Décision

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          LA COMMISSION D'APPEL EN MATIÈRE
          DE LÉSIONS PROFESSIONNELLES

     QUÉBEC    MONTRÉAL, le 2 mars 1993

     DISTRICT D'APPEL   DEVANT LA COMMISSAIRE  :  Sylvie Moreau
     DE MONTRÉAL

     RÉGION:MONTÉRÉGIE  AUDIENCE TENUE LE      :  21 janvier 1993
     DOSSIER:27499-62-9103 PRIS EN DÉLIBÉRÉ LE    :   4 février 1993

     DOSSIER CSST:76879881 À                      : Longueuil
     DOSSIER B.R.:60543156

          MONSIEUR ANDRÉ BOILY
          1793, rue Lapointe
          Sainte-Julie (Québec)
          J3E 1J6

                     PARTIE APPELANTE

          et

          LORRAINE FOODS SERVICES INC.
     

(Entreprise fermée) PARTIE INTÉRESSÉE et COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL 25, boul. Lafayette Longueuil (Québec) J4K 5B7 PARTIE INTERVENANTE D É C I S I O N Le 21 mars 1991, monsieur André Boily, le travailleur, dépose à la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d'appel) une déclaration d'appel à l'encontre d'une décision rendue le 13 février 1991 par le bureau de révision de la région de Longueuil.

Cette décision unanime du bureau de révision maintient la décision rendue le 23 avril 1990 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la Commission) refusant au travailleur une quatrième paire de chaussures, celui-ci ayant déjà atteint le maximum de trois paires de chaussures pour 1989.

Le 2 novembre 1992, la Commission dépose à la Commission d'appel un avis d'intervention.

Bien que dûment convoqué, l'employeur, Lorraine Foods Services Inc., n'est pas représenté à l'audience devant la Commission d'appel.

OBJET DE L'APPEL Le travailleur demande à la Commission d'appel d'infirmer la décision du bureau de révision et d'ordonner à la Commission de lui rembourser la somme de 50 $ représentant les frais relatifs à l'élévation d'une espadrille.

LES FAITS Le travailleur a, le 29 juin 1981, subi un accident du travail, pour lequel plusieurs interventions chirurgicales furent par la suite effectuées dont une arthrodèse de son genou gauche.

Une incapacité partielle permanente de 26,5 % lui est attribuée et une orthèse lui est prescrite aux fins de compenser l'inégalité de ses membres inférieurs.

Le 28 décembre 1987, le travailleur subit une rechute, récidive ou aggravation de sa lésion professionnelle du 29 juin 1981.

Le 19 avril 1989, le travailleur soumet à la Commission une demande pour une élévation à une quatrième paire de chaussures.

Le 23 avril 1990, la Commission avise, par écrit, le travailleur qu'elle ne peut autoriser cette demande en raison d'une directive qui permet le remboursement pour un maximum de trois paires de chaussures par année.

Le 4 mai 1990, le travailleur conteste la décision précitée.

Le 13 février 1991, une audience est tenue devant le bureau de révision qui rend, le 13 mars 1991, la décision faisant l'objet du présent appel.

ARGUMENTATION DES PARTIES Le travailleur soumet que les frais relatifs à l'élévation de sa chaussure sont prévus au 4ème alinéa de l'article 189 de la loi, étant une orthèse au sens de la Loi sur la protection de la santé publique (L.R.Q., c. P-35).

Il rappelle l'objet de la loi, laquelle doit recevoir une interprétation large et libérale.

Il réfère, de plus, aux articles 112 et 113 de la loi.

La Commission reconnaît que l'élévation de la chaussure du travailleur constitue une orthèse au sens de la loi précitée.

Cependant, dit-elle, une limite de trois paires de chaussures a été fixée dans les politiques de la Commission à moins que le travailleur n'obtienne de son médecin une ordonnance à l'effet contraire. Elle dépose alors copie de cette politique.

MOTIFS DE LA DÉCISION La Commission d'appel doit déterminer si le travailleur a droit au remboursement d'une quatrième orthèse pour l'année 1989.

En l'espèce, il est admis et reconnu que l'élévation de la chaussure gauche du travailleur constitue une orthèse au sens de la Loi sur la protection de la santé publique qui définit ainsi à l'alinéa «O» de son article premier l'expression orthèse : Orthèse: signifie un appareil adapté à un être humain et destiné à préserver les fonctions d'un de ses membres ou organes ou à restituer la fonction, à compenser pour les limitations ou à accroître le rendement physiologique d'un de ses membres ou organes qui a perdu sa fonction, ne s'est jamais pleinement développé ou est atteint d'anomalies congénitales.

L'article 1 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001) précise : 1. La présente loi a pour objet la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elles entraînent pour les bénéficiaires.

Le processus de réparation des lésions professionnelles comprend la fourniture des soins nécessaires à la consolidation d'une lésion, la réadaptation physique, sociale et professionnelle du travailleur victime d'une lésion, le paiement d'indemnités de remplacement du revenu, d'indemnités pour dommages corporels et, le cas échéant, d'indemnités de décès.

La présente loi confère en outre, dans les limites prévues au chapitre VII, le droit au retour au travail du travailleur victime d'une lésion professionnelle.

Les articles 112, 113, 188, 189 et 194 énoncent : 112. Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit, sur production de pièces justificatives, à une indemnité maximale de: 1o 300 $ pour le nettoyage, la réparation ou le remplacement des vêtements endommagés par suite d'un accident du travail; 2o 300 $ par année pour les dommages causés à ses vêtements par une prothèse ou une orthèse au sens de la Loi sur la protection de la santé publique (chapitre P- 35) dont le port est rendu nécessaire en raison d'une lésion professionnelle.

113. Un travailleur a droit, sur production de pièces justificatives, à une indemnité pour la réparation ou le remplacement d'une prothèse ou d'une orthèse au sens de la Loi sur la protection de la santé publique (chapitre P-35) endommagée involontairement par le fait ou à l'occasion de son travail, dans la mesure où il n'a pas droit à une telle indemnité en vertu d'un autre régime.

La Commission détermine les indemnités maximales payables en vertu du présent article.

188. Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit à l'assistance médicale que requiert son état en raison de cette lésion.

189. L'assistance médicale comprend: 1o les services de professionnels de la santé; 2o les soins hospitaliers; 3o les médicaments et autres produits pharmaceutiques; 4o les prothèses et orthèses au sens de la Loi sur la protection de la santé publique (chapitre P-35), prescrites par un professionnel de la santé et disponibles chez un fournisseur agréé par la Régie de l'assurance-maladie du Québec ou, s'il s'agit d'un fournisseur qui n'est pas établi au Québec, reconnu par la Commission; 5o les autres soins ou frais déterminés par la Commission.

194. Le coût de l'assistance médicale est à la charge de la Commission.

Aucun montant ne peut être réclamé au travailleur pour une prestation d'assistance médicale à laquelle il a droit en vertu de la présente loi et aucune action à ce sujet n'est reçue par une cour de justice.

La politique de la Commission précise quant à elle : «Prothèses et orthèses pour le tronc et les membres Lorsque les prothèses ou orthèses prescrites sont prévues dans la Liste des prothèses, appareils orthopédiques, dispositifs ou autres équipements publiée par la Régie de l'assurance-maladie du Québec, la Commission applique les tarifs en vigueur à la Régie.

La Commission assume également le coût d'orthèses fabriquées par un physiothérapeute, un ergothérapeute ou un podiatre. Ces orthèses doivent être prescrites par un professionnel de la santé.

Chaussures orthopédiques et orthèses plantaires On retrouve quatre (4) catégories de chaussures orthopédiques: a) Chaussures ou bottes que possède le travailleur: certaines modifications mineures peuvent y être faites sans qu'une chaussure ou botte spéciale soit nécessaire. Dans ce cas, seuls les frais de modification sont assumés par la Commission.

b) Chaussures ou bottes spécialement préfabriquées: elles sont disponibles en pointures conventionnelles mais spécialement profondes, permettant des modifications internes et externes.

c) Chaussures ou bottes sur mesure: elles sont fabriquées spécialement lorsqu'aucune chaussure ou botte préfabriquée n'est convenable pour permettre les modifications nécessaires à cause d'une déformation trop marquée du (des) pied (s) et de la (des) cheville (s).

d) Chaussures ou bottes moulées: leur fabrication nécessite l'utilisation d'un moulage à cause d'une déformation très importante du (des) pied (s) et de la (des) cheville (s).

La Commission assume les coûts de chaussures orthopédiques et orthèses plantaires lorsqu'elles sont prescrites par un médecin et qu'elles sont en relation avec la lésion professionnelle.

A moins d'une ordonnance du médecin à l'effet contraire: - la Commission assume les coûts d'un maximum de trois (3) paires de chaussures ou de bottes orthopédiques par année; - la Commission assume les coûts d'un maximum de deux (2) paires de chaussures orthopédiques par année pour le travailleur qui ne travaille pas ou qui est à la retraite; - la Commission assume les coûts d'un maximum d'une (1) paire de chaussures conventionnelles de transition lorsque nécessaire pour supporter temporairement la cheville (bottines) ou pour obtenir diminution de l'oedème ou dans le cas de la fabrication d'une nouvelle orthèse. Cette paire de chaussures n'est pas renouvelable.

La Commission assume, sujet à son autorisation préalable, les coûts de renouvellement des chaussures ou bottes orthopédiques selon le maximum établi.

Lorsqu'il survient un changement dans la pathologie du travailleur (ex.: suite à une nouvelle opération, etc.) nécessitant une modification différente ou un changement de catégorie de chaussures orthopédiques, la Commission en assume les coûts lorsque prescrit par un médecin.

La Commission assume les coûts d'une (1) paire par année de couvre-chaussures spéciaux convenables pour les chaussures orthopédiques.» En l'espèce, la Commission d'appel est d'avis que la preuve ne lui permet pas de conclure en l'application de l'article 113 de la loi, celle-ci ne disposant pas d'élément lui démontrant de façon probante que l'orthèse du travailleur ait été endommagée involontairement par le fait ou à l'occasion de son travail.

La Commission d'appel ne peut davantage relier ces frais de remplacement d'orthèse à la mesure prévue à l'article 112 de la loi, laquelle vise des frais étrangers au présent litige.

Selon l'article 589 de la loi, la Commission est chargée de l'administration de celle-ci et a, selon l'article 349 de la même loi, la compétence exclusive pour décider d'une affaire ou d'une question visée par celle-ci à moins qu'une disposition particulière ne donne compétence à une autre personne ou à un autre organisme.

Elle dispose alors d'un pouvoir général de faire des politiques lui permettant d'appliquer la loi et ses règlements.

En l'espèce, bien que la loi précise que le coût de l'assistance médicale, à l'intérieur de laquelle sont incluses les orthèses, est à la charge de la Commission, celle-ci peut, selon la Commission d'appel, aux fins de son administration, établir une telle politique sans pour ce faire restreindre le droit du travailleur à une pleine compensation.

En effet, la politique de la Commission n'empêche pas la réalisation de l'objet de la loi qu'est la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elles entraînent pour le bénéficiaire mais l'assujettit à une procédure qu'est l'obtention d'une ordonnance du médecin.

En conséquence, la Commission d'appel considère qu'en l'absence d'une ordonnance médicale à cet effet, la Commission était bien fondée de refuser au travailleur le remboursement d'une quatrième orthèse en 1989.

POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION D'APPEL EN MATIÈRE DE LÉSIONS PROFESSIONNELLES REJETTE l'appel du travailleur, monsieur André Boily; CONFIRME pour d'autres motifs la décision rendue le 13 février 1991 par le bureau de révision de la région de Longueuil; DÉCLARE qu'en l'absence d'une ordonnance médicale, la Commission de la santé et de la sécurité du travail était bien fondée de refuser le remboursement au travailleur d'une quatrième orthèse en 1989.

Sylvie Moreau, commissaire Monsieur Daniel Thimineur (TEAMSTERS C.C. 91) 8200, rue Grenache, bureau 101 Anjou (Québec) H1J 1C5 Représentant de la partie appelante Me Lucie Rouleau (CHAYER, PANNETON, LESSARD) 25, boul. Lafayette, 5e étage Longueuil (Québec) J4K 5B7 Représentante de la partie intervenante

AVIS :
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