Décision

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Gabarit EDJ

R. c. Pontbriand

2014 QCCQ 7928

COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

TERREBONNE

LOCALITÉ DE

SAINT-JÉRÔME

« Chambre criminelle et pénale »

N° :

700-01-079426-089

 

DATE :

29 août 2014

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

VALMONT BEAULIEU, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

SA MAJESTÉ LA REINE

Poursuivante

c.

TANIA PONTBRIAND

Accusée

______________________________________________________________________

 

PRONONCÉ DE LA PEINE

______________________________________________________________________

 

[1]           Suite à un procès, l'accusée fut déclarée coupable de ces chefs d'accusations :

1.          Entre le 1er mai 2002 et le 30 avril 2004, à Rosemère, district de Terrebonne, à Lorraine, Blainville, Boisbriand, district de Terrebonne, Mascouche, district de Joliette, a, à des fins d'ordre sexuel, touché une partie du corps de X (1986-[…]), adolescent vis-à-vis duquel elle était en situation d'autorité ou de confiance ou à l'égard de laquelle X (1986-[…]) était en situation de dépendance, commettant ainsi l'acte criminel prévu à l'article 153 (1) a) du Code criminel.

2.          Entre le 1er mai 2002 et le 30 avril 2004, à Rosemère, district de Terrebonne, à Lorraine, Blainville, Boisbriand, district de Terrebonne, Mascouche, district de Joliette, a, à des fins d'ordre sexuel, invité, engagé ou incité X (1986-[…]), un adolescent à la toucher alors qu'elle était en situation d'autorité ou de confiance vis-à-vis X (1986-[…]) ou alors que ce dernier était à son égard en situation de dépendance, commettant ainsi l'acte criminel prévu à l'article 153 (1) b) du Code criminel.

3.          Entre le 1er mai 2002 et le 30 avril 2004, à Rosemère, district de Terrebonne, à Lorraine, Blainville, Boisbriand, district de Terrebonne, Mascouche, district de Joliette, a agressé sexuellement X (1986-[…]), commettant ainsi l'acte criminel prévu à l'article 271 (1) a) du Code criminel.

[2]           Lors du prononcé du verdict de culpabilité en date du 23 janvier 2014, le Tribunal a résumé avec détails les faits pour lesquels l'accusée fut déclarée coupable.

[3]           De très nombreux événements sont survenus alors que cette dernière enseignait à la victime et certains autres se sont déroulés alors qu'elle n'était plus son enseignante.

[4]           X a rencontré l'accusée lorsqu'elle était son institutrice en secondaire 4. Cette dernière était professeure du cours de « Leadership » et d'éducation physique et sportive à l'école de Rosemère.

[5]           Tous les élèves du programme de « Leadership » ont participé à une excursion de camping d'hiver organisée par l'accusée.

[6]           Durant cette excursion, elle a démontré de grandes attentes envers la victime et a comparé sa conduite à son frère aîné qui avait auparavant participé au camp d'hiver.

[7]           Lors d'un projet d'auto-évaluation, la victime informa sa professeure qu'elle fut injuste envers lui.

[8]           Par la suite, il participa à une autre excursion au début du mois de mai.

[9]           Tard en soirée, X et l'accusée se retrouvèrent à l'intérieur d'un camion U-Haul. À un certain moment, les deux personnes ont discuté et ont partagé des détails intimes de leur vie. Elle a mentionné entre autres que son mariage était une erreur et ils pleurèrent ensemble pendant la conversation. S'établira alors un climat de confiance.

[10]        La victime, âgé de 15 ans lui raconta des événements qu'il n'aurait pas partagés avec ses amis.

[11]        Il a cru qu'elle pouvait le comprendre, car elle aussi provient d'une famille brisée par la séparation des parents.

[12]        Le Tribunal signale immédiatement que la victime vivait difficilement le fait qu'une autre famille porte des attentions particulières seulement à son frère.

[13]        Vers 6 h du matin, ils s'embrassèrent et chacun retourna à la tente.

[14]        Revenu à la maison, il a appris à sa mère qu'il avait maintenant « une meilleure amie ».

[15]        Le lendemain, l'accusée lui proposa d'organiser une autre excursion dans le but de terminer leur conversation en y précisant : « Ce roman que nous avons commencé, nous devons le finir ».

[16]        L'accusée et X en parlèrent à la mère de celui-ci et cette dernière donna son consentement à cette expédition.

[17]        Ils se retrouvèrent seuls pour camper dans une tente et durant la nuit, ils ont eu deux relations sexuelles complètes.

[18]        Lors de cet événement, il se dit « mêlé » car jamais il ne lui était venu à l'esprit qu'un tel événement pouvait survenir, car elle était mariée, âgée de 30 ans, lui de 15 ans et qu'elle était sa professeure.

[19]        Suite à cette nuit, entre le mois de mai 2002 et le 30 avril 2004, de multiples relations sexuelles se déroulèrent entre eux à divers endroits, entre autres; à l'école, dans la voiture, à la résidence de l'accusée et lors de certains voyages dont l'un à Toronto.

[20]        De plus, elle lui a offert de nombreux cadeaux.

[21]        Ayant terminé son secondaire, X emménagea avec son frère à Montréal.

[22]        L'accusée et la victime continuèrent leurs rencontres et eurent plusieurs autres relations sexuelles. Ces événements sont compris dans le troisième (3e) chef d'accusation. Lors du verdict, le Tribunal s'exprima ainsi :

« [449]              Le Tribunal est convaincu que l'accusée s'est servie de X afin de répondre à sa satisfaction sexuelle, exploitant ainsi la naïveté, le manque de maturité, sa dépendance et la confiance de ce dernier alors que le plaignant était son élève.

[450]     Au surplus, la preuve convainc le Tribunal que du début jusqu'à la fin de cette relation, l'accusée a dominé X devenu complètement dépendant de l'accusée, lui accordant sans retenue sa confiance, s'isolant de ses amis, perdant son intérêt pour ses études, se disputant avec sa mère. L'accusée, volontairement, ne s'est pas souciée de l'état psychologique de ce dernier qui était devenu pour cette dernière rapidement « un objet » afin de satisfaire égoïstement son « appétit sexuel » en n'utilisant qu'à son profit à elle X et décida un jour d'y mettre fin.

[451]     Tout cet état d'esprit de dépendance de X, de confiance aveugle, de X envers l'accusée lorsqu'elle n'est plus sa professeure est très bien expliqué par ce dernier le 2 septembre 2011 et le Tribunal est convaincu qu'il fut présent jusqu'au moment ou ce dernier a réalisé que le « château de cartes » ou « château de sable » construit habilement par l'accusée s'écroulait […].

[…]

[455]     Quant à la période se situant postérieurement, le Tribunal est convaincu hors de tout doute raisonnable qu'il y avait absence de consentement à cause d'abus de confiance créé par l'accusée et que la preuve révèle hors de tout doute raisonnable une inégalité profonde entre l'accusée et la victime. Le Tribunal est convaincu hors de tout doute raisonnable que l'accusée ne pouvait ignorer cette situation. »

[23]        Suite au verdict de culpabilité, le Tribunal a ordonné la rédaction d'un rapport par le service de la probation.

[24]        L'accusée est âgée de 43 ans, vit avec un conjoint et est mère de deux (2) enfants âgés de 6 et 7 ans. Elle occupe un emploi dans un centre de conditionnement physique.

[25]        L'accusée a indiqué à l'agente de probation qu'une procédure est en cours devant la Cour d'appel du Québec et par conséquent, elle a choisi de ne pas aborder les faits reprochés.

[26]        Lorsqu'elle était âgée de 3 ans, ses parents se séparèrent et elle connaîtra peu son père biologique.

[27]        Avec sa mère, elle emménagea chez ses grands-parents maternels vivant sur une ferme. À cet endroit, elle y développa son intérêt pour les activités de plein air.

[28]        Sa mère se remaria deux ans plus tard et deux enfants naîtront de cette union.

[29]        L'accusée affirme considérer son beau-père comme étant son père.

[30]        En 1995, elle obtient un baccalauréat en enseignement et en 1997, elle aura un poste permanent à la Rosemère High School.

[31]        Deux années plus tard, lui sont confiées davantage de responsabilités en tant que professeure d'éducation physique. Par la suite, elle deviendra responsable du département d'éducation physique jusqu'à la dénonciation des délits en 2007.

[32]        Elle précise avoir été passionnée par son emploi, appréciant particulièrement aider les jeunes à s'épanouir grâce aux activités physiques.

[33]        De plus, elle s'impliqua dans divers comités et dans l'organisation d'activités parascolaires.

[34]        Vers 1998, elle rencontra un homme avec lequel elle se mariera en 2001. Leur séparation en 2004 sera motivée par le désir de ce dernier de retourner vivre à Toronto alors que l'accusée souhaitait vivre à la campagne auprès de sa mère qui venait de subir une ablation mammaire à la suite d'un cancer.

[35]        En décembre 2005, elle emménagea avec une ancienne connaissance et son conjoint sera une source de support.

[36]        Un premier enfant naîtra en 2006 et le second en 2008.

[37]        Sur le plan des habitudes, l'accusée est surtout motivée par l'adoption de sains choix de vie. Donc, elle n'a jamais abusé d'alcool ni consommé de la drogue.

[38]        Sous le titre « évaluation », l'agente de probation écrit :

« […] La citée déplore les pertes occasionnées par ses déboires judiciaires sur le plan professionnel, ainsi que les impacts de ces accusations sur ses proches. Elle dit souffrir de la médiatisation de ses comparutions en Cour. Par ailleurs, le présent dossier a bouleversé la vie de la victime, sur qui l'accusée a exercé une forte emprise. Or, nous ne pouvons nous prononcer sur le degré d'empathie de l'accusée envers la victime puisque nous n'avons pas pu explorer les aspects délictuels avec madame. Le caractère défensif de sa démarche judiciaire ne nous permet pas non plus de nous prononcer sur sa conscientisation. Madame nous a toutefois informée ne pas avoir entrepris de thérapie. Cette situation d'ensemble nous préoccupe et nous permet de croire que les facteurs sous-jacents au passage à l'acte demeurent non explorés. Dans ce contexte, nous laissons le soin à la Cour de traiter ce dossier au mérite. Une interdiction de se retrouver dans un rôle d'autorité envers des adolescents masculins pourrait contribuer à protéger la société. Une interdiction de contact avec la victime et les membres de sa famille pourrait également sécuriser ceux-ci. »

[39]        Avec le consentement de la poursuite, la défense a produit divers documents.

[40]        Monsieur X est le grand-père paternel des enfants. Il connaît l'accusée depuis plus de 10 ans et cette dernière est une personne désirant fortement motiver, encourager et supporter les gens.

[41]        À de nombreuses occasions, il a pu observer que l'accusée est une mère idéale pour ses enfants.

[42]        Au cours de ses démêlés avec la justice, elle a continué d'être présente et engagée auprès de ses enfants.

[43]        Elle et son conjoint se sont assurés de protéger ces derniers des médias.

[44]        Tout en étant conscient que sa belle-fille fut déclarée coupable de trois (3) chefs d'accusations, il est convaincu qu'elle a déjà payé un prix très élevé pour ceux-ci.

[45]        Les médias et les médias sociaux ont fréquemment discuté de ce dossier, de sorte que le nom de Tania Pontbriand ne sera pas oublié et qu'elle continuera à servir sa peine dans les années futures.

[46]        Elle a également connu l'humiliation et la perte de sa réputation.

[47]        Il demande au Tribunal de prendre en considération la vie de ces deux jeunes enfants ayant besoin de la présence, de l'amour et du support de leur mère.

[48]        Il est évident pour l'auteur de cette lettre que l'accusée ne représente pas un danger pour la société et rappelle qu'elle est en liberté depuis 2007.

[49]        Une lettre de l'employeur du conjoint de l'accusée confirme que ce dernier travaille depuis 2008 au sein de leur entreprise.

[50]        Dans le cadre de son travail, monsieur doit voyager sur une base régulière au Québec et hors de ce territoire et parfois, aucun préavis ne précède ces déplacements pouvant atteindre quelques jours à quelques semaines.

[51]        En liasse, sont déposées sous la côte S-1, diverses lettres dont le Tribunal a fait lecture de chacune d'entre elles.

[52]        Dans l'exécution de son travail à temps partiel, elle y fait preuve d'esprit d'équipe et de minutie et de la part de la clientèle, on ne reçoit que d'excellents commentaires concernant l'accusée.

[53]        Quant aux autres lettres, on rappelle au Tribunal que cette dernière est et sera toujours une personne positive dans la société. De plus, elle est décrite comme une excellente mère et qu'il serait dévastateur pour ses deux enfants si le Tribunal condamne la délinquante à une peine de détention. On y suggère que cette peine soit purgée dans la collectivité et qu'elle exécute des travaux communautaires.

[54]        De plus, on y dénonce la publicité entretenue autour de cette affaire et la perte de sa bonne réputation.

[55]        Toutes ces personnes y compris son frère la supportent actuellement ainsi que dans le futur.

[56]        Sous la côte S-2 sont déposées d'autres lettres de diverses personnes connaissant l'accusée depuis de nombreuses années. Le contenu de celles-ci est similaire aux autres. Le Tribunal ne s'est pas attardé dans sa réflexion à celles dont les auteurs croient encore en l'innocence de l'accusée.

[57]        De celles-ci, le Tribunal a choisi d'en citer une en particulier représentant le portrait de la grande majorité des documents déposés sous S-1 et S-2 :

« June 15, 2014

Re: Sentencing hearing for Tania Pontbriand

To: Judge Valmont Beaulieu

I grew up in Mascouche, Quebec and went to Rosemere High School with Tania Pontbriand. We rode on the same yellow school bus to school each day. Although I am a year or so older than Tania and we were not in the same classes, her outgoing nature quickly made an impression with me.

As adults, we have had the chance to reacquaint and truly become good friends over the last 15 years. Tania is a woman who shows absolute devotion in everything she does. When Tania's father needs help each year with his grass farm, she is there. When Tania's mother had breast cancer and needed treatments and help going to appointments, she is there. When friends' are going though very hard times, she is there. When her partner and her children need her most through the ups and downs of life and all of its challenges, she is there. Tania is a pillar within her family and in her circle of friends. She is also a respected member of her community and many people turn to her and rely on her for advice, leadership and support.

While her verdict was ruled as guilty, I ask that you assign Tania community service as her sentencing as our society will benefit from her contributions. During the many long years that the investigations and trials have taken, Tania and her family have had more than enough time to reflect on the events and been punished enough by the lengthy process, delays, and the media which like to dramatize and paint a headline-splashy and unfavourable light.

Please assign Tania community service. She has two of the most adorable and lovely children any family could wish for and a devoted partner who loves her and she is the pillar in that family. Please allow them to continue to live together, and not break up a happy home, while Tania serves her time completing community service work.

Very truly yours,

Glenna Smith »

[58]        De plus, sous la côte S-3 sont déposées de nombreuses lettres demandant au Tribunal d'imposer à l'accusée une peine à être purgée dans la communauté. Le Tribunal a pu y lire des propos semblables aux autres lettres déposées et le Tribunal cite l'une de celles-ci :

« Lorraine, 17 juin 2014.

Bonjour,

Je me présente, je suis Sylvie Cholette, la présidente d'un organisme à but non-lucratif Les Matins Mères et Monde et une maman à la maison de 3 enfants. J'ai d'abord eu une carrière de vingt ans au sein de Bombardier avant de donner ma démission. C'est vous dire à quel point mes enfants sont ma priorité et toute mon âme.

Je n'aurai aucun mal à laisser mes enfants sous la garde de Tania Pontbriand. Elle est sans aucun doute une très bonne personne. Elle ne cesse de nous encourager à devenir meilleure, à toujours nous améliorer. Tania Pontbriand n'est pas un danger pour la société, ni pour personne peu importent l'âge.

Je considère qu'elle vit sa peine à tous les jours depuis déjà sept ans en ne pouvant plus pratiquer le métier pour lequel elle a étudié. En ne pouvant plus permettre à des jeunes femmes et des jeunes hommes de se surpasser afin de devenir des adultes responsables.

Il ne faut surtout pas oublié toute la peine qu'auront ses enfants, si elle doit être retirée de sa famille. Quels impacts pour leurs équilibres ? Des enfants en jeune âge ont besoin de leur mère pour bien s'épanouir.

Une peine dans la communauté serait bien suffisante à mon avis.

Merci de considérer mon opinion.

Bien à vous.

Sylvie Cholette »

[59]        La représentante du Directeur des poursuites criminelles et pénales avec le consentement de la défense a déposé un document rédigé par la victime au sujet des conséquences vécues, qu'elle vit présentement et vivra suite à la commission des actes criminels posés par l'accusée.

[60]        La victime en premier lieu dénonce avec vigueur la médiatisation du procès :

« […] I am extremely disappointed with the media's decontextualization and sensationalization of the events and case. Rather than taking this as an opportunity to have a discussion about exploitation and domination within sexual relations and other social contexts more generally, many media commentators paraded the classic tropes of gender stereotypes, rape myths, mental health concerns, and victim blaming that accompany all media trials. This is an insult to all victims and discourages future victims from coming forward in fear of having their character assassinated in the public light. The prolonged trial and media coverage has created an entirely new form of adversity which I have had to overcome. While anonymity protects the victim's identity, it does not protect their dignity. »

[61]        Le Tribunal note que la victime sait aussi reconnaître les actions positives posées par l'accusée et admet qu'à cette époque, il était trop naïf pour reconnaître les mensonges et la manipulation de l'accusée à son égard.

[62]        De plus, il a vécu de la culpabilité face à sa famille, le mari de l'accusée et ses amis par ses propres mensonges :

« With regard to Tania Pontbriand's actions, it is extremely difficult for me to express the impact not only because of temporal distance, but because they are memories that I do not wish to re-experience. Much of the negative effects are plainly obvious to any parent, respectable teacher, and individual with empathy. My experience was no ordinary teenage fling.

As with all social relations, each of us wears several different masks in front of different people. I have no intention of denying the positive influence Tania Pontbriand has had on the lives of many of her students and friends. However, I have profoundly experienced a side of her that is hidden from her supporters. Over the years of our relation, she systematically alienated me from my friends and family so as to satisfy her own egotistic and sexual desires. I was far too naïve at the time to recognize her lies and manipulation; lies which continue to exercise their force on those closest to her. The loyalty and vigour of her supporters is a testament to her skills in deception and manipulation. It was only after 5 years and completely severing contact with her that I was able to see through her network of deceit. She is a person who used her position as a teacher to groom a 15 year old into a sexual affair. While she relishes the thrill of secrecy, I still carry the guilt for having lied to her husband, my friends, and my family.

The affair left me confused, conflicted, and depressed. When I had first confided in her, the thought that a popular, married teacher would turn my trust into a sexual relationship had never crossed my mind. The stress and confusion persisted for several years, greatly impacting my post-secondary education and leading me to drop-out of university. While I have since reoriented my life and completed university, the financial loss, alienation from my loved ones, and years wasted is time that I can never get back.

I came forward about my experience not out of anger but in concern that her secret life has and would continue to negatively impact and derail the lives of other young students. This ordeal has left unmendable scars within my family and friendships, but I am extremely grateful that my friends and family have forgiven me for my naivety and lies long before I have been able to forgive myself.

Thank you. »

[63]        La défense a produit des témoins dont la crédibilité et la fiabilité ne furent pas remises en doute par la poursuite et ne le seront point par le Tribunal.

[64]        Ces personnes ont témoigné avec une grande émotion et le Tribunal respecte celle-ci et comprend leurs demandes.

[65]        La mère de l'accusée a raconté l'enfance heureuse de sa fille. Cette dernière s'est réjouie à la naissance de sa sœur. L'accusée a apprécié travailler à la ferme et a porté une attention particulière aux animaux et aux oiseaux.

[66]        Elle s'est présentée devant le Tribunal afin de partager ses inquiétudes concernant ses deux petits enfants.

[67]        Sa fille aimait enseigner, donner des heures après les cours, était près des parents et des autres employés.

[68]        Depuis les accusations, elle a perdu son emploi, tout perdu sauf ses deux enfants et ces derniers ont besoin de leur mère.

[69]        Après 7 ans, cette grand-mère désire protéger ses petits enfants et que répondre à la question de ces derniers : « Pourquoi maman ne revient pas à la maison ? » si le Tribunal condamne cette dernière à de la détention ferme.

[70]        Madame a combattu un cancer du sein, doit prendre de la médication et ne pourrait prendre soin de ses petits enfants si leur mère est absente de la maison.

[71]        La mère du conjoint de l'accusée connaît cette dernière depuis 12 ans.

[72]        Souvent, elle accompagne ses petits enfants à des activités sans la présence de leur mère. Elle désire également protéger ces derniers des médias.

[73]        Depuis les procédures, elle témoigne : « on a vécu l'enfer, ça dure depuis 8 ans, ça lâche pas! »

[74]        Elle-même a combattu un cancer et ne serait pas en mesure de prendre soin de ses petits enfants.

[75]        Le cri du cœur de ces deux grands-mères : « il ne faut pas priver ces enfants de leur mère » est encore présent aux oreilles du Tribunal et ce dernier est convaincu de leurs sentiments profonds et sincères.

[76]        Une ancienne collègue de travail a témoigné à l'effet que toute sa vie, l'accusée a désiré être professeure et le tout c'est terminé depuis 7 ans. Vu la médiatisation du dossier, elle ne peut être présente à certaines des activités avec ses enfants. L'accusée est une personne généreuse avec tous : « gave, gave, gave ».

[77]        L'accusée est entraîneuse au club Trio forme depuis 2 ans et ce dernier témoin est décoratrice d'intérieurs.

[78]        Le Tribunal ne fut nullement indisposé par certains propos de cette dame qui dès le début de son témoignage s'est demandée si la présomption d'innocence existait encore en ce pays envers les personnes subissant un procès.

[79]        Au grand étonnement du Tribunal, ce dernier a appris que pendant le procès, un animateur d'une émission télévisée a invité cinq (5) enseignantes afin de discuter durant une heure des faits reprochés à l'accusée. Un verdict unanime est prononcé : culpabilité.

[80]        De plus, elle relate qu'à un poste radiophonique à Montréal ayant une grande cote d'écoute, l'animateur le vendredi matin invite les auditeurs à communiquer avec ce dernier afin de composer une chanson à répondre sur un air de folklore québécois portant sur un sujet particulier.

[81]        Avant le prononcé du verdict, un vendredi matin, la chanson composée comprenait ces mots : « La Pontbriand se tape des petits gars ».

[82]        De plus, avant le verdict, un animateur de télévision fort connu d'une émission matinale a animé une programmation au sujet de ce dossier. De nombreuses personnes ont téléphoné et condamnaient l'accusée.

[83]        Suite à cette émission, ce témoin a communiqué avec cet animateur et ce dernier a donné suite à son appel. L'animateur aurait mentionné qu'il aurait lui aussi apprécié à 15 ans de connaître un début de vie sexuelle similaire.

[84]        L'ensemble des femmes s'entraînant sous les conseils de l'accusée se sont rendues à la résidence de cette dernière afin de rafraîchir les lieux, car tout l'argent que l'accusée gagne est dépensé « pour le procès ». En fin de journée, ses enfants étaient heureux de jouer sur un nouveau tapis et l'on constate un premier réel sourire sur le visage de l'accusée.

[85]        Au sujet de la médiatisation dont a souffert l'accusée, la poursuite a précisé au Tribunal avec l'accord des avocates de la défense que la victime a elle aussi vécu les conséquences fort négatives de celle-ci.

[86]        Premièrement, il en discute dans sa déclaration écrite produite et deuxièmement, l'animateur de la même émission télévisée disait sur les ondes : « un homme se plaint de quoi, il se plaint alors qu'il s'agit du rêve de tous les gars ce qu'il a vécu. »

Principes d'ordre général lors de l'imposition d'une peine

[87]        Le Tribunal, lorsqu'il prononce une peine, doit appliquer la loi et l'enseignement de la Cour d'appel et de la Cour suprême du Canada. Il doit imposer une sanction juste et proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité de l'accusée. L'article 718 du Code criminel énumère ainsi les objectifs de celle-ci :

a) dénoncer le comportement illégal;

b) dissuader les délinquants, et quiconque, de commettre des infractions;

c) isoler, au besoin, les délinquants du reste de la société;

d) favoriser la réinsertion sociale des délinquants;

e) assurer la réparation des torts causés aux victimes ou à la collectivité;

f) susciter la conscience de leurs responsabilités chez les délinquants, notamment par la reconnaissance du tort qu'ils ont causé aux victimes et à la collectivité;

[88]        Rappelons que la peine de détention ferme doit se prononcer en dernier recours et que le Tribunal se doit d'examiner la possibilité de sanctions moins contraignantes lorsque les circonstances le justifient.

[89]        Au surplus, le législateur prévoit à l'article 718.2 du Code criminel que la peine doit être adaptée aux circonstances aggravantes ou atténuantes liées à la perpétration de l'infraction ou à la situation du délinquant.

[90]        La législation prévoit à l'article 718.2 iii) du Code criminel que l'infraction perpétrée par le délinquant si elle constitue un abus de confiance de la victime ou un abus d'autorité à son égard, sont considérés à titre de circonstances aggravantes.

[91]        Même si les propos de l'honorable juge Marchand de la Cour d'appel du Québec datent de 1948, ils sont toujours d'actualité :

« On peut dire qu'une sentence à cette qualité de convenance quand elle est proportionnée à la fois à la gravité objective de l'infraction et à sa gravité subjective pour le délinquant et que, de plus, elle a les qualités nécessaires d'exemplarité protectrice et de correction curative. La gravité objective est décrite dans le code; la gravité subjective d'un acte peut varier suivant le degré de l'intelligence et de la détermination de la volonté du délinquant. L'âge dans les deux extrêmes d'immaturité et de la sénilité doit aussi être considérée.[1] »

[92]        Dans l'arrêt R. c. M. (C.A.)[2], la Cour suprême reprend ce principe d'une grande portée quant à la proportionnalité à la page 530 :

« Le juge Cory a de la même façon reconnu l'importance du «principe de proportionnalité» lorsqu'il a déclaré, au nom de la Cour, dans l'arrêt R. c. M. (J.J.), [1993] 2 R.C.S. 421, à la p. 431, qu'«[i]l est vrai que, pour les adultes comme pour les mineurs, la peine doit être proportionnelle à l'infraction commise». En effet, le principe de proportionnalité en matière de punition est fondamentalement lié au principe général de la responsabilité criminelle qui veut qu'on ne puisse imposer de sanction pénale qu'aux contrevenants possédant un état d'esprit moralement coupable. Dans le cours de l'examen de l'obligation constitutionnelle relative à l'existence d'une faute pour qu'il y ait meurtre, R. c. Martineau, [1990] 2 R.C.S. 633, à la p. 645, j'ai fait état des principes connexe que «la peine doit être proportionnée à la culpabilité morale du délinquant» et que «ceux qui causent un préjudice intentionnellement doivent être punis plus sévèrement que ceux qui le font involontairement». Pour ce qui concerne le principe de proportionnalité en général, voir l'arrêt R. c. Wilmott, [1967] 1 C.C.C. 171 (C.A. Ont.), aux pp. 178 et 179; Réformer la sentence : une approche canadienne, op. cit., à la p. 169. »

[93]        De plus, au paragraphe 41, la Cour précise que ce principe de proportionnalité se présente comme une obligation constitutionnelle et que des peines excessives au point de ne pas être compatibles avec la dignité humaine, violeront l'interdiction d'imposer des peines cruelles que fait la Constitution à l'article 12 de la Charte canadienne des droits et libertés.

[94]        La détermination de la peine est la tâche la plus difficile pour un juge d'instance, car à chaque prononcé de peine, il se doit d'individualiser celle-ci parce qu'il punit un individu et non un crime.

[95]        À cause de cette individualisation pour un même crime, certaines peines différentes seront prononcées comme le rappelle l'honorable juge Lamer dans l'arrêt R. c. Proulx[3] :

« Notre Cour a statué à maintes reprises que la détermination de la peine est un processus individualisé, dans le cadre duquel le juge du procès dispose d'un pouvoir discrétionnaire considérable pour déterminer la peine appropriée. La justification de cette approche individualisée réside dans le principe de la proportionnalité, principe fondamental de détermination de la peine suivant lequel la peine doit être proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du délinquant. Afin que la peine corresponde au crime, le principe de proportionnalité commande l'examen de la situation particulière du délinquant et des circonstances particulières de l'infraction. La conséquence de l'application d'une telle démarche individualisée est qu'il existera inévitablement des écarts entre les peines prononcées pour des crimes donnés. »

[96]        Seuls les esprits mal intentionnés ou recherchant le sensationnalisme ne peuvent comprendre ces sages propos. Rappelons que le but d'une peine est de punir un individu et qu'on ne doit jamais y retrouver un ton de vengeance. Par contre, le Tribunal se doit de considérer les facteurs aggravants et non seulement atténuants lors de son délibéré.

[97]        Les propos du Tribunal reposent sur ceux de la Cour suprême du Canada lorsqu'on consulte l'arrêt R. c. M. (C.A.)[4] :

« […] la vengeance n'au aucun rôle à jouer dans un système civilisé de détermination de la peine. Voir Ruby, Sentencing, op. cit., à la p.13. La vengeance, si je comprends bien, est un acte préjudiciable et non mesuré qu'un individu inflige à une autre personne, fréquemment sous le coup de l'émotion et de la colère, à titre de représailles pour un préjudice qu'il a lui-même subi aux mains de cette personne. En contexte criminel, par contraste, le châtiment se traduit par la détermination objective, raisonnée et mesurée d'une peine appropriée, reflétant adéquatement la culpabilité morale du délinquant, compte tenu des risques pris intentionnellement par le contrevenant, du préjudice qu'il a causé en conséquence et du caractère normatif de sa conduite. De plus, contrairement à la vengeance, le châtiment intègre un principe de modération; en effet, le châtiment exige l'application d'une peine juste et appropriée, rien de plus. »

[98]        De plus, le juge d'instance doit prononcer des peines dans lesquelles sont toujours présents les critères d'exemplarité, de dissuasion et de réhabilitation.

[99]        Comme l'enseigne la jurisprudence, les tribunaux ont aussi le devoir par le prononcé de leurs peines, de rappeler le consensus social existant dans la communauté canadienne : les professeurs de nos adolescent(e)s à qui les parents les confient, doivent instruire, éduquer et léguer de bonnes valeurs et n'ont pas pour fonction de les initier à la vie sexuelle et d'exploiter leur manque de maturité.

[100]     La Cour suprême, dans l'arrêt R. c. M. (C.A.)[5], nous dicte clairement cette conduite à ce sujet :

« […] Pour sa part, l'objectif de réprobation commande que la peine indique que la société condamne la conduite de ce contrevenant. Bref, une peine assortie d'un élément réprobateur représente une déclaration collective ayant valeur de symbole, que la conduite du contrevenant doit être punie parce qu'elle a porté atteinte au code des valeurs fondamentales dans notre société qui sont constatées dans notre droit pénal substantiel. Comme l'a dit le lors juge Lawton dans R. c. Sargeant (1974), 60 Cr. App. R.74, à la p. 77: [TRADUCTION] «la société doit, par l'entremise des tribunaux, communiquer sa répulsion à l'égard de certains crimes, et les peines qu'ils infligent sont le seul moyen qu'ont les tribunaux de transmettre ce message». La pertinence du châtiment et de la réprobation en tant qu'objectifs de la détermination de la peine fait bien ressortir que notre système de justice pénale n'est pas simplement un vaste régime de sanctions négatives visant à empêcher les conduites objectivement préjudiciables en haussant le coût que doit supporter le contrevenant qui commet une infraction énumérée. Notre droit criminel est également un système de valeurs. La peine qui exprime la réprobation de la société est uniquement le moyen par lequel ces valeurs sont communiquées. En résumé, en plus d'attacher des conséquences négatives aux comportements indésirables, les peines infligées par les tribunaux devraient également être infligées d'une manière propre à enseigner de manière positive la gamme fondamentale des va leurs communes que partagent l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes et qui sont exprimées par le Code criminel.

p. 558 »

[101]     De plus, au paragraphe 82, le regretté honorable juge Lamer définit ainsi le devoir général du juge :

« […] En dernière analyse, le devoir général du juge qui inflige la peine est de faire appel à tous les principes légitimes de détermination afin de fixer une peine «juste et appropriée», qui reflète la gravité de l'infraction commise et la culpabilité morale du contrevenant. »

[102]     Le Tribunal rappelle qu'il doit tenir compte du rapport soumis par l'agente de probation et soupeser la gravité subjective et objective se rattachant à l'infraction et évaluer le poids des facteurs aggravants et atténuants.

[103]     En dernier lieu, le Tribunal se doit de considérer l'enseignement constant des tribunaux relativement au crime d'agression sexuelle : la dissuasion générale est un critère prédominant.

[104]     Malgré ce propos, le Tribunal doit tenir compte de l'enseignement de la Cour d'appel du Québec dans Paré c. R.[6], sous la plume de l'honorable juge François Doyon :

« LA RÈGLE DE LA PROPORTIONNALITÉ ET POIDS INDU ACCORDÉ AUX CIRCONSTANCES AGGRAVANTES PAR RAPPORT À CELUI CONFÉRÉ AUX CIRCONSTANCES ATTÉNUANTES

[43]      Le juge de première instance a donné beaucoup d'importance à l'objectif de dissuasion générale. Avant d'aborder l'analyse du jugement sur cette question, il peut être utile de définir ce terme.

[44]      Au paragr. 2 de R. c. B.W.P.; R. c. B.V.N., [2006] 1 R.C.S. 941, la juge Charron en donne cette définition :

En tant que principe de détermination de la peine, la dissuasion consiste à imposer une sanction dans le but de décourager le délinquant, et quiconque, de se livrer à des activités criminelles. Lorsque la dissuasion vise le délinquant traduit devant le tribunal, on parle de « dissuasion spécifique », lorsqu’elle vise d’autres personnes, on parle de « dissuasion générale ». Les présents pourvois portent sur la dissuasion générale, qui est censée opérer ainsi : des criminels potentiels éviteront de se livrer à des activités criminelles en raison de l’exemple donné par la punition infligée au délinquant. Quand la dissuasion générale est prise en compte dans la détermination de la peine, le délinquant est puni plus sévèrement, non seulement parce qu’il le mérite, mais également parce que le tribunal décide de transmettre un message à quiconque pourrait être tenté de se livrer à des activités criminelles similaires.

 

[45]      La dissuasion générale autorise donc un tribunal à imposer une peine plus sévère pour faire en sorte de transmettre un message en vue de dissuader d'autres personnes de commettre une telle infraction, mais encore faut-il que le délinquant le mérite. Cette idée selon laquelle le délinquant doit mériter la peine qui lui est infligée nous renvoie nécessairement au principe fondamental de proportionnalité énoncé par le législateur à l'art. 718.1 C.cr. :

La peine est proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du délinquant.

 

[46]      La Cour d'appel de Terre-Neuve et Labrador conclut d'ailleurs, dans R. v. Rogers, [2008] N.J. no 81, qu'une peine dont la durée serait augmentée pour un motif de dissuasion, sans tenir compte de cette règle de proportionnalité, constituerait une erreur de droit :

42 From the trial judge's reasons, it appears his main emphasis was on specific and general deterrence and denunciation. The trial judge did not explain, however, why a sentence within the range established by the cases noted would not achieve this. He did refer to his previous sentencing of Rogers in 2005 for causing a disturbance and breach of probation and noted, at para. 15: "It is clear that that sentence failed to specifically deter the accused from committing other crimes". The trial judge also noted Roger's lack of insight regarding the risk at which he had placed his son.

43 Increasing the length of a sentence for specific deterrence without regard to whether it is proportionate to the gravity of the offence and the degree of responsibility of the offender is an error of law. The proportionality principle may be informed by the requirement that sentences be similar, in that the sentences in prior similar cases provide a gauge as to the view of various courts concerning the gravity of a particular offence and the degree of responsibility calling for sanction in particular circumstances.

[…]

[48]      En somme, « Monsieur et Madame Tout-le-Monde » doivent être dissuadés de commettre de telles infractions et, pour que le message porte, il faut imposer une peine sévère à l'appelant, malgré les nombreuses circonstances atténuantes et malgré le fait que « sa réinsertion sociale ne pose aucun problème ». Autrement dit, l'appelant doit être puni sévèrement pour que ceux et celles qui ne sont pas des criminels y pensent à deux fois avant de conduire de la sorte. À mon avis, cette façon de concevoir la peine est incompatible avec le principe d'individualisation. De plus, la dénonciation, l'exemplarité et la dissuasion générale peuvent être atteintes sans nécessairement infliger des peines d'emprisonnement de plus en plus sévères. En soi, une peine de pénitencier3, par exemple, peut sûrement être dissuasive et suffire pour dénoncer le crime et dissuader la personne ordinaire de le commettre. Je doute que « Monsieur et Madame Tout-le-Monde », sachant qu'une peine de pénitencier leur serait infligée, ne seraient pas dissuadés par une telle perspective, sans qu'il soit nécessaire d'en hausser le quantum pour cette seule raison. Le quantum d'une peine ne peut d'ailleurs pas être déterminé sur la seule base de la perception qu'en aura le public.

[…]

[54]      L'efficacité du principe même de la dissuasion générale est aussi objet de contestation, comme le souligne la juge Charron dans R. c. B.W.P.; R. c. B.V.N, précité, au paragr. 3 :

Bien que la dissuasion générale soit dans l’ensemble bien comprise en tant qu’objectif de la détermination de la peine, son degré d’efficacité suscite beaucoup de controverse. Ceux qui préconisent son abolition comme principe de détermination de la peine, particulièrement dans le cas des adolescents, soutiennent avec vigueur que rien ne démontre qu’elle contribue réellement à la prévention du crime. Ceux qui préconisent son maintien défendent tout aussi fermement leur position; ils invoquent l’utilisation par la société d’une forme de dissuasion générale pour inciter les adolescents à faire des choix responsables sur différentes questions, notamment en matière de tabagisme, de consommation d’alcool et de drogues et de conduite de véhicules à moteur. […]

[…]

[58]      Il n'est donc pas question de prétendre que la dissuasion générale n'est pas un objectif approprié et ne peut jamais être atteinte par des peines sévères. Il faut plutôt se rappeler que les données empiriques ne permettent pas d'en préciser les effets et que, de toute façon, la dissuasion ne peut être le seul objectif, la règle d'or demeurant la recherche de la proportionnalité.

[59]      Il vaut aussi de rappeler qu'il faut faire preuve de retenue lorsque la détention est fondée sur l'objectif de dissuasion générale. C'est ce que la Cour rappelle dans R. c. Coffin, 2006 J.Q. no 3136, au paragr. 57, ce qui est d'ailleurs dans la lignée de l'arrêt de la Cour d'appel d'Ontario, R. v. Wismayer, précité. Le juge Rosenberg y indique, au paragr. 48 :

This is not to doubt the theory of general deterrence, or its application to the manner of service of the sentence of imprisonment. Requiring some offenders to serve the sentence in a correctional facility as opposed to the community can reasonably be expected to deter some persons from offending: see R. v. Shropshire, supra, at p. 202. However, these conclusions suggest that general deterrence is not a sufficient justification for refusing to impose a conditional sentence. In view of its extremely negative collateral effects, incarceration should be used with great restraint where the justification is general deterrence. These effects have been repeatedly noted with depressing regularity. Some of the comments have been collected by the Sentencing Commission at pp. 42-44 and bear repeating: […]

[…]

[62]      En somme, la dissuasion générale, la dénonciation, l'exemplarité et même la punition doivent être prises en compte. Ce serait contraire aux voeux du législateur de ne pas le faire. Je dis simplement qu'il faut rechercher un juste équilibre et que le résultat consistera erronément à punir un crime, plutôt qu'un délinquant, si l'exercice est limité à ces considérations. Or, l'individualisation des peines est un objectif qui ne peut être ignoré, comme le souligne le juge LeBel dans R. c. Nasogaluak, précité, au paragr. 43 :

[…] Sous réserve de certaines règles particulières prescrites par la loi, le prononcé d’une peine « juste » reste un processus individualisé, qui oblige le juge à soupeser les objectifs de détermination de la peine de façon à tenir compte le mieux possible des circonstances de l’affaire. […]

[63]      Dans R. c. M.(C.A.), précité, le juge en chef Lamer écrivait d'ailleurs que « la détermination de la peine est un processus intrinsèquement individualisé ».

[64]      Ce principe fondamental est exprimé en ces termes à l'art. 718.1 C.c.r :

La peine est proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du délinquant.

[65]      Dans R.c. Proulx, précité, le juge en chef Lamer précise, au paragr. 82 :

Notre Cour a statué à maintes reprises que la détermination de la peine est un processus individualisé, dans le cadre duquel le juge du procès dispose d’un pouvoir discrétionnaire considérable pour déterminer la peine appropriée. La justification de cette approche individualisée réside dans le principe de proportionnalité, principe fondamental de détermination de la peine suivant lequel la peine doit être proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant. Afin que «la peine corresponde au crime», le principe de proportionnalité commande l’examen de la situation particulière du délinquant et des circonstances particulières de l’infraction. […] »

[105]     Donc, l'individualisation de la peine lors de son prononcé est aussi important que le principe de la présomption d'innocence lors de la tenue d'un procès décrit dans certaines décisions comme « un fil d'or ».

[106]     Malgré l'importance de l'individualisation de la peine, le Tribunal se doit de se soucier du principe de l'harmonisation des peines tel qu'énoncé à l'article 718.2 b) du Code criminel.

[107]     Le Tribunal s'est livré à l'analyse des décisions produites par les parties.

Jurisprudence de la poursuite

[108]     R. v. Fraser[7] : Suite à un procès devant jury, l'accusé est déclaré coupable d'une infraction contraire à l'article 153(1)a) du Code criminel. L'accusé était un professeur populaire et dévoué auprès de ces étudiants.

[109]     Les faits reprochés se déroulèrent entre le mois de février 2007 et mai 2008. Après le 16e anniversaire de naissance de l'adolescente débutèrent des relations sexuelles au domicile du professeur alors qu'elle gardait les enfants de l'accusé et à d'autres lieux. De plus, il y a eu des tentatives de sodomie et il lui a appris à faire le sexe oral.

[110]     Une peine de 9 mois d'incarcération fut imposée suivie d'une probation d'une année.

[111]     Le juge Cacchione décrit les attentes des parents et le rôle des professeurs :

« [52]    Sexual contact between a student under the age of 18 and a teacher is a criminal offence.  Parents and the community at large expect and trust that their children who go to school will be educated by the teachers and not sexually abused or exploited  by them.  The expectation is that children will be protected from any abuse in the school environment by their teachers.  When a teacher breaches that trust by engaging or allowing a student to engage in sexual activity with him or her, it is always a serious matter.  The onus and expectation is always on the teacher to reject all suggestions and initiatives that may lead to sexual contact with a student.

[53]             The community expects that the persons who are entrusted with the education and well being of its children will behave in accordance with the highest standards of morality and propriety.

[54]       Teachers are responsible for maintaining appropriate and professional relationships with their students.  It is a question of boundaries.  It is the teacher’s responsibility to ensure that the professional relationship does not become distorted with a personal relationship.  As Vertes J. stated in R. v. Lizotte, [2007] N.W.T.J. No. 54 at para. 4:

...Those who take the calculated risk of allowing themselves to give in to their personal desires will be punished for their breach of the trust and the duty they owe to their students and to the community.

[55] The New Brunswick case of R. v. C.A.C., [2006] N.B.J. No. 372 is similar to the present case in that the age differential between the accused teacher and the complainant is almost identical, as was the length of the sexual relationship. I agree with the comments of Robichaud J. at para. 41 where it is stated:

...Teachers and other such authoritative figures must ensure that crushes expressed by actions or by words from their students or pupils are not nurtured, but rather, are discouraged and are stalled from the outset. »

[112]     Au surplus, le juge d'instance cite de nombreuses décisions :

« [33]    Cases decided after the 2005 amendments to s.153 of the Criminal Code, which provided for a mandatory 45 day minimum sentence for offences tried by indictment, show that primary consideration should be given to the objectives of denunciation and deterrence in cases involving an offence under s. 153.  Prior to these amendments there was no minimum punishment for this offence and therefore conditional sentences were available.

[34]       Cases prior to the amendments are of little use in determining the range of sentence available for this offence but are consistent in affirming that deterrence and denunciation are the primary principles in such cases.

[35]       Cases decided after the amendments show that the range of sentences for this offence is from six months to four and a half years imprisonment.

[36]       In R. v. K.G.R. , [2009], A.J. No. 1264 the accused was a spiritual healer for the mother of the two complainants.  The mother had cancer.  The accused was convicted of offences contrary to s.151 and s.153 of the Code.  The complainants were 14 and 16 years old.  The accused pled guilty.  A provincial court judge sentenced the accused to five and one half years which was reduced on appeal to four and a half years; See R. v. K.G.R., [2009] A.J. No. 1264.

[37]       Although the R. v. Byford decision was handed down before the 2005 amendments, the case factually is very similar to the one before this court.

[38]       In R. v. Byford, [2000] O.J. No. 2134 the accused school teacher plead guilty to sexual exploitation of one of his students.  The sexual contact began with kissing and escalating to sexual intercourse and continued for a period of approximately two years.  The victim suffered bouts of depression as a result of that relationship.  The accused showed public remorse for his actions.  Gauthier J. of the Ontario Superior Court of Justice sentenced the accused to 18 months imprisonment followed by 18 months probation.

[39]       R. v. Lithgow, [2007]  O.J. No. 4448 involved a relationship between a teacher in his mid-50's and a grade 11 student who had been his former student in grades 9 and 10.  Emails were exchanged between the two.  Those emails became increasingly sexual.  When the accused was no longer the complainant’s teacher but still tutored her in mathematics, they began a sexual relationship which included oral sex and unprotected intercourse on approximately 25 to 30 occasions.  Lithgow was sentenced to 15 months incarceration for the sexual exploitation.  He had also been convicted of internet luring and received a 12 month conditional sentence for that offence.

[40]       In R. v. P.G., [2005] O.J. No. 4620 (Ont. C.A.) affirmed by [2006] O.J. No. 3614 (Ont. C.A.) a 26 year old female teacher was involved in a sexual relationship with a 14 year old male student.  The relationship involved intercourse and lasted for less than a month before they were discovered.  The accused was sentenced to 15 months incarceration followed by two years probation.

[…]

[42]       In R. v. Power, [2009] B.C.J. NO. 2194 a 47 year old lawyer was sentenced to 18 months incarceration and two years probation for one incident involving the sexual touching of a 14 year old client and for having oral sex with that young person.

[43]       R. v. N.M., [2009] B.C.J. No. 1776 a 29 year old teacher was sentenced to six months incarceration and two years probation for one instance of sexual contact including intercourse with a grade 12 student.

[44]       R. v. Debidin, [2007] O.J. No. 3429 a 41 year old male dance teacher received six months incarceration and a concurrent six month sentence for child pornography for having sexual relations with a 15 to 16 year old former female dance student.  The sexual activity included oral sex, digital penetration and an incomplete attempt at intercourse.  The sentencing judge refused to make an order under the Sexual Offender Identification Registration Act.  The Court of Appeal allowed the appeal and required the accused to register under SOIRA: See [2008] O.J. No. 5219.

[45]       In R. v. C.A.C., [2006] N.B.J. No. 372, the accused school teacher was approximately 17 years older than his 16 year old former student.  He was not her teacher at the time of the offence, but did tutor her occasionally.  The relationship lasted for approximately 10 months and involved sexual intercourse.  The accused was sentenced to six months imprisonment followed by a 12 month probation. »

[113]     R. v. V. W.[8] : Dans cette affaire, l'accusé a plaidé coupable à l'infraction prévue à l'article 151 du Code criminel.

[114]     V. W. enseignait à une adolescente alors que cette dernière étudiait en huitième année. À diverses reprises sur une période d'environ une année, l'accusé a commis divers actes à caractère sexuel sur la jeune fille. Auparavant, ils avaient discuté de leurs difficultés personnelles et l'adolescente était vulnérable puisque ses parents se séparaient.

[115]     Malgré le fait que l'accusé était sous enquête policière, il a continué ces activités sexuelles sur la victime. Cette dernière a subi de graves séquelles physiques et psychologiques permanentes.

[116]     Une peine d'une année de réclusion dans un centre de détention fut imposée malgré les remords et regrets exprimés par l'accusé.

[117]     Le juge C. Baird Ellan cite diverses décisions :

« [51]    The later cases cited by defence start with R. v. C.M., 2000 BCPC 64 (CanLII), 2000 BCPC 64, a decision of Judge Bruce, as she then was, involving intercourse between a 53 year old teacher and 17 year old student.  Apparently the student only came several years later to realize the offence was wrong.

[52]       The Court distinguished between grooming and opportunistic behaviour, based on the expert reports and found the offence to be spontaneous and opportunistic, consistent with the tenor of notes and cards exchanged between the two, and the complainant’s statements.  The offender received a conditional sentence of eight months, arguably the equivalent of a four to six month jail sentence.

[53]       The facts of C.M., says defence counsel, are similar to this case, and it should be persuasive as to the appropriate term of the sentence.  However, in my view the issue of reciprocity has more relevance where the complainant is over the statutory age of consent, which is now 16.  The complainant in C.M. was 17.

[54]       The next case cited, R. v. Edwards, 2003 BCCA 214 (CanLII), 2003 BCCA 214 also pre-dates the amendments.  It involved the sexual exploitation by a 27 year old dance instructor of a 15 year old.  The judge was said to have fallen into error in not considering whether the defendant could have received adequate rehabilitative counselling in a non-custodial setting, in over-emphasizing the breach of authority, and in failing to articulate why general deterrence and denunciation could not be achieved without jail.  The Court of Appeal substituted a 12 month conditional sentence for a nine month jail sentence.  This is one of the pre-amendment cases in which the focus was on an issue which is no longer relevant.  In the absence of a conditional sentence as an option, it arguably supports a nine month jail sentence.  I note as well the case involved a less significant age disparity.

[55]       In R. v. G.F.B., 2007 BCPC 363 (CanLII), 2007 BCPC 00363, Challenger PCJ dealt with what was termed a consensual relationship between a 36 year old teacher and his Grade 12 student.  The Crown proceeded summarily and counsel made a joint submission for the minimum 14 day sentence.  The complainant intended to continue the relationship and was legally able to do so at the time of sentencing which was within a year of the offence dates. Judge Challenger expressed grave concerns about the adequacy of the minimum sentence but felt bound to accept the joint submission. 

[56]       R. v. N.M., 2009 BCPC 281 (CanLII), 2009 BCPC 281 involved a 27 year old female teacher who had two sexual encounters including one incident of intercourse with a student in grade 11.  It appears he would have been 16 or 17 at the time.  The facts were aggravated by her having told friends of his about the encounter, and several other actions demonstrating self interest and a lack of insight.  She received a six month sentence.  As noted by Crown counsel, the teacher was very young, and the law had changed the day before the offence occurred.

[57]       In R. v. P.E.S., [2010] O.J. No. 1125 a 44 year old hockey coach engaged in a sexual relationship with a 17 year old player on his team.  There were similar acts of wooing to those here, he singled her out and gave her gifts, behaved romantically, and arranged a sick day at her school so they could be together.  The offence involved oral sex by the offender.  The Court imposed a four month sentence.

[58]       Turning to those cited by the Crown, they are all dated 1996 or later, but none are more recent than 2006.  Most are from out of the province.  The cases cited start with R. v. G.R.F., 2006 NBCA 104 (CanLII), 2006 NBCA 104, involving a younger teacher, with a 14 year old student, and more significant acts.  The appeal court converted a conditional sentence to one of two years jail, noting that gratification was the defendant’s primary aim.  

[59]       R. v. Bedard, 2006 ONSCJ involved a teacher with a student similar in age to this complainant, some grooming, and less significant sexual conduct.  One year was imposed.

[60]       In R. v. M.E.J., 1999 NWTSC, a stepfather offended against a blind victim, in one incident of a more significant nature sexually.  That defendant had alcohol and drug problems and low insight.  Counsel presented a joint submission for a sentence of two and a half years.

[61]       Finally, R. v. J.G.S., [2000] A.J. No. 709 involved a corrections officer supervising the complainant who used threats of jail to coerce sexual acts which were on the low end in terms of significance.  There were three incidents.  He received a nine month sentence. »

[118]     R. v. Lizotte[9] : L'accusé a plaidé coupable à trois chefs d'accusations d'exploitation sexuelle tel que prévu à l'article 153(1)a) du Code criminel.

[119]     Il s'agit de gestes à caractères sexuels posés par un professeur d'éducation physique âgé de 29 ans sur trois victimes. Les relations sexuelles se sont déroulées entre 1999 et 2002.

[120]     Avec deux victimes âgées de 14 et 16 ans, a eu lieu, à une reprise une relation sexuelle. Avec une autre étudiante âgée de 15 ans se sont déroulées plusieurs relations sexuelles.

[121]     L'accusé a démontré des remords sincères et était âgé de 36 ans lors du prononcé de la peine.

[122]     Le juge Vertes prononça une peine de 14 mois de détention ferme pour ces motifs :

« This is a case where the offender engaged in a lengthy and repetitive course of deliberate conduct not with one but with three of his students. He knew that what he was doing was wrong because he actively took steps to hide what he was doing. He kept doing it even after he was warned by a police officer. He took advantage of his position of trust in a small school in a small community. He may have all sorts of sterling qualities but he had a complete disregard for the impact of his conduct on his young students.

p. 9 »

[123]     Le juge d'instance expliqua pourquoi il refusait que la peine soit purgée dans la communauté :

« In my opinion, a conditional sentence in this case would send a wrong message to the victims, the offender, others who are in similar situations as the offender, and the community. Young people in F […], as much as young people anywhere in Canada, need to know that they are protected by the law. People in positions of trust and authority, whether in F […] or elsewhere in Canada, need to realize that they are subject to the control of the law. People in every community need to know that the law exists for their protection and the law must be seen to respond effectively when offences are committed. I have therefore concluded that the sentence must include a term of actual imprisonment.

p. 9-10 »

[124]     Il n'est pas superflu de citer les propos du juge expliquant pourquoi les professeurs portant atteinte à leur position d'autorité et de confiance sont punis sévèrement :

« The jurisprudence demonstrates that teachers who breach their position of trust and authority are treated severely. That is because, as many cases have said, teachers are responsible for maintaining an appropriate and professional relationship with their students. They are the ones responsible for ensuring that the professional relationship does not become distorted with a personal relationship. Those who take the calculated risk of allowing themselves to give in to their personal desires will be punished for their breach of the trust and the duty they owe to their students and to the community.

For these reasons, the law places emphasis on deterrence and denunciation as the primary principles in sentencing for this crime.

p. 1-2 »

[125]     R. v. Biss[10] : Dans ce dossier, l'accusé a plaidé coupable à un chef d'accusation à l'article 153(1)a) du Code criminel et a reçu une peine de 14 mois de détention ferme.

[126]     L'accusé a posé des gestes de masturbation, de sexe oral, a tenté à plusieurs reprises de pénétrer la jeune fille et a introduit ses doigts dans le vagin de sa victime. À cette époque, l'adolescente était âgée de 16 ans et les actes se sont déroulés sur une période de 6 mois. L'accusé était âgé de 53 ans et lors des représentations, il a lu un document dans lequel il écrit : « With this resolution this week I hope to close a painful process for [the victim], her family and for me and for my family, I accept responsability. […] »

[127]     Le juge Bovard résume certaines décisions et certains principes émis par la Cour suprême du Canada :

« [67]    As is often the case, sentencing case law is of assistance to a sentencing court only in a general way because it can only demonstrate what other courts have considered important in sentencing offenders for a particular offense. However, it gives the court an idea of the sentencing range that is considered reasonable in the jurisprudence. But no one case is the same as another; therefore, the cases presented to the court cannot be but a guide in sentencing the offender before the court, albeit a very helpful one.

[68]       The jurisprudence presented to the court in the case at bar refers to many different offenders charged in many different circumstances, all of which are different from the case at bar in their specifics. The range of sentences for this type of offense in this jurisprudence is between 6 months and 18 months. None of the cases is sufficiently similar to the case at bar that it would require the court to impose the same sentence in order to honour the principle of parity.

[69]       Some of the cases point out factors which are helpful in determining what sentence to pass on Mr. Biss. I would like to refer to these now.

[70]       With regard to the potential for rehabilitation of the offender, the Ontario Superior Court of Justice stated in Her Majesty the Queen v. Brent Ashley, 2010 ONSC 6228, at paragraphs 40 and 41 that "the potential to be rehabilitated,…should not be the focus of this court in sentencing an offender who has breached the trust of someone over whom he had authority and who was vulnerable. The focus must be general deterrence and denunciation."

[71]       With regard to the importance of teachers to their students and society at large, in Her Majesty the Queen v. Christopher Paul Mclister, (Sup. Ct. Justice), August 31, 2011, Ct. File No. 1476/10 and No.1530/10, the court said that "it goes without saying that a teacher is in a position of precious trust with respect to the students that he deals with" (page 5).

[72]       The court quoted from Justice La Forest’s decision in R. v. Audet (SCC),(no citation provided) where he stated that "… Teachers play a key role in our society that places them in a direct position of trust and authority towards their students. Parents delegate their parental authority to teachers and entrust them with the responsibility of instilling in their children a large part of the store of learning they will acquire during their development."

[73]       Justice La Forest added that "the integrity of the education system also depends to a great extent upon the perceived integrity of teachers…" He pointed out that the activities of teachers outside the classroom "may conflict with the values which the education system perpetuates".

[74]       In R. v. Plews [2011] O.J. No. 378 (Ont. Sup.Ct) at paragraphs 39, 40, Justice Hill pointed out some very relevant considerations with regard to the role of teachers in our society. He said that "Not only do teachers in the school environment stand in the place of parents insofar as community expectations of how they will instruct and care for students, but also it is anticipated that an educator will be a role model for young persons."

[75]       Justice Hill cited Ross v. New Brunswick School District No. 15, [1996]1 S.C.R. 825 at paragraph 43, where the Supreme Court of Canada stated that :

Teachers are inextricably linked to the integrity of the school system. Teachers occupy positions of trust and confidence, and exert considerable influence over their students as a result of their positions. The conduct of a teacher bears directly upon the community’s perception of the ability of the teacher to fulfill such a position of trust and influence, and upon the community's confidence in the public school system as a whole.

[76]       Justice Hill stated that "A teachers position of trust is essential to the efficient operation of the school system: "

[77]       He cited the Ontario Court of Appeal’s decision in R. v. Lysack, [1988] O.J. No. 287 at paragraph 5 that "Teachers are the trustees of the most precious possession of the community and must be held strictly accountable for any breach of that trust."

[78]       He pointed out that In R. v. R.F.G. 2006 NBCA 104 (CanLII), 2006 NBCA 104 at paragraph 32 the court said that the relationship of trust between a teacher and a student “is considered to be one of the most sacred in our society".

[79]       Justice Hill observed at paragraph 47 that "The overarching principle in sentencing is protection of the public. In the instance of a breach of trust by a teacher, general deterrence and denunciation are paramount concerns." »

[128]     Le Tribunal souligne dans cette affaire que la victime au point de départ s'était adressée à ce professeur afin de recevoir du support dû à la séparation de ses parents. Le juge rappelle que l'accusé a tiré avantage de la vulnérabilité de l'adolescente.

[129]     R. v. Miller[11] : L'accusé a plaidé coupable d'avoir eu plusieurs relations sexuelles avec une étudiante dont il était le tuteur pour le cours de biologie. L'année auparavant, il lui avait enseigné.

[130]     Le tout débuta par des baisers, ensuite des gestes de masturbations et se termina par des relations sexuelles à 4 ou 5 reprises. La victime était âgée de 17 ans.

[131]     Autrefois, le professeur et cette dernière avaient échangé des informations sur leurs vies personnelles.

[132]     Suite à son arrestation, l'accusé tenta de se suicider à deux reprises.

[133]     Le risque de récidive était peu élevé selon le rapport du service de la probation.

[134]     Une peine de détention de 29 mois d'incarcération fut prononcée.

[135]     Les événements s'étaient déroulés sur une période de 3 mois. Suite à l'arrestation, l'accusé n'a pas respecté son engagement en communiquant avec l'adolescente à diverses reprises.

[136]     Madame Pontbriand était une professeure d'expérience, une personne mature et par conséquent, il est opportun de citer les propos du juge Bascom :

« [19]    Mr. Miller was a mature individual, a teacher and a parent.  It would have been foreseeable to him there was a risk his conduct would cause harm to the complainant.  Such culpability is somewhat reduced due to the offender’s state of mind and that he did not intend emotional or physical harm to the complainant. »

Jurisprudence de la défense

[137]     Les avocates de la défense ont déposé certaines décisions dont des sentences à être purgées dans la communauté furent imposées.

[138]     Le Tribunal ne discutera pas de la décision R. v. Fraser[12] puisque celle-ci fut déposée par la poursuite.

[139]     R. v. Andrews[13] : L'accusé a rapidement plaidé coupable d'avoir eu des relations sexuelles avec une étudiante pendant une période de 4 mois et demi et la victime était âgée de 16 ans.

[140]     Enseignant la musique, les premiers gestes à caractères sexuels se sont déroulés dans le bureau de l'accusé alors qu'ils discutèrent tout en écoutant de la musique.

[141]     Lors du prononcé de la peine, l'accusé est âgé de 36 ans et est marié depuis 10 ans. Son épouse, ses parents et un groupe d'amis le supportent. Avant de commettre les infractions, il exerçait depuis 14 ans et appréciait être enseignant.

[142]     Avant de prononcer une peine de 18 mois de détention à être purgée dans la communauté, le juge Fradsham écrit :

« [25]    Conditional sentence orders have been used in a number of cases involving the offence of sexual exploitation. Ones to which I have been specifically referred are: R. v. McCrackin 2004 ABPC 2 (Alta. Prov. Ct.); R. v. Pyne (May 27, 2004; Taber Docket 031102940P101001-002; Alta. Prov. Ct.); R. v. Shewchuk (September 8, 2003, Edmonton Docket No. 021117643P1; Alta. Prov. Ct.); R. v. Edwards [2003] B.C.J. No. 996 (B.C.C.A.); R. v C.M. [2000] B.C.J. No. 2230 (B.C. Prov. Ct.); R. v. Ingram [2000] B.C.J. No. 1248 (B.C. Prov. Ct.); R. v. D.F.G. [2003] N.J. No. 340 (Nfld. S.C.-T.D.); and R. v. Penner [2001] A.J. No. 1749 (Alta. Q.B.).

[26]       That does not mean that a conditional sentence order should be utilized in every case of a section 153 offence involving a teacher and a student. It simply illustrates that, depending upon the facts of the particular case, the sentencing objectives of deterrence and denunciation may be able to be met by a conditional sentence order. »

[143]     R. v. Edwards[14] : L'appelant était âgé de 27 ans, enseignait la danse dans une école secondaire et l'adolescente était âgée de 15 ans au moment des infractions.

[144]     Après être devenus amis et sur une période de 4 à 5 mois, ils eurent plusieurs relations sexuelles.

[145]     La Cour d'appel prononça une peine de 9 mois de détention à être purgée dans la communauté.

[146]     R. v. C.(M.)[15] : L'accusé âgé de 53 ans enseignait dans une école secondaire et engagea une jeune fille de 16 ans à titre d'assistante.

[147]     Après l'avoir invité à un concert, leur relation a progressé intimement et lorsqu'elle fut âgée de 17 ans, se déroulèrent trois relations sexuelles. Suite à la divulgation, l'accusé a dû prendre sa retraite plus tôt.

[148]     Lors des plaidoiries, une centaine de lettres furent déposées afin de démontrer le support de ces personnes envers l'accusé.

[149]     Rencontrée par les policiers en 1997, la victime n'avait pas informé ces derniers concernant cette relation. Elle déclara les événements à son père en 1999 et par la suite dénonça l'accusé aux forces de l'ordre. Selon le juge d'instance, la victime n'avait pas souffert de séquelles dues aux gestes de l'accusé.

[150]     L'accusé fut condamné à une peine de 9 mois de détention à être purgée dans la communauté.

[151]     R. v. Penner[16] : L'accusé fut déclaré coupable d'un chef d'accusation d'exploitation sexuelle suite à un procès devant jury, sur une élève âgée de 16 ans.

[152]     Âgé de 30 ans, il enseignait le théâtre et possédait une réputation irréprochable auprès des étudiants. Ces derniers socialisaient aisément avec lui et discutaient de leurs problèmes personnels.

[153]     À une occasion, la victime et une amie se rendirent sur l'estrade, levèrent leurs chandails et montrèrent leurs poitrines. La plaignante s'approcha de son professeur et ce dernier l'embrassa.

[154]     Une peine de 9 mois de détention à être purgée dans la communauté fut imposée. Dans sa décision, le juge Martin s'exprima ainsi :

« [9]      Sexual contact, even consensual sexual contact, between a teacher and a student under the age of 18 years is a crime. Parents send their children to school trusting that they will be properly educated and not abused by their teachers. Indeed, they reasonably expect that teachers will protect their children from abuse. Whenever that trust is violated, and a teacher engages, or allows a student to engage him in sexual contact, it is a serious breach of trust. That is so whether or not the young person, as defined in s. 153(2) of the Criminal Code, has consented to, or even initiated, the conduct in question. I pause to observe that s. 153 is predicated on the assumption that the impugned conduct between the young person and the accused was consented to. I therefore consider the consent of the complainant to be a nonfactor in sentencing the accused for committing an offence under s. 153. In particular, consent cannot be seen as a mitigating factor. The onus and expectation is always on the teacher to reject all suggestions and initiatives that may lead to sexual contact between him and his students.

[10]       Still, the degree of seriousness and moral culpability of the offender will vary with the circumstances, so that a one time brief touching of the genital area over the clothing will be seen differently than acts of sexual intercourse.

[11]       In my view, the sentencing principles of denunciation and deterrence require that a teacher who has consensual sexual intercourse of any kind with his students receive a sentence of actual incarceration. I consider acts of sexual touching, especially over the clothing, to be somewhat different, so that in some circumstances incarceration is warranted and in others a conditional sentence may meet the objectives of sentencing.

[12]       In this case, I conclude that the jury found the accused encouraged the complainant to show him her nipple ring, to strip to the waist for him, and to do a "lap dance" with him while he kissed her. I consider this to be a borderline case which may or may not require actual incarceration. I turn to an assessment of the accused antecedents and the applicable criteria to determine that issue. »

[soulignements par le Tribunal]

[155]     R. v. T.D.M.[17] : Âgé de 31 ans, l'accusé enseignait et entraînait une équipe de lutte. La victime était âgée de 16 à 17 ans lorsque sont survenus les événements étalés sur une période de 7 mois. De nombreux gestes à caractères sexuels furent posés dont du sexe oral et deux relations sexuelles complètes.

[156]     Il est à noter que dès le début de la relation entre ces deux personnes, la victime était aux prises avec un état émotionnel fragile.

[157]     L'accusé était marié et père de deux enfants âgés de 2 ans et 6 mois et avait le support de sa femme et des membres de sa famille. Selon le rapport d'expertise, T.D.M. ne souffrait pas de déviation sexuelle.

[158]     Les deux avocats soumirent une recommandation commune de 15 mois de détention à être purgée dans la communauté suivie d'une ordonnance de probation de 12 mois.

[159]     Cette recommandation fut acceptée par le juge d'instance.

[160]     Le juge Stevenson précise la distinction importante entre les infractions prévues aux articles 153 et 271 du Code criminel.

[161]     Celle-ci doit se refléter lors de l'imposition de la peine :

« [63]    It is important to note that the offence of sexual exploitation is not viewed by either the sentencing provisions of the Criminal Code nor by the Courts to be as serious as the offence of sexual assault. Section 271(1) provides for a maximum sentence of ten years for sexual assault; Section 153(1) provides for a maximum sentence of five years for sexual exploitation.

[64]       In R. v. Bernard (1988) 45 C.C.C. (3d) 1, Madam Justice Wilson of the Supreme Court of Canada stated at page 39:

"Sexual assault is a crime of violence. There is no requirement of an intent or purpose beyond the intentional application of force. It is first and foremost an assault. It is sexual in nature only because, objectively viewed, it is related to sex either on account of the area of the body to which the violence is applied or on account of words accompanying the violence. Indeed, the whole purpose, as I understand it, of the replacement of the offence of rape by the offence of sexual assault was to emphasize the aspect of violence and put paid to the benign concept that rape was simply the act of a man who was "carried away" by his emotions."

[65]       And Justice Philp of the Ontario Supreme Court - High Court of Justice in R. v. Nelson (1989) 51 C.C.C. (3d) 150, emphasized the difference between the two offences at pages 152-153 :

"The learned district court judge held that the offence of sexual assault is included in s. 153 and hence he was not prepared to quash counts 1, 2 and 3 of the indictment. With the greatest respect I do not agree with the learned trial judges' finding that s. 153 includes the offence of sexual assault. To be an included offence, the offence must be a lesser one than the offence charged. See R. v. Fergusson (1961), 132 C.C.C. 112 where Taschereau J. of the Supreme Court of Canada stated at p. 114:

The count must therefore include but not necessarily mention the commission of another offence, but the latter must be a lesser offence than the offence charged. The expression "lesser offence" is a "part of the offence" which is charged, and it must necessarily include some elements of the "major offence", but be lacking in some of the essentials, without which the major offence would be incomplete.

For sexual assault to be an included offence of sexual exploitation, all of the elements of s. 271 must be elements of s. 153(1)a). One of the important ingredients in the offence of sexual assault is the need to prove lack of consent as an element of the offence. Consent or lack thereof is not part of the primary offence of sexual exploitation so that sexual assault cannot be include in the primary assault. The elements of the offence of sexual exploitation are quite specific and subjective whereas the offence of sexual assault is of general intent. The fact that the sexual assault carries a maximum penalty of 10 years whereas sexual exploitation offence carries a maximum penalty of only five years also must be considered as one of the reasons for stating that sexual assault is not an included offence of sexual exploitation." »

[162]     R. v. D.F.G.[18] : Pendant une année, un professeur à l'école secondaire a entretenu une activité sexuelle avec deux étudiantes âgées de 16 ans.

[163]     Le professeur a offert d'initier la plaignante au tango.

[164]     Suite à un baiser de ce dernier, leur relation personnelle se développa rapidement. Les gestes ont été posés à l'heure du dîner, après l'école et dans la voiture.

[165]     Ces actions ont regroupé des fellations et des relations sexuelles à plusieurs reprises. La victime a reconnu devant le juge qu'elle avait consenti à ces activités sexuelles.

[166]     Quant à l'autre victime, un seul événement d'une durée de trente minutes est survenu dans un véhicule. Les deux s'embrassèrent et lorsque l'accusé entra une main dans le pantalon de la victime, cette dernière lui demanda de cesser. De plus, suite à ce geste, il plaça son pénis brièvement dans la bouche de l'étudiante. L'accusé sera repoussé fortement et l'événement prendra fin.

[167]     L'accusé a plaidé coupable et exprima des remords.

[168]     Une peine de 18 mois à être purgée dans la communauté est imposée. Le Tribunal note que la poursuite ne s'était pas opposée à l'imposition de cette peine.

[169]     R. v. Ingram[19] : Dans cette affaire, il s'agit d'une professeure âgée de 30 ans ayant plaidé coupable d'une infraction selon l'article 153 du Code criminel sur un étudiant âgé de 17 ans.

[170]     Pendant plusieurs mois, les deux personnes ont eu plusieurs relations sexuelles. L'étudiant avait été l'instigateur de cette relation et ne considérait point qu'il fut exploité sexuellement par sa professeure.

[171]     Alors qu'il atteint l'âge de 18 ans, leur relation se poursuit.

[172]     Au paragraphe 7, le juge Giroday écrit que l'accusée aurait dû résister aux avances de l'étudiant parce qu'elle était professeure d'un jeune homme et était en position d'autorité.

[173]     Il faut noter que dans le présent dossier, l'accusée s'était confiée à un collègue de travail et ce dernier a insisté afin que l'accusée informe le directeur de la situation.

[174]     Concernant la victime, le juge Giroday écrit :

« [13]    On the defendant’s first appearance defence counsel categorized this as a "victimless" crime. I was at first inclined to agree with him. Certainly the young person does not see himself as a victim. However, in law, exploitation is clearly made out. The affair continued for almost five months while the young person was under 18, and while he was a student and she was a teacher in a position of authority over him. The matter was apparently known to some, if not many, students at the school. The relationship in these circumstances, given current mores, is an affront to society and society must be considered as the victim. The teacher is, in some ways, in the place of a parent to her students and has a great responsibility towards them. »

[175]     Le Tribunal partage sans hésitation les propos de son collègue de la Cour provinciale de la Colombie-Britannique.

[176]     Une peine de 10 mois à être purgée dans la communauté fut imposée.

[177]     Le Tribunal précise que l'accusée a plaidé coupable dès sa première comparution.

[178]     R. v. McLachlan[20] : L'accusée fut déclarée coupable par un jury d'un chef d'accusation selon l'article 153 du Code criminel.

[179]     Cette dernière a eu plusieurs relations sexuelles avec un garçon âgé de 15 ans alors qu'elle lui enseignait.

[180]     Dix-neuf (19) années se sont écoulées entre le moment des infractions et le prononcé de la peine.

[181]     À cette époque, la peine prévue à cette disposition était de 5 ans d'emprisonnement.

[182]     Aux paragraphes 15 et suivant, le juge Popescul avec justesse s'exprime ainsi :

« [15]    I want to talk about the offence of sexual exploitation of a young person. The offence of sexual exploitation is committed when an adult person, who stands in a position of trust or authority vis - à-vis a young person, abuses that trust or authority by engaging in sexual activity with that young person. The consent or acquiescence of the young person to that activity is irrelevant as far as the law is concerned. The aim of the law is to put the responsibility on the adult for his or her behaviour. In this case, the offender abused a position of trust because she was the school teacher of the complainant. The jurisprudence demonstrates that teachers who breach their position of trust and authority are treated severely. That is because, as many cases have said, teachers are responsible for maintaining an appropriate and professional relationship with their students. They are the ones responsible for ensuring that the professional relationship does not become distorted with a personal relationship. Those who take the calculated risk of allowing themselves to give into their personal desires will be punished for their breach of trust and the duty they owe to their students and to the community.

[16]       Parents who send their children to school must be able to expect that their children will not be sexually exploited. Children, even seemingly mature high school students, can be vulnerable. It is up to the teacher to set and maintain appropriate boundaries. As stated by Gabrielson J. in R. v. Elder, supra:

[34]       A strong message must be sent to teachers that there is no room for error in respecting these boundaries. The harm to students can be severe and even life changing and so must the penalty be severe if the boundary is crossed.

[17]       Teachers, and other persons in positions of trust or authority toward young persons - those under 18 years of age - must clearly understand that children are completely “off limits” sexually. To violate that trust will almost undoubtedly result in imprisonment.

[18]       As required by s. 718.2(a) of the Criminal Code, I am to take into account the aggravating and mitigating circumstances relating to the offence and the offender:

(a)        Aggravating circumstances:

(i)         The accused was a teacher in a position of trust or authority towards the victim.

(ii)         There were a series of sexual encounters over a significant period of time.

(iii)        There was a significant age difference between the accused and the victim. The accused was 33; the victim was 15.

(iv)        She has not shown any remorse.

(b)        Mitigating circumstances:

(i)         The accused has no previous criminal record.

(ii)         The accused had, but for this situation, a very positive employment history.

(iii)        The accused has lost her livelihood, and there is a significant possibility that she may never be able to teach again - something that she loved and, by all accounts, was very good at.

(iv)        The accused has led an exemplary life since the offence occurred 19 years ago.

(v)        The accused has had some significant health issues which may not be fully resolved (i.e. cancer).

(vi)        The accused has been publicly embarrassed.

(vii)       There was no force, threats or coercion.

(viii)      She has extremely strong support from family, friends and former colleagues - as demonstrated by the quantity and quality of the support letters that have been filed.

(ix)        I also considered the fact that the accused has been subject to increased anxiety as a result of the fact that there have been two trials required to conclude this matter.

(x)        Low risk to re-offend - no concern about re-offending.

(c)        Absent mitigating and aggravating factors - Mitigating and aggravating factors sometimes present in cases such as this, but which are absent here, are:

(i)         acceptance of responsibility and a guilty plea (mitigating factors); and

(ii)         no evidence that the victim was severely damaged as in the case of Elder (aggravating factor).

[19]       Another important consideration is that the sentence I impose should be similar to sentences imposed on similar offenders for similar circumstances. A review of the case law reveals that, generally speaking, sexual exploitation convictions involving teachers and students attract a jail term in the range of 14 months to two years less one day. For example, in R. v. Elder, referred to previously, Gabrielson J. imposed a jail term of 18 months’ incarceration on a Humboldt teacher. Carter P.C.J., in R. v. Paul, 2007 SKPC 150, 351 Sask.R. 276, sentenced a female Carlton Comprehensive High School teacher to two years less one day. In R. v. Robertson, an unreported Provincial Court decision, the sentence was 14 months (referred to in Elder, supra).

[20]       I fully appreciate that the precedential value of any case is limited because no two cases are exactly the same and no two accused persons are identical. Sentencing is a complex process and will always involve taking into account the full matrix of considerations identified in the Criminal Code - to which I referred earlier.

[21]       In all of the circumstances, I conclude that a fit and proper sentence is 18 months. This is the length necessary to emphasize deterrence and denunciation and drive home the point that children must not be sexually touched by teachers or other persons who hold positions of trust or authority. »

[183]     Une peine de 18 mois à être purgée dans la communauté fut imposée. Auparavant, le juge Popescul écrit :

« [27]    The second step is for the Court to decide whether a conditional sentence is consistent with the principles of sentencing identified inss. 718 to 718.2 of the Criminal Code.

[28]       After considerable thought and reflection, I am satisfied that the purposes and objectives of sentencing can be met by the imposition of a conditional sentence. The circumstances here are unique.

[…]

[30]       That does not mean that a conditional sentence order should be utilized in every case of a s. 153 offence involving a teacher and a student. It simply illustrates that, depending upon the facts of the particular case, the sentencing objectives of deterrence and denunciation may be able to be met by a conditional sentence order. »

[184]     À cette jurisprudence soumise par les parties, le Tribunal, humblement, cite deux décisions.

[185]     DPCP c. Chamberland[21] : L'accusé a plaidé coupable à des contacts sexuels, d'incitation à des contacts sexuels et d'avoir communiqué au moyen d'un ordinateur en vue de faciliter les infractions sexuelles.

[186]     Au moment des événements, l'accusé était animateur dans un collège d'enseignement. Il était âgé de 39 ans et la victime de 15 ans.

[187]     La mère de la victime et l'accusé partageaient le même bureau et occupaient la même fonction auprès des étudiants.

[188]     À un certain moment, cette dernière demanda à l'accusé d'assurer un suivi auprès de sa fille afin de la soutenir vu la séparation de ses parents.

[189]     Les faits sont résumés ainsi :

« [4]      C'est au début de son secondaire III que la relation entre X et l'accusé se transforme. X se confie à l'accusé, l'accusé se confie à X. Une relation plus intime se développe. Des courriels à caractère plus intime sont échangés entre l'accusé et X de septembre 2011 à janvier 2012. C'est en janvier 2012 que des contacts sexuels de caresses et de baisers se produisent à l'école et dans le véhicule de l'accusé. Ces contacts se produisent à environ dix reprises.

[5]         En mars 2012, à la semaine de relâche scolaire, l'accusé contacte X par courriel pour convenir d'un rendez-vous avec elle. L'accusé est seul à son domicile, sa conjointe ayant quitté avec les enfants pour quelques jours. L'accusé va chercher X chez elle. Il l'amène à son domicile. Il y a relation sexuelle complète.

[6]         À la suite de cette rencontre, l'accusé met un terme à la relation avec X. »

[190]     La victime garda le secret pendant plusieurs mois et le dévoilement a eu des effets sur sa santé physique et psychologique.

[191]     En effet, elle a dû cesser de fréquenter l'école durant 12 jours suite à de l'épuisement.

[192]     Suite aux événements, le père constata une baisse du rendement académique et la relation mère-fille se détériora.

[193]     Quant à l'accusé, il est père de trois enfants et a été congédié. Il a complété un programme de sensibilisation à la délinquance sexuelle, a accepté sa pleine responsabilité et s'est retrouvé un emploi.

[194]     Ma collègue, la juge Doucet s'exprime ainsi :

« [38]    La relation entre l'accusé et X se développe à travers le milieu scolaire.  L'accusé a ainsi abusé de la confiance que l'établissement scolaire met en lui ainsi que celle des parents qui confient leurs enfants à l'institution scolaire et son personnel.

[39]       X est décrite comme une adolescente de 15 ans, forte et engagée.  L'état de vulnérabilité de X ne s'évalue pas ainsi.  La vulnérabilité découle de son âge.  Le législateur a voulu protéger une catégorie de personne.  La responsabilité de l'accusé est entière.

[40]       Le Tribunal réfère ici à l'extrait suivant d'une décision de la Cour d'appel du Québec[22] :

[36]       Ces propos sont largement transposables aux adolescents qui, pour n'être plus des bambins, n'en sont pas moins, eux aussi, des personnes vulnérables, à une étape cruciale de leur développement personnel.  Leur vulnérabilité réside souvent dans le fait qu'ils paraissent consentir, désirer, s'abandonner même aux abus perpétrés sur leur personne, ce qui en fait des victimes idéales, qui ne résistent pas à l'emprise qu'on exerce sur eux.  On ne compte plus les adolescents ou adolescentes, par exemple, qui s'amourachent d'un professeur, d'un entraîneur ou autre personne faisant figure de mentor, et c'est précisément de cette attirance, qui accroît leur fragilité, que les adultes ne peuvent pas et n'ont pas le droit de profiter. … »

[195]     Dorval c. R.[23] : L'appelante a plaidé coupable d'avoir agressé sexuellement a plusieurs reprises sur une période de 5 mois, un garçon âgé de 13 ans.

[196]     Le juge d'instance imposa une peine de 15 mois de détention ferme. La Cour d'appel y substitua une peine de 15 mois à être purgée dans la communauté, car les circonstances particulières ne justifiaient pas l'importance que le juge d'instance avait accordée aux objectifs de dénonciation et de dissuasion.

[197]     Vu ces circonstances particulières se distinguant du présent dossier, le Tribunal a choisi de reprendre les paragraphes suivants :

« [20]    En l'espèce, l'infraction a été commise sans qu'il y ait usage de menace, de violence, de contrainte psychologique ou de manipulation. De fait, la preuve indique que c'est le jeune adolescent qui a initié des échanges sur Internet avec l'appelante. Celle-ci a commencé par refuser les avances pour ensuite céder. Leur relation s'est déroulée dans un contexte de « consentement »[24] mutuel, sans menace, ni violence ou intimidation. Personne n'a forcé personne à faire quoi que ce soit.

[21]       L'appelante et le jeune garçon se sont fréquentés de février à juin 2005. Leurs échanges de courriels se sont transformés en fréquentations amoureuses menant à des échanges de baisers, des attouchements sexuels réciproques et, enfin, à quelques relations sexuelles complètes, trois à quatre en tout.

[22]       À la suite du signalement fait à la DPJ les policiers ont rencontré l'appelante et la victime. Ni l'une ni l'autre n'a cherché à nier les faits. L'appelante n'a plus revu le jeune homme par la suite et n'a jamais cherché à le revoir non plus.

[23] L'appelante n'était pas véritablement en position d'autorité vis-à-vis le jeune adolescent même s'il est permis de croire que leur différence d'âge lui conférait un certain ascendant. Le jeune homme était un ami de sa fille, il aimait se réfugier chez l'appelante compte tenu des difficultés qu'il vivait dans son milieu familial. En acceptant de s'engager, puis d'entretenir la relation amoureuse que le jeune adolescent lui proposait, l'appelante a possiblement abusé de sa confiance, mais elle a surtout manqué de discernement et fait preuve d'irresponsabilité et d'immaturité.

[24]       Mais la preuve révèle qu'à cette époque, l'appelante était elle-même vulnérable du point de vue affectif. Dans le rapport-synthèse du Centre hospitalier Robert-Giffard, cosigné par un psychiatre, un psychologue et un sexologue, on lit que, pour toutes sortes de raisons attribuables à son milieu familial et à ses expériences de vie, l'appelante entretenait alors plusieurs distorsions cognitives. Les experts observent chez elle de l'immaturité, de l'égocentrisme et un besoin excessif d'attention et de valorisation. Ils écrivent qu'à l'époque des événements elle semblait « avoir perdu ses repères » (p. 4).   Ils notent que les avances que le jeune adolescent lui a faites lui ont plu « car cela comblait ses besoins incessants de valorisation, d'attention et de séduction » (p. 4).

[25]       Même si cela n'excuse pas son comportement irresponsable, il ne fait pas de doute, selon moi, que l'appelante était elle-même psychologiquement et affectivement vulnérable quand le jeune adolescent s'est présenté dans sa vie.

[26]       L'appelante en est à sa première condamnation pénale.

[27]       Quand l'appelante et le jeune adolescent ont été vus se promenant main dans la main et s'embrassant à proximité de l'école, la DPJ a été saisie de l'affaire. Les policiers ont fait enquête. L'appelante a tout avoué dès la première rencontre. Elle a plaidé coupable à l'accusation portée; il n'y a pas eu d'enquête préliminaire, ni procès. Le jeune garçon a rencontré les policiers, mais il n'a pas eu à témoigner. L'appelante ne l'a plus revu par la suite, ni cherché à le revoir.

[28]       Le dossier révèle que l'appelante, de sa propre initiative, a consulté une travailleuse sociale du CLSC Basse-Ville; de février à avril 2006, elle l'a rencontrée huit fois. De la fin avril au début juillet 2006, date du rapport-synthèse du Centre hospitalier Robert-Giffard, elle a aussi consulté une psychologue à deux reprises; il ne s'agirait pas d'un cheminement thérapeutique à proprement parler mais davantage d'un support en attendant la fin des procédures judiciaires et les résultats des différentes évaluations spécialisées. Les experts soulignent que l'appelante semble vouloir continuer son parcours thérapeutique car, écrivent-ils, elle veut comprendre pourquoi une chose pareille lui est arrivée.

[29]       À l'audience, l'avocat de l'appelante nous a remis certains documents qui témoignent des efforts de réhabilitation poursuivis par sa cliente. Démarches auprès de la clinique sexologique du Centre hospitalier Robert-Giffard. Démarches auprès du Centre femmes aux trois A. De plus, l'appelante qui, à l'époque des événements, avait une formation de premier cycle en littérature et travaillait à son compte comme rédactrice-réviseure, occupe maintenant un emploi dans le domaine de l'hôtellerie et s'est inscrite, à titre d'étudiante à temps partiel, à un programme de maîtrise en littérature à l'Université Laval.

[30]       L'appelante me semble donc comprendre qu'elle a un problème et être sur la bonne voie pour le résoudre.

[31]       Quant au jeune garçon, le juge de première instance note qu'il n'y a aucune preuve du tort psychologique qui lui aurait été causé. Il note également que le jeune homme, malgré son jeune âge, n'en était pas à sa première relation sexuelle et qu'il a d'ailleurs parlé avec sa mère de la relation amoureuse qu'il entretenait avec l'appelante.

[32]       Le juge de première instance retient tout de même que les gestes sexuels entre un adulte et un jeune adolescent « constituent une atteinte à son intégrité » et « risquent de produire des séquelles ». L'affirmation est générale et peut-être exacte mais il faut reconnaître que, dans ce cas précis, il n'y a pas de preuve de séquelles psychologiques. Le jeune garçon n'a pas témoigné, ni oralement ni par écrit; aucun expert n'a été entendu à ce sujet. Il n'est pas question non plus de violence physique ou psychologique; la relation a été « consensuelle » du début à la fin même si, du point de vue du droit pénal canadien, le consentement du jeune homme à des relations sexuelles avec une adulte n'a aucune valeur légale (art. 150.1 C.cr.).

[33]       Dans ce contexte particulier, la responsabilité pénale de l'appelante ne justifiait pas de rejeter le sursis à titre de modalité d'exécution de la peine d'emprisonnement. Le juge de première instance a, selon moi, accordé un poids excessif aux objectifs de dénonciation et de dissuasion. Les circonstances de la présente affaire sont si particulières que, sans banaliser pour autant la situation, il ne s'agit pas d'un « cas où la nécessité de dénoncer est si pressante que l'incarcération est alors la seule peine qui convienne pour exprimer la réprobation de la société »[25] à l'égard du comportement de l'appelante. L'emprisonnement avec sursis, assortie de conditions rigoureuses, suivi d'une période de probation, constitue, selon moi, une peine mieux indiquée dans les circonstances. »

Discussion

[198]     Le Tribunal a résumé et cité de nombreuses décisions de divers tribunaux et il conclut que des peines de détention pour ces infractions varient entre 6 mois et 2 ans. Ces peines sont différentes, car chaque cas est un cas particulier ayant des faits différents. Dans certains dossiers sont présentés des plaidoyers de culpabilité, parfois il y a des victimes ayant subi de nombreuses séquelles, d'autres moindres ou encore aucune, des accusés vivant des remords sincères et d'autres ont nié leur culpabilité.

[199]     Même si les juges, dans l'ensemble des dossiers, retiennent le critère de l'harmonisation de la peine, ils se devaient d'individualiser celles-ci et le devoir d'expliquer le pourquoi du prononcé de différentes périodes de détention.

[200]     Par contre, le critère de l'harmonisation de la peine trouve toujours son application, car tous furent condamnés à une peine de détention dans un centre de détention ou au sein de la communauté puisque cette modalité de purger une peine est reconnue par le législateur ou les tribunaux comme une peine de détention.

[201]     Ces peines de détention sont prononcées parce que l'objectif premier lors de l'évaluation de la peine sont les objectifs de dénonciation et de dissuasion générale.

[202]     Lors de la lecture de ces diverses décisions, le Tribunal a noté comme dans la présente affaire que les adolescents vivaient des difficultés émotives, que les professeurs furent considérés à titre de confidents, qu'eux-mêmes ont confié leurs difficultés à ces derniers et que les gestes à caractères sexuels furent posés par la suite.

[203]     Dans certains dossiers, les tribunaux d'instance ou d'appel ont décidé que des peines de détention à être purgée au sein de la communauté devaient s'appliquer.

[204]     Ces décisions ont rappelé que ces infractions ne sont pas exclues de l'article 742.1 du Code criminel et qu'une peine avec sursis assortie de conditions restrictives sévères de liberté a permis d'envoyer un message clair de dénonciation générale et de dissuasion sans qu'il soit nécessaire d'isoler le délinquant du reste de la société.

[205]     Depuis longtemps, les tribunaux de toutes juridictions ont prononcé des peines de détention dans un centre de détention qu'à titre de dernière solution et le Tribunal, lors de son délibéré, se devait aussi d'appliquer le principe fondamental énoncé par le législateur à l'effet que la peine doit être proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité de l'accusée. (Art 718 du C. cr.)

[206]     Quant aux peines de détention à être purgées dans la communauté, le Tribunal énumère certains considérants non limitatifs auxquels les juges ont accordé un certain poids lors de leurs analyses :

-           Plaidoyer de culpabilité;

-           Présence de remords;

-           Délai de 19 ans depuis la commission des infractions;

-           Circonstances très particulières ou uniques;

-           Victime ne vivant pas de sentiment à l'effet que l'adulte l'avait exploité sexuellement;

-           Absence de séquelle chez la victime ou peu de séquelles;

-           Victime ayant été l'instigatrice;

-           Professeure était vulnérable psychologiquement (rapport médical d'un centre hospitalier pour santé mentale - distorsions cognitives);

-           Suite à la commission des infractions, le (la) délinquant(e) consulte psychologue ou travailleur social.

-           Parfois même après la tenue d'un procès, de telles peines furent imposées.

[207]     Avant d'aborder les facteurs atténuants et aggravants de la présente affaire, le Tribunal se doit de commenter certains propos ou considérations énoncés lors des plaidoiries des avocates ayant su présenter dignement et sérieusement leurs argumentations.

[208]     En effet, le Tribunal ne peut punir plus sévèrement l'accusée parce qu'elle a demandé la tenue d'un procès et qu'elle nie encore sa culpabilité. De plus, le Tribunal ne peut s'abstenir de prononcer une peine de détention à être purgée au sein de la communauté due à ces mêmes raisons. Agir ainsi porterait atteinte aux principes de la présomption d'innocence ainsi qu'au droit constitutionnel à demander la tenue d'un procès.

[209]     Par contre, l'accusée ne peut bénéficier des facteurs atténuants considérés par les tribunaux lorsqu'un accusé plaide coupable, exprime des remords ou débute une thérapie.

[210]     Au sujet du crime d'exploitation sexuelle, la représentante du Directeur des poursuites criminelles et pénales a indiqué au Tribunal que le crime se doit d'être puni sévèrement même si l'accusée est de sexe féminin et que la victime est un adolescent.

[211]     Ces propos s'expliquent par certains commentaires émis par les médias, retrouvés sur les médias sociaux ou entretenus par certaines personnes au sein de la population.

[212]     Comme les tribunaux l'enseignent depuis fort longtemps et cet enseignement s'applique en ce jour, ces derniers dénoncent et continueront à dénoncer et rejeter fermement de telle façon de penser.

[213]     Les tribunaux doivent appliquer la loi, soupeser les facteurs aggravants et atténuants et prononcer des peines justes, équitables et proportionnelles à l'égard de l'accusé, la victime et la société.

[214]     Dans ce dossier, comme dans tout autre dossier, aucune peine moins sévère ne peut être rendue parce que la victime est un jeune homme et l'accusée, une femme. L'exploitation sexuelle d'un adolescent par une professeure doit être punie comme le serait puni une personne de sexe masculin ayant posé les mêmes gestes envers une adolescente.

[215]     Agir autrement serait discriminatoire et injuste envers un adolescent, car comme le démontre la jurisprudence, les adolescents et adolescentes souffrent de séquelles suite à la commission de ces infractions commises par une personne en position de confiance et d'autorité.

[216]     Avec justesse, la procureure de l'accusée a fait état de la très grande médiatisation dans la présente affaire.

[217]     À ce sujet, la Cour d'appel du Québec[26] apporte cette réponse :

« Sur le plan subjectif, il est évident que chaque fois qu'un crime est commis par un personnage public, une personne en autorité, vedette, etc., tous les facteurs qu'on nous souligne, ou à peu près, sont présents : le crime et le châtiment reçoivent une plus grande publicité, la honte et l'opprobre sont d'autant amplifiés, la perte financière résultant de la perte d'emploi est fonction du revenu élevé…

La sagesse populaire fait dire que plus on tombe de haut, plus on se fait mal…

…le fait que plus le personnage occupe un rang ou une fonction élevés dans la société plus il est connu, plus légère devra être la peine et, a contrario, plus humble ou obscur est le personnage, plus sévère sera-telle.  Je n'accepte pas cette proposition : les plateaux de la balance ne sauraient s'accommoder de ces deux mesures inégales.  La justice doit être la même pour tous, grands ou petits, riches ou pauvres.

p. 3 »

[218]     Il est du devoir du Tribunal d'appliquer les décisions de la Cour d'appel et il le fera.

[219]     Par contre, dans le présent dossier, le Tribunal ne peut que répéter aveuglément cet enseignement sans y apporter un poids plus modéré dû à cette médiatisation très particulière qui n'est pas accordé habituellement à d'autres accusés ayant commis des crimes semblables ou plus graves, objectivement ou subjectivement.

[220]     Le Tribunal précise immédiatement que le but de cet énoncé n'a pas pour objectif de s'inscrire en faux contre la médiatisation des affaires traitées par les tribunaux. Au contraire, l'action des médias est essentielle afin que le public soit informé de l'actualité judiciaire.

[221]     Dans le présent dossier, le Tribunal se doit de prendre en considération que l'accusée et sa famille ont connu des inconvénients par cette forte et abondante médiatisation et à titre d'exemples : les grands-parents devant accompagnés les enfants à des activités afin de protéger l'anonymat de ces derniers, l'accusé ayant dû se priver de les accompagner, être l'objet d'une émission télévisée et jugée coupable alors que le procès est en cours, les auditeurs participant à une émission radiophonique afin de composer une chanson ayant pour thème l'accusée.

[222]     Par contre, le Tribunal ne peut y accorder toute l'importance à titre de facteur atténuant tel que recommandé par la défense.

[223]     La victime à elle aussi connut des conséquences négatives de cette médiatisation par les médias ainsi que par les médias sociaux. Par ces derniers, son identité a été divulguée. Un animateur d'une émission télévisée s'est même questionné au sujet de la victime alors que pour lui, il aurait rêvé de connaître cette situation à cet âge.

[224]     Lorsqu'une personne ne vit qu'un rêve, elle n'en connaît point parfois les conséquences négatives si celui-ci n'est pas actualisé.

[225]     Suite à la rupture, la victime a connu les conséquences négatives de ce rêve et celui-ci c'est par la suite transformé en cauchemar.

[226]     Le Tribunal comprend sans difficulté les propos de la victime relativement aux médias et ceux-ci se doivent d'être pris en considération.

[227]     La Cour d'appel du Québec sous la plume de l'honorable Otis[27] énumère les facteurs de qualification d'une peine dans les cas d'une infraction à caractère sexuel :

•           la nature et la gravité intrinsèque des infractions se traduisant notamment par l'usage de menaces, la violence, la contrainte psychologique et la manipulation, etc.;

•           la fréquence des infractions et l'espace temporel qui les contient;

•           l'abus de confiance et l'abus d'autorité caractérisant les relations du délinquant avec la victime;

•           les désordres sous-jacents à la commission des infractions :  détresse psychologique du délinquant, pathologies et déviances, intoxication, etc.;

•           les condamnations antérieures du délinquant :  proximité temporelle avec l'infraction reprochée et nature des condamnations antérieures;

•           le comportement du délinquant après la commission de l'infraction :  aveux, collaboration à l'enquête, implication immédiate dans un programme de traitement, potentiel de réadaptation, compassion et empathie à l'endroit des victimes (remords, regrets, etc.);

•           le délai entre la commission de l'infraction et la déclaration de culpabilité comme facteur d'atténuation, selon le comportement du délinquant (âge du délinquant, intégration sociale et professionnelle, …);

•           la victime :  gravité des atteintes à l'intégrité physique et psychologique tenant compte, notamment, de l'âge de la victime, de la nature, de l'ampleur et de la fréquence des agressions, le caractère de la victime, sa vulnérabilité (déficience mentale ou physique), les séquelles traumatiques, etc.

[228]     Dans le présent dossier, même s'il y a absence de menace ou de violence physique, le Tribunal estime que par sa nature même de la disposition législative et des conséquences vécues par la victime, on se doit de conclure a une violence « psychologique » puisqu'une personne adulte a exploité sexuellement une jeune victime vulnérable.

[229]     Dans ce genre de relation, l'égalité entre les deux personnes est inexistante. Cette forme de violence a fait vivre des séquelles psychologiques à la victime. Même s'il y a eu présence de consentement de la part de ce dernier, celui-ci ne peut être considéré à titre de facteur atténuant, car cette disposition a pour but de protéger les adolescent(e)s des personnes profitant de leur fragilité émotive et psychologique, alors que l'adulte vit une satisfaction sexuelle, réalise un rêve, un fantasme ou encore satisfait un besoin égocentrique.

[230]     L'accusée ne pouvait ignorer qu'un jour, cette relation prendrait fin et que la victime vivrait difficilement cette rupture. Agir ainsi constitue également de la manipulation alors que l'accusée est passée de « confidente » à la professeure active initiant la victime à la vie sexuelle.

[231]     D'ailleurs, la commission des infractions s’est déroulée sur une période de deux ans, à de multiples reprises et ce dans divers lieux (école, automobile, résidence de l'accusée et camping). Dès la première fois, la victime et l'accusée ont eu des relations sexuelles et il y a eu fellation.

[232]     L'abus de confiance et d'autorité est entier dans le présent dossier. Par ces gestes, l'accusée a brisé le lien de confiance et d'autorité non seulement avec la victime, mais aussi avec la mère de cette dernière, les autorités scolaires et la société.

[233]     Les étudiants, les parents, les autorités et la société ont le droit et non le privilège d'avoir une entière confiance en leurs enseignants ayant comme rôle d'éduquer et d'instruire les enfants et les adolescents. Pendant la journée, les enseignants dans l'exercice de leurs fonctions sont la continuité de l'autorité parentale. D'ailleurs, l'article 43 du Code criminel leur confère même le droit de corriger un élève avec l'emploi d'une mesure raisonnable. Ce même droit est accordé aux parents.

[234]     Lors de la commission des infractions, aucune preuve ne permet au Tribunal de conclure que l'accusée vivait à l'époque un état de détresse psychologique, pathologies, déviances quelconques ou encore un état d'intoxication. La victime a précisé lors du procès que l'accusée lui avait mentionné qu'elle vivait un mariage malheureux. La société ne saurait tolérer que ces professeurs trouvent réconfort et consolation auprès de leurs étudiants.

[235]     La preuve permet au Tribunal de conclure que l'accusée a désiré et a décidé de vivre une « aventure sexuelle » avec un étudiant qui lui plaisait.

[236]     L'accusée n'a aucun antécédent judiciaire et de la preuve du dépôt de nombreuses lettres écrites, elle fut une professeure très impliquée auprès de ses étudiants, appréciés de ces derniers, des parents et des autorités scolaires. Par contre, malgré une rencontre avec le directeur de l'établissement scolaire lui partageant les inquiétudes de la mère de la victime et les restrictions imposées, l'accusée a poursuivi la commission des infractions.

[237]     Quant au comportement de l'accusée depuis la commission des infractions, cette dernière s'est séparée de son conjoint de l'époque, vit maintenant avec un nouveau conjoint et est devenue mère de famille de deux jeunes enfants. Elle travaille actuellement dans un centre d'entraînement et ses clientes ainsi que son patron sont très satisfaits de son travail.

[238]     Suite à la dénonciation, elle a perdu son travail d'enseignante et ne pourra plus exercer cette profession qu'elle appréciait. Mais, la perte de son emploi ne peut être considérée comme un facteur atténuant puisque cette situation est la conséquence des infractions pour lesquelles l'accusée fut déclarée coupable.

[239]     Le Tribunal note que son conjoint, sa famille et ses amis la supportent malgré sa situation judiciaire actuelle.

[240]     À l'égard des conséquences relatives à la vie familiale si l'accusée est incarcérée, le Tribunal en fut fortement sensibilisé lors des témoignages des deux grands-mères.

[241]     Les événements survenus se déroulèrent entre 2002 et 2004.

[242]     Après avoir obtenu de l'aide psychologique et des encouragements d'amis, suite aux hésitations de la victime qui se questionnait si elle devait ou non dénoncer l'accusée, étant conscient que cette dernière perdrait son emploi en cas de dénonciation, il décida avec l'aide d'un ami de se rendre au poste de police au mois de février 2007. Le Tribunal est convaincu que cette période de temps l'a bouleversée profondément.

[243]     Une dénonciation est déposée devant le juge de paix le 16 juillet 2008 et l'accusée comparaîtra le 8 septembre de la même année.

[244]     Cette dernière, suite à une enquête préliminaire est citée à procès le 12 juin 2009.

[245]     Le procès débuta le 30 août 2011 par la présentation d'une requête demandant l'arrêt des procédures selon l'article 11 b) de la Charte canadienne des droits et libertés.

[246]     Cette requête fut rejetée et le procès débuta le 2 septembre 2011.

[247]     Le verdict de culpabilité suite à plusieurs jours d'audition et d'autres motifs est prononcé le 23 janvier 2013.

[248]     Pendant les procédures judiciaires, l'accusée n'a pas commis d'autre délit et sa situation personnelle est résumée dans le rapport présentenciel. À part des événements pour lesquels l'accusée fut déclarée coupable, cette dernière est considérée comme une personne dévouée, attentive envers tous et bien intégrée socialement.

[249]     Ce long délai entre la commission de l'infraction et la déclaration de culpabilité considérée avec le comportement positif de l'accusée se doit d'être pris en considération à titre de facteur atténuant.

[250]     Par contre, le Tribunal ne doit pas y apporter un poids primordial. En effet, si les peines prononcées dans de tels cas sont trop clémentes, les victimes hésiteront encore plus longtemps avant de dénoncer les infractions aux policiers considérant que les tribunaux accordent une trop grande importance à ce facteur. Lorsqu'un plaignant se présente au poste de police, il ignore si la personne qu'il dénonce plaidera coupable ou non coupable. Par conséquent, un plaignant doit considérer lorsqu'il prend cette décision qu'il pourra être appelé à la barre des témoins et rendre témoignage pendant plusieurs jours. Si les tribunaux n'apportent pas suffisamment d'attention à l'objectif de dénonciation générale, le plaignant serait certes en droit de se demander si sa démarche en « vaut la peine ». Mais, le Tribunal rappelle qu'il se doit de punir un accusé et non de venger la victime.

[251]     La victime a déjà témoigné relativement aux graves conséquences que l'accusée lui a causé en commettant ces délits et une déclaration écrite fut déposée lors des plaidoiries. Il a connu, suite à la fin de cette relation débutant alors qu'il était âgé de seulement 15 ans, de nombreuses difficultés. Vu cette relation, il fut alors obligé de vivre dans le mensonge auprès de sa mère, du conjoint de l'accusée, de sa famille ainsi que de ses amis.

[252]     Suite à la rupture, il devient donc confus et dépressif.

[253]     Même les rapports mère-fils durant ces deux années sont devenus conflictuels et il abandonna un certain temps ces études alors qu'auparavant, il suivait un bon parcours scolaire. Par cette relation malsaine avec l'accusée, il fut privé de vivre certaines années comme tout adolescent ou jeune adulte a le droit de les vivre sainement entre amis.

[254]     Le Tribunal partage l'opinion de l'avocate de la défense quant à l'atteinte de l'objectif de dissuasion personnelle dans la présente affaire, certes cet objectif est atteint.

[255]     Quant au critère de la réhabilitation, le Tribunal doit constater que l'accusée fut dans le passé un actif pour la société et qu'elle pourra continuer à l'être dans le futur.

[256]     Malgré les facteurs atténuants, le critère de dénonciation générale est prédominant afin de rappeler le consensus social déjà exprimé par le Tribunal auparavant.

[257]     Le Tribunal mentionne qu'il se doit en premier lieu de protéger les adolescents vulnérables et que les personnes qui en ont la charge ou la responsabilité seront sévèrement punies en abusant de ceux-ci et portant ainsi un grave préjudice aux développements intellectuels (difficulté dans les études), moraux  et psychologiques de ces derniers.

Conclusion

[258]     Considérant la gravité objective et subjective des infractions, l'article 718 du Code criminel, de la jurisprudence et des règles de droit applicable au prononcé de la peine, le Tribunal condamne l'accusée à une peine de 18 mois de détention sur le premier (1er) chef et second (2e) chef ainsi qu'une peine de 20 mois de détention sur le troisième (3e) chef.

[259]     Le Tribunal prononce également une ordonnance de probation d'une durée de deux ans sans surveillance aux conditions suivantes : ne pas troubler l'ordre public et avoir une bonne conduite, répondre aux convocations du Tribunal, prévenir le Tribunal de tout changement d'adresse ou de nom et aviser rapidement de ses changements d'emploi ou d'occupation, s'abstenir d'être en présence physique de X et des membres de sa famille et ne pas communiquer directement ou indirectement (sauf par avocat) avec ces mêmes personnes.

[260]     Le Tribunal doit-il permettre à l'accusée de purger cette peine au sein de la collectivité ?

[261]     Ce dernier est convaincu qu'accorder cette mesure ne met pas en danger la sécurité de la collectivité.

[262]     Par contre, accorder cette mesure serait-il à l'encontre des principes énoncés aux articles 718 et 718.2 du Code criminel ?

[263]     Le Tribunal a déjà précisé qu'une peine de détention se doit d'être imposée afin de répondre aux objectifs de la dénonciation et dissuasion générale.

[264]     Dans l'arrêt Proulx[28], l'honorable juge en chef Lamer écrit :

« [113]  En résumé, au moment de décider si l’octroi du sursis à l’emprisonnement est conforme à l’objectif essentiel et aux principes de la détermination de la peine, le juge qui détermine la peine doit se demander quels sont les objectifs qui apparaissent prépondérants au regard des faits du cas dont il est saisi.  Lorsqu’il est possible de combiner des objectifs punitifs et des objectifs correctifs, l’emprisonnement avec sursis sera vraisemblablement une sanction plus appropriée que l’incarcération.  Pour décider s’il est possible de réaliser des objectifs correctifs dans une affaire donnée, le juge doit étudier les chances de réinsertion sociale du délinquant, notamment en tenant compte de tout plan de réadaptation proposé par ce dernier, de l’existence de programmes appropriés de service communautaire et de traitement dans la collectivité, de la question de savoir si le délinquant reconnaît ses torts et manifeste des remords, ainsi que des souhaits exprimés par la victime dans sa déclaration (que le tribunal doit prendre en considération suivant l’art. 722 du Code).  Cette liste n’est pas exhaustive. 

[114]     Lorsque des objectifs punitifs tels que la dénonciation et la dissuasion sont particulièrement pressants, par exemple en présence de circonstances aggravantes, l’incarcération sera généralement la sanction préférable, et ce en dépit du fait que l’emprisonnement avec sursis pourrait également permettre la réalisation d’objectifs correctifs.  À l’inverse, selon de la nature des conditions imposées dans l’ordonnance de sursis, la durée de celle-ci et la situation du délinquant et de la collectivité au sein de laquelle il purgera sa peine, il est possible que l’emprisonnement avec sursis ait un effet dénonciateur et dissuasif suffisant, même dans les cas où les objectifs correctifs présentent moins d’importance.

[115]     Finalement, il convient de souligner que le sursis à l’emprisonnement peut être octroyé même dans les cas où il y a des circonstances aggravantes liées à la perpétration de l’infraction ou à la situation du délinquant.  Il va de soi que la présence de circonstances aggravantes augmentera le besoin de dénonciation et de dissuasion.  Toutefois, il serait erroné d’écarter d’emblée la possibilité de l’octroi du sursis à l’emprisonnement pour cette seule raison.  Je le répète, il faut apprécier chaque cas individuellement.

[116]     Il arrive fréquemment que le juge qui détermine la peine se trouve devant une situation où certains objectifs militent en faveur de l’octroi du sursis à l’emprisonnement et d’autres en faveur de l’emprisonnement.  En pareils cas, le juge du procès doit soupeser ces divers objectifs pour déterminer la peine appropriée.  Comme a expliqué le juge La Forest dans R. c. Lyons, 1987 CanLII 25 (CSC), [1987] 2 R.C.S. 309, à la p. 329, «[d]ans un système rationnel de détermination des peines, l’importance respective de la prévention, de la dissuasion, du châtiment et de la réinsertion sociale variera selon la nature du crime et la situation du délinquant».  Le juge ne dispose pas d’un critère ou d’une formule d’application simple à cet égard.  Il faut s’en remettre au jugement et à la sagesse du juge qui détermine la peine, que le législateur a investi d’un pouvoir discrétionnaire considérable à cet égard à l’art. 718.3.

d)  Conditions appropriées »

[265]     Aussi, l'honorable juge Lamer s'exprime ainsi à ces paragraphes :

« [105]  Il ne faut pas sous-estimer les stigmates d’une ordonnance de sursis à l’emprisonnement assortie de la détention à domicile.  Le fait que le délinquant vive dans la collectivité sous des conditions strictes et que ses voisins soient bien au fait de son comportement criminel peut, dans bien des cas, produire un effet dénonciateur suffisant.  Dans certaines circonstances, en raison de la honte que le délinquant ressent lorsqu’il rencontre des membres de la collectivité, il peut même être plus difficile pour ce dernier de purger sa peine au sein de la collectivité qu’en prison.

[106]     Le degré de dénonciation produit par une ordonnance de sursis à l’emprisonnement est largement tributaire de la situation du délinquant, de la nature des conditions assortissant l’ordonnance et de la collectivité au sein de laquelle la peine est purgée.  En règle générale, plus l’infraction est grave et le besoin de dénonciation important, plus la durée de l’ordonnance de sursis devrait être longue et les conditions de celle-ci rigoureuses.  Toutefois, il peut survenir des cas où la nécessité de dénoncer est si pressante que l’incarcération est alors la seule peine qui convienne pour exprimer la réprobation de la société à l’égard du comportement du délinquant. »

[266]     Après avoir longuement soupesé les conséquences qu'une peine de détention dans un centre de détention créera dans le milieu familial, le Tribunal est convaincu que dans la présente affaire se retrouve la nécessité de dénoncer est si pressante que l'incarcération est la seule peine qui convienne afin d'exprimer la réprobation de la société à l'égard du comportement de l'accusée et l'objectif de donner suite à la dissuasion générale, car comme l'exprimait la Cour d'appel du Québec[29] :

« […] On ne compte plus les adolescents ou adolescentes, par exemple, qui s'amourachent d'un professeur, d'un entraîneur ou autre personne faisant figure de mentor, et c'est précisément de cette attirance, qui accroît leur fragilité, que les adultes ne peuvent pas et n'ont pas le droit de profiter… »

[267]     Le Tribunal prononce l'ordonnance de prélèvement de substances corporelles pour analyse génétique selon l'article 487.051 (1) du Code criminel et l'ordonnance selon l'article 490.012 (1) du Code criminel de se conformer à la Loi sur l'enregistrement des renseignements sur les délinquants sexuels à perpétuité.

[268]     Interdiction à l'accusée de posséder des armes pour une période de 10 ans en vertu de l'article 109 du Code criminel.

[269]     Interdiction de communiquer avec X et les membres de sa famille selon l'article 743.21 du Code criminel.

[270]     Dispense à l'accusée du paiement de la suramende.

 

 

 

__________________________________

VALMONT BEAULIEU, J.C.Q.

 

Me Caroline Lafleur

Procureure de la poursuite

 

Me Hanan Mrani

Procureure de l'accusée

 

Me Isabelle Patoine

Procureure de l'accusée

 



[1]     Lemire & Gosselin, 5 CR 181, C.A.Q. [1948].

[2]     [1996] 1 R.C.S. 500.

[3]     [2000] 1 R.C.S. 61.

[4]     Précitée, voir note 15.

[5]     Précitée, voir note 15.

[6]     2011 QCCA 2047.

[7]     2010 NSSC 194 (CanLII).

[8]     2011 BCPC 174 (CanLII).

[9]     2007 NWTSC 44 (CanLII).

[10]    2012 ONCJ 604 (CanLII).

[11]    2013 ABPC 323 (CanLII).

[12]    Précitée, voir note 7.

[13]    2006 ABPC 63 (CanLII).

[14]    2003 BCCA 214 (CanLII).

[15]    2000 BCPC 64 (CanLII).

[16]    2001 ABQB 1133.

[17]    2004 ABPC 2.

[18]    [2003] N.J. No. 340, 2004 NLSCTD 25.

[19]    2000 BCPC 0233.

[20]    2013 SKQB 332 (CanLII).

[21]    2014 QCCQ 3026.

[22]    R. c. Bergeron, 2013 QCCA 7.

[23]    2007 QCCA 1502.

[24]    Je parle ici de consentement au sens commun du terme; il ne s'agit pas, bien sûr, d'un consentement juridiquement valable au sens du droit pénal canadien puisque le jeune homme n'avait que 13 ans au moment des événements (art. 150.1 C.cr.). D'où les guillemets.

[25]    R. c. Proulx, précité, paragr. 106.

[26]    Marchessault c. La Reine, C.A. Mtl., no 500-10-000035-848, 12 juillet 1984.

[27]    R. c. L. (J.-J.), 500-10-000955-979, 24 mars 1998.

[28]    [2000] 1 R.C.S. 61.

[29]    R. c. Bergeron, 2013 QCCA 7.

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