Flores et Désossage Supérieur inc. |
2010 QCCLP 3150 |
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[1] Le 13 juillet 2009[1], monsieur Léonardo Flores (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) le 25 mai 2009 à la suite d’une révision administrative (la Révision administrative).
[2] Par celle-ci, la CSST maintient une décision qu’elle a initialement rendue le 7 novembre 2008 et, en conséquence, elle détermine que le travailleur n’a pas été victime d’une lésion professionnelle le 9 septembre 2008.
[3] L’audience dans cette affaire a lieu à Montréal, le 20 avril 2010, en présence du travailleur.
[4]
L’employeur, Désossage Supérieur inc., est absent même si un avis
l’informant du lieu, de la date et de l’heure de cette audience lui est expédié
et même si aucun retour de courrier ne permet à la Commission des lésions
professionnelles de conclure qu’il n’aurait pas reçu cet avis. La Commission
des lésions professionnelles a donc procédé sans ce dernier conformément à ce
qui est prévu à l’article
[5] Enfin, le travailleur n’étant pas représenté, la Commission des lésions professionnelles s’assure de sa volonté de procéder seul dans son dossier et elle lui explique la façon dont se déroulera l’audience.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[6] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a été victime d’une lésion professionnelle le 9 septembre 2008.
L’AVIS DES MEMBRES
[7]
Conformément à ce qui est prévu à l’article
[8] Les membres issus des associations syndicales et des associations d’employeurs sont d’avis qu’il y a lieu d’accueillir la requête déposée par le travailleur, d’infirmer la décision rendue par la Révision administrative et de déclarer que ce dernier a été victime d’une lésion professionnelle le 9 septembre 2008.
[9]
En effet, les membres issus des associations syndicales et
des associations d’employeurs estiment que le travailleur peut bénéficier de
l’application de la présomption de lésion professionnelle prévue à l’article
LES FAITS ET LES MOTIFS
[10] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur a été victime d’une lésion professionnelle le 9 septembre 2008.
[11] La loi énonce qu’une lésion professionnelle est une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l’occasion d’un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, rechute ou aggravation.
[12]
L’article
[13]
La maladie professionnelle est aussi décrite à l’article
[14] Enfin, le législateur prévoit des présomptions afin d’alléger le fardeau de la preuve qui repose sur les épaules du travailleur.
[15]
L’article
[16] Ceci étant établi, qu’en est-il du présent dossier ?
[17] Il ressort des documents disponibles et du témoignage du travailleur que l’employeur exploite une entreprise de désossage de porcs et que le travailleur est à l’emploi de ce dernier depuis 1997.
[18] Il occupe, au fil du temps, des postes de désosseur et de responsable d’une table de coupe.
[19] Le travailleur explique que, en 2007-2008, il est surtout responsable d’une table de coupe. Cependant, en raison d’une baisse de travail, le travailleur doit reprendre un travail de désosseur.
[20] Le travailleur précise qu’il n’a jamais eu de problèmes au cou et à l’épaule droite et qu’il n’a jamais consulté ou été traité pour des douleurs à ces sites.
[21] Il a déjà fait une réclamation pour un problème à l’épaule gauche et sa lésion avait été acceptée par la CSST.
[22] Donc, le travailleur indique que, le 9 septembre 2008, il se présente au travail en pleine forme. Il est affecté à une table de coupe où il doit tirer vers lui, dans un espace fixe prévu à cette fin, une fesse de porc qui défile sur un tapis roulant, en retirer l’os, et la remettre sur le tapis.
[23] Le travailleur est debout et à une certaine distance du tapis roulant. Il doit donc s’étirer afin d’aller chercher la fesse sur ce tapis. Or, vers la fin de l’avant-midi, le travailleur se penche, s’étire le bras droit, enfonce son couteau dans la fesse et il la tire vers lui et il ressent, ce faisant, une douleur subite et vive à l’épaule droite et au cou.
[24] Le travailleur termine son quart de travail avec difficulté. La douleur perdure en soirée et durant la nuit.
[25] Le travailleur se présente au travail le lendemain. Il ressent toujours une douleur à l’épaule droite et au cou. Il en parle à son contremaître et il lui demande de changer de poste. Il complète son quart de travail et il se présente au travail le lendemain. Toutefois, vers 8h30, il n’en peut plus, les douleurs sont trop fortes.
[26] Le travailleur quitte son travail et il consulte un médecin. Celui-ci diagnostique une douleur à l’épaule droite et à la région cervicale « d’origine musculaire » et il prévoit un arrêt du travail et des traitements pour cette condition. Le travailleur revoit son médecin les 18 et 29 septembre 2008. Ce dernier reprend le diagnostic de douleur à l’épaule droite lors de la première visite médicale, mais il propose un diagnostic de tendinite à l’épaule droite lors de la seconde et dernière visite. Il prévoit l’accomplissement de travaux légers du 30 septembre 2008 au 13 octobre 2008 et un retour au travail régulier par la suite.
[27] Le travailleur confirme avoir effectivement repris son travail normal à cette époque.
[28] Or, le 7 novembre 2008, la CSST rejette la réclamation du travailleur. Ce dernier demande la révision de cette décision mais, le 25 mai 2009, la Révision administrative la maintient d’où le présent litige.
[29] À l’audience, le travailleur mentionne qu’il ne comprend pas pourquoi la CSST a refusé sa demande. Il considère qu’il s’est fait mal au travail et qu’il devrait être indemnisé.
[30]
Or, la Commission des lésions professionnelles estime que le travailleur
peut bénéficier de l’application de la présomption de lésion professionnelle
prévue à l’article
[31] En effet, le premier diagnostic retenu par le médecin consulté est celui de douleur à l’épaule droite et à la région cervicale « d’origine musculaire ». La Commission des lésions professionnelles juge que cette douleur d’origine musculaire s’assimile à un étirement ou à une élongation surtout lorsque l’on considère le geste fait par le travailleur lors de l’apparition de celle-ci, à savoir une flexion antérieure de l’épaule droite et un effort pour tirer vers lui la fesse de porc à désosser.
[32] De plus, l’absence d’antécédents au niveau cervical et à l’épaule droite et l’apparition subite et aiguë de la douleur militent en faveur d’une blessure musculaire et non d’une maladie. Aussi, le court arrêt du travail et la résorption rapide des douleurs orientent vers une lésion traumatique mineure et non vers une maladie professionnelle de type tendinite.
[33]
La Commission des lésions professionnelles est donc d’avis que la
douleur à l’épaule droite et à la région cervicale d’origine musculaire
s’assimile à une blessure au sens de l’article
[34] Cette blessure arrive sur les lieux de travail alors que le travailleur accomplit son travail de désosseur. En outre, elle est dénoncée dès le lendemain et elle fait l’objet d’une consultation médicale dans les jours qui suivent.
[35] Dès lors, tous les éléments nécessaires à l’application de la présomption de lésion professionnelle sont réunis et, en l’absence de toute preuve visant à renverser cette présomption, la Commission des lésions professionnelles infirme la décision rendue par la Révision administrative et détermine que le travailleur a été victime d’une lésion professionnelle le 9 septembre 2008.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête déposée par le travailleur, monsieur Leonardo Flores;
INFIRME la décision rendue par la CSST le 25 mai 2009 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le travailleur a été victime d’une
lésion professionnelle, en application de la présomption de lésion
professionnelle prévue à l’article
DÉCLARE que le travailleur a droit aux prestations prévues à la loi.
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Carmen Racine |
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