Diesel, s.p.a. c. Benisti Import-Export inc. |
2016 QCCS 1085 |
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COUR SUPÉRIEURE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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N° : |
500-17-060891-101 |
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DATE : |
Le 14 mars 2016 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
FLORENCE LUCAS, J.C.S. |
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DIESEL S.p.A. |
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DIESEL CANADA INC. |
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Demanderesses |
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c. |
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BENISTI IMPORT-EXPORT INC. |
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- et - |
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MAURICE BENISTI |
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Défendeurs |
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JUGEMENT |
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[1] En septembre 2010, Diesel S.p.A. et Diesel Canada inc. («Diesel») requiert l’émission d’une ordonnance en injonction provisoire, interlocutoire et permanente contre Benisti Import-Export Inc. (faisant affaires sous le nom «Point Zero») afin qu’elle cesse de fabriquer et commercialiser des jeans avec l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION[1], alléguant qu’elle crée ou est susceptible de créer de la confusion avec la marque de commerce DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN[2], utilisée depuis 1988 («Pocket Design»)[3] et déposée en 2005. Invoquant la contrefaçon et la concurrence déloyale, Diesel réclame des dommages compensatoires, punitifs et extrajudiciaires à Point Zero, solidairement avec son président fondateur Maurice Benisti («Benisti»).
[2] Provisoirement en
octobre 2010, et définitivement en janvier 2010, les défendeurs
s’engagent, sans admission, à cesser de fabriquer et vendre un «five pocket
denim jeans containing a tag placed diagonally from left to right across a coin
pocket which is attached to the jeans by at least one rivet».
Au procès, ils plaident essentiellement l’absence de risque de confusion entre
les deux marques. Plus particulièrement avant que la marque ne soit déposée,
ils allèguent l’absence de droits et d’achalandage liés à l’étiquette Pocket
Design utilisée par Diesel. Aussi, la demande en justice contre Benisti[4]
personnellement est vigoureusement contestée et présentée comme abusive selon
l’article
[3] Le Tribunal doit décider si l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION est susceptible de créer de la confusion et viole le droit exclusif de Diesel à l’emploi de la marque DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN[6] déposée le 15 février 2005, et si l’usage de l’étiquette Point Zero avant cette date constitue une pratique de concurrence déloyale et de commercialisation trompeuse[7]. Dans l’affirmative, il y a lieu :
Ø de déterminer si Benisti, président fondateur et administrateur unique de Point Zero[8], est personnellement responsable, le cas échéant;
Ø d’examiner la réclamation de Diesel en dommages compensatoires, punitifs et extrajudiciaires.
[4] Fondée en 1978, Diesel S.p.A. est une entreprise italienne de fabrication et commercialisation de vêtements pour hommes, femmes et enfants. Principalement axée sur les jeans, elle est devenue l’un des chefs de file mondiaux de l’industrie du denim et commercialise ses produits partout dans le monde[9].
[5] En 1983, elle pénètre le marché canadien et enregistre sa marque de commerce principale DIESEL pour des vêtements et accessoires pour hommes et femmes[10]. Elle crée une filiale canadienne, la demanderesse Diesel Canada Inc., le 10 octobre 2006[11].
[6] Dans les années 1980, Diesel développe une griffe pour ses jeans, en l’occurrence une étiquette blanche cousue en diagonale sur la petite poche avant droite, superposant la marque «Diesel Industry» sur «DENIM DIVISION», avec à l’extrême droite un logo rouge rectangulaire de la lettre «D» de Diesel («Pocket Design»)[12]. Elle l’utilise pour la première fois au Canada en juillet 1988 :
Extrait de la Pièce P-5 :
[7] Elle l’appose sur la quasi-totalité de ses styles de jeans, mais également sur les poches de d’autres types de vêtements pour distinguer visuellement tous les produits Diesel. Elle désire que cette étiquette devienne, pour Diesel, l’équivalent de la petite étiquette rouge de Levi's[13].
[8] Dans l’intervalle, en mars 1995, Maurice Benisti fonde à Montréal son entreprise BENISTI IMPORT-EXPORT INC. et lui donne le nom de Point Zero. Elle est aujourd’hui un leader canadien de vêtements chics, tendances et prêt-à-porter pour hommes, femmes et enfants. Point Zero compte une importante division de denim.
[9] Le 7 décembre 2004, Point Zero dépose une demande d’enregistrement pour une nouvelle marque POINT ZERO CO. DENIM DIVISION, et déclare que celle-ci est employée au Canada depuis le 20 juin 1999[14].
[10] Il s’agit d’une étiquette blanche cousue en diagonale sur la petite poche avant droite de ses jeans, superposant la marque «Point Zero Co.» sur les mots «DENIM DIVISION», avec à l’extrême droite un logo rouge rectangulaire de la lettre «P» de Point Zero :
Extrait de la Pièce P-10 :
[11] Cette étiquette se retrouve sur deux styles de jeans Point Zero seulement (M3304BL et M3304CL)[15] qui, selon Benisti, sont fabriqués au Québec en quantité très limitée et distribués au Canada.
[12] De façon concomitante, le 15 février 2005, Diesel dépose trois demandes d’enregistrement de marques de commerce, pour des étiquettes placées en diagonale sur la petite poche avant droite de ses jeans, dont notamment le Pocket Design représenté dans la demande d’enregistrement de la marque DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN[16], qu’elle déclare employer au Canada depuis juillet 1988.
[13] La demande d’enregistrement de la marque POINT ZERO CO. DENIM DIVISION est approuvée le 14 décembre 2006 et publiée au Journal des marques de commerce le 17 janvier 2007.
[14] Le 14 mars 2007, Diesel s’oppose à la demande de Point Zero au motif que la marque convoitée crée de la confusion avec les marques de commerce Diesel, notamment la marque DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN antérieurement employée et faisant l’objet d’une demande d’enregistrement au Canada. Point Zero reçoit la déclaration d’opposition en juin 2007 et des déclarations assermentées supplémentaires en juin 2008[17].
[15] Point Zero décide de ne pas produire de contre-déclaration et de preuve dans le délai prescrit[18]. Par conséquent, le 7 avril 2009, sa demande est réputée abandonnée. Néanmoins, elle continue de commercialiser les deux styles de jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION. Benisti affirme que la marque a été approuvée par le bureau des marques le 14 décembre 2006[19] et considère que cela lui donne le droit de continuer.
[16] La marque DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN est admise le 14 juillet 2006 et devient officiellement une marque de commerce déposée le 28 novembre 2007.
[17] Diesel S.p.A est titulaire de toutes les marques de commerce enregistrées au Canada[20], dont sa filiale Diesel Canada Inc. est licenciée[21].
[18] À l’automne 2009, Diesel connaît une période d’expansion où elle prend de nouvelles initiatives, et notamment développe une relation d’affaires avec la grande chaîne La Baie d’Hudson, pour ouvrir ses propres boutiques Diesel à l’intérieur même de ces magasins.
[19] Au cours de l’été 2010, un directeur de comptes de Toronto communique avec le siège social de Diesel à Montréal et mentionne que Point Zero commercialise des jeans avec une étiquette blanche cousue en diagonale sur la petite poche avant droite, qu’il considère être une réplique de celle de Diesel[22].
[20] Le 5 août 2010, les procureurs de Diesel transmettent une lettre de mise en demeure à Point Zero[23] et mentionnent être informés de la distribution au Canada, et plus particulièrement dans le Grand Montréal, de vêtements utilisant une étiquette similaire au Pocket Design, protégée par la marque déposée DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN. S’agissant de l’étiquette de la demande de marque POINT ZERO CO. DENIM DIVISION, Diesel déplore que Point Zero l’ait utilisée malgré l’opposition en 2006 et après son abandon volontaire en 2009. Les procureurs dénoncent cette utilisation qu’ils considèrent être une violation des marques de commerce de Diesel et un acte de concurrence déloyale. Ils exigent de Point Zero qu’elle cesse de fabriquer, distribuer et vendre tout vêtement contrefaisant les marques de Diesel.
[21] Le 18 août 2010, les procureurs de Point Zero nient la commercialisation à Montréal des produits visés par la mise en demeure, et de ce fait, une quelconque contrefaçon sur ce territoire. En tout état de cause, ils soutiennent que tous les produits de leur cliente affichent clairement la marque POINT ZERO et qu’aucun risque de confusion ne peut exister entre les produits des deux parties sur le marché[24].
[22] Le 17 août 2010, Diesel intente le présent recours contre Point Zero et Benisti, requière l’émission d’une injonction provisoire, interlocutoire et permanente visant à les empêcher de fabriquer et commercialiser les jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION.
[23] Le 21 septembre 2010, au moment de l’audition de l’injonction provisoire, les défendeurs signent un consentement aux termes duquel ils s’engagent à cesser de fabriquer et vendre le «five pocket denim jeans containing a tag placed diagonally from left to right across a coin pocket which is attached to the jeans by at least one rivet[25].»
[24] En janvier 2010, les parties règlent en partie leur litige, alors que les défendeurs prennent l’engagement définitif, sans admission, de cesser et de s’abstenir de fabriquer et vendre les jeans visés par l’injonction[26], avec l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION[27], qu’il remplace par un logo bleu circulaire de la lettre «P» de Point Zero.
[25] Diesel soumet que le Pocket Design est utilisé au Canada depuis juillet 1988, ce qui n’est pas contesté. La marque de commerce afférente, intitulée DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN, est déposée depuis le 15 février 2005.
[26] La date de dépôt est importante, puisque c'est elle qui permet de déterminer le droit à l'enregistrement et au recours en contrefaçon[28]. Avant cette date, la protection de la marque non enregistrée est sanctionnée par la concurrence déloyale[29], qui interdit à quiconque de faire passer ses produits pour ceux d’une autre personne.
[27] Les jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION ont vraisemblablement été fabriqués et commercialisés avant et après le 15 février 2005, le Tribunal se doit d’analyser successivement les conditions afférentes aux deux recours.
[28] L’enregistrement d’une marque de commerce donne à son propriétaire le droit exclusif à l’emploi de celle-ci dans tout le Canada[30]. La violation existe lorsqu’une personne, qui n’est pas autorisée à employer la marque déposée, fabrique, vend, distribue ou annonce «des produits ou services en liaison avec une marque de commerce ou un nom commercial créant de la confusion[31].»
[29] Dans l’arrêt Masterpiece Inc. c. Alavida Lifestyles Inc.[32], la Cour suprême du Canada rappelle le critère applicable en matière de confusion :
[39] La
question au cœur du présent litige est de savoir si la marque de commerce
d’Alavida et les marques de commerce ou le nom commercial de Masterpiece Inc.
créaient de la confusion au sens de l’art.
[40] Il est utile, en
commençant l’analyse relative à la confusion, de se rappeler le critère prévu
dans la Loi.
Dans Veuve
Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée,
Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue [de la marque], alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce [antérieures] et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques.
Le juge Binnie renvoie avec
approbation aux propos tenus par le juge Pigeon dans Benson
& Hedges (Canada) Ltd. c. St. Regis Tobacco Corp.,
[Nos soulignés.]
[30] Il incombe à Diesel de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que la confusion est susceptible de survenir entre l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION et sa marque déposée DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN.
[31] Pour ce faire, l’article 6 L.m.c. énonce les facteurs applicables :
(5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris :
a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;
b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;
c) le genre de produits, services ou entreprises;
d) la nature du commerce;
e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent.
[32] Pour Diesel, la ressemblance entre l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION et la marque DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN, y compris le Pocket Design, apparaît évidente, indéniable et trompeuse. Selon elle, aucune autre circonstance a pour effet de réduire la probabilité de confusion, au point qu’il y ait peu de risque qu’elle survienne[33].
[33] En défense, Point Zero soumet que la présence des mots POINT ZERO CO, anéantit toute probabilité de confusion puisque le consommateur réalise immédiatement que les produits ne sont pas ceux de Diesel. Elle ajoute que les jeans, mis en marché en magasin sous la bannière POINT ZERO et avec plusieurs de ses étiquettes, rendant toute confusion avec Diesel impossible. Enfin, elle soumet que jusqu’en 2010, aucun incident de confusion n’a été mis en preuve, ce qui démontre, selon elle, l’absence de confusion entre les étiquettes.
[34] Premièrement, il ne fait aucun doute pour le Tribunal qu’il existe une forte ressemblance entre l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION et le Pocket Design, protégé par la marque déposée DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN.
[35] Le Tribunal précise que la marque déposée est décrite sous la forme d’un design, appliqué sur la petite poche avant du jeans, avec des mots et un logo que Diesel a le droit d’employer sous les couleurs de son choix[34]. Le Pocket Design est l’une des représentations possibles de sa marque, que Diesel emploie depuis 1988.
[36] À l’évidence, l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION apparaît quasi-identique à celle du Pocket Design :
Extrait de la Pièce P-14 :
[37] Les mêmes couleurs, la même configuration des mots et logos, le même positionnement sur la 5e poche du jeans, la même idée est véhiculée par ces étiquettes. Il suffit de remplacer «Diesel Industry» par «Point Zero Co.», et de substituer le logo rouge rectangulaire de la lettre «D» de Diesel par «P» de Point Zero. Certes, il y a une différence dans l’inclinaison de l’étiquette, cependant très légère et peu significative aux yeux du Tribunal.
[38] Aussi, on doit conclure que cette forte ressemblance persiste dans le deuxième style de jeans commercialisé par Point Zero, malgré que l’étiquette ait été cousue différemment, décalée vers la droite et réduite. Ces différences deviennent perceptibles suite à une analyse minutieuse et/ou comparative, mais le Tribunal considère qu’elles échappent nécessairement au consommateur ordinaire plutôt pressé :
Extrait de la Pièce P-10 :
[39] Deuxièmement, les défendeurs plaident que la marque POINT ZERO CO. suffit pour dissiper toute confusion. Le Tribunal ne partage pas ce point de vue.
[40] En droit, la proposition de Point Zero se heurte à des principes importants énoncés par la Cour suprême dans Masterpiece, soit :
[62] La
ressemblance est définie comme étant le rapport entre des objets de même espèce
présentant des éléments identiques. Cette définition comprend l’idée
de similitude; voir la définition de « ressemblance » dans Le Nouveau Petit Robert : Dictionnaire
alphabétique et analogique de la langue française (2010), p. 2220. Le mot
« degré de ressemblance » à l’al.
(…)
[83] Dans l’analyse
d’une marque de commerce, ni l’expert, ni le tribunal ne doit considérer chaque
partie de celle-ci séparément des autres éléments. Il convient plutôt
d’examiner la marque telle que le consommateur la voit, à savoir comme un tout,
et sur la base d’une première impression. Dans Ultravite
Laboratories Ltd. c. Whitehall Laboratories Ltd.,
[84] Toutefois, examiner la marque de commerce dans son ensemble ne veut pas dire qu’il faut faire abstraction d’une composante dominante de celle - ci qui aurait une incidence sur l’impression générale du consommateur moyen : voir les motifs de la juge Arden dans esure Insurance Ltd. c. Direct Line Insurance plc, 2008 EWCA Civ 842, [2008] R.P.C. 34, par. 45. Il en est ainsi parce que même si le consommateur regarde la marque dans son ensemble, il se peut qu’un certain aspect de celle-ci soit particulièrement frappant et qu’il en constitue l’élément le plus distinctif. Il en sera ainsi parce que cet aspect est la partie la plus distinctive de l’ensemble de la marque de commerce. En l’espèce, contrairement à l’expert, j’estime que la composante la plus distinctive et dominante de chacune des marques en cause est le mot « Masterpiece », car il en traduit le contenu et l’aspect le plus frappant. Le mot « Living » est fade par comparaison.
[Nos soulignés.]
[41] D’emblée, Point Zero suggère que le consommateur porte une attention particulière aux noms et aux mots, plutôt que d’observer l’étiquette comme un tout, sur la base de la première impression. Elle force un examen minutieux des étiquettes concurrentes, une comparaison côte à côte, ce que la Cour suprême du Canada nous proscrit de faire[35].
[42] Le Tribunal considère que ce qui est frappant et unique dans la marque DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN, ce ne sont pas les mots, mais bien le design d’une étiquette cousue en diagonale, positionnée sur la 5e poche avant du jeans, dessinée selon une configuration bien précise, soit deux noms superposés et un logo à l’extrême droite. Ce design est la composante dominante de la marque.
[43] Le Tribunal conclut que le «consommateur ordinaire plutôt pressé» retiendra globalement le design de l’étiquette, davantage que le détail des mots inscrits.
[44] Dans le cadre de l’analyse sur la confusion, l’arrêt Masterpiece s’exprime ainsi :
[104] Sans reprendre toutes les constatations susmentionnées, il ne fait aucun doute qu’il existe une forte ressemblance entre la marque de commerce de Masterpiece Inc., « Masterpiece the Art of Living », et celle d’Alavida, « Masterpiece Living ». Selon moi, le consommateur ordinaire qui observerait la seconde marque et ne posséderait qu’un vague souvenir de la première confondrait probablement la source des services liés à la marque de commerce d’Alavida avec celle des services liés à la marque de commerce de Masterpiece Inc. et se dirait que ces services émanent d’une seule et même source. Il s’agit maintenant de se demander si quelque autre circonstance de l’espèce a pour effet de réduire cette probabilité de confusion au point qu’il y ait peu de risque qu’elle survienne.
[Nos soulignés.]
[45] Ayant un vague souvenir du Pocket Design en l’instance, le Tribunal demeure convaincu que le consommateur risque de confondre les jeans des deux concurrents et penser qu’ils émanent d’une seule et même source. Il importe peu que le consommateur sache que le jeans origine de Diesel ou Point Zero.
[46] En effet, rappelons qu’il n’est pas nécessaire que les consommateurs connaissent l’identité de la source d’où originent les marchandises associées à la marque[36]. Dès lors que les consommateurs sont guidés vers une source qui n’est pas la bonne, la marque de commerce ne remplit pas sa fonction et crée de la confusion[37].
[47] Le Tribunal conclut que les deux étiquettes, dont celle de Diesel est protégée par un enregistrement, comportent certaines différences, mais véhicule la même idée[38] par leurs designs identiques et uniques, ce qui engendre une probabilité de confusion.
[48] Troisièmement, les défendeurs s’inspirent de la dissidence dans l’affaire T-Rex Véhicules Inc. c. 6155235 Inc.[39] et soumettent que la mise en marché des jeans en magasin, soit le présentoir et les nombreuses étiquettes POINT ZERO apposées sur ses produits, informe aussitôt le consommateur que ce ne sont pas des jeans DIESEL.
[49] D’une part, la majorité de la Cour d’appel, toujours dans T-Rex Véhicules Inc., ne se rallie pas à cet argument et considère plutôt qu’il ne permet pas de conclure à l’absence de confusion chez le consommateur[40]. Un argument de mise en marché a également été soulevé devant la Cour d’appel dans l’affaire Boulangerie St-Méthode Inc. c. Boulangerie Canada Bread Ltée, en matière de commercialisation trompeuse, et été jugé sans mérite. La Cour y rappelle que le juge de première instance doit se demander, dans les faits, «si ces consommateurs occasionnels ordinaires plutôt pressés sont susceptibles de se méprendre sur l’origine des marchandises ou des services[41].»
[50] En effet, il faut garder à l’esprit que le consommateur, ayant un vague souvenir de la marque de Diesel, n’a pas à connaître et ne se souvient pas nécessairement de l’identité de la source[42], soit que ce sont des jeans DIESEL. Comme le souligne la Cour suprême dans l’arrêt Ciba-Geigy Canada Ltd. c. Apotex Inc., «le nom du produit et du fabricant lui sont peut-être inconnus mais il n’en a pas besoin pour reconnaître ce qu’il veut se procurer.» Les caractéristiques extérieures sont le moyen de reconnaître le produit.[43]
[51] Ainsi, placé devant le présentoir de POINT ZERO, le consommateur est donc susceptible de se méprendre et de penser que ces jeans «émanent d’une seule et même source[44].»
[52] Enfin, les défendeurs plaident l’absence d’une preuve de confusion réelle et la coexistence des deux marques pendant 10 ans (1999-2004).
[53] La Cour suprême dans l’arrêt Mattel Inc. c. 3894207 Canada Inc.[45] nous rappelle que :
55 La preuve d’une confusion réelle serait une « circonstance de l’espèce » pertinente, mais elle n’est pas nécessaire (Christian Dior, par. 19), même s’il est démontré que les marques de commerce ont été exploitées dans la même région pendant dix ans : Mr. Submarine Ltd. c. Amandista Investments Ltd., [1987] A.C.F. no 1123 (QL) (C.A.). Comme nous le verrons plus loin, une conclusion défavorable peut toutefois être tirée de l’absence d’une telle preuve dans le cas où elle pourrait facilement être obtenue si l’allégation de probabilité de confusion était justifiée.
(…)
89 Il ne fait aucun doute qu’en principe, la marque de l’appelante est « célèbre » alors que celle dont l’intimée demande l’enregistrement ne l’est pas. Or, la question est de savoir s’il existe une probabilité de confusion (ou s’il y a eu confusion) sur le marché où les deux peuvent exercer leurs activités. À cet égard, la preuve d’une confusion réelle, même si elle n’était pas nécessaire, aurait été utile (ConAgra, Inc. c. McCain Foods Ltd., [2001] A.C.F. no 1331 (QL), 2001 CFPI 963; Matsushita Electric Industrial Co. c. Panavision, Inc., [1992] A.C.F. no 19 (QL) (1re inst.), mais elle n’a pas été produite. Le juge Décary a fait remarquer dans Christian Dior, par. 19 :
Bien que la question à laquelle il faut répondre soit celle de savoir s’il existe un « risque de confusion » et non une « confusion effective » ou « des cas concrets de confusion », l’absence de « confusion effective » est un facteur auquel les tribunaux accordent de l’importance lorsqu’ils se prononcent sur le « risque de confusion ». Une inférence négative peut être tirée lorsque la preuve démontre que l’utilisation simultanée des deux marques est significative et que l’opposant n’a soumis aucun élément de preuve tendant à démontrer l’existence d’une confusion.
[Nos soulignés.]
[54] En l’instance, le Tribunal souligne qu’il ne peut établir précisément à quelle date survient la première commercialisation des jeans étiquetés POINT ZERO CO. DENIM DIVISION[46].
[55] Benisti prétend que l’entreprise a fabriqué 10 000 exemplaires de ce jeans, dont elle a seulement vendu 4 340 exemplaires, sur une période de plus de 10 ans, de 1999 à 2010, non ventilée. Ces jeans ne se retrouvent dans aucune des publicités déposées en preuve par Point Zero[47]. Le Tribunal retient que la commercialisation de ces jeans n’apparaît pas significative, mais qu’elle est demeurée plutôt limitée et marginale.
[56] Le Tribunal conclut que dans les circonstances, il ne peut tirer aucune inférence utile de l’absence de preuve de confusion réelle avant 2010.
[57] Somme toute, la prise en compte de toutes les circonstances de l’espèce amène le Tribunal à conclure qu’il existe une probabilité de confusion chez le consommateur ordinaire, et par conséquent, que l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION viole le droit exclusif de Diesel à l’emploi de la marque de commerce DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN depuis la date de dépôt de la demande d’enregistrement, le 15 février 2005.
[58] D’emblée, les droits relatifs à un signe distinctif, une marque de commerce appartient à la personne qui en fait l’usage la première[48].
[59] En l’instance, la preuve non contestée révèle que Diesel utilise en premier le Pocket Design, dès juillet 1988[49], soit près de 17 ans avant sa demande d’enregistrement en février 2005.
[60] Quant à la date du premier emploi de la marque POINT ZERO CO. DENIM DIVISION, déclarée le 20 juin 1999, elle s’avère contestée par Diesel.
[61] Point Zero s’en remet essentiellement à la déclaration faite en 2004 dans la demande d’enregistrement de la marque POINT ZERO CO. DENIM DIVISION.
[62] La doctrine nous rappelle que les allégués d’emploi et la date déclarée sont présumés véridiques aux fins de la demande d’enregistrement et de l’examen. Le requérant n’a alors pas à préciser l’étendue de son emploi ou le justifier de quelque façon que ce soit. Toutefois, il doit être en mesure de corroborer cette date si requise dans le cadre d’une procédure d’opposition, notamment[50].
[63] Le Tribunal considère que la déclaration d’emploi de Point Zero dans la demande d’enregistrement, faite sans documents apportant une preuve, ne suffit pas aux fins du présent recours. Compte tenu de l’opposition en 2007 et de l’abandon de la demande en 2009, et considérant que la date d’emploi n’est toujours pas admise au procès, Point Zero a le fardeau de faire une preuve prépondérante du premier emploi déclaré en 1999.
[64] Or, les seuls éléments de preuve disponibles de l’existence des jeans et de leur commercialisation datent de 2005 à 2010.
[65] D’abord en 2005, l’agent de marque de commerce de Point Zero témoigne avoir déposé une photo du jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION, à la demande du registraire d’un spécimen de la marque[51].
[66] Ensuite, Point Zero produit les catalogues 2007 à 2009 seulement, qui présentent les deux styles M3304BL et M3304CL de ce jeans[52], ainsi que des factures de distributeurs pour les années 2007 à 2011[53].
[67] Autrement, la publicité déposée ne contient aucune photographie du jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION[54]. Quant à Benisti, son témoignage sur ce point est imprécis et non concluant. Notamment, il répète au moins à deux moments distincts pendant son témoignage devant le Tribunal que les jeans en litige ont coexisté pendant 5 ans, faisant référence aux années 2005 à 2010. Il mentionne ensuite en contre-interrogatoire une coexistence de plus de 20 ans, faisant référence aux années 1988 à 2010, alors que Point Zero n’existe que depuis 1995 et qu’il prétend avoir créé l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION à la fin des années 1990.
[68] Point Zéro plaide que le jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION a été lancé en 1999, ce qui expliquerait la déclaration d’emploi dans la demande, mais n’a pas bien fonctionné, de sorte qu’il est retiré et remis sur le marché en 2004. Elle conclut que ce sont «des marchandises qui ont vraiment bien marché entre 2007, 2008, 2009[55].»
[69] Somme toute, la date du 20 juin 1999 n’est corroborée par aucun document, ni aucune preuve probante, mais surtout Point Zéro admet que la commercialisation du jean POINT ZERO CO. DENIM DIVISION a été interrompue jusqu’en 2004, moment où la fabrication et la commercialisation des jeans reprennent et se concrétisent. Le Tribunal analyse donc la question de la concurrence déloyale en faisant les nuances appropriées, lorsque nécessaire.
[70] Il est bien établi qu’un signe distinctif peut faire l’objet d’une protection en vertu de la L.m.c., même sans enregistrement[56]. L’article 7 L.m.c. renferme les règles les plus importantes applicables à la concurrence déloyale, et notamment à l’imitation frauduleuse d’une marque non déposée[57] :
7. Nul ne peut :
[…]
b) appeler l’attention du public sur ses marchandises, ses services ou son entreprise de manière à causer ou à vraisemblablement causer de la confusion au Canada, lorsqu’il a commencé à y appeler ainsi l’attention, entre ses marchandises, ses services ou son entreprise et ceux d’un autre;
c) faire passer d’autres marchandises ou services pour ceux qui sont commandés ou demandés;
[71] Au Québec, les actions pour concurrence déloyale sont instruites en vertu, non seulement de la loi fédérale, mais également des principes généraux de la responsabilité civile délictuelle sous l’article 1457 du Code civil du Québec[58].
[72] Le droit en matière de commercialisation trompeuse se résume par un bref énoncé général : «il est interdit à quiconque de faire passer ses produits pour ceux d'une autre personne[59] .»
[73] La Cour suprême dans l’arrêt Ciba-Geigy résume les trois critères établis pour réussir une action en commercialisation trompeuse (passing off), soit : «l'existence d'un achalandage, la déception du public due à la représentation trompeuse et des dommages actuels ou possibles pour le demandeur.[60] »
[74] L’action pour commercialisation trompeuse protège l’achalandage rattaché aux marques de commerce et a pour objet d’empêcher que l’emploi de marques de commerce sème la confusion chez les consommateurs.[61]
[75] L’arrêt Boulangerie St-Méthode inc.[62] confirme le test à deux volets pour déterminer l’existence d’un achalandage, soit :
[70] D’abord, le Tribunal doit examiner les facteurs qui permettent de déterminer si l’entreprise du demandeur comporte un achalandage, une réputation ou une notoriété propre. Il peut s’agir de la durée d’utilisation d’une marque, de la publicité faite de façon régulière et des dépenses en activité de promotion, du nombre de points de service, de l’omniprésence du produit sur le marché, des prix d’excellence, etc. Le Tribunal doit ensuite déterminer si le demandeur a établi que le public reconnaît son produit d’après l’élément imité[63].
[Nos soulignés.]
[76] Premièrement, la marque de la partie demanderesse doit être suffisamment bien connue pour avoir acquis un achalandage protégeable. Elle n’a pas besoin d’être célèbre, seulement connue du public[64].
[77] Pour établir l’existence d’un achalandage, Diesel fait valoir qu’à travers 30 ans d’histoire et de commercialisation mondiale, elle s’est taillée une place parmi les chefs de file de l’industrie du denim et que, parmi ses marques de commerce, le Pocket Design est la griffe, le signe distinctif apposé sur ses jeans et vêtements depuis 1988, pour les distinguer de ses concurrents[65].
[78] La preuve démontre un emploi continu et uniforme du Pocket Design dans le marché, qui n’a jamais été modifié depuis 1988[66]. Diesel l’utilise dès lors sur la quasi-totalité des styles existants de jeans produits et vendus, toutes saisons confondues[67].
[79] En 2007, les ventes annuelles de Diesel au Canada s’évaluent à vingt-huit millions cinq cent mille de dollars et en 2008, à trente-cinq millions de dollars[68]. Elle fait valoir que les ventes annuelles de jeans représentent toujours une part importante du chiffre d'affaires de la société[69].
[80] Le budget de publicité annuel de Diesel se situe entre 5% et 7%, soit d’un million neuf cent mille dollars et à deux millions quatre cent mille dollars en 2008, publicité dans laquelle on représente le jeans Diesel avec le Pocket Design[70].
[81] Diesel ne met pas directement en preuve ses chiffres pour les années 1999 à 2005. Point Zéro lui reproche et suggère de conclure à l’absence de preuve d’achalandage pour cette période.
[82] Tel que discuté précédemment, le Tribunal rappelle que la preuve de la commercialisation des jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION n’est pas concluante pour cette période, si ce n’est que Point Zéro admet qu’elle est fructueuse qu’à partir de la reprise en 2004 seulement[71]. D’ailleurs, Point Zéro n’a jamais ventilé ses ventes et revenus en fonction des deux périodes de commercialisation, soit en 1999 et à partir de 2004.
[83] Or, pour atteindre des chiffres d’affaires aussi importants en 2007 et 2008, le Tribunal peut raisonnablement inférer que les jeans Pocket Design étaient connus du public depuis plusieurs années, et de toute évidence depuis 2004.
[84] Tout bien considéré, le Tribunal juge que l’ensemble des facteurs mis en preuve par Diesel établit une preuve probante d’achalandage à l’époque pertinente à son recours en concurrence déloyale et aux dommages qui découlent de la commercialisation du jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION.
[85] Deuxièmement, Diesel fait valoir le caractère distinctif du Pocket Design, qu’elle considère unique dans l’industrie du jeans, et qu’elle compare à la petite étiquette rouge brodée sur la poche arrière des jeans Levi's.
[86] Point Zero conteste le caractère distinctif du Pocket Design et soumet que l’application d’une marque de commerce sur la petite poche avant droite du jeans est une chose commune dans l’industrie du jeans. Elle dépose en preuve des photographies de designs utilisés par d’autres compagnies sur la même poche avant droite d’un jeans[72].
[87] Dans l’industrie du vêtement, il est pratique courante pour un manufacturier de revendiquer la protection d’un «design» pour se distinguer; rappelons notamment les surpiqûres apparaissant sur les poches arrière d’un jeans[73]. L’idée de surpiquer une poche, comme celle d’apposer une marque sur la petite poche avant d’un jeans, ne fait pas l’objet d’une protection. C’est le signe distinctif utilisé qui est protégé.
[88] Le Tribunal constate que d’autres manufacturiers ont effectivement proposé des designs sur la poche avant droite du jeans, mais qu’aucun des exemples rapportés ne ressemble de près ou de loin au Pocket Design de Diesel. Aucun de ces designs ne s’apparente à l’étiquette apposée en diagonale sur la pochette avant d’un jeans, aucun ne se rapproche des couleurs, du graphisme, du format et même du logo utilisés par Diesel pour son Pocket Design.
[89] En somme, le Tribunal considère que ces autres designs font ressortir le caractère original et distinctif du Pocket Design de Diesel par rapport à ce que l’on retrouve sur le marché.
[90] De plus, ces autres designs confortent la prétention de Diesel à l’effet que l’étiquette de Point Zero est volontairement calquée sur le Pocket Design et n’est pas le fruit du hasard, contrairement à ce que laisse entendre le président de Point Zero.
[91] En effet, sauf pour les noms Diesel Industry, remplacés par Point Zero Co., la présentation des deux étiquettes apparaît identique, dont la description visuelle se résume dans les deux cas à une étiquette blanche apposée en diagonale sur la petite poche avant droite du jeans, portant les noms des entreprises en grands caractères gras noirs, avec la première lettre du deuxième nom («I» ou «Z») qui s’allonge pour rejoindre dessous le milieu des mêmes mots «DENIM DIVISION» en majuscules, en plus petits caractères rouges, suivis à droite d’un logo rouge rectangulaire, dans un cas avec la lettre «D» de Diesel, dans l’autre la lettre «P»[74] de Point Zero.
[92] Pour le Tribunal, il ne peut s’agir d'une simple coïncidence. Cette conviction découle non seulement de la ressemblance évidente des deux étiquettes, mais également de la preuve et des explications données par Point Zero, qui ne le convainquent pas, sur la balance des probabilités, du contraire.
[93] En effet, Benisti affirme s’être inspiré de la marque Coca Cola pour demander à ses concepteurs de créer l’étiquette Point Zero, mais sans faire de liens clairs et convaincants entre les deux. Cette prétendue inspiration n’explique pas et Point Zero n’expliquera jamais :
· le choix quasi-identique du format de l’étiquette et de son positionnement;
· les couleurs identiques de l’étiquette, des mots et logos;
· l’idée d’allonger la lettre «Z» de Point Zero, jamais exploitée ailleurs dans la publicité déposée en preuve, selon un échantillonnage imposant[75];
· le même constat pour le logo rectangulaire rouge du «P» de Point Zero; et
· le choix de l’expression «DENIM DIVISION» (bien que descriptive et non protégée en soi) utilisée à l’identique dans l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION, soit en lettres majuscules rouges dans les deux cas. Point Zero ne l’utilise nulle part ailleurs dans sa publicité[76] ou ses catalogues[77], puisqu’elle utilise «Denim», «Point Zero Denim» ou «Denim Dimension», seulement.
[94] Le Tribunal détermine que Benisti ou les concepteurs de Point Zero ne peuvent pas avoir conçu une étiquette dont les caractéristiques sont à ce point similaires sans avoir eu accès au Pocket Design, commercialisé au Canada par Diesel depuis 1988. Il fallait une intention de le copier.
[95] Le Tribunal conclut de l’ensemble de la preuve que Point Zero a calqué le Pocket Design.
[96] La Cour d’appel de l’Ontario[78] énonce une présomption applicable en matière de passing off, retenue par la Cour suprême de la Colombie Britannique[79], à l’effet que :
If he imitates the other’s trademark or tradename knowingly and acts in other ways to convey the impression that his business is associated with the other, the inference may reasonably be drawn that there are prospective customers to be misled.
[97] D’ailleurs, à la lumière de la jurisprudence ontarienne, l’arrêt T-Rex retient que :
[51] Le demandeur doit donc tout d'abord établir que son produit avait acquis une notoriété propre quand le produit imitant le sien a fait son entrée dans le marché. En somme, il doit établir que les consommateurs percevaient les caractéristiques du produit comme une indication de son origine. La preuve que le défendeur a intentionnellement copié l'habillage du produit fait présumer de son caractère distinctif.
[Nos soulignés.]
[98] Récemment, la Cour d’appel dans Boulangerie St-Méthode inc. confirme que «la copie intentionnelle du symbole» fait partie des critères qui permettent de conclure qu’un symbole est distinctif.
[99] En l’occurrence, l’imitation du Pocket Design par Point Zero constitue certainement un autre indice de son caractère distinctif et que cette marque était connue du public, pour que Point Zero s’y intéresse.
[100] Au surplus, contrairement à ce que laisse entendre Point Zero, rien ne permet de conclure que l’utilisation de l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION pendant plusieurs années aurait fait perdre au Pocket Design son caractère distinctif[80].
[101] Finalement, Point Zero déplore l’absence d’une expertise pour mettre en preuve l’achalandage lié au Pocket Design.
[102] Toujours dans l’arrêt Boulangerie St-Méthode inc., la Cour d’appel précise les principes applicables à l’analyse de la preuve faite sur l’aspect distinctif d’un produit donné :
[41] Ces principes valent également ici. L'aspect distinctif d'un produit donné, de son emballage, doit être évalué selon la perception d'un consommateur ordinaire, d'une clientèle moyenne, sans qu'intervienne nécessairement un expert. Celui-ci ne peut pas, quoi qu'il arrive, avoir le dernier mot sur une détermination qui est du ressort du juge qui, après avoir soupesé la preuve, y compris la preuve par expert, décide la question selon la balance des probabilités.
[42] D'ailleurs, la documentation juridique foisonne d'information sur l'aspect distinctif d'une marque de commerce. Il ne s'agit pas là d'un domaine hautement technique et inconnu du juge. Plusieurs critères permettent de conclure qu'un symbole est distinctif malgré une apparence descriptive. Mentionnons par exemple la durée d'utilisation du symbole, la preuve par sondage, le niveau des ventes, la publicité et la copie intentionnelle du symbole. La plupart de ces éléments ne requièrent pas d'expertise. De surcroît, bien qu'une expertise puisse éclairer le tribunal, le juge « reste l'arbitre final et n'est pas lié par le témoignage des experts ».
[43] Dans un litige portant sur le droit d'auteur, notre Cour rappelait, dernièrement, que « le critère de nécessité doit être examiné au regard des circonstances de l'espèce tout en s'assurant que ce témoignage ne détourne pas l'attention du tribunal de l'analyse à laquelle il doit procéder ».
[44] En somme, le juge n'a pas erré en décidant du caractère distinctif de la pastille sans une preuve par expert valable, vu le rejet de l'expertise Corbin. Une telle expertise ne répondait pas au critère de la nécessité d'aider le juge des faits dans son examen de la perception d'un consommateur ordinaire. Le juge n'a pas erré davantage quant au fardeau de la preuve et la distinction que tente d'apporter l'appelante à ce sujet ne tient pas la route.
[Nos soulignés.]
[103] En l’occurrence, vu la preuve offerte par Diesel, le Tribunal considère qu’une expertise n’était pas nécessaire pour établir le caractère distinctif du Pocket Design pour établir l’achalandage de Diesel entre 1999 et 2004.
[104] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal estime que le Pocket Design, en tout temps pertinent aux présentes, était suffisamment connu et distinctif pour avoir acquis un achalandage protégeable, et par conséquent, conclut que le premier élément du fardeau de preuve a été établi de façon prépondérante.
[105] Le deuxième élément à prouver dans le cadre d’une action pour commercialisation trompeuse «est la fausse déclaration ou représentation trompeuse qui sème la confusion dans le public[81].» Contrairement à la contrefaçon[82], le Tribunal doit «examiner sous ce chapitre le comportement de la défenderesse afin d’y déceler les éléments qui engageraient sa responsabilité, c’est-à-dire à tout le moins, la fausse déclaration faite par négligence ou avec insouciance et qui cause de la confusion[83].»
[106] Point Zero ne pouvait ignorer l’existence du Pocket Design et prétendre qu’elle fabriquait et commercialisait de bonne foi son étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION. Rappelons qu’elle n’apporte aucune explication satisfaisante pour justifier cette copie.
[107] Ainsi, il apparaît clair que soit par insouciance, soit pour délibérément confondre le consommateur, Point Zero a fabriqué et commercialisé des jeans avec l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION qui constitue une copie quasi-identique du Pocket Design de Diesel et sème la confusion en vertu des facteurs de l’article 6 L.c.m., déjà jugée en matière de contrefaçon, et dont les motifs et conclusions s’avèrent applicables en matière de concurrence déloyale. Ce faisant, Point Zero engage sa responsabilité.
[108] Le Tribunal rappelle comment doit s’établir la preuve des dommages en matière de commercialisation trompeuse en reprenant les propos de la Cour d’appel dans l’arrêt Boulangerie St-Méthode[84] à cet égard :
[61] L'intimée plaide que malgré la croissance constante de ses ventes, celle-ci a ralenti pendant la campagne de l'appelante. Indépendamment de cela, la preuve d'un dommage actuel et quantifiable ne constituait pas un préalable à la réussite du recours de l'intimée. Notre Cour a été très claire à ce sujet :
[42] Dans Ciba-Geigy, précité, la Cour suprême parle de « dommages actuels ou possibles pour le demandeur », citation qui est reprise dans Kirkbi AG. Dans Kisber & Co., précité, la majorité, sous la plume de la juge Rousseau-Houle, écrit que le demandeur, aux fins de son action en imitation trompeuse, doit établir qu’« il subit ou est susceptible de subir des dommages à cause de la croyance erronée engendrée par la représentation trompeuse du défendeur ».
[43 Le juge de première instance a conclu à l’existence d’un préjudice probable.
[44] La preuve permet en effet de conclure de façon prépondérante que le risque de préjudice, en raison de la confusion, est bien réel. Il est vrai que l’intimée, au moment où elle intente son action en injonction, n’a pas encore subi de préjudice pécuniaire quantifiable (ses affaires sont même florissantes), mais l’on comprend que ce ne sera plus le cas si on laisse les appelantes usurper son nom ou continuer de profiter de la confusion engendrée par l’identité du nom sous lequel elles commercialisent toutes trois leurs services.
[62] Le risque de préjudice est tout aussi présent dans notre affaire.
[Soulignement ajouté] [Références omises]
[109] La démonstration d’une probabilité de dommages est suffisante, et celle-ci découle en l’espèce de la preuve de la commercialisation d’une étiquette trompeuse sur les jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION vendus selon Point Zero à 4 340 d’exemplaires.
* * *
[110] Somme toute, Diesel remplit les trois conditions nécessaires à l’existence et la détermination d’une concurrence déloyale de la part de Point Zero avant l’enregistrement de la marque de commerce en 2005. La preuve permet de conclure au risque de confusion entre le Pocket Design, protégé par la marque déposée DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN, et l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION, ce qui confirme la violation de la marque depuis le 15 février 2005.
[111] Diesel plaide que Benisti, seul et unique administrateur et actionnaire de Point Zero, est son alter ego et qu’il participe activement à la faute extracontractuelle de la compagnie. Celui-ci soutient que ses agissements ne permettent pas de conclure qu’il commet une faute lourde qui permettrait d’entraîner sa responsabilité à titre d’administrateur.
[112] Notons que la Cour d’appel[85] a maintes fois clarifié la confusion qui semble toujours régner entre «le soulèvement du voile corporatif» et la responsabilité des administrateurs à ce sujet. Le professeur Martel dans une étude de la jurisprudence depuis la mise en vigueur de l'article 317 C.c.Q.[86] explique que :
La responsabilité personnelle d'un individu qui est actionnaire majoritaire et administrateur d'une compagnie peut être retenue dans les circonstances suivantes:
- Il s'est porté caution d'une obligation contractuelle de la compagnie;
- Il a lui-même commis une faute entraînant sa responsabilité extracontractuelle, par exemple en faisant de fausses représentations ou en remettant des documents falsifiés;
- Il a activement participé à une faute extracontractuelle de la compagnie (ce qui se présume s'il est administrateur unique);
- Il a utilisé la compagnie qu'il contrôle comme écran, comme paravent pour tenter de camoufler le fait qu'il a commis une fraude ou un abus de droit ou qu'il a contrevenu à une règle intéressant l'ordre public; en d'autres termes, l'acte apparemment légitime de la compagnie revêt, parce que c'est lui qui la contrôle et bénéficie de cet acte, un caractère frauduleux, abusif ou contraire à l'ordre public.
L'article 317 ne s'applique que dans le dernier de ces cas. Le premier est régi par les articles 2333 et suivants, le deuxième par l'article 1457, et le troisième par les articles 1457 et 1526. Quant on regarde de près, on constate que sur la cinquantaine de prétendus cas de «levée du voile corporatif» répertoriés depuis le début de 1994, une infime minorité se range dans la dernière catégorie et mérite vraiment cette appellation.
[Nos soulignés.]
[113] L’auteur Raymonde Crête, citée récemment par la Cour d’appel dans Meyerco Enterprises Ltd. c. Kinmont Canada Inc.[87], précise qu’en matière de responsabilité extracontractuelle :
326. En terminant, il faut reconnaître que lorsqu'un
actionnaire occupe la fonction de dirigeant ou d'administrateur, sa
participation active au fonctionnement de la société fait en sorte qu'il sera
possible de prouver qu'il a personnellement commis une faute
extracontractuelle, laquelle engagera directement sa responsabilité. Comme
l'ont souligné les tribunaux à de nombreuses reprises, dans de telles
circonstances, il n'est donc pas nécessaire de recourir à l'article 317 pour
atteindre le dirigeant ou l'administrateur qui pose des gestes préjudiciables.
Il suffit d'appliquer directement le régime de la responsabilité civile
extracontractuelle. À cet égard, nous verrons ultérieurement que la Cour
suprême a rendu un arrêt important dans Magasins à rayons Peoples inc.
(Syndic de) c. Wise,
[Nos soulignés.]
[114] Ainsi, un administrateur peut encourir une responsabilité extracontractuelle pour des fautes commises à l’endroit de tiers, à titre personnel, «notamment lorsque l’on démontre la prise de décisions en soi fautives»[89].
[115] Dans l’affaire Plaza Bellehumer Holdings Ltd. c. 20722283 Ontario Inc.[90], la Cour supérieure précise la notion de faute dans ce contexte :
[86] Par contre, comme le rappelle la Cour d'appel dans l'affaire Pincourt, les tribunaux ne tiennent pas les administrateurs responsables pour de simples erreurs de jugement. De toute évidence, les administrateurs peuvent être tenus responsables de leurs fautes lourdes et de toute autre faute reliée à la norme de conduite imposée à l'administrateur et au dirigeant d'une entreprise évaluée objectivement, c'est-à-dire en référant aux critères de la personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances.
[87] Dans
cette même décision, la Cour d'appel constate que la question de la
responsabilité extracontractuelle de l'administrateur a bien évolué depuis une
décennie. Les auteurs Baudouin et Deslauriers écrivent qu'un administrateur
peut être recherché en responsabilité civile contractuelle ou
extracontractuelle par un tiers en vertu des dispositions de l'article
[88] Par contre, selon l'auteur Paul Martel
« Les décisions d'affaires des administrateurs prises légalement, de bonne foi, sans intérêt personnel et en de ça de leurs pouvoirs, ne sont pas sujettes à un examen microscopique par la cour et seront respectées même si le Tribunal les juges peu sages en l'occurrence. »
[116] D’abord, le Tribunal considère que Benisti n’engage pas sa responsabilité personnelle par le seul fait d’avoir éventuellement participé, à l’origine, à l’élaboration de l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION. La preuve ne révèle rien de clair à cet égard puisque des concepteurs de Point Zero ont travaillé sur l’étiquette et pourraient être à l’origine de la contrefaçon.
[117] Par la suite, en 2006, face à l’opposition de Diesel, Benisti admet prendre personnellement la décision d’abandonner la demande d’enregistrement de la marque POINT ZERO CO. DENIM DIVISION. Il explique qu’il refuse de se battre pour un simple «label» et juge que ce n’est pas pertinent pour sa compagnie, qui est très créative et développe constamment de meilleures idées. Il soumet que cela ne valait pas la peine, surtout compte tenu des coûts afférents[91].
[118] Cependant, faisant fi de cette opposition et de la procédure prévue pour légitimer l’utilisation ou l’enregistrement de sa marque, il décide tout de même de poursuivre la fabrication et commercialisation de jeans portant l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION. Son agent de marque le confirme au procès[92].
[119] Benisti affirme qu’il tenait pour acquis que la marque avait été approuvée par le bureau des marques le 14 décembre 2006, comme l’indique l’information relative à la marque de l’Office de la propriété intellectuelle[93]. Il considère que cela lui donnait le droit de continuer.
[120] Or, nul ne peut ignorer la loi. Une vérification diligente à cet égard aurait confirmé à Benisti que l’approbation du 14 décembre 2006 ne donne aucun droit à Point Zero et ne procure aucune légitimité à la marque POINT ZERO CO. DENIM DIVISION.
[121] Le Tribunal estime que cette décision du président et seul administrateur de Point Zero ne peut s’apparenter à celle de la personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances. Sachant que la commercialisation des jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION risquait de contrevenir à une marque déposée et d’engager la responsabilité de son entreprise, Benisti devait faire preuve de prudence et s’assurer de la légalité de sa propre marque et de son emploi. S’il désirait continuer à l’utiliser, dans les circonstances, il devait aller au bout de la procédure d’opposition.
[122] En prenant la décision contraire, Benisti contourne les règles prévues par la L.m.c. et ses règlements.
[123] Se faisant, le Tribunal conclut qu’en poursuivant la commercialisation de ses produits litigieux, Benisti a pris une décision en soi fautive, et par conséquent, il commet lui-même une faute entraînant sa responsabilité extracontractuelle.
[124] La requête pour abus de procédure du défendeur Benisti, soumise en vertu de l’article 54.1 du Code de procédure civil, devient donc sans objet.
[125] L’évaluation des dommages, tant dans le contexte de l’action en contrefaçon qu’en matière de commercialisation trompeuse, peut s’analyser à la lumière de l’article 53.2 L.m.c., qui énonce le pouvoir du Tribunal d’accorder une réparation :
53.2 (1) Lorsqu’il est convaincu, sur demande de toute personne intéressée, qu’un acte a été accompli contrairement à la présente loi, le tribunal peut rendre les ordonnances qu’il juge indiquées, notamment pour réparation par voie d’injonction ou par recouvrement de dommages-intérêts ou de profits, pour l’imposition de dommages punitifs, ou encore pour la disposition par destruction ou autrement des produits, emballages, étiquettes et matériel publicitaire contrevenant à la présente loi et de tout équipement employé pour produire ceux-ci.
[Nos soulignés.]
[126] Diesel réclame les profits découlant de la commercialisation trompeuse et de la contrefaçon de sa marque DIESEL INDUSTRY DENIM DIVISION & DESIGN, des dommages punitifs et les honoraires extrajudiciaires de ses avocats.
[127] Dans sa
demande initiale, Diesel réclame une somme compensatoire de
35 000 $, à parfaire. Dans sa défense, Point Zero allègue qu’en 2009,
lorsqu’elle cesse de fabriquer et commercialiser les jeans POINT ZERO CO. DENIM
DIVISION, son inventaire contient 554 paires, dont elle établit le prix de
vente au détail à 28 $, pour une valeur de 45 512 $. À titre subsidiaire,
suggérant une marge de profit de 25 %, elle allègue que les dommages doivent
être établis au montant de 3 878 $.
[128] Au procès, Point Zero se ravise et Benisti témoigne que Point Zero a fabriqué 10 000 paires de jeans dans les deux styles contestés. En 2010, elle cesse de les vendre et demeure avec un inventaire de 5 660 jeans, de sorte qu’au total, 4 340 jeans ont été vendus[94]. Point Zero établit son prix de vente au détail à 24 $. Le montant des revenus bruts s’établit à 104 160 $, et est non contesté.
[129] En matière de contrefaçon, aux fins du calcul des profits, le demandeur doit essentiellement faire la preuve des revenus, et c’est au défendeur que revient le fardeau de faire la preuve de tous les coûts déductibles[95].
[130] À la lumière des chiffres énoncés par Point Zero, alléguant une marge de profit d’usage dans l’industrie de 50%, Diesel calcule et réclame des profits de 52 080 $.
[131] Benisti témoigne d’une marge de profits de 25%, sans procurer aucune preuve documentaire. Il explique que contrairement aux autres vêtements fabriqués en Chine, les jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION étaient fabriqués au Québec, en quantité limitée. Les coûts de production de toute évidence plus élevés au Canada expliquent la marge de profits réduite, qu’il estime à 25%. Point Zero conclut, à titre subsidiaire, que le montant maximal des profits qui devrait être accordé est de 26 040 $.
[132] La demanderesse considère cette preuve insuffisante et soumet, au surplus, n’accorder aucune crédibilité à Benisti à cet égard.
[133] Benisti, à titre de président de Point Zero, est l’une des personnes autorisées et aptes à témoigner de tels faits. La preuve que l’on tente d’apporter par son entremise n’est pas la preuve d’un acte juridique. Son témoignage est donc recevable. La question qui se pose n’en est pas une de recevabilité de preuve, mais plutôt de valeur probante[96]
[134] Le Tribunal constate sur l’étiquette des jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION qu’ils ont bel et bien été fabriqués au Canada, et en quantité limitée, ce qui est admis. Toutefois, il n’est pas convaincu de l’exactitude du pourcentage approximatif donné par Benisti, qui n’a pas témoigné d’un calcul précis de cette marge de profits, jamais supportée par la documentation afférente, alors que le fardeau repose sur ses épaules. Le Tribunal juge que la preuve soumise ne comporte pas de force probante suffisante et par conséquent, n’a d’autre choix que de retenir la marge de profit de 50%, ultimement admise par Diesel.
[135] Enfin, pour les motifs exposés dans l’affaire Cinar Corporation c. Robinson[97], considérant que la restitution des profits prévue à l’art. 53.2 L.m.c. vise à empêcher le défendeur de conserver des gains illicites, le Tribunal ne peut tenir Benisti responsable des gains de Point Zero en lui imposant l’obligation de restituer solidairement les profits. Seul Point Zero sera condamnée à payer 52 080 $.
[136] Au Québec,
les tribunaux peuvent octroyer des dommages punitifs si une loi particulière
les prévoit[98].
En matière de marque de commerce, l’article 53.2 L.m.c. en dispose et, en tout
état de cause, à l’instar de la jurisprudence de la Cour suprême en matière de
violation du droit d’auteur[99], le Tribunal conclut
que la violation d’une marque de commerce constitue une violation «au droit
à la jouissance paisible et à la libre disposition de ses biens» prévu à
l’article
[137] Dans l’arrêt Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l’hôpital St-Ferdinand[102], la Cour suprême définit l’atteinte illicite et intentionnelle :
121. En conséquence,
il y aura atteinte illicite et intentionnelle au sens du second alinéa de
l'art.
[Nos soulignés.]
[138] Plus particulièrement, les auteurs résument la jurisprudence en matière de marques de commerce comme suit :
[…] The inclusion of punitive damages as relief under section 53.2 gives to the Superior Court of the province of Quebec an alternative which was previously doubtful. Punitive or exemplary damages will usually be awarded when the defendant has shown a cynical disregard for the plaintiff’s rights, where the defendant has taken a calculated risk that the money he could make through his infringing activities would exceed the damages obtainable by the plaintiff and where profits, for lack of proper accounting records, are difficult to evaluate[103].
[139] En 2005, Point Zero reçoit une opposition à sa marque de commerce et décide de ne pas y donner suite, pour des raisons qui lui sont propres, ce sur quoi le Tribunal ne peut rien conclure. Cependant, sa décision de poursuivre la commercialisation de ses jeans avec la marque qui fait l’objet de l’opposition, sans se soumettre au processus afférent, est empreinte de mauvaise foi. Point Zero démontre non seulement un mépris cynique pour les droits de Diesel, mais également pour toute la procédure d’enregistrement de marques de commerce prévue par la L.m.c. et le processus d’opposition auquel elle refuse de se soumettre.
[140] Dès lors, elle ne pouvait plus ignorer les enjeux importants que suscitait l’emploi de l’étiquette POINT ZERO CO. DENIM DIVISION qu’elle avait tenté d’enregistrer. Si elle désirait continuer de l’utiliser, elle devait faire le nécessaire pour clarifier la situation, et éventuellement légitimer sa position.
[141] Le risque apparaît vraisemblablement calculé : la commercialisation a été marginale et Point Zero n’a pas eu à ouvrir ses livres pour faire une reddition de compte. En effet, elle fournit au procès des données approximatives, que Diesel finira par accepter pour simplifier le débat.
[142] Le Tribunal conclut que les agissements de Point Zero, dans ce contexte, constituent des fautes illicites et intentionnelles et donnent droit à l’octroi de dommages punitifs.
[143] L’article
1621. Lorsque la loi prévoit l'attribution de dommages-intérêts punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.
Ils s'apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l'étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.
[144] Diesel plaide que la gravité de la faute et la situation patrimoniale de Point Zero, évaluée à quarante-deux millions de dollars, justifie l’octroi de dommages punitifs de l’ordre de 200 000$.
[145] La conduite de Point Zero est fortement répréhensible. Toutefois, le Tribunal note que la commercialisation des jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION demeure restreinte. Au-delà des profits octroyés, le Tribunal constate que les dommages réels s’avèrent conséquemment limités. Le Tribunal souligne le fait que Point Zero a promptement pris l’engagement de cesser de les fabriquer et de les vendre. Enfin, il juge que les motifs et conclusions de son jugement répondent en partie aux besoins de dissuasion et de dénonciation élaborée dans la jurisprudence[104].
[146] Le Tribunal établit à 20,000 $ le montant des dommages punitifs payables par Point Zero.
[147] En ce qui concerne Benisti, l’arrêt Robinson précité confirme que les dommages punitifs ne peuvent s’attribuer sur une base solidaire :
La Cour a reconnu
l’autonomie du régime de dommages-intérêts punitifs de la Charte par
rapport au régime de responsabilité civile extracontractuelle établi dans
le Code civil du Québec. L’article
[148] Il s’agit donc de déterminer si Benisti doit faire l’objet d’une condamnation personnelle à cet égard. Pour les raisons qui précèdent, le Tribunal condamne Benisti personnellement à payer un montant de 20,000 $ à ce titre, étant entendu que les circonstances appréciées aux fins de déterminer le quantum des dommages punitifs à l’endroit de Point Zero sont essentiellement les mêmes et relèvent de décisions prises par Benisti. La situation patrimoniale très aisée de Benisti, discutée au procès, lui permet amplement d’assumer cette condamnation.
[149] Le Tribunal souligne que le montant total de 40 000 $ en dommages punitifs apparaît raisonnable, notamment en tenant compte de la réparation à laquelle Point Zero est déjà tenu envers Diesel.
[150] Récemment, l’arrêt Hinse c. Canada (Procureur général)[106] réitère les conditions nécessaires au Québec pour accorder des honoraires extrajudiciaires à titre de dommages :
[168] Dans l’arrêt Viel
c. Entreprises Immobilières du Terroir ltée,
En principe, et sauf circonstances exceptionnelles, les honoraires payés par une partie à son avocat ne peuvent, à mon avis, être considérés comme un dommage direct qui sanctionne un abus sur le fond. Il n’existe pas de lien de causalité adéquat entre la faute (abus sur le fond) et le dommage. La causalité adéquate correspond à ou aux événements ayant un rapport logique, direct et immédiat avec l’origine du préjudice subi (. . .)
À l’inverse, peu importe qu’il y ait abus ou non sur le fond, une partie qui abuse de son droit d’ester en justice causera un dommage à la partie adverse, qui, pour combattre cet abus, paie inutilement des honoraires judiciaires à son avocat. Il y a, dans ce cas, un véritable lien de causalité entre la faute et le dommage. [Nous soulignons; italique dans l’original omis.]
(Viel, par. 77-79)
[Nos soulignés.]
[151] Diesel invoque la conduite répréhensible des défendeurs sur le fond du litige, qui ne conduit pas nécessairement à l'abus du droit d'ester en justice. En l’instance, le Tribunal constate que les défendeurs ont tôt fait de cesser la fabrication et la commercialisation des jeans POINT ZERO CO. DENIM DIVISION, soit dès la présentation de l’injonction provisoire. Avant l’interlocutoire, ils signent un engagement définitif à cet égard.
[152] Les défendeurs avaient certainement le droit de se défendre, de présenter de la preuve et des arguments pertinents sur toutes les questions en litige, et notamment eu égard au quantum des dommages.
[153] Par conséquent, la jurisprudence et la preuve ne permettent pas au Tribunal de conclure qu’il y a eu abus de procédure, et par conséquent, d’accéder à la demande de Diesel quant aux honoraires extrajudiciaires.
[154] POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[155] ACCUEILLE en partie la requête introductive d’instance en injonction permanente et en dommages et intérêts ré-ré-amendée de Diesel S.p.A. et Diesel Canada Inc.;
[156] CONDAMNE la défenderesse Benisti Import-Export Inc. (Point Zero) à payer aux demanderesses la somme de 52 080 $ à titre de dommages compensatoires, avec intérêt au taux légal, plus l’indemnité additionnelle depuis le 17 septembre 2010;
[157] CONDAMNE la défenderesse Benisti Import-Export Inc. (Point Zero) à payer aux demanderesses la somme de 20 000 $ à titre de dommages punitifs, avec intérêt au taux légal, plus l’indemnité additionnelle à compter du présent jugement;
[158] CONDAMNE le défendeur Maurice Benisti à payer aux demanderesses la somme de 20 000 $ à titre de dommages punitifs, avec intérêt au taux légal, plus l’indemnité additionnelle à compter du présent jugement;
[159] AVEC FRAIS DE JUSTICE en faveur de la partie demanderesse;
[160] REJETTE la requête pour abus de procédure de la partie défenderesse ;
[161] AVEC FRAIS DE JUSTICE en faveur de la partie demanderesse.
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__________________________________ FLORENCE LUCAS, J.C.S. |
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Me Howard L. Tatner |
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Procureur des demanderesses |
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Me Caroline Essiminy |
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Procureure des défendeurs |
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Dates d’audience : |
Les 24 et 25 septembre 2015 |
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[1] Pièce P-10.
[2] Pièce P-5.
[3] Défini au paragraphe [6] du jugement.
[4] L’utilisation des seuls noms de famille dans le présent jugement a pour but d’alléger le texte et l’on voudra bien n’y voir aucune discourtoisie à l’égard des personnes concernées.
[5] Le présent dossier a été entendu et pris en délibéré avant l'entrée en vigueur du Code de procédure civile, RLRQ, c. C-25.01.
[6] Extrait du registre de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada, pièce P-5.
[7] Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13 («L.m.c.»), art. 7; 1457 du Code civil du Québec.
[8] Extrait du CIDREQ, pièce P-3.
[9] Témoignage d’Heidi Pekofsky, directrice des ventes et du marketing de Diesel Canada Inc.; Statement of Opposition, pièce P-9.
[10] Pièce P-1.
[11] Pièce P-2.
[12] Pièce P-5.
[13] Témoignage d’Heidi Pekofsky, préc., note 9.
[14] Extrait du registre de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada, pièce P-8.
[15] Catalogues, pièce D-3.
[16] Extrait du registre de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada, pièce P-4.
[17] Pièce P-9.
[18] L.m.c., art. 38.
[19] Pièce P-8, p. 2, la mention «Approved 14 December 2006».
[20] Pièces P-1, P-4, P-6 et P-7.
[21] Interrogatoire d’Anthony Della Salla, 29 février 2012, p. 31.
[22] Interrogatoire d’Anthony Della Salla, 29 février 2012, pp. 38 et suiv.
[23] Pièce P-12.
[24] Pièce P-13.
[25] Pièce P-21.
[26] Pièce P-14.
[27] Pièce P-8, note 14.
[28] L.m.c., notamment, art. 2, 18, 19, 20, 34 et 51.01; Extrait du Guide des marques de commerce de l’Office de la propriété intellectuelle : http://www.ic.gc.ca/eic/site/cipointernet- internetopic.nsf/fra/h_wr02360.html?Open&wt_src=cipo-tm-main&wt_cxt=learn#filingDate.
[29]
T-Rex Véhicules inc. c. 6155235 Canada
inc.,
[30] L.m.c., art. 19.
[31] L.m.c., art. 20.
[32] Masterpiece Inc. c. Alavida
Lifestyles Inc ,
[33] Masterpiece, préc., note 32, par. 104.
[34] Id., par. 53, 55 à 59.
[35]
Masterpiece, préc., note 32, par. 39; Veuve Clicquot
Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée,
[36]
L.m.c., art. 2; Sportcam Co. c. Breck’s Sporting Goods, [1973] C.F.
360, 367 (C.A.F.), conf. par
[37] Barry, GAMACHE, Confusion, préc., note 36, par. 3.
[38] Masterpiece, note 32, par. 105; Veuve Clicquot Ponsardin, préc., note 35, par. 35.
[39] Préc., note 29, [L’honorable juge Chamberland], par. 57 à 63.
[40] Préc., note 29, [l’honorable juge Thibault], par. 107 à 111.
[41]
Boulangerie St-Méthode Inc. c. Boulangerie Canada Bread Ltée,
[42] L.m.c., art. 2, préc., note 36.
[43] Geigy Canada Ltd. c. Apotex
Inc.,
[44] Masterpiece, préc., note 32, par. 104.
[45] Mattel
Inc. c. 3894207
Canada Inc.,
[46] Voir la section B. La concurrence déloyale, la sous-section 1) Les remarques préliminaires.
[47] Pièce D-1.
[48] L.m.c., art. 2 et 16.
[49] Pièce P-6.
[50] Laurent CARRIÈRE, Traitement administratif des marques de commerce : bases d’enregistrement et priorité, dans Jurisclasseur Québec, coll. Propriété intellectuelle, Partie IV Marques de commerce, fasc. 14. Montréal, LexisNexis Canada, feuilles mobiles, par. 60.
[51] Témoignage de Me Mark Sumbulian, agent de marques de commerce.
[52] Pièce D-3.
[53] Pièces D-4 et D-8.
[54] Pièces D-1.
[55] Plaidoirie en défense du 25 septembre 2015, entre 15 :12 et 15 :15.
[56]
Boulangerie St-Méthode inc. c. Boulangerie
Canada Bread ltée,
T-Rex Véhicules inc., préc., note 29, par. 29
et 30.
[57] Mistrale GOUDREAU, Marques de commerce et concurrence déloyale, dans Jurisclasseur Québec, coll. Propriété intellectuelle, Partie IV Marques de commerce, fasc. 12. Montréal, LexisNexis Canada, feuilles mobiles, par. 42 et suivants.
[58] Geigy Canada Ltd., préc., note 43, p. 133; T-Rex Véhicules inc., préc., note 29; Boulangerie St-Méthode inc., préc., note 56, par. 51; Boulangerie Canada Bread ltée, préc. note 41, par. 67.
[59] Geigy Canada Ltd., préc., note 43, p. 132; Reckitt & Colman Products Ltd. c. Borden Inc., [1990] 1 All E.R. 873, p. 880.
[60] Geigy Canada Ltd., préc., note 43, p. 28.
[61]
Kirkbi AG c. Gestions Ritvik Inc.,
[62] Boulangerie Canada Bread ltée, préc., note 41.
[63] Boulangerie St-Méthode inc., préc., note 56, par. 70; Voir également Charlaine BOUCHARD, « Droit et pratique de l’entreprise - Fonds d’entreprise, concurrence et distribution », tome 2, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2005, p. 235.
[64] L.m.c., art. 5; Alexandra STEELE, Barry, GAMACHE, Exclusivité d’emploi, dans Jurisclasseur Québec, coll. Propriété intellectuelle, Partie IV Marques de commerce, fasc. 16. Montréal, LexisNexis Canada, feuilles mobiles, par. 38.
[65] Pièce P-16; témoignage de Heidi Pekofsky, préc., note 9.
[66] Livre intitulé DIESEL - XXX YEARS OF DIESEL COMMUNICATION, marquant le 30e anniversaire de Diesel, pièce P-16; Publicités, pièces P-17 et P-18; Statement of Opposition, pièce P-9; Témoignage d’Heidi Pekofsky, préc., note 9.
[67] Témoignage d’Heidi Pekofsky, préc., note 9.
[68] Statement of Opposition, pièce P-9, page 3; Témoignage d’Heidi Pekofsky, préc., note 9.
[69] Témoignage d’Heidi Pekofsky, préc., note 9.
[70] Livre intitulé DIESEL, préc. note 65, pièces P-17 et P-18; Statement of Opposition, pièce P-9; Témoignage d’Heidi Pekofsky, préc., note 9.
[71] Plaidoirie en défense du 25 septembre 2015, entre 15 :12 et 15 :15.
[72] Pièce D-6.
[73] Catherine BERGERON, Un regard récent sur la protection des costumes et accessoires, dans Service de la formation continue, Barreau du Québec, Développements récents en droit du divertissement, vol. 226, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2005, pp. 53 à 61.
[74] Si cette lettre n’est pas claire, la demande d’enregistrement du 7 décembre 2004 confirme que c’est un «P», pièce P-8.
[75] Pièce D-1.
[76] Id.
[77] Pièce D-3.
[78] Ray Plastics Ltd. v. Dustbane Products Ltd. (1994), 57 C.P.R. (3d) 474, par. 478; Orkin Exterminating Co. Inc. v. Pestco Co. of Canada Ltd. (1985), 5 C.P.R. (3d) 433, par. 452 (Ont. C.A.); Restatement of the Law of Torts, Tentative Draft No. 8 (1963), par. 113.
[79] Edward Chapman Ladies' Shop Limited v. Edward Chapman Limited et al., 2006 BCSC 14, par. 44.
[80] Argument allégué au par. 29 de la défense ré-amendée. Le Tribunal note que Point Zero n’insiste pas sur ce point en plaidoirie.
[81] Ciba-Geigy, préc., note 43, p. 133; Consumers Distributing Co. c. Seiko
Time Canada Ltd.,
[82]
Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc.,
[83] Barry, GAMACHE, Confusion, préc. note 36, par. 42.
[84] Boulangerie Canada Bread ltée, préc., note 41.
[85]
Lanoue
c. Brasserie Labatt Ltée.
[86]
Paul MARTEL, «Le «voile
corporatif» - l'attitude des tribunaux face
à l'article 317 du Code
civil du Québec»,
[87]
Meyerco Enterprises Ltd. c. Kinmont Canada Inc.,
[88]
Raymonde CRÊTE,
p. 141; Voir aussi, Paul MARTEL, La
société par actions au Québec, vol.
1 : Les aspects juridiques, Montréal, Wilson & Lafleur, 2011, p.
24-92, no 24-252.
[89] Métromédia CMR Montréal inc., préc., note 85, par. 89.
[90] Plaza
Bellehumer Holdings Ltd.
c. 20722283 Ontario Inc.,
[91] Témoignage de Mark Sumbulian, préc., note 51.
[92] Témoignage de Mark Sumbulian, préc., note 51.
[93] Extrait du registre de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada, pièce P-8, page 2, la mention «Approved 14 December 2006».
[94] Pièce D-5.
[95] Kelly GILL, R. Scott JOLIFFE, Fox on Canadian Law of Trade-marks and Unfair Competition, 4e éd., Toronto, Thomson Carswell, feuilles mobiles, mise à jour continue, pp. 13-50.2 et 13-51; Diversified Products Corp. v. Tye-Sil Corp., (1990), 32 C.R.P. (3d) 385 (Fed T.D.), (1990), 30 C.P.R. (3d) 318 (Fed.T.D.); par analogie en matière de droit d’auteur : Hugues RICHARD, Laurent CARRIÈRE (Léger Robic Richard), Canadian Copyright Annotated, volume 3, Toronto, Thomson Carswell, feuilles mobiles, mise à jour continue, p. 35-12.
[96] Agropur Coopérative c. Cegerco Constructeur Inc., 2004 CanLII 40403 (QCCS), par. 11 à 13.
[97]
Cinar Corporation c. Robinson,
[98] C.c.Q., art. 1621.
[99] Robinson, préc., note 97, par. 113 et 114.
[100] L.R.Q., ch. C-12.
[101] Id., art. 49.
[102]
Québec (Curateur public) c. Syndicat
national des employés de l’hôpital St-Ferdinand,
[103] Canadian Copyright Annotated, préc. note 94, par. 53.2-12 et 53.2-12.1.
[104]
BMW Canada inc. c. Automobiles Jalbert inc.,
[105] Robinson, préc. note 97, Résumé de l’arrêt, voir également par. 120 à 132.
[106]
Hinse c. Canada
(Procureur général),
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.