Décision

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Modèle de décision CLP - juillet 2015

Larouche et Syndicat des travailleuses et travailleurs de l'Institut universitaire en santé mentale de Québec - CSN

2017 QCTAT 447

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL

(Division des relations du travail)

 

 

Région :

Québec

 

Dossier :

CQ-2016-4434

 

Dossier accréditation :

AQ-2000-3151

 

 

Québec,

le 31 janvier 2017

______________________________________________________________________

 

DEVANT LE JUGE ADMINISTRATIF :

Christian Drolet

______________________________________________________________________

 

 

 

Carolle Larouche

 

Partie demanderesse

 

 

 

c.

 

 

 

Syndicat des travailleuses et travailleurs de l’Institut universitaire en santé mentale de Québec - CSN

Partie défenderesse

 

 

 

et

 

 

 

Institut universitaire en santé mentale de Québec

Partie mise en cause

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

[1]           Le 20 juillet 2016, Carolle Larouche (la Plaignante) dépose une plainte en vertu de l’article 47.2 du Code du travail[1] (le Code). Elle soutient que son association, le Syndicat des travailleuses et travailleurs de l’Institut universitaire en santé mentale de Québec - CSN (le Syndicat), a manqué à son devoir de juste représentation à son égard.

[2]           Elle allègue que le Syndicat a fait preuve de négligence grave en ne respectant pas la procédure de grief prévue à la convention collective de travail, de sorte qu’un arbitre a rendu une sentence arbitrale dans laquelle il rejette son grief parce que prescrit.

[3]           Le Syndicat reconnaît qu’il y a eu négligence de sa part, qu’il qualifie de grave, alors que l’Institut universitaire en santé mentale de Québec (l’Employeur) conteste que cette notion puisse trouver application en l’espèce.

[4]           L’erreur du Syndicat découle, selon l’Employeur, non pas d’une négligence, mais plutôt d’une erreur d’interprétation des articles pertinents de la convention collective en ce qui concerne la procédure de grief.

[5]           Il ajoute que le Tribunal ne peut révoquer la sentence arbitrale qui, selon le Code, est finale et sans appel, mais qu’il peut condamner le Syndicat à indemniser la Plaignante pour les dommages qu’elle aurait subis.

[6]           La Plaignante demande au Tribunal de soumettre son grief à un arbitre nommé par le ministre du Travail et consent à ce que le Syndicat la représente lors de l’arbitrage.

[7]           Enfin, elle demande que le Syndicat soit condamné à lui rembourser les honoraires et débours engagés pour l’exercice de son recours.

les faits

[8]           La Plaignante occupait un poste de préposée aux bénéficiaires chez l’Employeur.

[9]           Elle subit une lésion psychologique, le 25 février 2010, à la suite d’une réaction violente d’un patient à son endroit lors d’une intervention de sa part.

[10]        Elle est prise en charge par la CSST et est absente du travail pendant plusieurs mois. Comme elle ne pourra plus occuper son poste de préposé aux bénéficiaires, elle a droit à un processus de réadaptation dans le but d’identifier un emploi convenable qu’elle pourrait occuper.

[11]        Le 7 mai 2013, l’Employeur l’informe qu’il met fin administrativement à son emploi étant donné, notamment, « … qu’il n’y a pas de possibilité de trouver un emploi convenable à l’Institut ».

[12]        Le 16 mai 2013, la Plaignante et le Syndicat déposent chacun un grief afin de contester cette décision de l’Employeur.

[13]        Des discussions et échanges ont lieu entre le Syndicat et l’Employeur, concernant les griefs précités en juin et au début de juillet 2013. Puis, c’est le silence total jusqu’en mai 2015.

[14]        La Plaignante contacte occasionnellement le Syndicat pour s’enquérir de l’état de son dossier. On lui répond que tout va bien, que cela suit son cours.

[15]        En fait, pour le Syndicat, les griefs ont été déposés pour arbitrage et il est dans l’attente d’une date d’audition, ce qui prend souvent plusieurs mois.

[16]        En mai 2015, la représentante de l’Employeur contacte le Syndicat, à la demande de son supérieur, pour connaître ses intentions en ce qui concerne les griefs. Le Syndicat tente de contacter la Plaignante sans succès. Toutefois, celle-ci donne signe de vie à l’automne 2015 puisqu’elle apprend qu’il y aurait possiblement un poste disponible pour elle chez l’Employeur.

[17]        Quelques échanges ont lieu entre le Syndicat et l’Employeur au mois de septembre 2015, sans plus.

[18]        C’est à ce moment que le Syndicat constate que les griefs n’ont pas été déposés au greffe des tribunaux d’arbitrage du secteur de la santé et des services sociaux comme il se doit. Il le fera le 14 octobre 2015, et le mandat d’arbitrage est transmis le 5 ou le 6 novembre suivant à l’arbitre désigné. Le Syndicat n’a toutefois pas transmis à l’Employeur un avis d’arbitrage tel que prescrit par l’article 11.01 de la convention collective qui se lit comme suit :

11.01  Si les parties n’en arrivent pas à une solution satisfaisante, l’une ou l’autre des parties peut exiger que le grief ou la mésentente soit entendu en arbitrage, par un avis envoyé à l’autre partie.

[19]        Des audiences sont tenues les 20 mai et 3 juin 2016. L’Employeur soulève alors un moyen préliminaire demandant le rejet des griefs en vertu de l’article 71 du Code pour cause de prescription.

[20]        La Plaignante n’est informée de ce moyen préliminaire que quelques jours avant le début des audiences. Le Syndicat, manifestement inconfortable dans les circonstances, l’informe qu’elle peut déposer une plainte pour manquement au devoir de représentation en vertu de l’article 47.2 du Code.

[21]        L’arbitre donne raison à l’Employeur dans une sentence arbitrale portant la date du 15 juillet 2016[2]. Il motive sa conclusion comme suit :

[61]      En fait, la demande d’arbitrage prévue à l’article 10.06 et qui survient au moment du dépôt du grief interrompt la prescription. Tout suite après, les parties ont convenu d’autres formalités à remplir et c’est à la fin de celles-ci que la prescription recommencera à courir. À la fin de ces étapes d’échanges entre elles à propos du grief, une partie qui veut que le grief soit entendu en arbitrage devra envoyer l’avis prévu à l’article 11.01.

[62]      Dans notre cas, la rencontre a eu lieu le 13 juin 2013. Les parties ont fait connaître leur position respective les 19 juin et 2 juillet. Si une des deux parties estiment que ces positions ne permettent pas d’arriver à une solution satisfaisante, elle doit déposer un avis à l’effet qu’elle exige que le grief soit entendu en arbitrage. Puisque la convention collective ne prévoit pas de délai pour envoyer cet avis, le délai supplétif de 6 mois prévu à l’article 71 C.t. s’applique.

[63]      Le délai commence à courir 7 jours après la tenue de la rencontre du 13 juin, donc le 20 juin. La position du syndicat a été exprimée le 2 juillet. C’est un retard par rapport au 2e alinéa de l’article 10.02, mais qui n’est pas fatal en soi. Tout au plus, l’employeur aurait pu l’invoquer pour se donner un délai supplémentaire s’il avait voulu lui-même exiger l’arbitrage, mais ce n’est pas pertinent ici.

[64]      En vertu de l’article 71 C.t. le grief est prescrit à compter du 21 décembre 2013.

(reproduit tel quel)

[22]        L’arbitre se pose ensuite la question à savoir si le Syndicat a été dans l’impossibilité d’agir en temps utile. Il écrit ce qui suit à ce sujet :

[68]      Un syndicat pourrait en effet présenter une défense basée sur une impossibilité d’agir, la renonciation de l’autre partie à la prescription ou la faute de l’autre partie ou d’un tiers. Mais, il n’y a aucune défense de cette nature dans le présent cas.

[69]      Le syndicat reproche à xx de ne pas avoir répondu à xx après le 2 juillet. Elle n’avait pas à le faire. Elle avait exprimé la position de l’employeur le 19 juin conformément au 2e alinéa de l’article 10.02. Si le syndicat est insatisfait de la position de l’employeur, il doit prendre les dispositions pour s’assurer que le grief soit entendu en arbitrage en avisant l’employeur et en déposant le grief au greffe, comme il l’a fait le 14 octobre 2015, avec avis à l’employeur qui est en copie conforme.

[70]      Le syndicat prétend que le défaut s’explique par la croyance sincère que les représentants syndicaux avaient que le grief avait été déposé au greffe.

[71]      Il invoque aussi plusieurs raisons pour expliquer qu’on attendait une date du grief sans vérifier pourquoi elle tardait à être confirmée : le départ de xx et l’arrivée d’un nouvel agent de grief, les difficultés aux services alimentaires, l’absence de xx, le maraudage, le remplacement de la conseillère syndicale.

[72]      Je suis sympathique à la charge de travail  des représentants syndicaux, mais je vois mal comment on pourrait expliquer un délai de près de 2 ans après la date qui marque la prescription du grief. Tous savaient qu’il s’agissait d’un grief de fin d’emploi prioritaire. À chaque mois qui passait, le délai pour obtenir une date d’audience devenait de plus en plus incompréhensible et inacceptable, ce qui aurait dû ébranler leur croyance.

(reproduit tel quel, anonymisation des noms)

l’analyse et les motifs

[23]        Le devoir de juste représentation qui incombe au Syndicat est prévu à l’article 47.2 du Code qui se lit comme suit :

47.2     Une association accréditée ne doit pas agir de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire, ni faire preuve de négligence grave à l’endroit des salariés compris dans une unité de négociation qu’elle représente, peu importe qu’ils soient ses membres ou non.

 

[24]        C’est le salarié qui se plaint qui doit établir par une preuve prépondérante que le syndicat a manqué à son devoir de représentation (Habib c. Comité des travailleurs(euses) du textile, Lamour inc. (C.T.T.T.)[3]).

La négligence grave

[25]        Dans un premier temps, l’absence de contestation et l’admission par le Syndicat d’avoir été négligent dans le dossier de la Plaignante ne sont pas des éléments dont le Tribunal peut se satisfaire pour évaluer le caractère de gravité de la négligence s’il y en a eu (Voir Balthazard c. Syndicat des employées et employés professionnels et de bureau, section locale 57 (SEPB-FTQ)[4]).

[26]        Dans l’affaire Dufresne c. S.C.F.P. LOCAL 2918[5], la juge Handman s’exprime comme suit au sujet de la notion de négligence grave :

[32]      À plusieurs reprises, le Tribunal du travail a traité la question de savoir si le défaut de déposer un grief, dans les délais prescrits, constitue une simple erreur ou de la négligence grave. Le juge Brière a cité plusieurs causes où la prescription du grief fut imputée à la négligence grave du syndicat.

[33]      Dans Hugo Froment c. Métallurgistes unis d’Amérique, section locale 9324, ce dernier, a souligné que la bonne foi n’est pas incompatible avec l’existence d’une négligence grave. De plus, le juge Brière a rappelé les principaux critères énoncés, relativement à la notion de négligence grave, par le juge Saint-Arnaud, dans Bécotte c. S.C.F.P. :

¨… notamment l’erreur grossière, la faute lourde, l’omission impardonnable des précautions requises, le manque d’habileté notoire et évident, l’insouciance manifeste.

 

[34]      Le juge Paul Yergeau dans l’affaire Fortin c. Alliance des professionnelles et professionnels de la Ville de Québec a traité un cas semblable à la présente cause. Dû à une lourde charge de travail et à la négociation de la convention collective, le syndicat avait oublié de poursuivre le grief du requérant, à l’arbitrage. Le juge Yergeau a accueilli la requête, concluant, à la page 7 de son jugement, qu’il s’agissait d’un cas d’insouciance et non pas d’une erreur d’interprétation :

¨En matière de griefs et principalement en cas de congédiement, les syndicats doivent prévoir des mécanismes et des outils qui ne laissent rien au hasard ou à l’oubli. Le petit syndicat, comme les plus gros, doit voir à ce que ses membres bénéficient de représentation sérieuse, efficace et sans faille lorsqu’il est confronté à représenter de ses membres ou non qui ont subi une peine aussi importante en relations de travail, c’est-à-dire un congédiement. Rien ne doit être laissé au hasard.

 

Quand un représentant syndical oublie de porter un grief à l’arbitrage dans les délais prescrits à la convention collective, je n’hésite pas à dire qu’il y a là négligence puisqu’il ne s’est pas muni de mécanismes ou d’outils pour éviter un tel oubli et ceci peut être qualifié aussi de comportement insouciant. Et quand l’oubli affecte les droits d’un congédié au point de le priver de tout recours possible en vertu de sa convention collective, cette négligence ne peut être qualifiée autrement que de négligence grave, ceci dit avec égards.

 

Chaque cas étant un cas d’espèce…Il ne s’agit pas ici d’une erreur d’interprétation faite de bonne foi, mais bien d’un cas d’insouciance…¨

[…]

[36]      Comme le mentionnait le juge Yergeau, dans l’affaire Fortin, on doit nécessairement qualifier de négligence grave un oubli qui affecte les droits d’un congédié au point de le priver de tout recours possible en vertu de sa convention collective.

(caractères gras ajoutés, références omises)

[27]        La Commission des relations du travail, à laquelle le Tribunal a succédé, a endossé cette conclusion notamment dans l’affaire Renaud c. Syndicat des profesionnelles des CLSC-CHSLD de Québec et Chaudière-Appalaches (CSN)[6], ou, en référant au jugement du Tribunal du travail dans l’affaire Hachem c. Syndicat des travailleurs de l’Hôtel La Citadelle[7], elle écrit ce qui suit :

[45]      Dans l’instance, on a ignoré l’existence même du grief pendant plus de six mois après son dépôt auprès de l’employeur, ce qui entraîne le même résultat que si le grief n’avait jamais été soumis.

[46]      Que peut-on imaginer de plus grave et de plus sérieux comme omission? Dans le même jugement, le juge Brière, par delà l’importance de la faute, souligne à son tour qu’on doit aussi apprécier la négligence grave par l’importance des conséquences.

[47]      Et il ajoute que laisser prescrire un grief portant sur un congédiement m’apparaît plus grave que de laisser prescrire un grief portant sur une simple réprimande ou même une suspension de très courte durée […].

(caractères gras ajoutés)

[28]        De même, dans l’affaire Moisan c. Syndicat des fonctionnaires municipaux de Québec -(FISA)[8], la Commission des relations du travail a décidé que le défaut de poser un acte nécessaire pour la poursuite de la procédure d’arbitrage équivaut à la négligence grave :

[30]      La faute de l’association accréditée sera aussi dite grossière lorsque ses dirigeants responsables de l’application de la convention collective ignorent, oublient ou encore négligent de poser en temps utile les gestes qui sont nécessaires dans la poursuite des différentes étapes rattachées aux procédures de griefs ou d’arbitrage. (Voir la revue de jurisprudence dans Dufresne c. Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 2918, T.T. AZ-50178809).

(caractères gras ajoutés)

[29]        Dans le présent dossier, il ne fait aucun doute que le Syndicat a gravement négligé de s’occuper adéquatement du grief de la Plaignante.

[30]        En effet, après la rédaction des griefs neuf jours après le congédiement administratif de la Plaignante, le Syndicat se limite à quelques échanges avec l’Employeur qui prennent fin le 2 juillet 2013 au moment où il transmet sa position par écrit à ce dernier.

[31]        Il ne fera aucune démarche à compter de ce moment pour s’assurer que les griefs ont bel et bien été déposés et qu’une date d’audition sera fixée dans un délai raisonnable compte tenu de la nature prioritaire des griefs.

[32]        De même, il ne fait aucune consultation concernant son interprétation de la procédure d’arbitrage alors que l’article 11.01 de la convention collective exige clairement qu’un avis de l’intention de porter les griefs à l’arbitrage soit transmis à l’Employeur. On ne peut certainement pas conclure à une erreur d’interprétation de bonne foi dans les circonstances. Il s’agit clairement d’insouciance.

[33]        Il s’écoule plus de 27 mois entre le 2 juillet 2013 et le 14 octobre 2015, date à laquelle le Syndicat, après avoir constaté que les griefs n’avaient pas été déposés au greffe comme il se doit, les dépose formellement.

[34]        Le Syndicat invoque diverses excuses devant l’arbitre pour tenter de justifier sa conduite. L’arbitre ne les accepte pas, et le Tribunal non plus.

[35]        Le Syndicat a donc fait montre de négligence grave dans le cadre de l’exercice de son devoir de représentation à l’endroit de la Plaignante à la suite de son congédiement administratif.

L’impact de la sentence arbitrale du 15 juillet 2016

[36]        L’Employeur allègue que cette sentence arbitrale est finale et sans appel selon l’article 101 du Code. Il ajoute que l’annulation systématique de ce type de décision est de nature à perturber les relations du travail.

[37]        Il réfère à l’arrêt de la Cour suprême dans l’affaire Gendron c. Municipalité de la Baie James[9] dans lequel la Cour conclut que « Les articles 47.2 à 47.6 du Code du travail ne peuvent être interprétés de façon à donner ouverture à un second arbitrage d’un grief qui a déjà fait l’objet d’un premier, et à créer une exception à l’art. 101 qui consacre le caractère final d’une sentence ».

[38]        Dans cette affaire, l’employeur d’un salarié congédié s’oppose devant l’arbitre quant à la recevabilité du grief puisque, selon lui, le salarié n’avait pas complété sa période de probation. L’arbitre a accueilli l’objection et le salarié a déposé une plainte en vertu de l’article 47.2 du Code alléguant qu’il ignorait que son grief avait été entendu et que s’il avait été présent lors de l’audition, il aurait été en mesure de rectifier certains faits qui auraient démontré qu’il avait complété sa période de probation. Il voulait donc soumettre à nouveau à un arbitre la même question que celle que le premier arbitre avait tranchée.

[39]        Dans le présent dossier, la Plaignante ne demande pas que la question de la prescription de son grief soit à nouveau soumise à un autre arbitre. Elle désire, compte tenu de la négligence grave de son syndicat, que le fond de son grief soit tranché (Voir C.E.G.E.P. de Dawson c. Beaudry)[10].

[40]        Dans l’affaire Association des policiers de Thetford mines c. Thetford Mines (Ville de)[11], la Cour d’appel endosse cette distinction lorsqu’elle écrit :

[17]      En ce qui concerne la prescription du grief, le juge de première instance écrit que, faute d’un texte précis, le mis en cause n’avait pas le pouvoir de faire revivre un grief déclaré prescrit par une sentence finale, qui lie les parties. Il a tort. La Cour a déjà décidé que l’article 47.5 C.t. autorise le Tribunal du travail (remplacé par la CRT) à déférer un grief à l’arbitrage même si un arbitre avait déjà déclaré ce grief prescrit. Dans un tel cas, l’arbitre n’examine pas la question de la prescription parce que, vu l’article 47.6 C.t., ce moyen est inopposable au salarié.

(caractères gras ajoutés, références omises)

[41]        Le jugement auquel réfère le passage précité est celui rendu dans l’affaire Association des employés de garage de Drummondville (CSN) c. Gougeon & frères ltée[12].

[42]        La sentence arbitrale rendue le 15 juillet 2016 ne constitue donc pas un obstacle au recours de la Plaignante.

Les honoraires et débours engagés par la Plaignante pour l’exercice de son recours

[43]        La Commission des relations du travail écrivait ce qui suit en ce qui concerne ce sujet dans l’affaire Temgoua c. Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement[13] :

[14]      Depuis l’arrêt Castonguay c. Métallurgistes unis d’Amérique, section locale 9414, 2005 QCCRT 0204, il est bien établi qu’un salarié peut se faire rembourser les honoraires et débours engagés pour l’exercice de son recours. Il s’agit d’une mesure de redressement qui vise à rétablir le salarié dans tous ses droits à la suite de la contravention du Syndicat à ses obligations. En revanche, il n’est pas question de sanctionner la faute de ce dernier. La réparation consentie au salarié ne doit pas se révéler punitive.

[44]        Le Tribunal fait droit à cette demande.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL :

ACCUEILLE               la plainte;

AUTORISE                 Carolle Larouche à soumettre sa réclamation à un arbitre nommé par le ministre du Travail, aux frais du Syndicat des travailleuses et travailleurs de l’Institut universitaire en santé mentale de Québec - CSN, pour décision selon la convention collective comme s’il s’agissait d’un grief;

ORDONNE                 au Syndicat des travailleuses et travailleurs de l’Institut Universitaire en santé mentale de Québec - CSN de rembourser à Carolle Larouche, sur présentation d’un état de compte et, le cas échéant, des pièces à l’appui, les honoraires et frais raisonnables engagés pour l’exercice du présent recours;

RÉSERVE                  sa compétence pour déterminer le montant des honoraires et frais engagés pour la présentation du présent recours.

 

 

__________________________________

 

Christian Drolet

 

 

Me Valérie Vaillancourt

BEAUDOIN, ROBERT, AVOCATS

Pour la partie demanderesse

 

Me Pier-Olivier Angers

Pour la partie défenderesse

 

Me Amélie Asselin

Jolicoeur Lacasse Avocats

Pour la partie mise en cause

 

Date de la dernière audience :      9 janvier 2017

 

/cl



[1]           RLRQ, c. C-27.

[2]           Syndicat des travailleurs et travailleuses de l’Institut universitaire en santé mentale du Québec (FSSS-CSN) et CIUSSS de la Capitale-Nationale (Institut universitaire en santé mentale du Québec, Griefs no 184587 et 184588 - Mandat d’arbitrage #24166, 15 juillet 2016, Me Denis Gagnon.

[3]           2006 QCCRT 0475.

[4]           AZ-95147048.

[5]           AZ-50178809.

[6]           2007 QCCRT 0059.

[7]           AZ-96147034.

[8]           2012 QCCRT 0217.

[9]           [1986] 1 R.C.S. 79.

[10]         [1987] RL 139.

[11]         2015 QCCA 915.

[12]         (C.A.) J.E. 92-784.

[13]         2012 QCCRT 0121.

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