Décision

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Morin c. Khuong

2017 QCCA 1758

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

QUÉBEC

N° :

200-09-009567-170

(200-17-023917-164)

 

DATE :

8 NOVEMBRE 2017

 

 

CORAM :

LES HONORABLES

MARIE ST-PIERRE, J.C.A.

CLAUDE C. GAGNON, J.C.A.

JOCELYN F. RANCOURT, J.C.A.

 

 

CAROLE MORIN

APPELANTE - demanderesse

c.

 

LU CHAN KHUONG

INTIMÉE - défenderesse

 

 

ARRÊT

 

 

[1]           L’intimée, Me Lu Chan Khuong (« Khuong »), demande le rejet de l’appel formé par l’appelante, Carole Morin (« Morin »), à l’endroit du jugement rendu le 6 juillet 2017[1] par la Cour supérieure, district de Québec (l’honorable Daniel Beaulieu - « le juge »), qui a rejeté le recours en responsabilité professionnelle et dommages-intérêts entrepris contre elle par Morin. Elle plaide que l’appel proposé ne présente aucune chance raisonnable de succès et que son rejet s’impose aux termes de l’article 365 C.p.c.

[2]           De son côté, Morin présente une requête pour permission de déposer une preuve nouvelle, selon l’article 380 C.p.c.

[3]           Il y a lieu de rejeter la requête pour preuve nouvelle et d’accueillir la demande de rejet d’appel.

[4]           Voici pourquoi.

[5]           Le juge rejette le recours en dommages entrepris par Morin pour plus d’un motif. Comme on le constate à la lecture des paragraphes 59 à 67 de son jugement, ci-après reproduits, le juge retient non seulement l’absence de faute, mais aussi l’absence de tout lien causal entre les fautes reprochées et les dommages réclamés et l’absence de preuve de dommages.

L’existence d’un lien de causalité entre les fautes reprochées par la demanderesse et les dommages réclamés

[59]      Pour aucune des fautes reprochées par la demanderesse à la défenderesse, le Tribunal ne peut retenir un lien causal avec les dommages qui sont réclamés.

[60]      Il faut en effet se rappeler que la Cour d’appel, dans son arrêt rendu le 11 novembre 2013, rejette la demande qui lui est adressée, non seulement en vertu de l’article 523 C.p.c., mais également suivant l’article 26 du même Code, lequel prévoit spécifiquement les critères permettant à la Cour d’autoriser la permission demandée.

[61]      En ce qui concerne les offres de règlement, tel qu’indiqué précédemment, le Tribunal est persuadé qu’elles ont été transmises à la demanderesse. Toutefois et même si le Tribunal n’avait pas cette conviction, rien ne laisse croire que la demanderesse aurait effectivement accepté une telle proposition... soit une somme globale de 15 063 $ pour valoir jusqu’à l’âge de sa retraite. La demanderesse réclamait alors une indemnité annuelle de 90 000 $!

Les dommages

[62]      Outre les postes de réclamation présentés par la demanderesse et que l’on retrouve à sa procédure ré-réamendée du 15 mai 2017, lesquels sont plus amplement décrits à la section précédente du présent jugement (prétentions des parties), aucune preuve n’est présentée devant le Tribunal.

[63]      Autrement, la somme de 15 063 $ découle du montant global capitalisé prévoyant une incapacité permanente de trois pourcent (3 %), offre qui a été refusée.

[64]      La somme de 60 000 $ réclamée comme aggravation possible dans le cas où cette première proposition aurait été acceptée, est absolument hypothétique.

[65]      Aucune démonstration ni explication n’est fournie par la demanderesse afin de détailler le stress et les ennuis qu’elle invoque au soutien de sa réclamation de 30 000 $.

[66]      Finalement, le remboursement de la somme de 6 898,56 $ ne peut être payable que si le mandat n’a pas été réalisé, ce qui ne s’avère pas le cas.

[67]      En somme, en l’absence d’une faute, de dommages prouvés et en présence d’un bris de causalité, le recours de la demanderesse doit être rejeté.

[6]           Or, des huit moyens d’appel proposés par Morin, de même que des éléments de preuve énoncés dans sa requête pour permission d’administrer une preuve nouvelle, aucun ne concerne le lien de causalité ou la preuve des dommages : on y traite que de l’élément faute.

[7]           Ainsi, sans qu’il soit utile d’en décider, même en acceptant les allégations contenues dans la requête pour preuve nouvelle à la seule fin d’analyser la demande de rejet d’appel, il appert que l’appel proposé est voué à l’échec, car il ne peut y avoir de condamnation prononcée en l’absence de lien de causalité et de dommages prouvés.

[8]           Rappelons à cet égard que les normes d’intervention d’une cour d’appel en matière de questions de fait ou de questions mixtes de fait et de droit (incluant les inférences[2], l’évaluation de la crédibilité[3], le lien de causalité[4] et la détermination d’un quantum de dommages[5]) sont connues et que la déférence s’impose dans tous ces cas[6].  Ainsi, aucune intervention de la Cour n’est possible sans une erreur manifeste et déterminante[7] pointée du doigt[8].

[9]           Cela étant, prenant en compte les normes d’intervention applicables, force est de conclure que l’appel est manifestement voué à l’échec.

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

[10]        ACCUEILLE la requête en rejet d’appel, avec frais de justice en faveur de l’intimée;

[11]        REJETTE la requête pour preuve nouvelle sans objet dans les circonstances, mais sans frais de justice;

 

[12]        REJETTE l’appel, avec frais de justice en faveur de l’intimée.

 

 

 

 

MARIE ST-PIERRE, J.C.A.

 

 

 

 

 

CLAUDE C. GAGNON, J.C.A.

 

 

 

 

 

JOCELYN F. RANCOURT, J.C.A.

 

Mme Carole Morin

Non représentée

Partie appelante

 

Me Dominique E. Gagné

Stein, Monast

Pour l’intimée

 

Date d’audience :

6 novembre 2017

 



[1]     Morin c. Khuong, 2017 QCCS 3488.

[2]      Benhaim c. St-Germain, 2016 CSC 48 [Benhaim].

[3]      Id., paragr. 36-39; Aubry c. Éditions Vice-Versa inc., [1998] 1 R.C.S. 591, paragr. 71 [Aubry].

[4]      Benhaim, supra, note 2, paragr. 36-39; 9254-8494 Québec inc. c. Ville de Québec, 2017 QCCA 1012; J.G. c. Nadeau, 2016 QCCA 167, paragr. 75-79, requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée (C.S. Can., 2017-03-02) 36924 [J.G.].

[5]      Aubry, supra, note 3, paragr. 72. Voir aussi : Cinar Corporation c. Robinson, 2013 CSC 73, [2013] 3 R.C.S. 1168, paragr. 108-109.

[6]      Nelson (City) c. Mowatt, 2017 CSC 8; Benhaim, supra, note 2; Ediger c. Johnston, 2013 CSC 18, paragr. 29; Housen c. Nikolaisen, [2002] 2 R.C.S. 235; P.L. c. Benchetrit, 2010 QCCA 1505; Layne Christensen Company c. Forages LBM inc., 2009 QCCA 1514, paragr. 38 [Layne]; Regroupement des CHSLD Christ-Roi (Centre hospitalier, soins longue durée) c. Comité provincial des malades, 2007 QCCA 1068, paragr. 55.

[7]      Benhaim, supra, note 2, paragr. 36-39.

[8]      J.G., supra, note 4, paragr. 75-79, requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée (C.S. Can., 2017-03-02) 36924. Voir aussi : Layne, supra, note 6, paragr. 38.

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