Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Montréal

MONTRÉAL le 3 octobre 2000

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

124993-72-9910

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Me Marie Lamarre

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

114656291-1

AUDIENCE TENUE LE :

9 mars 2000

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À :

MONTRÉAL

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUTOCAR CONNAISSEUR INC.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 15 octobre 1999, Autocar Connaisseur inc. (l’employeur) dépose une requête à l’encontre d’une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST ) dans le cadre de la révision administrative le 6 octobre 1999.

[2]                Cette décision confirme une décision de la CSST du 2 février 1999 à l’effet que la décision d’imputer la totalité des coûts relatifs à la lésion professionnelle subie par Jean Gautreau le 1er mai 1998 au dossier de l’employeur demeure inchangée.

L'OBJET DE LA REQUÊTE

[3]               L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision rendue en révision administrative et de transférer les coûts relatifs à la lésion professionnelle subie par monsieur Jean Gautreau le 1er mai 1998 aux employeurs de toutes les unités en vertu des dispositions de l’article 326, alinéa 2, de la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001) (la loi).

LES FAITS

[4]               Le 1er mai 1998, monsieur Jean Gautreau (le travailleur), à l’emploi d’Autocar Connaisseur inc. comme chauffeur d’autobus, est victime d’un accident du travail alors qu’en descendant de l’autobus qu’il conduit, devant le 420 Sherbrooke ouest à Montréal, il s’inflige une blessure à la jambe gauche au moment où il pose le pied sur un couvercle d’un égout.

[5]               La preuve au dossier réfère effectivement à un rapport d’événement complété par un agent de police de la STCUM le 1er mai 1998, indiquant qu’au moment où le travailleur a posé, en descendant de l’autobus, le pied gauche sur un couvercle de bouche d’égout, ce couvercle étant brisé, il s’est infligé une blessure à la jambe gauche.

[6]               La réclamation du travailleur est acceptée par la CSST et, le 19 juin 1998, une décision d’imputation est adressée à l’employeur, l’informant que la totalité des sommes imputables en raison de l’accident du travail subi par le travailleur est portée à son compte d’employeur.

[7]               Le 29 juin 1998, l’employeur demande à la CSST un transfert des coûts en vertu de l’article 326, 2e alinéa.


[8]               Le 2 février 1999, la CSST informe l’employeur qu’elle maintient la décision d’imputer la totalité des coûts à son dossier au motif que, bien que l’accident du travail est effectivement attribuable à une tierce partie, la preuve n’ayant pas établi le degré de responsabilité du ou des tiers, il n’y a pas lieu d’appliquer les dispositions de l’article 326, alinéa 2, de la loi.

[9]               L’employeur demande la révision de cette décision le 5 février 1999, laquelle est confirmée par la révision administrative le 6 octobre 1999.

[10]           La décision en révision administrative conclut à l’absence de preuve de négligence dans l’entretien de la voie publique de la Ville de Montréal, aucune information au dossier ne permettant d’arriver à la conclusion que la Ville de Montréal aurait été informée préalablement de la défectuosité du couvercle d’égout et qu’elle n’aurait donné aucune réponse satisfaisante.  La révision administrative estime que la Ville de Montréal ne peut être considérée un tiers dont la négligence a causé l’accident du travail.  Il n’y a donc pas lieu d’accorder un transfert d’imputation des coûts.

[11]           L’employeur conteste la décision de la révision administrative le 6 octobre 1999 d’où la présente requête.

L'ARGUMENTATION DES PARTIES

[12]           À l’audience, le représentant de l’employeur, après avoir rapidement rappelé les faits entourant l’accident du travail du 1er mai 1998, s’appuyant sur une certaine jurisprudence des tribunaux de droit commun qu’il dépose, plaide que les municipalités ont une obligation d’entretien des voies publiques et qu’en conséquence, le couvercle de la bouche d’égout étant défectueux, la responsabilité de la Ville de Montréal est automatiquement engagée.

[13]           Il argumente, de plus, que les circonstances dans lesquelles l’accident du travail est survenu ne font pas partie des risques inhérents aux activités de l’employeur et qu’en conséquence, les coûts de la lésion professionnelle subie par le travailleur le 1er mai 1998 doivent être imputés à l’ensemble des employeurs.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[14]           Dans la présente instance, la Commission des lésions professionnelles doit déterminer si l’employeur a droit à un transfert du coût des prestations relatif à la lésion professionnelle subie par le travailleur le 1er mai 1998, en application des dispositions du 2e alinéa de l’article 326 de la loi, lequel se lit comme suit   :


326. La Commission impute à l'employeur le coût des prestations dues en raison d'un accident du travail survenu à un travailleur alors qu'il était à son emploi.

 

Elle peut également, de sa propre initiative ou à la demande d'un employeur, imputer le coût des prestations dues en raison d'un accident du travail aux employeurs d'une, de plusieurs ou de toutes les unités lorsque l'imputation faite en vertu du premier alinéa aurait pour effet de faire supporter injustement à un employeur le coût des prestations dues en raison d'un accident du travail attribuable à un tiers ou d'obérer injustement un employeur.

 

L'employeur qui présente une demande en vertu du deuxième alinéa doit le faire au moyen d'un écrit contenant un exposé des motifs à son soutien dans l'année suivant la date de l'accident.

________

1985, c. 6, a. 326; 1996, c. 70, a. 34.

 

 

 

[15]           En l’espèce, il ressort clairement de la preuve que l’accident du travail qui a entraîné la lésion professionnelle ne résulte pas du fait du travailleur lui-même ou encore de l’employeur mais de la défectuosité d’un couvercle d’une bouche d’égout située sur une voie publique.  L’employeur n’avait aucune obligation d’entretien en regard de cette bouche d’égout et la défectuosité du couvercle peut être attribuable à une multitude de causes extérieures au travailleur ou à l’employeur.

[16]           En l’instance, il serait facile d’imaginer que cette défectuosité pourrait avoir été causée soit par un véhicule qui circulait sur la chaussée publique, soit par l’usure ou encore le bris attribuable à un individu.  Aucune preuve n’a été présentée au tribunal, si ce n’est que l’employeur argumente qu’il appartenait à la Ville de Montréal d’assurer l’entretien de ce couvercle d’égout.

[17]           Or, en l’espèce, contrairement à la jurisprudence citée par l’employeur, aucune preuve n’a été faite à l’effet que la Ville de Montréal aurait été avisée de cette défectuosité et aurait manqué à son devoir de diligence ou aurait fait preuve de négligence en ne réparant pas le couvercle d’égout.

[18]           Néanmoins, le tribunal estime que lorsqu’il y a lieu de déterminer si un accident du travail est attribuable à un tiers, il convient d’appliquer un test de prépondérance de preuve en regard de l’implication d’un tiers dans la survenance d’un accident du travail sans qu’une preuve de négligence, faute lourde, faute délictuelle ou quasi délictuelle, soit nécessairement effectuée.

[19]           En l’espèce, le tribunal considère qu’il existe une preuve prépondérante à l’effet que l’accident du travail est attribuable à autrui puisqu’il s’agit d’un accident causé par la défectuosité d’un couvercle et que, même si la preuve ne permet pas de conclure à une négligence ou à une omission de la part de la Ville de Montréal chargée de l’entretien de cette partie de la voie publique, l’employeur devrait néanmoins avoir droit à un transfert des coûts en vertu des dispositions de l’article 326, alinéa 2, de la loi.

[20]           En effet, rien ne prouve que la défectuosité du couvercle provient d’un vice d’entretien ou d’une négligence de la Ville de Montréal, cette défectuosité pouvant aussi bien être attribuable à un bris contemporain à l’accident du travail provenant d’un véhicule qui circulait sur la chaussée ou à toute autre cause.

[21]           Or, imposer à l’employeur le fardeau d’établir que la Ville de Montréal a été négligente ou a omis de satisfaire à son devoir d’entretien des voies publiques dans de telles circonstances, pour obtenir un transfert de coûts en vertu de l’article 326, alinéa 2, de la loi, apparaît une preuve pratiquement impossible à réaliser, le bris du couvercle d’égout pouvant tout simplement être attribuable à une cause fortuite.

[22]           Dans ces circonstances, puisque cet accident du travail ne résulte pas d’une activité inhérente aux activités de l’employeur, le travailleur s’étant blessé en descendant de l’autocar qu’il conduisait, il serait de l’avis du tribunal injuste de faire supporter à l’employeur le coût des prestations reliées à cet accident du travail.

[23]           L’implication de la Ville de Montréal n’ayant été aucunement établie dans cet accident du travail, le tribunal considère qu’il n’y a pas lieu de transférer les coûts relatifs à cette lésion professionnelle au dossier d’employeur de la Ville de Montréal mais à l’ensemble des employeurs de toutes les unités puisque le tiers en question ne peut être identifié en l’espèce.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête d’Autocar Connaisseur inc.;

INFIRME la décision rendue en révision administrative le 6 octobre 1999;

DÉCLARE que la totalité des coûts relatifs à la lésion professionnelle subie par monsieur Jean Gautreau le 1er mai 1998 doit être transférée aux employeurs de toutes les unités.

 

 

 

 

Me Marie Lamarre

 

Commissaire

 

 

 

 

 

Dufresne, Hébert, Comeau

( Me Jean-François Martin )

3333, Place Cavendish

Bureau 600

Saint-Laurent  (Québec)

H4M  2X6

 

Représentant de la partie requérante

 

 

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