[1] L'appelant se pourvoit en appel d'un jugement rendu le 9 octobre 2019 par la Cour supérieure, district de Montréal (l'honorable Guylaine Duplessis), accueillant en partie son recours en annulation d'un contrat avec l'intimée pour la vente d'une voiture de luxe et condamnant cette dernière à payer des dommages punitifs de 3 000 $, ainsi que les frais judiciaires[1].
[2] L'appel porte principalement sur la question de la restitution des prestations. Plus précisément, l'appelant soutient que la juge a commis une erreur en refusant d'annuler la vente et d'ordonner la restitution, bien qu’elle ait reconnu que l'intimée avait faussement affirmé à l’appelant que la voiture n’avait jamais été impliquée dans un accident. Selon l'appelant, la juge a également commis une erreur en déclarant recevable le témoignage d'un mécanicien au sujet des réparations nécessaires à la voiture.
[3] Dans son appel incident, l'intimée soutient que la juge a erré en appliquant la Loi sur la protection du consommateur[2] (L.p.c.) à la vente, en rejetant sa demande pour le remboursement de ses honoraires extrajudiciaires et en concluant que l'appelant ne savait pas que la voiture était accidentée au moment de la vente, notamment en déplaçant le fardeau de la preuve.
[4] Lors de l'audience, l'appelant présente une demande pour preuve nouvelle indispensable, à savoir un rapport d'inspection récent relatif à la voiture ainsi qu’un document prouvant qu'il possède des fonds suffisants pour racheter la voiture afin d'être en mesure de la restituer. L'appelant est d'avis que si la Cour accueille l'appel, cette preuve sera indispensable pour éviter que l'affaire soit renvoyée à la Cour supérieure.
[5] La Cour ne partage pas l’avis de l’appelant quant au caractère indispensable de cette nouvelle preuve et, par conséquent, rejette cette demande.
I. Contexte
[6] En septembre 2015, l'appelant achète une automobile d’occasion de marque Audi, modèle R-8 auprès de l'intimée, un concessionnaire Audi agréé. Il paie 133 059,42 $, ce qui comprend les taxes et une garantie prolongée de deux ans[3]. Parmi les documents fournis à l'appelant lors de la vente figure une attestation précisant que la voiture n'a jamais été accidentée et que son odomètre indique 28 000 kilomètres[4].
[7] En janvier 2017, l’appelant obtient copie d’un rapport selon lequel la voiture aurait été impliquée dans deux accidents avant son achat[5].
[8] L'appelant envoie alors une mise en demeure à l’intimée réclamant l’annulation de la vente et offrant de lui remettre la voiture[6]. L'intimée refuse d'annuler la vente et fait parvenir à l’appelant une copie d'un autre rapport (le rapport Carproof), lequel fait état des accidents antérieurs à la vente. Selon l’intimée, le rapport Carproof a été fourni à l'appelant au moment de la vente et porte les initiales de ce dernier[7].
[9] En février 2017, l'appelant entame sa poursuite. Il demande l'annulation de la vente, la restitution des prestations et des dommages-intérêts. À ce moment, l’odomètre de la voiture indique 31 000 km.
[10] Dans le but d’obtenir du financement, l’appelant vend la voiture à Location Claireview, s.e.n.c. (Location Claireview) en juin 2017, et cette dernière la lui loue[8]. L’odomètre indique alors 35 000 km.
[11] En octobre 2018, l'appelant a un léger accident avec la voiture et réduit sa réclamation de 2 183,72 $ afin d’en tenir compte[9]. La voiture, dont l’odomètre est alors à 70 212 km, est entreposée à partir de ce moment.
II. Le jugement entrepris
[12] La juge débute son analyse en concluant que la L.p.c. s'applique à la vente. Bien que la voiture n’ait pas été immatriculée au nom de l'appelant et qu'une partie du prix d'achat n'ait pas été payée par lui personnellement, la juge estime que l'appelant a acquis la voiture pour son usage personnel.
[13] Elle conclut ensuite que l'intimée a faussement déclaré à l'appelant que la voiture n'avait jamais été accidentée alors qu'elle l’avait été à deux reprises. La juge préfère alors le témoignage de l'appelant qui nie avoir été informé des accidents à celui du représentant de l'intimée qui prétend le contraire. De plus, elle n’est pas persuadée que l’appelant avait reçu copie du rapport Carproof avant la vente.
[14] Bien que la juge ait conclu que l'appelant avait été induit en erreur par les fausses déclarations de l’intimée, elle estime que la vente ne peut être annulée, car la restitution n'est plus possible. Selon elle, l’obligation de remise en état requiert que le bien soit rendu dans l’état où il était lors de la vente à moins que la détérioration ne découle de la faute du vendeur. En l’espèce, elle conclut que l'utilisation de la voiture par l'appelant fait obstacle à la remise en état.
[15] La juge ajoute que le témoignage du mécanicien Jonathan Leblanc est admissible en preuve et établit la valeur des réparations à effectuer à 11 000 $, ce qui renforce sa conclusion voulant que la voiture ne soit plus dans la même condition qu'elle l’était au moment de la vente.
[16] La juge note qu'en l'absence de preuve concernant la dépréciation de la voiture, il est impossible de considérer des « remèdes » alternatifs, tels que la réduction des obligations de l’appelant ou la diminution du prix de vente. Elle fait cependant droit à la demande de dommages-intérêts punitifs, condamnant ainsi l'intimée à verser 3 000 $ à l'appelant.
[17] Enfin, la juge rejette la demande de remboursement des honoraires extrajudiciaires de l'intimée. Elle conclut à l’absence de mauvaise foi de la part de l'appelant dans le cadre de sa transaction avec Location Claireview.
III. Les questions soulevées par l’appel et l’appel incident
[18] Les questions soulevées par l’appel et l’appel incident ont été reformulées et seront analysées dans l’ordre suivant :
Question 1 : La juge a-t-elle erré en fait et en droit en déclarant que l’intimée avait le fardeau de la preuve quant à l’authenticité du rapport Carproof?
Question 2 : La juge a-t-elle erré en droit en concluant que la L.p.c. trouvait application en l’espèce?
Question 3 : La juge a-t-elle erré en fait et en droit en retenant le témoignage de Jonathan Leblanc, quant aux travaux devant être effectués sur la voiture?
Question 4 : La juge a-t-elle commis une erreur de fait ou de droit en concluant que la vente ne pouvait être annulée et, dans l'affirmative, quelles conséquences en découlent?[10]
Question 5 : La juge a-t-elle commis une erreur de fait ou de droit en rejetant la demande de l’intimée en dommages-intérêts?
IV. Analyse
[19] L'intimée soutient que l'appelant n'a pas été induit en erreur quant à l'état de la voiture. À cet égard, elle s'appuie largement sur le rapport Carproof qui, selon elle, a été remis à l'appelant qui l’a paraphé. La question de savoir si les initiales sur le rapport sont réellement celles de l'appelant était essentielle pour trancher cette question et les deux parties ont produit des expertises sur le sujet.
[20] L'intimée soutient que la juge a commis une erreur de droit en statuant que le fardeau de démontrer que les initiales sont celles de l'appelant lui incombait. En outre, l'intimée soutient que la juge a erré en concluant qu'aucun des deux experts n'a été convaincant puisque l’opinion de son expert était définitive alors que celle de l'expert de l'appelant ne l'était pas.
[21] Ce moyen ne peut être retenu.
[22] D'une part, le rapport Carproof produit par l'intimée est un document sous seing privé, dont l'authenticité a été contestée[11]. Par conséquent, comme la juge le note à juste titre, il incombe à la partie qui invoque le document, soit l'intimée, de prouver son authenticité[12].
[23] Par ailleurs, la conclusion de la juge concernant l'authenticité du rapport Carproof et la force probante des expertises, y compris son évaluation de la crédibilité des experts, est pleinement expliquée et est solidement ancrée dans la preuve. L'intimée n’identifie aucune erreur manifeste et déterminante dans cet aspect du jugement entrepris. Elle invite la Cour à examiner la preuve et à substituer son appréciation à celle de la juge, ce qui n'est pas le rôle d'une cour d'appel[13].
[24] L'intimée soutient que la juge a erré en concluant que la L.p.c. s'applique au contrat de vente. Selon elle, le fait que la voiture était immatriculée au nom d'une société affiliée à l'appelant et que des paiements ont été effectués en son nom par cette société indique que l'acheteur n'est pas un consommateur et que la voiture n'a pas été achetée pour son usage personnel.
[25] Or, la juge identifie correctement la question juridique à trancher, à savoir si la voiture a été achetée par un consommateur pour son usage personnel[14]. Ensuite, suivant son analyse de la preuve, la juge conclut que celle-ci a été achetée pour l'usage personnel de l'appelant, ce qui est conforme à une stipulation à cet effet prévue dans le contrat de vente[15].
[26] Comme la juge s'est correctement dirigée en droit et que l’intimée n’identifie aucune erreur de fait manifeste et déterminante dans son analyse, la Cour n'interviendra pas. Il y a lieu d'ajouter, comme le souligne la juge, qu’en ce qui concerne l’annulation de la vente, l'application de la L.p.c. n'est pas déterminante en l’espèce puisque les fausses déclarations de l'intimée auraient mené au même résultat en vertu du Code civil du Québec[16].
[27] L'appelant soutient que la juge a commis une erreur en retenant le témoignage du mécanicien Jonathan Leblanc, qui a fait état des travaux à effectuer sur la voiture et a estimé le coût de ces travaux à 11 000 $. Selon lui, M. Leblanc, qui n'a pas été qualifié d’expert par la juge, ne pouvait légalement témoigner sur les réparations à effectuer.
[28] L'appelant se trompe. M. Leblanc n’a pas exprimé d'opinion quant aux travaux requis. Son témoignage concernant la nécessité de réparer les freins et la transmission était basé sur les témoins lumineux du tableau de bord de la voiture. En ce qui a trait à l’estimation, un témoin peut exprimer son opinion dans un domaine d'activité qu'il connaît bien lorsque son explication ou sa description ne nécessite pas de connaissances particulières et techniques pour être comprise[17]. La juge était en mesure d'évaluer l'expérience de celui-ci et d'apprécier le poids de son témoignage. L'appelant ne relève aucune erreur manifeste et déterminante dans son appréciation du témoignage de M. Leblanc et, par conséquent, ce moyen ne peut être retenu.
4.1 La juge a-t-elle commis une erreur?
[29] L'intimée soutient que la juge n'a commis aucune erreur en refusant d'annuler la vente. Selon elle, le comportement de l'appelant, notamment sa décision de continuer à utiliser la voiture après avoir demandé l’annulation de la vente, est incompatible avec les règles de la restitution, ce qui justifiait le refus de la demande d'annulation.
[30] La Cour n’est pas de cet avis.
[31] La juge débute l’analyse de cette question en affirmant que le consentement de l'appelant à la vente de la voiture a été vicié par les fausses déclarations de l'intimée et que cette erreur est déterminante[18]. Elle affirme ensuite qu’avant d’ordonner la nullité de la vente, il y a lieu de s’assurer que la restitution soit possible. Or, avec respect, c’est ici que la juge fait fausse route. La restitution est la conséquence de l'annulation du contrat; elle n'est pas une condition de son exercice[19].
[32] La restitution des prestations a lieu « chaque fois » qu’un acte juridique est anéanti de façon rétroactive[20]. Ce n’est qu’exceptionnellement que le Tribunal peut refuser la restitution ou ajuster ses modalités lorsqu’elle aurait pour effet d’accorder, à l’une des parties, un avantage indu[21].
[33]
Avant d’envisager la possibilité de refuser la restitution, le tribunal doit
examiner les différentes modalités pour l’effectuer[22].
Ces modalités, énoncées aux articles
[34] La juge conclut que la restitution n’est pas possible en l’espèce, car l’utilisation de la voiture par l’appelant rend la remise en état impossible. Or, le fait de continuer à utiliser la chose vendue, même après la connaissance de la cause d’annulation, ne fait pas nécessairement obstacle à la restitution. Les principes régissant la restitution permettent de prendre en considération une telle utilisation[23].
[35] Il en découle que l'appelant n'était pas tenu de cesser d'utiliser la voiture et de la remettre immédiatement dans l'état où elle se trouvait au moment de la vente afin de préserver son recours à l’annulation. À cet égard, il convient de noter que la décision de la Cour dans Nichols c. Toyota Drummondville (1982) inc.[24], sur laquelle s'appuie la juge, a été rendue suivant le Code civil du Bas-Canada et n’est pas entièrement cohérente avec les règles actuellement en vigueur en matière de restitution, lesquelles sont prévues dans le Code civil du Québec.
[36] Ayant déterminé que la restitution était impossible, la juge n'a pas pleinement considéré les différentes modalités qui pouvaient s'appliquer. Puisque la preuve est disponible pour permettre cette analyse, il est dans l'intérêt d'une gestion efficace des ressources judiciaires que la Cour l’entreprenne, plutôt que de retourner le dossier à la Cour supérieure[25].
4.2 Application des règles de la restitution
[37] Lors de l'audience, les deux parties ont abordé la question de savoir comment les modalités de la restitution pouvaient s’appliquer en l'espèce. Plus précisément, elles ont chacune présenté leur point de vue quant au montant de la restitution due par l'intimée compte tenu de l'utilisation de la voiture par l'appelant. Dans leurs commentaires, elles ont abordé l'application possible des articles 1699 al. 2, 1702 et 1704 C.c.Q., qui sont libellés ainsi :
1699. La restitution des prestations a lieu chaque fois qu’une personne est, en vertu de la loi, tenue de rendre à une autre des biens qu’elle a reçus sans droit ou par erreur, ou encore en vertu d’un acte juridique qui est subséquemment anéanti de façon rétroactive ou dont les obligations deviennent impossibles à exécuter en raison d’une force majeure. |
1699. Restitution of prestations takes place where a person is bound by law to return to another person the property he has received, either without right or in error, or under a juridical act which is subsequently annulled with retroactive effect or whose obligations become impossible to perform by reason of superior force.
|
Le tribunal peut, exceptionnellement, refuser la restitution lorsqu’elle aurait pour effet d’accorder à l’une des parties, débiteur ou créancier, un avantage indu, à moins qu’il ne juge suffisant, dans ce cas, de modifier plutôt l’étendue ou les modalités de la restitution.
|
The court may, exceptionally, refuse restitution where it would have the effect of according an undue advantage to one party, whether the debtor or the creditor, unless it considers it sufficient, in that case, to modify the scope or modalities of the restitution instead. |
1702. Lorsque le bien qu’il rend a subi une perte partielle, telle une détérioration ou une autre dépréciation de valeur, celui qui a l’obligation de restituer est tenu d’indemniser le créancier pour cette perte, à moins que celle-ci ne résulte de l’usage normal du bien. |
1702. Where the property he returns has suffered partial loss, for example a deterioration or any other depreciation in value, the person who is obligated to make restitution is bound to indemnify the creditor for such loss, unless it results from normal use of the property.
|
1704. Celui qui a l’obligation de restituer fait siens les fruits et revenus produits par le bien qu’il rend et il supporte les frais qu’il a engagés pour les produire. Il ne doit aucune indemnité pour la jouissance du bien, à moins que cette jouissance n’ait été l’objet principal de la prestation ou que le bien était susceptible de se déprécier rapidement. |
1704. The fruits and revenues of the property being returned belong to the person who is bound to make restitution, and he bears the costs he has incurred to produce them. He owes no indemnity for enjoyment of the property unless that was the primary object of the prestation or unless the property was subject to rapid depreciation.
|
Cependant, s’il est de mauvaise foi, ou si la cause de la restitution est due à sa faute, il est tenu, après avoir compensé les frais, de rendre ces fruits et revenus et d’indemniser le créancier pour la jouissance qu’a pu lui procurer le bien. |
If the person who is bound to make restitution is in bad faith or if the cause of the restitution is due to his fault, he is bound, after compensating for the costs, to return the fruits and revenues and indemnify the creditor for any enjoyment he has derived from the property. |
[38] Selon l'appelant, au-delà du coût des réparations nécessaires à la suite de son accident (2 183,72 $), rien ne justifie que l'intimée ne soit pas tenue de restituer l'intégralité du prix de vente de 133 059,42 $.
[39]
Il soutient d’abord que l’article
[40]
Quant à l'article
[41]
Enfin, l'appelant fait valoir que si la Cour était encline à exercer la
discrétion prévue à l'article
[42] Selon l’intimée, la Cour doit déduire non seulement le coût de la garantie prolongée, qui est compris dans le prix de vente de la voiture (4 362,15 $) et le coût des réparations à la suite de l'accident de l’appelant (2 183,72 $), mais aussi la portion du prix de vente qui n'a pas été payée personnellement par l'appelant, soit un total de 49 085,47 $[26].
[43]
En outre, l'intimée fait valoir que, suivant l’article
[44] Les différentes modalités de la restitution énoncées dans le Code civil du Québec ne sont pas exclusives les unes des autres. Plus d'une modalité peut s'appliquer dans une situation donnée.
[45]
En l'espèce, il est vraisemblable que l'usage de la voiture par
l'appelant a entraîné une certaine perte de valeur. Si cet usage avait été jugé
supérieur à la normale au sens de l’article
[46]
Par ailleurs, contrairement à ce que soutient l'appelant, dès qu'il a
su, en janvier 2017, qu'il avait des motifs d'annuler la vente, il était de
mauvaise foi au sens de l'article 1704 C.c.Q.[28].
Dans ce contexte particulier, le terme « mauvaise foi » doit être
compris dans le sens où il est employé à l'article
[47] Les termes du contrat de location avec Location Claireview ne reflètent pas parfaitement la valeur que représente la jouissance de la voiture par l'appelant. Par exemple, les paiements mensuels de 1 649,89 $ ont été calculés sur la base d'une estimation de la valeur de la voiture qui était probablement trop basse[29]. De plus, les mensualités sont calculées en tenant compte d'un dépôt de 5 000 $[30]. Toutefois, malgré ces particularités, la Cour estime que le contrat de location avec Location Claireview constitue une assise rationnelle pour le calcul de l'indemnité due par l'appelant pour la jouissance de la voiture. Par conséquent, la Cour déduira un montant de 34 647,69 $ du prix d'achat, soit 1 649,89 $ par mois pour les 21 mois entre la mise en demeure du 2 février 2017[31] et le 11 octobre 2018, date à laquelle la voiture est entreposée.
[48] En outre, la Cour estime qu'il y a lieu d'inclure les frais d'entretien et de réparation dans l'indemnité à laquelle l'intimée a droit en raison de la jouissance de la voiture par l'appelant. Cette conclusion est conforme au contrat de location avec Location Claireview, lequel prévoit que l'entretien et les réparations de la voiture sont à la charge de l'appelant[32]. En conséquence, la Cour ajoutera la somme de 11 000 $ pour les réparations devant être effectuées sur la voiture[33].
[49] La Cour convient avec l'intimée que le coût de la garantie prolongée doit être déduit du prix de vente. Qu'il l'ait invoquée ou non, l'appelant a bénéficié de la garantie pendant toute sa durée et ne peut plus la restituer à l'intimée[34].
[50] Toutefois, la Cour n'est pas d’avis que les montants payés par la société affiliée à l'appelant doivent être déduits du prix de vente. Peu importe qui a payé ces montants, le contrat a été conclu entre l'appelant et l'intimée et c'est entre eux que la restitution doit être effectuée.
[51] Compte tenu de l'indemnité à laquelle l’intimée a droit pour la jouissance de la voiture par l'appelant (45 647,69 $[35]), de la déduction de la garantie prolongée (4 362,15 $) et de la réduction volontaire de l'appelant en raison de son accident (2 183,72 $), l'intimée doit restituer à l’appelant la somme de 80 865,86 $.
[52]
L'intimée fait valoir que la restitution conférerait un avantage indu à
l'appelant et que, par conséquent, la Cour devrait exercer le pouvoir
discrétionnaire que lui confère l'article
[53]
Il va sans dire que l'application de l'article
[54]
Il incombe à la partie qui invoque l'exception prévue à l'article
[55]
Par ailleurs, il convient de noter que l'application de l'article
[56] Enfin, l'intimée fait valoir que la restitution ne peut être ordonnée puisque l'appelant n'est plus propriétaire de la voiture, l'ayant vendue à Location Claireview.
[57] Si l'aliénation de la chose vendue peut rendre impossible la restitution en nature, ce n'est pas le cas en l'espèce[39]. La preuve démontre que Location Claireview s'engage à remettre la voiture à l'appelant dès paiement d'une somme convenue, de sorte que la vente n'est pas un obstacle à la restitution[40].
[58] L'intimée soutient que la juge a commis une erreur en refusant sa demande pour le remboursement de ses honoraires extrajudiciaires. Selon l'intimée, l'appelant a été de mauvaise foi en ne révélant que très tardivement le fait que la voiture n'était pas entreposée et qu'elle avait été vendue à Location Claireview. Cela a obligé l'intimée à modifier ses procédures et à faire des préparations de dernière minute pour le procès, dont le coût était une conséquence directe de la mauvaise foi de l'appelant.
[59] L’abus d’ester en justice est une question de fait qui doit être analysée en fonction des circonstances propres à chaque cas. Les tribunaux disposent d'un large pouvoir discrétionnaire pour déterminer si le comportement d'une partie est abusif ou non et la Cour n'interviendra que s'il est démontré que le juge a commis une erreur manifeste et déterminante[41].
[60] En ce qui concerne la transaction avec Location Claireview, la juge a déterminé qu'elle a été conclue uniquement à des fins de financement et qu'elle n'empêchait pas l'appelant de demander l'annulation de la vente. Par conséquent, elle n'a pas accordé à la question de la divulgation tardive l’importance qu’a suggérée l’intimée. Quoi qu'il en soit, l'intimée ne fait état d'aucune erreur manifeste et déterminante dans la détermination de la juge que l'appelant n'était pas de mauvaise foi. Par conséquent, il n’y a pas lieu pour la Cour d'intervenir.
POUR CES MOTIFS, LA COUR :
[61] ACCUEILLE en partie l'appel à la seule fin de REMPLACER le paragraphe 106 du jugement entrepris par les paragraphes suivants :
106.1 ACCUEILLE la demande;
106.2 ANNULE la vente de la voiture de marque Audi, modèle R8 5.2 Quattro, année 2010, numéro de série WUAANAFG3AN000372 (la Voiture), intervenue le 10 septembre 2015 entre la défenderesse, Prestige Gabriel Ouest, S.E.C. (DDO) et le demandeur, Frédéric Murray (Pièce P-3);
106.3 ORDONNE au demandeur de restituer la Voiture à la défenderesse dans les trente (30) jours du présent jugement;
106.4 CONDAMNE la défenderesse à payer au demandeur la somme de quatre-vingt mille huit cent soixante-cinq dollars et quatre-vingt-six cents (80 865,86 $) à titre de restitution du prix de vente de la Voiture, avec l’intérêt au taux légal depuis le 3 février 2017;
106.5 ORDONNE au demandeur de remettre la Voiture à la défenderesse, sur réception du paiement des montants accordés dans le présent jugement;
[62] REJETTE l'appel incident;
[63] REJETTE la demande pour autorisation de présentation d’une preuve nouvelle indispensable et pour abréger les délais de présentation;
[64] LE TOUT avec les frais de justice tant en première instance qu’en appel.
[1]
Murray c. Prestige Gabriel Ouest,
[2] RLRQ, c. P-40.1.
[3] Pièce P-3.
[4] Pièce P-4.
[5] Pièce P-5.
[6] Pièce P-7.
[7] Pièce P-8.
[8] Pièce P-13.
[9] Pièce P-17 et Demande introductive d’instance modifiée de l’appelant, paragr. 35.
[10] Cette question regroupe les premier et deuxième moyens du pourvoi de l'appelant.
[11]
Art.
[12]
Bien que l’appelant ne semble pas avoir suivi la procédure prévue à
l’article
[13]
Housen c. Nikolaisen,
[14]
Art.
[15] Pièce P-3.
[16] Jugement entrepris, supra, note 1, paragr. 35, 36, 37, 76 et 77.
[17]
Laval (Ville de) (Service de protection des citoyens, département de
police et centre d’appels d’urgence 911) c. Ducharme,
[18]
Soit par l’effet de la présomption créée par l’art.
[19]
Art.
[20]
Art.
[21]
Art.
[22] Octane, supra, note 21, paragr. 44.
[23]
Voir en particulier les articles
[24]
Nichols c. Toyota Drummondville (1982) inc.,
[25]
Cousineau c. Intact, compagnie d’assurances,
[26] Le dépôt de 25 000 $ et les paiements effectués à Crédit VW totalisant 24 085,47 $.
[27] Pièce P-13.
[28]
Didier Lluelles et Benoît Moore, Droit des obligations, 3 éd.,
Montréal, Thémis, 2018, paragr. 1277; Katheryne A. Desfossés, "Commentaire
sur l'article
[29] Témoignage de Maurice Kaspy de Location Claireview.
[30] Pièce P-13.
[31] Pièce P-7.
[32] Pièce P-13, paragr. 15.
[33] Selon l’estimation de M. Leblanc.
[34] La garantie prolongée était en vigueur jusqu’au 17 février 2017 (Pièce P-3).
[35] 34 647,69 $ + 11 000 $.
[36] Octane, supra, note 21, paragr. 43; Voir aussi Pascal Fréchette, La restitution des prestations, Montréal, Yvon Blais, 2018, p. 440.
[37]
Octane, supra, note 21, citant Rouleau c. Canada (Procureur
général),
[38]
Il est à noter que si le juge du fond s’abstient d’exercer la discrétion
conférée par l’art.
[39]
Art.
[40] Jugement entrepris, supra, note 1, paragr. 27 et Pièce P-14.
[41]
Hinse c. Canada (Procureur général),