Fortin et Agence du revenu du Canada |
2014 QCCLP 2733 |
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Dossier 463619-04-1202
[1] Le 20 février 2012, madame Lucie Fortin (la travailleuse) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle elle conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 12 janvier 2012 à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 3 novembre 2011 à la suite d’un avis rendu par le Bureau d'évaluation médicale le 24 octobre 2011 (examen du 17 octobre 2011) en rapport avec la récidive, la rechute ou l’aggravation du 29 novembre 2010 et déclare que la travailleuse a droit au versement de l’indemnité de remplacement du revenu puisque sa lésion n’est pas consolidée. La CSST déclare qu’elle est justifiée de poursuivre le paiement des soins ou des traitements puisqu’ils sont toujours nécessaires.
Dossier 473503-04-1206
[3] Le 5 juin 2012, la travailleuse dépose une requête devant la Commission des lésions professionnelles à l’encontre d’une décision rendue par la CSST le 27 avril 2012 à la suite d’une révision administrative.
[4] Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 16 mars 2012 et déclare que le diagnostic de capsulite à l’épaule droite n’est pas en relation avec l’événement du 21 avril 2009 et que la travailleuse n’a pas droit aux prestations prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) en regard de ce diagnostic.
Dossier 491425-04-1212
[5] Le 20 décembre 2012, la travailleuse dépose une requête devant la Commission des lésions professionnelles à l’encontre d’une décision rendue par la CSST le 16 novembre 2012 à la suite d’une révision administrative.
[6] Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 10 octobre 2012 à la suite d’un avis rendu par le Bureau d'évaluation médicale le 4 octobre 2012 (examen du 20 septembre 2012) toujours en rapport avec la récidive, la rechute ou l’aggravation du 29 novembre 2010.
[7] La CSST déclare qu’elle est justifiée de poursuivre le versement de l’indemnité de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’elle se prononce sur la capacité de la travailleuse à exercer son emploi, étant donné que la lésion est consolidée avec des limitations fonctionnelles. Elle ajoute qu’elle doit cesser de payer pour les soins et les traitements puisqu’ils ne sont plus justifiés et que la travailleuse a droit à une indemnité pour préjudice corporel étant donné la présence d’une atteinte permanente.
[8] L’audience relativement à ces contestations s’est tenue au bureau de la Commission des lésions professionnelles de Trois-Rivières le 12 septembre 2013. La travailleuse était présente et représentée. L’Agence du revenu du Canada (l’employeur) était représentée par procureure à l’audience. Pour sa part, la CSST a avisé le tribunal de son absence par l’entremise d’une lettre de sa procureure.
[9] Le dossier est mis en délibéré une première fois le 31 mars 2014, à la suite de la réception des compléments de preuve médicale produits par les représentants des parties, le tout accompagné de leurs argumentations écrites.
[10] Cependant, une décision rendue par la Cour suprême du Canada[2] le 28 mars 2014 et portée à la connaissance du tribunal dans les jours suivant la mise en délibéré du présent dossier, a forcé une réouverture des débats afin de donner l’opportunité aux représentants des parties de faire valoir leurs prétentions respectives sur la question qui y est traitée et dont il sera discuté ultérieurement dans la présente décision.
[11] Au terme du délai accordé pour ce faire, les représentants des parties ont signifié qu’ils n’avaient pas de commentaires supplémentaires à formuler. Le dossier est donc remis en délibéré le 25 avril 2014.
L’OBJET DES CONTESTATIONS
Dossier 463619-04-1202
[12] Le représentant de la travailleuse demande de modifier la décision faisant suite à l’avis du Bureau d'évaluation médicale du 24 octobre 2011 et de retenir le diagnostic de ténosynovite de De Quervain droite associée à des myalgies thénariennes en lien avec la récidive, la rechute ou l’aggravation du 29 novembre 2010.
[13] Le représentant de la travailleuse demande de déclarer que cette lésion n’est pas consolidée et que la travailleuse a toujours droit au paiement pour les soins et les traitements qui y sont reliés ainsi qu’au versement des prestations prévues par la loi.
Dossier 491425-04-1212
[14] Le représentant de la travailleuse demande de modifier la décision de la CSST faisant suite à l’avis du Bureau d'évaluation médicale du 4 octobre 2012 portant sur le diagnostic, la date de consolidation, la suffisance des soins ou des traitements, l’évaluation de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.
[15] Il demande de reconnaître les diagnostics de syndrome de douleur régionale complexe (SDRC) au membre supérieur droit et de capsulite à l’épaule droite secondaires à l’immobilisation plâtrée, conformément à l’opinion de la docteure Claudine Morand, physiatre, dans son expertise datée du 23 août 2013.
[16] Le représentant de la travailleuse demande de retenir les autres conclusions de la docteure Morand quant à l’absence de consolidation du SDRC et la nécessité de soins, en plus de son avis concernant l’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles, le cas échéant.
Dossier 473503-04-1206
[17] Le représentant de la travailleuse demande de reconnaître que la capsulite à l’épaule droite subie par la travailleuse est une lésion professionnelle, tel que déjà formulé dans la contestation 491425.
LES FAITS
[18] Après audience et analyse de la preuve documentaire, la Commission des lésions professionnelles retient principalement les éléments suivants.
[19] À l’époque pertinente, la travailleuse est commis aux services généraux chez l’employeur lorsque le 30 avril 2009, elle complète un formulaire de réclamation du travailleur suivant un événement survenu au travail le 21 avril 2009 qu’elle décrit de la manière suivante : « En prenant plusieurs paquets de déclaration d’impôts dans un bassin situé à ma droite, j’ai ressentie une douleur au pouce droit. [sic] ».
[20] Le 24 avril 2009, la travailleuse consulte le docteur Michel Lafond qui diagnostique une tendinite au poignet droit (pouce droit).
[21] La Commission des lésions professionnelles ne retrouve pas au dossier de rapport final permettant de confirmer la date de consolidation de la lésion professionnelle initiale. Quoiqu’il en soit, il appert que le 23 février 2011, la CSST accepte la réclamation de la travailleuse pour une récidive, une rechute ou une aggravation survenue le 29 novembre 2010, dont le diagnostic est une tendinite au pouce droit. Cette décision ne fait pas l’objet d’une demande de révision.
[22] Le 23 mars 2011, une imagerie par résonance magnétique du pouce droit révèle une asymétrie non spécifique de l’articulation métacarpo-phalangienne du pouce qui apparaît plus ouverte du côté externe, sans anomalie osseuse ou ligamentaire associée apparente. Il y a aussi des signes de tendinite du tendon fléchisseur du 2e doigt sans signe de synovite associée.
[23] Le 13 juin 2011, la travailleuse est examinée par le docteur Mario Giroux, chirurgien orthopédiste, mandaté par la CSST.
[24] Au moment de cet examen, la travailleuse porte une orthèse rigide la nuit au niveau du poignet droit et une orthèse souple le jour. Elle a aussi cessé sa médication anti - inflammatoire depuis peu.
[25] L’examen objectif et neurovasculaire ne permet pas de constater d’anomalie.
[26] La travailleuse présente une douleur résiduelle au pouce droit, en relation avec les activités de préhension. Aucun signe inflammatoire au niveau des tendons fléchisseurs ou extenseurs n’a été observé. La douleur semble musculaire au niveau de l’éminence thénarienne. Cette problématique amène, de l’avis du docteur Giroux, des limitations fonctionnelles.
[27] Par conséquent, le docteur Giroux est d’avis que la consolidation de la tendinite au pouce droit a été obtenue et que la travailleuse devra éviter les mouvements de préhension répétés avec utilisation du pouce droit.
[28] Le 24 juin 2011, une consultation avec le docteur Daniel Cloutier, chirurgien de la main, met en évidence le diagnostic d’entorse avec douleur persistante. À l’examen radiologique, aucune ostéoarthrose n’est retrouvée alors que la résonance magnétique n’a pas permis de confirmer une atteinte osseuse ou articulaire de la région trapézo-métacarpienne.
[29] Le 4 août 2011, la docteure Marie-Thérèse Groarke, chirurgienne orthopédiste, effectue une immobilisation plâtrée spica. Le plâtre doit être maintenu en place pendant 4 à 6 semaines.
[30] Le 25 août 2011, constatant que la travailleuse se plaint de douleurs importantes, la docteure Groarke retire le plâtre et réfère la travailleuse en ergothérapie.
[31] En audience, la travailleuse explique que la douleur était même intolérable. Elle a observé un gonflement et un changement de couleur au niveau de son avant-bras et de sa main droits avec difficulté importante à bouger les doigts.
[32] Le 15 septembre 2011, la docteure Groarke soupçonne un début de DSR (dystrophie sympathique réflexe)[3].
[33] Le 17 octobre 2011, la travailleuse est examinée par le docteur André Léveillé, plasticien et membre du Bureau d’évaluation médicale. Le 24 octobre 2011, un avis est rendu sur les points 1 à 3 de l’article 212 de la loi.
[34] Le docteur Léveillé note que depuis la récente immobilisation, la travailleuse dit ressentir des raideurs significatives à l’ensemble de tous les doigts le matin, qui en cours de journée s’atténuent, mais qui persistent en regard du pouce. Des bains contrastants 2 fois par jour amélioreraient l’impression de raideur. Il y aurait aussi des phénomènes de douleurs persistantes périphériques au pouce, s’étendant vers la base du pouce, adjacentes à la première loge, avec des phénomènes de crampes la nuit et le soir, douleurs qui sont exagérées par la préhension tel que soulever une assiette, couper des légumes ou lors de la manipulation d’une poignée de porte.
[35] Alors que la douleur était principalement sur le rebord antérieur du premier métacarpe, dans la région thénarienne, cette douleur est toujours présente, mais elle s’est mobilisée progressivement suite au plâtre dans la région adjacente au côté radial du poignet droit.
[36] La travailleuse décrit que son état s’est détérioré depuis le plâtre et qu’elle a souvent la peau froide, blanchâtre et avec un œdème résiduel.
[37] À l’examen physique, le docteur Léveillé note :
Il semble y avoir un gonflement périphérique au poignet droit, avec des doigts qui présentent une très discrète asymétrie de circonférence, mais un aspect plus boudiné, plus gonflé. La peau à la main droite est plus froide, plus blanchâtre. Elle est légèrement plus cireuse.
[38] Le test de Finkelstein est équivoque à droite et la palpation profonde de la première loge est décrite comme étant douloureuse.
[39] Dans sa discussion, le docteur Léveillé relate qu’il semble y avoir une détérioration depuis l’examen avec le docteur Giroux et qui serait consécutive à l’immobilisation plâtrée. Il se serait alors installé un œdème important en regard des doigts et de la main, avec détérioration de l’état douloureux.
[40] À ce moment, il n’y a pas d’évidence d’arthrose trapézo-métacarpienne et les douleurs semblent plutôt concentrées au niveau de la première loge des extenseurs au niveau de l’éminence thénarienne.
[41] Il retient les diagnostics de ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main droite et de myalgie thénarienne droite.
[42] Le docteur Léveillé ajoute qu’après l’immobilisation plâtrée, il semble s’être installé des changements d’ordre vaso-moteur, sympathique. Il est d’avis qu’il n’y a pas d’évidence de SDRC, mais il est en mesure de constater la présence d’un œdème au niveau du poignet, une raideur au niveau des doigts et l’absence de stabilisation de la condition de la travailleuse.
[43] Par conséquent, il ne consolide pas la lésion et puisque le tableau clinique démontre une évolution qui n’est pas habituelle et qu’il semble y avoir eu détérioration avec altération frustre d’ordre sympathique suite à une immobilisation, le tout manifesté par une peau plus blanche, froide et apparition d’œdème, il recommande dans le but de mieux préciser le diagnostic et de mieux orienter le traitement, d’effectuer une infiltration de type Xylo test, dirigée vers la première loge pour s’assurer que la pathologie provienne bien de cet endroit. Il ne recommande pas d’intervention chirurgicale, mais est d’accord avec les traitements de physiothérapie.
[44] Le 12 octobre 2011, la docteure Groarke recommande de procéder à un traitement chirurgical soit une relâche du premier compartiment des extenseurs droit. Cette option sera mise de côté ultérieurement alors que la docteure Groarke est d’avis qu’il est nécessaire d’attendre qu’un diagnostic franc soit établi, puisque la condition de la travailleuse n’évolue pas de façon standard.
[45] Le 14 octobre 2011, la travailleuse accuse des douleurs qui sont maintenant au niveau de l’épaule droite. Vu l’augmentation significative de celles-ci, elle décide de consulter à sa clinique familiale et rencontre le docteur Yves Thomas qui diagnostique une capsulite droite post-plâtre avant-bras et poignet droit.
[46] Le 3 novembre 2011, la CSST donne suite à l’avis du Bureau d’évaluation médicale émis le 24 octobre 2011 et rend une décision.
[47] La CSST déclare qu’il y a relation entre l’événement du 29 novembre 2010 et le diagnostic établi. Elle ajoute que les soins et les traitements sont toujours nécessaires et qu’elle continuera à les payer ainsi que les indemnités de remplacement du revenu de la travailleuse puisque sa lésion n’est pas consolidée.
[48] La travailleuse demande la révision de cette décision qui sera confirmée le 12 janvier 2012 à la suite d’une révision administrative et contestée à la Commission des lésions professionnelles. Il s’agit du premier litige dont le tribunal est saisi et identifié par le dossier portant le numéro 463619.
[49] Le 23 novembre 2011, le docteur Daniel Gélinas retient maintenant le diagnostic de capsulite à l’épaule droite. Il réfère la travailleuse en radiologie pour une infiltration.
[50] Le 29 novembre 2011, la docteure Groarke retient aussi le diagnostic de capsulite à l’épaule droite en plus de celui de tendinite de De Quervain. Elle réfère la travailleuse à la docteure Marie Lou Rodrigue Vinet, chirurgienne orthopédiste. Elle recommande de poursuivre les traitements d’ergothérapie.
[51] Le 13 décembre 2011, la travailleuse est examinée par la docteure Rodrigue Vinet. À sa note de consultation, il est relaté la présence d’une douleur à la face radiale à la base du pouce et une sensibilité même au frôlement qui irradie dans tout le poignet. La douleur est pire lors du port de charges, à l’écriture ou pour effectuer une préhension d’objets. La douleur est aussi maintenant pire à l’épaule à la base du deltoïde et depuis la mi-octobre sa condition se détériore. La prise d’anti-inflammatoires l’aide, mais elle se réveille toujours la nuit.
[52] La docteure Rodrigue Vinet retient les diagnostics de tendinite de De Quervain au pouce droit, capsulite à l’épaule droite et SDRC au membre supérieur droit. Elle recommande de continuer l’ergothérapie pour le poignet et réfère la travailleuse à la clinique de la douleur pour le SDRC.
[53] Toujours le 13 décembre 2011, une scintigraphie osseuse révèle des anomalies se situant au niveau de la région gléno-humérale et au niveau du poignet où il y a des rehaussements en phase vasculaire diffusément suggestifs d’une synovite légère.
[54] Un rehaussement plus subtil péri-articulaire diffus sur le reste des structures de la main droite et également un peu au niveau du coude droit est aussi noté. Selon le radiologiste, l’aspect scintigraphique est donc compatible avec une algodystrophie réflexe sympathique secondaire au membre supérieur droit.
[55] Le 19 janvier 2012, la docteure Valérie Cardinal, anesthésiologue, confirme qu’un cinquième bloc intraveineux a été administré à la travailleuse en raison du SDRC à la main droite.
[56] Le 16 mars 2012, la CSST rend une décision et se prononce sur le nouveau diagnostic de capsulite à l’épaule droite. La CSST conclut qu’il n’y a pas de relation entre ce diagnostic et l’événement du 29 novembre 2010. La travailleuse demande la révision de cette décision qui sera confirmée le 27 avril 2012 à la suite d’une révision administrative et contestée à la Commission des lésions professionnelles dans le dossier numéro 473503.
[57] Le 14 mai 2012, la travailleuse est revue par le docteur Mario Giroux à la demande de la CSST. Il produit son rapport le 4 juillet 2012.
[58] La travailleuse lui rapporte qu’elle a eu une détérioration de sa condition en comparaison avec l’évaluation qui a été faite en juin 2011. La travailleuse explique que l’ensemble des symptômes qui sont actuellement présents est consécutif à l’immobilisation plâtrée.
[59] Le docteur Giroux retient les diagnostics de ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main droite et myalgie thénarienne droite. Il retient aussi les diagnostics d’algodystrophie sympathique réflexe et de capsulite à l’épaule droite, mais il considère qu’il s’agit de conditions personnelles.
[60] À son avis, ces lésions sont consolidées en date de son expertise alors qu’aucun autre traitement n’est justifié. Il n’attribue aucune atteinte permanente ni limitations fonctionnelles.
[61] Le 23 juillet 2012, une échographie du poignet droit avec infiltration échoguidée permet de constater qu’au niveau du deuxième compartiment des extenseurs, la douleur, qui est reproductible à plusieurs reprises, s’associe à la présence d’un peu de liquide synovial au pourtour des extenseurs radiaux ainsi qu’à un épaississement de la gaine synoviale secondaire au croisement du long extenseur du pouce. L’aspect échographique est donc en faveur d’une ténosynovite des extenseurs du carpe (2e compartiment) secondaire à un syndrome de croisement du long extenseur du pouce.
[62] Le 8 août 2012, le docteur Lafond, qui a charge de la travailleuse, remplit le rapport complémentaire après avoir pris connaissance de l’expertise du docteur Giroux du 4 juillet 2012. Il soutient que les diagnostics de ténosynovite au pouce droit, capsulite à l’épaule droite et SDRC au membre supérieur droit doivent être maintenus. Il est d’avis que ces lésions ne sont pas consolidées et les soins sont toujours nécessaires. Il prévoit une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.
[63] Le 18 septembre 2012, une note d’intervention en ergothérapie fait état de signes discrets concordant avec un SDRC. L’état de la travailleuse au niveau objectif et subjectif est stable depuis plusieurs mois et l’ergothérapeute note qu’il n’a pas d’autres interventions à offrir.
[64] Le 20 septembre 2012, la travailleuse est examinée par le docteur Richard Lirette, chirurgien orthopédiste et membre du Bureau d’évaluation médicale.
[65] À l’examen physique, l’épaule droite révèle des mouvements complets, mais douloureux en fin d’élévation et d’abduction. Au niveau de la main et du poignet, il n’y a aucune allodynie lors de l’examen, ni froideur. La coloration est normale et il n’y a pas de changement trophique. L’examen de la main révèle qu’il n’y a pas d’atrophie des éminces thénariennes et hypothénariennes. La mobilité des doigts est tout à fait normale et symétrique.
[66] L’examen neurovasculaire démontre que la force segmentaire est normale ainsi que la sensibilité. Aucune atrophie significative n’est notée entre autres au niveau des bras qui sont mesurés bilatéralement à 27cm et pour les avant-bras, 25cm à droite et 24cm à gauche.
[67] L’examen vasculaire est normal et la force de préhension au dynamomètre de Jamar démontre qu’elle peut faire après 3 reprises, en moyenne 20 kilos à droite et 30 kilos à gauche. Le reste de l’examen est sans particularité.
[68] Le docteur Lirette est d’avis que la travailleuse a présenté une tendinite du pouce droit. La mobilité de l’épaule lors de son examen est complète et il n’y a pas d’évidence de capsulite. De plus, bien qu’elle présente des douleurs disproportionnées par rapport à l’événement initial, il est d’avis que les critères diagnostiques ne sont pas remplis quant à un SDRC. Si celui-ci était présent, il doit être considéré comme étant résolu.
[69] Le docteur Lirette est donc d’avis que les lésions de la travailleuse sont consolidées et qu’elle devrait simplement prendre un analgésique approprié et porter une orthèse de type scaphoïde au pouce droit pour les mouvements répétés ou avec force.
[70] Une certaine perte de force et une incapacité fonctionnelle permettent d’accorder une atteinte des tissus mous évaluée à 2 %.
[71] Les limitations fonctionnelles suivantes devront aussi être respectées :
Madame Lucie Fortin devrait éviter les mouvements répétitifs du pouce droit surtout en extension et éviter de manipuler des charges de plus de 5 kilos de façon fréquente et répétitive.
[72] Le 10 octobre 2012, la CSST rend une décision et donne suite à l’avis du Bureau d’évaluation médicale rendu le 4 octobre 2012.
[73] La CSST déclare que la travailleuse a droit aux indemnités prévues par la loi puisque le diagnostic de son médecin est maintenu et qu’il a déjà été établi qu’il est en relation avec l’événement du 29 novembre 2010. Elle ajoute que les soins et les traitements étaient justifiés. Compte tenu de la date de consolidation et des limitations fonctionnelles de la travailleuse, la CSST conclut qu’elle recevra des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’elle se soit prononcée sur la capacité de la travailleuse à exercer un emploi.
[74] Enfin, puisque la lésion a entraîné une atteinte permanente, la CSST informe la travailleuse qu’elle a droit à une indemnité pour dommage corporel et qu’elle rendra une décision prochainement[4] quant au pourcentage et l’indemnité qui lui seront accordés.
[75] La travailleuse demande la révision de cette décision et le 16 novembre 2012, la CSST maintient ses conclusions dans une décision rendue à la suite d’une révision administrative. La travailleuse conteste cette décision à la Commission des lésions professionnelles dans le dossier 491425. Il s’agit du troisième et dernier litige dont le tribunal est saisi.
[76] Entretemps, le 7 novembre 2012, le docteur Lafond complète un formulaire intitulé « Échelle des restrictions pour les membres supérieurs ».
[77] Selon le questionnaire, le docteur Lafond indique que la travailleuse ne peut manipuler ou saisir des objets du bout des doigts ou exécuter des mouvements rapides des doigts. Il note qu’elle ne peut tenir serrer ou effectuer des mouvements complets de flexion, d’extension, de latéralité ou de rotation du poignet. Il ajoute aussi que la travailleuse ne peut fléchir complètement le coude ou faire le geste de visser ou de dévisser. Elle ne peut élever le bras plus haut que la hauteur des épaules ni effectuer des mouvements de rotation. Il limite les charges à 5 kg et énumère les restrictions suivantes :
- Éviter mouvements répétitifs
- Éviter de brocher ou de débrocher feuilles
- Pas de préhension forcée
- Éviter mouvement de pince (pouce, index)
- Éviter écriture répétée
- Ne peut tourner page rapidement.
[78] Le 20 novembre 2012, le docteur Lafond maintient toujours son avis quant aux trois diagnostics en cause.
[79] Le 6 février 2013, le docteur Lafond ajoute qu’il débute la médication avec du Lyrica.
[80] Le même jour, la CSST rend une décision et déclare que la travailleuse a droit à une mesure de réadaptation, soit une formation de mise à jour en secrétariat. La travailleuse demande la révision de cette décision qui sera confirmée par la CSST à la suite d’une révision administrative le 16 avril 2013 et contestée à la Commission des lésions professionnelles. Le tribunal n’est pas saisi de cette contestation qui sera entendue ultérieurement.
[81] Le 9 avril 2013, le docteur Lafond réfère la travailleuse à la clinique de la douleur. Depuis ce temps, elle est suivie par différents intervenants notamment une infirmière, une anesthésiste, un psychologue et un physiothérapeute. Depuis que la posologie du Lyrica a été augmentée à 100 mg deux fois par jour, elle dort beaucoup mieux, mais la douleur est quand même présente le jour.
[82] Le 24 avril 2013, la CSST rend une décision et déclare que la travailleuse est capable d’exercer l’emploi convenable de secrétaire. Cette décision fait aussi état des modalités accessoires, notamment le revenu annuel estimé de cet emploi. La travailleuse demande la révision de cette décision qui sera confirmée par la CSST le 6 juin 2013 à la suite d’une révision administrative et contestée à la Commission des lésions professionnelles. Le tribunal n’est actuellement pas saisi de cette contestation qui sera entendue ultérieurement.
[83] En audience, la travailleuse explique qu’à la suite de l’administration des cinq blocs veineux, la couleur et l’enflure des doigts se sont améliorées. La douleur, l’engourdissement et la sensation de choc électrique n’ont pas connu d’amélioration.
[84] La travailleuse affirme que depuis l’évaluation du docteur Lirette au Bureau d’évaluation médicale en septembre 2012 et jusqu’au moment de l’audience, après quelques mois de suivi à la clinique de la douleur, aucun gain permanent n’a été noté de sa part, sauf pour une légère amélioration de son sommeil et un soulagement temporaire qui disparaissent quelques jours après les traitements.
[85] On lui a recommandé de faire des pauses dans ses activités et elle explique que depuis qu’elle s’est mise à faire du vélo de route, elle en fait presque chaque jour, ce qui l’aide à se garder occupée. À l’hiver dernier, la travailleuse s’entraînait sur un vélo de type spinning où elle pouvait appuyer ses avant-bras pour se reposer.
[86] Depuis la sortie de son vélo à l’été, la travailleuse précise qu’elle peut faire environ 26 kilomètres en une heure, mais qu’elle doit ensuite prendre une pause. Lorsqu’elle ressent de l’inconfort ou des douleurs, elle prend sa médication qui semble être plus efficace qu’auparavant.
[87] Elle ajoute qu’une intervention de l’ergonome de la clinique de la douleur est à venir et éventuellement, elle devra adapter son vélo, sa voiture et son ordinateur personnel.
[88] La travailleuse croit que si elle avait été référée à la clinique de la douleur avant, elle serait déjà beaucoup mieux.
[89] La travailleuse explique qu’après le retrait de son plâtre en août 2011, les douleurs importantes ont perduré pendant environ 10 mois, soit jusqu’au début de l’été 2012. Par la suite, une certaine souplesse de mouvements a été retrouvée. Au moment de l’audience, elle évalue que la douleur est à 3 ou 4/10 au repos, mais augmente lorsqu’elle sollicite son membre supérieur droit, comme pour le grand ménage.
[90] Si elle ne fait rien et qu’elle est au repos, il se peut qu’elle n’ait pas de douleur, mais la sensation de choc électrique peut tout de même survenir.
[91] Aussi, la douleur à l’épaule peut irradier au niveau du cou à l’occasion. Au moment d’être évaluée au Bureau d’évaluation médicale, la travailleuse précise que le docteur Lirette n’a fait qu’un examen visuel de ses doigts.
[92] Pour sa part, la docteure Claudine Morand l’a rencontrée le 10 mai 2013 et a procédé à son examen. La rencontre a duré environ 3 heures et demie.
[93] L’évaluation écrite de la docteure Morand se résume de la manière suivante.
[94] Lors du questionnaire, la travailleuse se plaint d’une douleur qui persiste au niveau de l’épaule, du bras, du poignet et à la face palmaire et au pouce droit. La douleur est décrite comme étant un choc électrique et une sensation d’anneau au poignet droit alors qu’elle est augmentée par tous les mouvements et les efforts tels que tenir un téléphone ou conduire.
[95] Selon le questionnaire QUICK-DAS, la travailleuse éprouve certaines difficultés quant aux activités de la vie quotidienne, notamment des activités de loisirs qui nécessitent une certaine force avec des chocs au niveau de l’épaule, du bras ou de la main.
[96] La docteure Morand écrit qu’à l’examen physique, la température, la coloration et la sudation sont normales aux deux mains. La palpation, la pression latérale légère des MCP et la traction des doigts sont positives à droite et négatives à gauche, signe d’allodynie mécanique, très fréquemment rencontré dans le SDRC. La palpation révèle une douleur diffuse mal localisée à la face antérieure de l’épaule droite et tous les mouvements résistés augmentent la douleur et ne discriminent pas une tendinopathie précise.
[97] L’amplitude articulaire des membres supérieurs est normale et la manœuvre de Finkelstein est équivoque à droite alors qu’elle est négative à gauche. Cependant, il n’y a aucune synovite ni instabilité du poignet ou du pouce.
[98] La docteure Morand est d’avis que selon les critères de Budapest, le diagnostic de SDRC doit être confirmé.
[99] La travailleuse rapporte des faiblesses, gonflements, changements de coloration et de température occasionnels et de la douleur mécanique provoquée. À l’examen physique, la docteure Morand note la présence de faiblesse à la préhension avec allodynie à l’effleurement ou à l’effort léger et douleur provoquée à la compression légère des MCP de la main droite.
[100] Suivant cette expertise, la docteur Morand est d’avis que le diagnostic de SDRC doit être ajouté au diagnostic retenu par le docteur Lirette et que la travailleuse est toujours symptomatique avec des douleurs disproportionnées en intensité par rapport à l’événement initial.
[101] Elle ajoute que cette lésion est consécutive à l’immobilisation plâtrée du 4 août 2011, qui est reconnue comme un facteur favorisant le développement du SDRC.
[102] Par conséquent, elle retient les diagnostics de ténosynovite de De Quervain droite, associée à des myalgies thénariennes, SDRC secondaire à l’immobilisation plâtrée, tel que confirmé par la scintigraphie osseuse et capsulite à l’épaule droite actuellement résolue.
[103] Elle ajoute que puisque la travailleuse est en attente d’une évaluation à la clinique de la douleur à l’hôpital St-Joseph, elle ne peut consolider les autres lésions jusqu’à la fin des traitements qui seront entrepris.
[104] Elle se dit d’accord avec l’évaluation du docteur Lirette quant à une atteinte des tissus mous du membre supérieur droit donnant droit à 2 %, car il n’y a pas d’ankylose au site douloureux du SDRC.
[105] Concernant les limitations fonctionnelles, elle se dit partiellement d’accord avec l’opinion du docteur Lirette et mentionne que la travailleuse devra éviter toute forme de mouvement répétitif ou fréquent du pouce droit, les mouvements de pince digitale ou tridigitale. Les mouvements de préhension forcée et de manipulation de charges de plus de 5 kg.
[106] Le tribunal remarque que même si la docteure Morand considère que la capsulite à l’épaule droite est résolue, elle écrit que selon l’évolution de l’épaule droite, des limitations fonctionnelles supplémentaires pourront être nécessaires et devront être réévaluées.
[107] La docteure Morand commente aussi l’opinion du docteur Giroux quant à l’étiologie personnelle du diagnostic de SDRC. À son avis, la travailleuse n’avait aucun antécédent de problème au membre supérieur droit avant cette blessure au pouce droit et l’immobilisation par plâtre a été le seul facteur déclenchant identifié et pouvant être reconnu dans ce dossier.
[108] Quant à la capsulite, elle ajoute qu’il y a un lien direct entre cette lésion et le développement du SDRC à cause de l’exacerbation de la douleur d’une région adjacente ou d’un syndrome épaule main, tel le SDRC.
[109] En audience, l’employeur a obtenu l’autorisation de produire une contre-expertise et le 24 septembre 2013, la travailleuse est examinée par le docteur Denys Jobin, physiatre/rhumatologue. L’expertise du docteur Jobin est reçue au bureau de la Commission des lésions professionnelles le 20 décembre 2013.
[110] Après avoir procédé à l’étude du dossier et à l’examen de la travailleuse, le docteur Jobin est d’avis que si le SDRC et la capsulite ont existé en fonction du tableau clinique observé, cette lésion est consolidée.
[111] En l’absence d’atrophie musculaire, de trouble sensitif important ou de limitation d’amplitude, il ne peut retenir de séquelles permanentes.
[112] Le docteur Jobin est tout de même d’avis qu’il n’est pas impossible que la travailleuse ait présenté un SDRC, mais les descriptions cliniques retrouvées au dossier, ne sont pas, à sa connaissance, suffisamment détaillées pour valider cette hypothèse en se basant sur les critères établis.
[113] Selon le docteur Jobin, même l’image de la scintigraphie n’est pas exclusive à un SDRC. Pour un SDRC, la distribution de la substance radioactive observée à la scintigraphie est habituellement beaucoup plus diffuse. Il est d’avis que la synovite représente beaucoup plus un problème rhumatismal touchant l’articulation en cause, tout comme pour la capsulite.
[114] De plus, en l’absence d’un examen isotopique bien documenté au moment où la travailleuse était porteuse de ce problème douloureux, il ne peut confirmer ce diagnostic.
[115] Le docteur Jobin ajoute qu’en l’absence d’un traumatisme et vu le long délai d’apparition des premiers signes suite à l’événement initial, l’histoire est peu compatible avec ce diagnostic. Il remet aussi en question le mode d’apparition des symptômes qu’il est plus courant de voir apparaître de la partie proximale vers la partie distale du membre blessé, contrairement à ce qu’il observe dans le dossier sous étude.
[116] L’évolution atypique du tableau clinique plaide aussi, selon le docteur Jobin, en faveur d’une condition personnelle, car l’apparition ne fait suite à aucun traumatisme ni sollicitation abusive. Aussi, le tableau clinique est fluctuant et confondant, alors que plusieurs diagnostics ont été avancés par les différents médecins. Il ajoute que les thérapeutes ont souligné des douleurs au poignet et de l’œdème à la paume de la main ainsi qu’une raideur des doigts qui étaient présents bien avant l’immobilisation plâtrée.
[117] Le docteur Jobin souligne que la tendinite du départ a trainé en longueur et s’est chronicisée, ce qui milite en faveur d’une maladie rhumatismale, car une tendinite guérit habituellement en quelques semaines. Cependant, il note qu’à son examen clinique, il n’a pu mettre en évidence de signes, même frustres, d’une maladie rhumatismale en évolution à ce moment.
[118] Enfin, le docteur Jobin, dépose, sans les commenter, des extraits de littérature médicale[5], au soutien de son avis écrit.
[119] Dans l’un de ces documents, selon les critères de L’IASP[6], pour confirmer un SDRC, il faut être en mesure de retrouver :
1. La présence d’un événement déclencheur délétère ou d’une cause d’immobilisation.
2. Une douleur continue, une allodynie, ou une hyperalgie quand la douleur est disproportionnée par rapport à tout événement initiateur connu.
3. On observe parfois un œdème, des modifications du débit sanguin cutané ou une activité sudomotrice anormale de la région douloureuse (Il peut s’agir d’un signe ou d’un symptôme).
4. Ce diagnostic est exclu quand il existe des pathologies pouvant expliquer le degré de douleur et de dysfonctionnement.
[120] Le 28 janvier 2014, la docteure Claudine Morand, physiatre, rédige une expertise médicale complémentaire, à la demande du représentant de la travailleuse. Ce complément est produit au tribunal le 4 février 2014.
[121] D’entrée de jeu, la docteure Morand énumère des éléments factuels rapportés par le docteur Jobin dans son expertise. Elle s’adonne ensuite à la rectification de ces faits rapportés.
[122] À la suite d’une objection produite par la représentante de l’employeur quant à la recevabilité en preuve de ce complément, puisqu’aucune demande de permission n’avait été formulée, le tribunal a accepté que ce complément soit admis en preuve, en rappelant cependant aux représentants des parties les Attentes relatives au rôle des experts émises par la Commission des lésions professionnelles.
[123] En effet, il appert qu’une partie importante du complément produit par la docteure Morand s’avère en fait être une plaidoirie écrite et non une opinion médicale. La soussignée a rappelé aux représentants qu’ils ont un intérêt à sensibiliser les experts quant aux attentes du tribunal à leur endroit afin qu’ils se gardent d’outrepasser leur champ d’expertise.
[124] C’est en tenant compte de cet impératif, que le tribunal résume le complément de la docteure Morand, soit en omettant de considérer les passages qui relèvent plutôt du rôle du représentant que de celui du témoin expert.
[125] Ainsi, la docteure Morand soumet que le docteur Jobin passe sous silence l’expertise qu’elle a réalisée le 10 mai 2013 et le fait que l’immobilisation plâtrée peut être responsable du SDRC et que les signes observés par le docteur Léveillé, au Bureau d’évaluation médicale, le 17 octobre 2011 orientent vers la manifestation de ce type de pathologie.
[126] La docteure Morand écrit que la scintigraphie osseuse du 13 décembre 2011 soutient le diagnostic de SDRC. Selon le volume Pathologie de l’appareil locomoteur[7], « une hypercaptation qui touche plusieurs articulations du membre atteint est un bon indicateur du SDRC ».
[127] Aussi, selon une méta-analyse de 12 publications scientifiques de R. Ringer[8] en 2012, la notion de diffusion aux articulations sus et sous jacentes est un argument fort dans le diagnostic et le caractère homogène pour certain, ou souvent hétérogène pour beaucoup, de la région douloureuse est un autre argument. La spécificité de la scintigraphie osseuse trois phases pour le SDRC est très bonne, alors qu’il n’y a que très peu de faux positifs.
[128] La docteure Morand ajoute que le SDRC n’est plus considéré comme une maladie qui implique une condition personnelle préexistante et dans le cas de la travailleuse, il n’y aucune évidence de cette hypothèse.
[129] Au surplus, le docteur Giroux, mandaté par la CSST, est le troisième orthopédiste à diagnostiquer le SDRC.
[130] Le fait que la travailleuse perçoive un soulagement important depuis qu’elle est suivie à la Clinique de la douleur par le docteur Charpentier, anesthésiologue et que le Lyrica soit efficace doit aussi être considéré. Ce médicament agit sur les douleurs neuropathiques, telles que retrouvées dans le SDRC et non dans les pathologies de type rhumatisme inflammatoire, surtout que la travailleuse ne prend aucun AINS. Aussi, les cas de SDRC, qui n’évoluent pas favorablement, sont référés en anesthésiologie par les autres spécialistes. Ce qui est le cas, en l’espèce.
[131] Enfin, la docteure Morand soutient que le docteur Jobin a omis d’évaluer l’intensité de la douleur de la travailleuse et son impact sur les activités domestiques et de la vie quotidienne.
[132] Selon le questionnaire qu’elle a réalisé lors de son examen du 10 mai 2013, elle a relevé des signes concordants avec le SDRC, notamment la durée et la disproportion de la douleur par rapport à l’événement causal, qui peut aussi être une immobilisation, selon la littérature médicale.
[133] Quant à l’examen comme tel du docteur Jobin, la docteure Morand retient que les mesures objectives articulaires du membre supérieur droit ne sont pas documentées mais uniquement celles de la colonne vertébrale. La préhension n’est pas non plus objectivée.
[134] La docteure Morand conclut qu’il a évidence d’un SDRC et que celui-ci est en relation avec l’immobilisation plâtrée. Les conclusions du docteur Jobin ne doivent pas être retenues, car il omet d’accorder de l’importance à certains éléments qui soutiennent le diagnostic de SDRC et permettent d’écarter une cause rhumatismale. Aussi, selon les critères de Budapest pour le SDRC et la scintigraphie osseuse positive, le SDRC doit être reconnu ainsi que le lien de causalité.
L’ARGUMENTATION DES PARTIES
[135] Le représentant de la travailleuse plaide que l’opinion diagnostique de la docteure Morand doit être retenue et l’avis du Bureau d’évaluation médicale, modifié en conséquence.
[136] Il soutient que le diagnostic de ténosynovite de De Quervain droite, associée à des myalgies thénariennes est en relation avec la récidive, la rechute ou l’aggravation du 29 novembre 2010, tandis que le SDRC et la capsulite à l’épaule droite sont secondaires à l’immobilisation plâtrée et doivent être reconnus en vertu de l’article 31 de la loi.
[137] Le représentant de la travailleuse ajoute que la lésion professionnelle de la travailleuse n’est pas consolidée et que la travailleuse a droit aux prestations prévues par la loi et au paiement des soins et des traitements puisqu’ils sont toujours nécessaires, notamment en ce qui concerne la référence à la clinique de la douleur.
[138] Subsidiairement, le représentant de la travailleuse plaide que si la lésion professionnelle devait être consolidée, les limitations fonctionnelles énoncées par la docteure Morand doivent être retenues, car l’évaluation du docteur Lirette ne tient pas compte des difficultés fonctionnelles de la travailleuse dans ses activités de la vie quotidienne, mais uniquement des diminutions observées dans les amplitudes des mouvements. Ainsi, le dossier doit être retourné à la CSST pour que le processus de détermination d’un emploi convenable soit repris.
[139] Pour sa part, la représentante de l’employeur demande de maintenir les conclusions des docteurs Léveillé et Lirette à la suite des évaluations effectuées au Bureau d’évaluation médicale.
[140] Selon l’expertise du docteur Jobin, les diagnostics de SDRC et de capsulite à l’épaule droite ne devraient pas être retenus.
[141] Subsidiairement et si ces diagnostics devaient être reconnus, la représentante de l’employeur demande de déclarer qu’au 20 septembre 2012, l’ensemble de la condition de la travailleuse était consolidé, sans atteinte permanente, ni limitations fonctionnelles puisque l’examen le plus récent au dossier, soit celui du docteur Jobin, met en évidence l’absence de signe objectif permettant de soutenir l’attribution de séquelles permanentes.
[142] Tout au plus, l’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles émises par le docteur Lirette devraient être confirmées puisque son examen est similaire à celui du docteur Jobin et ces examens, qui se distinguent nettement de celui de la docteure Morand, sont prépondérants.
L’AVIS DES MEMBRES
[143] Conformément à l’article 429.50 de la loi, la soussignée a obtenu l’avis motivé des membres ayant siégé avec elle en audience.
[144] Le membre issu des associations syndicales de même que le membre issu des associations d’employeurs partagent le même avis.
[145] Ils considèrent que le diagnostic de ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main droite avec myalgie thénarienne droite ainsi que ceux de SDRC au membre supérieur droit et de capsulite à l’épaule droite secondaires à l’immobilisation plâtrée doivent être retenus en relation avec la récidive, la rechute ou l’aggravation du 29 novembre 2010.
[146] Les membres sont aussi d’avis que ces lésions sont consolidées en date du 20 septembre 2012, avec suffisance de soins à cette date sauf en ce qui concerne la médication analgésique et l’orthèse recommandée par le docteur Lirette. L’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles évaluées par le docteur Lirette doivent aussi être confirmées.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
Dossiers 463619-04-1202, 473503-04-1206 et 491425-04-1212
[147] Avant de discuter de l’admissibilité des diagnostics retenus, la Commission des lésions professionnelles doit décider si la décision de la CSST faisant suite à l’avis du Bureau d’évaluation médicale rendu le 24 octobre 2011 (examen du 17 octobre 2011) doit être modifiée selon les représentations formulées par le représentant de la travailleuse en regard du diagnostic.
[148] Il en est de même quant à la décision de la CSST rendue à la suite de l’avis du Bureau d’évaluation médicale du 4 octobre 2012 (examen du 20 septembre 2012).
[149] Les dispositions légales pertinentes sont les suivantes :
212. L'employeur qui a droit d'accès au dossier que la Commission possède au sujet d'une lésion professionnelle dont a été victime un travailleur peut contester l'attestation ou le rapport du médecin qui a charge du travailleur, s'il obtient un rapport d'un professionnel de la santé qui, après avoir examiné le travailleur, infirme les conclusions de ce médecin quant à l'un ou plusieurs des sujets suivants :
1° le diagnostic;
2° la date ou la période prévisible de consolidation de la lésion;
3° la nature, la nécessité, la suffisance ou la durée des soins ou des traitements administrés ou prescrits;
4° l'existence ou le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique du travailleur;
5° l'existence ou l'évaluation des limitations fonctionnelles du travailleur.
L'employeur transmet copie de ce rapport à la Commission dans les 30 jours de la date de la réception de l'attestation ou du rapport qu'il désire contester.
__________
1985, c. 6, a. 212; 1992, c. 11, a. 15; 1997, c. 27, a. 4.
221. Le membre du Bureau d'évaluation médicale, par avis écrit motivé, infirme ou confirme le diagnostic et les autres conclusions du médecin qui a charge du travailleur et du professionnel de la santé désigné par la Commission ou l'employeur, relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212, et y substitue les siens, s'il y a lieu.
Il peut aussi, s'il l'estime approprié, donner son avis relativement à chacun de ces sujets, même si le médecin qui a charge du travailleur ou le professionnel de la santé désigné par l'employeur ou la Commission ne s'est pas prononcé relativement à ce sujet.
__________
1985, c. 6, a. 221; 1992, c. 11, a. 23.
224.1. Lorsqu'un membre du Bureau d'évaluation médicale rend un avis en vertu de l'article 221 dans le délai prescrit à l'article 222, la Commission est liée par cet avis et rend une décision en conséquence.
Lorsque le membre de ce Bureau ne rend pas son avis dans le délai prescrit à l'article 222, la Commission est liée par le rapport qu'elle a obtenu du professionnel de la santé qu'elle a désigné, le cas échéant.
Si elle n'a pas déjà obtenu un tel rapport, la Commission peut demander au professionnel de la santé qu'elle désigne un rapport sur le sujet mentionné aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212 qui a fait l'objet de la contestation; elle est alors liée par le premier avis ou rapport qu'elle reçoit, du membre du Bureau d'évaluation médicale ou du professionnel de la santé qu'elle a désigné, et elle rend une décision en conséquence.
La Commission verse au dossier du travailleur tout avis ou rapport qu'elle reçoit même s'il ne la lie pas.
__________
1992, c. 11, a. 27.
[150] L’avis du Bureau d’évaluation médicale du 24 octobre 2011 concerne les sujets 1 à 3 de l’article 212 de la loi. Le docteur Léveillé se prononce quant au diagnostic, la date de consolidation et la suffisance des soins et des traitements en lien avec la récidive, rechute ou aggravation du 29 novembre 2010.
[151] Quant à l’avis du Bureau d’évaluation médicale du 4 octobre 2012, celui-ci traite des sujets 1 à 5 de l’article 212 de la loi. Le docteur Lirette se prononce quant au diagnostic, la date de consolidation, la suffisance des soins et des traitements, l’existence et l’évaluation de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.
Les diagnostics
[152] Dans un premier temps, la Commission des lésions professionnelles doit décider du ou des diagnostics qui doivent être retenus avant de se questionner quant au caractère professionnelle de ces lésions.
[153] En l’espèce, tant le docteur Léveillé le 24 octobre 2011, que le docteur Lirette, dans son avis du 4 octobre 2012, se prononcent quant au diagnostic.
[154] La Commission des lésions professionnelles fait remarquer que ces avis du Bureau d’évaluation médicale n’ont pas été contestés par l’employeur et les diagnostics qui y sont retenus ne sont pas remis en cause par la travailleuse, soit d’une part une ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main droite[9] avec myalgie thénarienne droite et d’autre part le diagnostic de tendinite au pouce droit.
[155] Ce que demande la travailleuse, c’est de reconnaître en plus les diagnostics de SDRC au membre supérieur droit et de capsulite à l’épaule droite secondaires à l’immobilisation plâtrée.
[156] Tout d’abord, après avoir pris connaissance de l’ensemble des évaluations au dossier et afin de simplifier la compréhension du suivi médical, le diagnostic de ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main droite et myalgie thénarienne droite doit être retenu au détriment de celui moins spécifique de tendinite au pouce droit, qui est écarté.
[157] Concernant le SDRC, même si les signes sont qualifiés par moment de frustes, l’ensemble des constatations consignées par les différents examinateurs, combinées aux plaintes de la travailleuse et au résultat de la scintigraphie osseuse, permet de retenir ce diagnostic.
[158] La Commission des lésions professionnelles remarque que c’est pendant le port même du plâtre que des douleurs plus importantes se sont manifestées. Cette situation a provoqué l’échec de l’immobilisation plâtrée le 25 août 2011.
[159] Par la suite, la travailleuse et les différents intervenants, notamment le docteur Léveillé, ont remarqué des modifications de l’apparence de la peau au niveau de la main et du pouce, en plus d’une main plus froide, de l’œdème et des douleurs disproportionnées par rapport à l’événement causal, et ce, dès le 15 septembre 2011.
[160] La docteure Morand rapporte de façon détaillée, les critères diagnostiques et les symptômes documentés au dossier et qui correspondent, de l’avis du tribunal, à la manifestation clinique du SDRC.
[161] Aussi, même le docteur Mario Giroux, mandaté par la CSST, reconnaît l’existence de ce diagnostic ainsi que celui de capsulite à l’épaule droite lors de son examen du 14 mai 2012.
[162] Pour sa part, le docteur Jobin, expert de l’employeur, retient qu’il n’est pas impossible que la travailleuse ait présenté un SDRC, selon la symptomatologie qui lui est rapportée. Même s’il croit que la description du tableau clinique n’est pas suffisamment détaillée pour valider cette hypothèse et que le diagnostic a été surtout accepté à partir du rapport de la scintigraphie qui décrit une image qui est compatible, mais pas exclusive à un SDRC, les avis des docteurs Morand et Giroux sont prépondérants puisque de manière prépondérante, aucune autre cause ne peut expliquer les symptômes de la travailleuse.
[163] Même l’hypothèse rhumatismale avancée par le docteur Jobin doit être rejetée. La preuve médicale contemporaine à la manifestation des différentes pathologies de la travailleuse, confirme l’opinion de la docteure Morand à l’effet que les examens ne permettent pas d’appuyer une telle hypothèse, d’autant que les symptômes de la travailleuse ne débordent pas le membre supérieur droit.
[164] Aussi, plus particulièrement quant au diagnostic de capsulite à l’épaule droite, celui-ci a été retenu par les différents examinateurs dès le 14 octobre 2011, soit dans les semaines qui ont suivi l’immobilisation plâtrée qui est susceptible d’être responsable de la condition douloureuse aiguë dont se plaint la travailleuse. Par conséquent, ce diagnostic doit être retenu.
[165] Enfin, même le docteur Lirette, au Bureau d’évaluation médicale le 20 septembre 2012 n’exclut pas ces diagnostics, il considère cependant qu’au moment de son examen, ils sont résolus.
[166] En conclusion, tant la docteure Morand, le docteur Giroux, le médecin traitant et les intervenants médicaux qui ont suivi la travailleuse sont d’accord avec les diagnostics de SDRC et de capsulite à l’épaule droite et même le docteur Léveillé retrouve des éléments d’ordre sympathique lors de son examen du 17 octobre 2011. En somme, aucun médecin ne nie catégoriquement l’existence de ces pathologies. La Commission des lésions professionnelles est d’avis que la preuve prépondérante justifie la reconnaissance de ces diagnostics.
La relation causale
[167] Dans un premier temps, puisque le diagnostic de tendinite au pouce droit n’est plus retenu, il n’est pas nécessaire que le tribunal procède à l’analyse de la relation causale en regard de ce diagnostic.
[168] Le tribunal dispose maintenant du diagnostic de ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main droite et myalgie thénarienne droite. Cette pathologie a fait l’objet d’une décision rendue à la suite de l’avis du Bureau d’évaluation médicale le 3 novembre 2011. En présence d’un nouveau diagnostic, la CSST de prononce alors quant à l’admissibilité de cette lésion et elle reconnait qu’il s’agit d’une lésion professionnelle. La décision d’admissibilité du diagnostic de tendinite au pouce droit rendue le 23 février 2011 est ainsi remplacée le 3 novembre 2011.
[169] Après contestation de la travailleuse, la décision du 3 novembre 2011 est confirmée par la révision administrative le 12 janvier 2012. Puisque cette décision ne fait pas l’objet d’une contestation par l’employeur, l’admissibilité de la récidive, la rechute ou l’aggravation du 29 novembre 2010, sous forme de ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main droite et myalgie thénarienne droite ne peut être remise en cause.
[170] Au surplus, tant le docteur Giroux, que les docteurs Léveillé ou Morand sont d’avis qu’il s’agit du diagnostic de la lésion professionnelle.
[171] Seule l’admissibilité des diagnostics de SDRC au membre supérieur droit et de capsulite à l’épaule droite, nouvellement retenus, doit être analysée.
[172] Ainsi, est-ce que ces diagnostics sont en relation avec la lésion professionnelle du 29 novembre 2010?
[173] En l’espèce, le représentant de la travailleuse soutient que le SDRC et la capsulite à l’épaule droite sont des lésions qui correspondent à l’une des situations prévue à l’article 31 de la loi, car elles sont survenues à l’occasion des soins que la travailleuse a reçus pour sa lésion professionnelle du 29 novembre 2010, plus particulièrement, l’immobilisation plâtrée mise en place le 4 août 2011 :
31. Est considérée une lésion professionnelle, une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion :
1° des soins qu'un travailleur reçoit pour une lésion professionnelle ou de l'omission de tels soins;
2° d'une activité prescrite au travailleur dans le cadre des traitements médicaux qu'il reçoit pour une lésion professionnelle ou dans le cadre de son plan individualisé de réadaptation.
Cependant, le premier alinéa ne s'applique pas si la blessure ou la maladie donne lieu à une indemnisation en vertu de la Loi sur l'assurance automobile (chapitre A-25), de la Loi visant à favoriser le civisme (chapitre C-20) ou de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels (chapitre I-6).
__________
1985, c. 6, a. 31.
[174] Dans un premier temps, notons que la travailleuse est une employée au service du gouvernement fédéral et est régie par la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État[10] (la loi fédérale).
[175] L’article 4 de la loi fédérale renvoie à la législation provinciale, en l’occurrence, notre Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, quant aux modalités de versement des indemnités à un agent de l’état fédéral qui est victime d’une lésion professionnelle :
4. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, il est versé une indemnité:
a) aux agents de l’État qui sont :
(i) soit blessés dans un accident survenu par le fait ou à l’occasion de leur travail,
(ii) soit devenus invalides par suite d’une maladie professionnelle attribuable à la nature de leur travail;
b) aux personnes à charge des agents décédés des suites de l’accident ou de la maladie.
(2) Les agents de l’État visés au paragraphe (1), quelle que soit la nature de leur travail ou la catégorie de leur emploi, et les personnes à leur charge ont droit à l’indemnité prévue par la législation — aux taux et conditions qu’elle fixe — de la province où les agents exercent habituellement leurs fonctions en matière d’indemnisation des travailleurs non employés par Sa Majesté — et de leurs personnes à charge, en cas de décès — et qui sont :
a) soit blessés dans la province dans des accidents survenus par le fait ou à l’occasion de leur travail;
b) soit devenus invalides dans la province par suite de maladies professionnelles attribuables à la nature de leur travail.
(3) L’indemnité est déterminée :
a) soit par l’autorité — personne ou organisme — compétente en la matière, pour les travailleurs non employés par Sa Majesté et leurs personnes à charge, en cas de décès, dans la province où l’agent de l’État exerce habituellement ses fonctions;
b) soit par l’autorité, judiciaire ou autre, que désigne le gouverneur en conseil.
(4) [Abrogé, 1996, ch. 10, art. 229.3]
[176] Depuis l’arrêt de la Cour d’appel dans l’affaire Lamy[11], il est généralement énoncé par notre tribunal que le renvoi prévu à l’article 4 de la loi fédérale est assez restrictif et ne permet pas, entre autres, de reconnaître que la présomption de lésion professionnelle prévue à l’article 28 de la loi et facilitant le fardeau des travailleurs quant à la démonstration de la survenance d’une lésion professionnelle, soit applicable à un agent de l’état fédéral.
[177] En ce qui concerne l’applicabilité de l’article 31 de la loi à un agent de l’état fédéral, il appert que la jurisprudence de notre tribunal est muette face à une telle situation qui ne semble pas s’être déjà présentée. Même si l’article 31 de la loi ne crée pas une présomption (ou un moyen de preuve), mais qu’il s’agit plutôt d’une disposition que la soussignée considère être de droit substantif, l’avenue plutôt restrictive inspirée par la décision de la Cour d’appel afin de limiter l’applicabilité de certaines dispositions de la loi aux agents de l’état fédéral, pourrait inciter à une certaine réserve.
[178] Or, une très récente décision de la Cour suprême du Canada, rendue le 28 mars 2014 dans l’affaire Martin et Alberta (Workers’ Compensation Board)[12] vient, de l’avis du tribunal, clarifier la situation des agents de l’état fédéral, quant à la portée du renvoi prévu à l’article 4 de la loi fédérale.
[179] La juge Karakatsanis, qui signe la version française des motifs de ce jugement, situe la question que la Cour suprême est alors appelée à disposer de la manière suivante :
Le pourvoi pose principalement la question de savoir si la LIAÉ exige que les organismes provinciaux déterminent le droit à l’indemnité en appliquant la législation et les politiques provinciale. Les cours d’appel provinciale ont rendu des décisions divergentes sur ce point. Certains ont conclu que la LIAÉ constitue un code complet régissant l’admissibilité des travailleurs fédéraux à l’indemnité1. D’autres, telle la Cour d’appel de l’Alberta en l’espèce, ont jugé que l’admissibilité à l’indemnité sous le régime de la LIAÉ obéit aux règles provinciales2.
(notes omises)
[180] Après une analyse contextuelle et historique des dispositions législatives applicables, tant pour la loi fédérale que la loi provinciale de l’Alberta alors sous étude, la Cour suprême du Canada est d’avis que les autorités provinciales compétentes doivent appliquer la législation et les politiques en vigueur dans leur province, dans la mesure où celles-ci n’entrent pas en conflit avec les dispositions de la loi fédérale.
[181] La Cour suprême du Canada retient que la définition d’accident du travail de la loi fédérale énonce les éléments de base qui la composent, mais n’est pas exhaustive ni restrictive. Cette définition est ouverte et souple, ce qui témoigne, selon la Cour suprême du Canada : … de l’intention du législateur de déléguer aux autorités provinciales l’administration du régime d’indemnisation. (…) La législation de chaque province complète la loi fédérale en fait de structure et de spécificité.
[182] Ce jugement de la Cour suprême du Canada a été soumis aux représentants des parties qui ont choisi de ne pas formuler de commentaires supplémentaires.
[183] Le tribunal fait humblement siens les propos tenus dans cette affaire et par conséquent, conclut que l’article 31 de la loi est applicable aux agents de l’état fédéral. Une lésion qui survient à l’occasion des soins administrés pour une lésion professionnelle peut être considérée comme une lésion professionnelle même chez un travailleur au service du gouvernement fédéral. Le renvoi prévu à l’article 4 de la loi fédérale permet à la travailleuse de bénéficier de cette disposition législative provinciale. Aucun argument au contraire n’a été présenté et rien ne permet de conclure que l’article 31 de la loi entre en conflit avec la loi fédérale.
[184] Cela étant dit, il reste à décider si les diagnostics de SDRC et de capsulite à l’épaule droite sont des lésions professionnelles au sens de l’article 31 de la loi. Pour ce faire, il doit être démontré que ces lésions sont distinctes de la lésion professionnelle du 29 novembre 2010 et qu’elles sont consécutives aux soins reçus pour cette lésion professionnelle.
[185] Dès le 25 août 2011, le plâtre installé le 4 août précédent doit être retiré vu les douleurs intenses ressenties par la travailleuse. Par la suite, les diagnostics en cause sont rapidement émis alors que la docteure Groarke constate un début de SDRC dès le 15 septembre 2011 et la capsulite à l’épaule droite post-plâtre est diagnostiquée par le docteur Thomas dès le 14 octobre 2011. Il s’agit alors de nouvelles lésions distinctes de la première qui avait justifié la récidive, rechute ou aggravation du 29 novembre 2010.
[186] Ensuite, l’avis de la docteure Morand, qui établit une relation entre ces lésions et l’immobilisation plâtrée, est probant compte tenu notamment de la concordance temporelle entre le plâtre et la manifestation des premiers symptômes. Pour sa part, le docteur Jobin ne se questionne pas sur cette hypothèse qui est pourtant bien documentée dans la littérature médicale[13] qu’il dépose lui-même.
[187] Dans ces circonstances, le tribunal en vient à la conclusion que la preuve médicale appuie de manière prépondérante que le SDRC au membre supérieur droit et la capsulite à l’épaule droite sont des lésions professionnelles comme le prévoit le premier alinéa de l’article 31 de la loi, puisqu’il s’agit en fait d’une lésion distincte de la ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main droite et la myalgie thénarienne droite. Il s’agit d’une conséquence de l’immobilisation plâtrée du 4 août 2011.
[188] Maintenant la Commission des lésions professionnelles doit décider de la date de consolidation de lésion professionnelle de la travailleuse.
[189] La notion de consolidation est définie à l’article 2 de la loi :
2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :
« consolidation » : la guérison ou la stabilisation d'une lésion professionnelle à la suite de laquelle aucune amélioration de l'état de santé du travailleur victime de cette lésion n'est prévisible;
__________
1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.
[190] Dans la présente affaire, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que l’ensemble des pathologies dont souffre la travailleuse est consolidé en date de l’examen du docteur Lirette effectué le 20 septembre 2012.
[191] À cet effet, l’examen du docteur Lirette est complet et permet au tribunal de disposer de la question de la consolidation pour l’ensemble des diagnostics retenus.
[192] On peut lire à l’avis du Bureau d’évaluation médicale du 4 octobre 2012 que la mobilité des doigts est normale et symétrique, tout comme la mobilité de l’épaule droite qui est complète, alors qu’il n’y a pas d’évidence de capsulite. Aussi, au moment de cet examen, la travailleuse ne présente pas les critères diagnostiques pouvant permettre de conclure à un SDRC. Ainsi, si cette lésion était présente, elle doit être, selon le docteur Lirette, considérée comme étant résolue.
[193] Le tribunal retient aussi que la docteure Morand est d’avis que la capsulite est résolue puisque les mouvements de l’épaule sont normaux au moment de son expertise réalisée le 10 mai 2013.
[194] Au moment d’être examinée par le docteur Lirette, la travailleuse se plaint principalement de douleurs résiduelles peu améliorées, à la base du pouce. Cette douleur est augmentée à l’effort et à l’extension du pouce ou à la préhension forte. Une douleur en fin d’amplitude, située à la face antérieure de l’épaule droite est aussi verbalisée.
[195] L’examen objectif est essentiellement normal sauf pour une certaine perte de force à la préhension à droite. La mobilité des doigts est tout à fait normale et symétrique, c’est pourquoi le docteur Lirette consolide la lésion.
[196] Selon le docteur Lirette, la travailleuse a eu tous les traitements possibles et il n’y a aucune indication chirurgicale. Il recommande de prendre un analgésique et de porter une orthèse de type scaphoïdienne au pouce droit pour les mouvements répétés ou avec force.
[197] Or, la seule justification pour laquelle la docteure Morand ne consolide pas le SDRC et la ténosynovite de De Quervain droite associée à des myalgies thénariennes, est que la travailleuse est en attente d’une évaluation à la clinique de la douleur à l’hôpital St-Joseph pour établir la médication et les autres traitements possibles.
[198] Il importe donc de déterminer si l’avis du docteur Richard Lirette, quant à la suffisance des soins et des traitements à partir du 20 septembre 2012 et la consolidation de la lésion professionnelle, est justifié ou si les différentes interventions continuées par le médecin qui a charge de la travailleuse et éventuellement un suivi à la clinique de la douleur justifient la poursuite des traitements et appuient l’absence de consolidation.
[199] Au moment de procéder à son examen au Bureau d’évaluation médicale le 20 septembre 2012, le docteur Lirette rapporte que la travailleuse a bénéficié de deux infiltrations au pouce échoguidées, sans amélioration. Aussi, malgré les 5 blocs administrés en lien avec le SDRC, ceux-ci n’ont permis aucune amélioration. La médication de la travailleuse comprend uniquement l’Elavil.
[200] Même l’ergothérapeute indique le 18 septembre 2012, qu’il met fin aux traitements et qu’il n’a plus rien à offrir.
[201] De son côté, bien que la docteure Morand soit physiatre et bien au fait du dossier, elle ne recommande aucun traitement additionnel. Elle s’en remet à l’avis éventuel des intervenants de la clinique de la douleur.
[202] Le tribunal est d’avis qu’il n’a pas été établi de manière prépondérante, que la lésion professionnelle de la travailleuse n’était pas consolidée le 20 septembre 2012. Toutes les recommandations thérapeutiques proposées par le docteur Léveillé, lors du premier examen au Bureau d’évaluation médicale, ont été suivies, et ce, sans que la travailleuse ne rapporte d’amélioration notable par la suite.
[203] Même après de multiples consultations auprès d’une panoplie de professionnels de la santé et à la suite des avis rendus par plusieurs experts, incluant des spécialistes et thérapeutes de tout ordre, en date de l’évaluation du docteur Lirette, rien ne permet de présager que la condition de la travailleuse trouvera une réponse favorable si elle devait être référée à la clinique de la douleur.
[204] Au surplus, lors de son témoignage en audience, la travailleuse explique que malgré l’avis du docteur Lirette quant à la suffisance des traitements (sauf pour la médication analgésique et le port d’une orthèse), son médecin a maintenu une référence à la clinique de la douleur. Cependant, à la suite des interventions qui y ont été effectuées, sa condition n’a pas connu d’amélioration notable sauf pour un meilleur sommeil. Cela confirme que cette avenue n’a pas permis d’obtenir des gains significatifs justifiant de reconnaître que la lésion professionnelle de la travailleuse n’était pas consolidée le 20 septembre 2012.
[205] En conséquence et puisque les traitements sont jugés suffisants (sauf pour la médication analgésique et le port d’une orthèse) et que la condition de la travailleuse est stationnaire et n’a pas connu d’amélioration notable à la suite des différentes modalités thérapeutiques tentées, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que la lésion professionnelle est consolidée en date du 20 septembre 2012.
[206] Maintenant, au sujet de l’existence d’une atteinte permanente, la Commission des lésions professionnelles remarque que cette question n’est pas en litige. Le docteur Lirette observe une certaine perte de force à la préhension de la main droite et l’incapacité fonctionnelle qui en découle, justifie le Bureau d’évaluation médicale d’accorder une atteinte des tissus mous de 2%. Or, dans son expertise, la docteure Morand est aussi d’avis qu’il persiste une telle atteinte, se disant même en accord avec l’évaluation du docteur Lirette.
[207] Quant à l’évaluation de cette atteinte permanente, la décision initiale du 10 octobre 2012 précise qu’une autre décision sera rendue afin d’établir le pourcentage et l’indemnité à laquelle la travailleuse a droit. Ainsi, si la travailleuse est insatisfaite du pourcentage qui a été accordé par le Bureau d’évaluation médicale, c’est par l’entremise de la contestation de la décision établissant le pourcentage et l’indemnité à laquelle elle a droit qu’elle doit faire valoir ses prétentions.[14]
[208] Il reste ainsi la question des limitations fonctionnelles qui doivent être retenues en lien avec la lésion professionnelle du 29 novembre 2010.
[209] D’une part, le docteur Lirette établit que la travailleuse devra éviter des mouvements répétitifs du pouce droit surtout en extension et éviter de manipuler des charges de plus de 5 kilos de façon fréquente et répétitive.
[210] D’autre part, la docteure Morand se dit partiellement d’accord avec l’opinion du docteur Lirette et ajoute la mention que ce sont plutôt toutes les formes de mouvements répétitifs ou fréquents du pouce droit qui devront être évitées, soit les mouvements de pince digitale ou tridigitale et les mouvements de préhension forcée et la manipulation de charge de plus de 5 kilos. Elle ajoute que selon l’évolution de l’épaule droite, des limitations fonctionnelles supplémentaires pourront être nécessaires et devront être réévaluées.
[211] Le représentant de la travailleuse soutient que le docteur Lirette devait tenir compte des problèmes fonctionnels rapportés par la travailleuse et non pas uniquement des limitations des amplitudes articulaires afin d’établir les limitations fonctionnelles de la travailleuse.
[212] Or, la Commission des lésions professionnelles remarque que puisque la condition à l’épaule droite de la travailleuse est résolue et qu’il y a un certain consensus à ce sujet, aucune limitation fonctionnelle spécifique à l’épaule droite ne peut être retenue, en présence d’amplitudes de mouvements tout à fait normales et alors que la docteure Morand constate aussi cette résolution.
[213] La question qui demeure est de savoir si le SDRC et la ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main droite avec myalgie thénarienne justifient l’attribution de limitations fonctionnelles plus sévères que celles octroyées par le docteur Lirette.
[214] De l’avis du tribunal, la preuve médicale ne permet pas d’aller en ce sens.
[215] Dans un premier temps, les examens objectifs sont essentiellement normaux sauf pour une perte de force en préhension pour le membre supérieur droit. Une certaine allodynie à l’effleurement et une douleur provoquée à la compression légère des métacarpiens de la main droite sont constatées uniquement par la docteure Morand en mai 2013, soit plusieurs mois après l’examen au Bureau d’évaluation médicale. Cependant, elle est d’avis qu’il n’y a pas d’ankylose aux sites douloureux du SDRC de type épaule-main.
[216] Les plaintes rapportées par la travailleuse sont essentiellement subjectives et l’absence d’atrophie au membre supérieur droit, alors que la travailleuse rapporte des difficultés dans l’exécution de certaines activités de la vie quotidienne et devoir ainsi utiliser d’avantage son membre supérieur gauche, limite la valeur probante de ces plaintes.
[217] De plus, la travailleuse témoigne en audience être en mesure de faire certaines activités de loisir, tel du vélo de route à chaque jour à raison de 26 km en une heure et de l’entraînement de type spinning en hiver. Cela est tout autant incompatible avec les difficultés fonctionnelles intéressant le membre supérieur droit, rapportées par la docteure Morand et qui, selon le représentant de la travailleuse, pourraient justifier des limitations fonctionnelles permanentes plus importantes.
[218] Ainsi, l’avis du Bureau d’évaluation médicale, quant à l’existence d’une atteinte permanente et l’évaluation des limitations fonctionnelles, demeure inchangé.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
Dossier 463619-04-1202
REJETTE la requête de la madame Lucie Fortin, la travailleuse;
CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 12 janvier 2012 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le diagnostic qui doit être retenu à la suite de l’examen au Bureau d’évaluation médicale effectué le 17 octobre 2011 est une ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main droite avec une myalgie thénarienne droite;
DÉCLARE que le 29 novembre 2010, la travailleuse a subi une récidive, une rechute ou une aggravation de sa lésion initiale du 21 avril 2009, sous forme de ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main droite avec une myalgie thénarienne droite et qu’elle a droit aux prestations prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles puisque sa lésion professionnelle n’est pas consolidée;
DÉCLARE que la Commission de la santé et de la sécurité du travail était justifiée de poursuivre le paiement des soins ou des traitements puisqu’ils étaient toujours nécessaires.
Dossier 491425-04-1212
ACCUEILLE en partie la requête de la travailleuse;
MODIFIE la décision rendue par la CSST le 16 novembre 2012 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que les diagnostics qui doivent être retenus à la suite de l’examen au Bureau d’évaluation médicale du 20 septembre 2012 sont un syndrome douloureux régional complexe au membre supérieur droit et une capsulite à l’épaule droite;
DÉCLARE que le syndrome douloureux régional complexe au membre supérieure droit constitue une lésion professionnelle découlant des soins reçus par la travailleuse en relation avec la lésion professionnelle du 29 novembre 2010;
DÉCLARE que la travailleuse a droit aux prestations prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles en regard de ce diagnostic;
DÉCLARE que les diagnostics de ténosynovite de la première loge des extenseurs de la main avec une myalgie thénarienne droite, de syndrome douloureux régional complexe au membre supérieur droit et de capsulite à l’épaule droite sont consolidés le 20 septembre 2012;
DÉCLARE que la CSST doit cesser de payer pour les soins et les traitements puisqu’ils ne sont plus justifiés sauf en ce qui concerne la médication analgésique et une orthèse de type scaphoïdienne au pouce droit si requise;
DÉCLARE que la travailleuse conserve les limitations fonctionnelles suivantes de sa lésion professionnelle du 29 novembre 2010 :
- éviter les mouvements répétitifs du pouce droit surtout en extension;
- éviter de manipuler des charges de plus de 5 kilos de façon fréquente et répétitive.
DÉCLARE que la travailleuse a droit à une indemnité pour préjudice corporel étant donné la présence d’une atteinte permanente;
DÉCLARE que la travailleuse a droit au versement des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à ce que la CSST se prononce sur sa capacité à exercer son emploi.
Dossier 473503-04-1206
ACCUEILLE la requête de la travailleuse;
INFIRME la décision rendue par la CSST le 27 avril 2012 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le diagnostic de capsulite à l’épaule droite constitue une lésion professionnelle découlant des soins reçus par la travailleuse en relation avec la lésion professionnelle du 29 novembre 2010;
DÉCLARE que la travailleuse a droit aux prestations prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles en regard de ce diagnostic.
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Valérie Lizotte |
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M. Dominique Le Sage |
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S.A.T.A. |
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Représentant de la partie requérante |
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Me Amy Joslin-Besner |
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MINISTÈRE DE LA JUSTICE DU CANADA |
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Représentante de la partie intéressée |
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Me Marie-Ève Dagenais |
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VIGNEAULT THIBODEAU BERGERON |
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Représentante de la partie intervenante |
[2] Martin c. Alberta (Workers’ Compensation Board), 2014 CSC 25.
[3] DSR ou SDRC : syndrome douloureux régional complexe.
[4] Il semble qu’une décision concernant le pourcentage et l’indemnité à laquelle la travailleuse a droit a été rendue par la CSST le 18 octobre 2012, selon les notes d’intervention de la CSST. Cette décision n’est pas au dossier du tribunal et il ne semble pas qu’elle ait fait l’objet d’une demande de révision.
[5] R.N. HARDEN et al.,«Proposed New Diagnostic Criteria for Complex Regional Pain Syndrome», (2007) 8 Pain Medicine, pp. 326-331; Anthony WEINBERG, Syndrome douloureux régional complexe (DSR - Dystrophie sympathique réflexe),Toronto, Tribunal d'appel de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail, 2010, [En ligne], <http://www.wsiat.on.ca/french/mlo/freflex.htm> (Page consultée le 10 décembre 2013); Walker-Bone, K. Palmer, K.T. Reading, I., Coggon, D. and Cooper, C. (2004), Prévalence and impact of musculoskeletal disorders of the upper limb in the general population. Arthritis & Rheumatism, 51 : 642-651. Doi : 10.1002/art.20535.
[6] Critères de l’Association internationale pour l’étude de la douleur pour le diagnostic du syndrome douloureux régional complexe (SDRC), cités dans l’article de Weinberg (réf.supra).
[7] Yves BERGERON, Luc FORTIN et Richard LECLAIRE (dir.), Pathologie médicale de l'appareil locomoteur, 2e éd., Saint-Hyacinthe, Edisem, Paris, Maloine, 2008, p. 1046.
[8] Sensitivity avnd specificity of 3-phase bone scintigraphy in the diagnosis of CRPS of the upper extremity, Clin J Pain 2010, Mar-Apr; 26(3) : 182-9.
[9] Le tribunal n’entend pas faire de distinction entre ce diagnostic et la tendinite de De Quervain diagnostiquée par la docteure Morand. Aucun argument ni preuve n’ont été présentés par le représentant de la travailleuse quant à la distinction qui devrait s’imposer. Le tribunal est d’avis que le diagnostic du docteur Léveillé inclut celui énoncé par la docteure Morand. Dans ce contexte, au dispositif de la présente décision, au point de vue technique, la requête de la travailleuse doit être rejetée dans le dossier 463619.
[10] L.R.C. (1985), ch. G-5.
[11] Société canadienne des postes c. C.A.L.P. et Lamy [1998], CLP 1472 (C.A.), requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée, 26 avril 2000; Voir aussi plus récemment : Lapierre c. Société canadienne des postes, C.A. Montréal, 500-09-010476-0000, 4 février 2003, jj. Rothman, Rousseau-Houle, Dalphond, requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée, 17 juillet 2003, 29692.
[12] Précitée, note 2.
[13] Précitée note 5.
[14] Voir notamment à ce sujet la décision Duchesneau et Matériaux J.L. Gauthier inc. (F) 2014 QCCLP 2018.
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