of discussion that I can come.».

[42]        La défenderesse Kalogrias lui répond alors que sa décision est finale. Elle ne peut pas l’accommoder pour ces deux jours. Elle l'informe par la même occasion que sa collègue madame Benoualid avait déjà choisi comme journée de congé, le jeudi 16 septembre. De plus, elle lui mentionne que si elle ne se présente pas au travail, elle sera alors suspendue pour trois jours, sans rémunération.

[43]        Surprise et bouleversée par cette réponse, madame Strauber lui répond, en substance, qu’elle ne peut pas la punir comme à la petite école. Elle lui déclare être étonnée qu’il lui ait été impossible de trouver quelqu’un pour la remplacer, même pas une seule personne. Elle suggère alors le nom de la fille de l'éducatrice substitut qui remplace à l'occasion ou même, suggère de diviser les enfants en groupe d’âge et pourquoi pas, qu'elle prenne elle-même charge des enfants pour la journée supplémentaire requise. 

[44]        La défenderesse Kalogrias refuse net de revenir sur sa décision. Madame Strauber lui  répond  alors que, dans ce contexte, elle accepte la suspension. 

[45]        La même journée, vers les 16 h 30,  la défenderesse Kalogrias, en présence de son conjoint, monsieur Chris Didaskalou, convoque madame Strauber à  son bureau. Ils l’informent alors qu’elle est congédiée, témoigne la plaignante.

[46]        C'est d'ailleurs le conjoint, monsieur Didaskalou, qui l’informe de leur décision.  Ils la justifient en substance par son comportement qu’ils jugent inacceptable. Son acceptation sans difficulté de la suspension de trois jours démontre son peu d’intérêt pour son travail d'éducatrice à la garderie d’une part, et d’autre part, que l'environnement de travail risquait d'être perturbé si elle continuait à travailler à la garderie. 

[47]        Puis, selon madame Strauber, la défenderesse Kalogrias lui présente une lettre de fin d’emploi qu'elle se doit de signer sur-le-champ, une formalité usuelle lors de la cessation d'un emploi, aurait-elle précisé. 

[48]        Madame Strauber prend la lettre mais refuse de la signer. Elle va la signer seulement si elle y est obligée, aurait-elle précisée,  selon madame Kalogrias.

[49]        Dès le lendemain, elle téléphone à la Commission des normes du travail (CNT) pour vérifier les affirmations de la directrice au regard de la lettre.

[50]        Elle communique également avec le bureau du Congrès juif canadien à Montréal  «Canadien Jewish Congress» concernant le paiement de ses deux semaines de préavis et de l'indemnité de vacances de 4% auquel elle a droit compte tenu de la cessation d'emploi.  

[51]        Madame Strauber témoigne avoir été bouleversée de perdre son emploi.  Elle s'est sentie perdue et confuse. Elle a pleuré en réalisant qu’elle allait être sans emploi aux célébrations de «Rosh Hashanah».  Elle en a parlé avec tout le monde au sein de la communauté juive. Ce fut une période difficile émotivement, précise-t-elle.  Elle s'est «revue» alors en Roumanie où elle ne pouvait pas dire qu’elle était juive. Elle ne pouvait croire qu'une telle situation puisse  survenir au Canada.

[52]        Le 1er novembre 2004, après plusieurs démarches au sein de la communauté juive, elle déniche un nouvel emploi dans une autre garderie.

Le témoignage du Rabin Bitton

[53]        Le Rabbin David Bitton témoigne en demande pour établir l’importance de la fête «Rosh Hashanah» pour les personnes de confession juive. En substance, il confirme le témoignage de madame Strauber concernant les rites ou préceptes de la religion pendant la fête du Nouvel An juif. Il se souvient que madame Strauber était très affectée de la perte de son emploi. Il précise avoir apprécié alors sa décision de sacrifier son travail pour respecter ses convictions religieuses.

Le témoignage de madame Kalogrias

[54]        Sous plusieurs aspects, madame Kalogrias présente une version différente des événements.

[55]        Elle est propriétaire de la garderie depuis 1994. À l’époque pertinente du litige, la garderie employait neuf éducatrices et une éducatrice substitut pour quelques 80 enfants âgés de dix-huit mois à quatre ans, répartis en neuf groupes.

[56]        Elle soutient qu’elle n’a jamais mis fin à l’emploi de madame Strauber. C’est plutôt cette dernière qui a décidé, de plein gré, de quitter, tout  en donnant aux défenderesses un préavis de fin d'emploi de deux semaines.

[57]        Elle corrobore le témoignage de la plaignante sur le fait qu'elle a bien reçu la demande des deux éducatrices pour le même congé. Elle déclare avoir effectué des démarches en vue de dénicher des remplaçantes pour les deux jours de congé demandés, mais en vain. Elle n'a déniché qu'une seule éducatrice substitut.

[58]        Elle dit avoir fait des vérifications notamment auprès d'autres centres de la petite enfance de sa région et auprès de l’Association des garderies privées pour y dénicher une éducatrice pour le vendredi 17 septembre. Elle soutient avoir même «supplié» son éducatrice substitut, pour qu’elle se rendre disponible le vendredi en question et ce, de façon exceptionnelle. Elle ne travaille pas habituellement cette journée-là car elle doit se rendre à l’hôpital pour rendre visite à son fils.  Là encore, une réponse négative fut obtenue.

[59]        C'est dans ce contexte, conclut-elle, qu'elle s'est résignée à n'accorder qu'une seule journée de congé aux deux éducatrices concernées, à leur choix, le jeudi ou le vendredi.

[60]        Madame Kalogrias précise que le mois de septembre est généralement une période difficile pour la garderie. C’est le début de l’année scolaire, les enfants pleurent plus souvent et les parents sont plus anxieux. Plus encore, ce mois de septembre 2004 avait été particulièrement difficile pour elle puisqu’une employée avait démissionné durant l’été et qu'elle n’avait pas d’éducatrices «substitut» (floaters) en nombre suffisant pour remplacer les éducatrices absentes. Elle avait une seule éducatrice substitut qui pouvait travailler uniquement quatre jours, soit du lundi au jeudi. 

[61]        Le 10 septembre 2004, elle a rencontré madame Strauber et l’autre éducatrice pour les informer qu’elle pouvait les remplacer toutes les deux, jeudi le 16 septembre, mais qu’elle ne peut le faire pour le vendredi étant donné qu’elle n’avait pas d’éducatrice  substitut pour cette journée.

[62]        Désireuse d'être équitable envers les éducatrices, madame Kalogrias confirme qu'elle a demandé aux deux éducatrices de choisir l’une ou l’autre des jours. 

[63]        Le lundi matin suivant, le 13 septembre 2004, alors qu’elle effectue sa tournée, madame Benoualid l’informe qu’elle prend le jeudi comme journée de congé.

[64]        De retour à son bureau, elle rencontre madame Strauber qui désire lui parler. Cette dernière l’informe d'emblée qu’elle refuse de faire un choix comme elle lui avait demandé. Elle requiert à nouveau de pouvoir prendre les deux journées demandées et prend soin de préciser que, de toute façon, elle ne viendra pas au travail. Elle va rester à la maison comme lui dicte sa foi juive. 

[65]        Devant l’intransigeance de madame  Strauber, madame Kalogrias lui répond que si elle ne se soumet pas à sa décision de choisir l’une ou l’autre des journées, elle est susceptible d’être suspendue pour une journée, soit le lundi.

[66]        À ce moment-là, madame Strauber est devenue agressive et même impolie, selon madame Kalogrias. La plaignante lui aurait demandé «si elle allait la punir comme à la petite école».

[67]        Madame Kalogrias lui répond alors que si elle continuait de refuser l’offre de choisir une des journées, elle devra en subir les conséquences. Pour son insubordination, elle va la suspendre sans salaire pour la journée du lundi suivant.

[68]        C’est à ce moment que madame Strauber lui réplique qu’elle n’a pas d’avenir à la garderie et qu’elle lui a annoncé sa démission sur-le-champ tout en lui donnant  deux semaines de préavis.

[69]        Dans le cours de la journée, la défenderesse Kalogrias observe que madame Strauber bavarde avec les autres éducatrices sur les événements de la matinée créant une certaine «commotion», affirme-t-elle. 

[70]        Préoccupée par l'animosité de madame Strauber à son égard et de la tension qui s'installe dans la garderie et de ses conséquences néfastes sur les enfants, voire même sur les parents, elle décide alors de demander à la plaignante de rester à la maison et de ne pas venir travailler pendant la durée des deux semaines de préavis.

[71]        Elle convoqua alors la plaignante dans son bureau en présence de son conjoint, monsieur Chris Didaskalou, pour l’informer de sa décision et pour lui demander d’écrire une lettre pour confirmer sa démission.  Elle soutient n’avoir jamais préparé une lettre de fin d’emploi ni n’a donné une telle lettre à la plaignante.

[72]        La semaine suivant sa rencontre avec la plaignante, elle reçoit une communication téléphonique d'une personne du Congrès juif canadien au sujet du paiement des deux semaines de préavis et l'indemnité pour les vacances (le 4%). Elle confirme la transmission des indemnités à la plaignante dans les jours suivants le jour habituel de la paie.

[73]        La plaignante, madame Strauber, ayant quitté la garderie,  madame Kalogrias se résigne à lui trouver une remplaçante. L’employée en congé de maternité, que remplaçait madame Strauber, l’a informée qu'elle ne revenait pas au travail à la garderie.  C’est dans ce contexte qu’elle s’y affère rapidement.

[74]        À l'été 2004, elle avait justement publié dans le journal une offre d'emploi pour recruter une éducatrice pour remplacer celle qui avait démissionné. C'est ainsi que dès le lundi suivant le départ de madame Strauber, elle embauche une nouvelle éducatrice.  

[75]        Elle confirme en contre-interrogatoire que l'éducatrice substitut, madame Rosa Romeo, a en effet travaillé du mardi 14 septembre au jeudi 16 septembre et que sa fille a travaillé le vendredi 17 septembre pour remplacer madame Strauber. 

[76]        En réponse à une question du Tribunal, madame Kalogrias précise que la liste informatisée d'éducatrices disponibles sur appel et dont les antécédents professionnels avaient été vérifiés par les services policiers, a été rendue accessible seulement à la fin d’octobre 2004.

            3.         LES QUESTIONS EN LITIGE

[77]        Le présent litige soulève en substance les questions suivantes:

1.    En n’offrant qu’une seule journée de congé au choix de la plaignante au lieu de deux jours demandés lors du Nouvel An juif, les défenderesses ont-elles porté atteinte au droit de la plaignante d’être traitée en toute égalité, sans distinction ou exclusion fondées sur la religion dans le cadre de son emploi, contrairement aux articles 3, 10, et 16 de la Charte?

2.    Par le fait même, les défenderesses ont-elles porté atteinte au droit de la plaignante à la sauvegarde de sa dignité, sans distinction ou exclusion fondée sur sa religion, contrairement aux articles 4 et 10 de la Charte?

3.    La plaignante a-t-elle par ailleurs été congédié lorsqu’elle a refusé la proposition de la défenderesse Kalogrias de prendre une seule journée de congé au lieu de deux journées demandées?

4.    Dans l’affirmative aux questions sus-mentionnées, la plaignante a-t-elle droit aux dommages-intérêts matériels et moraux réclamés en sa faveur par la Commission?

            4.   LE DROIT

[78]        Les dispositions pertinentes de la Charte relativement au droit d’être traité en toute égalité, sans distinction ou exclusion fondées sur la religion en garantissant notamment le droit à la dignité s’énoncent comme suit:

3.   Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association”

  4.   Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation.

 10.    Toute personne a droit à la reconnaissance et à l’exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l’orientation sexuelle, l’état civil, l’âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l’origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l’utilisation d’un moyen pour pallier ce handicap.

      Il y a discrimination lorsqu’une telle distinction, exclusion ou      préférence a pour effet de détruire ou de compromettre ce droit.”

[79]        Dans le domaine de l’emploi, la Charte prévoit spécifiquement  à l’article 16 les règles suivantes:

16. Nul ne peut exercer de discrimination dans l’embauche, l’apprentissage, la durée de la période de probation, la formation professionnelle, la promotion, la mutation, le déplacement, la mise à pied, la suspension, le renvoi ou les conditions de travail d’une personne ainsi que dans l’établissement de catégories ou de classifications d’emploi.

[80]        Enfin, l’article 49 de la Charte énonce le droit à l’indemnisation d'une victime de discrimination:

49.    Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnu par la présente Charte confère à la victime le droit d’obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte.

En cas d’atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des dommages-intérêts punitifs.

[81]        L’article 10 de la Charte énonce le principe du droit à l’égalité dans l’exercice des droits et libertés protégés par la Charte. La religion est l’un des motifs illicites de discrimination.

[82]        La Cour suprême du Canada a précisé à plusieurs reprises que trois éléments doivent être présents pour qu’il y ait discrimination: 

1)         qu’il existe une «distinction, exclusion ou préférence»;

2)         que cette «distinction, exclusion ou préférence» est fondée sur l’un des éléments énumérés à l’article 10 et;

3)         que la «distinction, exclusion ou préférence a pour effet de détruire ou de compromettre» le «droit à la pleine égalité dans la reconnaissance et l’exercice d’un droit ou d’une liberté de la personne».[16]

[83]        Elle a de plus statué qu’une discrimination peut résulter des effets préjudiciables d’une norme qui, à première vue, est neutre, puisqu’elle s’applique à tous également, mais qui a un effet discriminatoire pour un motif prohibé pour un seul employé ou un groupe d’employés[17].

[84]        D’ailleurs, dans l’arrêt Bergevin[18], la Cour suprême a établi que le principe de la discrimination par suite d’un «effet préjudiciable» reçoit application sous la Charte québécoise.

[85]        En affirmant que l’article 10 inclut les actes ayant pour effet de «détruire ou de compromettre» le droit à l’égalité, la Cour suprême précise dans cette même décision que pour déterminer si une distinction est fondée sur un motif interdit par l’article 10, il faut tenir compte de l’effet de la distinction plutôt que de se fonder uniquement sur sa nature apparente. L’acte qui est discriminatoire parce qu’incompatible avec le droit à l’égalité de l’article 10 est celui qui produit un effet sur ce droit, de telle sorte que l’article 10 se vise tant la discrimination indirecte ou « par effet préjudiciable ».

[86]        Ainsi, les pratiques et les normes d’apparence neutre et dont les objectifs sont par ailleurs légitimes, peuvent avoir un effet différent sur une personne et partant, être  discriminatoires au sens de la Charte. Par conséquent, pour qu’il y ait égalité et équité concrète ou véritable, l’employeur se doit de prendre des mesures raisonnables afin d’accommoder les personnes concernées.  

[87]        L’importance de prendre des mesures raisonnables afin de protéger le droit à l’égalité est explicitée par le juge Cory dans l’affaire Bergevin où il écrit que l’obligation d’accommodement raisonnable fait partie du droit à l’égalité :

“(....) une mesure d’accommodement raisonnable fait partie intégrante du droit à l’égalité. On peut donc considérer que l’obligation d’accommodement est un aspect fondamentalement important des lois en matière de droits de la personne et une partie intégrante du droit à l’égalité en milieu de travail."[19]

[88]        En matière de discrimination, une victime n’a pas à prouver l’intention de discriminer ou de porter préjudice, pas plus que l’auteur d’une discrimination ne peut se justifier en prouvant sa bonne foi ou ses bonnes intentions. Lorsqu’une victime a prouvé l’existence d’une différence de traitement et démontré que la cause efficiente de cette différence est un des motifs de discrimination prévus à l’article 10 de la Charte, l’auteur de cette différence ne peut pas prétendre se justifier en démontrant sa bonne foi[20].

[89]        Ainsi, dès que la partie en demande, la Commission, au nom de la plaignante,  établit qu’une norme est discriminatoire à première vue, il appartient alors à l’auteur allégué de la faute discriminatoire, d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que cette norme discriminatoire a une justification réelle et raisonnable.

[90]        En droit québécois, un employeur doit justifier en deux étapes, selon la prépondérance des probabilités, la  norme discriminatoire qu’il a adoptée:

1)   qu’il a adopté la norme dans un but rationnellement lié à l’exécution du travail en cause;

2)   que la norme est raisonnablement nécessaire pour réaliser ce but légitime lié au travail.  Pour prouver que la norme est raisonnablement nécessaire, il faut démontrer qu’il est impossible de composer avec les employés qui ont les mêmes caractéristiques que le demandeur sans que l’employeur ne subisse une contrainte excessive. [21]

[91]        Une fois la discrimination prouvée de façon prima facie, c’est donc à l’employeur de démontrer qu’il ne peut composer avec les caractéristiques du plaignant sans subir une contrainte excessive.

[92]        En ce qui concerne la contrainte excessive, la Cour suprême a souligné dans l’arrêt Renaud:

L’utilisation de l’adjectif “excessive” suppose qu’une certaine contrainte est acceptable; seule la contrainte “excessive” répond à ce critère.[22]

[93]        C’est ainsi qu’un certain degré de contrainte est acceptable, ce qui exclut de simples efforts ou des inconvénients négligeables.

[94]         Dans l’affaire Central Alberta Dairy Pool[23], la Cour suprême a énoncé, sans toutefois définir exhaustivement le concept de contrainte excessive, certains facteurs susceptibles, dans le contexte de l’emploi, d’être jugés pertinents. La Cour écrit: 

"… le coût financier, l'atteinte à la convention collective, le moral du personnel et l'interchangeabilité des effectifs et des installations.  L'importance de l'exploitation de l'employeur peut jouer sur l'évaluation de ce qui représente un coût excessif ou sur la facilité avec laquelle les effectifs et les installations peuvent s'adapter au circonstances.  Lorsque la sécurité est en jeu, l'ampleur du risque et l'identité de ceux qui le supportent sont des facteurs pertinents. 

"…[c]ette énumération ne se veut pas exhaustive et les résultats qu'on obtiendra en mesurant ces facteurs par rapport au droit de l'employé de ne pas faire l'objet de discrimination varieront nécessairement selon le cas."[24]

[95]        Aussi, dans l’arrêt Bergevin[25], le juge Cory précise que:  «[c]es facteurs ne sont pas coulés dans le béton» et qu’il y a lieu «de les appliquer d’une manière souple et conforme au bon sens, en fonction des faits de chaque cas».[26]

[96]        Par ailleurs, il est aussi important de préciser, comme la Cour suprême a déjà souligné dans l’arrêt Renaud[27] que la victime de discrimination ne peut de son côté s’attendre à une solution parfaite et doit plutôt faciliter la recherche d’un compromis raisonnable.

[97]        La Cour précise en ces termes la coopération souhaitée:

Pour faciliter la recherche d’un compromis, le plaignant doit lui aussi faire sa part. À la recherche d’un compromis raisonnable s’ajoute l’obligation de faciliter la recherche d’un tel compromis.  Ainsi, pour déterminer si l’obligation d’accommodement a été remplie, il faut examiner la conduite du plaignant.[28]

[98]        Dans l’arrêt Simpson-Sears[29], la Cour suprême écrit à cet égard, qu’à défaut de faire preuve de la souplesse nécessaire, la partie plaignante qui se dit victime de discrimination pourra se voir dans l’obligation d’exercer un choix difficile:

Lorsque ces mesures ne permettent pas d’atteindre complètement le but souhaité, le plaignant, en l’absence de concessions de sa propre part, doit sacrifier soit ses principes religieux, soit son emploi.[30]

[99]        C’est ainsi qu’une telle victime a le devoir d’accepter une mesure d’accommodement raisonnable et, en l’absence de concessions de sa part, il pourra se voir forcé de choisir entre ses principes religieux et son emploi.

[100]     Cela ne signifie pas par contre que son obligation de rechercher un compromis dégage l’employeur de ses responsabilités premières. L’initiative de proposer des mesures d’accommodement est de sa responsabilité. La victime n’est pas tenue par ailleurs d’accepter une mesure d’accommodement lorsqu’elle juge que cette dernière n’est pas conforme à ses impératifs religieux.

[101]     Il s’en suit donc que le Tribunal, en matière d’accommodement raisonnable,  doit examiner le sérieux des recherches et des démarches effectuées ainsi que la diversité des options considérées à cette fin. Il doit aussi prendre en considération l’attitude générale adoptée par les deux parties impliquées.

[102]     En conséquence, il est important pour l’employeur de faire la preuve probante des tentatives sérieuses d’accommodement dits raisonnables et la contrainte excessive qu’elles représentent. Car, comme l’énonce le professeur Brunelle, « [...] toute mesure de nature à limiter la possibilité d’un individu de satisfaire les exigences de sa religion (exemples: observance de jours et de rites à caractères religieux, [...]) devra dès lors être rationnelle et proportionnée sous peine d’être déclarée inopérante.[31]»

 


5.         L’APPLICATION DU DROIT AUX FAITS EN L’ESPÈCE

[103]     D'emblée, le Tribunal conclut que la Commission a établi une preuve prima facie de l’existence de discrimination par suite d’un effet préjudiciable, fondée sur la religion, l’un des motifs de discrimination de l’article 10 de la Charte

[104]     En l’espèce, le Tribunal est en présence d’une norme en apparence neutre concernant la présence au travail imposée par les défenderesses à la plaignante laquelle s’applique de façon égale à tous les employés, mais qui, compte tenu des croyances et des pratiques religieuses de la plaignante, a pour effet de compromettre son droit de ne pas subir de discrimination dans le cadre de son emploi. 

[105]     La plaignante, madame Strauber a, de façon plus que probante, démontré  au Tribunal sa croyance sincère à la religion juive et expliqué comment les préceptes de cette dernière lui interdisent de travailler pendant les deux premiers jours de la fête du  Rosh Hashanah.

[106]     Comme le rappelle le professeur Christian Brunelle, la liberté de religion garantie par la Charte ne protége pas seulement les croyances mais aussi les pratiques dictées pas ces croyances. En conséquence, écrit-il:

[...] la personne qui invoque sa liberté de religion pour expliquer sa conduite ou ses pratiques ne saurait être tenue « de prouver l’existence d’une quelque obligation, exigence ou précepte religieux objectif ». Si la croyance en un précepte religieux est sincère, c’est-à-dire qu’elle est « avancée de bonne foi », qu’elle n’est « ni fictive ni arbitraire » et qu’elle ne constitue pas  « un artifice », le tribunal ne la mettra pas en doute [...]»[32]

[107]     Afin de contrer cette preuve prima facie de discrimination, il appartient aux défenderesses de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la norme est justifiée par les objectifs poursuivis par la garderie dans le cadre de l’emploi et qu’elles ont considéré les accommodements raisonnables pouvant être offertes à la plaignante sans que cela leur cause une contrainte excessive.

[108]     Dans un premier temps, il y a lieu de questionner la légitimité de la norme et de vérifier dans sa foulée si elle est rationnellement liée à l’emploi.  

[109]     Un employeur se doit de trouver des solutions sérieuses et explorer les différentes possibilités qui s’offrent à lui pour répondre à la demande d’accommodement de la part de son employé qui requiert un accommodement raisonnable pour respecter les préceptes de sa foi. Cet employeur doit par ailleurs démontrer que les possibilités écartées, après une sérieuse analyse et considération, constituaient pour lui des contraintes excessives, qu’elles n’étaient pas acceptables pour l’organisation du travail dans son entreprise.

[110]     Certes, l’obligation d’accommodement de l’employeur n’est pas une obligation de résultat, elle est plutôt une obligation de moyen. La notion de la contrainte excessive ne se présume pas, elle doit par ailleurs se prouver

[111]     En l’espèce, les défenderesses ont-elles fait la démonstration probante qu’elles ont fait des efforts sérieux pour trouver une solution à la difficulté rencontrée et que les diverses hypothèses considérées constituaient des contraintes excessives?

[112]     Certes, il est tout à fait légitime pour une garderie d’adopter un horaire de travail et de prendre tous les moyens nécessaires afin de garantir la présence suffisante d’éducatrices pour voir à la sécurité, la santé et au bien-être général des enfants.

[113]     Afin de réussir leur défense d’accommodement raisonnable, les défenderesses devaient donc démontrer qu’elles ont fait de réels efforts pour donner suite à la demande de madame Strauber. Elles se devaient d’explorer les différentes possibilités d’aménagement du travail qui s’offraient à elles au regard de cette dernière tout comme elles se devaient de faire la preuve des difficultés réelles pour chacune des situations envisagées.[33]

[114]     La preuve révèle en effet que la défenderesse Kalogrias a refusé la demande de la plaignante de deux jours de congé puisqu’une autre éducatrice qui travaille avec le même groupe d’enfants a également demandé ces deux jours. Toutefois, ayant une substitut du lundi au jeudi et une remplaçante substitut pour le vendredi, elle pouvait offrir les deux jours de congé aux deux éducatrices pour le jeudi et dans ce contexte, il ne lui restait qu'à trouver une remplaçante pour le vendredi.

[115]      La défenderesse Kalogrias a expliqué au Tribunal que son problème était essentiellement de trouver une remplacement pour la journée de vendredi, le 17 septembre.  Elle a communiqué avec d’autres directrices de Centres de la Petite Enfance de sa région et auprès de l’Association des garderies privées pour recruter une éducatrice remplaçante. Ce fut en vain.

[116]     Elle a jugé en conséquence qu’il serait inéquitable d’offrir une journée de congé à madame Benoualid et deux jours de congé à la plaignante madame Strauber.

[117]     Toutefois, eu égard à la nécessité de préserver le droit à la non-discrimination fondée sur la liberté de la religion garantit par la Charte, ces efforts sont jugés insuffisants. D’autres solutions auraient pu être davantage explorées dans le contexte en particulier où son remplacement a été réalisé sans difficultés majeures et ce, dans un court laps de temps.

[118]     En fait, elle n’a pas vérifié d’autres possibilités afin d’accommoder la plaignante, telles que la réorganisation de l’horaire de travail ou même la répartition différente des groupes d’enfants pour cette journée.  Ces solutions n’ont pas été sérieusement considérées et plus vraisemblablement ont été écartées, sans grande analyse. Le regroupement des enfants avait d’ailleurs été proposé par madame Strauber. 

[119]     En particulier, elle n’a pas fait la preuve que l’absence de la plaignante pendant une journée, le vendredi, présentait une contrainte excessive, notamment un risque grave pour la sécurité des enfants ou celle de la garderie en général. 

[120]     De plus, il y a absence de preuve au dossier au regard des difficultés qui auraient pu se poser si la défenderesse Kalogrias avait pris d’autres mesures, des problèmes ou des dépenses qu’il lui aurait fallu engager pour modifier l’horaire de travail ou même la répartition des groupes d’enfants, ou des autres problèmes qui auraient pu surgir si d’autres mesures d’accommodement avaient été prises.

[121]     Somme toute, la défenderesse Kalogrias n’a donc envisagé sérieusement qu’une seule possibilité pour accommoder la plaignante, soit de trouver une remplaçante pour le vendredi. Même si la preuve démontre que la défenderesse Kalogrias a fait quelques efforts afin de trouver une remplaçante pour le vendredi, elle n’a pas véritablement exploré d’autres alternatives. 

[122]     Certes,  la recherche d’un compromis doit aussi impliquer la plaignante. En effet, l’employée concernée doit, dans une certaine mesure, contribuer à cette tentative d’accommodement. Par contre, bien que l’employée ait cette obligation d’accommodement, ceci ne signifie pas pour autant qu’elle soit tenu d’accepter toute proposition d’accommodement de l’employeur.[34]  

[123]     Cependant, le compromis doit d’abord être initié par l’employeur qui a l’obligation première d’offrir une solution réelle et acceptable au regard des droits fondamentaux de la victime de discrimination et qu’à défaut de pouvoir répondre à la demande telle que formulée par cette dernière, il doit faire la démonstration qu’il lui est l’impossible de la mettre en application sans subir de contraintes excessives, c’est à dire de faire des efforts significatifs, sérieux et sincères. Dans le cas d’une adaptation individualisée comme en l’espèce, l’employeur doit veiller à ce que la solution d’accommodement n’entraîne ni perte de salaire, ni perte de congés, ni inconvénients exagérés pour l’employé visé[35].

[124]     En l’espèce, le Tribunal conclut que les défenderesses ont failli à leurs obligations et partant, elles ont porté atteinte au droit de la plaignante d’être traitée en toute égalité dans son emploi, sans discrimination fondée sur la religion et ont compromis le droit de la plaignante à la sauvegarde de sa dignité.

              6.    LES DOMMAGES

[125]     La Commission demande, en faveur de la plaignante, un montant total de huit mille cinquante-neuf dollars et vingt sous (8 059,20 $). Plus particulièrement, elle demande la somme de deux mille cinquante-neuf dollars et vingt sous (2 059,20 $), à titre de dommages matériels pour la perte de salaire et la somme de six mille dollars (6 000,00 $) à titre de dommages moraux.

                 6.1    Les dommages matériels

[126]     Pour établir les dommages matériels, il convient de déterminer d’abord s’il y a eu congédiement en l’espèce. 

[127]     Sur cette question, les parties présentent des points de vue diamétralement opposés et dans leur foulée, offrent des versions des événements contradictoires. 

[128]     D’une part, madame Strauber plaide qu’elle a été congédiée suite à sa décision de refuser la proposition offerte par la défenderesse Kalogrias de prendre une seule journée de congé et par la suite, d’accepter la suspension de trois jours.

[129]     D’autre part, la défenderesse Kalogrias soutient plutôt qu’elle n’a jamais mis fin à l’emploi de la plaignante et c’est plutôt la plaignante qui a décidé de son plein gré de quitter son emploi en lui donnant à la défenderesse un préavis de deux semaines.

[130]     En présence de témoignages contradictoires, le Tribunal doit  retenir une version des faits positive, vraisemblable, cohérente, constante, corroborée et exempte de contradictions[36].

[131]     Le Tribunal est d’avis que, compte tenu de la réaction émotive et intransigeante de la plaignante au moment de la rencontre du 13 septembre 2004 et une pareille attitude maintenue de son témoignage à l’audience, qu’il est plutôt vraisemblable que madame Strauber ait donné sa démission.

[132]      D’ailleurs, à l’audience, madame Strauber témoigne avec insistance qu’elle a été surprise et bouleversée par la réponse de la directrice de la garderie. Elle n’a pas tenté de cacher non plus ses intentions véritables qui étaient de ne pas entrer au travail les deux jours demandés: « I know you told me Friday that you cannot give me those two days , this is what I have to do, I have to take those two days, it is out of discussion that I can come».  

[133]     Madame Strauber soutient de plus que lors de la rencontre du 13 septembre, le conjoint de la défenderesse Kalogrias, monsieur Chris Didaskalou lui a présenté  une lettre qu’elle se devait de signer pour ainsi confirmer sa fin d’emploi. Cette lettre n’a toutefois pas été produite en preuve. La défenderesse Kalogrias en nie même l’existence. 

[134]     La Commission soutient également que même si le Tribunal décide qu’il n’y a pas de congédiement, qu’on devrait considérer que la menace de suspension lorsque la plaignante a refusé de se présenter au travail, devrait équivaloir à un congédiement déguisé.

[135]     Avec égard, le Tribunal ne peut pas accepter cet argument en l’espèce. Le concept compris dans l’expression «démission forcée» ou un «congédiement déguisé» fait référence à des modifications substantielles apportées aux conditions de travail de l’employé sur lesquelles les parties s’étaient entendues lors du contrat de travail initial.[37]

[136]     En l’instance, l’imposition de la présence de la plaignante au travail ne peut être assimilé à un congédiement déguisé puisqu’il ne s’agit pas d’une modification substantielle aux conditions de travail d’une part et, d’autre part, la défenderesse Kalogrias lui a quand même offert l’une des deux journées de congé demandées.

[137]     Le Tribunal conclut qu’il n’y a pas eu de congédiement, pas même déguisé en l’espèce. Il n’y a pas lieu par conséquent de considérer l’argument de la Commission au regard  de la question relative à la garantie de l’emploi de madame Strauber dans l’éventualité où l’éducatrice en congé de maternité ne revenait pas au travail[38].

[138]     Dans ce contexte, la réclamation pour perte de salaire est rejetée.

              6.2      Les dommages moraux

[139]     L'une des présentations parmi les plus éloquentes du « dommage moral », d'ailleurs maintes fois rappelée par le Tribunal, est celle de madame la juge Pierrette Rayle de la Cour d'appel dans l'arrêt Malhab c. Métromédia CMR Montréal inc.,  qu’il convient de citer à nouveau :

[62]       S'il est moins palpable, il n'en est pas moins réel. 

Le dommage moral ou extrapatrimonial est souvent difficile à chiffrer d'une manière exacte ou même approximative.

[…]

Dans tous ces cas cependant, le préjudice est direct, certain et réel et doit donc être compensé, même s'il n'existe pas de base scientifique permettant de l'évaluer précisément.

[63]      Que le préjudice moral soit plus difficile à cerner ne diminue en rien la blessure qu'il constitue. J'irais même jusqu'à dire que parce qu'il est non apparent, le préjudice moral est d'autant plus pernicieux. Il affecte l'être humain dans son for intérieur, dans les ramifications de sa nature intime et détruit la sérénité à laquelle il aspire, il s'attaque à sa dignité et laisse l'individu ébranlé, seul à combattre les effets d'un mal qu'il porte en lui plutôt que sur sa personne ou sur ses biens.[39]

[140]     Bien que difficile à cerner, le préjudice moral doit néanmoins être compensé pour réparer le préjudice subi.

[141]     Pour réussir à évaluer correctement le préjudice moral, il faut tenir compte des circonstances dans lesquelles l'acte reproché a eu lieu, notamment de la vulnérabilité de la victime, des circonstances factuelles et objectives dans lesquelles les actes reprochés se sont déroulés[40].

[142]     Au regard de la vulnérabilité de la victime, les auteurs Baudouin et Deslauriers écrivent :

Le principe de la réparation intégrale exige aussi que l'auteur de la faute prenne la victime dans l'état où elle se trouve au moment où le dommage est causé […] Selon qu'il blesse un millionnaire ou un chômeur, la situation pour lui risque d'être fort différente. Si donc également, en raison d'une fragilité de santé particulière de sa victime, les conséquences de l'acte fautif sont beaucoup plus considérables qu'elles ne l'auraient été sur une personne ordinaire, peu importe.[41]

[143]     En l’espèce, madame Strauber témoigne que la décision des défenderesses de ne pas lui accorder les deux jours de congé demandés afin de célébrer la fête du Nouvel An juif a été pour elle « emotionally draining » et qu’elle s'est sentie « quite lost and confused ».  Cette situation l’a replongée dans un passé pas si lointain alors qu’elle vivait en Roumanie et où sa foi juive ne pouvait être exprimée ouvertement.

[144]     En l’espèce, le refus d’accorder à la plaignante les deux jours de congé demandés est non seulement une atteinte à l’un de ses droits garantis par la Charte mais également une atteinte à son droit à la dignité reconnu par la Charte.

[145]     L'article 4 de la Charte énonce le droit de toute personne « à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation.».

[146]     La dignité humaine a été ainsi définie par la Cour suprême :

« […] La dignité humaine signifie qu'une personne ou un groupe ressent du respect et de l'estime de soi. Elle relève de l'intégrité physique et psychologique et de la prise en main personnelle. La dignité humaine est bafouée par le traitement injuste fondé sur des caractéristiques ou la situation personnelles qui n'ont rien à voir avec les besoins, les capacités ou les mérites de la personne. […] La dignité humaine est bafouée lorsque des personnes et des groupes sont marginalisés, mis de côté et dévalorisés […] »[42]

[147]     Sous la plume de la juge Claire l'Heureux-Dubé, la Cour suprême a par ailleurs précisé que : « […] l'article 4 de la Charte vise les atteintes aux attributs fondamentaux de l'être humain qui contreviennent au respect auquel toute personne a droit du seul fait qu'elle est un être humain et au respect qu'elle se doit à elle-même. »[43]

[148]     De même, il convient de rappeler l'énoncé suivant formulé par le Tribunal :

« […] la dignité se pose en tant que valeur transcendante à tous les droits et libertés et inscrite dans le préambule de la Charte, ce qui en fait un principe premier d'interprétation de celle-ci. La Charte consacre ainsi cette valeur […] en tant que principe constituant le fondement de tous les droits et libertés […] »[44]

[Le soulignement est du Tribunal]

[149]     Pour la violation des droits garantis à la Charte de la plaignante, madame Strauber, le Tribunal accorde la somme de 2 000,00$; une somme jugée juste et raisonnable en l’espèce.[45]

[150]     POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:

[151]     CONDAMNE solidairement les défenderesses à payer à la demanderesse, au profit de la plaignante madame Daniela Strauber, la somme de 2 000,00 $ à titre de dommages moraux pour l'atteinte discriminatoire à ses droits fondamentaux, fondée sur la religion dans le cadre de son emploi.


[152]     LE TOUT avec intérêts au taux légal plus l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 C.c.Q. depuis la signification de la proposition de mesures de redressement, soit à compter du 4 octobre 2006.

[153]     LE TOUT avec dépens.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

__________________________________

Pierre E. Audet,

Juge au Tribunal des droits de la personne

 

Me Pierre Moretti

Commission des droits de la personne

et des droits de la jeunesse

360, rue St-Jacques Ouest, 2ième étage

Montréal (Québec)  H2Y 1P5

Procureur de la partie demanderesse

 

Me Madeleine Leduc

24 rue St-Joseph

Sainte-Thérèse

J7E 3L6

Procureur de la partie défenderesses

 

Date d’audience :

23 mai 2008

 



[1]     L.R.Q., c. C-12

[2]     L.R.Q., c. C-25

[3]     Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Centre de la petite enfance Les Pandamis (anciennement Le Gardeurois), (T.D.P.Q., 2006-05-29), 2006 QCTDP 11, SOQUIJ AZ-50376833, J.E. 2006-1230, [2006] R.J.Q. 1727

[4]     MCCCUC Housing Corporation Residents Association c. Vokey (T.D.P.Q., 2007-01-29), 2007 QCTDP 1, SOQUIJ AZ-50413021, J.E. 2007-1184

[5]     Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Montréal (Ville de) (Service de police), (T.D.P.Q., 2007-02-28), 2007 QCTDP 5, SOQUIJ AZ-50420761, J.E. 2007-638, D.T.E. 2007T-267

[6]     Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Centre de la petite enfance des Pandamis, précité, note 3.

[7]     Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Centre de la petite enfance des Pandamis, id.; MCCCUC Housing Corporation Residents Association and al. c. Vokey, précité, note 4; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Blais (T.D.P.Q., 2007-03-08), 2007 QCTDP 11, SOQUIJ AZ-50424102, J.E. 2007-973 par. 72 à 74.

[8]     Blencoe c. Colombie-Britannique (Human Rights Commission), [2000] 2 R.C.S. 307.

[9]     Id., par. 122.

[10]    Id., par. 133

[11]    Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Centre de la petite  enfance des Pandamis, précitée, note 3.

[12]    Pièce P-7 : « Chronologie des communications pendant l’enquête »

[13]   Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Centre de la petite enfance des Pandamis,  précitée, note 3.

[14]    L.R.Q., c. C-8.2 

[15]    Pièce P-4 : Contrat de travail

[16]    Commission scolaire régionale de Chambly c. Bergevin (C.S. Can., 1994-06-23), SOQUIJ AZ-94111066, J.E. 94-1093, D.T.E. 94T-767, (1994) 62 Q.A.C. 241, [1994] 2 R.C.S. 525, p. 538;

Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Montréal (Ville); Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Boisbriand (Ville), (C.S. Can., 2000-05-03), 2000 CSC 27, SOQUIJ AZ-50075403, J.E. 2000-941, D.T.E. 2000T-440, [2000] 1 R.C.S. 665

[17]    Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears Ltd. (C.S.              Can., 1985-12-17), SOQUIJ AZ-86111012, J.E. 86-88, D.T.E. 86T-39, [1986]          D.L.Q. 89, [1985] 2 R.C.S. 536

[18]    Commission scolaire régionale de Chambly c. Bergevin, précité, note 16.

[19]    Id., pages 544-545, Voir également : Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears Ltd., précité, note 17, page 555.

[20]    Commission scolaire St-Jean-sur-Richelieu c. Commission des droits de la        personne (C.A., 1994-05-20), SOQUIJ AZ-94011587, J.E. 94-925, [1994] R.J.Q.   1227, (1995) 64 Q.A.C. 1

[21]    Colombie-Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. B.C.G.S.E.U. (C.S. Can., 1999-09-09), SOQUIJ AZ-50067256, J.E. 99-1807, D.T.E. 99T-868, [1999] 3 R.C.S. 3 page 32; Voir également : Colombie-Britannique (Superintendent of Motor Vehicles) c. Colombie-Britannique (Council of Human Rights), (C.S. Can., 1999-12-16), SOQUIJ AZ-50068485, J.E. 2000-43, [1999] 3 R.C.S. 868

[22]    Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud (C.S. Can., 1992-09-24), SOQUIJ AZ-92111101, J.E. 92-1483, D.T.E. 92T-1083, [1992] 2 R.C.S. 970, p. 984

[23]    Central Alberta Dairy Pool c. Alberta (Commission des droits de la personne), (C.S. Can., 1990-09-13), SOQUIJ AZ-90111088, J.E. 90-1345, [1990] 2 R.C.S. 489

[24]    Central Alberta Dairy Pool c. Alberta (Commission des droits de la personne), (C.S. Can., 1990-09-13), SOQUIJ AZ-90111088, J.E. 90-1345, [1990] 2 R.C.S. 489; pp. 520-521.

[25]    Commission scolaire régionale de Chambly c. Bergevin, précité, note 16

[26]    Id., page 546

[27]    Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud, précité, note 22, page 994.

[28]    Id.

[29]    Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears Ltd., précité, note 17.

[30]    Id., page 555

[31]    C. Brunelle, Les droits et libertés dans le contexte civil. Dans Droit public et administratif, Collection de droit 2008-2009, École du Barreau du Québec, vol. 7, 2008 ; EYB2008CDD166,  p. 11 de 52

[32]  C. Brunelle, id., p.10 de 52. Le mot en italique est de l’auteur. Les citations ont été omises.

[33]    Colombie-Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. B.C.G.S.E.U., précité, note 21 ; Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears Ltd., précité, note 21. 

[34]    Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud, précité, note 22.

[35]    Voir les illustrations mentionnées par M. Jéréquel, Horaires et congés : les possibilités d’accommodements, Le journal, Barreau du Québec, janvier 2008, p.19

[36]   Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Pettas     (T.D.P.Q., 2005-04-12), SOQUIJ AZ-50311040, J.E. 2005-977

      (Paret c. Pettas, 2005 CanLII 14297 (QC T.D.P.), par. 39)

[37]  G. Audet, R. Bonhomme, C. Gascon, C. Proulx, Le congédiement en droit québécois, Éd. Y. Blais, 3 ème édition, vol. 1, p. 3-3/3-5 ,

[38]    Le contrat de travail daté du 18 février 2004 déposé sous P-4.

[39]    Malhab c. Métromédia C.M.R. Montréal inc. (C.A., 2003-03-24), SOQUIJ AZ-50167663, J.E. 2003-711, [2003] R.J.Q. 1011, [2003] R.R.A. 417 (rés.)

[40]    J.-L. BAUDOUIN et P. DESLAURIERS, La responsabilité civile, 6 éd. , Éd. Y. Blais, 2003, paragr. 350.

[41]    J.-L. BAUDOUIN et P. DESLAURIERS, id., paragr. 359.

[42]    Law c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), (C.S. Can., 1999-03-25), SOQUIJ AZ-50060907, J.E. 99-700, [1999] 1 R.C.S. 497, paragr. 53.

[43]    Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l'hôpital St-Ferdinand (C.S. Can., 1996-10-03), SOQUIJ AZ-96111110, J.E. 96-2256, D.T.E. 96T-1257, [1996] 3 R.C.S. 211, p. 254 et 256; (paragr. 99, 100 et 105).

[44]    Québec (Commission des droits de la personne et des droits de le jeunesse) c. Transport en commun La Québécoise inc., 2002 CanLII 9226 (QC T.D.P.), paragr. 31.

[45]    Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. 9113-0831 Québec inc. (Bronzage Évasion au soleil du monde), (T.D.P.Q., 2007-06-04), 2007 QCTDP 18, SOQUIJ AZ-50437782, J.E. 2007-1488, D.T.E. 2007T-655, [2007] R.J.D.T. 1289, le Tribunal a accordé 5 000 $ pour des propos dégradants et congédiement à cause d’un motif prohibé; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunes du Québec c. D.L., 2007 QCTDP 23 (CanLII), le Tribunal a accordé 6 000 $ à la victime d’un harcèlement sexuel qui a fait une profonde dépression et a mis quelques années à s’en remettre; Commission des droits de la personne du Québec c. Larouche* (T.D.P.Q., 1993-04-27), SOQUIJ AZ-93171014, J.E. 93-994, D.T.E. 93T-623 et Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Lavoie (T.D.P.Q., 1997-10-20), SOQUIJ AZ-97171040, D.T.E. 97T-1436, le Tribunal a accordé 5 000 $ pour l’harcèlement sexuel.

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