Droit de la famille — 18789 |
2018 QCCS 1521 |
|||
COUR SUPÉRIEURE (Chambre de la famille) |
||||
|
||||
CANADA |
||||
PROVINCE DE QUÉBEC |
||||
DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
|||
|
||||
N° : |
500-12-323455-141 500-04-064286-140 |
|||
|
|
|||
|
||||
DATE : |
5 AVRIL 2018 |
|||
______________________________________________________________________ |
||||
|
||||
SOUS LA PRÉSIDENCE DE : L’HONORABLE CAROLE HALLÉE, J.C.S. |
||||
______________________________________________________________________ |
||||
|
||||
R... S...
|
||||
Demanderesse |
||||
c.
|
||||
P... R... |
||||
Défendeur |
||||
______________________________________________________________________ |
||||
|
||||
JUGEMENT SUR MESURES PROVISOIRES |
||||
______________________________________________________________________ |
||||
|
||||
[1] Dans le cadre d’une demande réamendée pour mesures provisoires, Madame R... S... « S... »[1] réclame une pension alimentaire pour les enfants, une pension alimentaire de 150 000 $ par mois pour elle-même ainsi qu’une provision pour frais de plus de 10 M$.
[2] S’ajoutent à ces demandes, plusieurs réclamations financières recherchant le remboursement de certaines dépenses effectuées par S... depuis l’introduction de l’instance en août 2014.
[3] De son côté, Monsieur P... R... « R... » revendique la diminution de la pension alimentaire payable pour les enfants afin de refléter la situation financière des parties, le rejet de la demande de pension alimentaire et provision pour frais pour S....
[4] R..., de nationalité française et S... de nationalité marocaine, se rencontrent à Paris au mois de juin 1990, elles font rapidement vie commune.
[5] R... a alors deux enfants d’une première union, X et Y, lesquels sont âgés aujourd’hui de 33 et 32 ans.
[6] De l’union avec S..., les parties ont deux enfants, Z et A, respectivement âgés de 20 et 15 ans.
[7] En 2004, les parties déménagent à Bruxelles en Belgique. Elles se marient le 21 décembre 2004, faisant précéder leur union d’un contrat de mariage en séparation de biens, signé devant notaire, le 13 décembre 2004.
[8] Le 4 juillet 2013, les époux immigrent à Ville A.
[9] Le déménagement de la famille de la Belgique vers le Québec fait suite à la procédure d’immigration introduite par S... à l’été 2011, en tant qu’investisseur.
[10] Les parties se portent acquéreurs de plusieurs immeubles dont une résidence cossue appelée « [la résidence A] » située à Ville B, au coût de 6 475 000 $[2].
[11] Au cours de l’année 2014, leurs relations se dégradent.
[12] Divers litiges et procédures s’en suivent tant en Belgique qu’au Québec.
[13] Le 12 août 2014, R... introduit une demande en divorce en Belgique auprès du Tribunal de première instance de Bruxelles.
[14] Le 15 août 2014, S... entreprend une demande en divorce dans le district judiciaire de Montréal.
[15] Le 20 août 2014, R... présente une requête en irrecevabilité pour litispendance.
[16] Le 16 décembre 2015, le Tribunal de première instance de Bruxelles[3] se déclare internationalement compétent quant aux demandes formulées par les parties à titre principal et reconventionnel et dit ne pas avoir à surseoir, ni à statuer jusqu’à ce que la juridiction québécoise se soit prononcée au sujet de l’exception de litispendance soulevée par R..., les parties possédant la nationalité belge.
[17] Le 15 juillet 2016, la soussignée rend jugement déclarant que les tribunaux québécois sont compétents pour prononcer un jugement de divorce sur mesures accessoires entre les parties, ces dernières résidant au Québec pendant au moins l’année précédant l’introduction de l’instance, et rejette la requête en irrecevabilité pour litispendance.
[18] Le 29 septembre 2017, la Cour d’appel du Québec infirme le jugement de première instance et ordonne la suspension des procédures à l’exception des droits relatifs à l’usage de la résidence familiale, aux obligations alimentaires pour les enfants et leur garde, le cas échéant, pension alimentaire pour la demanderesse ainsi que la provision pour frais[4].
[19] Le 15 juillet 2016, la soussignée prononçait une ordonnance de sauvegarde pour valoir jusqu’au jugement sur mesures provisoires comme suit :
(49) ORDONNE à Monsieur de payer à Madame pour les deux enfants Z et A une pension alimentaire mensuelle de 15 833 $ rétroactivement au 15 avril 2016;
(50) ORDONNE à Monsieur de payer 100 % des frais de scolarité, d’activités parascolaires, des fournitures et uniformes scolaires pour les enfants, et ce, dès leur réception et lui ORDONNE de s’y conformer;
(51) ORDONNE à Monsieur de payer les frais de tutorat et de psychologue pour l’enfant A sur présentation des factures jusqu’à concurrence de 20 000 $ annuellement, et ce, dès leur réception et lui ORDONNE de s’y conformer;
[20] Les mesures provisoires devaient être entendues du 14 au 25 novembre 2016, mais une chirurgie subie par R... a nécessité le report de celles-ci. Ainsi, le 1er décembre 2016, suite à une audience de deux jours pour une seconde ordonnance de sauvegarde, la soussignée prononçait plusieurs conclusions, qu’il est utile de reproduire intégralement pour la suite du présent dossier :
« PRONONCE une ordonnance de sauvegarde pour valoir jusqu’au jugement sur mesures provisoires;
ACCORDE à la demanderesse, R... S..., et aux enfants, l’usage exclusif de la résidence familiale sise au [adresse 1] à Ville B y incluant l’ensemble de son contenu intérieur et extérieur, et ce, à compter du 1er décembre 2016;
AUTORISE les parties à retenir les services d’un huissier conjoint afin de procéder à un inventaire des biens au [adresse 1] à Ville B afin d’éviter qu’elles ne s’accusent mutuellement de s’être appropriées de biens;
ACCORDE à la demanderesse, R... S..., et aux enfants, l’usage exclusif de l’ensemble des véhicules d’agréments suivants et/ou liés à l’usage ou à l’entretien de la propriété sise au [adresse 1] à Ville B, et ce, à compter du 1er décembre 2016 :
Ø Un Dodge-ram 1500 SRT;
Ø Un Quad 4D 2008-2009;
Ø Une automobile Mercedes Sprinter 2013 noire;
Ø Une Rolls Royce;
Ø Un grand tracteur avec son accessoire d’excavation;
Ø Quatre tracteurs à tondeuse;
Ø Trois Tondeuses automatiques Huskvarna;
Ø Trois remorques (petite - moyenne - grande);
Ø Deux voiturettes de golf (8 places et 4 places);
Ø Un Quad Polaris à quatre roues;
Ø Un camion cube;
Ø Un motocross;
Ø Quatre tricycles;
Ø Un bateau Sea-doo;
Ø Une barque bleue;
Ø Deux jets skis Sea-doo;
Ø Une remorque noire;
Ø Trois « ski-doos »;
ORDONNE au défendeur, P... R..., de payer directement auprès des tiers concernés les frais suivants relatifs à la résidence sise au [adresse 1] à Ville B :
Ø Les taxes foncières ;
Ø Les taxes scolaires ;
Ø Les assurances de la résidence ainsi que des véhicules ;
Ø L’électricité ;
Ø Le chauffage ;
Ø La climatisation.
ORDONNE au défendeur P... R... de rembourser à la demanderesse, R... S..., dans les dix jours de la réception de la facture, les frais suivants relatifs à la résidence sise au [adresse 1] à Ville B:
Ø Les frais de déneigement;
Ø Les frais de jardinier;
Ø Les frais d’entretien de la piscine;
Ø Les frais d’entretien du quai pour les bateaux;
Ø Les frais d’entretien du portail;
Ø Le salaire des employés déjà au service du défendeur, P... R..., alors qu’il habitait [la résidence A];
ORDONNE à la demanderesse, R... S..., de ne pas se départir d’aucun bien situé et/ou relié à l’entretien du [adresse 1] à Ville B;
AUTORISE la demanderesse, R... S..., à avoir accès et à prendre possession de ses bijoux et effets personnels contenus aux coffrets de sûreté portant les numéros [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...] et [...] de la succursale de la Banque Royale du Canada, sise au 800 Square Victoria, à Montréal conformément à la pièce R-18;
ORDONNE au défendeur, P... R..., de collaborer et de prendre les dispositions nécessaires pour l’ouverture des coffres;
ACCORDE à la demanderesse, R... S..., l’usage exclusif à compter de la présente ordonnance de sauvegarde de l’ensemble de ses bijoux, effets personnels, papiers personnels ainsi que tous les biens des enfants emportés de la résidence des parties et placés dans des coffrets de sûreté de la Banque Royale du Canada sise au 800 Square Victoria à Montréal;
AUTORISE les parties à avoir chacun leur représentant au moment où la demanderesse aura accès au coffre;
ORDONNE à la demanderesse, R... S..., de ne pas se départir d’aucun bijou et/ou effet personnel dont elle prendra possession dans les coffrets de sûreté;
AUTORISE le défendeur, P... R..., à récupérer ses vêtements et effets personnels situés à la résidence familiale du [adresse 1] à Ville B et ce, sur préavis écrit de 48 heures à la demanderesse, R... S...;
AUTORISE les parties à avoir chacun leur représentant au moment où le défendeur, P... R..., prendra possession de ses vêtements et effets personnels à la résidence familiale;
ACCORDE à la demanderesse, R... S..., l’usage exclusif à compter de la présente ordonnance de sauvegarde de l’ensemble du contenu de sa garde-robe désignée par les parties sous le nom de son « dressing » et la chambre verte situés au [adresse 2] à Lasne en Belgique, ainsi que de l’ensemble des vêtements, bijoux et instruments de musique appartenant aux enfants;
AUTORISE la demanderesse, R... S..., à récupérer en Belgique l’ensemble des biens décrits au paragraphe [98] à sa plus proche convenance;
AUTORISE la demanderesse, R... S..., à ne récupérer que les vêtements et effets personnels du « dressing » et de la chambre verte ainsi que les vêtements, bijoux et instruments de musique des enfants; étant entendu que la présente ordonnance ne constitue pas une autorisation à la demanderesse, R... S..., de prendre des meubles et/ œuvres d’art qui ne constituent pas aux fins de la présente ordonnance des effets personnels;
AUTORISE la demanderesse, R... S..., à rapporter au Canada l’ensemble du contenu de sa garde-robe désignée par les parties sous le nom de son « dressing » et de la chambre verte ainsi que l’ensemble des vêtements, bijoux et instruments de musique appartenant aux enfants;
AUTORISE les parties à avoir chacun leur représentant au moment où la demanderesse, R... S..., se rendra en Belgique pour récupérer lesdits effets;
ORDONNE au défendeur, P... R..., de signer toute autorisation nécessaire afin d’assurer le respect de la présente ordonnance au séquestre Me Jean-Louis Sorel afin de faciliter l’exécution des ordonnances relatives à l’usage de l’ensemble du contenu de la garde-robe désignée par les parties sous le nom de « dressing » et de la chambre verte ainsi que pour l’ensemble des vêtements, bijoux et instruments de musique appartenant aux enfants et signer toute autorisation nécessaire afin d’assurer le respect de la présente ordonnance;
PREND ACTE de l’engagement des parties à débuter la médiation avec l’honorable Pierrette Rayle, juge à la retraite de la Cour d’appel et un comédiateur Belge choisi de consentement entre les parties;
PREND ACTE de l’engagement des parties à débuter la médiation dans les meilleurs délais;
ORDONNE aux parties d’assumer en parts égales les honoraires des deux médiateurs;
ORDONNE au défendeur, P... R..., d’assumer tous les frais de déplacement y incluant, mais sans restreindre la généralité de ce qui précède, avion, hôtel et repas du médiateur Belge;
RÉSERVE les droits de la demanderesse à demander une provision pour frais advenant une demande de remise de l’audience des mesures provisoires de la part du défendeur;
FIXE l’audience des mesures provisoires au mois de mai 2017 à une date à être déterminée;
Frais de justice à suivre. »
[21] R... ne voit plus Z depuis plus de trois ans et A depuis plus de deux ans.
[22] C’est dans ce contexte que l’audience des mesures provisoires a eu lieu aux dates suivantes :
Ø Mai 2017 : 4, 5, 8, 9, 10, 15, 16, 17, 18, 19;
Ø Novembre 2017 : 27, 28, 29 et 30;
Ø Décembre 2017 : 1er, 5, 6, 7, 8, 11, 13 et 14;
Ø Février 2018 : 14;
Ø Pour un total de : 21.5 jours.
a) Établir les revenus de R...;
b) Fixer la pension alimentaire payable pour les enfants en fonction des Tables provinciales entre la date d’introduction de l’instance et le 31 décembre 2015;
c) Déterminer si à compter du 1er janvier 2016, les Tables fédérales trouvent application pour la pension alimentaire des enfants, en raison du lieu de résidence de R...;
d) Établir le droit à la pension alimentaire pour S... et dans l’affirmative, déterminer le montant de pension alimentaire;
e) Évaluer les dépenses effectuées par S... depuis l’introduction de l’instance dont elle demande le remboursement;
f) Déterminer le droit à la provision pour frais et le montant, s’il y a lieu.
Ø Liste des propriétés
[23] Les parties elles-mêmes ou par le biais de leurs sociétés détiennent plusieurs immeubles, en Belgique, en France et au Québec. Le Tribunal reproduit la liste préparée par l’expert Hamelin. [NDLE : Liste non reproduite en l’espèce]
[24] S... demande le maintien du statu quo quant au niveau de vie de la famille, niveau de vie qu’elle estime entre 8 à 10 M$ par année. Ainsi, elle recherche une pension alimentaire substantielle pour les enfants en fonction des lignes directrices provinciales et fédérales selon la période et le lieu de résidence de R..., une pension alimentaire pour elle-même de 150 000 $ par mois, une provision pour frais de plus de 10 M$ ainsi que le remboursement de plusieurs dépenses, et ce, rétroactivement à la date d’introduction de l’instance en août 2014.
[25] S... témoigne que le couple et les enfants se payaient ce qu’il y avait de mieux. Elle ajoute que R... était généreux et qu’il a toujours payé toutes les dépenses de la famille et qu’elle n’y a jamais contribué.
[26] De son côté, R... nie le droit à la pension alimentaire pour S... déclarant avoir été amplement généreux envers elle, lui ayant fait don de parts d’immeubles et de placements financiers au fil des ans. Au surplus, il ajoute que les sommes réclamées, sont disproportionnées, déraisonnables et qu’il n’a pas la capacité de payer ces sommes, et ce, tant pour S... que pour les enfants.
[27] Le 1er mars 2017, et ce, de consentement avec les parties, le Tribunal désignait à titre d’expert de la Cour, Monsieur Michel Hamelin de la firme Demers, Beaulne afin d’évaluer le train de vie des parties pendant la vie commune, la valeur nette de chacune d’elles ainsi que leurs revenus annuels.
[28] Trois rapports ont été transmis aux parties et déposés au dossier de la Cour. Le premier rapport porte la date du 15 mai 2017 et conclut ainsi quant au train de vie des parties et à leurs revenus annuels :
« Compte tenu des renseignements et documents mis à notre disposition, des analyses réalisées, des hypothèses mentionnées précédemment et des restrictions et réserves du présent rapport, nous sommes d’avis que :
· le Train de vie des parties pendant la vie commune s’élève à 4,7 M$ par année;
· les liquidités générées en moyenne en 2014 et 2015 à 2 M$, dont 1,8 M$ par Monsieur, essentiellement par le biais de la disposition d’actifs, et 219 k$ par Madame; et
· les revenus générés en 2016 par les parties au Canada s’élèvent à 278 k$, dont 158 k$ par Monsieur et 120 k$ par Madame. »
[29] Un deuxième rapport concernant la valeur nette des parties a été produit le 26 mai 2017. Cependant, ce rapport a été remplacé par celui du 10 novembre 2017, et ce, compte tenu des documents supplémentaires fournis par R.... Nous y reviendrons.
[30] Ce rapport du 26 mai 2017 évaluait l’actif net escompté de R... à 66 M$ CA et celui de la demanderesse à 34 M$ CA.
[31] Le rapport du 10 novembre 2017 évalue la valeur nette de R... à 53 M$ CA, dont 4,8 M$ de liquidités et placements. Quant à la valeur nette de S..., elle est fixée à 36 M$ CA, dont 440 000 $ en liquidités et de placements.
Ø Le droit
Ø Loi sur le divorce
Ordonnance alimentaire au profit d’un enfant
· 15.1 (1) […]
Ordonnance provisoire
· (2) Sur demande des époux ou de l’un d’eux, le tribunal peut rendre une ordonnance provisoire enjoignant à un époux de verser, dans l’attente d’une décision sur la demande visée au paragraphe (1), une prestation pour les aliments des enfants à charge ou de l’un d’eux.
Application des lignes directrices applicables
(3) Le tribunal qui rend une ordonnance ou une ordonnance provisoire la rend conformément aux lignes directrices applicables.
· Ordonnance alimentaire au profit d’un époux
· 15.2 (1) […]
Ordonnance provisoire
(2) Sur demande des époux ou de l’un d’eux, le tribunal peut rendre une ordonnance provisoire enjoignant à un époux de garantir ou de verser, ou de garantir et de verser, dans l’attente d’une décision sur la demande visée au paragraphe (1), la prestation, sous forme de capital, de pension ou des deux, qu’il estime raisonnable pour les aliments de l’autre époux.
[…]
Priorité aux aliments pour enfants
· 15.3 (1) Dans le cas où une demande d’ordonnance alimentaire au profit d’un enfant et une demande d’ordonnance alimentaire au profit d’un époux lui sont présentées, le tribunal donne la priorité aux aliments de l’enfant.
Facteurs
(4) En rendant une ordonnance ou une ordonnance provisoire au titre du présent article, le tribunal tient compte des ressources, des besoins et
d’une façon générale, de la situation de chaque époux, y compris :
§ a) la durée de la cohabitation des époux;
Ø Code civil du Québec
[32] L’article 588 se lit comme suit :
588. Le tribunal peut accorder au créancier d’aliments une pension provisoire pour la durée de l’instance.
Il peut, également, accorder au créancier d’aliments une provision pour les frais de l’instance.
Ø Code de procédure civile
[33] L’article 416 :
416. Le tribunal peut ordonner à l’une des parties de verser à l’autre partie une provision pour les frais de l’instance si les circonstances le justifient, notamment s’il constate que sans cette aide cette partie risque de se trouver dans une situation économique telle qu’elle ne pourrait faire valoir son point de vue valablement.
[34] L’article 446 :
446. Lorsque l’information contenue dans les documents prescrits est incomplète ou contestée, ou dans tous les cas où il l’estime nécessaire, le tribunal peut y suppléer et, notamment, établir le revenu d’un parent. Il tient alors compte, entre autres, de la valeur des actifs de ce parent et des revenus qu’ils produisent ou qu’ils pourraient produire, selon ce qu’il estime approprié.
Ø Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants
Table applicable
(3) La table applicable est :
· a) si l’époux faisant l’objet de la demande d’ordonnance alimentaire réside au Canada :
[…]
· b) s’il réside à l’extérieur du Canada ou si le lieu de sa résidence est inconnu, la table de la province où réside habituellement l’autre époux à la date à laquelle la demande d’ordonnance alimentaire ou la demande de modification de celle-ci est présentée ou à la date à laquelle le nouveau montant de l’ordonnance doit être fixé sous le régime de l’article 25.1 de la Loi.
Ø La doctrine et la jurisprudence à l’étape des mesures provisoires
[35] Aux termes des paragraphes 15.1(2) et 15.2(2) de la Loi sur le divorce, le Tribunal peut, dans l’attente d’une décision au fond, rendre une ordonnance provisoire enjoignant à un époux de verser la prestation qu’il estime raisonnable pour les aliments des enfants à charge et de l’autre époux.
[36] Conformément à la Loi sur le divorce[5], le Tribunal donne la priorité aux aliments des enfants.
[37] Il y a lieu de faire un bref rappel des principes applicables à l’étape des mesures provisoires.
[38] De l’avis de la Cour d’appel, la fixation de la pension alimentaire est laissée à la discrétion du Tribunal, selon ce qu’il estime raisonnable dans les circonstances du cas en l’espèce[6].
[39] À l’étape des mesures provisoires, l’exercice se fait donc de façon beaucoup plus sommaire qu’au stade final et comporte un aspect discrétionnaire laissé à l’appréciation du Tribunal[7]. Il n’est donc pas nécessaire à cette phase de procéder à un examen complet des moyens financiers du débiteur afin de répartir les conséquences de l’échec du mariage, ni de déterminer l’autonomie financière du créancier[8].
[40] Pour reprendre les mots de la Cour d’appel, au stade des mesures provisoires, le Tribunal a une large discrétion, plus étendue qu’au fond et qui peut s’exercer sans qu’il soit nécessaire de tenir une longue enquête[9].
[41] Les fins de l’ordonnance sur mesures provisoires diffèrent essentiellement de celles des mesures accessoires, ne concernant qu’une période limitée et ayant pour but le maintien du statu quo[10].
[42] Les Tribunaux ont, à maintes reprises, exprimé l’opinion qu’au niveau provisoire, il doit y avoir maintien du niveau de vie autant que possible[11].
[43] À ce stade, il est primordial de s’assurer que l’épouse puisse maintenir un certain niveau de vie et faire face à ses engagements[12].
[44] Le Tribunal ne peut pas, au stade des mesures provisoires, demander à l’épouse d’entamer sa part du patrimoine familial pour combler ses besoins durant l’instance, même si celle-ci possède des actifs considérables[13].
[45] Finalement, se prononçant sur le principe de la rétroactivité de la pension, la Cour d’appel affirme que les tribunaux peuvent réviser, de manière rétroactive, la pension alimentaire accordée à l’étape intérimaire, et ce, tant au stade provisoire qu’au fond[14].
a) Établir les revenus de R...
[46] Le Tribunal a un pouvoir discrétionnaire étendu pour déterminer les revenus d’une partie, surtout en matière de pension alimentaire pour enfants. Le Tribunal ne doit pas s’en tenir à l’application des règles fiscales. Le rôle du tribunal est plutôt de « chercher à déterminer la réalité financière de chacun des parents et sa capacité de pourvoir aux besoins des enfants et non de voir à l’application fidèle des règles fiscales statutaires qui ont leur logique propre »[15]. La discrétion du Tribunal sera tributaire de la preuve faite à l’audience[16].
[47] L’article 446 C.p.c. « reprend le droit antérieur en clarifiant toutefois la prise en considération par le tribunal non seulement des revenus qu'un actif produit, mais aussi de ceux qu'il pourrait produire. Cette règle permettra au tribunal d'allouer des aliments si l'actif est maintenu improductif en raison notamment de la volonté du débiteur de se soustraire à son obligation ou d'en diminuer la portée »[17]. Ce principe s’applique tant au stade des mesures provisoires[18] qu’à celui des mesures accessoires.
[48] Comme l’énonce Me Jocelyn Verdon dans le Grand Collectif[19], à propos de l’article 446 C.p.c., anciennement l’article 825.12 C.p.c. :
Cet article réitère la discrétion judiciaire pour établir le revenu d'un parent lorsque les informations apparaissant dans les formulaires, les annexes ou les documents prescrits sont incomplets ou contestés ou dans tout autre cas jugé utile. Le cas du parent qui n'a pas produit les documents, annexes ou formulaires exigés entraîne l'application de l'article 446.
La décision de base en la matière demeure Droit de la famille — 3000[20], où la Cour d'appel rappelle que « la capacité de payer une pension n'est pas limitée aux revenus indiqués dans les déclarations de revenus » ou dans les formulaires. L'analyse et l'évaluation de la capacité de payer doivent se faire de manière large et libérale, en tenant compte de l'ensemble de la situation et notamment des actifs.
Le but recherché est d'établir la « réelle capacité financière » des parents. La jurisprudence largement majoritaire n'hésite pas à utiliser la discrétion que lui confère cet article pour établir le revenu d'un parent qui fait défaut de transmettre les documents requis, surtout lorsqu'il appert que ce dernier tente de dissimuler ses revenus afin de se soustraire à ses obligations.
Les « autres cas » auxquels réfère cette disposition sont notamment les dossiers où les revenus déclarés sont contestés ou incompatibles avec le train de vie déclaré. La jurisprudence « sanctionne » les comportements fautifs afin, entre autres, qu'une partie ne trouve aucun avantage à ne pas compléter ou à ne pas produire les documents requis par la loi.
Les termes « si les circonstances le justifient » du nouvel article 416 traitant de la provision pour frais permettent à une partie de réclamer une provision pour frais pour les frais ainsi occasionnés. En effet, tout manquement à l'obligation de produire les documents va à l'encontre de la réforme du nouveau Code de procédure civile axée sur la déjudiciarisation et la collaboration. Le manquement de produire des documents entraîne souvent des délais et des démarches additionnelles pour le parent qui réclame une pension. Conformément au désir du législateur, ce parent n'a pas à assumer ces coûts.
[Le Tribunal souligne]
[49] En 2010, la Cour d’appel a confirmé une décision de la Cour supérieure qui avait été très sévère quant aux manœuvres d’un débiteur alimentaire (l’appelant) pour cacher ses véritables revenus, dont le témoignage n’était qu’une succession d’invraisemblances et de contradictions, au point qu’aucune crédibilité ne pouvait lui être accordée[21]. « Cela va de la fabrication de documents erronés, au manque d'explications crédibles sur les nombreux transferts bancaires et à ses revenus d'emploi. Le juge n'a accordé aucune crédibilité à l'appelant. Ce dernier aurait multiplié les manœuvres pour cacher ses véritables revenus ». D’ailleurs, la baisse de son train de vie ne constituait qu’une manœuvre supplémentaire pour échapper à ses responsabilités. La Cour a finalement usé de sa discrétion afin d’établir son revenu aux fins de la fixation de la pension alimentaire pour enfant, et a retenu pour ce faire le témoignage de l’épouse, qui était parfaitement compatible avec le train de vie des parties au moment de la séparation et des revenus de l’époux[22].
[50] En 2016, la Cour d’appel[23] rappelait, que l’article 446 C.p.c. permet au Tribunal d’imputer un revenu lorsqu’il l’estime nécessaire afin de déterminer la réelle capacité de payer du parent débiteur et confirme qu’une approche libérale est de mise.
Ø Train de vie des parties
[51] R... œuvre depuis sa jeunesse dans le commerce d’œuvres d’art pour ensuite entreprendre une carrière de promoteur immobilier. Il a travaillé notamment au développement d’un centre commercial en France.
[52] En 2004, suite à un arrêt cardiaque, R... aurait été informé qu’il lui restait tout au plus cinq ans à vivre. Il décide de mettre en vente le centre commercial pour profiter auprès de S... et des enfants, de ce qu’il croit être ses dernières années.
[53] Il procède donc aux transactions dites « A » en 2006[24]. Ces transactions sont évaluées à environ 150 M€[25].
[54] R... quitte alors la France pour la Belgique et renonce de façon définitive à sa nationalité française pour se mettre à l’abri de l’impôt.
[55] Suite à la vente de ce centre commercial, les parties reconnaissent que leur train de vie a drastiquement augmenté.
[56] S... a longuement témoigné[26] de leur vie en Belgique, de leur luxueuse résidence familiale située au [adresse 2] à Lasne. Cette propriété ayant été payée 1,5 M€ en 2005, dont 7,5 M€ ont été ajoutés en améliorations et rénovations.
[57] Suite à une évaluation immobilière professionnelle demandée par R..., la résidence de Lasne avait une valeur de 9 M€ en date du 3 juillet 2013[27]. Dans son interrogatoire hors cour du 16 février 2015, R... déclare que l’immeuble vaut 10 M€ .
[58] Cette résidence inclut un ascenseur, un monte-charge, une cuisine de restauration comprenant six frigos, deux buanderies avec machines industrielles.
[59] S... soutient avoir eu les services d’une gouvernante pendant environ 17 ans, laquelle les a d’ailleurs suivis de Paris jusqu’à Lasne en Belgique lors de leur déménagement en 2004. En Belgique, S... bénéficiait également d’une autre dame qui vaquait aux tâches domestiques. Ces deux employées vivaient avec la famille, 24 heures sur 24, sept jours par semaine. S... ajoute qu’il y avait un homme à tout faire, quatre femmes de ménage tous les jours, deux femmes pour la buanderie et un cuisiner. Elle affirme ainsi que dix employés étaient à leur service à cette résidence.
[60] S... ajoute qu’un fleuriste venait tous les lundis mettre 200 roses par vase, disposées dans quinze vases à travers la propriété. Le fleuriste repassait tous les deux ou trois jours pour changer l’eau des roses. Il s’occupait également d’une centaine d’orchidées qui garnissaient la résidence.
[61] S... témoigne du train de vie élevé des parties et des enfants pendant le mariage : résidences de luxe, voyages, achats de vêtements griffés et bijoux de grande valeur.
[62] S... précise que dès 2005, et ce, jusqu’en 2012 inclusivement, la famille se rendait à Dubaï pour une durée de deux à trois mois entre octobre et février de chaque année.
[63] En plus de leurs propres suites à l’hôtel, ils louaient des chambres d’amis afin que ces derniers puissent les visiter à Dubaï. Tant R... que S... reconnaissent qu’ils faisaient installer des chapiteaux au bord de la mer, dont un pour le spa, un pour les études des enfants, une salle à manger pouvant contenir une table de 15 à 20 invités. Enfin, un autre chapiteau était installé pour les bureaux de R....
[64] D’ailleurs, ce dernier confirme qu’il faisait aménager une chambre en bureau et changer les circuits électriques pour pouvoir y travailler. Il corrobore l’installation des chapiteaux y incluant un chapiteau sur la plage pour qu’il soit près des enfants lorsqu’il travaillait.
[65] Bien que depuis le début des procédures, R... nie ce train de vie, il reconnaît lors de son témoignage du 28 novembre 2017, l’achat des roses à la résidence en Belgique ainsi que la fréquence et la durée des voyages à Dubaï.
[66] Il ajoute que S... dépensait lors de ces séjours, au point de revenir chaque année avec 20 valises supplémentaires de vêtements, chaussures, bijoux pour elle et les enfants. Il déclare même que les gains qu’il faisait, comme courtier à la bourse lorsqu’il était à Dubaï, excédaient les dépenses de la famille, dépenses qu’il qualifie de pharaoniques. Il témoigne que ces voyages représentaient une excellente plate-forme pour gagner de l’argent et qu’il gagnait plus en deux ou trois mois que ce que S... dépensait.
[67] Un ami du couple et témoin appelé par R..., Monsieur Ph... M... confirme que les parties passaient trois mois par année à Dubaï.
Ø Qu’en est-il en l’espèce?
Ø Formulaire III
[68] Dans son formulaire III du 7 juillet 2016, R... estime ses besoins personnels, y incluant une injection d’argent de 2 M$ par année dans ses sociétés, à 5 209 883 $ annuellement.
[69] Dans son formulaire III amendé du 10 mai 2017, alors qu’il indique maintenant un apport au compte courant de ses entreprises de 500 000 $ par année, ses besoins s’élèvent à 7 524 618,82 $.
[70] Dans son bilan du 7 juillet 2016, R... indique comme paiement de dettes, des intérêts annuels sur découvert bancaire de 94 700 $ et dans son budget du 10 mai 2017, le paiement des dettes et des intérêts s’élèvent à 4 276 866 $ annuellement.
[71] Dans ses deux budgets, il y a des frais d’avocats représentant environ 2 M$ annuellement, soit 1,9 M$ dans le budget du 7 juillet 2016 et 2 036 960 $ dans celui du 10 mai 2017.
[72] C’est donc dire que dans son budget du 7 juillet 2016, R... a des besoins personnels annuels de 1 309 883 $ pour une personne seule, et ce, en excluant les frais d’avocats et l’injection d’argent dans les compagnies[28].
[73] Dans son budget du 10 mai 2017, les besoins personnels de R... s’élèvent à 1 210 792,82 $ en soustrayant les frais d’avocats ainsi que le paiement des dettes qu’il indique rembourser à raison de 4 276 866 $ annuellement[29].
[74] Dans l’hypothèse où le Tribunal soustrait dans les deux budgets, les frais d’avocats, les paiements de dettes annuels et l’injection d’argent dans les compagnies, car non récurrents, cela représente pour le budget du 7 juillet 2016, des besoins personnels annuels de 1 215 183 $[30].
[75] Dans le budget du 10 mai 2017, ses besoins personnels s’élèvent alors à 710 792,82 $[31].
[76] Le Tribunal constate, sans véritable justification, une diminution des dépenses de R... de 504 391 $, soit près d’un demi-million de moins par année à l’approche de l’audience des mesures provisoires.
[77] Par ailleurs, après avoir examiné les dépenses énumérées aux formulaires III du 7 juillet 2016 et du 10 mai 2017, le Tribunal retient ce qui suit.
[78] Dans le budget du 10 mai 2017, R... a ajouté une dépense de loyer de 60 000 $ par année pour le [adresse 3], alors qu’il s’agit de l’immeuble qui abrite ses bureaux depuis son arrivée au Québec, immeuble acquis par la compagnie A, dont il est actionnaire unique. Le 4 juillet 2012, [la Compagnie A] acquiert ledit immeuble pour la somme de 2,6 M$ et le rénove et investit à cette fin plus d’un million de dollars.
[79] Depuis l’ordonnance de sauvegarde prononcée le 1er décembre 2016, laquelle accordait à S... et aux enfants l’usage exclusif de la résidence familiale appelée « [la résidence A] » que R... habitait seul, il réside, lorsqu’il est au Québec, au [adresse 3].
[80] R... produit des résolutions intitulées : « Résolution de l’administrateur unique de [la Compagnie A] en date du 1er juillet 2013 », « Résolution d’administrateur unique de [la Compagnie A] en date du 1er janvier 2015 » comprenant un avenant à la Convention signée le 1er juillet 2013. Enfin, un troisième document non intitulé portant la date du 12 septembre 2017 et signé par le comptable de la [Compagnie A] a été produit[32].
[81] Dans un premier temps, le Tribunal constate que les deux résolutions, du 1er juillet 2013 ainsi que celle du 1er janvier 2015 portent des signatures identiques (comme si elles avaient été signées au même moment) et dont le Tribunal n’a pas l’original. De plus, les documents ont le même caractère et la même forme comme s’ils avaient également été rédigés au même moment.
[82] La résolution de 2013 spécifie que R... peut avoir un usage personnel d’une partie des locaux du [adresse 3] à titre de location moyennant un montant forfaitaire et global de 5 000 $ par trimestre, soit 10 000 $ pour les années 2013 et 2014. Or, R... a habité [la résidence A] dès son arrivée au Québec, et ce, jusqu’au 1er décembre 2016.
[83] Il en est de même pour l’avenant du 1er janvier 2015 où il écrit que la location a été augmentée à 40 000 $ pour l’année 2015 et suivante alors que R... n’habitait pas le [adresse 3]. Enfin, le document du 12 septembre 2017 signé par le comptable indique que R... a payé à la [Compagnie A], un loyer de 40 000 $ pour l’année 2016. Or, le Formulaire III du 10 mai 2017 de R... indique un loyer de 60 000 $ par année.
[84] Au surplus, si R... a payé 40 000 $ de loyer pour les années 2015 et 2016 pourquoi cette dépense de 40 000 $ n’apparaît-elle pas à son budget du 7 juillet 2016?
[85] R... habitait [la résidence A] jusqu’au 1er décembre 2016 et a même été à l’extérieur du pays plus de 50 % durant cette année.
[86] De deux choses l’une, soit R... ne paie pas ces sommes à sa société et a fait préparer ces documents pour fins de dépenses fiscales, soit ces documents ont été préparés en vue de l’audience des mesures provisoires et ajoutés à son formulaire III du 10 mai 2017 pour augmenter ses dépenses.
[87] Dans son budget du 7 juillet 2016, R... indiquait une dépense annuelle de 27 943 $ en assurance-vie, accident et invalidité. Il a totalement retiré cette dépense dans son budget du mois de mai 2017.
[88] Alors qu’il habitait [la résidence A], à l’exclusion de S... et des enfants, il inscrivait 75 000 $ de budget annuel pour la réparation et l’entretien de cette résidence, budget qu’il a réduit à 24 105 $, alors que l’ordonnance de sauvegarde a autorisé S... et les enfants à reprendre le domicile familial.
[89] Il en va de même pour les services d’entretien domestique qui sont passés de 60 000 $, alors qu’il habitait seul [la résidence A], à 36 250 $ annuellement, maintenant que S... et les enfants y habitent.
[90] Il en est de même pour le budget annuel de l’essence et de l’entretien des véhicules de [la résidence A], lequel est passé de 58 000 $ annuellement à 0 $ dans le dernier budget.
[91] Au poste de « jouets et cadeaux », R... avait inscrit en juillet 2016, 30 000 $ annuellement, somme qu’il a réduite en 2017 à 10 000 $. Pourtant, la preuve révèle que R... a fait un cadeau de 30 000 € à son adjointe en janvier 2017 pour souligner ses 25 ans de service.
[92] Au poste de « vacances », alors qu’il avait indiqué 30 000 $ pour lui seul en 2016, il a augmenté son budget à 40 000 $ en 2017. Or, quand on examine la fréquence des voyages pendant la vie commune et depuis la rupture, ce budget est nettement sous-estimé.
[93] D’ailleurs, bien que R... soutienne qu’il voyage pour des soins de santé, il est tout de même allé à Dubaï et en Arabie Saoudite depuis la rupture des parties, et ce, sans compter ses déplacements en Belgique.
[94] En effet, en 2016 et 2017, sur une période de 22 mois, soit 669 jours, R... a été en déplacement à l’extérieur du pays au moins 390 jours, soit 58 % du temps, et ce, sans compter ses séjours en Belgique. Il a, entre-autres, effectué les voyages suivants :
Ø Trois voyages en République-Dominicaine;
Ø Deux en Espagne;
Ø Quatre en France;
Ø Cinq en Belgique;
Ø Un à Dubaï;
Ø Un en Floride;
Ø Arabie Saoudite.
[95] En 2016, S... et les enfants ont voyagé aux États-Unis et aux Caraïbes. En 2017, ils n’ont effectué qu’un seul voyage à Miami aux États-Unis. La famille était habituée à un tout autre train de vie.
[96] Le Tribunal estime que R... modifie les chiffres à sa guise, et ce, pour les besoins de sa cause. Les formulaires III de 2016 et 2017 en sont la preuve.
[97] Le Tribunal ne peut s’expliquer pourquoi entre le budget du 7 juillet 2016 et celui du 10 mai 2017, Monsieur change les chiffres de son formulaire III (ligne 45) relativement aux paiements de dettes et apports ou injections d’argent dans les compagnies. Entre 2016 et 2017, les injections d’argent sont passées de 2 M$ annuellement à 500 000 $ par année. Par contre, le paiement des dettes est passé de 94 700 $ en 2016 à 4 276 866 $ en 2017.
[98] Comment expliquer une telle fluctuation?
[99] Outre les ordonnances de sauvegarde prononcées par la soussignée les 15 juillet et 1er décembre 2016, condamnant R... à payer une pension alimentaire pour les enfants ainsi que certaines dépenses de [la résidence A] et l’approche de l’audience des mesures provisoires, il est difficile d’expliquer telle fluctuation.
[100] Par ailleurs, l’expert Hamelin se basant sur un tableau préparé par R...[33] et après contre-vérification des chiffres apparaissant à ce tableau avec les états financiers fournis par R..., conclut qu’entre le 31 décembre 2013 et le 31 décembre 2016, R... a récupéré des avances à l’actionnaire pour un montant de 7 M$.
[101] En effet, Hamelin confirme dans son témoignage que depuis 2013, R... a reçu 9 M$ de ses sociétés et a réinjecté 2 M$ en 2015.
[102] En 2016, R... n’a pas eu besoin d’injecter des fonds dans ses sociétés et a plutôt reçu 2 030 400 $[34].
[103] Ainsi, bien que R... soutienne que ses actifs ont diminué de 55 M$ en trois ans, la preuve n’est pas au même effet.
[104] D’ailleurs, le Tribunal note que suite à son interrogatoire hors cour du 16 février 2015 et selon des documents produits par lui[35], la valeur nette de son patrimoine était :
Ø au 31 mai 2014 : 88 581 158,36 $;
Ø au 30 juin 2014 : 88 358 989,16 $;
Ø au 31 octobre 2014 : soit deux mois et demi après l’introduction de l’instance, 83 448 444,73 $;
Ø au 31 janvier 2015 : 94 810 070 $;
Ø au 7 juillet 2016 : 37 618 739 $.
[105] Comment expliquer cette diminution de 57 191 331 $, entre janvier 2015 et juillet 2016, soit en 18 mois?
[106] Le 15 avril 2016, curieusement S... présente une demande pour mesures provisoires et ordonnance de sauvegarde, concernant les besoins alimentaires des enfants, ses besoins alimentaires pour elle-même ainsi qu’une demande de provision pour frais.
[107] Aussi, entre son Formulaire III du 10 mai 2017 et son actif-passif en date du 30 septembre 2017, la valeur nette de R... passe, de 36 656 834,28 $ à 32 124 513 $, soit une différence de 4 532 231,20 $ en quatre mois.
[108] En faisant le même exercice comparatif des déclarations de R... et en prenant les mêmes pièces, ses liquidités et placements étaient [36] :
Ø au 31 mai 2014 : 33 856 296,14 $;
Ø au 30 juin 2014 : 32 943 566,72 $;
Ø au 31 octobre 2014 : 28 242 641,55 $ (soit une différence de 4 700 925,20 $ - deux mois et demi après l’introduction de l’instance);
Ø au 31 janvier 2015 : 28 406 855 $;
Ø au 7 juillet 2016 : 10 433 455 $ (soit une différence de 17 973 400 $) depuis l’introduction de l’instance au mois d’août 2014);
Ø au 10 mai 2017 : 8 356 646 $;
Ø au 30 septembre 2017 : 5 593 755 $ (soit une diminution de 2 762 891 $) en quatre mois;
[109] On constate une diminution des liquidités et placements de 22 648 886,50 $ entre l’introduction de l’instance et le mois de septembre 2017. Le paiement des ordonnances de sauvegarde du 15 juillet et 1er décembre 2016 ne justifie pas un tel écart.
[110] Enfin, la comparaison des déclarations de R... relativement à ses dettes s’avère tout aussi questionnable puisqu’elles s’élevaient :
Ø au 31 mai 2014 : 5 914 361,23 $;
Ø au 31 octobre 2014 : 4 451 114,80 $;
Ø au 31 janvier 2015 : aucune dette n’est mentionnée;
Ø au 7 juillet 2016 : 20 319 715 $;
Ø au 30 septembre 2017 : 13 209 147 $.
[111] Pourquoi y a-t-il une augmentation de près de 15 M$ de dettes entre le 31 octobre 2014, soit deux mois après l’introduction de l’instance, et le 7 juillet 2016, soit quelques jours avant l’audience de l’ordonnance de sauvegarde?
[112] S... estime que le revenu de R... est d’au moins 5 M$ par année. Elle calcule ainsi l’attribution d’un revenu à un taux marginal de 5 % à ses actifs, soit un revenu d’investissements sur les liquidités et placements et un revenu locatif au même taux conservateur sur les propriétés, actifs qu’elle estime à 94 810 000 $ soit la déclaration de R... au 31 janvier 2015[37].
Ø Aveu
[113] Par ailleurs, le 6 août 2014, R... déclare à son fils A, avoir gagné 15 M$ CA au cours des trois dernières années. Cette conversation fut enregistrée, transcrite et produite à la Cour[38].
[114] S’agit-il d’un aveu?
[115] R... ne remet pas en question l’authenticité de l’enregistrement et reconnaît avoir fait la déclaration en question.
[116] Il soutient cependant que cette déclaration visait à améliorer l’estime que A pouvait avoir envers lui.
[117] Selon l’article 2850 C.c.Q., l’aveu est défini comme suit :
2850. L’aveu est la reconnaissance d’un fait de nature à produire des conséquences juridiques contre son auteur.
[118] Afin de constituer un aveu, une déclaration doit porter sur un fait et non sur une question de droit[39]. Elle doit aussi pouvoir entraîner des conséquences juridiques défavorables contre son auteur[40].
[119] La jurisprudence a établi depuis bien longtemps que l’aveu est un moyen de preuve par excellence[41]. En effet, il est considéré contre nature qu’un individu effectue une déclaration reconnaissant son tort ou l’incriminant lorsque cette déclaration est fausse[42].
[120] Afin d’être mis en preuve contre son auteur, l’aveu extrajudiciaire doit être allégué par l’autre partie[43]. Cette dernière pourra utiliser tous les moyens de preuve recevables afin de le prouver,
[121] À cet égard, l’article 2867 C.c.Q. prévoit ce qui suit :
2867. L’aveu, fait en dehors de l’instance où il est invoqué, se prouve par les moyens recevables pour prouver le fait qui en est l’objet.
[122] La valeur probante de l’aveu extrajudiciaire est laissée à l’appréciation du Tribunal[44].
[123] Le Tribunal a une large discrétion dans son analyse de l’appréciation de cette preuve. Une fois que l’aveu extrajudiciaire est mis en preuve, il bénéficie d’une présomption de vérité[45].
[124] Une preuve contraire peut cependant être amenée par l’auteur de la déclaration, sans qu’il ait besoin d’invoquer l’erreur de fait[46].
[125] L’auteur Jean-Claude Royer écrit ce qui suit à cet égard :
L'article 2852 C.c.Q. dispose expressément que la force probante de l'aveu extrajudiciaire est laissée à l'appréciation du tribunal. Aussi, un plaideur peut offrir une preuve contredisant son admission extrajudiciaire. Cette preuve est admise même si l'aveu n'est pas annulé. Ainsi, la partie qui a admis hors de cour un fait qu'elle savait être faux peut établir devant le tribunal la fausseté de son aveu. Le tribunal a discrétion pour choisir entre la version contenue dans l'aveu et la preuve soumise devant lui.[47]
[126] Ainsi, R... pouvait établir la fausseté de son aveu, même son propre témoignage[48]. Il devra cependant apporter une preuve ayant pour objectif d’affaiblir ou de contredire l’aveu qui lui est opposé[49].
[127] En effet, certaines décisions de la Cour d’appel ont établi qu’un aveu extrajudiciaire peut être révoqué lorsque la partie qui a fait la déclaration fournit des explications raisonnables de son faux aveu[50].
[128] Or, pour tous les motifs exprimés dans le présent jugement, le Tribunal estime que R... n’a pas réussi à établir une preuve contraire.
[129] À plusieurs reprises, R... a affirmé dans son témoignage que pendant la vie commune, il payait tout et que S... ne contribuait aucunement aux besoins de la famille.
Ø Vente d’immeubles
[130] R... se décrit comme un promoteur-constructeur, un professionnel de l’immobilier. Il dit disposer de ses actifs à tous les 15 à 30 ans. Il témoigne agir personnellement et financièrement pour ses 14 entreprises.
[131] R... ajoute qu’il vit de la disposition de ses actifs et qu’avec toutes ces procédures et le refus de Madame de collaborer à la vente des immeubles, il ne peut rien vendre. Pourtant, la preuve démontre qu’entre la date du mariage en 2004 et la date de la rupture en 2014, R... n’a vendu aucun immeuble personnellement ou par le biais de ses sociétés.
[132] Il témoigne aujourd’hui avoir donné mandat à son fils X de vendre tous les biens que ce dernier gère en Europe, car il craint la ruine au Canada.
[133] R... témoigne que c’est possible que X puisse mettre en vente des propriétés sans lui en parler. Nous y reviendrons.
[134] À cet égard, R... a fait entendre un de ses amis, Monsieur F... Ma..., lequel est administrateur délégué pour la [Compagnie B]. Cette société détient, entre autres, un immeuble sis au [adresse 4] à Bruxelles ainsi que divers emplacements de stationnement.
[135] Bien que R... ait témoigné avoir mis en vente cet immeuble, Monsieur Ma... le contredit dans son contre-interrogatoire affirmant que l’immeuble de la rue A n’était pas en vente et qu’il n’y avait eu, à sa connaissance, aucune évaluation immobilière de cette propriété.
[136] Or, R... a témoigné avoir mis en vente cet immeuble et obtenu une évaluation en date du 3 juillet 2013.
[137] Le Tribunal conclut que R... contrôle toutes ses sociétés sans nécessairement aviser ou consulter ses gérants ou administrateurs, y incluant son fils X qui a livré un témoignage flou et imprécis. Nous y reviendrons.
[138] S... soutient que depuis l’institution des procédures, R... tente de se départir de ses biens, tant personnels que corporatifs. Elle ajoute également qu’il a, depuis la rupture des parties, pris tous les moyens afin d’hypothéquer ou d’augmenter les dettes visant ainsi à réduire sa valeur nette.
[139] Le 2 octobre 2015, par le biais de sa compagnie, [la Compagnie A] dont il est actionnaire unique, R... a hypothéqué l’immeuble situé au [adresse 3] à Ville B pour un montant de 2 M$.
[140] Le 13 septembre 2016, [la Compagnie A] a vendu 75 % de l’immeuble du [adresse 3], à Ville B à un ami personnel de R.... Ce dernier est décédé le 10 mai 2017. S... a d’ailleurs intenté un recours en inopposabilité[51].
[141] [La Compagnie A] dont R... est l’unique actionnaire, a également vendu des terrains sur la rue B à Ville B pour la somme de 1,5 M$.
[142] La [Compagnie C] dont R... est le seul actionnaire, possède des bureaux d’affaires occupés par R... au [adresse 5] à Paris.
[143] Lors de son témoignage du 27 novembre 2017, R... annonçait à la Cour qu’il avait mis en vente, le [adresse 5] et avait reçu une offre de 3,1 M€ en date du 9 novembre 2017[52].
[144] Finalement, au cours du procès, R... a indiqué que l’offre d’achat avait avortée.
[145] En contre-interrogatoire, le procureur de S... demande à R... s’il avait déjà reçu dans le passé une offre d’achat à 4,5 M€ pour le [adresse 5]. R... répond d’abord que c’est possible, mais qu’il ne se souvient pas.
[146] Or, dans son interrogatoire hors cour du 16 février 2015, R... témoigne avoir refusé une offre à 4,5 M€ pour le [adresse 5].
[147] Lors de son témoignage du 1er décembre 2017, R... n’a aucun souvenir de cette offre. Dans son témoignage du 5 décembre en avant-midi, il se rappelle soudainement avoir reçu une offre variant entre 14 et 15 M€ pour le [adresse 5] ainsi que la résidence secondaire de la famille en Belgique au [adresse 2]. R... admettra finalement que cette offre avait été faite par son ex-épouse.
[148] R... témoigne pourtant verser à son ex-épouse, mère de X et Y, laquelle habite en Arabie Saoudite, 2 000 € par mois, somme qu’il qualifie de symbolique.
[149] Il ajoutera quelques minutes plus tard dans son témoignage avoir cessé de payer cette mensualité depuis trois mois puisqu’il se dit ruiné.
[150] Comment l’ex-épouse de R... peut-elle faire une offre pour acheter le [adresse 5] et la résidence de Belgique pour 14 M€, alors qu’elle reçoit un montant de 2 000 € par mois de R...? Poser la question, c’est y répondre.
[151] Par ailleurs, bien que R... témoigne avoir même cessé de verser l’allocation de 2 000 € par mois à son ex-épouse parce qu’il est ruiné, il a pourtant le 20 janvier 2017 fait cadeau de 30 000 € à M3…, son adjointe en Belgique, pour ses 25 ans de service[53].
[152] Le Tribunal ne croit pas R... lorsqu’il déclare vouloir liquider et vendre à la « casse », suivant sa propre expression, tous ses immeubles y incluant le [adresse 5] à Paris.
[153] Dans son interrogatoire du 16 février 2015[54], R... déclare que l’immeuble du [adresse 2] est un bien immobilier de très grand standing et qu’il vaut 10 M€ .
[154] Il a, à cette époque, une évaluation professionnelle datant du 3 juillet 2013 où la valeur de l’immeuble est estimée à 9 M€ .
[155] Or, il produit un bilan au 30 septembre 2017 où il évalue maintenant la résidence à 6 M€ . Pourtant, il reconnaît lui-même avoir mis 7,5 M€ en rénovations et améliorations. Encore une fois, R... joue avec les chiffres pour les besoins de sa cause.
Ø Sommes payées par R... à des corporations dont il n’est pas actionnaire ou à ses fils de son union précédente
[156] En 2008, la [Compagnie D] a acquis une propriété sise au [adresse 6] à Bruxelles. Cet immeuble était détenu à 50 % par les deux fils de l’union précédente de R... (X et Y) et 50 % au nom de S.... Il est admis que cette propriété avait été achetée afin que les quatre enfants (des deux unions de R...) soient tous copropriétaires à 25 %.
[157] Au moment où Z a atteint l’âge de 18 ans, S... a transféré sa part (50 %) dans une fiducie pour le bénéfice de ses deux enfants. R..., par le biais de X et Y a contesté[55] en Belgique cette fiducie en subventionnant le recours alors qu’il n’est pas actionnaire de la société. Bien que S... ait eu gain de cause, ce dossier a été porté en appel[56].
[158] En 2017, R... a transféré de ses comptes personnels à la [Compagnie D], société dont il n’est pas actionnaire, 65 000 €[57]. R... soutient qu’il est gérant de cette société et qu’il y a eu des infiltrations dans l’immeuble, c’est pourquoi il a transféré des sommes à cette société.
[159] R... témoigne louer à X et Y le [adresse 6] au montant de 93 000 € par année. Pourtant, cet immeuble appartient à 100 % à la [Compagnie D]. De plus, R... louerait également un second immeuble à ses deux fils sis au [adresse 7] à Lasne en Belgique, cette fois pour la somme de 24 000 €.
[160] Il semble que X habite les deux propriétés, soit celle sur [la rue C] et rue D.
[161] Ainsi, la [Compagnie D] reçoit des fonds par des apports de R..., alors que ce dernier n’est pas actionnaire de cette société, et en retour, les fils paient un loyer. Il est permis de se questionner si les fils paient réellement ce loyer. D’ailleurs, X n’a pas été en mesure de répondre, de quelle façon il payait le loyer à son père, ni à quelle fréquence.
Ø Témoignage de X
[162] X a témoigné par visioconférence et a livré un témoignage vague, imprécis et nébuleux.
[163] La preuve révèle qu’en 2013, R... a fait donation à X de 328 500 € . Ce dernier ne se rappelle pas de ce don, en un ou plusieurs versements[58].
[164] R... a créé pour ses deux fils, X et Y, la [Compagnie E]. Ces derniers sont actionnaires en parts égales.
[165] X ne sait pas ce que détient la [Compagnie E]. Il répond possiblement une maison à Chaumont-en-Vexin, en France, maison d’enfance donnée par son père.
[166] Lorsque contre-interrogé, à savoir si son père a transféré à [Compagnie E] 154 500 € entre 2014 et 2017, il répond qu’il sait que son père fait des avances au compte courant de la société et que cette dernière ne doit pas le rembourser.
[167] X reconnaît que son père paie ses cartes de crédit.
[168] X reconnaît avoir reçu de sa mère un versement de 60 000 € , il y a quelques mois pour ses dépenses quotidiennes.
[169] X soutient ne pas recevoir de salaire pour ses services de gérant dans les sociétés de son père. Parallèlement, il fait le commerce de vente de voitures de luxe.
[170] Il possède un entrepôt où quatre voitures de luxe lui appartiennent, dont une Dodge Challenger acquise en 2017 au coût de 45 000 $ US, une Dodge Viper 2017 achetée au prix de 139 000 $ US, une McLaren 2015 orange achetée en 2016, payée 190 000 € et enfin une Dodge Viper 2010.
[171] X fait ce commerce depuis trois ou quatre ans et aurait vendu huit voitures au total. Il témoigne que son père lui a toujours acheté des voitures d’occasion, et ce, dès 2006 où il a reçu sa première voiture en cadeau, alors qu’il avait 22 ans.
[172] En 2009, son père lui a offert une Dodge Viper 2001 au coût de 42 500 € . Plus tard, son père lui a acheté une Lamborghini jaune pour son commerce. Aujourd’hui, il a revendu cette voiture. Son père témoigne plutôt lui avoir acheté une Ferrari au coût de 100 000 $ US en 2011 ou 2012 pour l’aider à partir son commerce.
[173] X témoigne ne faire aucun profit de la vente de ces véhicules.
Ø Crédibilité de R...
[174] Il est en preuve que R... a quatre comptes bancaires à Dubaï et un en Suisse. Ces comptes n’ont pas été fournis à l’expert Hamelin.
[175] L’expert reconnaît que R... ne lui a remis aucun compte bancaire de Dubaï.
[176] Or, il a été démontré que R... a fait un retrait de 800 000 $ US au mois de mai 2016 dans un compte à Dubaï. L’expert ignorait cette transaction.
[177] Il s’agit d’un montant qui apparaît soudainement au compte de Dubaï, lequel est retiré au même moment que sa rentrée afin d’être transféré à un compte de R... en Europe[59]. Il s’agit d’un transfert d’un million de dollars canadiens que R... a caché au Tribunal et à l’expert.
[178] Combien de renseignements, informations ou transactions n’ont pas été fournis à l’expert ou à la partie adverse malgré les citations à comparaître et les nombreux avis de gestion?[60]
[179] R... se plaint d’avoir remis aux procureurs de S... des milliers de pages.
[180] R... a entaché sa crédibilité en cachant certaines informations ou en omettant de fournir certains comptes bancaires ou documents, d’autant plus, que ces informations étaient nécessaires pour la confection des rapports d’expert mandaté par le Tribunal.
[181] R... contrôle l’information qu’il veut bien divulguer. Ainsi, malgré l’ordonnance d’expertise ayant pour objectif d’éclairer le Tribunal, cet objectif n’a pu être atteint.
[182] On ne peut entièrement faire reproche à l’expert Hamelin de ne pas avoir été en mesure de quantifier le train de vie ou la valeur nette des parties puisqu’il n’a pas obtenu l’information complète pour le faire.
[183] L’expert Hamelin a cru en toute bonne foi qu’il avait en sa possession tous les documents lui permettant de procéder au mandat qui lui avait été demandé.
[184] R... témoigne que S... avait perdu la tête et dépensait sans compter. Il ajoute qu’il tentait depuis plusieurs années de la raisonner. Il remonte même au jour de ses 60 ans alors qu’il en a 71 aujourd’hui, pour déclarer que S... lui avait organisé une surprise pour son anniversaire et que le coût de la fête était 1 M€ . Aujourd’hui, il va même jusqu’à dire que tout était déjà orchestré à cette époque pour augmenter le train de vie du couple. Or, s’il avait voulu mettre fin à cette hémorragie financière, le Tribunal n’a aucun doute qu’il l’aurait fait.
[185] Le Tribunal a été à même de constater l’insolence de R... lors de son témoignage non seulement à l’égard de S..., mais également envers ses propres procureurs en leur sommant « posez-moi la bonne question ».
[186] R... menace de déposer un bilan général de toutes ses entreprises[61] selon ce qu’il adviendra à la suite du présent jugement.
[187] Il ajoute ne plus avoir les moyens d’assumer [la résidence A] et suggère de la vendre ou alors qu’elle soit vendue en justice.
[188] Bien que R... tente d’établir que S... a créé ce train de vie en prévision de la rupture, le Tribunal n’est pas de cet avis. R... est un homme de pouvoir et le Tribunal a été en mesure de le constater à plusieurs reprises, lorsque c’est non… c’est non.
[189] R... n’accepte pas la rupture, il se sent trahi. Il n’accepte surtout pas de donner de l’argent à S.... Il ne l’acceptera jamais. Il s’est même exclamé à la Cour « mais qu’est-ce que cette justice au Québec? »
[190] Or, au moment de l’ordonnance de sauvegarde du mois de juillet 2016, R... offrait une pension alimentaire de 1 581,90 $ par mois[62] pour ses enfants, alors que l’expert établit le train de vie des enfants à 219 000 $ par année, et ce, en excluant les frais d’orthodontie.
[191] Bien qu’il tente par tous les moyens de prouver que S... est en train de le ruiner, R... n’a pas payé de pension alimentaire depuis l’institution des procédures jusqu’à l’ordonnance de sauvegarde du 15 juillet 2016. Or, si la vie commune avait continué, il aurait payé toutes les dépenses de [la résidence A], des enfants et de S....
Ø Conclusions
[192] Considérant les avances, paiements et remboursements de dépenses auprès de X et Y, R... doit également subvenir aux besoins de sa deuxième famille.
[193] Si les parties ne s’étaient pas séparées, il est indéniable que S... aurait continué à dépenser et R... aurait payé.
[194] L’expert conclut que le train de vie des parties pendant la vie commune se situait entre 5 à 8 M$ annuellement. L’expert a également témoigné que pour établir le train de vie des parties, il s’est basé sur les formulaires III de chacune d’elles. L’expert ajoute avoir simplement exercé son jugement professionnel. Il a estimé le train de vie des parties à 4,7 M$ annuellement, ce qui lui semblait raisonnable. Mais il reconnaît d’emblée que le chiffre pourrait être plus élevé. La non-transparence de R... laisse planer un doute en sa défaveur.
[195] Hamelin a témoigné que le point de départ de ses expertises étaient les Formulaires III des parties. Pour lui, ce formulaire est assermenté et c’est à partir desdits formulaires qu’il a validé ces informations.
[196] Or, la preuve démontre que les chiffres de R... changent à chaque formulaire.
[197] Dans les circonstances, l’expert Hamelin a reconnu que si les informations incluent au Formulaire III sont trompeuses ou inexactes, cela peut changer la donne.
[198] C’est pourquoi le Tribunal n’a aucune hésitation à situer le train de vie des parties entre 5 à 8 M$ par année du temps de la vie commune.
[199] Le Tribunal ne croit pas R... et depuis la notification des mesures provisoires du 15 avril 2016, il tente de se soustraire à ses obligations.
[200] Pour tous ces motifs, le Tribunal estime que les revenus annuels de R... se situent entre 4 et 5 M$ par année. Par ailleurs, la conclusion du Tribunal ne serait pas différente même en écartant l’aveu de R....
c) Déterminer si à compter du 1er janvier 2016, les Tables fédérales trouvent application pour la pension alimentaire des enfants, en raison du lieu de résidence de R...
[201] S... réclame une pension alimentaire pour les deux enfants rétroactivement à la date de signification des procédures, soit au 15 août 2014.
[202] Elle demande l’application des tables provinciales pour les années 2014 et 2015 suivants les différents horaires de garde et d’ordonnances rendues dans le passé.
[203] À compter du 1er janvier 2016, elle requiert l’application des lignes directrices fédérales puisque, soutient-elle, R... réside à l’extérieur du Canada plus de 50 % de son temps.
[204] Elle plaide que la résidence principale de R... est en Europe et non pas au Canada et que tous les liens de rattachement principaux le ramènent en Europe.
[205] En effet, elle ajoute que depuis la rupture des parties, tout le suivi médical ainsi que les interventions chirurgicales qu’il a subies ont eu lieu en Belgique. Elle soutient qu’il est à Ville A uniquement pour la préparation des procès et des jours d’audience et dès que tout cela est terminé, il retourne en Belgique.
[206] La majorité de ces comptes bancaires sont en Belgique. R... ou ses sociétés possèdent plusieurs immeubles dans ce pays et en France.
[207] La preuve révèle que pour l’année 2016, R... a séjourné à l’extérieur du Canada pour une période de 220 jours et 170 jours en 2017.
[208] De son côté, R... soutient que son lieu de résidence habituel est au Québec et qu’il habite au [adresse 3], à Ville B. Il ajoute qu’il détient des comptes bancaires ici, qu’il a une voiture immatriculée au Québec et un permis de conduire au Québec. Enfin, il a fondé des entreprises ici, avec lesquelles il transige.
[209] Il a produit une déclaration de revenus à titre de non-résident en Belgique en 2014 et produit ses déclarations de revenus au Québec depuis 2015.
[210] R... soutient que seuls ses problèmes de santé l’on forcé à se rendre en Belgique pour son hospitalisation.
[211] Il est bien connu que le fait qu’une personne soit temporairement absente ne fait pas en sorte qu’elle cesse de vivre à un endroit donné.
[212] La jurisprudence a déterminé que la résidence habituelle d’une personne est l’endroit où elle vit régulièrement, normalement, ordinairement.
[213] La résidence habituelle n’est donc pas un simple lieu de passage. Par ailleurs, une personne ne cesse pas de « résider habituellement » à un endroit du seul fait qu’elle en est temporairement absente, par exemple lorsqu’elle est en voyage. »[63]
[214] Bien que R... se considère davantage citoyen belge que citoyen canadien, il est prématuré à cette étape du dossier, de conclure qu’il n’a pas sa résidence habituelle au Québec. Il est indéniable que R... retournera vivre définitivement en Belgique dès que les procédures seront terminées, mais pour le moment, le Tribunal ne peut faire droit à l’argument de S... quant à l’application des lignes directrices fédérales.
[215] Dans les circonstances, le Tribunal calculera la pension alimentaire en fonction des Tables provinciales, et ce, rétroactivement au 15 août 2014 en tenant compte du temps de garde exercé par les parties et des revenus respectifs des parties[64]. Aussi, le partage du temps de garde est admis.
1. Du 15 août 2014 au 20 septembre 2014, garde exclusive des deux enfants à la mère : une pension alimentaire mensuelle de 19 554,88$;
2. Du 21 septembre 2014 au 19 décembre 2014, un enfant en garde partagé et un enfant en garde exclusive à la mère : une pension alimentaire mensuelle de 14 495,88$;
3. Du 20 décembre 2014 au 31 décembre 2014, garde partagée pour les deux enfants : une pension alimentaire mensuelle de 9 436,88$;
4. Du 1er janvier 2015 au 11 avril 2015, garde partagée : une pension alimentaire mensuelle de 9 049,09$;
5. Du 12 avril 2015 au 31 décembre 2015, un enfant en garde partagée et un enfant en garde exclusive avec la mère : une pension alimentaire de 14 287,50$;
6. Du 1er janvier 2016 au 27 janvier 2016, un enfant en garde partagée et un enfant en garde exclusive à la mère : une pension alimentaire de 14 553,06$;
7. Du 27 janvier 2016 au 31 décembre 2016, deux enfants en garde exclusive avec la mère : une pension alimentaire de 19 566,63$;
8. Du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2017, deux enfants en garde exclusive avec la mère : une pension alimentaire de 19 576,39$;
9. À compter du 1er janvier 2018, deux enfants en garde exclusive avec la mère : une pension alimentaire de 19 591,23$.
Ø Frais de scolarité pour l’enfant A / Réouverture d’enquête
[216] Suite à un changement d’école de A, R... a demandé une réouverture d’enquête.
[217] Le 14 février 2018, le Tribunal a entendu les parties pour de courtes représentations sur le sujet.
[218] Jusqu’à l’automne 2017, A a fréquenté le « [école A] », à Ville C, lequel représentait un coût annuel d’environ 21 500 $, dont R... assumait les frais[65].
[219] Suite à certains problèmes, S... a retiré A de cette institution et ce dernier a été inscrit pour quelques semaines à une école publique de Ville B.
[220] Pendant la période des Fêtes 2017-2018, sans consulter R..., S... a inscrit A à un collège privé à Halifax en Nouvelle-Écosse[66].
[221] A est donc pensionnaire depuis janvier 2018.
[222] R... demande au Tribunal de faire assumer la totalité de la dépense à S... puisqu’il n’a pas été consulté.
[223] Par le passé, la garde a longuement été l’objet d’un litige avant qu’un consentement n’intervienne, puisque R... demandait lui-même à ce que A soit placé en pensionnat, et ce, suite à la recommandation d’un psychologue désigné par le Tribunal.
[224] Bien que S... n’ait pas consulté R... à cet égard, le Tribunal ne peut faire droit à la demande de ce dernier.
[225] Il ne s’agit pas d’un cas où les parties n’en n’ont pas les moyens.
[226] R... devra payer le coût du programme académique annuel de 41 750 $. Le Tribunal réitère que depuis longtemps le pensionnat était le vœu de R....
[227] Par ailleurs, R... demande de tenir compte dans l’établissement de la pension alimentaire que A passera la majorité de son temps à l’extérieur du Québec et ainsi réduire la pension alimentaire en conséquence.
[228] La pension alimentaire englobe la prise en charge de neuf besoins de base, soit nourriture, logement, communication, habillement, transport, loisirs, ameublements, soins personnels et entretien ménager.
[229] L’éloignement de l’enfant A, n’a pas d’effet direct sur les dépenses de logement, communication, habillement, ameublement et soins personnels de l’enfant.
[230] Cependant, les loisirs et les dépenses de nourriture sont certainement moindres.
[231] Par ailleurs, il est en preuve que R... ne voit plus Z depuis plus de trois ans et A, depuis plus de deux ans.
[232] S... ne demande pas la majoration de la pension alimentaire à raison de 20 % pour non-exercice des droits d’accès.
[233] Le Tribunal ne réduira pas la pension alimentaire, laquelle comblera les frais de transport entre la Nouvelle-Écosse et Ville A.
Ø Demande de somme globale pour l’enfant Z
Ø Véhicule automobile
[234] S... demande une somme globale de 90 000 $ afin de pouvoir faire l’acquisition d’une voiture pour l’enfant, Z. Cette dernière aurait obtenu son permis de conduire le 5 novembre 2014 et son père lui aurait promis l’achat d’une Range Rover Evoque.
[235] S... soutient que les fils aînés de R..., issus de sa première union, ont reçu des voitures en cadeau de leur père dès qu’ils ont eu l’âge de conduire. R... leur aurait acheté des véhicules extrêmement luxueux.
[236] Le Tribunal fera droit à cette demande en partie et fixera un budget de 40 000 $ pour l’achat d’une première voiture.
Ø Intervention chirurgicale de Z
[237] S... demande également le paiement d’une somme de 180 000 $ représentant le coût d’une intervention chirurgicale afin de retirer et de camoufler plusieurs cicatrices présentes sur l’abdomen de Z, une au genou et deux au bras ainsi que certaines marques au visage liées à la varicelle.
[238] Le Tribunal n’a aucune preuve documentaire des coûts reliés à cette intervention.
[239] De son côté, R... soutient que dans la mesure où on lui fournit la preuve documentaire de la nécessité de cette intervention, il n’a aucun problème à acquitter les coûts.
[240] Le Tribunal rendra une ordonnance, en ce sens.
[241] Outre les frais reliés aux dépenses courantes de la résidence familiale, S... réclame une pension alimentaire pour elle-même de 150 000 $ par mois, soit 1,8 M$ annuellement, rétroactivement au 15 août 2014.
[242] R... plaide que la demande alimentaire de S... est irrecevable puisque sa demande alimentaire pour elle-même n’est pas chiffrée.
[243] Il est vrai que la demande de S... pour mesures provisoires du 15 avril 2016 n’est pas chiffrée, mais plusieurs demandes financières détaillées sont indiquées dans les conclusions de la procédure.
[244] Or, dès la demande introductive de divorce du 15 août 2014, S... réclame une pension alimentaire pour enfants et demande de réserver ses droits quant à une pension alimentaire pour elle-même à titre intérimaire et provisoire.
[245] Par la suite, dans une procédure amendée du 21 octobre 2014, S... réclame une pension alimentaire de 200 000 $ par mois pour elle-même, une provision pour frais de 2 M$, une somme globale de 20 M$ à parfaire ainsi qu’une demande de prestation compensatoire de 50 M$.
[246] S... a produit des milliers de pages de factures et de pièces justificatives afin de justifier son train de vie[67].
[247] Contrairement à ce qu’allèguent les procureurs de R..., le Tribunal ne peut conclure qu’aucun quantum n’est réclamé et qu’aucune preuve des besoins alimentaires n’a été administrée. Il est vrai que ce n’est que le 13 décembre 2017, au moment de l’argumentation, que le Tribunal et la partie adverse apprenaient que la pension alimentaire requise de S... était passée de 200 000 $ à 150 000 $ par mois.
[248] Cependant, le Tribunal ne peut rejeter la procédure de S... pour ces motifs et d’ailleurs, aucune demande en rejet ou en précision n’a été présentée avant l’audition des mesures provisoires.
Ø Formulaire III
[249] S... a préparé deux formulaires III, l’un du 27 juin 2016 et un second du 1er mai 2017. Dans celui du 27 juin 2016, S... estime que les dépenses annuelles récurrentes requises, pour maintenir le même train de vie qu’à l’époque de la vie commune, représentent 9 376 152 $.
[250] Dans sa demande pour mesures provisoires du 15 avril 2016, S... évalue alors le train de vie annuel de la famille à 5,9 M$ CA.
[251] À son budget du 1er mai 2017, S... calcule les dépenses encourues pour la période du 15 août 2014 au 15 août 2015, incluant les dépenses des enfants, à 2 812 957 $.
[252] Pour la période du 16 août 2015 au 31 août 2016, les dépenses de S... et des deux enfants s’élèvent à 2 033 383,49 $.
[253] Pour la période du 1er septembre 2016 au 31 mars 2017, les besoins de S... et des enfants s’élèvent à la somme de 1 113 712 $.
[254] Ses budgets incluent des dépenses d’immeubles et de logements pour les propriétés louées avant que la soussignée l’autorise à réintégrer le domicile familial le 1er décembre 2016. Or, ces dépenses de location sont réclamées dans des conclusions distinctes. Nous y reviendrons.
[255] Si le Tribunal soustrait de son budget du 1er mai 2017, les dépenses des enfants et certaines coupures appliquées par la soussignée, ses besoins annuels s’établissent à 1 073 801 $[68].
[256] Ce résultat de 1 073 801 $ inclut, un budget de vacances pour les enfants ainsi qu’une réclamation de loyer, [adresse 8], auquel un montant doit être soustrait, tant pour les vacances que pour le logement puisque la pension alimentaire pour enfants en tient compte.
[257] Cela sans compter certaines autres dépenses que S... devra réduire. Le Tribunal précise ici que bien que S... ait des comptables et employés qui s’occupent de ses dépenses et de sa conciliation financière, elle devra regarder les chiffres de plus près puisque lors de son interrogatoire, elle a eu de la difficulté à répondre et doit s’en remettre aux chiffres et formulaires préparés par les comptables, lesquels ont tout simplement additionné les dépenses, lesquelles ne se retrouvent pas toujours au bon poste.
[258] Bref, S... devra gérer de plus près ses dépenses personnelles.
[259] Ainsi, les dépenses personnelles de R... et de S... sont pratiquement identiques. Bien entendu, le budget de R... inclut une dépense annuelle se situant entre 170 000 $ à 195 000 $ par année représentant les dépenses récurrentes de [la résidence A].
[260] R... a toujours acquitté les dépenses de S... et des enfants.
[261] Bien qu’il ait été généreux avec S... suite à la vente de son centre commercial, cette dernière n’a pas à épuiser tous ses capitaux.
[262] La preuve révèle[69] que R... a donné à ses fils entre 2004 et 2013, en donations et paiements 5 861 496 $ CA à X et 2 152 271 $ CA à Y. Les procureurs de R... plaident que pour la même période, il a donné en bijoux, vêtements et donations en numéraires ou immeubles, 59 127 396 $ canadiens à S....
[263] Or, avec les coûts engendrés pour les procédures des deux côtés de l’Atlantique, S... produit un bilan en date du 18 septembre 2017, démontrant que ses actifs totalisent aujourd’hui 15 247 158 $ et que ses passifs sont de l’ordre de 35 149 749 $ lui laissant une valeur nette déficitaire de 19 902 591 $.
[264] Lorsqu’on additionne les honoraires professionnels engendrés et payés par les parties pour ce litige, la famille s’appauvrit dangereusement. Si les parties ne réalisent pas le gouffre dans lequel elles s’enfoncent, ce n’est pas faute par le Tribunal de les avoir mises en garde.
[265] Outre la pension alimentaire payable pour les enfants, et les dépenses annuelles de [la résidence A] que R... estime à 170 000 $, mais qui représente 191 686 $ à son budget du 10 mai 2017, qu’il devra continuer d’assumer, le Tribunal fixera la pension alimentaire payable pour S... personnellement à 75 000 $ par mois, représentant 900 000 $ par année.
[266] Bien entendu, S... devra payer l’impôt sur cette somme, tout en réduisant certaines dépenses, telles, location de jet privé, paiement de vacances ou voyages pour des amis. Elle devra également, puisque le procès est terminé, réduire certaines charges salariales. Elle n’aura plus les frais de sécurité Garda et les honoraires professionnels des avocats devraient diminuer drastiquement.
[267] Les dépenses annuelles de S... ont diminuées depuis 2014. Bien que les parties ont connu un niveau de vie luxueux, alors qu’elles habitaient ensemble, le Tribunal estime qu’avec une pension alimentaire de 900 000 $ annuellement, les dépenses récurrentes de [la résidence A] étant assumées par R..., S... pourra vivre plus que décemment.
[268] Le Tribunal précise ici que S... devra transmettre à R... seulement les factures relatives aux frais autorisés dans les conclusions du présent jugement et non toutes factures réclamées pour des postes non autorisés, comme elle l’a fait dans le passé.
[269] Compte tenu de la rétroactivité de la pension alimentaire, laquelle sera accordée, le Tribunal ne fera pas droit aux remboursements des dépenses réclamées par S... depuis août 2014.
e) Évaluer les dépenses effectuées par S... depuis l’introduction de l’instance dont elle demande le remboursement
[270] S... réclame ces dépenses puisqu’elle reproche à R..., qui par son comportement, l’a empêchée ainsi que les enfants de résider à [la résidence A], alors qu’il avait à sa disposition une prestigieuse résidence secondaire au [adresse 3], à Ville B.
Ø Logement à l’hôtel du 12 août 2014 jusqu’au mois d’octobre 2014
[271] S... soutient qu’à son retour au Québec avec les deux enfants, le 12 août 2014, R... lui a interdit l’accès à [la résidence A] de Ville B. Elle a donc habité à l’hôtel jusqu’au moment où elle a loué une première maison de transition.
[272] Elle a d’abord habité une semaine au Ritz-Carlton au coût de 52 843,27 $ et ensuite à l’hôtel St-James pour un total de 258 290,61 $[70].
[273] Tel que déjà mentionné, la pension alimentaire accordée à S... sera rétroactive à l’institution des procédures, ainsi ce remboursement distinct n’est pas accordé, puisque cette dépense est déjà incluse au budget.
Ø Loyer et frais d’installation - [adresse 9] - Ville B
[274] Par la suite, et ce, du mois d’octobre 2014 au mois de juillet 2015, S... a loué une maison de transition située au [adresse 9] à Ville B.
[275] Elle soutient avoir dû meubler rapidement cette résidence. La totalité des dépenses engendrées pour la location et l’aménagement de cette résidence transitoire s’évaluent à 186 825,47 $.
[276] Pour les mêmes motifs, cette réclamation ne sera pas accordée.
Ø Remboursement de loyers et installation - [adresse 8] - Ville B
[277] S... réclame également le remboursement d’une somme de 200 227,71 $ pour les coûts reliés à la résidence située au [adresse 8], à Ville B, qu’elle a louée à compter de juillet 2015.
[278] Pour les mêmes motifs, cette réclamation ne sera pas accordée.
Ø Remboursement de frais de psychologue pour la mère
[279] S... réclame le remboursement de 114 774,61 $ représentant ses frais de thérapie pour elle-même.
[280] La pension alimentaire étant rétroactive et cette dépense étant prévue au budget, cette réclamation distincte ne sera pas accordée.
Ø Droit d’usage des bijoux identifiés comme étant aux coffrets de la RBC
[281] À l’étape des mesures provisoires, le Tribunal n’a pas à statuer sur la propriété des bijoux, mais seulement sur l’usage de ces objets.
[282] S... a appelé comme témoin, Madame L... S... laquelle a travaillé de septembre 2009 à avril 2013 pour [la maison A], maison de joaillerie de luxe.
[283] Madame S... a rencontré pour la première fois, R... et S... à Londres. Elle les a revus par la suite en Belgique, à nouveau à Londres et à Dubaï.
[284] Elle a témoigné de façon très crédible que S... était devenue une ambassadrice pour [la maison A] et qu’elle dessinait même des bijoux pour cette maison.
[285] C’est toujours Madame S... qui apportait les bijoux à S... au moment des livraisons pour les années où elle a travaillé pour cette maison.
[286] De son côté, R... a appelé un témoin, Monsieur Ph... M..., lequel a dirigé la maison A au Moyen-Orient. Il est venu témoigner que c’est R... qui prenait la décision des achats et que c’était important pour lui d’avoir des produits de haute qualité puisqu’il faisait ses achats aux fins d’investissements.
[287] Quant à une montre portée par Madame sur lesdites photos, il déclare qu’il s’agit d’un objet de collection, pièce rare et que ce n’est normalement pas portée par une femme.
[288] S... demande l’usage des 17 bijoux demeurés au coffret de la RBC à Montréal.
[289] R... en réclame également l’usage et se dit propriétaire de tous ces bijoux.
[290] Or, S... produit plusieurs photos pendant la vie commune démontrant qu’elle portait lesdits bijoux[71].
[291] Le Tribunal réitère qu’à l’étape des mesures provisoires, la propriété n’est pas en cause. S... aura l’usage desdits bijoux, laissant au juge du fond la question de la propriété.
[292] Une ordonnance sera prononcée interdisant à Madame de se départir desdits bijoux.
f) Déterminer le droit à la provision pour frais et le montant s’il y a lieu
Ø Provision pour frais
[293] S... réclame une provision pour frais ventilée comme suit :
Remboursement des frais de services de sécurité au Canada (Garda) :
|
1 038 362,25 $
|
Remboursement des frais de services de gardiennage Belgique :
|
967 930,14 $
|
Remboursement des montants versés par l’épouse au séquestre Sorel :
|
209 145,11 $
|
Remboursement des frais légaux encourus pour les procédures au Canada Ø Divers procureurs canadiens :
|
6 654 487,34 $
|
Remboursement des frais légaux encourus pour les procédures en Belgique
|
798 129,67 $
|
Remboursement de frais de professionnels liés à l’instance :
Ø Marie-Josée Mercier : Ø MNP Comptables : Ø Comptables Désormeaux Patenaude
|
760 $ 36 820,74 $ 172 415,34 $ |
Remboursement des frais liés à l’expertise de Monsieur Hamelin (Demers Beaulne) Remboursement des frais payés (10 décembre) :
Ø Ordonner au mari d’assumer l’entièreté des factures de Monsieur Hamelin (à venir)
|
160 297,97 $
|
Frais futurs Ø Provision pour frais : |
3 000 000 $ |
[294] Depuis l’institution des procédures au mois d’août 2014, il y a eu neuf journées et demie d’interrogatoires hors cour, 80 journées d’audition et pas moins de 47 ordonnances et jugements.
[295] La Cour d’appel[72] a synthétisé les critères d’analyse applicables en matière de provision pour frais :
i) la nécessité pour le créancier de l’attribution de la provision pour frais;
ii) les besoins et les moyens de la partie qui la requiert;
iii) les ressources du débiteur, du créancier et leur disparité;
iv) la nature, la complexité et l’importance du litige;
v) la protection des droits des enfants ou une demande de nature alimentaire;
vi) le comportement respectif des parties.
[296] Il est admis que la provision pour frais à un caractère alimentaire et a pour but de permettre à une partie qui n’en a pas les moyens de faire valoir ses droits. Le requérant n’a toutefois pas à prouver qu’il est sans aucune ressource pécuniaire[73]. Les demandes de provision pour frais sont plus fréquemment admises quand le réclamant agit pour et au nom des enfants[74].
[297] L’auteur Me Michel Tétreault écrit ce qui suit quant au dernier critère, soit celui du comportement respectif des parties, voulant que cela comprend notamment :
Le fait de ne pas se prévaloir du recours à la médiation sans motifs raisonnables, où il aurait pu y avoir tentative de règlement;
Le fait de ne pas reconnaître ou l'entêtement à ne pas reconnaître la justesse de la position de l'autre partie ;
Le fait de faire preuve
d'intransigeance ou de ne pas donner suite à une invitation de discuter du
litige pour tenter de le solutionner ;
La multiplication de procédures ou
de demandes non fondées de la part de la partie adverse ;
Le défaut de fournir de
l'information tels les revenus tirés d'un second emploi ou de la mauvaise foi[75].
[298] Comme l’énonce Me Jocelyn Verdon dans le Grand Collectif[76], à propos de l’article 416 C.p.c. :
Les termes « si les circonstances le justifient » du nouvel article 416 traitant de la provision pour frais permettent à une partie de réclamer une provision pour frais pour les frais ainsi occasionnés. En effet, tout manquement à l'obligation de produire les documents va à l'encontre de la réforme du nouveau Code de procédure civile axée sur la déjudiciarisation et la collaboration. Le manquement de produire des documents entraîne souvent des délais et des démarches additionnelles pour le parent qui réclame une pension. Conformément au désir du législateur, ce parent n'a pas à assumer ces coûts.
[Le Tribunal souligne]
[299] Une provision pour frais peut être accordée même si la partie qui la demande n’est pas sans ressources[77].
[300] Très récemment, l’Honorable André Wery, J.C.S.,[78] a rendu une ordonnance au stade intérimaire pour le versement d’une provision pour frais de 475 000 $, afin de permettre à l’épouse de ramener ses actifs nets à un niveau plus ou moins équivalent de celui d’avant les procédures et de pouvoir cheminer dans la mise en état de son dossier sans avoir à entamer de nouveaux actifs. Après avoir réitéré les six critères pour l’octroi d’une provision pour frais, le juge Wery énonce :
181. Par conséquent, l'«écart entre les moyens des parties» jouera un rôle prépondérant dans l'étude de l'opportunité d'accorder une telle provision, et ce, même si les moyens de la partie qui la demande sont importants. C'est ainsi que les juges qui refusèrent d'accorder une provision pour frais parce que la partie qui la demandait jouissait de moyens financiers importants se firent rappeler par la Cour d'appel qu'une partie «n'a pas à s'appauvrir pour faire valoir les droits alimentaires des enfants des parties». Une partie n'a pas non plus à s'endetter pour faire valoir ses droits de nature alimentaire. La Cour d'appel est limpide à ce sujet :
[…] le créancier alimentaire n'a pas à liquider ses actifs ni à s'endetter pour faire valoir ses droits lorsque la loi lui donne le droit de demander une provision pour frais à son débiteur et que ce dernier en a les moyens.
[Le Tribunal souligne]
[301] En ce qui concerne le comportement des parties comme critère de l’octroi de la provision pour frais, il faut noter, suivant une analyse de la jurisprudence, que la Cour ordonnera une provision pour frais dans le cas où la partie requérante a dû entreprendre de nombreuses démarches et procédures afin de faire respecter les jugements et ordonnances de la Cour en raison du refus de collaborer de l’autre partie[79], lorsque la partie requérante a dû mener une lutte pour obtenir la preuve des actifs de l’autre partie et du fait que cette autre partie a liquidé et diverti ses actifs[80] et lorsque l’autre partie est de mauvaise foi[81].
[302] Le juge Wery dans l’affaire précitée, rappelle un principe énoncé par la Cour d’appel :
« Notre cour refuse généralement d’accorder une provision pour frais lorsque les frais juridiques sont dus à l’attitude de la partie requérante. La multiplication des coûts inutiles, l’insistance à poursuivre un débat ruineux et le refus de prendre les moyens appropriés pour solutionner le litige sont autant de comportements qui doivent être combattus. »[82]
[303] Dans la présente affaire, et ce, dès le 20 août 2015, R... a rappelé par écrit à ses procureurs son interdiction formelle à ce que prenne place toute forme de négociation avec la partie adverse[83].
[304] R... a adopté la ligne dure non pas seulement envers S..., mais également envers les enfants qui n’ont pourtant rien à voir dans ce conflit d’ordre financier.
[305] Suite à la demande d’ordonnance de sauvegarde présentée par S... en avril 2016, R... a offert de payer à titre alimentaire pour ses enfants la somme de 1 581,90 $ par mois[84]. Or, l’expert Hamelin évalue le train de vie des enfants à 219 000 $ par année[85]. R... étant le seul payeur de la famille depuis toujours, il est mieux placé que quiconque pour savoir que cette offre était non seulement dérisoire, mais de pure mauvaise foi.
[306] Ainsi, S... n’a eu d’autre choix que d’utiliser son capital afin d’assumer ses frais légaux ne serait-ce que pour obtenir une pension alimentaire décente pour les enfants.
[307] Également, pendant les procédures, R... a forcé S... à rembourser une partie d’un prêt hypothécaire de 2 M€ auprès de la banque ABN-AMRO[86], ce qu’il n’avait jamais demandé auparavant.
[308] Par ailleurs, la preuve est nébuleuse quant à savoir, lequel de R... ou de S..., a retenu les services de l’entrepreneur-électricien, Serge Théorêt, pour poser des réverbères et lampadaires sur le chemin menant à [la résidence A]. R... soutient qu’il n’a jamais consenti à cette dépense.
[309] Or, la facture s’élevait à 200 000 $ et suite à la rupture des parties, R... a refusé de payer, alors qu’il a payé tous les autres sous-traitants[87].
[310] Devant les procédures imminentes et devant la menace de l’entrepreneur de l’enregistrement d’une hypothèque légale sur [la résidence A], R... lui a prêté 100 000 $ sans intérêt afin qu’il poursuive S.... Il a choisi de lui avancer cette somme plutôt que d’acquitter la facture.
[311] Également, R..., gérant de la [Compagnie D] ne détenant aucune part dans cette société a avancé des fonds afin qu’elle poursuive S... et qu’elle soit forcée de transférer ses parts aux fils aînés de R..., et ce, faisant, dépouiller les enfants, Z et A[88]. La société a été déboutée et le transfert confirmé par un Tribunal belge. Cette décision a été portée en appel par la société dans laquelle, le Tribunal le rappelle, R... ne détient aucune part.
[312] Dans une autre affaire en Belgique, R... a fait une intervention volontaire de façon à soutenir le séquestre et demander à S... de payer la moitié des frais de gardiennage de la résidence secondaire de Lasne en Belgique, et ce, alors qu’elle avait indiqué son désaccord quant à ses frais.
[313] Le 16 février 2016, les demandes de R... ont été jugées irrecevables par le Tribunal belge[89].
[314] Le 10 mai 2016, la soussignée est nommée pour gérer le présent dossier. Le Tribunal est donc à même de constater la difficulté pour R... à respecter les ordonnances de la Cour, forçant S... à obtenir d’autres ordonnances pour faciliter l’exécution du jugement du 1er décembre 2016, entre autres, pour qu’elle puisse récupérer son dressing de Belgique.
[315] Après plusieurs conférences téléphoniques, vacations à la Cour, ordonnances de gestion, obstacles ou embûches posés par R..., S... n’a reçu son dressing qu’au mois de juillet 2017, soit huit mois après le prononcé du jugement.
[316] Par ces agissements, R... a empêché S... d’avoir accès à ses effets personnels.
[317] L’obstruction systématique à l’exécution du jugement du 1er décembre 2016 a entraîné des frais légaux importants pour S..., laquelle a dû puiser dans son capital, aujourd’hui, sévèrement entamé.
[318] R... a fait défaut de fournir certains relevés bancaires à l’expert et fait défaut de fournir ses relevés bancaires aux procureures de S..., malgré l’ordonnance du 21 juin 2017 qui prévoyait qu’il devait les fournir le 26 juillet 2017 ou au plus tard le 21 août 2017.
[319] Ce n’est qu’à l’automne 2017, quelques jours avant l’audition que R... a transmis ses relevés bancaires tout en omettant certains relevés toujours manquant au moment de l’audience.
[320] R... soutient qu’il a fait des copies de plusieurs milliers de pages. Cependant, le Tribunal constate de nouveau et réitère qu’il a contrôlé l’information. La transparence ne se détermine pas en termes de nombre de copies. La mauvaise foi crève les yeux afin d’épuiser S... en multipliant les démarches judiciaires.
Ø Honoraires de l’expert Hamelin
[321] D’une part, R... n’a pas fourni tous les renseignements à l’expert de sorte que les conclusions des rapports sont plus ou moins exactes. D’autre part, l’expert Hamelin témoigne qu’on ne peut tirer aucune inférence des conclusions du rapport du 26 mai 2017 et que le rapport du 10 novembre le remplace.
[322] Au départ, cela devait être un simple complément d’expertise. S... a fourni les documents requis pour le 28 mars 2017, mais de son côté, R... a envoyé des documents jusqu’au 2 mai 2017[90].
[323] Le coût des trois rapports est de 320 595,93 $ incluant les taxes. Le dernier rapport a coûté 102 275,14 $ incluant les taxes.
[324] S... demande le remboursement de la moitié des frais qu’elle a payés, soit 160 297,87 $.
[325] Le Tribunal fera assumer le dernier rapport d’expert par R..., nécessité par sa faute. Ainsi, il devra rembourser à S... la moitié de 102 275,14 $, soit 51 137,57 $ représentant la part que cette dernière a payée.
Ø Garda
[326] S... demande le remboursement de la somme de 1 038 362,25 $ représentant les frais de sécurité payés au Québec à la compagnie Garda.
[327] Il est en preuve que pendant la période de garde partagée des enfants de type Nesting, R... déménageait de [la résidence A] à son bureau au [adresse 3], tous les véhicules afin d’en priver S... et les enfants lors de la semaine de garde de S...[91].
[328] Bien qu’une certaine surveillance aurait pu être nécessaire, elle ne l’était pas de l’ampleur des services requis par S....
[329] En ce qui concerne les frais de Garda, certains rapports démontrent l’exagération des services retenus par S....
[330] L’analyse des rapports transmis montre que le mandat donné par S... à Garda était à certains égards abusif, inutile et déraisonnable. Notamment pour les motifs suivants :
a) S... a affirmé que le mandat de Garda était lié uniquement aux biens. À compter du 20 septembre 2014, les rapports quotidiens débutent par : « Depuis le samedi 20 septembre 2014 à 17h00, le mandat de GardaWorld est d’assurer la protection de Madame S… et de sa famille […] Un contrôle des allées et venues et des patrouilles pour sécuriser les voies d’accès menant aux propriétés est sous la responsabilité de Garda World » (à titre d’exemples, voir page 771, 773, 775, 777, 781, 783, 785, etc.).
b) La lecture des rapports confirme que « des caméras de sécurité [ont été] placées à des endroits stratégiques autour de la résidence du [adresse 9] » (page 773). Or, il s’agit de la résidence de S...; celle-ci ne peut prétendre que cela vise à protéger les biens dont elle craindrait supposément la disparition.
c) La lecture des rapports montre que les ressources de Garda sont également mises à profit pour différentes initiatives sans lien avec la prétendue sécurité de S.... À titre d’exemples : pour des appels à Hydro Québec lors d’une panne d’électricité (MPR-158, milieu de la p. 796); pour pourchasser « l’oie rebelle » sur le terrain de [la résidence A] (p. 789, 792) laquelle « refuse encore et toujours de se faire capturer » (p. 788). Voici un autre extrait des rapports pour lesquels S... réclame plus de 2 millions: « Il est alors intercepter (sic) derrière un sapin il est en dessous de la balançoire de métal (…). Il se préparait à uriner. Ce dernier fut identifier (sic) […]. Il n’a pas eu le temps de terminer et remet son brin d’amour dans sa culotte. Il fut escorter (sic) à sa voiture » (p. 546).
[331] De façon discrétionnaire, le Tribunal réduira le montant accordé pour Garda à 250 000 $.
Ø Service de gardiennage en Belgique
[332] Quant au remboursement des frais de service de gardiennage en Belgique et à celui des honoraires versés au séquestre Sorel ainsi que les frais légaux encourus par les procédures en Belgique, le Tribunal ne croit pas opportun de se prononcer puisque ces frais ont été engendrés pour les procédures entreprises devant le Tribunal belge. S... pourra faire valoir ses droits quant aux frais payés par elle devant le forum approprié.
Ø Remboursement pour les frais légaux pour les procédures au Canada
[333] À ce chapitre, S... réclame 6 654 487,34$.
[334] L’ampleur des honoraires de S... rend impossible la revue exhaustive des sommes réclamées.
[335] Au surplus, S... réclame des honoraires encourus pour des causes sans lien avec le divorce.
[336] En effet, en scrutant les factures, on constate par exemple, des services rendus pour « Constitution de fiducie », « Projet immobilier A », « Servitude de passage », « Affaires corporatives »[92].
[337] R... soutient que S... a dépensé pratiquement le double des frais d’avocats qu’il a payés.
[338] Certaines questions auraient pu faire l’objet d’admission ou d’ententes, mais sont demeurées contestées plus de trois ans après l’institution des procédures, peut-être en partie de l’entêtement de R... :
Ø La part des enfants Z et A dans l’immeuble de la rue C;
Ø La pension alimentaire pour les enfants;
Ø La communication incomplète des relevés bancaires de R...;
Ø L’établissement du train de vie pendant l’union, ce qui aura coûté beaucoup de temps et d’argent à S...;
Ø Les variations des déclarations sur les valeurs des immeubles.
[339] Le Tribunal ne peut que déplorer l’attitude des parties dans cette affaire.
[340] Les parties auront dépensé près de 12 M$ d’honoraires d’avocats à l’étape des mesures provisoires au Canada et en Belgique.
[341] Bien qu’il y ait eu plusieurs incidents et vacations à la Cour, ces honoraires ne sont nullement justifiés.
[342] Le Tribunal n’a pu s’empêcher de faire réaliser aux parties à la dernière journée d’audience que ces sommes auraient pu être utilisées pour régler les mesures provisoires et ainsi bénéficier aux membres de la famille.
[343] Mais dès 2015, ce dernier a interdit à ses avocats toute négociation avec la partie adverse[93] contrairement à la nouvelle philosophie du nouveau Code de procédure civile. Ce dernier en vigueur depuis le 1er juillet 2016 édicte clairement à ses articles 18 à 20 ce qui suit :
18. Les parties à une instance doivent respecter le principe de proportionnalité et s’assurer que leurs démarches, les actes de procédure, y compris le choix de contester oralement ou par écrit, et les moyens de preuve choisis sont, eu égard aux coûts et au temps exigé, proportionnés à la nature et à la complexité de l’affaire et à la finalité de la demande. Les juges doivent faire de même dans la gestion de chacune des instances qui leur sont confiées, et ce, quelle que soit l’étape à laquelle ils interviennent. Les mesures et les actes qu’ils ordonnent ou autorisent doivent l’être dans le respect de ce principe, tout en tenant compte de la bonne administration de la justice.
19. Les parties à une instance ont, sous réserve du devoir des tribunaux d’assurer la saine gestion des instances et de veiller à leur bon déroulement, la maîtrise de leur dossier dans le respect des principes, des objectifs et des règles de la procédure et des délais établis. Elles doivent veiller à limiter l’affaire à ce qui est nécessaire pour résoudre le litige et elles ne doivent pas agir en vue de nuire à autrui ou d’une manière excessive ou déraisonnable, allant ainsi à l’encontre des exigences de la bonne foi. Elles peuvent, à tout moment de l’instance, sans pour autant qu’il y ait lieu d’en arrêter le cours, choisir de régler leur litige en ayant recours à un mode privé de prévention et de règlement des différends ou à la conciliation judiciaire; elles peuvent aussi mettre autrement fin à l’instance.
20. Les parties se doivent de coopérer notamment en s’informant mutuellement, en tout temps, des faits et des éléments susceptibles de favoriser un débat loyal et en s’assurant de préserver les éléments de preuve pertinents. Elles doivent notamment, au temps prévu par le Code ou le protocole de l’instance, s’informer des faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions et des éléments de preuve qu’elles entendent produire.
[Le Tribunal souligne]
[344] Le comportement fautif de R... se doit d’être sanctionné par le versement d’une provision pour frais.
[345] S... témoigne que les frais judiciaires liés à la garde des enfants s’élèvent à 2 791 524 $[94].
[346] Bien que les procureurs de R... plaident que cette dernière n’est pas dans une situation de faiblesse financière ou de fragilité économique et qu’elle a choisi d’investir ses liquidités dans des honoraires professionnels plutôt que de voir, ne serait-ce que partiellement à ses propres besoins et à ceux de ses enfants, le Tribunal n’est pas de cet avis.
[347] La preuve démontre clairement et ne laisse aucun doute sur le refus de R... de payer une pension alimentaire représentant les besoins réels des enfants et un refus de payer pour S....
[348] S... n’a eu d’autre choix que de se battre et d’affronter R... puisqu’il ne lui offre rien et que sans une ordonnance de sauvegarde, il n’aurait pas payé de pension alimentaire sur une base volontaire.
[349] R... est blessé dans son amour-propre, le Tribunal l’a constaté et déplore qu’il ait décidé de livrer une bataille sans fin à l’égard de S..., et ce, au détriment de sa santé physique et financière.
[350] Ainsi, le Tribunal accorde à S... une provision pour frais de 2 M$, en plus, du remboursement de 250 000 $ pour les frais de sécurité de Garda et de la somme de 51 137,57$ représentant la moitié du rapport d’expert du mois de novembre 2017.
[351] Quant à la demande de provision pour frais supplémentaires de 3 M$ et ne sachant pas la suite des choses puisque la Cour d’appel a ordonné que le divorce au fond soit entendu en Belgique, le Tribunal réservera plutôt les droits de S... à cet égard, mais ne l’accordera pas à ce stade-ci des procédures.
[352] ACCUEILLE en partie la demande réamendée de la demanderesse pour mesures provisoires concernant les besoins alimentaires des enfants, les besoins alimentaires de la demanderesse et une demande de provision pour frais;
[353] DÉCLARE que les deux parties exerceront conjointement l’autorité parentale à l’égard de l’enfant A et leur ORDONNE de se consulter avant de prendre quelques décisions importantes que ce soient relativement à l’enfant, notamment quant à sa santé et son éducation;
[354] ACCORDE à la demanderesse la garde de l’enfant mineur A;
[355] ORDONNE à la demanderesse de transmettre au défendeur, et ce, sur réception tous les résultats scolaires des enfants, A et Z;
[356] ORDONNE au défendeur de payer à la demanderesse une pension alimentaire pour les enfants, conformément aux Tables provinciales, et ce, rétroactivement à l’institution des procédures, soit au 15 août 2014;
[357] ORDONNE au défendeur de payer à la demanderesse, pour la garde exclusive des deux enfants, une pension alimentaire mensuelle de 19 554,88$, et ce, pour la période du 15 août 2014 au 20 septembre 2014;
[358] ORDONNE au défendeur de payer à la demanderesse, pour un enfant en garde partagée et un enfant en garde exclusive, une pension alimentaire mensuelle de 14 495,884, et ce, pour la période du 21 septembre 2014 au 19 décembre 2014;
[359] ORDONNE au défendeur de payer à la demanderesse, pour une garde partagée des deux enfants, une pension alimentaire mensuelle de 9 436,88$, et ce, du 20 décembre 2014 au 31 décembre 2014;
[360] ORDONNE au défendeur de payer à la demanderesse, pour la garde partagée des deux enfants, une pension alimentaire mensuelle de 9 049,09$, et ce, pour la période du 1er janvier 2015 au 11 avril 2015;
[361] ORDONNE au défendeur de payer à la demanderesse, pour un enfant en garde partagée et un enfant en garde exclusive avec la mère, une pension alimentaire mensuelle de 14 287,50$, et ce, pour la période du 12 avril 2015 au 31 décembre 2015;
[362] ORDONNE au défendeur de payer à la demanderesse pour un enfant en garde partagée et un enfant en garde exclusive à la mère, une pension alimentaire mensuelle de 14 553,06$, et ce, pour la période du 1er janvier 2016 au 27 janvier 2016;
[363] ORDONNE au défendeur de payer à la demanderesse, pour les deux enfants en garde exclusive avec la mère, une pension alimentaire mensuelle de 19 566,63$, et ce, à compter du 27 janvier 2016 au 31 décembre 2016, et ce, en tenant compte des sommes déjà versées par le défendeur suite à l’ordonnance de sauvegarde du 15 juillet 2016;
[364] ORDONNE au défendeur de payer à la demanderesse, pour les deux enfants en garde exclusive avec la mère, une pension alimentaire mensuelle de 19 576,39$, et ce, à compter du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2017, et ce, en tenant compte des sommes déjà versées par le défendeur suite à l’ordonnance de sauvegarde du 15 juillet 2016;
[365] ORDONNE au défendeur de payer à la demanderesse, pour les deux enfants en garde exclusive avec la mère, une pension alimentaire mensuelle de 19 591,23, à compter du 1er janvier 2018, et ce, en tenant compte des sommes déjà versées par le défendeur suite à l’ordonnance de sauvegarde du 15 juillet 2016;
[366] ORDONNE au défendeur de payer les frais de scolarité de l’enfant, A, pour [l’école B] en Nouvelle-Écosse représentant la somme de 41 750 $ annuellement, et ce, rétroactivement au 4 janvier 2018, et ce, dès réception des factures;
[367] ORDONNE au défendeur d’offrir un véhicule automobile à l’enfant Z d’une valeur de 40 000 $, véhicule choisi par cette dernière, et ce, dans les 60 jours du présent jugement;
[368] ORDONNE à la demanderesse de transmettre au défendeur une opinion écrite d’un chirurgien plasticien afin de permettre à Z d’obtenir une intervention chirurgicale afin de camoufler les cicatrices présentes sur son corps, dans la mesure où cette intervention s’avère nécessaire et ORDONNE au défendeur de rembourser la totalité du coût de ladite intervention, et ce, dans les dix jours suivants l’intervention;
[369] ORDONNE au défendeur d’assumer, pour le bénéfice de la fiducie au nom des enfants Z et A, et pour le bénéfice de ceux-ci personnellement, l’entièreté de tous paiements, de tous frais, de toutes dépenses, de tous remboursements et de toutes charges de quelque nature relative à la propriété sise au [adresse 6] Bruxelles, en Belgique, y incluant et sans limiter la généralité de ce qui précède, tout versement de taxes et tout versement hypothécaire, y incluant tout remboursement de capital, le cas échéant;
[370] ACCORDE à la demanderesse et aux enfants, l’usage exclusif de la résidence familiale sise au [adresse 1] à Ville B et de l’ensemble de son contenu;
[371] ACCORDE à la demanderesse et aux enfants, l’usage exclusif de l’ensemble des véhicules d’agrément et/ou liés à l’usage ou à l’entretien de la propriété sise au [adresse 1] à Ville B au moment de leur séparation, y incluant, mais non limitativement des véhicules suivants :
· Un Dodge-ram 1500 SRT;
· Un Quad 4D 2008-2009;
· Un véhicule Cadillac Escalade Premium 2012 noir;
· Une automobile Mercedes Sprinter 2013 noir;
· Une Rolls Royce;
· Un grand tracteur avec son accessoire d’excavation;
· Quatre tracteurs à tondeuse;
· Trois Tondeuses automatiques Huskvarna;
· Trois remorques (petite - moyenne - grande);
· Deux voiturettes de golf (8 places et 4 places);
· Un Quad Polaris à quatre roues;
· Un camion cube;
· Un motocross;
· Quatre tricycles;
· Un bateau Sea-doo;
· Une barque bleue;
· Deux jet skis Sea-doo;
· Une remorque noire;
· Trois skidoos;
[372] ORDONNE au défendeur de continuer à payer directement auprès des tiers concernés les frais suivants relatifs à la résidence sise au [adresse 1] à Ville B :
· Les taxes foncières ;
· Les taxes scolaires ;
· Les assurances de la résidence ainsi que des véhicules ;
· Hydro-Québec;
· Les frais d’entretien de la résidence;
[373] ORDONNE au défendeur de rembourser à l’épouse dans les dix jours d’une telle demande écrite les frais suivants relatifs à la résidence sise au [adresse 1] à Ville B :
· Les frais de déneigement y incluant l’entrée principale;
· Les frais de jardinier;
· Les frais d’entretien de la piscine;
· Les frais d’entretien du quai pour les bateaux;
· Les frais liés à l’alarme et au système de sécurité
(sécurité et caméra);
· Les frais d’entretien du portail;
· Le salaire d’un homme à tout faire.
[374] AUTORISE la demanderesse à avoir accès et à prendre possession du contenu des biens des coffrets de sureté portant des numéros [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...] et [...] de la succursale de la Banque Royale du Canada, sise au 800 Square Victoria, à Montréal;
[375] AUTORISE la demanderesse à prendre possession sans autre délai et hors la présence du défendeur ou de ses représentants, des 17 items toujours dans les coffres de la Banque Royale du Canada, lesquels sont visés par l’ordonnance de sauvegarde du 1er décembre 2016;
[376] ORDONNE à la demanderesse de ne pas se départir des bijoux dans les coffrets de la RBC;
[377] ORDONNE au défendeur de verser à la demanderesse une pension alimentaire pour elle-même de 75 000 $ par mois, et ce, rétroactivement à la date d’institution des procédures, soit au 15 août 2014;
[378] REJETTE la demande de la demanderesse pour le remboursement de la somme de 258 290,61 $, requise pour le logement à l’hôtel suite à la séparation des parties;
[379] REJETTE la demande de remboursement de la demanderesse pour la somme de 186 825,47 $, requise pour le logement et l’aménagement de la résidence située au [adresse 9], à Ville B;
[380] REJETTE la demande de remboursement de la demanderesse de la somme de 200 227,71 $, requise pour le logement et l’aménagement de la résidence située au [adresse 8], à Ville B, pour la période du mois de juin au mois de janvier 2016;
[381] REJETTE la demande de la demanderesse pour le remboursement des frais de psychologue de 114 774,61$;
[382] ORDONNE au défendeur de payer à la demanderesse une provision pour frais de 2 301 137,50$, comprenant une provision pour frais de 2 M$, le remboursement de 250 000 $ pour les frais de Garda et le remboursement de 51 137,57$, pour le rapport de l’expert Hamelin du 10 novembre 2017, et ce, dans les 60 jours du présent jugement;
[383] LE TOUT, sans frais de justice.
|
|
|
__________________________________ CAROLE HALLÉE, J.C.S. |
|
|
Me Luce Gayrard Me Gabrielle Gayrard Gayrard avocats Avocates de la demanderesse
|
|
Me Pascale Nolin Me Benjamin Prud’homme Robinson Sheppard Shapiro Avocats du défendeur
|
|
Me Jessica Harding Me Sylvain Lussier Osler, Hoskin & Harcourt Avocats-conseils du défendeur |
|
Dates d’audience : 4, 5, 8, 9, 10, 15, 16, 17, 18, 19 mai 2017 / 27, 28, 29 et 30 novembre 2017; 1er, 5, 6, 7, 8, 11, 13 et 14 décembre 2017; 14 février 2018.
|
[NDLE : Par souci de confidentialité, SOQUIJ a retiré du
présent jugement l’Annexe 1.]
TABLE DES MATIÈRES
Ø LES REVENUS DE R...……………………………………………………………….14
Ø PENSION ALIMENTAIRE POUR LES ENFANTS…………………………………33
Ø PENSION ALIMENTAIRE POUR S...……………….………………………………37
Ø DÉPENSES RÉCLAMÉES PAR S...…………….………………….……………....41
Ø PROVISION POUR FRAIS…………………………………………………………...43
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[1] L’utilisation des noms de famille dans le cadre du présent jugement vise à alléger le texte et l’on voudra bien n’y voir aucune discourtoisie à l’endroit des personnes concernées.
[2] Pièce MPR-118.
[3] Pièce PRS-7.
[4] Jugement de la Cour d’appel, 29 septembre 2017.
[5] Article 15.3(1).
[6] Droit de la famille - 775, [1990] R.D.F. 174 (C.A.).
[7] Droit de la famille - 131908, [2013] QCCA 1206; Droit de la famille - 775, [1990] R.D.F. 174 (C.A.); Droit de la famille - 2540 [1996) R.D.F. 739 (C.A.).
[8] Droit de la famille - 16940, [2016] QCCS 1892, paragr. 16.
[9] Droit de la famille - 775, [1990] R.D.F. 174 (C.A.).
[10] L. (A.) c. C. (S.), 2010 QCCS 6120, paragr. 78-79 (Honorable Francine Nantel).
[11] Droit de la famille - 924, J.E. 91-14 (CA).
[12] D. (A.) c. O. (D), 2014 QCCS 3614, paragr. 41 (Honorable Lise Bergeron).
[13] C. (D.) c. F. (L.), 2012 QCCS 6951, paragr. 41 (Honorable Michel Yergeau).
[14] S. (S.) v. Sh. (L.), 2013 QCCA 1206, paragr. 19 (Honorables Marie-France Bich, Dominique Bélanger et Marie St-Pierre).
[15] C. (P.) c. D. (M.), 2011 QCCS 2493, para. 66 (Honorable Claude Dallaire); J. (S.) c. K. (A.), 2014 QCCS 3465, paragr. 45 (Honorable Francine Nantel).
[16] C. (P.) c. D. (M.), 2011 QCCS 2493, paragr. 84 (Honorable Claude Dallaire) ; C. (G.) c. R. (L.), 2012 QCCA 90, paragr. 36-37 (Les Honorables Benoît Morin, Pierre J. Dalphond et Jacques A. Léger).
[17] Commentaires de la ministre de la justice, Article 446 C.p.c., Le Grand Collectif, Code de procédure civile, Commentaires et annotations, sous la direction de Luc Chamberland, Éd., Yvon Blais, 2016.
[18] C. (P.) c. D. (M.), 2011 QCCS 2493, paragr. 63-66 (Honorable Claude Dallaire).
[19] Commentaires de Jocelyn Verdon, Article 446 C.p.c., Le Grand Collectif, Code de procédure civile, Commentaires et annotations, sous la direction de Luc Chamberland, Éditions Yvon Blais, 2016.
[20] Droit de la famille - 3000, [2000] R.D.F. 11, (Les Honorables Thérèse Rousseau-Houle, Jacques Chamberland et André Forget).
[21] L. (R.) c. S. (M.), 2010 QCCS 1411, paragr. 200 (Honorable Pierre Béliveau).
[22] L. (R.) c. S. (M.), 2010 QCCA 1937, paragr. 6 (Les Honorables François Pelletier, André Rochon et Bernard Godbout); Première instance : L. (R.) c. S. (M.), 2010 QCCS 1411, paragr. 200 à 271 (Honorable Pierre Béliveau).
[23] T. (G.) c. R. (S.), 2016 QCCA 915, paragr. 7-9 (Les Honorables France Thibault, Geneviève Marcotte et Martin Vauclair); Première instance : T. (G.), v. R. (S.), 2015 QCCS 2080, paragr. 42 et 50 (Honorable Stephen W. Hamilton); Voir aussi J. (E.) c. L. (C.), 2010 QCCA 1087, paragr. 36 (Les Honorables J.J. Michel Robert, Lise Côté et Nicholas Kasirer) pour l’approche large et libérale dans l’appréciation de la « réelle capacité financière du parent débiteur ».
[24] Pièce MPR-26.
[25] € = euro / M€ = millions d’euros.
[26] Les 9, 10, 15, 16, 17 et 18 mai 2017.
[27] Pièce PRS-72.
[28] 5 209 883 $ - 1,9 M$ - 2 M$ = 1 309 883 $.
[29] 7 524 618,82$ - 2 036 960 $ - 4 276 866 $ = 1 210 792,82$.
[30] 5 209 883 $ - 1,9 M$ - 2 M$ - 94 700 $ = 1 215 183 $.
[31] 7 524 618,82$ - 2 036 960 $ - 4 276 866 $ - 500 000 $.
[32] Pièce MPR-78.
[33] Pièce MPR-83, rapport d’expert du 10 novembre 2017 - annexe 13 - page 5 de 5.
[34] Rapport du 10 novembre 2017 de l’expert Hamelin, annexe 13, page 5 de 5.
[35] Pièces PRS-65, PRS-66 et PRS-80.
[36] Pièce PRS-65, PRS-66 et PRS-80 ainsi que les formulaires - actifs / passifs.
[37] Pièce PRS-66.
[38] Pièce PRS-64.
[39] Coderre c. Douville, [1943] no AZ-50293123. Voir aussi, Droit de la famille - 152324, 2015 QCCS 4336; Thériault c. Garage A.R. Dionne inc., J.E. 2005-1701 (C.S.) et Dubreuil c. Trépanier, J.E. 96-1654 (C.S.).
[40] Article 2850 C.c.Q. Voir aussi, Robineault c. Bilodeau, J.E. 2005-607 (C.Q.) et Veuilleux c. Condorde (La), J.E. 85-322 (C.A.).
[41] Bressani c. Alta Itée, J.E. 98-2227 (C.A.) et Veuilleux c. Condorde (La), J.E. 85-322 (C.A.).
[42] Bressani c. Alta Itée, préc., note 41.
[43] Construction DJL inc. c. Conex Construction routière inc., 2014 QCCS 3437.
[44] Article 2852 C.c.Q.
[45] Léo DUCHARME, Précis de la preuve, 6e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2005, par. 757.
[46] Henri Cousineau & Fils inc. c. Axa Assurances inc., 2010 QCCA 1000.
[47] Jean-Claude ROYER, La preuve civile, 5e éd., par Catherine PICHÉ, Montréal, Éd. Yvon Blais, 2016, paragr. 1090.
[48] Cinegrand Montréal Inc. c. Forum Entertainment Centre Company, 2006 QCCA 1579.
[49] Joséane CHRÉTIEN, Aveu, dans Jurisclasseur Québec, coll. « Preuve et prescription », fasc. 8, Montréal, LexisNexis Canada, à jour au 1er juin 2017, paragr. 80.
[50] Arsenault c. Union Insurance Society of Canton Ltd, [1961] B.R. 59 (C.A.).
[51] [...].
[52] Pièce MPR-124.
[53] Pièce PRS-88.
[54] Interrogatoire du 16 février 2015, p. 147.
[55] Pièce P-6.
[56] Pièce PRS-31.
[57] Pièce PRS-81.
[58] Pièce PRS-83.
[59] Pièce MPR-83.
[60] Entre autres, procès-verbal des 21 juin et 11 octobre 2017.
[61] Termes référant à une faillite.
[62] Pièce PR-5 des pièces de l’audition du 7 juillet 2016.
[63] Droit de la famille-2617, AZ-97021208 (C.S.), p.3 et 4.
[64] Les neuf formulaires de fixation des pensions alimentaires pour enfants sont joints au présent jugement.
[65] Inscription : 15 000 $, Activités parascolaires : 5 000 $, uniformes : 1 500 $.
[66] [L’école B].
[67] Pièce PRS-25 (cahier 9 - volume 2).
[68] Section 3 - dépenses de nourriture : 30 000 $ puisque cette dépense inclut les enfants; Section 4 - ligne 4.4 : 69 429,30 $; Section 7 - dépenses des enfants : 57 488,02 $; Section 8 - dépenses de charges salariales : 95 822,05 $ puisque ces dépenses sont réclamées dans des conclusions distinctes; Section 9 - honoraires professionnels : 5 779,37 $; Section 10 - dépenses générales d’administration : le Tribunal soustrait arbitrairement 150 000 $; [Calcul : 1 113 712,06 $ moins 30 000 $ moins 69 429,30 $ moins 57 488,02 $ moins 95 822,05 $ moins 5 779,37 $ moins 150 000 $ = 705 193,28 $ cette somme divisée par 7 X 12 = Ça fait des besoins de 1 208 902,60 $ par année moins son revenu de 135 101 $ = 1 073 801,60 $].
[69] Pièces PRS-83 et PRS-94.
[70] Cahier 10, Volume 1, section 5.
[71] Cahier 8, P-13, onglets 1 et 2.
[72] Droit de la famille - 132381, 2013 QCCA 1505; Droit de la famille - 142449, 2014 QCCA 1791; Droit de la famille - 142142, 2014 QCCA 1562.
[73] Droit de la famille - 691, [1989] R.D.F. 548 (C.S.).
[74] Droit de la famille - 3025, [1998] R.D.F. 389 (C.A.); Droit de la famille - 2943, [1998] R.D.F. 204 (C.S.); Droit de la famille - 3062, [1998] R.D.F. 574 (C.S);
[75] M. TÉTRAULT, De choses et d'autres en droit de la famille - La jurisprudence marquante de 2008-2009 : La procédure et la preuve en matière familiale, Formation continue du Barreau - Développements récents (2009), 2009 EYB2009DEV1581 (Section 1.6 La provision pour frais : la synthèse).
[76] Commentaires de Jocelyn Verdon, Article 446 C.p.c., Le Grand Collectif, Code de procédure civile, Commentaires et annotations, sous la direction de Luc Chamberland, Éd., Yvon Blais, 2016.
[77] J. (S.) c. K. (A.), 2014 QCCS 3465, paragr. 153 (Honorable Francine Nantel); M. (L.) c. B. (A.), 2015 QCCS 5638, para. 37 (Honorable France Dulude).
[78] Droit de la famille - 172327, 2017 QCCS 4849, (Honorable André Wery).
[79] M. (L.) c. B. (A.), 2015 Q CCS 5638, paragr. 39-41 ((Honorable France Dulude) ; G. (G.) c. M. (C.), 2014 QCCS 63, paragr. 155 (Provision pour frais de 121,612.20 $) (Honorable Daniel W. Payette).
[80] G. (G.) c. M. (C.), 2014 QCCS 63, paragr. 155-157 (Honorable Daniel W. Payette).
[81] L. (R.) c. S. (M.), 2010 QCCS 1411, paragr. 374-379 (Honorable Pierre Béliveau) et L. (R.) c. S. (M.), 2010 QCCA 1937, paragr. 8 (Octroi d’une provision pour frais de 187,078.81 $) (Les Honorables François Pelletier, André Rochon et Bernard Godbout).
[82] L.S. c. A.C., Droit de la Famille 172327, EYV 2017-286151, j. André Wery, 5 octobre 2017.
[83] Liste de pièces de la demanderesse en vue de l’audition intérimaire du mardi 12 juillet 2016, Pièce R-6, lettre du 20 août 2015.
[84] Pièce PR-5 de l’audition du 7 juillet 2016.
[85] Rapport du 15 mai 2017, page 13.
[86] Cahier 6, Pièces P-9 à P-13.
[87] Témoignage de Monsieur Serge Théorêt du 7 décembre 2017.
[88] Cahier 9, Volume 3, Pièce PRS-31.
[89] Cahier 9, Volume 1, Pièce PRS-5d).
[90] Lettre du 2 mai 2017.
[91] Cahier 9, Volume 1, Pièce PRS-2.
[92] Pièce D-19b), p. 55, 56, 57, 89 et 90.
[93] À l’exception d’une médiation contrôlée par R…, en ce qu’il a exigé une comédiation, soit à ce qu’un médiateur belge soit présent avec Pierrette Rayle, juge retraitée.
[94] Plan d’argumentation, onglet 11.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.