Champagne c. Samsung Électronique Canada inc. |
2016 QCCQ 4328 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
JOLIETTE |
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LOCALITÉ DE |
JOLIETTE |
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« Chambre civile » |
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N° : |
705-32-014654-153 |
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DATE : |
19 mai 2016 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DU |
JUGE |
DENIS LE RESTE, J.C.Q. |
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GILLES CHAMPAGNE -et- MARYSE ARBOUR |
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Demandeurs |
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c. |
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SAMSUNG ÉLECTRONIQUE CANADA INC. |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Gilles Champagne et Maryse Arbour, ci-après désignés «Champagne» et «Arbour[1]» réclament de Samsung Électronique Canada inc., ci-après désignée «Samsung» 565 $ en coûts de réparation de leur réfrigérateur.
JL 3959 |
[2] Ils soutiennent que le panneau avant est bosselé et qu’il s’agit là d’un défaut de fabrication.
[3] Samsung, pour sa part, plaide qu’il s’agit d’un mauvais entretien ou d’une utilisation abusive de ses clients.
QUESTIONS LITIGE :
[4] Les questions en litige sont les suivantes :
- Le réfrigérateur en litige est-il affecté d’un vice de fabrication?
- Y a-t-il eu lieu à indemnisation? Et, si oui, pour combien?
LE CONTEXTE :
[5] En juin 2013, Champagne et Arbour achètent un réfrigérateur 25,5 pieds cubes recouvert d’acier inoxydable de marque Samsung.
[6] La livraison s’effectue le 22 juin. L’appareil est en bon état.
[7] Champagne et Arbour témoignent qu’au fil des mois, une première bosse apparaît au haut de la poignée du tiroir du bas, soit celui du congélateur.
[8] Un peu plus tard, deux autres bosses sont constatées à proximité, toutes à des distances égales et situées sur la ligne longitudinale entre la poignée et le dessus du recouvrement avant du tiroir du congélateur.
[9] Aussitôt, on entre en contact avec le vendeur, une chaîne grande surface au Québec. On réfère les clients à Samsung, puisque la garantie d’un an est terminée.
[10] Malgré plusieurs démarches, expéditions de photos et mises en demeure, on refuse de les indemniser.
[11] Raymi Gélineau, représentant du service technique pour les détaillants de Samsung nie responsabilité. Il a la preuve que lors de la livraison, l’appareil n’est pas endommagé. Il soutient qu’il s’agit d’un problème d’esthétisme causé uniquement par l’utilisation de Champagne et Arbour.
[12] Il ajoute que les demandeurs, n’ayant pas de preuve d’expert, ne peuvent prouver la défectuosité du panneau du congélateur et que parce qu’on ne connaît pas la cause du vice allégué, il n’y a pas lieu d’indemniser.
[13] Il n’a jamais rien vu de pareil pour des réfrigérateurs Samsung et ajoute qu’il n’y a rien à l’intérieur du panneau qui pourrait causer ce bosselage.
[14] Selon lui, cette situation est impossible et ne peut être causée que par une mauvaise manipulation.
[15] Il s’agit là de l’essentiel de la preuve retenue par le Tribunal.
[16] Le Tribunal doit maintenant répondre aux questions en litige.
LE DROIT APPLICABLE :
[17] Le Tribunal souligne les articles 37 et 38 de la Loi sur la protection du consommateur[2] (L.P.C.) et les articles 1726 et 1729 du Code civil du Québec.
37. Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à l'usage auquel il est normalement destiné.
38. Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d'utilisation du bien.
1726. Le vendeur est tenu de garantir à l'acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l'usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l'acheteur ne l'aurait pas acheté, ou n'aurait pas donné si haut prix, s'il les avait connus.
Il n'est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l'acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.
1729. En cas de vente par un vendeur professionnel, l'existence d'un vice au moment de la vente est présumée, lorsque le mauvais fonctionnement du bien ou sa détérioration survient prématurément par rapport à des biens identiques ou de même espèce; cette présomption est repoussée si le défaut est dû à une mauvaise utilisation du bien par l'acheteur.
[18] Le Tribunal considère important de décrire les règles et critères applicables dans le cadre du fardeau de la preuve.
[19] Le rôle principal des parties dans la charge de la preuve est établi aux articles 2803 et 2804 du Code civil du Québec qui prévoient:
2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.
Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée.
2804. La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante.
[20] Les justiciables ont le fardeau de prouver l'existence, la modification ou l'extinction d'un droit. Les règles du fardeau de la preuve signifient l'obligation de convaincre, qui est également qualifiée de fardeau de persuasion. Il s'agit donc de l'obligation de produire dans les éléments de preuve une quantité et une qualité de preuve nécessaires à convaincre le Tribunal des allégations faites lors du procès.
[21] En matière civile, le fardeau de la preuve repose sur les épaules de la partie demanderesse suivant les principes de la simple prépondérance.
[22] La partie demanderesse doit présenter au juge une preuve qui surpasse et domine celle de la partie défenderesse.
[23] La partie qui assume le fardeau de la preuve doit démontrer que le fait litigieux est non seulement possible, mais probable.
[24] La probabilité n'est pas seulement prouvée par une preuve directe, mais aussi par les circonstances et les inférences qu'il est raisonnablement possible d'en tirer.
[25] Le niveau d'une preuve prépondérante n'équivaut donc pas à une certitude, ni à une preuve hors de tout doute.
[26] La Cour suprême du Canada, dans la décision de Parent c. Lapointe[3], sous la plume de l'honorable juge Taschereau, précise:
«C'est par la prépondérance de la preuve que les causes doivent être déterminées, et c'est à la lumière de ce que révèlent les faits les plus probables, que les responsabilités doivent être établies.»
ANALYSE ET DISCUSSION :
[27] Le Tribunal constate que la garantie conventionnelle est expirée.
[28] Cependant, les dispositions législatives pertinentes précitées permettent l’indemnisation d’un bien lorsque la preuve prépondérante démontre qu’il est soit défectueux lors de l’achat ou soit qu’il est affecté d’un vice de fabrication affectant sa durée de vie.
[29] La garantie de bon fonctionnement prévue à ces dispositions légales s’étend à des défauts non couverts par la garantie légale.
[30] Le seul fait que le défaut ne soit pas imputable à l’acheteur et qu’il se révèle durant la période stipulée et dite «raisonnable» donne ouverture à la réparation.
[31] Le consommateur n’a pas à prouver que les défauts existaient au moment de la livraison.
[32] Selon l’état de la jurisprudence actuelle et suivant notamment l’article 38 L.P.C., Samsung est présumée connaître la problématique.
[33] Il importe de préciser que la jurisprudence est constante à l’effet que la garantie légale prévue aux articles 37 et 38 L.P.C. continue de s’appliquer même après l’expiration de la garantie conventionnelle[4].
[34] Ainsi, le Tribunal conclut qu’il n’y a pas eu utilisation abusive de Champagne et Arbour. Au contraire, la preuve prépondérante démontre que les défectuosités constatées sont celles reliées à un vice de conception ou de fabrication.
[35] En conséquence, il y a lieu à indemnisation.
[36] Selon la preuve recueillie, le coût d’un nouveau panneau est de 280,40 $ et la main-d’œuvre pour effectuer son remplacement est arbitrée à 100 $.
[37] C’est donc dire que Champagne et Arbour ont droit d’être indemnisés de 380,40 $ plus taxes (437,36 $) ainsi que de 10,50 $ pour les frais de courrier recommandé.
[38] POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[39] ACCUEILLE en partie la réclamation.
[40] CONDAMNE Samsung Électronique Canada inc. à payer à Gilles Champagne et Maryse Arbour 447,86 $ plus les intérêts au taux légal majoré de l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec à compter de l’assignation et les frais de justice de 75,25 $.
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__________________________________ DENIS LE RESTE, J.C.Q. |
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Date d’audition : 28 avril 2016 |
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.