Décision

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Pouliot et Supermarché Lambert inc.

2009 QCCLP 5512

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Saint-Hyacinthe

5 août 2009

 

Région :

Yamaska

 

Dossier :

361844-62B-0810

 

Dossier CSST :

103786968

 

Commissaire :

Marie-Danielle Lampron, juge administratif

 

Membres :

Jacques Lesage, associations d’employeurs

 

Noëlla Poulin, associations syndicales

______________________________________________________________________

 

 

 

Diane Pouliot

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Supermarché Lambert inc.

 

Partie intéressée

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 29 octobre 2008, madame Diane Pouliot (la travailleuse) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle elle conteste une décision rendue le 19 septembre 2008 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) à la suite d’une révision administrative de deux décisions.

[2]                La CSST confirme dans un premier temps une décision rendue le 9 mai 2008 et se dit justifiée de requérir de la travailleuse deux soumissions pour chaque travail d’entretien courant dont elle demande le remboursement pour l’année 2008.

[3]                La CSST modifie une autre décision qu’elle a initialement rendue le 2 juin 2008 : elle déclare que la travailleuse n’a pas droit au remboursement des factures des 10 mai et 10 octobre 2007 concernant des travaux de tonte de gazon, coupe de bordure et ratissage des feuilles ainsi que de déneigement. La CSST fait droit au remboursement de la facture du 17 novembre 2007 (350 $) concernant des travaux de peinture au sous-sol (salon et passage, murs et plafonds, incluant le déplacement des meubles) ainsi qu’au remboursement de la facture du 1er décembre 2007 (300 $) pour des travaux de peinture de la salle de bains du sous-sol, pour un montant total de 650 $, pourvu qu’il n’excède pas le montant maximum prévu à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) pour l’année 2007.

[4]                Les parties, ainsi que leur représentant respectif, sont absents à l’audience prévue le 7 avril 2009. Ces derniers ont, par ailleurs, avisé préalablement de leur absence et ils ont transmis une argumentation écrite au soutien de leurs prétentions et demandé qu’une décision soit rendue sur dossier, conformément à l’article 429.14 de la loi.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[5]                La travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’elle n’a pas à fournir deux soumissions pour obtenir le remboursement des travaux d’entretien courant de son domicile. Elle demande de déclarer qu’elle a droit au remboursement de la facture du 10 mai 2007 (350 $) pour des travaux d’entretien paysager (tonte de gazon, coupe de bordure et ratissage des feuilles) ainsi qu’au remboursement de la facture du 10 octobre 2007 (300 $) concernant des frais de déneigement.

L’AVIS DES MEMBRES

[6]                Le membre issu des associations d'employeurs et le membre issu des associations syndicales sont d'avis d’accueillir la requête de la travailleuse. Ils sont d’avis que l’article 165 de la loi n’impose pas à la travailleuse une obligation de soumettre deux soumissions afin d’obtenir un remboursement.

[7]                Considérant que la lésion professionnelle a entraîné une atteinte permanente grave et des limitations fonctionnelles sévères, qui sont démontrées être incompatibles avec la nature des travaux d’entretien demandés, que la travailleuse aurait normalement faits elle-même n’eût été de sa lésion, les membres sont d’avis que la travailleuse a droit au remboursement du coût de ceux-ci dans la mesure où le montant n’excède pas le montant maximum prévu à la loi pour l’année 2007.

LES FAITS ET LES MOTIFS

[8]                La Commission des lésions professionnelles doit décider si la CSST était justifiée de requérir de la travailleuse deux soumissions pour obtenir le remboursement des travaux d’entretien courant de son domicile.

[9]                Le tribunal doit aussi décider si la travailleuse a droit au remboursement de la facture du 10 mai 2007 (350 $) pour des travaux d’entretien paysager (tonte de gazon, coupe de bordure et ratissage des feuilles) ainsi qu’au remboursement de la facture du 10 octobre 2007 (300 $) concernant des frais de déneigement.

[10]           Le tribunal considère, pour les motifs ci-après exposés, qu’il y a lieu d’accueillir la requête de la travailleuse.

[11]           L’article 165 de la loi, qui traite des travaux d’entretien courant du domicile, se lit comme suit :

165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.

__________

1985, c. 6, a. 165.

 

 

[12]           Il ressort de l’article 165 de la loi que pour avoir droit au remboursement des frais encourus à titre de travaux d’entretien courant du domicile, la travailleuse doit démontrer qu’elle a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique découlant de sa lésion professionnelle, qu’elle est incapable d’effectuer les travaux d’entretien courant de son domicile qu’elle effectuerait normalement elle-même si ce n’était de sa lésion professionnelle et qu’elle a droit d’être remboursée des frais qu’elle engage pour les faire faire, et ce, jusqu’à concurrence du montant prévu annuellement, à savoir 2 713 $ en 2007 et 2 767 $ en 2008.

[13]           Il ressort de la preuve au dossier que la travailleuse a subi une lésion professionnelle le 14 août 1992 sous la forme d’un dérangement intervertébral mineur (DIM) C5-C6 gauche avec hernie discale cervicale ainsi qu’une entorse dorsolombaire gauche. Cette lésion a été consolidée au 23 mai 1997 sans atteinte permanente, mais avec des limitations fonctionnelles qui n’empêchaient pas le retour au travail.

[14]           Selon les notes évolutives au dossier, la travailleuse est aussi porteuse de limitations fonctionnelles à la suite d’un autre événement survenu en 1998 (dossier CSST 115271884) qui a entraîné une entorse dorsale sur colonne déjà atteinte d’une discarthrose multiétagée pour laquelle une atteinte permanente de 2,20 % a été octroyée de même que les limitations fonctionnelles suivantes :

-Éviter les mouvements répétitifs au niveau des membres supérieurs et les positions des épaules à plus de 70 degrés d’abduction ou 70 degrés d’élévation antérieure.

-Éviter les efforts de plus de 10 kg avec les membres supérieurs pour tirer, soulever ou pousser.

-Éviter les mouvements à grande amplitude en extension ou en inclinaison latérale pour le rachis dorsolombaire.

-Il est à noter que la restriction de mouvement répétitif au niveau des membres supérieurs s’applique surtout si les épaules sont en abduction ou en élévation à plus de 70 degrés.

 

 

[15]           Selon les notes évolutives au dossier, la travailleuse est porteuse de limitations fonctionnelles à la suite d’un autre événement survenu en 1999 (dossier CSST 121632459) qui a entraîné une entorse dorsale :

-Ne pas déplacer ou soulever des charges supérieures à 10 kg.

-Éviter les mouvements de grande amplitude en extension ou torsion pour le rachis dorsolombaire.

-Éviter de travailler les bras au-dessus des épaules.

 

 

[16]           En avril 2002, la travailleuse subit une récidive, rechute ou aggravation de sa lésion cervicale, une hernie discale C5-C6. Cette lésion a été consolidée par le médecin de la travailleuse, le docteur Chartrand, au 2 juin 2006 avec atteinte permanente et limitations fonctionnelles. Dans son rapport d’évaluation médicale d’août 2006, le docteur Chartrand émet l’avis qu’il s’agit de limitations fonctionnelles de classe IV.

[17]           À la suite d’une procédure d’évaluation médicale enclenchée par la CSST sur la question de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles, la travailleuse a été examinée par le docteur Knight, agissant à titre de membre du Bureau d’évaluation médicale.

[18]           Le docteur Knight émet l’avis que la lésion professionnelle de 2002 a entraîné des limitations fonctionnelles ainsi que des déficits anatomo-physiologiques qui totalisent 14 % : 2 % pour une hernie discale cervicale non opérée et plusieurs déficits (dap) en raison d’une perte de 25 degrés dans toutes les amplitudes de la colonne cervicale, à savoir flexion antérieure (dap 1,5 %), extension (dap 1,5 %), flexions latérales droite et gauche (dap de 1,5 % pour chacune) et rotations droite et gauche (dap de 3 % pour chacune).

[19]           La CSST donne suite à l’avis du docteur Knight et fait droit à une atteinte permanente supplémentaire de 1,70 % après avoir soustrait les séquelles déjà établies de façon provisoire en avril 2005. Elle ajoute à l’indemnité forfaitaire déjà octroyée de 8 871,40 $, un montant de 998,77 $. La travailleuse demande la révision des décisions rendues par la CSST à la suite de l’avis du membre du Bureau d'évaluation médicale.

 

 

[20]           Le 1er octobre 2007, à la suite de la contestation de la travailleuse, la Commission des lésions professionnelles entérine un accord intervenu entre les parties[2] et déclare que la lésion professionnelle d’avril 2002 a entraîné des limitations fonctionnelles de classe IV, selon la classification de l’IRSST. Celles-ci se lisent comme suit :

Classe 4 : Restrictions très sévères

En plus des restrictions de la classe 1, 2, et 3 :

Le caractère continue de la douleur et son effet sur le comportement et sur la capacité de concentration sont incompatibles avec tout travail régulier.

On peut toutefois envisager une activité dont l’individu peut contrôler lui-même le rythme et l’horaire.

 

Les limitations fonctionnelles de classe 1, 2, et 3 sont ainsi établies :

Classe 1 : Restrictions légères

Éviter d’accomplir de façon répétitive ou fréquente les activités qui impliquent de :

-soulever, porter, pousser, tirer des charges supérieures à environ 25 kg.

-ramper.

-effectuer des mouvements avec des amplitudes extrêmes de flexion, d’extension ou de torsion de la colonne cervicale

-subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale

 

Classe 2 : Restrictions modérées

En plus des restrictions de la classe 1, éviter les activités qui impliquent de :

-soulever, porter, pousser, tirer de façon répétitive ou fréquente des charges dépassant environ 15 kg.

-effectuer des mouvements répétitifs ou fréquents de flexion, d’extension ou de torsion de la colonne cervicale, même de faible amplitude.

 

Classe 3 : Restrictions sévères

En plus des restrictions de classe 1 et 2, éviter les activités qui impliquent de :

-maintenir la colonne cervicale en position fixe plus de 30 à 60 minutes, même en position neutre.

-effectuer des mouvements répétitifs des membres supérieurs.

 

 

[21]           Comme on peut le constater, la preuve au dossier démontre qu’à la suite de sa lésion professionnelle, la travailleuse a subi une atteinte permanente grave qui la restreint plus qu’antérieurement puisqu’elle présente des ankyloses dans toutes les amplitudes de la colonne cervicale et qu’elle est porteuse de limitations fonctionnelles très sévères, les plus sévères de la catégorie.

[22]           En octobre 2007, la CSST déclare que la travailleuse est incapable, compte tenu de ses limitations fonctionnelles, d’exercer tout emploi et fait droit à une indemnité de remplacement du revenu jusqu’à ce que la travailleuse ait l’âge de 68 ans, avec réduction par la suite des indemnités selon les modalités prévues à la loi.

[23]           Le tribunal considère que la travailleuse a satisfait à son fardeau de démontrer, par une preuve prépondérante, qu’elle a droit au remboursement des coûts réclamés à titre de travaux d’entretien courant du domicile.

[24]           En octobre 2007, la travailleuse transmet à la CSST un formulaire de demande de remboursement des frais d’entretien courant de son domicile en précisant la nature des travaux demandés : tonte de gazon, taille des arbustes et haies, déneigement, travaux du grand ménage annuel, travaux de peinture. Elle affirme dans sa demande qu’elle effectuait elle-même ces travaux avant la survenance de sa lésion professionnelle.

[25]           Une facture datée du 10 mai 2007 établit à 350 $ le coût de la tonte du gazon et coupe de bordure, entretien de la rocaille, ratissage des feuilles à l’automne ainsi que l’entretien des arbustes et leur taille. Une autre facture, datée le 10 octobre 2007, établit à 300 $ le coût du déneigement de la cour et des voies d’accès (marche, trottoir, balcons). Une autre facture, datée le 17 novembre 2007, établit à 350 $ le coût des frais de peinture du salon, du passage, des murs et plafonds, coûts qui comprennent le déplacement des meubles.

[26]           En février 2008, à la suite d’une évaluation faite à la demande de la CSST, un ergothérapeute émet l’avis que les « éventuelles demandes d’aide financière pour la réalisation de travaux lourds d’entretien, tels que pelleter, tondre le gazon, faire le grand ménage du printemps ou laver les vitres sont entièrement justifiées » compte tenu que « les exigences physiques de ces travaux d’entretien dépassent assurément les limitations fonctionnelles de classe IV ».

[27]           En avril 2008, la travailleuse transmet à la CSST deux soumissions pour le coût des travaux de peinture : l’une au montant de 3 532,98 $ pour le coût de travaux de peinture des murs, plafonds de la cuisine, salon et passage (trois couches) ainsi que pour la peinture du patio avec réparation de certains éléments. L’autre soumission est au coût de 2 934,75 $.

[28]           En mai 2008, la CSST a fait droit à la demande de la travailleuse concernant l’aide personnelle à domicile demandée et lui accorde, rétroactivement au 18 avril 2005, des sommes d’argent à cet égard retenant alors un pointage de 22,5, précisant qu’après enseignement de certaines techniques, elle devrait être en mesure d’effectuer sans aide certaines activités, telles que se lever, se coucher, s’habiller et se déshabiller et que le pointage auquel elle aura droit à compter d’août 2008 sera de 16,5 points.

[29]           Le 9 mai 2008, la CSST rend une décision où elle reconnaît que la travailleuse « a droit au remboursement » de frais pour les travaux d’entretien du terrain, à savoir de tonte de gazon, ratissage et taille bordure, la taille des arbustes et haies ainsi que pour le déneigement et les travaux de peinture, mais indique que pour obtenir un remboursement, la travailleuse devra « d’abord présenter deux soumissions pour chaque travail demandé ». La travailleuse demande la révision de la partie de la décision qui l’oblige à soumettre des soumissions pour l’exécution des travaux, ce qui est maintenu en révision administrative.

[30]           Le 2 juin 2008, la CSST refuse de rembourser à la travailleuse les frais de travaux réalisés en 2007 par son conjoint, soulignant que certains sont déjà remboursés dans le cadre de l’aide personnelle à domicile déjà accordée. La travailleuse a demandé la révision de cette décision qui fût modifiée par la révision administrative.

[31]           En révision administrative donc, la CSST a modifié la décision du 2 juin 2008 et fait droit au remboursement de la facture du 17 novembre 2007 (350 $) concernant des travaux de peinture au sous-sol (salon et passage, murs et plafonds, incluant le déplacement des meubles) ainsi qu’au remboursement de la facture du 1er décembre 2007 (300 $) pour des travaux de peinture de la salle de bains du sous-sol, pour un montant total de 650 $, pourvu qu’il n’excède pas le montant maximum prévu pour l’année 2007. La CSST a, par ailleurs, refusé le remboursement des factures des 10 mai et 10 octobre 2007 concernant des travaux de tonte de gazon, coupe de bordure et ratissage des feuilles ainsi que de déneigement. Ce refus fait l’objet du présent dossier.

[32]           Il ressort des limitations fonctionnelles, dont la travailleuse est porteuse en raison de sa lésion professionnelle, que les exigences requises pour effectuer les travaux d’entretien courant de type tonte de gazon, ratissage de feuilles ainsi que de déneigement sont incompatibles avec ces limitations fonctionnelles, et ce, de l’opinion même de l’ergothérapeute qui les analysées, mais aussi du contenu même de la décision qui a été rendue le 9 mai 2008 par le conseiller en réadaptation de la CSST.

[33]           Dans cette décision du 9 mai 2008, la CSST reconnaît qu’à la suite de la lésion professionnelle d’avril 2002, la travailleuse n’a plus la capacité physique requise pour l’exécution de certains travaux d’entretien courant de son domicile, précisément ceux de l’entretien paysager, de la peinture et du déneigement.

[34]           La preuve au dossier converge dans un seul et même sens, à savoir l’incapacité de la travailleuse de faire ce type de travaux. Comme rien de permet de contredire la déclaration de la travailleuse quant au fait qu’elle effectuerait normalement elle-même ces travaux n’eût été des séquelles de sa lésion professionnelle, une conclusion s’impose, à savoir que le travailleur a droit au remboursement du coût de travaux d’entretien paysager et de déneigement.

 

[35]           Dans son argumentation, l’employeur se dit en accord avec la CSST quant à l’exigence de deux soumissions puisqu’il s’agirait d’une politique de la CSST visant à éviter les abus et pour s’assurer que la soumission retenue sera la plus équitable et la plus économique.

[36]           Or, il ressort de la jurisprudence, notamment de la décision rendue par la Commission des lésions professionnelles dans Bastien et CHSLD Plateau Mont-Royal[3], que la CSST ne peut exiger des soumissions d’un travailleur dans le cadre des travaux d’entretien courant du domicile en vertu de l’article 165 de la loi, car contrairement aux dispositions des articles 154 et 156 de la loi, l’article165 de la loi ne l’exige pas :

[22] La Commission des lésions professionnelles constate que les dispositions de l’article 165 de la loi, contrairement à ce qui est prévu aux articles 154 et 155 de la loi,  n’obligent nullement le travailleur à fournir deux soumissions pour des travaux d’entretien courant du domicile. La CSST ne pouvait donc pas exiger du travailleur de telles soumissions, sans ajouter au texte de la loi. La soussignée souscrit ainsi à l’opinion exprimée par la commissaire Blanchard dans une décision2 rendue sur le même objet, à l’effet que les soumissions demandées par la CSST ne sont pas nécessaires en vertu de l’article 165 de la loi, aux fins du remboursement de montants pour l’entretien courant du domicile.

 

2Babeu et Boulangerie Weston Québec ltée, 166478-62B-0108, 16 janvier 2003, N. Blanchard.

 

 

[23] La seule obligation du travailleur est de fournir la preuve que les travaux engagés représentent effectivement des travaux d’entretien courant du domicile et que des sommes ont effectivement été déboursées pour de tels travaux.

 

 

[37]           La soussignée souscrit à ces conclusions et fait droit à la requête de la travailleuse puisque celle-ci a démontré, par une preuve prépondérante, qu’elle remplit les conditions requises à l’article 165 de la loi, lesquelles conditions diffèrent de celles énoncées aux articles 154 à 156 de la loi, qui se lisent comme suit :

154. Lorsque le domicile d'un travailleur visé dans l'article 153 ne peut être adapté à sa capacité résiduelle, ce travailleur peut être remboursé des frais qu'il engage, jusqu'à concurrence de 3 000 $, pour déménager dans un nouveau domicile adapté à sa capacité résiduelle ou qui peut l'être.

 

À cette fin, le travailleur doit fournir à la Commission au moins deux estimations détaillées dont la teneur est conforme à ce qu'elle exige.

__________

1985, c. 6, a. 154.

 

 

155. L'adaptation du véhicule principal du travailleur peut être faite si ce travailleur a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique et si cette adaptation est nécessaire, du fait de sa lésion professionnelle, pour le rendre capable de conduire lui-même ce véhicule ou pour lui permettre d'y avoir accès.

__________

1985, c. 6, a. 155.

 

 

156. La Commission ne peut assumer le coût des travaux d'adaptation du domicile ou du véhicule principal du travailleur visé dans l'article 153 ou 155 que si celui-ci lui fournit au moins deux estimations détaillées des travaux à exécuter, faites par des entrepreneurs spécialisés et dont la teneur est conforme à ce qu'elle exige, et lui remet copies des autorisations et permis requis pour l'exécution de ces travaux.

__________

1985, c. 6, a. 156.

                                                                                  (les soulignés sont nôtres)

 

 

[38]           Dans Millaire et Sport motorisé Millaire inc.[4], la Commission des lésions professionnelles retient que le travailleur peut retenir les services de quiconque pour l’exécution des travaux d’entretien courant de son domicile et qu’il a droit au remboursement des coûts s’il produit les factures ou reçus originaux sur lesquels apparaissent la description des travaux ainsi que les coordonnées des personnes qui les ont effectués de manière à permettre une vérification de leur véracité :

[33] La Commission des lésions professionnelles estime donc que, pour obtenir le remboursement des frais qu’il engage pour faire exécuter les travaux d’entretien courant de son domicile, le travailleur peut retenir les services de quiconque et doit ensuite produire des factures ou des reçus originaux sur lesquels apparaissent la description de ces travaux ainsi que les noms, adresses et, le cas échéant, numéros de téléphone des personnes qui les ont effectués.

 

[34] La CSST pourra, bien sûr, exercer les pouvoirs d’enquête que la loi lui donne si, pour quelques motifs que ce soit, elle a de bonnes raisons de douter de la validité ou de la véracité des factures ou des reçus qui lui sont présentés.  Elle n’est cependant pas habilitée à imposer au travailleur des conditions ou des exigences qui n’ont pas été prévues par le législateur et qui ont pour effet de limiter l’exercice des droits de ce dernier.

 

[35] Soulignons par ailleurs que, dès la réception des pièces justificatives, la CSST doit rembourser au travailleur tous les frais qu’il engage pour faire exécuter les travaux d’entretien courant de son domicile […]

 

 

[39]           Le tribunal ne retient pas l’argument de l’employeur qui se dit en accord avec la CSST quant aux refus des factures au motif que les travaux ont été exécutés avant que ne soient déterminées les limitations fonctionnelles de la travailleuse.

 

[40]           Comme l’a fait remarquer le représentant de la travailleuse dans son argumentation écrite, il ressort de la jurisprudence, notamment de la décision rendue dans Gagné et 3131751 Canada inc. (fermé)[5], que rien dans la loi n’empêche qu’une décision faisant droit au remboursement des coûts pour travaux d’entretien puisse avoir un effet rétroactif :

[15] Même si la demande de remboursement des travaux d’entretien courant de son domicile n’a été formulée que le 27 août 2005, rien n’empêche qu’une décision faisant droit au remboursement de certains ou de tous les travaux puisse rétroagir à la date de la lésion professionnelle, soit au 11 décembre 2000. En effet, le travailleur n’était évidemment pas capable d’effectuer les travaux qu’il faisait antérieurement à compter de cette date. La loi n’interdit aucunement la rétroactivité dans un tel cas et l’article 1 de la loi, dont l’objet est la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu’elle entraîne pour les bénéficiaires, permet, certes, d’appliquer cette réparation à compter de la lésion, car les conséquences ont commencé le 11 décembre 2000 et non au 3 novembre 2004, date de la consolidation.

 

[16] Afin de déterminer le droit au remboursement des frais des divers travaux pour lesquels réclame le travailleur, il y a lieu de procéder à l’analyse de chacune de ses réclamations, donc des travaux qu’il aurait exécutés n’eût été de sa lésion professionnelle.

 

 

[41]           Dans le présent cas, la preuve démontre que les travaux ont été effectués en 2007 et que leur coût a été payé. La preuve démontre que non seulement la travailleuse parlait déjà de ces travaux au conseiller en réadaptation en 2006, mais les limitations fonctionnelles qui ont été retenues dans l’accord du 1er octobre 2007 rétroagissent à tout le moins à la période de la consolidation de la lésion professionnelle, à savoir juin 2006.

[42]           Il nous apparaît donc, tout comme pour l’année 2008, vu le respect des conditions énoncées à l’article 165 de la loi, que la CSST n’était pas justifiée de refuser le remboursement des coûts demandés dans les factures des 10 mai et 10 octobre 2007.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête de la travailleuse, madame Diane Pouliot;

MODIFIE la décision rendue le 19 septembre 2008 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative; et,

 

DÉCLARE que la Commission de la santé et de la sécurité du travail n’était pas justifiée de requérir de la travailleuse, madame Diane Pouliot, deux soumissions pour chaque travail d’entretien courant du domicile dont elle demande le remboursement pour l’année 2008;

DÉCLARE que la travailleuse, madame Diane Pouliot, a droit au remboursement des factures des 10 mai et 10 octobre 2007 au coût total de 650 $ pour l’exécution des travaux d’entretien paysager de tonte de gazon, coupe de bordure, ratissage de feuilles et de déneigement dans la mesure où cette somme n’excède pas le montant maximum prévu pour l’année 2007.

 

 

 

__________________________________

 

Marie-Danielle Lampron

 

Monsieur Gilles Witty

Représentant de la partie requérante

 

Madame Lyse Dumas

SHEPELL FGI

Représentante de la partie intéressée

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           306806-62B-0701, Alain Vaillancourt.

[3]           226220-71-0401, 15 juillet 2004, L. Couture.

[4]           252156-64-0412, 14 novembre 2005, F. Poupart.

[5]           284176-63-0603, 1er août 2007, M. Sauvé.

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