LA COMMISSION D'APPEL EN MATIERE DE LESIONS PROFESSIONNELLES QUEBEC MONTREAL, le 19 février 1991 DISTRICT D'APPEL DEVANT LA COMMISSAIRE: Anne Leydet DE MONTREAL REGION: Abitibi/ Témiscamingue DOSSIER: 15984-08-8912 DOSSIER CSST: 9961 937 AUDIENCE TENUE LE: 4 septembre 1990 A: Val d'Or Minerais Lac Ltée (Mine Doyon) a/s M. Raymond Vermette Case postale 970 Rouyn-Noranda, (Québec) J9X 5C8 PARTIE APPELANTE et M. André Meilleur 193, chemin St-Luc La Motte, (Québec) J0Y 1T6 PARTIE INTERESSEE D E C I S I O N L'employeur, Minerais Lac Ltée (Mine Doyon), en appelle le 18 décembre 1989 auprès de la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d'appel), d'une décision du bureau de révision d'Abitibi-Témiscamingue rendue le 30 novembre 1989, laquelle confirme la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la Commission), le 8 novembre 1988.Par cette dernière décision, la Commission accueille la plainte faite en vertu de l'article 32 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles1 par monsieur André Meilleur, le travailleur. La Commission ordonne à l'employeur de verser au fonds de retraite, l'équivalent de 4% du salaire brut du travailleur pour la période du 13 mai au 22 mai 1988.
OBJET DE L'APPEL L'employeur demande à la Commission d'appel d'infirmer la décision du bureau de révision, et de rejeter la plainte formulée par le travailleur, en vertu de l'article 32 de la loi.
LES FAITS Le travailleur a été victime, le 13 mai 1988, d'un accident du travail au sens de la loi, alors qu'il était à l'emploi de l'employeur. Il est retourné au travail le 22 mai 1988.
En tous temps pertinents à la présente affaire, le travailleur bénéficiait de conditions de travail régies par une convention collective de travail intervenue le 12 février 1987, entre l'employeur et le Syndicat des métallurgistes unis d'Amérique, local 9019.
En vertu de l'article 16.14 de la convention, «les modalités du régime d'assurance-groupe et du régime de retraite apparaissent en annexe à la convention». L'annexe «C» de la convention fait bénéficier le travailleur d'un régime de retraite auquel l'employeur cotise «4% du salaire que l'adhérent aura gagné au cours de chaque année de participation au régime». Il n'y a aucune cotisation obligatoire de la part du travailleur. Il est à noter que dans le document intitulé «Généralités sur les régimes de rentes, deuxième partie» on lit entre autres ce qui suit à la rubrique «arrêt de travail»: «Si vous touchez une rémunération durant la période d'absence, vos cotisations et vos crédits de rentes continueront de la même façon que si vous étiez au travail. Si vous ne touchez pas de rémunération, vos cotisations ne seront pas requises et les cotisations de la compagnie seront également interrompues durant la période d'absence.» Le 10 juin 1988, le travailleur, par la voie de son représentant à la prévention, demande à l'employeur de contribuer la cotisation de 4% de son salaire au régime de retraite pour la période du 13 mai au 22 mai 1988.
Vu le refus de l'employeur, le travailleur fait une plainte le même jour auprès de la Commission en vertu de l'article 32 de la loi, se disant l'objet de mesures discriminatoires.
Les parties admettent la véracité du témoignage offert par monsieur Albert G. Lafrenière, surintendant aux ressources humaines pour l'employeur, lors de l'audience tenue le 24 octobre 1989 devant le bureau de révision.
Monsieur Lafrenière a alors témoigné que tous les travailleurs qui s'absentent pour quelque raison, ne voient aucune somme versée dans leur fonds de pension puisqu'ils ne gagnent alors aucun salaire, et que le fonds de pension est établi en fonction du salaire brut.
ARGUMENTATION DES PARTIES Le procureur de l'employeur soumet que le travailleur n'a aucunement fait l'objet de mesures discriminatoires, le régime de retraite s'appliquant à tous les employés absents, que ce soit pour cause de maladie personnelle ou d'accident du travail, de la 1 L.R.Q., chapitre A-3.001 même façon.
Il soutient par ailleurs que, contrairement à ce qu'en pense le travailleur, l'article 235 de la loi a été respecté. Cette disposition prévoit ce qui suit: 235. Le travailleur qui s'absente de son travail en raison de sa lésion professionnelle: 1 continue d'accumuler de l'ancienneté au sens de la convention collective qui lui est applicable et du service continu au sens de cette convention et au sens de la Loi sur les normes du travail (chapitre N-1.1); 2 continue de participer aux régimes de retraite et d'assurances offerts dans l'établissement, pourvu qu'il paie sa part des cotisations exigibles, s'il y a lieu, auquel cas son employeur assume la sienne.
Le présent article s'applique au travailleur jusqu'à l'expiration du délai prévu par le paragraphe 1 ou 2 , selon le cas, du premier alinéa de l'article 240.
Malgré son absence du travail en raison d'une lésion professionnelle, un travailleur continuera, en vertu de cet article, à participer au régime de retraite offert dans l'établissement.
Voilà le grand principe imposé par le législateur à cet article, et que les employeurs doivent respecter depuis l'avènement de la loi. C'est le cas en l'espèce.
La loi impose comme condition au maintien de la participation au régime de retraite, le paiement par le travailleur, de sa part des cotisations s'il y a lieu. Mais le travailleur n'est pas requis, en vertu du régime sous étude, de payer de telles cotisations. La condition d'application de l'article 235 est donc respectée.
L'employeur doit alors en vertu de l'article 235, continuer d'assumer sa part des cotisations exigibles pendant l'absence.
La cotisation exigible de l'employeur en vertu du régime de retraite est, en l'espèce, de 4% du salaire brut.
Il faut entendre par l'expression «salaire brut», la rémunération gagnée en contrepartie d'un travail.
Le travailleur n'ayant pas travaillé entre le 13 et le 22 mai 1988, il n'a pas reçu de salaire, et donc le calcul, à effectuer, pour déterminer la cotisation exigible est de 4% X 0.00$ = 0.00$.
Le procureur de l'employeur plaide que l'indemnité de remplacement de revenu prévue à la loi ne constitue pas du salaire.
Le procureur plaide que l'employeur respecte la lettre de l'article 235 de la loi, mais vu le régime particulier en l'espèce, cela n'a pas pour effet de donner droit au travailleur à une contribution à son fonds de retraite pendant son absence.
Non pas parce que l'employeur a ignoré la loi, mais plutôt parce que les dispositions du régime particulier dont il est le détenteur, ne permettent pas le résultat escompté par le travailleur.
Dans l'hypothèse où le régime avait prévu que la cotisation de l'employeur serait de 18.00$ par semaine, ou encore la moyenne du salaire des cinq meilleures années, il en serait peut-être autrement.
Mais le régime de retraite en l'espèce utilise plutôt la notion de salaire brut. Or, l'article 235 ne peut être interprété comme ayant pour effet de modifier les clauses d'un régime privé. Une telle interprétation ne pourrait être fondée que sur la seule inférence d'une intention implicite du lé-gislateur à cet effet.
Or, pour déroger au droit commun, soit l'existence et l'application de régimes privés dont l'interprétation se fait suivant le Code civil, il faudrait que l'article 235 s'exprime expressément sur le sujet. Ainsi, il faudrait pouvoir dire à l'article 235 que les régimes privés de retraite, doivent, nonobstant les clauses qui y prévalent, obliger l'employeur à faire une contribution au fonds de retraite pendant l'absence du travailleur. Ce serait ajouter à l'article 235, une disposition qui ne s'y trouve aucunement.
S'il fallait comprendre de l'article 235 que le législateur oblige l'employeur à faire une contribution en tout temps au fonds de retraite, le procureur de l'employeur ne voit pas, en l'absence de plus amples indications, sur quelle base de calcul cette contribution devrait être faite. Quatre pour cent de quoi? De l'indemnité de remplacement de revenu? Du salaire que le travailleur aurait normalement gagné n'eût été de son absence? L'impossibilité de répondre à ces questions démontre bien que l'article 235 ne peut recevoir l'interprétation que recherche le travailleur.
Il faut donc conclure que l'article 235 de la loi a été respecté par l'employeur, et que le travailleur n'a pas, par ailleurs, subi de mesures discriminatoires en raison de la façon dont l'employeur applique les modalités du régime de retraite.
Le procureur du travailleur soumet que l'employeur ne peut prétendre que le travailleur n'a pas fait l'objet de mesures discriminatoires. En effet, l'employeur a peut-être traité tous ses employés absents - que ce soit pour maladie ou accident - de la même façon... mais il l'a fait à l'encontre de la loi.
Il rappelle que la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles déroge effectivement au droit commun.
On ne peut donc se surprendre si l'article 235 astreint l'employeur, détenteur d'un régime de retraite, à des conditions qui ne sont pas, par ailleurs, spécifiquement prévues aux modalités du régime.
Le procureur du travailleur signale également que la loi est, en vertu de son article 4, d'ordre public, et qu'une convention collective ne peut prévoir des dispositions moins avantageuses que celles prévues à la loi.
L'employeur devait contribuer 4% du salaire brut, indépendemment de l'absence du travailleur en raison de sa lésion professionnelle. Et il pouvait le faire.
S'il y a une ambiguïté dans le texte de la loi concernant la méthode de calcul de la cotisation, on doit alors utiliser comme base de calcul le salaire que le travailleur aurait normalement gagné pendant la période d'absence.
Même si l'article 60 de la loi parle du versement, par l'employeur, d'une «indemnité de remplacement de revenu», il n'en reste pas moins que cette indemnité est constituée du salaire que le travailleur aurait normalement gagné. Il en est de même aux articles 59 et 61 de la loi.
L'article 235, premier alinéa, prévoit que le travailleur continue d'accumuler de l'ancienneté au sens de la convention collective. C'est donc dire que le législateur considère le travailleur accidenté, comme s'il n'avait jamais cessé de travailler.
L'article 235, second alinéa, prévoit que le travailleur continue de participer au régime de retraite. Il faut donner au mot participer son sens actif, et en déduire que le législateur n'a pas seulement voulu assurer le maintien du statut d'adhérent du travailleur, mais également garantir la remise des cotisations au régime de retraite. Pour ce faire, le législateur traite le travailleur, comme s'il avait continué de travailler pendant son absence. Cette fiction juridique permet de calculer la cotisation en l'espèce, sur la base du salaire brut qui aurait normalement été gagné. Elle oblige aussi les employeurs à traiter les travailleurs absents pour accident du travail sur un pied d'égalité avec les travailleurs présents au travail.
Le régime de retraite de l'employeur prévoit qu'aucune cotisation n'est versée pendant la période où un travailleur s'absente, entre autres en raison d'une lésion professionnelle. Cela va à l'encontre de l'article 235 de la loi, qui est d'ordre public, et constitue une mesure discriminatoire envers les travailleurs absents en raison d'une lésion professionnelle.
Les parties demandent à la Commission d'appel de se prononcer sur les questions soulevées par le présent débat en faisant les distinctions qui, le cas échéant, pourraient être faites entre le premier jour d'incapacité (article 59), les quatorze jours qui suivent, et la période d'absence à compter du quinzième jour d'incapacité.
MOTIFS DE LA DECISION La Commission d'appel doit déterminer si le travailleur a été victime d'une mesure prohibée par l'article 32 de la Loi sur les accidents du travail et le maladies professionnelles.
Cet article édicte ce qui suit 32. L'employeur ne peut congédier, suspendre ou déplacer un travailleur, exercer à son endroit des mesures discriminatoires ou de représailles ou lui imposer toute autre sanction parce qu'il a été victime d'une lésion professionnelle ou à cause de l'exercice d'un droit que lui confère la présente loi.
Le travailleur qui croit avoir été l'objet d'une sanction ou d'une mesure visée dans le premier alinéa peut, à son choix, recourir à la procédure de griefs prévue par la convention collective qui lui est applicable ou soumettre une plainte à la Commission conformément à l'article 253.
Le travailleur reproche à l'employeur de ne pas avoir cotisé au régime de retraite quatre pour cent de la somme qu'il aurait gagnée, à titre de salaire, s'il avait travaillé durant sa période d'absence en raison d'une lésion professionnelle.
Le régime de retraite détenu par l'employeur prévoit que celui-ci sera tenu de verser une cotisation au cours de chaque année contractuelle, pour chaque adhérent, qui est égale à «4% du salaire que l'adhérent aura gagné au cours de chaque année de participation au régime».
L'employeur interprète l'expression «salaire gagné» comme signifiant la rémunération brute versée au travailleur en contrepartie d'une prestation de travail fournie par celui-ci.
Tout comme dans l'affaire Baker et Coopérative fédérée du Québec, CALP 12827-63-8906, 1990-01-24, 90T-435, ni le travailleur, ni le syndicat qui le représente, ne contestent vraiment cette interprétation, puisqu'ils admettent que c'est le sens à donner aux mots «salaire gagné» lorsqu'il s'agit de calculer la cotisation des travailleurs absents, pour des motifs autres qu'un accident de travail, et qui ne sont pas rémunérés.
D'ailleurs, la signification courante donnée à l'expression «salaire gagné» est effectivement celle conférée par l'employeur.
On peut lire, dans le Dictionnaire canadien des relations de travail, P.U.L. , 1986, 2e éd., que le mot «salaire» signifie la «prestation versée par l'employeur au salarié en contrepartie de son travail». Si ce salaire a été «gagné», c'est que le travailleur a exécuté une prestation de travail, en contrepartie de laquelle il a droit à une rémunération.
Donc, pour un travailleur absent en raison d'un accident de travail survenu chez l'employeur en cause, ce dernier effectue, pour la période d'absence, le calcul suivant: 4% X 0 = 0.
Le sens courant attribué par le Petit Robert au mot «discrimination», est le suivant: «Le fait de séparer un groupe social des autres en le traitant plus mal. Cette loi s'applique à tous sans discrimination façon égalitaire.» En l'espèce, tous les travailleurs qu'ils soient au travail, ou absents pour maladie ou accident, sont traités de la même façon: on calcule la cotisation de l'employeur, devant être contribuée au fonds de retraite, selon une seule et même méthode, applicable à tous, soit un pourcentage du salaire gagné.
La Commission d'appel ne peut donc conclure que le travailleur a été l'objet d'une mesure discriminatoire imposée par l'employeur.
Le Petit Robert définit ainsi le terme «représailles»: 1 Mesure de violence, illicite en soi, que prend un Etat pour répondre à un acte également illicite (violation du droit des gens) accompli par un autre Etat.
2 Par ext. Se dit de toute riposte individuelle à un mauvais procédé.
Le mot «sanction» signifie, dans le sens courant, «peine établie pour réprimer un acte».
La méthode de calcul prévue au régime de retraite constitue-t- elle une sanction ou une mesure de représailles, à l'encontre du fait que le travailleur ait été victime d'une lésion professionnelle, ou ait exercé un droit en vertu de la loi, en l'occurrence le droit implicite de s'absenter du travail en raison d'une telle lésion? La méthode de calcul prévue au régime de retraite ne dépend ni de la survenance de l'accident, ni de l'absence du travail due à l'accident. Cette méthode de calcul est basée strictement sur l'existence d'une rémunération. Ainsi, il appert des documents au dossier que si le travailleur touche une rémunération pendant une période d'absence, les cotisations continuent.
La Commission d'appel ne voit donc pas en quoi le calcul opéré par l'employeur constitue une sanction ou mesure de représailles, imposée parce que le travailleur a subi une lésion professionnelle, et s'est absenté en conséquence de son travail.
La conclusion pourrait être différente si, à titre d'exemple, le régime de retraite prévoyait, règle générale, le versement par l'employeur d'une somme de 15$ par semaine et que, dans une clause particulière, il soit stipulé que ce versement n'a pas à être fait pendant les périodes d'absence du travail. Il pourrait alors être argué qu'une telle clause a comme effet de sanctionner l'absence due à un accident du travail, et viole ainsi l'article 32 de la loi.
Ce n'est pas le cas en instance.
Toutefois, le travailleur plaide que l'article 235 de la loi a pour effet d'obliger l'employeur à verser sa cotisation, sur la base de quatre pourcent du salaire qu'il aurait normalement gagné, n'eût été de l'accident du travail.
Si cela est vrai, le travailleur, parce qu'il a été victime d'un accident de travail, aura donc été pénalisé par le refus de l'employeur d'obtempérer à la loi, ce qui est un geste illicite en soi.
Il convient donc d'examiner de plus près l'article 235 de la loi, qui prévoit ce qui suit: 235. Le travailleur qui s'absente de son travail en raison de sa lésion professionnelle: 1 continue d'accumuler de l'ancienneté au sens de la convention collective qui lui est applicable et du service continu au sens de cette convention et au sens de la Loi sur les normes du travail (chapitre N-1.1); 2 continue de participer aux régimes de retraite et d'assurances offerts dans l'établissement, pourvu qu'il paie sa part des cotisations exigibles, s'il y a lieu, auquel cas son employeur assume la sienne.
Le présent article s'applique au travailleur jusqu'à l'expiration du délai prévu par le paragraphe 1 ou 2 , selon le cas, du premier alinéa de l'article 240.
En l'espèce, le travailleur n'a pas à payer «sa part des cotisations exigibles». Mais l'employeur, lui, doit assumer «la sienne», c'est-à-dire assumer sa part des «cotisations exigibles». Il faut donc se demander, quelle est la cotisation exigible en vertu du régime de retraite? Il faut comprendre qu'il s'agit de la cotisation normalement versée, par l'employeur, pour le bénéfice d'un travailleur lorsque celui-ci est au travail.
Reprenons l'hypothèse où, en vertu de son régime de retraite l'employeur doit payer, à titre de cotisation, 15$/semaine par employé au fonds de retraite. Assumons par ailleurs qu'il existe une clause d'exception prévoyant qu'en cas d'absence du travail, l'employeur n'a pas à effectuer ce paiement hebdomadaire. Cette clause devient inopérante en raison de l'application de l'article 235, qui est d'ordre public. En effet, l'employeur a l'obligation de payer la cotisation habituelle, qui est de 15.00$ par semaine.
Dans le cas présent, la cotisation habituelle est de 4% du salaire gagné.
L'article 59 de la loi oblige l'employeur à verser au travailleur son salaire pour la journée au cours de laquelle le travailleur devient incapable d'exercer son emploi. Ce salaire ne fait pas l'objet d'un remboursement par la Commission, et n'est pas considéré comme étant une indemnité de remplacement de revenu prévue par la loi. C'est donc du salaire «gagné» par le travailleur par l'effet de la loi, et l'employeur devra cotiser 4% du brut, au fonds de retraite, pour cette première journée.
Il en est de même dans le cas de l'article 61, où l'employeur doit verser au travailleur son salaire, malgré l'absence de celui-ci pour recevoir des soins ou subir des examens médicaux.
Dans le cas de l'article 60, l'employeur verse au travailleur 90% de son salaire net, pour chaque jour ou partie de jour où le travailleur aurait normalement travaillé, n'eût été de son incapacité, pendant les 14 jours complets suivant le début de son incapacité.
Selon l'article 62, le salaire net du travailleur est égal à son salaire brut moins certaines retenues à la source, et aux fins de l'article 60, le salaire brut est pris en considération jusqu'à concurrence du maximum annuel assurable.
Le montant résultant des calculs ci-haut mentionnés, représente, selon l'article 60, l'indemnité de remplacement de revenu à laquelle le travailleur a droit pour les quatorze premiers jours.
Par la suite, le travailleur se voit verser par la Commission une indemnité de remplacement de revenu à compter du quinzième jour d'incapacité, en vertu de l'article 124 de la loi.
L'indemnité de remplacement du revenu constitue une compensation pour remplacer le revenu perdu à cause de l'absence due à la lésion professionnelle. Le travailleur ne plaide pas qu'il s'agit là d'un «salaire» sur la base duquel devrait être calculée la cotisation de l'employeur. Il soumet plutôt que pour la période pendant laquelle le travailleur reçoit une telle indemnité, l'article 235 a pour effet d'obliger l'employeur à contribuer 4% du salaire qui aurait été normalement gagné.
Le libellé de l'article 235 de la loi permet-il une telle interprétation? Il a déjà été décidé que le droit d'accumuler l'ancienneté accordé par l'article 235, ne fait pas automatiquement des heures «de travail» accumulées pendant l'absence pour fin d'ancienneté, des heures effectivement travaillées: Métro-Richelieu et T.V.A.C., section locale 501, (1989) T.A. 699 , 1989-05-18, Me Michel Bolduc, arbitre.
Il faut en déduire que, de la même façon, le droit de participer, pendant l'absence, à un régime de retraite, ne fait pas automatiquement de la période d'absence, une période effectivement travaillée.
Par analogie, l'article 242 donne le droit au travailleur qui retourne au travail, de recevoir le salaire et avantages «aux mêmes taux et conditions que ceux dont il bénéficierait s'il avait continué à exercer son emploi pendant son absence». Il a déjà été plaidé que la période d'absence est considérée comme l'équivalent d'une période travaillée. Il en a décidé autrement: l'article 242 n'édicte aucunement que la période d'absence devient du «temps travaillé»: Voir Syndicat national des employés de l'alimentation en gros de Québec Inc., (C.S.N.), (1987) T.A. 371 ; Steinberg Inc. et Travailleurs Unis de l'alimentation et du commerce, local 500 (1988) T.A. 831 ; et Société Canadienne de métaux Reynolds Limitée c. CALP et al. c.s.
655-05-000034-900, Juge Corriveau, 7/11/90.
Dans Baker et Coopérative fédérée du Québec, supra, la Commission d'appel a déclaré, p. 10: «Cet article (242) vise à déterminer le régime de travail qui va s'appliquer à l'employé qui réintègre son emploi sans pour autant faire ni d'un montant non gagné ni d'une indemnité de remplacement du revenu reçu, un «salaire gagné.» Si cela est vrai dans le contexte de l'article 242, cela l'est encore plus dans le cas de l'article 235, qui ne mentionne même pas que le travailleur a droit au versement des cotisations exigibles par l'employeur, comme «s'il avait continué à exercer son emploi pendant son absence».
Pour que la Commission d'appel fasse droit aux prétentions du travailleur dans le contexte particulier du régime de retraite auquel il adhère, il faudrait que l'article 235 soit libellé ainsi: 235. Le travailleur qui s'absente de son travail en raison de sa lésion professionnelle: (...) 2 continue de participer aux régimes de retraite et d'assurances offerts dans l'établissement, pourvu qu'il paie sa part des cotisations exigibles, s'il y a lieu, auquel cas son employeur assume la sienne.
Dans le cas où la cotisation exigible dépend de la rémunération gagnée par le travailleur, l'employeur doit calculer la cotisation, sur la base du revenu brut que le travailleur aurait tiré de l'emploi, n'eût été de son absence.
Accepter l'interprétation suggérée par le travailleur équivaudrait à ajouter à l'article 235, des dispositions qui ne s'y trouvent pas. La Commission d'appel ne peut inférer du libellé de l'article 235 une telle interprétation.
L'employeur, en calculant la cotisation sur la base de 4% du salaire gagné, n'a pas violé l'article 235 de la loi.
En conclusion, le travailleur n'a pas été l'objet de mesures discriminatoires, ou de représailles ni d'une sanction imposée par l'employeur, pour le motif qu'il a été victime d'une lésion professionnelle, ou a exercé un droit que lui confère la loi.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION D'APPEL EN MATIERE DE LESIONS PROFESSIONNELLES: ACCUEILLE l'appel de l'employeur, Minerais Lac Ltée (Mine Doyon); INFIRME la décision rendue le 30 novembre 1989, par le bureau de révision; ET DECLARE que monsieur André Meilleur n'a pas fait l'objet de mesures discriminatoires, de représailles, ni d'autres sanctions en contravention de l'article 32 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
__________________ Anne Leydet Commissaire Byers Casgrain a/s Me Michel Towner 1, Place Ville Marie, S 3900 Montréal, (Québec) H3B 4M7 Représentant de la partie appelante Trudel, Nadeau, Lesage, Cleary & Ass.
a/s Me Richard Cleary 300, Léo Parizeau, B 2500 Succ. La Cité Montréal, (Québec) H2W 2N1 Représentant de la partie intéressée
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.