Descheneaux c. Canada (Procureur général) |
2015 QCCS 3555 |
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JM 2158 |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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N° : |
500-17-048861-093 |
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DATE : |
3 août 2015 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : |
L’HONORABLE |
CHANTAL MASSE, J.C.S. |
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STÉPHANE DESCHENEAUX et SUSAN YANTHA et TAMMY YANTHA
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Demandeurs |
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c. |
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LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA |
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Défendeur |
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et
CHEF RICK O'BOMSAWIN, NICOLE O'BOMSAWIN, CLÉMENT SADOQUES, ALAIN O'BOMSAWIN ET JACQUES THÉRIAULT WATSO, en leur propre nom et en leur qualité de conseil élu représentant LES ABÉNAKIS D'ODANAK et CHEF RAYMOND BERNARD, CHRISTIAN TROTTIER, KEVEN BERNARD, LUCIEN MILLETTE ET NAYAN BERNARD, en leur propre nom et en leur qualité de conseil élu représentant LES ABÉNAKIS DE WÔLINAK Intervenants |
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JUGEMENT
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TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
I- LE CONTEXTE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1. Les principales dispositions législatives en cause . . . . . . . . . . . . . . . . 3
2. L'historique législatif avant la Loi de 1985 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
3. La Loi de 1985 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
4. L'affaire McIvor et la Loi de 2010 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
5. Les demandeurs et la discrimination qu'ils allèguent . . . . . . . . . . . . 18
6. Les conclusions recherchées par les demandeurs et la
position des autres parties . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
II- L'ANALYSE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
1. Dans quelle mesure la décision rendue dans McIvor lie-t-elle
le Tribunal? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2. Les demandeurs ont-ils la qualité pour agir? . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
3. Le recours entrepris demande-t-il une application
rétroactive de la Charte canadienne? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
4. Y a-t-il discrimination? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
4.1 Les principes généraux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
4.2 Le groupe comparateur retenu et les
caractéristiques personnelles pertinentes . . . . . . . . . . . . . . . 46
4.3 Le demandeur Descheneaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
4.4 Les demanderesses Susan et Tammy Yantha . . . . . . . . . . . . 59
5. La discrimination est-elle justifiée? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
5.1 L'objectif urgent et réel .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
5.2 La proportionnalité des moyens choisis . . . . . . . . . . . . . . . . 70
5.3 La Loi de 2010 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
5.4 Conclusion sur la justification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
6. Quel est le remède approprié? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
INTRODUCTION
[1] La discrimination fondée sur le sexe dont les Indiennes et leurs descendants ont été victimes dans le passé concernant le droit à l'inscription au registre des Indiens (« le Registre ») se perpétue-t-elle encore de nos jours? Si oui, une preuve démontrant qu'elle se justifie dans une société libre et démocratique a-t-elle été apportée? Le Tribunal est-il lié par la décision rendue par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique (« CACB ») dans McIvor c. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs)[1] (« McIvor ») ou existe-t-il des motifs lui permettant de s'en écarter en tout ou en partie? Ce sont là, en quelques mots, les questions essentielles qu'il faut résoudre ici.
[2] Sur le plan du droit à l'égalité en cause en l'espèce, le législateur s'est parfaitement acquitté de sa tâche quant au nouveau régime mis en place dans la Loi modifiant la Loi sur les Indiens[2] en 1985 et a remédié pour l'avenir à la discrimination fondée sur le sexe présente dans la Loi de 1951, loi qui a créé le Registre et déterminé les conditions à remplir pour être reconnu comme un Indien pouvant y être inscrit.
[3] Néanmoins, le traitement fait aux personnes auxquelles les deux régimes auront été applicables n'a pas parfaitement répondu aux exigences de ce droit fondamental. La décision rendue par la CACB dans l'affaire McIvor, la Cour suprême du Canada ayant refusé d'entendre l'affaire, a en effet donné lieu à un amendement législatif en 2010. La Loi de 2010 avait pour but de donner suite à cette décision en corrigeant la discrimination fondée sur le sexe découlant de certaines dispositions transitoires de la Loi de 1985.
[4] Dans cette affaire, la CACB a jugé justifié le traitement discriminatoire subsistant en raison de la préservation des droits acquis sous l'ancienne législation.
[5] La discrimination non justifiée identifiée par la CACB dans McIvor découlait d'un avantage additionnel conféré par la Loi de 1985 à un groupe particulier et non d'un droit acquis. Le législateur aurait pu décider d'identifier qui étaient les personnes souffrant d'une discrimination en raison d'un motif prohibé vis-à-vis ce groupe avantagé et tenter de remédier à cette discrimination. Il a plutôt choisi de restreindre le remède apporté aux seules parties au litige et aux personnes dans une situation rigoureusement identique à la leur.
[6] Tant les demandeurs que le Procureur général du Canada (« le PGC ») plaident que le Tribunal devrait s'écarter en partie de la décision rendue dans McIvor, chacun ne souhaitant voir retenu que ce qui l'avantage. Pour les raisons qui seront explicitées plus loin, il ne serait pas approprié de donner raison aux uns ou à l'autre sur ce point, du moins quant à ce qui relève des motifs essentiels et déterminants de cette décision.
[7] Tenant compte du précédent établi dans McIvor, le Tribunal doit décider en l'espèce si les demandeurs ont soit démontré qu'ils sont victimes de la discrimination non justifiée déjà identifiée dans cette décision de la CACB et à laquelle la Loi de 2010 n'aurait pas remédié, soit prouvé qu'ils sont victimes d'une discrimination qui n'aurait pas été identifiée dans cette affaire laquelle serait également injustifiée.
[8] Les demandeurs se sont tous trois déchargés de leur fardeau et ont prouvé des atteintes discriminatoires à leur droit à l'égalité. Le traitement discriminatoire dont ils souffrent découle d'une comparaison avec un sous-groupe faisant partie du groupe avantagé identifié par la CACB dans McIvor. Comme dans cette affaire, le PGC n'a pu démontrer que ces atteintes dues à une discrimination fondée sur le sexe se justifient dans le cadre d'une société libre et démocratique.
[9] Une discrimination de même nature que celle qui avait historiquement cours à l'endroit des Indiennes et de leurs descendants concernant leur inscription au Registre existe donc encore aujourd'hui malgré les tentatives du législateur de l'éradiquer en 1985 et en 2010. En fait, en traitant encore plus avantageusement un groupe déjà avantagé sous l'ancienne loi, la Loi de 1985 a accentué le traitement discriminatoire à l'endroit de certaines personnes, dont les demandeurs et d'autres personnes dans leur situation. La Loi de 2010 n'y a pas remédié ou, à tout le moins, pas pleinement.
[10] La discrimination fondée sur le sexe, bien que plus subtile qu'autrefois, a la vie dure.
[11] Voilà, en peu de mots, les résultats de l'analyse plus approfondie, et parfois bien technique, qui se retrouve après la mise en contexte qui suit.
I- LE CONTEXTE
[12] Les éléments permettant de comprendre le contexte et les enjeux de la présente affaire seront abordés en fonction des rubriques suivantes: les principales dispositions législatives en cause, l'historique législatif avant la Loi de 1985, la Loi de 1985, l'affaire McIvor et la Loi de 2010, les demandeurs et la discrimination qu'ils allèguent et, enfin, les conclusions recherchées par les demandeurs et la position des autres parties au litige.
1. Les principales dispositions législatives en cause
[13] La disposition législative au coeur du débat, l'article 6 de la Loi, incluant la modification qui a été faite en 2010 par l'ajout de l'alinéa 6(1)c.1), se lit comme suit:
«6. (1) Sous réserve de l’article 7, toute personne a le droit d’être inscrite dans les cas suivants :
a) elle était inscrite ou avait le droit de l’être le 16 avril 1985;
b) elle est membre d’un groupe de personnes déclaré par le gouverneur en conseil après le 16 avril 1985 être une bande pour l’application de la présente loi;
c) son nom a été omis ou retranché du registre des Indiens ou, avant le 4 septembre 1951, d’une liste de bande, en vertu du sous-alinéa 12(1)a)(iv), de l’alinéa 12(1)b) ou du paragraphe 12(2) ou en vertu du sous-alinéa 12(1)a)(iii) conformément à une ordonnance prise en vertu du paragraphe 109(2), dans leur version antérieure au 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui d’une de ces dispositions;
c.1) elle remplit les conditions suivantes :
(i) le nom de sa mère a été, en raison du mariage de celle-ci, omis ou retranché du registre des Indiens ou, avant le 4 septembre 1951, d’une liste de bande, en vertu de l’alinéa 12(1)b) ou en vertu du sous-alinéa 12(1)a)(iii) conformément à une ordonnance prise en vertu du paragraphe 109(2), dans leur version antérieure au 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui d’une de ces dispositions,
(ii) son autre parent n’a pas le droit d’être inscrit ou, s’il est décédé, soit n’avait pas ce droit à la date de son décès, soit n’était pas un Indien à cette date dans le cas d’un décès survenu avant le 4 septembre 1951,
(iii) elle est née à la date du mariage visé au sous-alinéa (i) ou après cette date et, à moins que ses parents se soient mariés avant le 17 avril 1985, est née avant cette dernière date,
(iv) elle a eu ou a adopté, le 4 septembre 1951 ou après cette date, un enfant avec une personne qui, lors de la naissance ou de l’adoption, n’avait pas le droit d’être inscrite;
d) son nom a été omis ou retranché du registre des Indiens ou, avant le 4 septembre 1951, d’une liste de bande, en vertu du sous-alinéa 12(1)a)(iii) conformément à une ordonnance prise en vertu du paragraphe 109(1), dans leur version antérieure au 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui d’une de ces dispositions;
e) son nom a été omis ou retranché du registre des Indiens ou, avant le 4 septembre 1951, d’une liste de bande :
(i) soit en vertu de l’article 13, dans sa version antérieure au 4 septembre 1951, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet article,
(ii) soit en vertu de l’article 111, dans sa version antérieure au 1er juillet 1920, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet article;
f) ses parents ont tous deux le droit d’être inscrits en vertu du présent article ou, s’ils sont décédés, avaient ce droit à la date de leur décès.
(2) Sous réserve de l’article 7, une personne a le droit d’être inscrite si l’un de ses parents a le droit d’être inscrit en vertu du paragraphe (1) ou, s’il est décédé, avait ce droit à la date de son décès.
(3) Pour l’application de l’alinéa (1)f) et du paragraphe (2) :
a) la personne qui est décédée avant le 17 avril 1985 mais qui avait le droit d’être inscrite à la date de son décès est réputée avoir le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa (1)a);
b) la personne visée aux alinéas (1)c), d), e) ou f) ou au paragraphe (2) et qui est décédée avant le 17 avril 1985 est réputée avoir le droit d’être inscrite en vertu de ces dispositions;
c) la personne visée à l’alinéa (1) c.1) et qui est décédée avant l’entrée en vigueur de cet alinéa est réputée avoir le droit d’être inscrite en vertu de celui-ci.»
[14] C'est l'effet de cette disposition sur les personnes à qui la règle dite de la double-mère s'appliquait jusqu'à son entrée en vigueur qui cause problème.
[15] La règle de la double-mère était prévue au sous-alinéa 12(1)a)(iv) de la Loi de 1951. Les articles 10 à 12 de cette loi sont instructifs quant au régime discriminatoire applicable jusqu'à l'entrée en vigueur de la Charte canadienne:
«10. Lorsque le nom d'une personne du sexe masculin est inclus dans une liste de bande ou une liste générale, ou y est ajouté ou omis, ou en est retranché, les noms de son épouse et de ses enfants mineurs doivent également être inclus, ajoutés, omis ou retranchés, selon le cas.
11. Sous réserve de l'article douze, une personne a droit d'être inscrite si
a) elle était, le vingt-six mai mil huit cent soixante-quatorze, aux fins de la loi alors intitulée: Acte pourvoyant à l'organisation du Département du Secrétaire d'État du Canada, ainsi qu'à l'administration des Terres des Sauvages et de l'Ordonnance, chapitre quarante-deux des Statuts de 1868, modifiée par l'article six du chapitre six des Statuts de 1869 et par l'article huit du chapitre vingt et un des Statuts de 1874, considérée comme ayant droit à la détention, l'usage ou la jouissance des terres et autres biens immobiliers appartenant aux tribus, bandes ou groupes d'Indiens au Canada, ou affectés à leur usage,
b) elle est membre d'une bande
(i) à l'usage et au profit communs de laquelle des terres ont été mises de côté ou, depuis le vingt-six mai mil huit cent soixante-quatorze, ont fait l'objet d'un traité les mettant de côté, ou
(ii) que le gouverneur en conseil a déclaré une bande aux fins de la présente loi,
c) elle est du sexe masculin et descendante directe, dans la ligne masculine, d'une personne du sexe masculin décrite à l'alinéa a) ou b),
d) elle est l'enfant légitime
(i) d'une personne du sexe masculin décrite à l'alinéa a) ou b), ou
(ii) d'une personne décrite à l'alinéa c),
e) elle est l'enfant illégitime d'une personne du sexe féminin décrite à l'alinéa a), b) ou d), à moins que le registraire ne soit convaincu que le père de l'enfant n'était pas un Indien et n'ait déclaré que l'enfant n'a pas le droit d'être inscrit, ou
f) elle est l'épouse ou la veuve d'une personne ayant le droit d'être inscrite aux termes de l'alinéa a), b), c), d) ou e).
12. (1) Les personnes suivantes n'ont pas le droit d'être inscrites, savoir:
a) une personne qui
(i) a reçu ou à qui il a été attribué, des terres ou certificats d'argent de métis,
(ii) est un descendant d'une personne décrite au sous-alinéa (i),
(iii) est émancipée, ou
(iv) est née d'un mariage contracté après l'entrée en vigueur de la présente loi et a atteint l'âge de vingt et un ans, dont la mère et la grand-mère paternelle ne sont pas des personnes décrites à l'alinéa a), b) ou d) ou admises à être inscrites en vertu de l'alinéa e) de l'article onze,
sauf si, étant une femme, cette personne est l'épouse ou la veuve de quelqu'un décrit à l'article onze, et
b) une femme qui a épousé une personne non-Indienne.
(2) Le Ministre peut délivrer à tout Indien auquel la présente loi cesse de s'appliquer, un certificat dans ce sens.»
[16] Ces dispositions sont demeurées en vigueur telles quelles jusqu'en 1985, sauf un amendement survenu en 1956 lequel n'a pas d'impact en l'espèce.
[17] En lien avec la discrimination dont se plaignent les demanderesses Susan et Tammy Yantha, l'alinéa (2) e) de la Loi de 1927 revêt une pertinence particulière:
« 2. En la présente loi, à moins que le contexte ne s'y oppose, l'expression
[…]
e) «Indien» signifie
i) tout individu du sexe masculin et de sang Indien réputé appartenir à une bande particulière,
ii) tout enfant de cet individu,
iii) toute femme qui est ou a été légalement mariée à cet individu; »
[18] Ces dispositions ainsi que les autres dispositions législatives les plus pertinentes sont reproduites en anglais et en français en annexe à la présente décision.
2. L'historique législatif avant la Loi de 1985
[19] Plusieurs décisions judiciaires font état de façon détaillée de la discrimination fondée sur le sexe dont ont historiquement souffert les Indiennes depuis la fin du 19ième siècle en lien avec leur statut et celui de leurs descendants. Cette discrimination directe, sans aucune subtilité, écrite noire sur blanc dans de multiples lois au fil du temps, a entièrement subsisté jusqu'à l'entrée en vigueur de la Loi de 1985 le 17 avril 1985, laquelle a coïncidé avec celle de l'article 15 de la Charte canadienne.
[20] Au Canada, les Indiennes, dès qu'elles épousaient un non-Indien, perdaient leur statut, et ce, depuis même avant la Loi de 1951. Par opposition, leurs semblables de sexe masculin épousant une non-Indienne, non seulement conservaient leur statut d'Indien mais se trouvaient à le conférer à la personne ayant convolé en justes noces avec eux. Ainsi, avant 1985, les personnes dont le père Indien avait épousé une non-Indienne (avant son mariage) se voyaient considérées Indiennes, sous réserve de la règle de la double-mère, alors que les enfants d'Indiennes ayant perdu leur statut en raison de leur mariage à un non-Indien n'étaient pas considérés comme des Indiens.
[21] La CACB résume bien l'évolution du régime législatif au fil du temps, y compris la règle de la double-mère, à une nuance près. Voici ce qu'elle en dit:
« [14] Historically, members of First Nations in Canada were subject to special disqualifications as well as special entitlements. Not surprisingly, it became necessary, even prior to Confederation, to enact legislation setting out who was and who was not considered to be an Indian. In 1868, the first post-confederation statute establishing entitlement to Indian status was enacted. Section 15 of An Act providing for the organisation of the Department of the Secretary of State of Canada, and for the management of Indian and Ordnance Lands, S.C. 1868, c. 42 (31 Vict.) provided as follows:
15. For the purpose of determining what persons are entitled to hold, use or enjoy the lands and other immoveable property belonging to or appropriated to the use of the various tribes, bands or bodies of Indians in Canada, the following persons and classes of persons, and none other, shall be considered as Indians belonging to the tribe, band or body of Indians interested in any such lands or immoveable property:
Firstly. All persons of Indian blood, reputed to belong to the particular tribe, band or body of Indians interested in such lands or immoveable property, and their descendants;
Secondly. All persons residing among such Indians, whose parents were or are, or either of them was or is, descended on either side from Indians or an Indian reputed to belong to the particular tribe, band or body of Indians interested in such lands or immoveable property, and the descendants of all such persons; And
Thirdly. All women lawfully married to any of the persons included in the several classes hereinbefore designated; the children issue of such marriages, and their descendants.
[15] This early legislation, then, treated Indian men and women differently, in that an Indian man could confer status on his non-Indian wife through marriage, while an Indian woman could not confer status on her non-Indian husband. It appears that one rationale for this distinction was a fear that non-Indian men might marry Indian women with a view to insinuating themselves into Indian bands and acquiring property reserved for Indians.
[16] In 1869, the first legislation that deprived Indian women of their status upon marriage to non-Indians was passed. Section 6 of An Act for the gradual enfranchisement of Indians, the better management of Indian affairs, and to extend the provisions of the Act 31st Victoria, Chapter 42, S.C. 1869, c. 6 (32-33 Vict.) amended s. 15 of the 1868 statute by adding the following proviso:
Provided always that any Indian woman marrying any other than an Indian shall cease to be an Indian within the meaning of this Act, nor shall the children issue of such marriage be considered as Indians within the meaning of this Act; Provided also, that any Indian woman marrying an Indian of any other tribe, band or body shall cease to be a member of the tribe, band or body to which she formerly belonged, and become a member of the tribe, band or body of which her husband is a member, and the children, issue of this marriage, shall belong to their father’s tribe only.
[17] The traditions of First Nations in Canada varied greatly, and this new legislation did not reflect the aboriginal traditions of all First Nations. To some extent, it may be the product of the Victorian mores of Europe as transplanted to Canada. The legislation largely parallels contemporary views of the legal status of women in both English common law and French civil law. The status of a woman depended on the status of her husband; upon marriage, she ceased, in many respects for legal purposes, to be a separate person in her own right.
[18] The general structure of 1869 legislation was preserved in the first enactment of the Indian Act, as S.C. 1876, c. 18 (39 Vict.). This statute added further bases for the loss of Indian status, including provisions whereby an illegitimate child of an Indian could be excluded by the Superintendent General of Indian Affairs.
[19] Substantial changes in the regime were introduced in the Indian Act, S.C. 1951, c. 29 (15 Geo. VI). The statute created an “Indian Register”. Sections 10-12 of the Act defined entitlement to registration as an Indian:
[le texte des dispositions législatives, citées au long dans la décision, est omis]
[20] Apart from one amendment in 1956, this legislation survived intact until the 1985 legislation. The 1956 amendment made a change in the manner in which the registration of an illegitimate child could be nullified. It allowed the council of the band to which a child was registered, or any ten electors of the band, to file a written protest against the registration of the child on the ground that the child’s father was not an Indian. The Registrar was then required to investigate the situation, and to exclude the child if the child’s father was determined to be a non-Indian.
[21] For the purposes of this litigation, then, there were three significant features of the legislation that immediately pre-dated the coming into force of s. 15 of the Charter: First, a woman lost her status as an Indian if she married a non-Indian. On the other hand, an Indian man retained his status if he married a non-Indian, and his wife also became entitled to status.
[22] Second, a child born of a marriage between an Indian and a non-Indian was an Indian only if his or her father was an Indian. The rules for illegitimate children were more complex - if both parents were Indians, the child was an Indian. If only the father was an Indian, the child was non-Indian, and if only the mother was an Indian, the child was an Indian, but subject to being excluded if a protest was made.
[23] Finally, from 1951 onward, where an Indian man married a non-Indian woman, any child that they had was an Indian. If, however, the Indian man’s mother was also non-Indian prior to marriage, the child would cease to have Indian status upon attaining the age of 21 under the Double Mother Rule.»[3]
[22] La seule nuance que le Tribunal apporterait à cet exposé, nuance qui n'avait aucun impact dans l'affaire dont était saisie la CACB mais qui a donné lieu à des arguments dans le présent dossier, résulte de l'effet conjoint du texte de l'alinéa 11(c) -devenu 11(1)c) à compter de 1956- et du sous-alinéa 12(1)a)(iv) de la Loi de 1951 ainsi que du régime applicable aux enfants illégitimes d'Indiens de sexe masculin.
[23] Le sous-alinéa 12(1)a)(iv) prévoyant la règle de la double-mère précise ne s'appliquer qu'aux enfants d'un mariage contracté après son entrée en vigueur, soit le 4 septembre 1951. Cette disposition ne fait cependant mention d'aucune exigence selon laquelle leur père Indien devrait être né d'un mariage aux fins de l'application de la règle de la double-mère. Or, en fonction du régime applicable avant 1951, le terme « Indien » était défini comme incluant notamment tout enfant d'un Indien de sexe masculin, sans égard au fait qu'il soit légitime ou non et sans égard à son sexe[4].
[24] À partir du 4 septembre 1951, l'enfant illégitime de sexe masculin d'un Indien pouvait être inscrit au Registre suivant l'alinéa 11(c) -devenu 11(1)c) à la suite d'amendements en 1956-, mais non l'enfant illégitime de sexe féminin[5].
[25] Il résulte de ces dispositions qu'aux fins de l'application de la règle de la double-mère, applicable à des enfants nés d'un mariage contracté entre le 4 septembre 1951 et le 16 avril 1985 inclusivement, il n'est pas nécessaire que le grand-père Indien et la grand-mère non-Indienne aient été mariés ou, autrement dit, que le père Indien soit un enfant légitime.
[26] Ainsi, suivant la règle de la double-mère, si leur père Indien avait épousé une non-Indienne après 1951 et était lui-même le fruit des relations entre un Indien et une non-Indienne, mariés ou non, les enfants d'un tel mariage n'avaient le droit de conserver leur statut d'Indien inscrit au Registre que jusqu'à 21 ans.
[27] Il faut noter que la preuve révèle toutefois que la règle de la double-mère a fait l'objet de nombreuses exemptions à la demande de certaines bandes. La règle ne s'appliquant pas aux membres de ces bandes, les Indiens de sexe masculin qui y appartenaient pouvaient avoir des enfants avec des non-Indiennes sur plusieurs générations sans qu'il y ait de conséquences sur le statut de leurs descendants, sauf s'il s'agissait de filles illégitimes. De plus, la règle de la double-mère n'était pas uniformément appliquée dans les faits, les enfants qui auraient dû en droit en être rayés à 21 ans demeurant parfois inscrits au Registre leur vie durant.
[28] Enfin, à compter de la Loi de 1951, les enfants illégitimes d'une Indienne étaient inscrits au Registre à moins que le registraire considère que leur père n'était pas un Indien. Par la suite, tel que mentionné par la CACB, la Loi de 1951 telle que modifiée en 1956, a prévu que de tels enfants, si nés après l'entrée en vigueur de cette modification, étaient inscrits sous réserve d'une protestation dans les 12 mois de leur ajout au Registre donnant lieu à une décision suivant laquelle l'enfant n'a pas le droit d'être inscrit parce que son père n'est pas Indien.
3. La Loi de 1985
[29] Ce qui précède a changé à compter du 17 avril 1985, date d'entrée en vigueur de la Loi de 1985, mais, cependant, sans que le nouveau régime corrige toutes les inégalités du passé et en reconnaissant le statut des personnes inscrites au Registre et le droit des personnes qui auraient pu y être inscrites suivant les règles qui leur étaient applicables immédiatement avant l'entrée en vigueur de la Loi de 1985. C'est l'effet de l'alinéa 6(1)(a) de la Loi stipulant que sous réserve de l'article 7, cette disposition n'ayant pas d'incidence en l'espèce, une personne qui était inscrite ou avait droit de l'être immédiatement avant le 17 avril 1985 a droit d'être inscrite au Registre.
[30] Soulignons qu'auparavant, l'article 7 de la Loi de 1951 permettait notamment au registraire de retirer des listes formant le Registre le nom de toute personne n'ayant pas droit d'y être inscrite.
[31] Il résulte de la Loi de 1985 que les noms des personnes inscrites au Registre immédiatement avant son entrée en vigueur ne peuvent en principe plus en être retirés, et ce, sans égard aux véritables droits de ces personnes en vertu de la loi applicable à ce moment. C'est d'ailleurs cette interprétation qui a été retenue par la CACB dans Marchand v. Canada (Registrar, Indian and Northern Affairs)[6], celle-ci s'abstenant toutefois de décider si les personnes inscrites frauduleusement pouvaient se prévaloir du statut d'Indien[7].
[32] Rectifiant certaines situations du passé, le législateur a choisi de conférer le droit de s'inscrire aux Indiennes exclues en raison de leur mariage à un non-Indien, aux personnes victimes de la règle de la double-mère, aux enfants illégitimes d'Indiennes exclus à la suite d'une protestation ainsi qu'à des personnes exclues pour certains autres motifs.
[33] La règle neutre nouvellement mise en place est dite du « second generation cut off ». Elle veut qu'aient droit à l'inscription sous 6 (1) les enfants de deux parents, en vie ou décédés après l'entrée en vigueur de la Loi de 1985, ayant droit d'être inscrits en vertu de l'article 6. Toutefois, si un seul parent a droit à l'inscription en vertu de cette disposition, l'inscription de l'enfant est faite sous 6(2). Dans ce dernier cas, la génération suivante ne pourra être inscrite que si le parent 6(2) a un enfant avec une personne ayant le droit d'être inscrite sous 6(1) ou 6(2). La règle ainsi mise en place vise à éradiquer la discrimination fondée sur le sexe que le régime antérieur avait érigée en système.
[34] Il est évident que si cette règle avait été applicable en tout temps, aucune discrimination fondée sur le sexe n'aurait eu cours. La difficulté réside plutôt dans l'effet des autres dispositions ayant reconnu certains droits aux Indiens inscrits avant l'entrée en vigueur de la Loi de 1985 ainsi qu'à d'autres personnes. En fait, c'est la transition entre les deux régimes qui s'avère problématique, tel que mentionné par la CACB dans l'affaire McIvor.
[35] Une observation: cette nouvelle règle fait en sorte que jamais les Indiennes et leurs descendants n'auront reçu un traitement aussi favorable que celui que les lois d'avant 1985 accordaient aux Indiens et à leurs descendants.
4. L'affaire McIvor et la Loi de 2010
[36] La Loi de 2010 avait l'objectif moins ambitieux de donner suite à la décision de la CACB dans McIvor constatant que la Loi de 1985 avait créé une nouvelle discrimination injustifiée. Sharon McIvor, son fils Jacob Grismer et les enfants de celui-ci appartenaient à un groupe victime de cette discrimination.
[37] Dans leur recours, McIvor et Grismer contestaient la constitutionnalité des paragraphes 6(1) et 6(2) de la Loi de 1985. Ils alléguaient notamment que la discrimination historique à l'endroit des femmes Indiennes perdurait en raison des doits acquis reconnus à l'alinéa 6(1) a). Ils soutenaient que la Loi de 1985 avait pour effet de maintenir la discrimination entre les descendants des hommes Indiens et ceux des femmes Indiennes.
[38] La décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique (« CSCB »), l'équivalent de la Cour supérieure au Québec, leur a donné raison, constatant une telle discrimination sur la base du sexe et du statut matrimonial[8]. La juge de première instance décida également du remède à accorder, dont l'objet était de permettre l'inscription au Registre des personnes pouvant retracer parmi leurs ancêtres une femme ayant perdu son statut d'Indienne en raison de son mariage à un non-Indien[9].
[39] En appel de cette décision, la CACB en a ramené la portée à ce dont les demandeurs pouvaient eux-mêmes se plaindre. Refusant de retenir la discrimination sur une base matrilinéaire qui était alléguée, elle a considéré que ce dont McIvor et Grismer souffraient découlait d'une discrimination fondée sur le sexe à l'endroit de McIvor, celle-ci ayant perdu son statut en se mariant à un non-Indien.
[40] À la suite de l'entrée en vigueur de la Loi de 1985, sa mère ayant retrouvé son statut en vertu de 6(1)c), Grismer a eu droit au statut 6(2), alors que dans le groupe auquel il se comparait, les enfants du père Indien ayant épousé une non-Indienne (avant son mariage) se voyaient attribuer le statut 6(1). Si Grismer disposait pour lui-même du statut d'Indien, ses enfants avec une non-Indienne n'en bénéficieraient pas alors que les enfants des personnes de sexe masculin appartenant au groupe comparateur, mariées comme lui après 1985 à des non-Indiennes, allaient pouvoir bénéficier du statut 6(2).
[41] Selon la CACB, cette situation discriminatoire était justifiée dans la mesure où il s'agissait de préserver les droits acquis des personnes appartenant au groupe comparateur en vertu de la législation en vigueur avant le 17 avril 1985.
[42] Cependant, en reconnaissant aux enfants d'un père Indien et d'une non-Indienne visés par la règle de la double-mère un statut d'Indien au-delà de leurs 21 ans, la Loi de 1985 améliorait le statut d'un groupe déjà avantagé. Cette discrimination amplifiait la différence de traitement entre ce groupe et celui auquel appartenaient les enfants dont la mère Indienne avait perdu son statut en raison de son mariage à un non-Indien. Cette discrimination additionnelle créée par la Loi de 1985 a été considérée comme ne portant pas minimalement atteinte au droit à l'égalité et comme ne se justifiant pas en vertu de l'article 1 de la Charte canadienne. Voici l'essentiel des conclusions de la CACB dans McIvor:
« [93] In any event, it seems to me that the inherently multi-generational nature of legislation of the sort involved in this case and in Benner requires a court to take a broad, “purposive approach” to determining issues of discrimination and of standing. The determination of Indian status under the Indian Act requires an examination of three generations (here, Ms. McIvor, Mr. Grismer, and his children); it would not be in keeping with the purpose of s. 15 of the Charter to hold that sex discrimination directed at one of those three generations was inconsequential so long as the disadvantageous treatment accrued only to another of them.
[…]
[111] The impugned legislation in this case is, in my opinion, discriminatory as that concept is used in s. 15 of the Charter. The historical reliance on patrilineal descent to determine Indian status was based on stereotypical views of the role of a woman within a family. It had (in the words of Law) “the effect of perpetuating or promoting the view that [women were] ... less ... worthy of recognition or value as a human being[s] or as a member[s] of Canadian society, equally deserving of concern, respect, and consideration”. The impugned legislation in this case is the echo of historic discrimination. As such, it serves to perpetuate, at least in a small way, the discriminatory attitudes of the past.
[112] The limited disadvantages that women face under the legislation are not preserved in order to, in some way, ameliorate their position, or to assist more disadvantaged groups. None of the distinctions is designed to take into account actual differences in culture, ability, or merit.
[…]
[122] The discrimination in this case is the result of under-inclusive legislation. The combination of s. 6(1)(a) and 6(2) of the Indian Act results in a situation in which people in Mr. Grismer's position are unable to transmit Indian status to their children only because their mothers, rather than their fathers, are entitled to status as Indians. This discrimination applies only to a group caught in the transition between the old regime and the new one.
[…]
[151] I find that the infringement of the plaintiffs' s. 15 rights is not saved by s. 1 of the Charter. In according members of the comparator group additional rights beyond those that they possessed prior to April 17, 1985, the 1985 legislation did not minimally impair the equality rights of the plaintiffs. However, the legislation does pass all other aspects of the s. 1 test.
[…]
[154] The Charter violation that I find to be made out is a much narrower one than was found by the trial judge. The 1985 legislation violates the Charter by according Indian status to children
i) who have only one parent who is Indian (other than by reason of having married an Indian).
ii) where that parent was born prior to April 17, 1985, and
iii) where that parent in turn only had one parent who was Indian (other than by reason of having married an Indian).
If their Indian grand-parent is a man, but not if their Indian grandparent is a woman.
[155] The legislation would have been constitutional if it had preserved only the status that such children had before 1985. By according them enhanced status, it created new inequalities, and violated the Charter.
[156] There are two obvious ways in which the violation of s. 15 might have been avoided. The 1985 legislation could have given status under an equivalent of s. 6(1) to people in Mr. Grismer's situation. Equally, it could have preserved only the existing rights of those in the comparator group. While these are the obvious ways of avoiding a violation of s. 15, other, more complicated, solutions might also have been found.
[…]
[161] Sections 6(1)(a) and 6(1)(c) of the Indian Act violate the Charter to the extent that they grant individuals to whom the Double Mother Rule applied greater rights than they would have had under s. 12(1)(a)(iv) of the former legislation. Accordingly, I would declare ss. 6(1)(a) and 6(1)(c) to be of no force and effect, pursuant to s. 52 of the Constitution Act, 1982. I would suspend the declaration for a period of 1 year, to allow Parliament time to amend the legislation to make it constitutional.
[…]
[165] […] In particular, I find that the infringement of s. 15 would be saved by s.1 but for the advantageous treatment that the 1985 legislation accorded those to whom the Double Mother Rule under previous legislation applied.
[166] I would allow the appeal, and substitute for the order of the trial judge and order declaring ss. 6(1)(a) and 6(1)(c) of the Indian Act to be of no force and effect. I would suspend the declaration for a period of 1 year. »[10]
[43] La demande d'autorisation d'appel à la Cour suprême présentée par les demandeurs dans cette affaire a été rejetée. Le PGC n'avait pas présenté de telle demande mais avait indiqué vouloir procéder par appel incident advenant que la Cour suprême accorde la requête des demandeurs.
[44] Deux jugements ont prolongé la durée de la suspension. Dans le premier jugement, la CACB devait disposer d'une demande d'accorder immédiatement le statut aux enfants de Grismer comme condition à la prolongation de la suspension, ce qu'elle a refusé. À cette occasion, ayant en mains un projet de loi, elle s'exprimait comme suit, mentionnant au passage que les enfants de Grismer appartenaient à un groupe de
personnes victimes de discrimination et que d'autres solutions que celles envisagées dans leur décision étaient disponibles au législateur:
« [14] We do not think it is accurate to describe our reasons as affirming the rights of Mr. Grismer's children to registration under the Indian Act. Rather, we found that aspects of the current regime put them in a manner within a class of persons who had been treated less favourably than others under the Act, that infringed their equality rights. We recognized that an obvious option open to the government to redress the inequality was to extend the right to Indian status to persons in the positions of Mr. Grismer's children. We also recognized, however, that other methods of eliminating the inequality might also be available to government, and left it to Parliament to formulate an appropriate response. »[11]
[45] Dans le jugement prolongeant une seconde fois les délais, la CACB tient les propos suivants:
« [6] There were, we are advised, inter-party discussions on the bill between May 25 and June 17, 2010. We have been provided with some material that indicates that the bill's passage through the House of Commons has been slowed down because some members of the House wish to broaden the bill to deal with issues beyond those specifically raised by this Court's decision of April 6, 2009.
[…]
[8] Parliament, of course, is the master of its own procedure, and we do not in any way wish to interfere with its processes. The Court recognizes that there are many issues that must be dealt with in Parliament. We would remind the Attorney General, however that a final determination by the courts that provisions of the Indian Act violate constitutional rights is a serious matter that must be dealt with expeditiously. We would also observe that while efforts of Members of Parliament to improve provisions of the Indian Act not touched by our decision are laudable, those efforts should not be allowed to unduly delay the passage of legislation that deals with the specific issues that this Court has identified as violating the Charter. »[12]
[46] Notons que ces commentaires de la CACB n'exemptaient certainement pas le législateur de poursuivre ses efforts dans le but d'édicter une loi exempte de toute discrimination ne pouvant être justifiée, comme c'est son obligation constitutionnelle de le faire. Au contraire, la CACB reconnaissait que plusieurs enjeux devaient être traités par le législateur.
[47] La Loi de 2010 n'a cependant pas cherché à remédier à toute discrimination pouvant résulter du traitement avantageux que la Loi de 1985 a réservé aux personnes auxquelles la règle de la double-mère s'appliquait avant son entrée en vigueur. Le législateur a plutôt choisi des mesures ne s'appliquant qu'aux personnes qui étaient dans une situation rigoureusement identique à celle de Grismer.
[48] Du choix législatif retenu, découlent les quatre conditions énoncées à l'alinéa 6(1) c.1), déterminant qui sont les nouvelles personnes pouvant s'inscrire à la suite de la décision rendue dans l'affaire McIvor et de l'entrée en vigueur de la Loi de 2010:
· Le nom de la mère de cette personne doit avoir été omis ou retranché du Registre -ou d'une liste de bande avant 1951- en raison de son mariage.
· L'autre parent de cette personne n'a pas le droit à l'inscription ou, s'il est décédé, soit n'avait pas ce droit à son décès, ou n'était pas un Indien à cette date dans le cas d'un décès survenu avant le 4 septembre 1951.
· La personne doit être née à la date du mariage ayant donné lieu à l'exclusion de sa mère ou après cette date, et, à moins que ses parents se soient mariés avant le 17 avril 1985, est née avant cette dernière date.
· La personne doit avoir eu ou adopté un enfant le 4 septembre 1951 ou après avec une personne qui n'avait pas le droit d'être inscrite.
[49] Faute de rencontrer chacune de ces conditions, la personne qui ne pouvait s'inscrire sous 6(1) avant les amendements ne pourra davantage obtenir ce statut à la suite de ceux-ci.
[50] Par ailleurs, l'effet de la Loi de 2010 est de ne conférer aux enfants de Grismer qu'un statut 6(2) par ricochet, vu le statut 6(1) accordé à leur père. La situation factuelle particulière de Grismer, qui s'est marié après 1985, n'est sans doute pas étrangère à la décision du législateur, la CACB ayant constaté que les enfants des personnes appartenant au groupe comparateur qu'elle avait retenu et qui se sont mariées après cette date à des non-Indiennes, obtenaient ce statut.
[51] Seule la femme Indienne ayant perdu son statut par mariage doit s'être mariée à un moment précis, soit avant le 17 avril 1985, car sa perte de statut ne pouvait plus survenir après cette date. Ses descendants n'avaient pas à s'être mariés au même moment que les personnes membres du groupe comparateur, ni même à s'être mariés, mais seulement à avoir une situation identique sur le plan de leurs ancêtres Indiens à celle des membres du groupe comparateur.
[52] En effet, il découle de la décision de la CACB que la caractéristique pertinente quant à la capacité de transmettre le statut d'Indien à un enfant est constituée des ancêtres Indiens nécessaires à cette fin, les ancêtres Indiens excluant les non-Indiennes ayant acquis le statut par mariage.
[53] Toutes ces questions seront traitées plus en détail ci-après, mais il est utile de souligner immédiatement que rien n'empêchait la comparaison avec le groupe encore mieux traité par la Loi de 1985 des personnes à qui la règle de la double-mère s'appliquait avant 1985 et qui se sont mariées avant 1985. Les enfants de ces personnes obtenaient un statut 6(1) à vie et non un statut 6(2) à vie.
[54] Ainsi, conférer par ricochet un statut 6(2) aux enfants de Grismer, comme le suggérait la CACB et comme l'a fait le législateur, ne corrigeait pas la pleine mesure de la discrimination à leur endroit. Il faut ajouter qu'une telle comparaison n'a toutefois pas été plaidée dans McIvor. Descheneaux est l'une des victimes de cette situation. Nous y reviendrons également.
5. Les demandeurs et la discrimination qu'ils allèguent
[55] Le demandeur Stéphane Descheneaux a des enfants nés entre 2002 et 2007 qui ne peuvent être inscrits au Registre puisqu'il a épousé une non-Indienne et ne possède qu'un statut en vertu de 6(2). Il soutient qu'il est privé du statut en vertu de 6(1) en raison d'une discrimination fondée sur le sexe.
[56] Sa grand-mère, Clémente O'Bomsawin, avait perdu son statut en 1935 à la suite de son mariage avec un non-Indien. Sa mère, Hélène Durand, n'avait aucun statut à la naissance et s'est mariée à un non-Indien. Stéphane Descheneaux est né en 1968, bien avant la Loi de 1985, sans statut. Sa grand-mère a récupéré son statut d'Indienne en vertu de 6(1)c) de la Loi de 1985, sa mère obtenant par la même occasion un statut en vertu de 6(2). Stéphane Descheneaux était alors toujours sans statut.
[57] À la suite de la Loi de 2010, la mère de Stéphane Descheneaux a bénéficié d'un statut en vertu de 6(1)c.1) puisqu'elle rencontrait chacune des 4 conditions qui y sont prévues. Stéphane Descheneaux n'a cependant tiré aucun bénéfice direct de cette disposition, le nom de sa mère n'ayant pas été omis ou retranché du Registre en raison de son mariage puisqu'elle n'avait pas droit au statut à sa naissance ni avant son mariage. La disposition a cependant eu l'effet, par ricochet, de conférer à Stéphane Descheneaux un statut en vertu de 6(2).
[58] La nature de la discrimination dont Stéphane Descheneaux se plaint est explicitée dans la conclusion déclaratoire qu'il recherche relativement à l'article 6 de la Loi sur les Indiens:
« B- DÉCLARER que l'article 6 de la Loi sur les Indiens viole la garantie d'égalité stipulée au paragraphe 15 (1) de la Charte canadienne des droits et libertés, en ce qu'il crée une différence de traitement discriminatoire:
1- Entre:
a. d'une part, les petits-enfants d'une Indienne ayant marié un non-Indien, nés comme le demandeur Stéphane Descheneaux d'un mariage formé entre le 4 septembre 1951 et le 16 avril 1985 ou nés hors mariage entre les mêmes dates; et
b. d'autre part, les petits-enfants d'un Indien ayant marié une non-Indienne nés de mariages formés entre le 4 septembre 1951 et le 16 avril 1985 ou nées hors mariage entre les mêmes dates;
en ce qui concerne leur capacité respective à transmettre à leurs enfants le droit à l'inscription au Registre des Indien;
[…] »[13]
[59] Le demandeur Descheneaux plaide notamment que cette distinction fondée sur le sexe du grand-parent Indien est discriminatoire en perpétuant un stéréotype selon lequel l'identité Indienne des femmes et de leurs descendants ne serait pas aussi digne de considération ou n'aurait pas une aussi grande valeur que celle des hommes Indiens et de leurs descendants et en ayant pour effet que les enfants de Stéphane Descheneaux ne peuvent se voir transmettre le statut d'Indien ni jouir de certains bénéfices attachés à celui-ci, y compris des bénéfices liés à leur éducation postsecondaire, ce qui a également un impact sur lui. Il soutient de plus qu'il souffre dans sa dignité de l'inégalité de statut avec les personnes appartenant au groupe auquel il se compare.
[60] Il allègue enfin que l'article 6 de la Loi est interprété et appliqué de manière à faire perdurer ce traitement discriminatoire, ce qui serait contraire à la Charte canadienne.
[61] Les demanderesses Susan Yantha et Tammy Yantha ont une histoire quelque peu différente.
[62] Susan Yantha est la fille illégitime d'un Indien et d'une non-Indienne. Elle est née en 1954 et n'avait aucun statut à la naissance, ignorant même dans les premières années de sa vie que son père biologique était Indien. Elle apprend qui est son père à la fin de l'adolescence et tente une première prise de contact sans succès. Elle a par la suite un enfant avec un non-Indien, la demanderesse Tammy Yantha, en 1972. Son mariage a été dissout par un tribunal ecclésiastique en février 1976[14]. Aucun jugement de divorce n'a été produit au dossier. Elle se remarie en novembre 1976 et elle a un second enfant, Dennis, en 1983. Susan reprend contact avec son père Indien et met également Tammy en contact avec celui-ci. Le père biologique Indien de Susan l'adopte après le décès de ses parents adoptifs. À la suite de l'entrée en vigueur de la Loi de 1985, Susan obtient le statut d'Indienne en vertu de 6(2).
[63] Susan et Tammy Yantha se plaignent de la discrimination suivante décrite aux conclusions de la requête introductive d'instance:
« B- DÉCLARER que l'article 6 de la Loi sur les Indiens viole la garantie d'égalité stipulée au paragraphe 15 (1) de la Charte canadienne des droits et libertés, en ce qu'il crée une différence de traitement discriminatoire:
[…]
2- Entre:
a. d'une part, les femmes - comme la demanderesse Susan Yantha - nées entre le 4 septembre 1951 et le 16 avril 1985 hors mariage d'un Indien et d'une non-Indienne; et
b. les hommes nés hors mariage à la même époque d'un Indien et d'une non-Indienne;
en ce qui concerne leur droit à l'inscription au Registre des Indiens et leur capacité respective à transmettre ce droit à leurs enfants et petits-enfants;
3- Entre:
a. d'une part les enfants - comme la demanderesse Tammy Yantha - nés entre le 4 septembre 1951 et le 16 avril 1985 d'une femme née hors mariage d'un Indien et d'une non-Indienne; et
b. les enfants nés à la même époque d'un homme né d'une union de fait semblable;
en ce qui concerne leur droit respectif à l'inscription au Registre des Indiens et leur capacité à transmettre ce droit à leurs enfants; »[15]
[64] Il faut noter ici que la discrimination dont se plaint Tammy Yantha n'implique pas nécessairement qu'elle soit née d'un mariage[16].
[65] Susan et Tammy Yantha plaident notamment que les distinctions en matière d'inscription au Registre fondées sur le sexe de Susan sont discriminatoires en perpétuant un stéréotype selon lequel l'identité Indienne des femmes et de leurs descendants n'aurait pas la même valeur ou importance que celle des hommes Indiens et de leurs descendants.
[66] Susan soutient qu'elle éprouve un sentiment d'injustice et d'humiliation du fait de ne pouvoir transmettre à ses enfants et petits-enfants la pleine identité Indienne et les bénéfices découlant de ce statut, alors que les personnes auxquelles elle se compare le peuvent. Elle considère qu'elle a été privée de façon discriminatoire d'avantages pour ses enfants, notamment en devant défrayer elle-même des frais d'études postsecondaires pour eux alors que les parents appartenant au groupe comparateur n'ont pas eu à le faire.
[67] Tammy fait les mêmes allégations et représentations en regard de la transmission de l'identité Indienne et autres bénéfices découlant du statut d'Indienne, à sa fille Julia Louise.
[68] Susan et Tammy Yantha allèguent également souffrir dans leur dignité de l'inégalité de statut avec les personnes appartenant au groupe auquel elles se comparent.
[69] En terminant sur cette question, il faut souligner que les demandeurs n'ont pas repris la thèse générale plaidée en première instance et écartée en appel dans McIvor selon laquelle ils seraient les victimes d'une discrimination matrilinéaire plus générale à laquelle il faudrait apporter un remède systémique en refaisant l'histoire. Même s'ils ont référé à une telle discrimination dans leur requête introductive d'instance, ils ont plutôt plaidé sur la base de faits les affectant directement mais qui concernent quand même plus d'une génération, ce que la CACB a accepté dans McIvor.
6. Les conclusions recherchées par les demandeurs et la position des autres parties
[70] En plus des conclusions visant à faire déclarer l'article 6 de la Loi discriminatoire et inconstitutionnel, lesquelles sont citées plus haut, les demandeurs demandent au Tribunal d'élargir l'application de 6(1) de la Loi pour qu'il s'applique à eux, notamment afin qu'ils puissent, comme ceux auxquels ils se comparent, voir leurs enfants bénéficier du statut d'Indien, ce qui n'est pas le cas présentement. Ils suggèrent dans leur requête des libellés précis de nouvelles dispositions législatives.
[71] Les trois demandeurs cherchent de plus à obtenir une conclusion déclarant qu'ils ont le droit d'être inscrits au Registre avec le statut qu'ils requièrent et demandent au Tribunal de rendre toute autre ordonnance jugée équitable.
[72] Les intervenants appuient les demandeurs.
[73] Le PGC plaide qu'aucun des demandeurs n'a la qualité pour agir afin de contester la constitutionnalité de l'article 6 dans son application aux personnes nées après le 16 avril 1985[17]. Il nie la discrimination et soutient au surplus que s'il y avait telle discrimination, celle-ci serait justifiée suivant l'article 1 de la Charte canadienne. Il conteste que les comparateurs choisis par les demandeurs soient appropriés, notamment au motif que ceux-ci bénéficient de droits acquis, et plaide que les demandeurs cherchent à faire appliquer l'article 15 de la Charte canadienne antérieurement à son entrée en vigueur.
[74] Enfin, selon le PGC, les conclusions visant à obtenir une interprétation large de la Loi et à déclarer le droit des demandeurs à l'inscription seraient, dans le premier cas, incompatibles avec le rôle des tribunaux et, dans le second, ne relèveraient pas de la compétence du Tribunal. Le seul remède possible, advenant que le Tribunal déclare l'article 6 inconstitutionnel en tout ou en partie, serait de suspendre l'effet d'une telle réparation afin que les options appropriées puissent être considérées par le législateur.
II- L'ANALYSE
[75] Le Tribunal déterminera d'abord dans quelle mesure il est lié par la décision de la CACB dans l'affaire McIvor, pour ensuite décider des questions préliminaires soulevées par le PGC en lien avec la qualité pour agir des demandeurs et avec l'application rétroactive de la Charte canadienne qu'impliquerait selon lui le recours en l'espèce. Suivra la question hautement contestée de savoir si les dispositions applicables depuis 1985 en matière d'inscription au Registre sont source d'une discrimination fondée sur le sexe à l'endroit de chacun des demandeurs et, puisqu'une telle discrimination a été identifiée, celle de savoir si le PGC a démontré que cette discrimination se justifie dans une société libre et démocratique. Enfin, le remède approprié sera discuté.
1. Dans quelle mesure la décision rendue dans McIvor lie-t-elle le Tribunal?
[76] La décision rendue dans l'affaire McIvor par la CACB porte sur l'article 6 de la Loi de 1985, une loi fédérale applicable partout au pays, et sa constitutionnalité en regard de l'article 15 de la Charte canadienne. Le Tribunal est saisi de cette même question, tenant cependant compte des amendements apportés par la Loi de 2010 et de contextes factuels qui diffèrent quelque peu, mais ont plusieurs points communs avec la situation en cause dans l'affaire McIvor.
[77] La règle du stare decisis fait en sorte que les justiciables dont la situation est la même en faits et en droit que celle dont a déjà disposé une juridiction supérieure dans une décision se verront traités par les tribunaux de façon conforme aux énoncés de cette décision[18].
[78] L'application du droit constitutionnel à travers le Canada devrait être cohérente, et ce, dès la première instance. Il n'y a aucune raison pour que les décisions finales des cours d'appel des provinces en cette matière n'aient pas force de précédent dans chacune d'entre elles, du moins devant les tribunaux de première instance. Notons que la force du précédent se distingue du caractère exécutoire d'un jugement, la reconnaissance d'un jugement étranger au Québec afin d'y être exécuté étant régie par les dispositions du Code civil du Québec.
[79] À moins de jugements contradictoires des cours d'appel, ce qui n'est pas le cas ici, le Tribunal considère qu'il est en principe lié par la décision d'une cour d'appel en matière de droit constitutionnel, même s'il s'agit de celle d'une autre province.
[80] Dans Carter c. Canada (Procureur général)[19], la Cour suprême fait état de l'importance fondamentale du principe du stare decisis, indiquant que les tribunaux ne pourront s'en écarter que lorsqu'une nouvelle question juridique se pose ou qu'une modification de la situation ou de la preuve « change radicalement la donne »:
« [44] La doctrine selon laquelle les tribunaux d'instance inférieure doivent suivre les décisions des juridictions supérieures est un principe fondamental de notre système juridique. Elle confère une certitude tout en permettant l'évolution ordonnée et progressive du droit. Cependant, le principe du stare decisis ne constitue pas un carcan qui condamne le droit à l'inertie. Les juridictions inférieures peuvent réexaminer les précédents de tribunaux supérieurs dans deux situations: (1) lorsqu'une nouvelle question juridique se pose; et (2) lorsqu'une modification de la situation ou de la preuve « change radicalement la donne » (Canada (Procureur général) c, Bedford, 2013 CSC 72, [2013] 3 R.C.S. 1101, par.42). »
[81] Dans cette affaire, la Cour suprême a considéré que la juge de première instance était fondée à réexaminer la décision rendue dans l'affaire Rodriguez c. Colombie-Britannique (Procureur général)[20], puisque les éléments mis en preuve l'y autorisaient et que le cadre juridique applicable à l'article 7 de la Charte canadienne avait évolué de façon importante depuis cette décision rendue en 1993.
[82] Toutefois, la Cour suprême était en désaccord avec la juge de première instance quant à une évolution du droit en lien avec la justification à une atteinte à l'article 15 de la Charte canadienne, la disposition invoquée en l'espèce, comme étant suffisamment importante pour justifier de s'écarter de la décision rendue. Voici ce que la Cour suprême en disait:
« [48] Bien que nous ne soyons pas d'accord avec la juge de première instance pour dire que les observations faites dans Hutterian Brethren au sujet du principe de la proportionnalité garanti à l'article premier suffisent pour justifier un réexamen de la prétention fondée sur le droit à l'égalité prévu à l'art.15, nous estimons que la juge pouvait également réexaminer la prétention fondée sur l'art.15, compte tenu des faits radicalement différents. »[21]
[83] En l'espèce, les parties s'accordent pour dire que c'est le test appliqué dans l'affaire Withler c. Canada (Procureur général)[22] qu'il y a lieu d'appliquer afin de déterminer s'il y a violation de l'article 15 de la Charte canadienne. Ce test en deux étapes n'est qu'une reformulation du test en trois étapes[23] établi dans l'affaire Law c. Canada (Ministère de l'emploi et de l'immigration)[24] auquel se réfère la CACB dans McIvor.
[84] Il y a cependant une certaine évolution sur le plan de l'approche quant à la détermination du groupe comparateur, plus clairement axée sur l'égalité réelle que sur la comparaison de groupes identiques en tous points. Le Tribunal devra en tenir compte, surtout qu'elle est pertinente à l'examen d'une question qui n'avait pas été soumise à la CACB mais est soulevée en l'espèce.
[85] Par ailleurs, le cadre juridique relatif à l'article 1 de la Charte canadienne n'a pas évolué de façon importante depuis la décision rendue dans McIvor. Les propos ci-haut cités de la Cour suprême dans Carter font d'ailleurs en sorte qu'il serait difficile de conclure autrement.
[86] Dans McIvor, le PGC avait questionné la qualité pour agir des demandeurs, ce qu'il fait également en l'espèce, pour des motifs quasi-identiques. Le PGC avait également plaidé que les arguments soumis en demande impliquaient une application rétroactive de la Charte canadienne, argument qui n'a pas été retenu par la CACB. La plaidoirie du PGC en l'espèce implique que le Tribunal désavoue les raisonnements retenus par la CACB sur ces questions pour plutôt faire droit aux arguments du PGC rejetés par celle-ci. Cette plaidoirie ne démontre cependant pas d'évolution du droit quant à ces questions.
[87] Il faut conclure qu'il n'y a pas, sous réserve des questions liées à la détermination du groupe comparateur, une évolution du droit justifiant un réexamen de McIvor. La Loi de 2010, en cause en l'espèce, ne fait évidemment pas l'objet de la décision rendue par la CACB antérieurement à son entrée en vigueur. Toutefois, dans la mesure où cette loi n'a pas réglé entièrement la discrimination découlant de la Loi de 1985 identifiée dans McIvor, et c'est là l'un des arguments soulevé par les demandeurs, le Tribunal demeure en principe lié par cette décision quant aux questions de droit dont elle dispose.
[88] Les demandeurs soutiennent également que les faits mis en preuve devant le Tribunal sont suffisamment différents de ce qui avait été prouvé dans le cadre du dossier McIvor pour en justifier le réexamen, notamment en ce qui concerne l'ampleur de la discrimination dont ils sont victimes.
[89] Dans le cas du demandeur Stéphane Descheneaux, la nature de la discrimination dont il se plaint est quasi-identique à celle identifiée par la CACB à l'endroit des demandeurs McIvor et Grismer, et ce, malgré certaines différences dans les situations respectives de Descheneaux et Grismer. Dans le cas de Grismer, la discrimination dont il était victime était en lien avec la perte de statut de sa mère, et dans le cas de Descheneaux, la discrimination dont il est victime aujourd'hui au niveau de son inscription au Registre, est en lien avec la perte de statut de sa grand-mère. Or, dans sa décision, la CACB traite également de la discrimination faite à l'endroit des petits-enfants de McIvor, notamment en regard du traitement plus favorable accordé dans la Loi de 1985 aux personnes à qui la règle de la double-mère s'appliquait avant la Loi de 1985.
[90] Sur les questions relatives à la discrimination ayant des composantes multi-générationnelles avant et après l'entrée en vigueur de la Charte canadienne, le Tribunal est certainement lié par McIvor. Cependant, la situation factuelle de Descheneaux jette un nouvel éclairage sur l'ampleur du traitement préférentiel accordé à certaines personnes à qui la règle de la double-mère s'appliquait, puisque sa mère, contrairement à Grismer, s'est mariée avant 1985. Quant à cette question qui s'est soulevée en raison du contexte factuel différent mis en preuve en l'espèce, et sur laquelle McIvor ne se prononce pas, le Tribunal n'est pas lié par cette décision.
[91] La discrimination dont se plaignent les demanderesses Susan et Tammy Yantha se pose dans un contexte quelque peu différent de celle alléguée dans McIvor.
[92] Avant 1985, Susan Yantha, fille illégitime d'un Indien et d'une non-Indienne, n'a jamais eu le statut d'Indienne, alors que tout fils illégitime d'un Indien avec une non-Indienne né pendant la même période qu'elle possédait ce statut. Après 1985, en raison du fait qu'elle n'avait qu'un seul parent Indien, elle a obtenu un statut 6(2) alors que les enfants illégitimes de sexe masculin nés à la même époque qu'elle obtenaient le statut 6(1), étant soit déjà inscrits ou ayant droit de l'être au 16 avril 1985. Si sa situation factuelle est différente, la nature de la discrimination est identique: elle découle de la valeur moindre historiquement accordée par le législateur à l'identité Indienne d'une femme. Le traitement discriminatoire actuel à l'endroit de Susan et de Tammy Yantha au niveau de leur inscription au Registre, lequel prend place sous le régime de la Loi de 1985, résulte également, tout comme dans le dossier McIvor, des droits reconnus à 6(1)a) et de bénéfices conférés aux victimes de la règle de la double-mère allant au-delà de la préservation des droits acquis.
[93] La décision de première instance dans McIvor fait amplement état de l'impact considérable de la reconnaissance prévue à 6(1)a)[25]. La CACB a néanmoins jugé que cette discrimination était justifiée par l'objectif de préserver les droits acquis sous l'ancienne loi, tout en indiquant qu'il n'en était pas de même quant à la discrimination résultant des bénéfices conférés aux personnes victimes de la règle de la double-mère allant au-delà de la préservation de tels droits acquis.
[94] Les situations factuelles dont le Tribunal est saisi ne peuvent être qualifiées comme changeant « radicalement la donne » et ne lui permettent donc pas de réexaminer le précédent établi dans McIvor quant aux questions liées à la discrimination et à sa justification dont la CACB a été saisie.
[95] Si l'on faisait ici abstraction de la force du précédent se rattachant à la décision rendue dans McIvor, le Tribunal serait de toute façon pleinement en accord avec l'ensemble des conclusions qui y sont énoncées, sauf une. Il sera fait état plus loin des réserves du Tribunal quant à la conclusion suivant laquelle le traitement discriminatoire découlant de droits acquis serait justifié. En raison de l'importance de la règle du stare decisis, et ce, même en matière constitutionnelle, les principes énoncés dans McIvor en regard des questions dont la CACB était saisie seront tous appliqués, malgré les réserves en lien avec cette question. Le Tribunal appuie toutes les autres conclusions et ajoutera ses propres motifs à ceux de la CACB sur l'ensemble des autres questions.
[96] Notons par ailleurs que si le Tribunal avait eu la latitude de ne pas se considérer lié par McIvor sur la question de la justification de la discrimination découlant de la préservation des droits acquis et avait choisi de ce faire, le remède accordé aux parties en cause en l'espèce n'aurait pas été différent ou plus étendu.
[97] Ainsi, le Tribunal se considère lié par le précédent établi par la CACB dans McIvor dans la mesure suivante:
· la décision McIvor lie le Tribunal quant à toutes les questions liées à l'intérêt et la qualité pour agir ainsi qu'à l'application rétroactive de la Charte canadienne, des questions semblables à celles dont était saisie la CACB à cet égard étant soulevées dans le présent dossier;
· le Tribunal ne peut s'écarter des conclusions de la CACB considérant discriminatoire une situation analogue à celle de l'affaire McIvor et, s'il considérait que Stéphane Descheneaux est victime d'une telle discrimination et que la Loi de 2010 adoptée à la suite de cette décision n'a pas pleinement remédié à celle-ci, il serait également lié par les conclusions de la CACB jugeant justifiés les effets discriminatoires dus à la préservation de droits acquis et injustifiés les effets discriminatoires dus aux bénéfices additionnels conférés par la Loi de 1985 aux personnes à qui la règle de la double-mère était applicable avant cette loi;
· si le Tribunal jugeait que la situation alléguée par Susan et Tammy Yantha constitue également de la discrimination, il ne lui serait pas non plus possible de s'écarter de la conclusion de la CACB suivant laquelle la discrimination résultant de la préservation des droits acquis est justifiée, non plus que de la conclusion suivant laquelle celle résultant de bénéfices allant au-delà de la préservation de
droits acquis conférés aux personnes victimes de la règle de la double-mère n'est pas justifiée;
pourvu que les faits en lien avec la justification ne soient pas radicalement différents, ce qui n'est pas le cas, tel qu'explicité ci-après.
[98] Par ailleurs, il faut le réitérer, la décision de la CACB ne lie pas le Tribunal quant à la question du caractère approprié d'un groupe comparateur encore plus avantagé, laquelle ne lui avait pas été soumise.
[99] Il va enfin de soi que le Tribunal n'est pas lié par les obiter de la CACB en ce qui concerne la façon de remédier à la discrimination constatée. En effet, la CACB a émis son opinion à cet égard de façon incidente, préférant laisser au législateur le soin de déterminer le remède à apporter. Il en résulte que si le législateur n'était pas lié par les suggestions de la CACB à cet égard, le Tribunal ne l'est pas non plus.
2. Les demandeurs ont-ils la qualité pour agir?
[100] Le PGC a plaidé à l'audience que les demandeurs n'ont pas la qualité pour agir ou n'ont pas un intérêt suffisant.
[101] Quant au demandeur Stéphane Descheneaux, on retrouve dans la défense ré-amendée, quelques mentions selon lesquelles les « véritables demandeurs » seraient ses enfants. Tammy Yantha, fille de Susan, est l'une des parties au dossier et est sans statut. Il n'est donc pas étonnant que l'on ne retrouve pas de mention semblable à celle concernant Stéphane Descheneaux dans le cas de sa mère Susan. Au paragraphe 173 des notes et autorités du PGC celui-ci semble d'ailleurs reconnaître la qualité pour agir de la demanderesse Tammy Yantha, du moins quant au bénéfice dont elle est privée pour elle-même.
[102] Toutefois, la défense ré-amendée allègue également de façon générale que la Loi ne confère pas un droit aux parents de transmettre leur statut à leurs enfants. Il faut en comprendre que l'intérêt ou la qualité pour agir de Stéphane Descheneaux et de Susan Yantha, lesquels ont tous les deux un statut 6(2), est donc toujours contesté. Ceux-ci jouissent en effet pour eux-mêmes du statut d'Indien mais ne peuvent le transmettre à leurs enfants, leurs conjoints n'étant pas Indiens. C'est la même chose en ce qui concerne la portée de l'intérêt de Tammy Yantha, celle-ci n'ayant l'intérêt que pour elle-même selon le PGC, ses enfants devant se porter demandeurs afin de pouvoir tirer bénéfice pour eux-mêmes de la présente décision.
[103] Du point de vue du Tribunal, cette question est l'une de celles qui sont réglées
par le précédent de McIvor. En témoignent, les extraits suivants tirés des décisions rendues en première instance et en appel dans cette affaire:
· Décision de la CSCB:
« [176] The plaintiffs submit that they seek a right to equal registration status and that each of registration status and the ability to transmit status to one’s children is a benefit of the law to which s. 15 of the Charter applies. The plaintiffs submit that the challenged registration provisions governing registration constitute a benefit of the law, for both progenitors through whom the children derive status, and those upon whom the status is conferred.
[177] The defendants submit that there is no denial of a benefit of law at issue in these proceedings. First, the benefits associated with registration are the same for all individuals, whether registered pursuant to s. 6(1)(a) as the plaintiffs seek, 6(1)(c) such as Sharon McIvor is, or 6(2) such as Jacob Grismer is. Thus, the difference in registration classification does not result in a denial of any benefit.
[178] The defendants submit further that there is no right to transmit status. Rather, the entitlement to registration is conferred on a person by statute, and is contingent on the entitlement to registration of his or her parents. Registration or status as an Indian is not a right or entitlement which resides in the parent and which can be transmitted to a child. Accordingly, since regardless of registration status the plaintiffs have no ability to transmit status, they suffer from no denial of a benefit of the law. There is therefore, they submit, no violation of their equality rights.
[179] It is correct that, with exception of the question of the status of one’s children, entitlement to the tangible benefits associated with registration is the same for all persons registered whether under s. 6(1)(a), 6(1)(c), 6(2), or any of the other provisions in s. 6 of the 1985 Act. However, a person in Jacob Grismer’s circumstances, married to a person who is not entitled to be registered, and therefore with children who are not entitled to be registered, will not have access to the tangible benefits available to children who are entitled to registration, such as extended health benefits, financial assistance with post secondary education and extracurricular programs. Since parents are responsible for the support of their children, such programs can, it seems to me, be benefits for both parent and child.
[180] The question of transmission of status as a benefit of the law in which both the parent and the child have an interest has arisen in a number of decisions. In Benner, the plaintiff was the child. The respondent had argued that the child lacked standing because the discrimination was really imposed on his mother and not upon him. The court rejected this submission, concluding that the impugned provisions of the Citizenship Act are aimed at the applicant in that they determine the citizenship rights of the children, not of the parent. The Charter was engaged because the extent of the child’s rights was dependent upon the gender of his Canadian parent. In Benner at para. 397 Iacobucci J. cited with approval an observation of Linden J.A., in dissent, suggesting that the mother was also discriminated against: “in this situation, the discrimination against the mother is unfairly visited upon the child.”
[181] In Canada (Attorney General) v. McKenna, 1998 CanLII 9098 (FCA), [1999] 1 F.C. 401 (F.C.A.), the issue was the provisions of the Citizenship Act pertaining to adopted children. Although the appeal was dismissed on other grounds, the court concluded that the Citizenship Act prima facie discriminates against children born abroad and adopted by Canadian citizens in comparison to children born abroad of Canadian citizens. The court also concluded that the adoptive mother could be considered to be a victim within the meaning of the Canadian Human Rights Act, R.S.C. 1995, c. H-6.
[182] In Trociuk v. British Columbia (Attorney General), 2003 SCC 34 (CanLII), [2003] 1 S.C.R. 835, the provisions at issue were those of the Vital Statistics Act, R.S.B.C. 1996, c. 479 that permitted the arbitrary exclusion of a father’s particulars from his children’s birth registration and of his participation from the choice of the child’s surname. The court concluded that the arbitrary exclusion of the father from such participation negatively affects an interest that is significant to a father and did so in a way that the reasonable claimant would perceive as harmful to his dignity.
[183] The issue of the transmission of status from parent to child has been the subject of comment in international tribunals. Sources from international human rights law provide support for the view that the s. 15 right to equality encompasses the right to be free from discrimination in respect of the transmission of status. The plaintiffs relied on the following authorities:
1. Concluding Observations of the Committee on the Elimination of Discrimination Against Women: Algeria (January 27, 1999) at para. 83;
2. Concluding Observations of the Committee on the Rights of the Child: Kuwait (October 26, 1998) at para. 20;
3. Concluding Observations of the Committee on the Elimination of Discrimination Against Women: Iraq (June 14, 2000) at para. 187;
4. Concluding Observations of the Committee on the Elimination of Discrimination Against Women: Jordan (January 27, 2000) at para. 172; and
5. Concluding Observations of the Committee on the Elimination of Discrimination Against Women: Morocco (August 12, 1997) at para. 64.
[184] In U.S.A. v. Burns, 2001 SCC 7 (CanLII), [2001] 1 S.C.R. 283, the court acknowledged sources of international human rights law as including declarations, covenants, conventions, judicial and quasi-judicial decisions of international tribunals, and customary norms. Such sources were acknowledged to constitute persuasive sources for the interpretation of the content of the rights guaranteed by the Charter in Slaight Communications Inc. v. Davidson, 1989 CanLII 92 (SCC), [1989] 1 S.C.R. 1038.
[185] The question of transmission of status must be considered in light of the substance of the concept that is at issue. This touches upon the intangible implications of the concept of Indian discussed earlier in these reasons. The government created the concept of Indian, and in so doing, superimposed this concept upon the First Nations’ own definitions of cultural identity. It is clear, as discussed earlier, that this concept of Indian has come to form an important aspect of cultural identity.
[186] It seems to me that it is one of our most basic expectations that we will acquire the cultural identity of our parents; and that as parents, we will transmit our cultural identity to our children. It is, therefore, not surprising to see this basic expectation reflected in the evidence, not only of Sharon McIvor and Jacob Grismer, but also of many of the witnesses who testified before the Standing Committee. It is also not surprising that one of the most frequent criticisms of the registration scheme is that it denies Indian women the ability to pass Indian status to their children. For example, “... we are unable to pass our Indian-ness and the Indian culture that is engendered by a woman in her children ...” Standing Committee, September 13, 1982, testimony of Mary Two-Axe Earley, President, Quebec Equal Rights for Indian Women at p. 4:46.
[187] Numerous publications that emanate from government ministries make use of the language of transmission of status in discussions of registration provisions under the 1985 Act and its previous versions. For example, the publication of the Ministry of Indian and Northern Affairs entitled Impacts of the 1985 Amendments to the Indian Act (Bill C-31) (Ottawa: Indian and Northern Affairs Canada, Summary Report, 1990) reflects this understanding and uses the language of transmission of status. At p. ii the study notes that most Bill C-31 registrants sought status for reasons of cultural belonging, personal identity and correction of injustice. At p. iv, in a discussion of concerns, the authors note:
Some gender discrimination remains because in certain family situations, women who lost status through marriage prior to 1985 cannot automatically pass on status to their children as can their brothers who married prior to 1985 (emphasis added).
[188] Similar language was adopted by the Royal Commission on the Status of Women, cited earlier in these reasons, in the recommendation that the Indian Act be amended, inter alia to allow an Indian woman upon marriage to a non-Indian to “transmit her Indian status to her children”. The Report of the Aboriginal Justice Inquiry of Manitoba, Vol. 1, The Justice System and Aboriginal People; A Public Inquiry in to the Administration of Justice and Aboriginal People (Manitoba, 1991), also incorporates the language of the transmission of status as follows at ch. 13, p. 479:
While Bill C-31 (1985) addressed many of these problems, it created new ones in terms of the differential treatment of male and female children of Aboriginal people. Under the new Act, anomalies can develop where the children of a status Indian woman can pass on status to their children only if they marry registered Indians, whereas the grandchildren of a status male will have full status, despite the fact that one of their parents does not have status.
[189] The Royal Commission Report quoted at para. 22 of these reasons in describing the discriminatory aspects of the registration system stated ... they lost Indian status, membership in their home community and the right to transmit Indian status to the children of that marriage at p. 28.
[190] Jill Wherrett, “Indian Status and Band Membership Issues”, Political and Social Affairs Division, Research Branch, Feb. 1996, is another example of such an official publication referring to the transmission of status. In a section entitled “Continuing Inequities in Legislation”, the author states at pp. 9-10:
Despite efforts to eliminate inequities through the amendments, the effects of past discrimination remain and new forms of discrimination have been created. The amendments resulted in a complicated array of categories of Indians and restrictions on status, which have been significant sources of grievance. The most important target of criticism is the “second generation cut-off rule,” which results in the loss of Indian status after two successive generations of parenting by non- Indians. People registered under section 6(2) have fewer rights than do those registered under section 6(1), as they cannot pass on status to their child unless the child’s other parent is also a registered Indian. One criticism comes from women who, prior to 1985, lost status because of marriages to non-Indian men. These women are able to regain status under section 6(1); however, their children are entitled to registration only under section 6(2). In contrast, the children of Indian men who married non-Indian women, whose registration before 1985 was continued under section 6(1), are able to pass on status if they marry non-Indians.
[191] This use of language is consistent with the basic notion that one acquires one’s cultural identity from one’s parents and that a parent transmits such status to his or her child.
[192] In my view, status under the Indian Act is a concept that is closely akin to the concepts of nationality and citizenship. Status under the Indian Act, like citizenship, is governed by statute. The eligibility of a child in both cases is related to the circumstances of his or her parents. In my view, the eligibility of the child to registration as an Indian based upon the circumstances of the parent, is a benefit of the law in which both the parent and the child have a legitimate interest.
[193] It is my view that the defendants’ submission is a strained and unnatural construct that ignores the significance of the concept of Indian as an aspect of cultural identity. The defendants’ approach would treat status as an Indian as if it were simply a statutory definition pertaining to eligibility for some program or benefit. However, having created and then imposed this identity upon First Nations peoples, with the result that it has become a central aspect of identity, the government cannot now treat it in that way, ignoring the true essence or significance of the concept.»[26]
· Décision de la CACB:
«[70] This case is concerned with entitlement to Indian status. The plaintiffs have adduced significant evidence demonstrating that Indian status is a benefit. Under the terms of the Indian Act and other legislation, persons who have Indian status are entitled to tangible benefits beyond those that accrue to other Canadians. These include extended health benefits, financial assistance with post-secondary education and extracurricular programs, and exemption from certain taxes. The trial judge also accepted that certain intangible benefits arise from Indian status, in that it results in acceptance within the aboriginal community. While some of the evidence of such acceptance may be overstated, in that it fails to distinguish between Indian status and membership in a band, I am of the view that the trial judge was correct in accepting that intangible benefits do flow from the right to Indian status.
[71] The plaintiffs assert that the right to transmit Indian status to one’s child should also be recognized as a benefit. I agree with that proposition. Parents are responsible for their children’s upbringing, and financial benefits that an Indian child receives will, accordingly, alleviate burdens that would otherwise fall on the parent. Quite apart from such benefits, though, it seems to me that the ability to transmit Indian status to one’s offspring can be of significant spiritual and cultural value. I accept that the ability to pass on Indian status to a child can be a matter of comfort and pride for a parent, even leaving aside the financial benefits that accrue to the family.
[72] It is evident to me, therefore, that there is merit in Mr. Grismer’s claim that the ability to transmit status to his children is a benefit of the law to which s. 15 applies. Ms. McIvor’s claim is a more remote one. She does not, as a grandparent, have the same legal obligations to support and nurture her grandchildren that a parent has to his or her children.
[73] Given that Mr. Grismer is a plaintiff in this matter, and given that any practical remedy that might be granted could be based on the claim by Mr. Grismer rather than that of Ms. McIvor, it is, strictly speaking, unnecessary to determine whether the ability to confer Indian status on a grandchild is a “benefit of the law” to which s. 15 of the Charter applies. In view of the cultural importance of being recognized as an Indian and the requirement to give s. 15 a broad, purposive interpretation, however, I would be inclined to the view that the ability to transmit Indian status to a grandchild is a sufficient “benefit of the law” to come within s. 15 of the Charter.
[74] In the analysis that follows, I will concentrate on Mr. Grismer’s claim, since it is, in some ways, more straightforward and simpler to describe than that of Ms. McIvor. Except as I will indicate, however, the analysis of Ms. McIvor’s claim would be similar. In my view, the claims stand or fall together.
[…]
[91] I am unable to accept this argument. As I have already indicated, I am of the view that the ability to transmit Indian status to his children is a benefit to Mr. Grismer himself, and not solely a benefit to his children. He is, therefore, in a situation analogous to that of Mr. Benner.
[92] Similarly, I am of the view that the ability to transmit Indian status to her grandchildren through Mr. Grismer is a benefit to Ms. McIvor. I am, therefore, of the view that she can also demonstrate that the legislation accords her disadvantageous treatment on the basis of sex.
[93] In any event, it seems to me that the inherently multi-generational nature of legislation of the sort involved in this case and in Benner requires a court to take a broad, “purposive approach” to determining issues of discrimination and of standing. The determination of Indian status under the Indian Act requires an examination of three generations (here, Ms. McIvor, Mr. Grismer, and his children); it would not be in keeping with the purpose of s. 15 of the Charter to hold that sex discrimination directed at one of those three generations was inconsequential so long as the disadvantageous treatment accrued only to another of them.
[94] This is not to say that the Court should adopt a broad “discrimination by association” doctrine. The extent to which a person can raise a Charter claim based on discrimination directed primarily against a person’s ancestors or descendants must depend on the context of the legislation in question and its effects on the claimant.»[27]
[104] Le Tribunal se considère lié par la décision de la CACB mais est, au surplus, en accord avec les raisonnements exprimés par tous les juges de la Colombie-Britannique sur cette question.
[105] S'ajoute par ailleurs aux mentions émanant du gouvernement citées par la juge Ross en première instance, le fait que le législateur ait accepté cette conception en prévoyant dans la Loi de 2010, la condition d'avoir un enfant pour pouvoir obtenir le statut en vertu de 6(1) c.1).
[106] Cette condition implique en effet que les personnes dont le statut est reconnu sous 6(2) ne seraient pas victimes de discrimination tant qu'elles n'ont pas au moins un enfant car ce n'est qu'alors que leur statut restreindrait effectivement leur droit de le transmettre. Le législateur, en limitant le correctif apporté par la Loi de 2010 aux personnes ayant au moins un enfant a donc implicitement reconnu l'intérêt de celles-ci à transmettre leur statut.
[107] De l'ensemble de ce qui précède, il faut conclure que les trois demandeurs ont un intérêt suffisant au sens de l'art. 55 C.p.c. dans le recours entrepris, soit un intérêt direct et personnel, y compris lorsqu'il s'agit de leur capacité de transmettre le statut d'Indien à leurs enfants et petits-enfants.
3. Le recours entrepris demande-t-il une application rétroactive de la Charte canadienne?
[108] Le PGC a réitéré l'argument plaidé et rejeté dans McIvor, selon lequel le recours entrepris demande en réalité une application rétroactive de la Charte canadienne. Non seulement le Tribunal est-il lié par la décision rendue dans McIvor mais il est pleinement en accord avec les motifs énoncés sur la question, et ce, tant en première instance qu'en appel. Essentiellement, le caractère continu d'un statut implique que les conditions en fonction desquelles ce statut peut ou non être obtenu peuvent être examinées en fonction de la Charte canadienne, pourvu qu'il s'agisse bien d'appliquer celle-ci aux conditions actuelles d'obtention ou de refus de ce statut plutôt qu'à un événement du passé précédant son entrée en vigueur:
· Décision de la CSCB:
«[144] The defendants submit that the plaintiffs’ claim constitutes an impermissible attempt to apply the Charter in a retroactive or retrospective fashion. They submit that the real essence of the plaintiffs’ claim is a challenge of the repealed provisions of the 1951 and 1970 versions of the Indian Act. The plaintiffs, however, submit that their challenge seeks neither a retroactive nor a retrospective application of the Charter. It is common ground that the Charter cannot be invoked to apply to repealed legislation or to attach future consequences to distinctions made in repealed legislation.
[145] The leading case with respect to the issues of retroactivity and retrospectivity in the context of Charter litigation is Benner v. Canada (Secretary of State), 1997 CanLII 376 (SCC), [1997] 1 S.C.R. 358 [Benner]. The issue in Benner was the constitutionality of certain provisions of the Citizenship Act, S.C. 1974-75-76, c. 108 [Citizenship Act], which provided for different treatment of persons born before February 14, 1977, wishing to become Canadian citizens who had Canadian mothers when compared with those who had Canadian fathers. Prior to the enactment of the provisions at issue, children born abroad of Canadian fathers were entitled to claim Canadian citizenship on registration of their birth, but there were no such provisions for the children of Canadian mothers. Parliament then enacted new remedial legislation. The remedial legislation however continued to preserve different treatment for children born abroad of Canadian mothers prior to February 14, 1977. The legislation at issue created three classes of applicants for Canadian citizenship based on parental lineage:
1. Children born abroad after February 14, 1977. These children will be citizens at birth if either of their parents is Canadian: ss. 3(1)(b);
2. Children born abroad before February 15, 1977, of a Canadian father or out of wedlock of a Canadian mother. These children are automatically entitled to Canadian citizenship upon registration of their birth within two years of that birth or within an extended period authorized by the Minister: ss. 3(1)(e) (continuing ss. 5(1)(b) of the old Citizenship Act).
3. Children born abroad before February 15, 1977, in wedlock of a Canadian mother. These children must apply to become citizens and are required to swear an oath and pass a security check in order to qualify for citizenship: ss. 5(2)(b), 3(1)(c), 12(2), (3), 22(2) and (3).
[146] Mr. Benner was born in 1962 in the United States to a Canadian mother in wedlock. His father was not a Canadian. He applied for citizenship after he moved to Canada in 1986 under s. 5(2)(b) of the Citizenship Act. The Registrar refused his application because Mr. Benner did not pass the security check as a result of outstanding criminal charges against him.
[147] The court held that providing for differential treatment of persons wishing to become Canadian citizens who had Canadian mothers as opposed to those with Canadian fathers violated s. 15 of the Charter and could not be justified under s. 1. The offending provisions were, to the extent of the unconstitutionality, declared to be of no force and effect.
[148] One aspect of the decision was an analysis of the concepts of retroactivity and retrospectivity as they apply in the context of Charter litigation. Mr. Justice Iacobucci, speaking for the court, adopted the following definition of the concepts at para. 39:
E.A. Driedger, in “Statutes: Retroactive Retrospective Reflections” (1978), 56 Can. Bar Rev. 264 at pp. 268-69, has offered these concise definitions which I find helpful:
A retroactive statute is one that operates as of a time prior to its enactment. A retrospective statute is one that operates for the future only. It is prospective, but it imposes new results in respect of a past event. A retroactive statute operates backwards. A retrospective statute operates forwards, but it looks backwards in that it attaches new consequences for the future to an event that took place before the statute was enacted. A retroactive statute changes the law from what it was; a retrospective statute changes the law from what it otherwise would be with respect to a prior event. [Emphasis in original.]
[149] The following principles emerge from Benner with respect to the analysis of these concepts in the context of a claim under the Charter:
(a) the Charter has neither retroactive nor retrospective application;
(b) there is no rigid test for determining when an application is retrospective;
(c) the court must consider the factual and legal context and the nature of the right at issue;
(d) when considering the application of the Charter in relation to facts which took place before it came into force, the court must consider whether the facts constitute a discrete event or an ongoing status or characteristic;
(e) the Charter cannot be evoked to attack a discrete event which took place before the Charter came into force such as a pre- Charter conviction;
(f) the Charter can be invoked where the effect of a law is to impose an ongoing discriminatory status or disability on an individual; and
(g) in applying the Charter to questions of status, the time to consider is not when the individual acquired the status but when the status was held against him or disentitled him to a benefit.
(Benner at paras. 39-59).
[150] In Benner, the court concluded that the application of the Charter was not retrospective because:
(a) the appellant’s position was a status or on-going condition, being a child born outside Canada prior to February 15, 1977, to a Canadian mother and a non-Canadian father in wedlock; and
(b) the discrimination took place when the state denied the appellant’s application for citizenship on the basis of criteria which he alleged violated s. 15 of the Charter. This occurred after s. 15 of the Charter came into effect.
[151] In the instant case, the plaintiffs submit that the challenge is neither retroactive nor retrospective because the plaintiffs are not seeking to change the law in the past or to change the current legal consequences of a distinct event in the past, but rather to apply the Charter to current legislation. The case, they submit, concerns the application of the Charter to the legal effect of an ongoing state of affairs. They submit that the eligibility requirements for Indian status violate s. 15 of the Charter because the test for Indian ancestry continues to discriminate on grounds of sex, marital status, and legitimacy. The requirements of the current statute, the 1985 Act, continue to discriminate against descendents who trace their ancestry along the maternal line.
[152] Finally, the plaintiffs submit that the current challenge is not retrospective because, as in Benner, Ms. McIvor did not apply for registration for herself and her children until after s. 15 of the Charter came into effect. The discrimination did not take place until the state actually responded to the applications. This was after s. 15 came into effect and accordingly the denial is open to scrutiny under the Charter.
[153] The defendants submitted that, in seeking to be registered under s. 6(1)(a), the plaintiffs are asking to apply the Charter retroactively since the only way to achieve this remedy would be to retroactively amend the 1951 Act and the 1970 Act so that they “were registered or entitled to be registered immediately before April 17, 1985”. The plaintiffs, they submit, are seeking to redress the historical discrimination of those repealed provisions, all of which pre-date the coming into force of s. 15 of the Charter. In addition, the defendants submit that the distinction in treatment about which the plaintiffs complain arises from the discrete event of Ms. McIvor’s marriage in 1970 to a person who was not entitled to be registered. It was, the defendants contend, the single discrete event of that marriage which raised the distinction. Ms. McIvor was, to use the language of Benner, confronted with the law as of the date of her marriage. In Mr. Grismer’s case, his entitlement to registration crystallized at birth and not upon application for registration. Finally, the defendants submit that the relief the plaintiffs seek would amount to a finding of discrimination by association and that the Supreme Court of Canada in Benner cautioned against such findings.
[154] In my view, the analysis of whether the claim is retrospective or retroactive must focus not on the particular remedies sought on the substance or essence of the complaint. In the case at bar, the substance or essence of the plaintiffs’ complaint is that the eligibility criteria found in s. 6 of the 1985 Act discriminate contrary to s. 15 of the Charter. This is a claim that addresses the present criteria for registration and not the criteria from previous versions of the Indian Act. I agree with the submission of the plaintiffs that the eligibility provisions of prior versions of Indian Acts are engaged only because and to the extent that these provisions have been continued in the 1985 Act. The fact that such criteria have been incorporated in the 1985 Act does not however make the application of those criteria to present eligibility for registration a retrospective exercise.
[155] In my view, the defendants’ submission that the only way in which the plaintiffs can succeed is if the court were to amend repealed legislation is incorrect. I agree that such an exercise would be an inappropriate attempt to apply the Charter to repealed legislation. Further, it is the case that given the current legislation as drafted, the plaintiffs could only be entitled to registration under s. 6(1)(a) by amending repealed legislation. That is in fact, a reflection of the very distinction in treatment about which the plaintiffs complain in this litigation. However, the plaintiffs as part of their relief seek registration pursuant to s. 6(1)(a) as they propose it should be amended by this court. Thus, the relief sought in fact would not amend repealed legislation, but only the current legislation.
[156] Turning to the other factors identified in Benner, the plaintiffs’ claim engages s. 15 of the Charter. The right to equality is, as Madam Justice Wilson noted in R. v. Gamble, 1988 CanLII 15 (SCC), [1988] 2 S.C.R. 595 at para. 40, a right whose purpose is to protect against an on going condition or state of affairs. Such rights are susceptible of current application even where such application takes cognizance of pre-Charter events; See Benner para. 43-44.
[157] In my view, with respect to each plaintiff, it is an ongoing status that is at issue and not a discrete event. I agree with the plaintiffs’ submission that Ms. McIvor did not become disentitled to registration because of the discrete act of marriage, but because she was a woman. Marriage was not, and is not, an event that results in the loss of status. Indian men and women could marry each other without effect on their status. Indian men could marry women without effect on their status. Marriage was a bar to status only when an Indian woman married a non-Indian man. The relevant factor, therefore, is not marriage, which typically did not result in a loss of entitlement to registration, but being a woman who married a non-Indian man. It was, therefore, Sharon McIvor’s sex and not the event of marriage, which was the primary cause of the loss of her entitlement to registration. Mr. Grismer’s case, like that of Mr. Benner, involved the status of being the child of an Indian mother who married a non-Indian.
[158] The plaintiffs’ challenge is directed to the present legislation and not to past repealed versions of the legislation. Finally, the state became engaged with each plaintiff when application was made for registration and the Registrar responded to the applications. That event occurred after s. 15 of the Charter came into force. Accordingly, I conclude that this case does not involve either a retroactive or a retrospective application of the Charter.»[28]
· Décision de la CACB:
« [47] It is evident from the history of the Charter that it was not intended to apply retroactively. This is particularly clear in respect of s. 15 of the Charter, which, pursuant to s. 32(2) of the Charter did not take effect until 3 years after the rest of the Charter came into force. The delay in bringing s. 15 into effect was a recognition of the fact that considerable legislative amendment might be necessary in order to bring the laws of Canada into compliance with its dictates. It is now well-settled that the Charter applies only prospectively from the date it was brought into effect. Section 15, therefore, cannot be used to question the validity of governmental action that pre-dated its coming into force.
[48] On the other hand, continuing governmental action may violate the Charter even if it began prior to the coming into force of the Charter. Violations of s. 15 cannot be countenanced simply because discrimination began before April 17, 1985:
Section 15 cannot be used to attack a discrete act which took place before the Charter came into effect. It cannot, for example, be invoked to challenge a pre-Charter conviction: R. v. Edwards Books and Art Ltd., 1986 CanLII 12 (SCC), [1986] 2 S.C.R. 713; R. v. Gamble, 1988 CanLII 15 (SCC), [1988] 2 S.C.R. 595. Where the effect of a law is simply to impose an on-going discriminatory status or disability on an individual, however, then it will not be insulated from Charter review simply because it happened to be passed before April 17, 1985. If it continues to impose its effects on new applicants today, then it is susceptible to Charter scrutiny today: Andrews v. Law Society of British Columbia, 1989 CanLII 2 (SCC), [1989] 1 S.C.R. 143.
The question, then, is one of characterization: is the situation really one of going back to redress an old event which took place before the Charter created the right sought to be vindicated, or is it simply one of assessing the contemporary application of a law which happened to be passed before the Charter came into effect?
Benner v. Canada (Secretary of State), 1997 CanLII 376 (SCC), [1997] 1 S.C.R. 358 at paras. 44-45
[49] Unfortunately, differentiating between ongoing discrimination and mere effects of concluded pre-Charter discrimination is not always a simple matter. In Benner, at para. 46, the Supreme Court of Canada adopted a flexible and nuanced approach to the issue:
[M]any situations may be reasonably seen to involve both past discrete events and on-going conditions. A status or on-going condition will often, for example, stem from some past discrete event. A criminal conviction is a single discrete event, but it gives rise to the on-going condition of being detained, the status of “detainee”. Similar observations could be made about a marriage or divorce. Successfully determining whether a particular case involves applying the Charter to a past event or simply to a current condition or status will involve determining whether, in all the circumstances, the most significant or relevant feature of the case is the past event or the current condition resulting from it. This is, as I already stated, a question of characterization, and will vary with the circumstances. Making this determination will depend on the facts of the case, on the law in question, and on the Charter right which the applicant seeks to apply.
[50] The Benner case is instructive. In 1962, Mr. Benner was born abroad to a mother who was a Canadian citizen and a father who was not. At the time of his birth, the Canadian Citizenship Act, R.S.C. 1952, c. 33, provided that a child born abroad was entitled to Canadian citizenship if the child’s father was a citizen. A legitimate child born abroad whose only Canadian parent was his or her mother was not entitled to citizenship. Mr. Benner, therefore, had no right to Canadian citizenship at the time of his birth.
[51] A new Citizenship Act (S.C. 1974-75-76, c. 108) came into force in 1977. For the first time, it allowed persons in Mr. Benner’s position to apply for Canadian citizenship. Still, it differentiated between people born abroad whose fathers were Canadian and those whose mothers (but not fathers) were Canadian. If only the mother was a citizen, the child was required to meet requirements with respect to criminal records and national security; people whose fathers were Canadian did not have to satisfy those requirements. The difference was of significance to Mr. Benner, because he was, when his application was before the Registrar in 1989, facing serious criminal charges that prevented him from gaining citizenship.
[52] Canada argued that Mr. Benner’s right to citizenship had crystallized in 1962, when he was born, or in 1977, when the new statute came into force. Any discrimination faced by Mr. Benner, it claimed, pre-dated the coming into force of the Charter. Therefore, it said, Mr. Benner was not entitled to rely on s. 15 to found his claim.
[53] The Supreme Court of Canada, at para. 52, rejected that view, holding that Mr. Benner’s situation should be characterized not as an “event”, but as an ongoing status:
From the time of his birth, he has been a child, born outside Canada prior to February 15, 1977, of a Canadian mother and a non-Canadian father. This is no less a “status” than being of a particular skin colour or ethnic or religious background: it is an ongoing state of affairs. People in the appellant’s condition continue to this day to be denied the automatic right to citizenship granted to children of Canadian fathers.
[54] It followed that any discrimination occurred when Mr. Benner applied for and was denied citizenship, not at an earlier date. The Court concluded, at para. 56:
In applying s. 15 to questions of status, or what Driedger, [Construction of Statutes (2nd ed. 1983), at p. 192], calls “being something”, the important point is not the moment at which the individual acquires the status in question, it is the moment at which that status is held against him or disentitles him to a benefit. Here, that moment was when the respondent Registrar considered and rejected the appellant’s application. Since this occurred well after s. 15 came into effect, subjecting the appellant’s treatment by the respondent to Charter scrutiny involves neither retroactive nor retrospective application of the Charter.
[55] The case at bar is, in many ways, similar to Benner. Mr. Grismer says that he suffers discrimination because his Indian status derives from his mother rather than his father. He says that the discrimination is ongoing; his children (who were not even born prior to the coming into force of the Charter) are denied Indian status based on differences between men and women in the pre-1985 law that were preserved in the transition to the current regime.
[56] The defendants argue that the source of discrimination, if any, is Ms. McIvor’s loss of Indian status when she married a non-Indian. They say that any discrimination was not on the basis of sex, but on the basis of marriage. Further, they contend that the marriage was an event, not a status; therefore, they argue, any discrimination pre-dated the Charter.
[57] I am unable to accept the defendants’ characterization of the matter for several reasons. First, to describe any discrimination as being based on “marriage” rather than “sex” is arbitrary. It might equally have been said that Mr. Benner suffered discrimination not because of the sex of his Canadian parent, but by virtue of the event of being born abroad. Ms. McIvor’s loss of status was not based solely on marriage or on sex, but rather on a combination of the two. The claim in the case at bar is based primarily not on differences in treatment between married and single people (just as the claim in Benner was not based on the difference between people born in Canada and those born abroad), but rather on the differences in treatment between men and women. In that sense, the claim is based on an ongoing status (that of Ms. McIvor being a woman) rather than on a discrete event (marriage).
[58] Second, the defendants’ argument focuses exclusively on Ms. McIvor’s loss of status prior to the coming into force of the Charter. That loss is not, per se, the foundation for the claim of discrimination. Rather, it is the fact that Ms. McIvor’s grandchildren lack status that constitutes the tangible basis for a claim of discrimination. Had they a male Indian grandparent rather than a female one, the current legislation would grant them status.
[59] Finally, and importantly, the defendants ignore the detailed effects of the 1985 statute in suggesting that the alleged discrimination against Ms. McIvor and Mr. Grismer arose from pre-Charter statutory provisions. This becomes clear when one compares the situation of Ms. McIvor’s male analogue (or “hypothetical brother”) under the old legislation and under the current regime. The situation is summarized in the following table:
Situation under Old Legislation |
Situation under 1985 Statute |
Hypothetical Brother |
Hypothetical Brother |
Child born - Child entitled to status |
Child born - Child entitled to status |
|
1985 Act comes into force |
- Assume child marries a non-Indian and has children - |
|
Grandchild of hypothetical
brother |
Grandchild of hypothetical
brother |
[60] The old legislation treated the hypothetical brother’s grandchildren somewhat better than those of Ms. McIvor; the hypothetical brother’s grandchildren would have enjoyed status up until the age of 21. It is, however, the overlay of the 1985 amendments on the previous legislation that accounts for the bulk of the differential treatment that the plaintiffs complain about. Under the 1985 legislation, the hypothetical brother’s grandchildren have Indian status. They are also able to transmit status to any children that they have with persons who have status under ss. 6(1) or 6(2). Ms. McIvor’s grandchildren, on the other hand, have no claim to Indian status.
[61] Thus, the most important difference in treatment between Ms. McIvor’s grandchildren and those of her male analogue was a creation of the 1985 legislation itself, and not of the pre-Charter regime.
[62] For all of these reasons, I would reject the defendants’ contention that the plaintiffs’ claim would require the Court to engage in a prohibited retroactive or retrospective application of the Charter. Just as in the Benner case, the plaintiffs’ claim in this case is one alleging ongoing discrimination.»[29]
[109] Les raisonnements de la CSCB et de la CACB sur cette question sont directement applicables au recours entrepris par les trois demandeurs en l'espèce. Leur recours repose notamment sur leur statut ou absence de statut et leur impossibilité de le transmettre à leurs enfants et petits-enfants en vertu du nouveau régime en place à compter de 1985.
[110] En lien avec le tableau apparaissant au paragraphe 59 de la décision de la CACB, il faut souligner que si le mariage intervient avant la Loi de 1985, le traitement accordé par la Loi de 1985 aux personnes à qui la règle de la double-mère s'appliquait est encore plus favorable que si le mariage intervient après 1985. L'enfant qui perdait auparavant son statut à 21 ans obtient alors, non pas un statut 6(2) à vie, mais un statut 6(1) à vie.
[111] Le PGC ne peut prétendre que cet avantage résulte du fait que l'épouse non-Indienne bénéficie d'un droit acquis sous l'ancienne loi car l'ancienne loi ne lui permettait pas de transmettre son statut acquis par mariage à son enfant né d'un Indien au-delà des 21 ans de celui-ci lorsque la règle de la double-mère s'appliquait.
[112] Il ne s'agit pas ici de réécrire la législation applicable avant 1985 en fonction de la Charte canadienne mais de décider de la constitutionnalité de droits accordés en vertu de la Loi de 1985.
[113] L'argument du PGC quant à une application rétroactive de la Charte canadienne ne peut être retenu.
4. Y a-t-il discrimination?
[114] Il sera d'abord fait état des principes généraux applicables en matière de discrimination avant de déterminer le groupe comparateur retenu et s'il y a discrimination à l'endroit des demandeurs.
4.1 Les principes généraux
[115] Le droit à l'égalité sans distinction fondée sur un motif prohibé ou analogue est prévu au par.15(1) de la Charte canadienne:
«15. (1) La loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques. »
[116] La Cour suprême énonce maintenant le test applicable afin de déterminer s'il y a violation du droit à l'égalité en deux volets: (1) La loi crée-t-elle une distinction fondée sur un motif énuméré ou analogue? (2) La distinction crée-t-elle un désavantage par la perpétuation d'un préjugé ou l'application de stéréotypes?[30]
[117] Dans une toute récente décision rendue le 28 mai dernier, la Cour suprême résume la jurisprudence sur la question comme suit:
« [16] L’approche relative au par. 15(1) a été énoncée le plus récemment dans Québec (Procureur général) c. A, [2013] 1 R.C.S. 61, par. 319 - 347. Cet arrêt a clarifié le fait que le par. 15(1) de la Charte exige « une analyse souple et contextuelle visant à déterminer si la distinction a pour effet de perpétuer un désavantage arbitraire à l’égard du demandeur, du fait de son appartenance à un groupe énuméré ou analogue » (par. 331 (italiques ajoutés)).
[17] La Cour a confirmé à maintes reprises que l’art. 15 protège l’égalité réelle (Québec c. A, par. 325; Withler c. Canada (Procureur général), [2011] 1 R.C.S. 396, par. 2; R c. Kapp, [2008] 2 R.C.S. 483, par. 16; Andrews c. Law Society of British Columbia, [1989] 1 R.C.S. 143). Cette démarche reconnaît que des désavantages systémiques persistants ont eu pour effet de restreindre les possibilités offertes aux membres de certains groupes de la société et elle vise à empêcher tout acte qui contribue à perpétuer ces désavantages. Ainsi que le juge McIntyre l’a fait observer dans l’arrêt Andrews, cette approche repose sur l’idée que toute différence de traitement ne produira pas forcément une inégalité et qu’un traitement identique peut fréquemment engendrer de graves inégalités (p. 164).
[18] L’article 15 vise donc les lois qui établissent des distinctions discriminatoires, c’est-à-dire des distinctions qui ont pour effet de perpétuer un désavantage arbitraire à l’égard d’une personne du fait de son appartenance à un groupe énuméré ou analogue (Andrews, p. 174 et 175, Québec c. A, par. 331). L’analyse à laquelle on procède pour l’application du par. 15(1) s’intéresse donc au contexte social et économique dans lequel s’inscrit la plainte d’inégalité et aux effets de la loi ou de l’acte contesté sur le groupe demandeur (Québec c. A, par. 331).
[19] Le premier volet de l’analyse fondée sur l’art. 15 consiste donc à se demander si, à première vue ou de par son effet, une loi crée une distinction fondée sur un motif énuméré ou analogue. Limiter les demandes à celles fondées sur des motifs énumérés ou analogues — qui « constituent des indicateurs permanents de l’existence d’un processus décisionnel suspect ou de discrimination potentielle » —, permet d’écarter [traduction] « les demandes qui n’ont rien à voir avec l’égalité réelle et de mettre l’accent sur l’égalité dans le cas de groupes qui sont défavorisés dans un contexte social et économique plus large » (Corbiere c. Canada (Ministre des Affaires Indiennes et du Nord canadien), [1999] 2 R.C.S. 203, par. 8; Lynn Smith et William Black, « The Equality Rights » (2013), 62 S.C.L.R. (2d) 301, p. 336). Le demandeur peut fonder son allégation sur un ou sur plusieurs motifs, selon l’acte de l’État en cause et son interaction avec le désavantage infligé aux membres du groupe dont il fait partie (Law c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1999] 1 R.C.S. 497, par. 37).
[20] Le second volet de l’analyse est axé sur les désavantages arbitraires — ou discriminatoires —, c’est-à-dire sur la question de savoir si la loi contestée ne répond pas aux capacités et aux besoins concrets des membres du groupe et leur impose plutôt un fardeau ou leur nie un avantage d’une manière qui a pour effet de renforcer, de perpétuer ou d’accentuer le désavantage dont ils sont victimes :
À la base, l’art. 15 résulte d’une prise de conscience que certains groupes ont depuis longtemps été victimes de discrimination, et qu’il faut mettre fin à la perpétuation de cette discrimination. Les actes de l’État qui ont pour effet d’élargir, au lieu de rétrécir, l’écart entre le groupe historiquement défavorisé et le reste de la société sont discriminatoires. [Québec c. A, par. 332]
[21] Pour établir qu’il y a eu à première vue violation du par. 15(1) , le demandeur doit par conséquent démontrer que la loi en cause a un effet disproportionné à son égard du fait de son appartenance à un groupe énuméré ou analogue. À la seconde étape de l’analyse, la preuve précise requise variera selon le contexte de la demande, mais « les éléments tendant à prouver qu’un demandeur a été historiquement désavantagé » seront pertinents (Withler, par. 38; Québec c. A, par. 327).»[31]
(Les soulignements sont de la soussignée.)
[118] Les demandeurs allèguent ici que le traitement discriminatoire dont ils souffrent est fondée sur un motif prohibé énuméré, soit le sexe.
[119] Comme l'indique la Cour suprême, c'est l'égalité réelle, et non l'égalité formelle qui doit retenir l'attention. La simple différence ou absence de différence n'est pas admise comme justification d'un traitement différent. Il faut déterminer ce qu'accomplit vraiment la mesure appliquée et si les caractéristiques sur lesquelles est fondé le traitement différent sont pertinentes dans les circonstances:
« [39] Que l'on cherche à savoir s'il y a perpétuation d'un désavantage ou application d'un stéréotype, il faut déterminer si la mesure transgresse l'impératif d'égalité réelle. L'égalité réelle, contrairement à l'égalité formelle, n'admet pas la simple différence ou absence de différence comme justification d'un traitement différent. Elle transcende les similitudes et distinctions apparentes. Elle demande qu'on détermine non seulement sur quelles caractéristiques est fondé le traitement différent, mais également si ces caractéristiques sont pertinentes dans les circonstances. L'analyse est centrée sur l'effet réel de la mesure législative contestée, compte tenu de l'ensemble des facteurs sociaux, politiques, économiques et historiques inhérents au groupe. Cette analyse peut démontrer qu'un traitement différent est discriminatoire en raison de son effet préjudiciable ou de l'application d'un stéréotype négatif ou, au contraire, qu'il est nécessaire pour améliorer la situation véritable du groupe de demandeurs.
[40] Ainsi, une analyse formelle fondée sur une comparaison du groupe de demandeurs à un groupe « se trouvant dans une situation semblable » ne garantit pas la suppression du mal auquel le par. 15 (1) vise à remédier -l'élimination des mesures législatives qui ont pour effet d'imposer ou de perpétuer une inégalité réelle. L'exercice requis n'est pas une comparaison formelle avec un groupe de comparaison donné aux caractéristiques identiques, mais une démarche qui tienne compte du contexte dans son ensemble, y compris la situation du groupe de demandeurs et la question de savoir si la mesure législative contestée a pour effet de perpétuer un désavantage ou un stéréotype négatif à l'égard du groupe. » [32]
(Les soulignements sont de la soussignée)
[120] Voyons maintenant comment ces principes s'appliquent en l'espèce.
4.2 Le groupe comparateur retenu et les caractéristiques personnelles pertinentes
[121] Les demandeurs, tant dans leurs procédures qu'en plaidoirie, ont référé au traitement fait à des personnes qui leur seraient apparentées. Cet élément n'a aucune pertinence afin de déterminer s'il y a en droit violation du droit à l'égalité[33]. Il serait par ailleurs susceptible de porter à confusion si l'on tenait compte des exemptions obtenues à la règle de la double-mère dans les bandes auxquelles appartiennent les personnes victimes de discrimination.
[122] Les demandeurs et les autres victimes de discrimination peuvent se comparer au groupe le plus avantagé en vertu de la Loi, pourvu que leurs caractéristiques personnelles pertinentes au bénéfice recherché soient semblables, à l'exception du motif de discrimination prohibé, et ce, que les membres du groupe en question leur soient ou non apparentés.
[123] Du passage de l'affaire Withler cité précédemment, il est clair que le groupe de comparaison retenu n'a pas à posséder des caractéristiques rigoureusement identiques à celles des personnes se plaignant de discrimination. Cette décision, il faut le souligner, a été rendue après la décision de la CACB dans McIvor.
[124] La CACB dans McIvor, tout comme la juge de première instance avant elle, a retenu un groupe de comparaison identique en tous points à la situation de Grismer. Elle a néanmoins fait mention de la caractéristique qu'elle jugeait essentielle, soit celle relative aux ancêtres Indiens, et fait un constat très général de discrimination. C'est ce qui découle des paragraphes suivants de sa décision:
«[76] It is clear that the claimant under s. 15 is entitled, in the first instance, to choose the group with which he or she wishes to be compared (Law at para. 58). This is partly a function of the nature of the equality inquiry. The right to equality is not a right to be treated as well as one particular comparator group. Rather, it is, prima facie, a right to be treated as well as the members of all appropriate comparator groups. It is, therefore, no defence to a s.15 claim that some particular comparator group is treated no better than the group to which the claimant belongs. On the other hand, all that the claimant need show, in order to pass the first stage of analysis of a s. 15 claim, is that there is at least one appropriate comparator group which is afforded better treatment than the one to which he or she belongs.
[77] In this case, Mr. Grismer wishes to compare his group (people born prior to April 17, 1985 of Indian women who were married to non-Indian men) with people born prior to April 17, 1985 of Indian men who were married to non-Indian women. That comparator group was accepted by the trial judge.
[78] On the face of it, the comparator group proposed by Mr. Grismer is the most logical one. It is a group that is in all ways identical to the group to which Mr. Grismer belongs, except for the sex of the parent who has Indian status. By selecting this comparator group, Mr. Grismer isolates the alleged ground of discrimination as the sole variable resulting in differential treatment. That is, generally, an indicator of an appropriate comparator group:
The appropriate comparator group is the one which mirrors the characteristics of the claimant (or claimant group) relevant to the benefit or advantage sought except that the statutory definition includes a personal characteristic that is offensive to the Charter or omits a personal characteristic in a way that is offensive to the Charter. Hodge v. Canada Minister of Human Resources Development), [2004] 3 S.C.R. 357, 2004 SCC 65 at para. 23.
[79] Here Mr. Grismer says that the benefit or advantage sought is the ability to transmit Indian status to one's children. The relevant characteristic is Indian ancestry. The personal characteristic that is a requirement of the statute, and which is allegedly offensive to the Charter is that the Indian parent be the father. While it is true that that personal characteristic is not expressly referred to in the current legislation, the plaintiffs argue that in preserving Indian status for those who had it prior to the 1985 amendments, that personal characteristic has effectively been imported into the current legislation.
[…]
[154] The Charter violation that I find to be made out is a much narrower one than was found by the trial judge. The 1985 legislation violates the Charter by according Indian status to children
i) who have only one parent who is Indian (other than by reason of having married an Indian).
ii) where that parent was born prior to April 17, 1985, and
iii) where that parent in turn only had one parent who was Indian (other than by reason of having married an Indian).
If their Indian grand-parent is a man, but not if their Indian grandparent is a woman.
[…]
[161] Sections 6(1)(a) and 6(1)(c) of the Indian Act violate the Charter to the extent that they grant individuals to whom the Double Mother Rule applied greater rights than they would have had under s. 12(1)(a)(iv) of the former legislation. Accordingly, I would declare ss. 6(1)(a) and 6(1)(c) to be of no force and effect, pursuant to s. 52 of the Constitution Act, 1982. I would suspend the declaration for a period of 1 year, to allow Parliament time to amend the legislation to make it constitutional.
[…]
[165] […] In particular, I find that the infringement of s. 15 would be saved by s.1 but for the advantageous treatment that the 1985 legislation accorded those to whom the Double Mother Rule under previous legislation applied. »[34]
(Les soulignements sont de la soussignée)
[125] Le choix du groupe comparateur retenu en l'espèce est conditionné par le fait que, dans McIvor, la CACB a considéré justifié le traitement favorable accordé aux personnes bénéficiant de droits acquis. Le Tribunal a donc retenu comme comparateur un groupe issu de celui bénéficiant d'un traitement amélioré en vertu de la Loi de 1985 selon la CACB.
[126] La CACB a décrit comme suit le traitement avantageux dont bénéficie le groupe de comparaison en tous points identique à Grismer qu'elle a retenu, lequel impliquait l'obtention d'un statut 6(2) pour les enfants de Grismer:
« [137] I say this because the 1985 legislation did not merely preserve the rights of the comparator group. As I have previously indicated, members of the comparator group were able, prior to 1985, to confer only limited Indian status on their children. Such children (who would have fallen under the Double Mother Rule) were given status as Indians only up to the age of 21. Under the 1985 legislation, persons who fell into the comparator group were given Indian status under s. 6(1). Their children had status under s. 6(2) for life, and the ability to transmit status to their own children as long as they married persons who had at least one Indian parent. »[35]
(Le soulignement est de la soussignée.)
[127] Ceci résulte du fait que Grismer s'est marié après le 17 avril 1985 et que pour les personnes à qui la règle de la double-mère s'appliquait et qui se sont également mariées après 1985 avec une non-Indienne, les petits-enfants avaient aussi un statut 6(2).
[128] La situation factuelle en l'espèce a permis de jeter un autre éclairage sur l'ampleur du traitement plus favorable accordé par la Loi de 1985 aux personnes à qui la règle de la double-mère s'appliquait auparavant. Il y a lieu de retenir comme groupe comparateur, tel que requis par les demandeurs qui ont produit un tableau allant en ce sens, le sous-groupe plus favorisé des personnes à qui la règle de la double-mère s'appliquait avant 1985, lorsque les parents des enfants qui auraient été exclus à 21 ans suivant cette règle se sont mariés avant 1985[36].
[129] Tous les enfants membres du groupe comparateur devant être exclus suivant la règle de la double-mère, et ceci inclut les enfants à naître, devaient cesser d'avoir leur statut d'Indien à 21 ans en vertu des dispositions en vigueur immédiatement avant la Loi de 1985[37]. Autrement dit, le parent Indien marié à une non-Indienne (avant son mariage) et dont les parents étaient un Indien et une non-Indienne, ne pouvait transmettre le statut à ses enfants que pour une période limitée aux 21 premières années de leur vie avant l'entrée en vigueur de la Loi de 1985.
[130] Les enfants Indiens de moins de 21 ans membres du groupe comparateur au moment de l'entrée en vigueur de la Loi de 1985 se sont vus reconnaître un statut d'Indien à vie en vertu de 6(1)a) puisqu'ils étaient soient inscrits au Registre ou y avaient droit avant l'entrée en vigueur de cette loi. Les personnes de plus de 21 ans nées avant 1985 appartenant à ce groupe et demeurées inscrites malgré cela, par erreur ou autrement, se voyaient également reconnaître le statut d'Indien à vie en vertu de cette même disposition alors que celui-ci aurait pu être remis en question par le Registraire auparavant. Les personnes ayant perdu leur statut en raison de l'application de la règle de la double-mère, récupéraient leur statut d'Indien en vertu de 6(1)c), et ce, pour la vie. Enfin, les personnes nées après le 17 avril 1985 d'un père Indien marié à une non-Indienne avant cette date et dont les grands-parents du côté de leur père étaient un Indien et une non-Indienne ont pu obtenir le statut d'Indien, et ce, pour la vie, en vertu de 6(1)f). Les parents et grands-parents de ces personnes ont donc obtenu la faculté de leur transmettre un statut amélioré.
[131] Si le nombre des victimes de la règle de la double-mère ayant effectivement perdu leur statut et à qui on l'a redonné est relativement limité, la preuve ne révèle pas le nombre des autres personnes ayant bénéficié de ce traitement plus avantageux que sous l'ancienne loi.
[132] Comme indiqué dans McIvor, les demandeurs peuvent se comparer au groupe le plus avantagé. L'affaire Withler a réitéré que toutes les caractéristiques des groupes comparés ne sont pas pertinentes au bénéfice recherché, spécifiant qu'il y a lieu de déterminer quelles sont les caractéristiques pertinentes dans les circonstances afin de mieux centrer l'analyse sur l'égalité réelle.
[133] Ici, la caractéristique pertinente est constituée des ancêtres Indiens nécessaires à l'obtention ou à la transmission d'un statut. Même si les demandeurs ont tenté d'établir que toutes leurs caractéristiques correspondaient en tous points à celles du groupe comparateur, il suffit qu'ils aient en commun avec ce groupe mieux traité leurs ancêtres Indiens et qu'ils démontrent qu'ils n'ont pas obtenu un traitement aussi avantageux en raison d'un motif de discrimination prohibé.
[134] Ainsi, si la Loi de 1985 accorde un statut 6(1) à vie à un groupe déjà privilégié qui n'avait pas droit à un tel statut sous l'ancienne loi, tout en le refusant à des groupes historiquement victimes de discrimination alors que leurs caractéristiques sur le plan généalogique, outre le sexe de leurs ancêtres Indiens, sont les mêmes, il faudra conclure qu'elle est discriminatoire.
4.3 Le demandeur Descheneaux
[135] Descheneaux, soutient qu'il aurait aujourd'hui droit à un statut 6(1) lui permettant de le transmettre à ses enfants si sa grand-mère Indienne avait plutôt été un grand-père Indien.
[136] Il compare sa situation à celle du petit-fils d'un Indien hypothétique de la même génération que sa grand-mère Clémente à qui la règle de la double-mère aurait dû s'appliquer. Cet Indien hypothétique, en se mariant, a conservé son statut et a conféré son statut à son épouse non-Indienne. Son fils, né à la même époque que la mère de Stéphane Descheneaux, a donc eu le statut d'Indien à la naissance. Se mariant à son tour à une non-Indienne, celle-ci obtient le statut et ils ont des enfants nés avant le 17 avril 1985, date de l'entrée en vigueur de la Loi de 1985. À leur naissance, ces enfants possédaient un statut mais devaient en principe le perdre à 21 ans compte tenu de la règle de la double-mère, leur père ayant épousé une non-Indienne (avant son mariage) et étant les petits-enfants d'un Indien et d'une non-Indienne (avant son mariage).
[137] Avant la Loi de 1985, Stéphane Descheneaux, petit-fils de Clémente O'Bomsawin est sans statut alors que les petits-enfants de l'Indien hypothétique de la même génération que sa grand-mère possèdent le statut d'Indien jusqu'à 21 ans.
[138] La loi de 1985 accorde un statut 6(1) aux petits-enfants membres du groupe comparateur, qu'ils aient ou non été inscrits sur le Registre au moment de son entrée en vigueur. Stéphane Descheneaux n'a toujours aucun statut. Il acquiert le statut en vertu de 6(2) à la suite de la Loi de 2010 alors que les petits-enfants du groupe comparateur conservent leur statut en vertu de 6(1).
[139] Les tableaux suivants illustrent ce qui précède:
Groupe comparateur Demandeur Descheneaux
Loi de 1927
Le grand-père Indien conserve son statut à la suite de son mariage et son épouse non-Indienne l'obtient du fait du mariage. |
La grand-mère Indienne, Clémente O'Bomsawin, perd son statut à la suite de son mariage avec un non-Indien en 1935. |
Les enfants du grand-père indien jouissent du statut à la naissance. |
Sa fille Hélène Durand, mère en devenir du demandeur Descheneaux, n'a pas droit au statut à sa naissance. |
Loi de 1951
Le grand-père Indien et son épouse conservent leur statut. |
La grand-mère Indienne Clémente O'Bomsawin demeure sans statut. |
Le fils du grand-père Indien qui se marie après 1951 et avant le 17 avril 1985 conserve son statut et le confère à son épouse non-Indienne; ils ont la capacité de transmettre leur statut à leurs enfants seulement jusqu'à ce que ceux-ci atteignent 21 ans (règle de la double-mère). |
La fille de la grand-mère Indienne, Hélène Durand demeure sans droit après son mariage à un non-Indien en 1968. |
Les petits enfants du côté du fils du grand-père Indien ont droit au statut de la naissance à 21 ans (règle de la double-mère). |
Le petit-fils de la grand-mère Indienne, le demandeur Descheneaux né en 1968 n'a pas droit au statut. |
Loi de 1985
Le grand-père Indien et son épouse conservent leur statut en vertu de 6(1)(a). |
La grand-mère Indienne Clémente O'Bomsawin retrouve son statut en vertu de 6(1)(c). |
Le fils du grand-père Indien et son épouse conservent leur statut en vertu de 6(1)a) et acquièrent la capacité de transmettre le statut à leurs enfants actuels et à venir à vie en vertu de 6(1)a), 6(1)c) ou 6(1)f). |
La fille de la grand-mère Indienne, Hélène Durand, obtient le statut en vertu de 6(2); elle ne peut transmettre aucun statut à ses enfants, ayant épousé un non-Indien. |
Les petits-enfants du côté du fils du grand-père Indien nés avant le 17 avril 1985 d'un mariage contracté avant cette date obtiennent un statut à vie en vertu de 6(1)a) ou de 6(1)c) et, s'ils sont nés après cette date d'un mariage contracté avant celle-ci, obtiennent également un statut à vie en vertu de 6(1)f); ils ont la capacité de transmettre au moins un statut 6(2) à leurs enfants. |
Le petit-fils de la grand-mère Indienne, le demandeur Descheneaux demeure sans statut. |
Loi de 2010
Le grand-père Indien et son épouse conservent leur statut en vertu de 6(1)a). |
La grand-mère Indienne Clémente O'Bomsawin conserve son statut en vertu de 6(1)c). |
Le fils du grand-père Indien et son épouse conservent leur statut en vertu de 6(1)a) et leur capacité de transmettre le statut à leurs enfants actuels et à venir à vie en vertu de 6(1)a), 6(1)c) ou 6(1)f). |
La fille de la grand-mère Indienne, Hélène Durand, passe d'un statut en vertu de 6(2) à un statut en vertu de 6(1)c.1); elle acquiert la possibilité de transmettre au moins un statut 6(2) à ses enfants. |
Les petits-enfants du côté du fils du grand-père Indien nés avant le 17 avril 1985 d'un mariage contracté avant cette date conservent un statut à vie en vertu de 6(1)a) ou de 6(1)c) et, s'ils sont nés après cette date d'un mariage contracté avant celle-ci, conservent également un statut à vie en vertu de 6(1)f); ils conservent la capacité de transmettre au moins un statut 6(2) à leurs enfants. |
Le petit-fils de la grand-mère Indienne, le demandeur Descheneaux, né avant le 17 avril 1985 d'un mariage contracté avant cette date obtient le statut en vertu de 6(2); il ne possède pas la capacité de transmettre un statut quelconque à ses enfants puisque la mère de ses enfants est une non-Indienne. |
Les arrières petits-enfants du côté du fils du grand-père Indien obtiennent au moins le statut 6(2). |
Les arrières petits-enfants de la grand-mère Indienne n'ont pas droit au statut. |
[140] Il est évident que Descheneaux n'est pas traité de façon identique à ceux qui conservent leur statut en raison des droits acquis sous l'ancienne loi tel que prévu à 6(1) a), et ce, en raison du sexe de sa grand-mère Indienne ayant perdu son statut à la suite de son mariage avec un non-Indien. Ce groupe inclut les Indiens auxquels la règle de la double-mère se serait appliquée n'eût été des exemptions obtenues par plusieurs bandes. Ces Indiens étaient donc inscrits au Registre ou avaient droit d'y être inscrits le 16 avril 1985. La discrimination en lien avec de tels droits acquis a cependant été jugée justifiée dans McIvor et le Tribunal se considère lié par cette conclusion, tel que vu plus haut et pour les motifs qui seront énoncés plus loin en lien avec la question de la justification.
[141] Il n'est cependant pas traité également non plus lorsqu'il se compare au groupe plus restreint auquel la règle de la double-mère s'appliquait avant la Loi de 1985 et auquel cette loi a conféré un avantage additionnel allant au-delà des droits acquis sous l'ancienne loi. Le tableau ci-haut fait d'ailleurs référence au traitement accordé aux personnes à qui s'appliquait cette règle lorsque les parents des enfants devant être exclus en vertu de celle-ci se sont mariés avant 1985, soit au groupe comparateur retenu en l'espèce. Comme dans McIvor, il faut en effet retenir que Descheneaux a le droit de se comparer au groupe recevant le traitement le plus avantageux.
[142] En substance, la situation du demandeur Descheneaux et celle de ce groupe comparateur sur le plan des ancêtres est identique: ils n'ont qu'un parent Indien (autre qu'une femme non-Indienne ayant acquis le statut par mariage) et ce parent Indien n'a lui-même qu'un seul parent Indien (autre qu'une femme non-Indienne ayant acquis le statut par mariage). Le membre du groupe comparateur aura un statut en vertu de 6(1)a) car son grand-parent Indien est de sexe masculin ainsi que son parent Indien, tandis que Descheneaux aura, sans égard au sexe de son parent dont la mère Indienne avait perdu son statut en se mariant, un statut en vertu de 6(2) car son grand-parent Indien est de sexe féminin.
[143] Le sexe du parent Indien de Descheneaux est en effet sans importance. Même si son père, plutôt que sa mère, avait été l'enfant de la grand-mère Indienne ayant perdu son statut, la Loi de 1985 et la Loi de 2010 n'auraient pas eu pour effet de permettre que son épouse non-Indienne soit rétroactivement considérée Indienne de façon à conférer un statut 6(1)(a) à Descheneaux, la Loi de 1951 ne s'étant jamais appliquée à elle. Dans cette hypothèse, ni Descheneaux, ni son père et ni sa mère non-Indienne, n'auraient été inscrits ou n'auraient eu le droit de l'être le 16 avril 1985.
[144] Notons de plus, même si c'est le cas pour Descheneaux et pour sa mère, qu'il n'est pas nécessaire que la victime de discrimination se soit mariée avant 1985 comme les membres du groupe comparateur. Cette caractéristique est sans pertinence quant au bénéfice recherché.
[145] Par ailleurs, la discrimination constatée par la CACB dans McIvor, comme celle constatée en l'espèce, n'implique pas que les petits-enfants appartenant au groupe victime de discrimination doivent être nés d'un mariage[38]. Il ne s'agit pas en effet d'une caractéristique pertinente aux fins du constat d'une discrimination ou de la reconnaissance d'une égalité réelle. L'absence de pertinence d'une telle distinction est également cohérente avec la Loi de 2010 et le régime neutre qu'elle a mis en place.
[146] De même, comme l'illustre d'ailleurs l'affaire McIvor -les petits-enfants de McIvor sont nés après 1985- le groupe victime de discrimination n'est pas restreint aux personnes nées pendant la période d'application de la règle de la double-mère.
[147] L'existence d'une discrimination au moment de la demande d'inscription dépend cependant de l'exclusion de la grand-mère en raison de son sexe et de son mariage à un non-Indien, ce qui implique qu'elle se soit mariée avant le 17 avril 1985.
[148] Le traitement avantageux accordé en vertu de la Loi de 1985 à un groupe déjà avantagé sous l'ancien régime a été considéré discriminatoire par la CACB dans McIvor:
«[72] It is evident to me, therefore, that there is merit in Mr. Grismer's claim that the ability to transmit status to his children is a benefit of the law to which s. 15 applies. Ms. McIvor's claim is a more remote one. She does not, as a grandparent, have the same legal obligations to support and nurture her grandchildren that a parent has to his or her children.
[73] Given that Mr. Grismer is a plaintiff in this matter, and given that any practical remedy that might be granted could be based on the claim by Mr. Grismer rather than that of Ms. McIvor, it is, strictly speaking, unnecessary to determine whether the ability to confer Indian status on a grandchild is a "benefit of the law" to which s. 15 of the Charter applies. In view of the cultural importance of being recognized as an Indian and the requirement to give s. 15 a broad, purposive interpretation, however, I would be inclined to the view that the ability to transmit Indian status to a grandchild is a sufficient "benefit of the law" to come within s. 15 of the Charter.
[74] In the analysis that follows, I will concentrate on Mr. Grismer's claim, since it is, in some ways, more straightforward and simpler to describe than that of Ms. McIvor. Except as I will indicate, however, the analysis of Ms. McIvor's claim would be similar. In my view, the claims stand or fall together.
[…]
[83] It is apparent that the Indian Act treats Mr. Grismer’s group less well than the comparator group. Unlike those in the comparator group, Mr. Grismer is unable to transmit Indian status to the children of his marriage to a non-Indian woman.
[84] Interestingly, even if one accepted the defendants’ assertion that only people who were benefited by the 1985 amendments can constitute a comparator group, the result would be the same. The defendants argue, in their
factum, that no appropriate comparator group obtained, as a result of the 1985 amendment, any benefit superior to that afforded Mr. Grismer:
68. ... [L]ike all children of registrants entitled under s. 6(2), Mr. Grismer’s children will not be entitled to registration if he parents with a non-Indian. This is the real benefit that the Respondents seek - registration and the ability to transmit entitlement to registration after two successive generations of parenting with a non-Indian.
69. However, no one obtains this benefit under the impugned legislation. The 1985 Act incorporates a second generation cut-off rule, and no one was reinstated or registered with the ability to circumvent it. The entitlement of Mr. Grismer’s hypothetical cousin was only maintained or confirmed ... and not obtained … under s. 6(1)(a). [Emphasis added]
[85] In my view, this assertion mischaracterizes the effects of the 1985 amendments. As I have already noted, prior to 1985, Mr. Grismer’s hypothetical cousin was not entitled to transmit normal Indian status to his children if he married a non-Indian. Any children of the marriage would cease to have Indian status when they attained the age of 21 under s. 12(1)(a)(iv) of the pre-1985 legislation. It is only with the coming into force of the 1985 legislation that such children received (or were reinstated to) full status.
[86] Even, therefore, if I were convinced by the defendants’ argument that only those who were afforded enhanced status by the 1985 amendments can constitute a comparator group for the purposes of s. 15 of the Charter, it seems to me that Mr. Grismer would be able to demonstrate differential treatment.
[…]
[90] The defendants acknowledge that, based on Benner, if Mr. Grismer suffers discrimination as a result of his mother’s gender, he has standing to raise a s. 15 claim. They say, however, that the situation that is alleged to prevail in this case is not discrimination against Mr. Grismer based on his mother’s gender, but rather discrimination against Mr. Grismer’s children based on his mother’s gender.
[91] I am unable to accept this argument. As I have already indicated, I am of the view that the ability to transmit Indian status to his children is a benefit to Mr. Grismer himself, and not solely a benefit to his children. He is, therefore, in a situation analogous to that of Mr. Benner.
[92] Similarly, I am of the view that the ability to transmit Indian status to her grandchildren through Mr. Grismer is a benefit to Ms. McIvor. I am, therefore, of the view that she can also demonstrate that the legislation accords her disadvantageous treatment on the basis of sex.
[93] In any event, it seems to me that the inherently multi-generational nature of legislation of the sort involved in this case and in Benner requires a court to take a broad, “purposive approach” to determining issues of discrimination and of standing. The determination of Indian status under the Indian Act requires an examination of three generations (here, Ms. McIvor, Mr. Grismer, and his children); it would not be in keeping with the purpose of s. 15 of the Charter to hold that sex discrimination directed at one of those three generations was inconsequential so long as the disadvantageous treatment accrued only to another of them.
[…]
[111] The impugned legislation in this case is, in my opinion, discriminatory as that concept is used in s. 15 of the Charter. The historical reliance on patrilineal descent to determine Indian status was based on stereotypical views of the role of a woman within a family. It had (in the words of Law) “the effect of perpetuating or promoting the view that [women were] ... less ... worthy of recognition or value as a human being[s] or as a member[s] of Canadian society, equally deserving of concern, respect, and consideration”. The impugned legislation in this case is the echo of historic discrimination. As such, it serves to perpetuate, at least in a small way, the discriminatory attitudes of the past.
[112] The limited disadvantages that women face under the legislation are not preserved in order to, in some way, ameliorate their position, or to assist more disadvantaged groups. None of the distinctions is designed to take into account actual differences in culture, ability, or merit.
[…]
[117] It follows that the unequal treatment of which the plaintiffs complain is discriminatory, and that the justifications for the discrimination proposed by the defendants are most appropriately considered under s. 1 of the Charter. The impugned legislation constitutes a prima facie infringement of s. 15 of the Charter. Section 6 of the Indian Act must be justified, if at all, under s. 1.
[…]
[154] The Charter violation that I find to be made out is a much narrower one than was found by the trial judge. The 1985 legislation violates the Charter by according Indian status to children
i) who have only one parent who is Indian (other than by reason of having married an Indian).
ii) where that parent was born prior to April 17, 1985, and
iii) where that parent in turn only had one parent who was Indian (other than by reason of having married an Indian).
If their Indian grand-parent is a man, but not if their Indian grandparent is a woman.
[155] The legislation would have been constitutional if it had preserved only the status that such children had before 1985. By according them enhanced status, it created new inequalities, and violated the Charter.
[156] There are two obvious ways in which the violation of s. 15 might have been avoided. The 1985 legislation could have given status under an equivalent of s. 6(1) to people in Mr. Grismer's situation. Equally, it could have preserved only the existing rights of those in the comparator group. While these are the obvious ways of avoiding a violation of s. 15, other, more complicated, solutions might also have been found.
[…]
[161] Sections 6(1)(a) and 6(1)(c) of the Indian Act violate the Charter to the extent that they grant individuals to whom the Double Mother Rule applied greater rights than they would have had under s. 12(1)(a)(iv) of the former legislation. Accordingly, I would declare ss. 6(1)(a) and 6(1)(c) to be of no force and effect, pursuant to s. 52 of the Constitution Act, 1982. I would suspend the declaration for a period of 1 year, to allow Parliament time to amend the legislation to make it constitutional.
[…]
[165] […] In particular, I find that the infringement of s. 15 would be saved by s.1 but for the advantageous treatment that the 1985 legislation accorded those to whom the Double Mother Rule under previous legislation applied.»[39]
(Les soulignements sont de la soussignée.)
[149] Il faut bien constater que Descheneaux subit lui aussi un traitement discriminatoire en raison du sexe de son grand-parent Indien, même lorsqu'il se compare au groupe plus restreint des personnes auxquelles la règle de la double-mère s'appliquait avant l'entrée en vigueur de la Loi de 1985 et au sous-groupe encore plus avantagé retenu aux fins de comparaison en l'espèce.
[150] Malgré ce qu'a plaidé le PGC, ce constat, considérant le caractère historique et fondé sur des stéréotypes de la discrimination en cause, la moindre valeur accordée à l'identité Indienne des femmes et à celle de leurs descendants, ne dépend aucunement de la façon dont Descheneaux ou ses enfants ont pu s'accommoder de leur statut diminué ou de leur absence de statut dans les faits. Le bénéfice dont ils sont privés est en effet lié à leur incapacité de transmettre un statut de la même façon que les personnes appartenant au groupe comparateur.
[151] Notons qu'aux fins de la comparaison et du constat de discrimination, il faut faire abstraction des personnes ayant obtenu le statut du fait de leur mariage dans le groupe comparateur, tel que l'a d'ailleurs fait la CACB au paragraphe 154 de sa décision, citée plus haut. Agir autrement ne serait pas conforme à une approche se centrant sur l'égalité réelle plutôt que formelle. Ce serait également omettre de considérer que le statut acquis du fait du mariage n'était pas un plein statut vu la règle de la double-mère. La CACB s'est d'ailleurs exprimée comme suit à ce sujet:
« [141] The defendants have not presented evidence or argument attempting to justify the 1985 legislation on any basis other than that it preserved existing rights. When pressed, they acknowledge that the situation of persons in what I have found to be the appropriate comparator group was ameliorated by the 1985 legislation. They say, however, that there is an important difference between the comparator group and Mr. Grismer's group. They note that members of the comparator group have two Indian parents -a father who is of Indian heritage, and a mother who became Indian by virtue of marriage. In contrast, Mr. Grismer has only one parent of Indian heritage - his mother.
[142] I find this distinction unconvincing. It is based on the very sort of discrimination that Mr. Grismer complains of. Further, notwithstanding the Indian status of the comparator group's mothers, the pre-1985 legislation specifically limited the member's ability to transmit status to their children, through the Double Mother Rule. »[40]
[152] Le Tribunal est d'avis que les alinéas 6(1)a), c) et f) et le paragraphe 6(2) de la Loi portent atteinte au droit à l'égalité du demandeur Descheneaux consacré par la Charte canadienne en accordant un plein statut 6(1) ou un statut 6(1) au-delà de leurs 21 ans à certaines personnes:
i) qui n'ont qu'un parent Indien (autre qu'une femme non-Indienne ayant acquis le statut par mariage),
ii) ce parent Indien n'ayant lui-même qu'un seul parent Indien (autre qu'une femme non-Indienne ayant acquis le statut par mariage),
si leur grand-parent Indien est un homme, mais non si ce grand-parent Indien est une femme Indienne ayant perdu son statut par mariage.
[153] Autrement dit, la Loi discrimine à l'endroit de Descheneaux en ne permettant pas qu'il s'inscrive au Registre avec un statut équivalent à celui de 6(1), ce qui l'empêche de transmettre un statut à ses enfants à moins de les avoir avec une Indienne, ce qui n'est pas le cas ici.
[154] Une autre façon d'exprimer la discrimination identifiée par le Tribunal est de constater que l'un des moyens par lequel le législateur aurait pu assurer un traitement exempt de discrimination fondée sur le sexe à l'endroit du groupe auquel appartient Descheneaux, aurait été de donner un statut équivalent à celui du paragraphe 6(1) à toutes les personnes qui ont un parent dont l'un des parents est une femme Indienne qui a perdu son statut en se mariant à son père non-Indien, et dont l'autre parent est non-Indien.
[155] Ayant établi que Descheneaux appartient à un groupe victime de discrimination fondée sur le sexe, il reste au Tribunal à déterminer s'il en est de même pour les demanderesses Susan et Tammy Yantha avant de traiter de la question de la justification.
4.4 Les demanderesses Susan et Tammy Yantha
[156] Même s'il a techniquement été plaidé que Susan et Tammy pouvaient se comparer aux personnes bénéficiant de droits acquis, leurs procureurs ont davantage insisté sur le groupe comparateur formé de personnes auxquelles la règle de la double-mère s'appliquait avant 1985.
[157] Tel que déjà mentionné, le Tribunal se considère lié par la décision de la CACB sur le caractère justifié de la discrimination découlant du traitement fait aux personnes bénéficiant de droits acquis. L'analyse a donc été centrée sur la discrimination découlant du traitement particulier accordé au groupe comparateur retenu, soit les personnes auxquelles la règle de la double-mère s'appliquait avant 1985, lorsque les parents des enfants qui auraient été exclus à 21 ans suivant cette règle se sont mariés avant 1985.
[158] Susan Yantha compare sa situation à celle du fils illégitime hypothétique d'un Indien né à la même époque qu'elle tandis que la situation de Tammy se compare à celle des enfants issus du mariage de celui-ci avec une mère non-Indienne.
[159] Le fils illégitime hypothétique, est né d'un père Indien et d'une non-Indienne, tout comme Susan, mais possède le statut d'Indien à la naissance en vertu de l'alinéa 11(c) de la Loi de 1951 -devenu 11(1) c) à la suite des amendements de 1956- tel qu'interprété par la Cour suprême dans l'affaire Martin c. Chapman[41].
[160] Il conserve son statut à la suite de son mariage à une non-Indienne avant 1985 et son épouse l'obtient suivant les dispositions alors applicables. Cependant, leurs enfants, s'ils jouissent du statut d'Indien à la naissance, pouvaient le perdre à 21 ans en raison de la règle de la double-mère telle que décrite plus haut.
[161] La Loi de 1985 accorde aux enfants du groupe comparateur un statut en vertu de 6(1) alors que Tammy Yantha demeure sans statut, sa mère Susan ne pouvant le lui transmettre puisqu'elle ne possède qu'un statut 6(2) à la suite de l'entrée en vigueur de cette loi, n'ayant qu'un seul parent Indien, et n'a pas épousé un Indien.
[162] La Loi de 2010 n'a aucun impact quant aux deux demanderesses Yantha. La demanderesse Tammy Yantha, dont la mère Susan n'avait pas le statut à la naissance et n'a donc pu le perdre en raison de son mariage, ne rencontre pas cette condition d'application de la nouvelle disposition 6(1)c.1). Quant à la demanderesse Susan Yantha, c'est son père qui est Indien, ce qui fait qu'elle n'entre pas non plus dans le champ d'application de cette disposition.
[163] Les tableaux qui suivent illustrent l'effet des différentes lois sur le statut des demanderesses Susan et Tammy Yantha ainsi que sur le groupe comparateur.
Groupe comparateur Demanderesses Yantha
Loi de 1951
Le grand-père Indien a un fils hors mariage avec une non-Indienne. |
Clément O'Bomsawin, un Indien, a une fille hors mariage avec une non-Indienne, la demanderesse Susan Yantha, née en 1954. |
Le fils né hors mariage a droit au statut d'Indien à la naissance en vertu de 11c) (devenu 11(1)c) en 1956). |
La demanderesse Susan Yantha n'a pas droit au statut. |
Le fils né hors mariage conserve son statut à la suite de son mariage à une non-Indienne et celle-ci obtient le statut du fait du mariage mais ils n'ont la capacité de transmettre le statut à leurs enfants que jusqu'aux 21 ans de ceux-ci (règle de la double-mère). |
La demanderesse Susan Yantha demeure sans statut à la suite de son premier mariage à un non-Indien et de son second mariage à un non-Indien, que ces mariages soient valides ou non. |
Les enfants du fils né hors mariage ont droit au statut de la naissance à 21 ans (règle de la double-mère). |
Les enfants de la fille née hors-mariage, Tammy Yantha née en 1972 et Dennis, né le 23 avril 1983, sont sans statut à la naissance. |
Loi de 1985
Le fils né hors mariage et son épouse conservent leur statut en vertu de 6(1)a) et acquièrent la capacité de transmettre le statut à leurs enfants actuels et à venir à vie en vertu de 6(1)a), 6(1)c) ou 6(1)f). |
La fille née hors mariage, la demanderesse Susan Yantha obtient un statut en vertu de 6(2) et ne peut transmettre le statut à sa fille Tammy Yantha, le père de celle-ci étant non-Indien. |
Les enfants du fils né hors mariage nés avant le 17 avril 1985 d'un mariage contracté avant cette date obtiennent un statut à vie en vertu de 6(1)a) ou de 6(1)(c) et, s'ils sont nés après cette date d'un mariage contracté avant celle-ci, ils obtiennent également un statut à vie en vertu de 6(1)f); ils ont la capacité de transmettre au moins un statut 6(2) à leurs enfants. |
L'enfant de la fille née hors mariage, la demanderesse Tammy Yantha, née avant le 17 avril 1985 d'un mariage contracté avant cette date demeure sans statut et ne peut transmettre aucun statut à ses enfants et il en est de même pour Dennis, que les mariages soient valides ou non. |
Les petits-enfants du fils né hors mariage obtiennent au moins un statut en vertu de 6(2) à la naissance. |
La petite-fille de la fille née hors mariage, Julia Yantha, n'a aucun statut à la naissance (2006). |
Loi de 2010
Aucun changement. |
Aucun changement. |
[164] Il faut bien constater que Susan et Tammy Yantha subissent un traitement différent relativement à leur statut et à leur inscription au Registre ainsi qu'en regard de la possibilité de transmettre ce statut, et ce, à la suite de la Loi de 1985 et en raison du sexe de Susan, lorsqu'elles se comparent au groupe auquel la règle de la double-mère s'appliquait sous l'ancien régime. La Loi de 1985 se trouve à avoir accentué encore davantage que sous l'ancienne loi la valorisation moindre de l'identité Indienne des femmes et de leurs descendants par rapport à celle des hommes Indiens et de leurs descendants. Il s'agit ici, bien clairement, d'un type de discrimination qui a eu cours historiquement et est fondé sur un stéréotype, ce qui implique qu'il s'agit d'une discrimination au sens de l'article 15.
[165] Susan Yantha est née en 1954 et donc sans statut à la naissance parce qu'enfant illégitime de sexe féminin. Il en résulte que ni Susan, ni Tammy ne peuvent transmettre leur statut à leurs enfants avec un non-Indien. Susan n'a obtenu qu'un statut 6(2) en vertu de la Loi de 1985 et Tammy n'a aucun statut. Le groupe comparateur, à la suite de l'entrée en vigueur de la Loi de 1985, bénéficie plutôt, tel que le démontre le tableau et tel que déjà vu, d'un statut amélioré à cet égard, lequel n'est plus limité à la transmission du statut jusqu'aux 21 ans des enfants. Ainsi, les enfants comparables à Tammy sur le plan des ancêtres Indiens obtiennent le statut 6(1) pour la vie tandis que celle-ci n'en possède aucun.
[166] La question de la validité du mariage de Susan Yantha avec Robert Marier, les parents de Tammy, a été soulevée lors des plaidoiries en lien avec la règle de la double-mère afin de contester que le groupe auquel elle s'applique constitue un groupe de comparaison valable.
[167] Tant quant à Susan que quant à Tammy, le fait que Tammy soit ou non née d'un mariage n'est pas une caractéristique personnelle pertinente au bénéfice recherché, soit le droit à l'inscription au Registre avec un statut permettant de le transmettre à ses enfants.
[168] Ce sont les ancêtres Indiens nécessaires à l'obtention d'un statut permettant de le transmettre à leurs enfants, excluant les personnes ayant obtenu le statut du fait de leur mariage, qui autorisent Susan et Tammy à se comparer au groupe auquel la règle de la double-mère s'appliquait. Le père Indien de Susan Yantha suffit à cette fin. Tel que déjà vu, ne pas faire abstraction des personnes ayant obtenu le statut du fait de leur mariage reviendrait à nier que l'on doit ici se prononcer sur l'égalité réelle plutôt que sur l'égalité formelle. C'est d'ailleurs l'approche qui a été retenue par la CACB dans McIvor[42].
[169] La discrimination constatée quant aux conditions actuelles d'inscription et quant au droit de transmettre le statut ne peut toutefois exister que dans les cas où, comme Susan Yantha, la fille illégitime d'un Indien et d'une non-Indienne est née entre le 4 septembre 1951 et le 16 avril 1985 inclusivement. En effet, avant le 4 septembre 1951, les filles illégitimes d'un père Indien possédaient un statut à la naissance, tout comme cela a été le cas à compter du 17 avril 1985.
[170] Tel que l'illustre le tableau ci-haut, la Loi de 2010 n'a aucunement remédié à la situation discriminatoire constatée.
[171] Le Tribunal est d'avis que les alinéas 6(1)a), c) et f) et le paragraphe 6(2) de la Loi portent atteinte au droit à l'égalité consacré par la Charte canadienne:
1. De Susan Yantha en permettant que:
i) certains enfants illégitimes de sexe masculin d'un Indien avec une non-Indienne puissent transmettre un statut 6(1) à leurs enfants avec une non-Indienne (ayant acquis le statut d'Indienne par mariage),
ii) et ce, au-delà des 21 ans de ceux-ci ou, autrement dit, à vie,
alors que la pareille ne lui est pas permise, étant une enfant illégitime de sexe féminin née entre le 4 septembre 1951 et le 16 avril 1985 inclusivement;
2. De Tammy Yantha, en accordant un statut équivalant à celui du paragraphe 6(1) à certaines personnes:
i) qui ont seulement un parent Indien (autre qu'une femme non-Indienne ayant acquis le statut par mariage),
ii) ce parent Indien étant né hors mariage d'un père Indien et d'une mère non-Indienne entre le 4 septembre 1951 et le 16 avril 1985 inclusivement,
si leur parent Indien né hors mariage est un homme mais non si ce parent Indien né hors mariage est une femme née entre le 4 septembre 1951 et le 16 avril 1985 inclusivement.
[172] Une autre façon d'exprimer la discrimination identifiée par le Tribunal est de constater que l'un des moyens par lequel le législateur aurait pu assurer un traitement égal à toutes les filles illégitimes de père Indien par rapport au groupe comparateur, aurait été de donner un statut équivalent à celui du paragraphe 6(1) à toutes les personnes dont la mère est née hors mariage d'un Indien et d'une non-Indienne entre les dates ci-haut mentionnées, et dont le père est non-Indien. Accorder le statut 6(1) seulement à la fille illégitime serait en effet insuffisant puisque cela n'assurerait pas un statut équivalent à celui du paragraphe 6(1) aux personnes dans la situation de Tammy, ce qui est requis aux fins du droit à l'égalité.
[173] Tenant pour acquis que le bénéfice d'avoir le statut 6(1) plutôt que 6(2) a pour seul impact concret la plus grande possibilité de transmettre un statut à son enfant, accorder le statut 6(1) directement à Tammy suffirait à éliminer l'effet discriminatoire à l'endroit de sa mère Susan. Malgré son statut 6(2), cette enfant illégitime d'un Indien et d'une non-Indienne, par l'effet d'une disposition correctrice à cet effet, transmettrait de facto un statut 6(1) à ses enfants avec un non-Indien et donc, au moins un statut 6(2) à ses petits-enfants.
5. La discrimination identifiée est-elle justifiée?
[174] L'article 1 de la Charte canadienne établit les limites à l'intérieur desquelles le législateur peut restreindre les droits et libertés qu'elle garantit:
« 1. La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique. »
[175] Le PGC a le fardeau de justifier l'atteinte aux droits que reconnaît le paragraphe 15(1) aux demandeurs. Il doit d'abord démontrer que l'objet de la disposition contestée est urgent et réel et que les moyens choisis sont proportionnels à cet objet. Une disposition attentatoire est proportionnée à son objet si:
· les moyens adoptés sont rationnellement liés à cet objet;
· elle porte atteinte de façon minimale au droit en cause;
· il y a proportionnalité entre ses effets préjudiciables et ses effets bénéfiques.
[176] C'est en essence, le test établi dans R. c. Oakes[43], et appliqué dans McIvor. Dans le cadre de l'analyse de la proportionnalité, les tribunaux doivent faire preuve d'une certaine déférence à l'endroit du législateur, la proportionnalité ne nécessitant pas la perfection mais seulement que les limites apportées aux droits et libertés fondamentaux soient raisonnables. Aussi, lorsque plusieurs solutions sont possibles, une mesure réglementaire complexe commande une grande déférence[44].
[177] L'atteinte aux droits des demandeurs est prescrite par une règle de droit, soit l'article 6 de la Loi.
5.1 L'objectif urgent et réel
[178] La CACB a tranché dans McIvor que l'objectif de préserver les droits acquis des personnes en vertu des dispositions législatives applicables avant l'entrée en vigueur de la Loi de 1985 est un objectif urgent et réel. Voici comment la CACB s'exprime à ce sujet tout en faisant référence aux 5 objectifs que le législateur s'était lui-même fixés:
« [123] I have already quoted from the speech of the Minister of Indian Affairs and Northern Development in the House of Commons on moving second reading of the legislation. He set out five objectives, or principles, for the legislation:
(1) Removal of sex discrimination from the Indian Act.
(2) Restoration of Indian status and band membership to those who lost such status as a result of discrimination in the former legislation.
(3) Removal of any provisions conferring or removing Indian status as a result of marriage.
(4) Preservation of all rights acquired by persons under the former legislation.
(5) Conferral on Indian bands of the right to determine their own membership.
[124] The extensive legislative history presented in this case clearly establishes that these were, indeed, the objectives of the 1985 legislation. It cannot be seriously suggested that the government acted other than in good faith in enacting legislation in pursuit of these objectives.
[125] It is the fourth of the listed objectives, i.e., preservation of existing rights, which is the most important for the purposes of the s. 1 analysis in this case.
[126] I am of the view that the objective of preserving the rights of people who acquired Indian status and band membership under pre-1985 legislation is properly considered to be pressing and substantial. The law generally places significant value on protecting vested rights. This is particularly important in situations where people have made life choices and planned their futures in reliance on their legal status.
[127] In enacting new legislation in 1985, the government cannot, in my view, be criticised for embracing the principle that those who had Indian status under the previous legislative regime ought to be able to retain the benefits of such status going forward. Indeed, such a principle was necessary in order to avoid the disruption and hardship to individuals that would have resulted from depriving them of Indian status.
[128] Because the legislation in this case is criticized as being under-inclusive, however, it is necessary to consider whether the government had a proper objective in refusing to grant Indian status under s. 6(1) to persons in the position of Mr. Grismer. In other words, was there a pressing and substantial objective that was satisfied by preserving the status of the comparator group, while not extending that status to the group to which Mr. Grismer belongs?
[129] In my view, there was such an objective, though the objective is apparent only when one examines the broader provisions and goals of the regime put in place in 1985. The 1985 legislation was passed only after years of consultation and discussion. The legislation resulted in a significant increase in the number of people entitled to Indian status in Canada. There were widespread concerns that the influx might overwhelm the resources available to bands, and that it might serve to dilute the cultural integrity of existing First Nations groups. The goal of the legislation, therefore, was not to expand the right to Indian status per se, but rather to create a new, non-discriminatory regime which recognized the importance of Indian ancestry to Indian status.
[130] In fashioning the legislation, the government decided that having a single Indian grandparent should not be sufficient to accord Indian status to an individual. This was in keeping with the views expressed by a number of aboriginal groups. It was also in keeping with the existing legislative regime, which included the Double Mother Rule.
[131] It is in this context that we must examine the transitional provisions of the 1985 legislation. It would have been quite anomalous for the legislation to extend Indian status to Mr. Grismer’s children. They did not qualify for status under the old regime, nor would people in their situation (i.e., having only a single Indian grandparent) have status in the future under the new regime.
[132] It is true that one group of persons who have only a single Indian grandparent are entitled to status under the 1985 legislation. That group is comprised of persons who had status prior to April 17, 1985. That anomaly is (subject to what I will say later about the Double Mother Rule) justified by the governmental objective of preserving vested rights. To extend that anomaly to Mr. Grismer would give him equality with the existing anomalous group, but only at the expense of creating yet more anomalies in the legislation.
[133] Given that there is a clear pressing and substantial objective in preserving the status of those who had Indian status prior to 1985, and given that it would be anomalous and not in keeping with the post-1985 regime to extend status to people in Mr. Grismer’s situation, I am of the view that the first part of the s. 1 test is satisfied in this case. The legislative regime is premised on a pressing and substantial governmental objective.»[45]
(les soulignements sont de la soussignée).
[179] La preuve produite au dossier en regard de cette question, du côté du PGC, est essentiellement celle qui était produite au dossier de la CACB dans McIvor. Sur la question de l'objectif poursuivi par la Loi de 1985, la preuve en demande n'ajoute rien de suffisamment différent pour que le Tribunal ait la latitude de reconsidérer le raisonnement de la CACB sur la question.
[180] Avec beaucoup d'égards, le Tribunal a toutefois des réserves en regard de l'analyse de la CACB quant à l'existence d'un objectif urgent et réel justifiant le refus d'accorder un statut identique à celui des Indiens bénéficiant de droits acquis aux groupes historiquement discriminés dont les caractéristiques personnelles pertinentes à l'octroi dudit statut sont les mêmes, hormis la caractéristique liée à un motif de discrimination prohibé. Voici pourquoi.
[181] Les considérations particulières relatives aux droits acquis, soit les conséquences d'ordre pratique qui découleraient de leur non-respect dont fait état la CACB sont indéniables. La question de savoir pourquoi l'égalité de traitement n'a pas été accordée aux personnes Indiennes et à leurs descendants, s'ils possèdent les mêmes caractéristiques que celles bénéficiant de ces droits acquis sur le plan des ancêtres Indiens, pose cependant problème.
[182] D'abord, un tel refus est contraire à l'objectif premier identifié par le législateur lui-même, soit l'éradication de toute discrimination dans la Loi, et n'est pas nécessaire aux fins d'atteindre l'objectif de maintien des droits acquis. L'objectif d'éradiquer toute disposition conférant ou retirant le statut d'Indien en raison d'un mariage n'est pas en cause. Ni les demandeurs dans McIvor, ni les demandeurs en l'espèce, ne soutiennent que cet objectif ne serait pas valable ou ne demandent à ce que leurs conjoints reçoivent un statut en raison de leur mariage avec eux. Leurs demandes se limitent à eux-mêmes en lien avec leur capacité d'obtenir un statut et d'en transmettre un à leurs descendants. De toute façon, sur le plan de l'égalité réelle et de la justification, cette question, si jamais elle se posait, ne recevrait pas nécessairement le même traitement que les demandes faites par les Indiennes et leurs descendants.
[183] Par ailleurs, en référant à un objectif que le législateur n'avait pas identifié lui-même et qui ne deviendrait apparent qu'en examinant plus largement les dispositions et objectifs de la Loi de 1985, la CACB a exempté le PGC de produire une véritable preuve de justification, tenant pour prouvées, au paragraphe 129 de sa décision reproduit plus haut, des « inquiétudes » exprimées par des groupes intéressés.
[184] Ainsi, les inquiétudes de certains quant à la dilution de l'identité culturelle des Premières Nations ne pouvaient être considérées, dans le contexte de la justification d'une atteinte au droit à l'égalité, que sous peine de donner un poids à des stéréotypes. En effet, la juge de première instance fait plutôt état d'une preuve allant dans le sens contraire dans sa décision[46] et la CACB ne pointe aucune erreur de sa part sur la question ni ne réfère à une preuve spécifique autre que celle des inquiétudes émanant de groupes intéressés lors de consultations.
[185] Plus, la Cour suprême enseigne dans l'affaire Corbière c. Canada (Ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien[47], qu'il serait incompatible avec une approche visant à atteindre une égalité réelle de tenir compte de stéréotypes permettant de présumer que les personnes qui ont précisément été éloignées des Premières nations en raison de la discrimination dont elles ont été victimes, dans cette affaire des membres hors réserve de bandes indiennes dont des personnes ayant dû quitter la réserve en raison de discrimination, ne seraient pas intéressées à participer concrètement à la vie de leur bande ou à préserver leur identité culturelle:
« [18] Compte tenu de tout ce qui précède, il est clair que la privation du droit de vote découlant du par. 77(1) est discriminatoire. Cette privation refuse aux membres hors réserve des bandes indiennes, sur le fondement arbitraire d’une caractéristique personnelle, le droit de participer pleinement à l’administration de leur bande respective. Elle touche à l’identité culturelle des Autochtones hors réserve par l’effet de stéréotypes. Elle présume que les Autochtones hors réserve ne sont pas intéressés à participer concrètement à la vie de leur bande ou à préserver leur identité culturelle, et qu’ils ne sont donc pas des membres de leur bande aussi méritants que les autres. L’effet, comme le message, est clair: les membres hors réserve des bandes indiennes ne sont pas aussi méritants que les membres qui vivent dans les réserves. Cette situation soulève l’application de l’aspect dignité de l’analyse fondée sur l’art. 15 et entraîne le déni du droit à l’égalité réelle. »
(Les soulignements sont de la soussignée.)
[186] De même, les inquiétudes exprimées en lien avec les ressources sont un élément problématique, surtout si elles sont utilisées comme pouvant justifier à elles-seules que des mesures appropriées ne soient pas prises afin de donner accès à l'égalité à des personnes victimes de discrimination fondée sur un motif prohibé. Même dûment prouvé, un contexte de restrictions budgétaires ne permettra pas à lui seul de justifier une atteinte et pourrait bien rencontrer le scepticisme des tribunaux[48]. La CACB ne pouvait référer à ces inquiétudes comme élément lui permettant de conclure qu'il y avait un objectif urgent et réel justifiant de refuser des avantages égaux à un groupe historiquement victime de discrimination, et ce, même s'il était évident qu'il y allait y avoir des coûts additionnels du fait de leur octroyer ces avantages[49]. L'égalité impliquera souvent, lorsqu'un avantage a été refusé sur la base d'un motif prohibé, des coûts additionnels pour la société. Le fait que l'on invoque qu'il n'y a soudainement plus suffisamment de ressources pour tous lorsqu'il faut se plier aux exigences du droit à l'égalité peut s'avérer un autre affront fait à celui-ci.
[187] Il est vrai que si le choix législatif avait été fait d'étendre à Grismer le droit à un statut 6(1)a), comme c'était le cas pour ceux qui avaient le droit à l'inscription ou étaient déjà inscrits, cela aurait eu pour effet de créer une nouvelle anomalie en regard de la partie neutre du régime mis en place et, autrement dit, ne permettrait pas de préserver le plus possible l'intégrité de cette partie du nouveau régime.
[188] Cependant, faute d'accepter de créer cette nouvelle anomalie, afin d'amener le groupe des personnes qui continuent de subir de la discrimination lorsqu'elles font une demande d'inscription après le 16 avril 1985 au même niveau que celui du groupe avantagé, la discrimination se perpétue et fait du nouveau régime un régime en partie discriminatoire. L'« anomalie » favorisant les personnes bénéficiant de droits acquis fait partie intégrante du nouveau régime. Le maintien de l'intégrité d'un tel régime ne peut être considéré comme un objectif servant à justifier la discrimination.
[189] Par ailleurs, si une « anomalie » additionnelle s'avère nécessaire afin d'éradiquer la discrimination, l'un des objectifs de la Loi de 1985, elle se justifie au moins tout autant que l'anomalie qui découle de l'objectif de maintien des droits acquis.
[190] Pour tous ces motifs, et avec les plus grands égards, le Tribunal a des réserves importantes à l'endroit du raisonnement de la CACB quant à l'existence d'un objectif urgent et réel justifiant le refus de traiter les personnes dans la situation de McIvor, Grismer et leurs descendants en toute égalité avec les personnes bénéficiant de droits acquis.
[191] Cependant, le raisonnement de la CACB dans ce cas très similaire à celui de Descheneaux a force de précédent émanant d'un tribunal supérieur. Malgré ses réserves, le Tribunal se considère lié par cette appréciation et y donne suite dans la présente décision.
[192] Il faut réitérer toutefois que le remède accordé aux demandeurs n'aurait pas été différent si le Tribunal ne s'était pas considéré lié par McIvor.
[193] Dans le cas des demanderesses Yantha, leur donner un statut équivalent à 6(1) aurait également pour effet de créer de nouvelles anomalies par rapport à la partie neutre du nouveau régime en place. Le raisonnement de la CACB dans McIvor est tout aussi applicable en ce qui les concerne et lie également le Tribunal quant à celles-ci.
[194] Mais ici, comme dans McIvor, la violation alléguée ne découle pas uniquement de droits acquis mais aussi des droits additionnels accordés aux personnes à qui la règle de la double-mère s'appliquait. Le législateur, pour ce groupe, a clairement fait fi de ses objectifs visant notamment à préserver les droits acquis, mais aussi à éliminer la discrimination. Il a de plus restauré le statut des victimes de la règle de la double-mère alors que celles-ci n'avaient pas été victimes de discrimination fondée sur le sexe mais avaient bénéficié d'un traitement avantageux en raison de la valeur plus importante accordée à l'identité Indienne transmise par les Indiens de sexe masculin.
[195] En leur accordant ce traitement, le législateur n'a pas non plus préservé l'intégrité du nouveau régime neutre mis en place. Comme l'indique la CACB dans McIvor, le traitement accordé à ce groupe est également une anomalie par rapport au nouveau régime. Cette anomalie est encore plus importante si on considère le traitement accordé au groupe comparateur particulier retenu en l'espèce, soit les personnes auxquelles la règle de la double-mère s'appliquait avant 1985, lorsque les parents des enfants qui auraient été exclus à 21 ans se sont mariés avant 1985.
[196] C'est à l'étape de l'atteinte minimale que McIvor a traité de la question. Elle aurait tout aussi bien pu être traitée à l'étape de l'objectif urgent et réel. Non seulement n'y a-t-il pas eu démonstration d'un tel objectif justifiant d'accorder un droit plus étendu à ce groupe tout en le refusant aux personnes dans la situation des demandeurs, mais ce choix législatif est en contradiction complète avec les objectifs de la Loi de 1985. Ces objectifs, en conséquence, ne pouvaient aucunement servir afin de justifier la discrimination découlant des droits additionnels accordés à ce groupe en 1985.
5.2 La proportionnalité des moyens choisis
Le lien rationnel entre les moyens choisis et l'objectif urgent et réel
[197] Tenant pour acquis que les objectifs identifiés sont urgents et réels, mais en lien avec la préservation des droits acquis seulement, il existe un lien rationnel entre la mesure, avoir accordé un statut 6(1) aux personnes inscrites ou y ayant droit tout en refusant d'accorder ce même statut aux personnes dans la position des demandeurs, et ces objectifs, préserver les droits acquis en vertu de l'ancienne législation et préserver le plus possible l'intégrité du régime neutre mis en place. Le lien causal fondé sur la raison ou la logique entre la violation et l'avantage recherché est établi. C'est ce qu'avait conclu la CACB dans McIvor, tout en ayant fait une réserve concernant l'existence même d'un objectif urgent et réel quant aux avantages additionnels conférés au groupe auquel la règle de la double-mère s'appliquait[50].
[198] Faute d'un objectif urgent et réel justifiant d'octroyer des bénéfices additionnels au groupe auquel la règle de la double-mère s'appliquait tout en les refusant aux groupes comparables, la Loi de 1985 échoue aussi à cette partie du test.
L'atteinte minimale
[199] Le PGC aura rencontré son fardeau quant à l'atteinte minimale s'il démontre l'absence de moyens moins attentatoires d'atteindre l'objectif de façon réelle et substantielle. Cette étape de l'analyse « vise à garantir que la privation de droits reconnus par la Charte se limite à ce qui est raisonnablement nécessaire pour atteindre l'objectif de l'État »[51]
[200] La CACB a considéré que, même en accordant de la déférence au législateur devant choisir un compromis entre divers intérêts, la Loi de 1985 ne pouvait être considérée comme portant minimalement atteinte aux droits de Grismer et de son groupe en ce qui concerne les droits additionnels qu'elle confère au groupe auquel la règle de la double-mère s'appliquait. La CACB s'exprime comme suit sur cette question:
« [140] The 1985 legislation put Mr. Grismer and his group at a further disadvantage vis-à-vis the comparator group than they were at prior to its enactment. Had the 1985 legislation merely preserved the right of children of persons in the comparator group to Indian status until the age of 21, the government could rely on preservation of vested rights as being neatly tailored to the pressing and substantial objective under s. 1. Such legislation would have minimally impaired Mr. Grismer’s right to equality. Instead, the 1985 legislation appears to have given a further advantage to an already advantaged group. I am unable to accept that this result is in keeping with the minimal impairment requirement of the Oakes test.
[141] The defendants have not presented evidence or argument attempting to justify the 1985 legislation on any basis other than that it preserved existing rights. When pressed, they acknowledge that the situation of persons in what I have found to be the appropriate comparator group was ameliorated by the 1985 legislation. They say, however, that there is an important difference between the comparator group and Mr. Grismer’s group. They note that members of the comparator group have two Indian parents - a father who is of Indian heritage, and a mother who became Indian by virtue of marriage. In contrast, Mr. Grismer has only one parent of Indian heritage - his mother.
[142] I find this distinction unconvincing. It is based on the very sort of discrimination that Mr. Grismer complains of. Further, notwithstanding the Indian status of the comparator group’s mothers, the pre-1985 legislation specifically limited the member’s ability to transmit status to their children, through the Double Mother Rule.
[143] I find that the 1985 legislation does not minimally impair the equality rights of Mr. Grismer, because it served to widen the existing inequality between his group and members of the comparator group.»[52]
[201] Ce même raisonnement, avec lequel le Tribunal est cette fois entièrement d'accord en plus d'être lié par celui-ci, s'applique à la situation des trois demandeurs.
[202] Le PGC a bien évidemment tenté de convaincre le Tribunal de se dissocier de la décision de la CACB en lien avec l'atteinte minimale.
[203] Il a plaidé, sur la base en grande partie de la même preuve que celle présentée à la CACB dans McIvor et produite dans le présent dossier, qu'il n'aurait pas été équitable ou raisonnable de refuser de donner davantage aux personnes visées par la règle de la double-mère que ce qui aurait pu relever de la préservation de droits acquis sous l'ancienne législation. Ainsi, il soutient dans son argumentation écrite qu'il n'aurait pas été raisonnable de perpétuer une politique qui enlevait le droit à l'inscription à l'âge de 21 ans au nom de la préservation des droits acquis et que cela aurait été contraire à l'orientation générale de la Loi de 1985. Voici ce qu'il argumente précisément sur cette question:
«106. D'une part, nous soumettons que la règle du DMR résultait en un contexte unique, dans lequel l'application stricte du principe de la «préservation des droits acquis», en 1985, n'aurait pas été raisonnable pour les personnes directement touchées. On ne peut reprocher au gouvernement d'avoir refusé, en 1985, de perpétuer une politique qui enlevait le droit à l'inscription des personnes à l'âge de 21 ans. Cela aurait été contraire à l'orientation générale du projet de loi C-31.
107. En d'autres termes, enlever le droit à l'inscription d'une personne ayant atteint l'âge de 21 ans, après qu'elle ait passé toute sa vie comme un Indien inscrit, n'est pas quelque chose que le gouvernement aurait raisonnablement pu faire, au nom du respect strict de la préservation des droits acquis. Enlever le droit à l'inscription d'une personne devenue adulte, lui retirant un droit sur lequel elle a compté en grandissant, est problématique en soi.
108. Si nous appliquons les motifs de la BCCA (sur le critère de l'atteinte minimale) aux faits du présent dossier, cela reviendrait à rendre la possibilité pour le gouvernement de justifier la ligne tracée sur le rétablissement au droit à l'inscription (en l'occurrence ne pas aller aussi loin que de prévoir l'inscription des arrière-petits-enfants des femmes qui se sont mariées) conditionnelle à la continuité d'une pratique jugée insoutenable en 1985, soit la règle DMR.» [53]
(Les soulignements sont de la soussignée.)
[204] Des arguments proches parents de ceux-ci avaient été soumis à la CACB dans le dossier McIvor[54] et n'ont pas été retenus. Le Tribunal est également d'avis qu'il n'y a pas lieu de les retenir en l'espèce.
[205] La première remarque à faire est que l'orientation générale de la Loi de 1985 était de mettre fin à la discrimination fondée sur le sexe, pas de l'accentuer, et de restaurer le statut de personnes ayant été victimes de discrimination, pas d'améliorer le sort de groupes avantagés n'ayant subi aucune discrimination. L'argument du PGC selon lequel il aurait été contraire à l'orientation générale de la Loi de 1985 de ne pas reconnaître davantage de droits aux personnes auxquelles la règle de la double-mère s'appliquait est donc sans fondement.
[206] La seconde chose à préciser a trait à l'ampleur des droits additionnels conférés par la Loi de 1985 à ce groupe déjà mieux traité que les groupes auxquels appartiennent les demandeurs. Ces droits additionnels avantagent non seulement les personnes qui étaient susceptibles d'être exclues par la règle de la double-mère ou déjà exclues en vertu de celle-ci, mais aussi leurs pères Indiens mariés à leurs mères non-Indiennes (avant leurs mariages) avant que la Loi de 1985 entre en vigueur. Ceux-ci peuvent en effet, en raison de cet avantage additionnel, transmettre leur statut tant à leurs enfants nés avant que la Loi de 1985 soit en vigueur qu'à ceux nés par la suite, ce statut leur étant transmis pour la vie, alors que la règle de la double-mère les limitait à transmettre le statut à leurs enfants pour les 21 premières années de leurs vies. Les grands-parents en tirent également bénéfice, ayant une possibilité accrue de transmettre leur statut à leurs petits-enfants malgré que ceux-ci ont une mère et une grand-mère non-Indiennes (avant leurs mariages).
[207] Troisièmement, l'argument fait par le PGC qu'il fallait aller au-delà de la préservation des droits conférés sous l'ancienne loi revient à considérer un souci d'équité à l'endroit d'un groupe déjà avantagé comme un objectif urgent et réel justifiant d'accentuer la discrimination fondée sur le sexe à l'endroit de personnes appartenant à des groupes historiquement désavantagés. Un tel résultat est inacceptable en droit.
[208] Il est très vrai, comme l'ont habilement soulevé les procureurs du PGC, qu'il y a quelque chose d'odieux au fait de retirer le statut d'Indien à une personne à l'âge de 21 ans, vu le caractère intrinsèquement lié à l'identité de ce statut. Il faut certes y être sensible et c'est tout à l'honneur du législateur d'y avoir été sensible en octroyant aux personnes visées par la règle de la double-mère un statut perdurant au-delà de leur droit acquis d'en bénéficier jusqu'à 21 ans.
[209] Cependant, il n'est pas moins odieux de refuser totalement un tel statut, intimement lié à l'identité, à une personne se trouvant dans la même situation sur le plan des ancêtres Indiens que d'autres qui en bénéficient, et ce, pour un motif discriminatoire. Or, cette discrimination a été ignorée par le législateur dans la Loi de 1985, et cette atteinte au droit fondamental à l'égalité a été jugée justifiée par la CACB sur la base, très précisément, du maintien des droits acquis.
[210] La préservation de l'intégrité du nouveau régime neutre a aussi été évoquée par la CACB comme justifiant l'atteinte, mais cette intégrité n'est pas non plus préservée en reconnaissant les droits acquis et encore moins par l'octroi d'un nouvel avantage supérieur à ceux-ci.
[211] Faire le pas additionnel de juger justifiée la discrimination découlant de l'octroi de droits au-delà des droits acquis au groupe déjà avantagé des personnes auxquelles la règle de la double-mère s'appliquait reviendrait à reconnaître que le législateur puisse impunément doubler ses torts d'un affront ou, selon l'expression anglaise, « add insult to injury ».
[212] Bref, dans la mesure où le législateur voulait faire preuve d'équité à l'endroit de ces personnes en leur accordant des droits additionnels dans la Loi de 1985, il devait le faire en respectant le droit à l'égalité, vu l'entrée en vigueur de la Charte canadienne.
[213] Il résulte de ce qui précède que la différence de traitement dont les demandeurs se plaignent n'est pas limitée à ce qui est raisonnablement nécessaire pour atteindre les objectifs de la Loi, ce qui aurait été le cas si seuls les droits acquis avaient été préservés, et ce, tel que l'a décidé la CACB dans McIvor. Cette option moins attentatoire aurait permis, toujours selon la CACB, d'atteindre les objectifs urgents et réels identifiés par le législateur.
La proportionnalité entre les effets préjudiciables et les effets bénéfiques
[214] Vu ce qui précède, il n'est pas nécessaire de trancher la question de la proportionnalité des effets préjudiciables et des effets bénéfiques des mesures en cause. La CACB s'est toutefois prononcée sur la question. Le Tribunal s'abstient de tout commentaire quant à cette partie de la décision McIvor, n'en retenant que le fait que cette analyse ne modifiait pas la conclusion selon laquelle le PGC n'avait pas réussi à démontrer que la discrimination constatée en fonction des personnes auxquelles la règle de la double-mère s'appliquait était justifiée en vertu de l'article 1 de la Charte canadienne.
5.3 La Loi de 2010
[215] La preuve révèle par ailleurs que la Loi de 2010 ne visait à apporter solution à la discrimination constatée par la CACB que dans le cas des personnes dans une situation rigoureusement identique à celle de Grismer en les amenant au même niveau que le groupe visé par la règle de la double-mère lorsque les parents des enfants qui auraient été exclus à 21 ans suivant cette règle se sont mariés après 1985, comme c'était le cas de Grismer. Elle n'a pas corrigé la situation des demandeurs lorsque comparée à celle du groupe comparateur retenu en l'espèce, soit le même, sauf que les parents des enfants qui auraient été exclus à 21 ans se sont mariés avant 1985.
[216] La Loi de 2010 n'a donc pas entièrement corrigé la situation de discrimination augmentée résultant de la Loi de 1985. Son objectif de correction limité aux personnes se trouvant dans la situation de Grismer ne justifie pas davantage les situations discriminatoires accentuées causées par la Loi de 1985, lesquelles persistent à l'endroit des demandeurs même à la suite de la Loi de 2010.
5.4 Conclusion sur la justification
[217] Le PGC n'a pas réussi à s'acquitter de son fardeau de démontrer le caractère minimal de l'atteinte, ou l'absence de moyens moins attentatoires ou même, plus fondamentalement, de démontrer l'existence d'un objectif urgent et réel de nature à justifier le traitement discriminatoire accentué dont souffrent les demandeurs depuis que la Loi de 1985 est en vigueur.
[218] Vu le constat d'une atteinte non-justifiée au droit à l'égalité des demandeurs en vertu de l'article 15 de la Charte canadienne, il n'est pas nécessaire d'analyser les arguments des demandeurs quant aux autres sources potentielles d'un droit à l'égalité[55].
6. Quel est le remède approprié?
[219] Les alinéas 6(1)a), c) et f) et le paragraphe 6(2) de la Loi violent le paragraphe 15(1) de la Charte canadienne et le PGC n'a pas démontré que cette discrimination était justifiée suivant l'article 1.
[220] Le Tribunal n'est pas lié par le libellé des conclusions en jugement déclaratoire de la requête des demandeurs en autant que celles qui seront rendues ne s'éloignent pas de la question en litige. Selon la jurisprudence, de telles conclusions peuvent même être complétées pour apporter une solution complète au débat judiciaire[56].
[221] En l'espèce, le paragraphe 3 de la requête demande spécifiquement à ce que le Tribunal accorde aux demandeurs les « remèdes appropriés » et l'une des conclusions demande à ce qu'il rende toute autre ordonnance jugée équitable. De plus, lors des plaidoiries, il a été explicitement plaidé par le PGC qu'une déclaration selon laquelle les dispositions en cause seraient inconstitutionnelles devrait faire l'objet d'une suspension.
[222] Cependant, pour les motifs qui suivent, le Tribunal considère qu'il ne serait pas approprié d'imposer des solutions aussi précises que celles suggérées par les demandeurs. Dans leurs conclusions, ceux-ci demandent au Tribunal d'imposer l'adoption de nouvelles dispositions permettant aux demandeurs de s'inscrire au Registre.
[223] Nous sommes en 2015. La Loi de 1985 dont découle la discrimination est en vigueur depuis un peu plus de 30 ans. Le constat général de discrimination fait dans la décision de 2009 rendue par la CACB dans McIvor aurait pu permettre au législateur de corriger plus largement que ce qu'accomplissent les mesures prises dans la Loi de 2010. La discrimination dont les demandeurs sont victimes découle de la même source que celle déjà identifiée dans cette affaire.
[224] Même s'il peut être tentant, compte tenu des faits particuliers de l'espèce, d'imposer immédiatement un remède, le Tribunal considère qu'il y a plutôt lieu de donner, à nouveau, l'opportunité au législateur de jouer son rôle. Les constats suivants, faits par la CACB en 2009 sur la question du remède, voient cependant leur poids augmenté du fait des années additionnelles écoulées depuis ce jugement et du fait de l'inclusion d'un nouveau groupe dans la Loi de 2010:
« [155] The legislation would have been constitutional if it had preserved only the status that such children [les enfants visés par la règle de la double-mère] had before 1985. By according them enhanced status, it created new equalities, and violated the Charter.
[156] There are two obvious ways in which the violation s. 15 might have been avoided. The 1985 legislation could have given status under an equivalent of s. 6(1) to people in Mr. Grismer's situation [incluant les enfants de celui-ci]. Equally, it could have preserved only the existing rights of those in the comparator group. While these are the obvious ways of avoiding a violation of s. 15, other, more complicated solutions might also have been found.
[158] Contextual factors, including the reliance that people have placed on the existing state of the law, may affect the options currently available to the Federal government in remedying the Charter violation. It may be that some of the options that were available in 1985 are no longer practical. On the other hand, options that would not have been appropriate in 1985 may be justifiable today, under s. 1 of the Charter, in order to avoid draconian effects.
[159] I cannot say which legislative choice would have been made in 1985 had the violation of s. 15 been recognized. I am even less certain of the options that the government might choose today to make the legislation constitutional. For that reason, I am reluctant to read new entitlements into s. 6 of the Indian Act. I am even more reluctant to read down the entitlement of the comparator group, especially given that it is not represented before this Court.»
(Les soulignements sont du Tribunal.)
[225] Devant ces constats, la CACB a choisi de suspendre la déclaration d'invalidité pour une période d'un an comme la Cour suprême invite à le faire lorsqu'une loi est limitative quant aux bénéfices accordés (« underinclusiveness ») afin de permettre au législateur de déterminer s'il y a lieu de les étendre ou de les annuler[57]. Ce délai a cependant dû être prolongé à deux reprises.
[226] Même si le Tribunal considère peu probable que l'option d'annuler les avantages conférés aux personnes à qui la règle de la double-mère s'applique soit retenue, le législateur doit quand même avoir une marge de manœuvre suffisante afin d'élaborer le détail des dispositions pouvant remédier à la discrimination.
[227] Il est en effet mieux en mesure que le Tribunal de déterminer le détail de celles-ci et leur cohérence avec le nouveau régime en place, surtout considérant le caractère technique et la complexité de la Loi. Par exemple, l'arrimage entre ce qu'énonce le présent jugement et les articles 8 et suivants de la Loi, relatifs aux listes de bande et aux règles d'appartenance pouvant être fixées par une bande ayant assumé la responsabilité de sa liste devra être fait, comme cela a été le cas lors de l'ajout de l'alinéa 6(1)c.1) en 2010.
[228] Ainsi, même si le Tribunal avait considéré approprié d'encadrer les mesures législatives à prendre, il se serait bien gardé d'imposer un libellé précis, se contentant plutôt d'envisager la question sous l'angle du résultat que le législateur devrait chercher à accomplir afin de respecter les exigences du droit fondamental à l'égalité. Une telle conclusion, cohérente avec les motifs du présent jugement, aurait pu se lire comme suit:
DÉCLARE que les alinéas 6(1) a), c) et f) et le paragraphe 6(2) de la Loi sur les Indiens portent atteinte de manière injustifiée à l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés et sont inopérants dans la mesure où:
a) ils ne permettent pas aux personnes appartenant aux groupes suivants:
i) les personnes dont un seul grand-parent est une Indienne, celle-ci ayant perdu son statut par mariage, et dont les parents ne sont pas tous les deux Indiens, le demandeur Stéphane Descheneaux étant l'une des personnes appartenant à ce groupe, et,
ii) les personnes dont les parents ne sont pas tous les deux Indiens et dont la mère est une fille née hors mariage dont le père est Indien et la mère non-Indienne, cette fille étant née sans statut (soit entre le 4 septembre 1951 et le 16 avril 1985 inclusivement), la demanderesse Tammy Yantha étant l'une des personnes appartenant à ce groupe,
de s'inscrire au Registre des Indiens avec un statut d'Indien équivalent au paragraphe 6(1) ou permettant de transmettre un statut équivalent à celui du paragraphe 6(2) à leurs enfants dont l'autre parent est non-Indien;
b) tant qu'ils n'accordent pas l'équivalent d'un statut 6(1) aux personnes dans la situation de la demanderesse Tammy Yantha, ils ne permettent pas que les personnes appartenant au groupe suivant:
· les filles nées hors mariage dont le père est Indien et la mère non-Indienne, nées sans statut, soit pendant la période s'étendant du 4 septembre 1951 au 16 avril 1985 inclusivement, ayant un ou des enfants avec un non-Indien, la demanderesse Susan Yantha étant l'une des personnes appartenant à ce groupe,
puissent transmettre à leurs enfants avec un non-Indien un statut équivalent à celui du paragraphe 6(1) leur permettant de transmettre à leur tour un statut à leurs enfants dont l'autre parent est non-Indien.
[229] Mais même cette conclusion ne serait pas appropriée. Le législateur peut en effet choisir d'envisager d'autres avenues que celles que suggère le présent jugement, même si les options paraissent plutôt limitées. Il est de plus toujours possible aussi qu'il retienne des options encore plus inclusives que celles dictées par les impératifs du droit à l'égalité, pour des motifs d'équité ou autres. C'est d'ailleurs ce qu'il a fait en 1985 pour les personnes à qui la règle de la double-mère s'appliquait.
[230] Il va de soi également que la question des coûts qu'impliqueraient des dispositions plus inclusives est un élément parmi d'autres que le législateur peut considérer[58]. Certaines remarques ont cependant déjà été faites sur le scepticisme dont les tribunaux pourraient faire preuve devant une telle approche. De plus, la situation factuelle ayant perduré, tel que le souligne la CACB dans l'extrait ci-haut cité, et le législateur ayant déjà préféré étendre le bénéfice de 6(1) à un autre groupe en 2010 plutôt que de le retirer à certains, sa marge de manœuvre est probablement réduite. Sur cette question des coûts, il faudrait aussi considérer que la logique de l'article 6 de la Loi, en prévoyant un « second generation cut off », implique selon l'expert Stewart Clatworthy, qu'en ce qui concerne les bandes des demandeurs, aucun nouvel enfant n'aura droit d'être inscrit au Registre d'ici environ 100 ans dans l'état actuel des choses. S'il y a davantage de personnes inscrites sous 6(1), cela retarde quelque peu l'évolution mais, éventuellement, à cause de la nature du mécanisme prévu à l'article 6, il ne naîtra plus d'enfants ayant droit d'être inscrits au Registre[59]. Aucune preuve ne porte spécifiquement sur les autres bandes Indiennes, mais il faut comprendre que le même mécanisme est à l'oeuvre.
[231] Considérant ce qui précède, il ne serait pas non plus approprié pour le Tribunal de rendre des ordonnances octroyant directement un statut aux demandeurs. De plus, de telles décisions relèvent du Registraire.
[232] Le délai d'un an et demi pour décider des mesures à prendre paraît raisonnable, et ce, en tenant compte du contexte préélectoral ambiant et en considérant que ce n'est pas la première fois que le législateur est appelé à analyser la question et qu'il procède à des consultations à ce sujet. Il faut réitérer que la situation perdure depuis maintenant un peu plus de 30 ans sans qu'une solution complète y ait été apportée. Et le Tribunal fait abstraction des discussions relatives à la discrimination découlant de la Loi de 1951 lesquelles se sont déroulées bien avant que l'entrée en vigueur de la Charte canadienne soit en vue[60]. Le délai retenu tient compte du fait que les problématiques dont il s'agit ici ont été dénoncées depuis plusieurs années. Même si de nouvelles consultations devaient être tenues, il faudra qu'il y soit procédé rondement.
[233] Ce faisant, le Tribunal est bien conscient que les demandeurs et les autres personnes dans leur situation continueront d'être victimes de discrimination pendant la période de 18 mois accordée, à moins que le législateur agisse plus rapidement. C'est néanmoins le prix que comporte le respect du rôle fondamental du pouvoir législatif dans notre société, un rôle que le Tribunal ne saurait usurper.
CONCLUSION
[234] Le présent jugement vise à disposer du recours exercé par les demandeurs.
[235] Il n'exempte pas pour autant le législateur de prendre les mesures appropriées afin d'identifier et de régler toutes les autres situations discriminatoires pouvant découler de la problématique identifiée, fondées sur le sexe ou sur d'autres motifs prohibés, et ce, en conformité avec son obligation constitutionnelle de s'assurer que les lois respectent les droits consacrés à la Charte canadienne.
[236] Cette tâche du législateur est complexe et à la mesure de l'impact généralisé des lois qu'il adopte. Il doit tenir compte des effets d'une loi sur l'ensemble des situations auxquelles elle est susceptible de s'appliquer, et ce, notamment, à la lumière de rapports, d'études et de situations factuelles, discutés et mis de l'avant lors du processus d'adoption des lois de même qu'en considérant le droit applicable, incluant les principes énoncés dans les décisions judiciaires.
[237] Les juges n'étant saisis que d'un litige particulier et de ce qui est mis en preuve et plaidé devant eux, ils ne sont pas les mieux placés pour saisir toutes les implications des lois et tous leurs effets potentiellement discriminatoires.
[238] Le législateur, dans la Loi de 2010, a choisi de restreindre le remède apporté aux seules parties au litige dans McIvor et aux personnes dans une situation rigoureusement identique à la leur et n'a pas non plus cherché à identifier la pleine mesure du traitement avantageux accordé au groupe privilégié identifié dans cette affaire.
[239] Lorsque le législateur choisit d'omettre de considérer les implications plus larges des décisions judiciaires en restreignant la portée de celles-ci à leur strict minimum, une certaine abdication du pouvoir législatif aux mains du pouvoir judiciaire est susceptible de prendre place. Les détenteurs du pouvoir législatif se contenteraient alors d'attendre que les tribunaux se prononcent au cas par cas avant d'agir et que leurs décisions forcent progressivement la modification des lois afin que celles-ci soient, finalement, conformes à la Constitution.
[240] Du point de vue des citoyens canadiens, qui sont tous des justiciables potentiels, le manquement à cette obligation du législateur et l'abdication de pouvoir qui pourrait en résulter ne sont évidemment pas souhaitables.
[241] D'abord, cela les obligerait à faire valoir à grands frais leurs droits constitutionnels dans l'arène judiciaire dans de multiples cas très connexes plutôt que de bénéficier des effets plus larges d'une décision de principe et plutôt que de compter sur ceux et celles qui exercent le pouvoir législatif pour assurer le respect de leurs droits lors de l'adoption et de la révision de lois qui relèvent d'eux. Ensuite, les ressources judiciaires limitées, sollicitées à plusieurs reprises pour des litiges qu'un jugement précédant bien interprété aurait dû régler, sont ainsi dilapidées plutôt qu'utilisées de manière efficace, ce qui a des effets malheureux sur l'ensemble des justiciables.
[242] Il est évident qu'en raison du caractère technique de la Loi, de son évolution dans le temps, et de ses effets multi-générationnels, s'assurer qu'elle n'a pas d'effets discriminatoires injustifiés représente un défi important. Ce ne sont cependant pas là des motifs justifiant de ne pas tenter, une nouvelle fois, de le relever.
[243] Une lecture aussi stricte du présent jugement que celle qui a été faite de la décision de la CACB dans McIvor, n'est pas la voie que devrait emprunter le législateur. S'il souhaite jouer pleinement son rôle, plutôt que de laisser le champ libre aux litiges, il fera autrement cette fois-ci, tout en apportant rapidement des correctifs suffisamment larges pour remédier à la discrimination constatée en l'espèce. L'un n'exclut pas l'autre.
[244] Vu le droit constitutionnel à l'égalité des demandeurs, les alinéas 6(1)a), c) et f) et le paragraphe 6(2) de la Loi doivent être déclarés inopérants. La prise d'effet de cette conclusion sera cependant suspendue pour une période de 18 mois.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:
[245] DÉCLARE que les alinéas 6(1)a), c) et f) et le paragraphe 6(2) de la Loi sur les Indiens portent atteinte de manière injustifiée à l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés et sont inopérants;
[246] SUSPEND la prise d'effet de la conclusion précédente pour une période de 18 mois;
[247] AVEC DÉPENS, incluant les frais d'expert.
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__________________________________ CHANTAL MASSE, J.C.S. |
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Me David Schulze |
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Me Marie-Ève Dumont Dionne Schulze Me Mary Eberts |
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Procureurs des demandeurs et intervenants |
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Me Nancy Bonsaint Me Dah Yoon Min |
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Ministère de la justice Canada |
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Procureures du défendeur |
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Dates d’audience : |
Les 6, 7, 8, 12, 13, 14, 27, 28, 29 et 30 janvier 2015 et les 3, 4, 5 et 6 février 2015. Notes écrites additionnelles à la suite de l'audience reçues les 23 et 27 février 2015. |
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ANNEXE
Extraits législatifs les plus pertinents
1. Loi sur les Indiens, S.R.C. 1927, c.98 (extraits).
2. Loi sur les Indiens, S.C. 1951, c. 29 (extraits).
3. Loi modifiant la Loi sur les Indiens, S.C. 1956, c. 40, art. 3.
4. Loi modifiant la Loi sur les Indiens, S.C. 1985, c. 27, art. 4.
5. Loi favorisant l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens en donnant suite à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), L.C. 2010, c. 18.
6. Loi sur les Indiens, L.R.C. (1985), c. I-5, art. 6 (tel qu'en vigueur actuellement).
1. Loi sur les Indiens, S.R.C. 1927, c.98 (extraits):
«2. En la présente loi, à moins que le contexte ne s'y oppose, l'expression […] e) «Indien» signifie i) tout individu du sexe masculin et de sang indien réputé appartenir à une bande particulière, ii) tout enfant de cet individu, iii) toute femme qui est ou a été légalement mariée à cet individu; […]
12. Le surintendant général peut, en tout temps, refuser de reconnaître tout enfant illégitime comme membre de la bande, à moins que, du consentement de la bande dont est membre son père ou sa mère, il n'ait eu part, pendant une période de plus de deux ans, aux deniers distribués à cette bande.
13. Tout Indien qui a résidé pendant cinq ans consécutifs dans un pays étranger, sans le consentement par écrit du surintendant général ou de son agent, cesse de faire partie de la bande à laquelle il appartenait, et il ne peut faire de nouveau partie de cette même bande ni d'aucune autre bande, à moins que le consentement de cette bande, avec l'approbation du surintendant général ou de son agent, ne soit préalablement obtenu.
14. Toute femme indienne qui épouse une autre personne qu'un Indien, ou un Indien non soumis au régime d'un traité, cesse, à tous égards, d'être Indienne, au sens de la présente loi, sauf qu'elle a droit de participer également avec les membres de la bande à laquelle elle appartenait antérieurement, à la distribution annuelle ou semi-annuelle des annuités, intérêts et rentes de celle-ci; mais, avec l'assentiment du surintendant général, ce revenu peut, en tout temps, être converti en un rachat de dix ans.
15. Toute femme indienne qui épouse un Indien d'une autre bande, ou un Indien non soumis aux traités, cesse de faire partie de la bande à laquelle elle appartenait antérieurement, et elle devient membre de la bande ou de la bande irrégulière dont son mari fait partie.
2. Si elle épouse un Indien non soumis au régime d'un traité, elle a droit, tout en devenant membre de la bande irrégulière dont son mari fait partie, de participer également avec les membres de la bande à laquelle elle appartenait antérieurement; mais, avec l'assentiment du surintendant général, ce revenu peut, en tout temps, être converti en un rachat de dix ans.»
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«2. In this Act, unless the context otherwise requires, […] d) «Indian» means i) any male person of Indian blood reputed to belong to a particular band, ii) any child of such person, iii) any woman who is or was lawfully married to such person;
[…]
12. Any illegitimate child may, unless he has, with the consent of the band whereof the father or mother of such child is a member, shared in the distribution moneys of such band for a period exceeding two years, be, at any time, excluded from the membership thereof by the Superintendent General.
13. Any Indian who has for five years continuously resided in a foreign country without the consent, in writing, of the Superintendent General or his agent, shall cease to be a member of the band of which he was formerly a member and he shall not again become a member of that band, or of a any other band, unless the consent of such band, with the approval of the Superintendent General or his agent, is first obtained.
14. Any Indian woman who marries any person other than an Indian, or a non-treaty Indian, shall cease to be an Indian in every respect within the meaning of this Act, except that she shall be entitled to share equally with the members of the band to which she formerly belonged, in the annual or semi-annual distribution of their annuities, interest moneys and rents; but such income may be commuted to her at any time at ten years' purchase, with the approval of the Superintendent General.
15. Any Indian woman who marries an Indian of any other band, or a non-treaty Indian, shall cease to be a member of the band to which she formerly belonged, and shall become a member of the band or irregular band or which her husband is a member.
2. If she marries a non-treaty Indian, while becoming a member of the irregular band of which her husband is a member, she shall be entitled to share equally with the members of the band of which she was formerly a member, in the distribution of their moneys; but such income may be commuted to her at any time at ten years' purchase, with the consent of the band.» |
2. Loi sur les Indiens, S.C. 1951, c. 29 (extraits):
«2. (1) Dans la présente loi, l'expression […] g) «Indien» signifie une personne qui, conformément à la présente loi, est inscrite à titre d'Indien ou a droit de l'être; […] m) «inscrit» signifie inscrit comme Indien dans le registre des Indiens; n) «registraire» désigne le fonctionnaire du ministère qui est préposé au registre des Indiens; […]
5. Est maintenu au ministère un registre des Indiens, lequel consiste dans des listes de bande et des listes générales et où doit être consigné le nom de chaque personne ayant droit d'être inscrite comme Indien.
6. Le nom de chaque personne qui est membre d'une bande et a droit d'être inscrite doit être consigné sur la liste de bande pour la bande en question, et le nom de chaque personne qui n'est pas membre d'une bande et a droit d'être inscrite doit apparaître sur une liste générale.
7. (1) Le registraire peut en tout temps ajouter à une liste de bande ou à une liste générale, ou en retrancher, le nom de toute personne qui, d'après les dispositions de la présente loi, a ou n'a pas droit, selon le cas, à l'inclusion de son nom dans cette liste.
(2) Le registraire des Indiens doit indiquer la date où chaque nom y a été ajouté ou en a été retranché.
8. Dès l'entrée en vigueur de la présente loi, les listes de bande alors dressées au ministère doivent constituer le registre des Indiens et les listes applicables doivent être affichées à un endroit bien en vue dans le bureau du surintendant qui dessert la bande ou les personne visées par la lite et dans tous les autres endroits où les avis concernant la bande sont ordinairement affichés.
9. (1) Dans les six mois de l'affichage d'une liste conformément à l'article huit ou dans les trois mois de l'addition du nom d'une personne à une liste de bande ou à une liste générale ou de son retranchement d'une telle liste, en vertu de l'article sept, a) dans le cas d'une liste de bande, le conseil de la bande, dix électeurs de la bande ou trois électeurs, s'il y en a moins de dix, b) dans le cas d'une portion affichée d'une liste générale, tout adulte dont le nom figure sur cette portion affichée, et c) la personne dont le nom a été inclus dans la liste mentionnée à l'article huit, ou y a été omis, ou dont le nom a été ajouté à une liste de bande ou une liste générale, ou en a été retranché, peuvent, par avis écrit au registraire, renfermant un bref exposé des motifs invoqués à cette fin, protester contre l'inclusion, l'omission, l'addition ou le retranchement, selon le cas, du nom de cette personne. (2) Lorsqu'une protestation est adressée au registraire, en vertu du présent article, il doit faire tenir une enquête sur la question et rendre une décision qui, sous réserve d'un renvoi prévu au paragraphe trois, est définitive et péremptoire. (3) Dans les trois mois de la date d'une décision du registraire aux termes du présent article, a) le conseil de la bande que vise la décision du registraire, ou b) la personne qui a fait la protestation ou à l'égard de qui elle a eu lieu, peut, moyennant un avis par écrit, demander au registraire de soumettre la décision à un juge, pour revision, et dès lors le registraire doit déférer la décision, avec tous les éléments que le registraire a examinés en rendant sa décision, au juge de la cour de comté ou district du comté ou district où la bande est située ou dans lequel réside la personne à l'égard de qui la protestation a été faite, ou de tel autre comté ou district que le Ministre peut désigner, ou, dans la province de Québec, au juge de la cour supérieure du district où la bande est située ou dans lequel réside la personne à l'égard de qui la protestation a été faite, ou de tel autre district que le Ministre peut désigner.
(4) Le juge de la cour de comté, de la cour de district ou de la cour supérieure, selon le cas, doit enquêter sur la justesse de la décision du registraire et, à ces fins, peut exercer tous les pouvoirs d'un commissaire en vertu de la Partie I de la Loi des enquêtes. Le juge doit décider si la personne qui a fait l'objet de la protestation a ou n'a pas droit, selon le cas, d'après les dispositions de la présente loi, à l'inscription de son nom au registre des Indiens, et la décision du juge est définitive et péremptoire.
10. Lorsque le nom d'une personne du sexe masculin est inclus dans une liste de bande ou une liste générale, ou y est ajouté ou omis, ou en est retranché, les noms de son épouse et de ses enfants mineurs doivent également être inclus, ajoutés, omis ou retranchés, selon le cas.
11. Sous réserve de l'article douze, une personne a droit d'être inscrite si
a) elle était, le vingt-six mai mil huit cent soixante-quatorze, aux fins de la loi alors intitulée: Acte pourvoyant à l'organisation du Département du Secrétaire d'État du Canada, ainsi qu'à l'administration des Terres des Sauvages et de l'Ordonnance, chapitre quarante-deux des Statuts de 1868, modifiée par l'article six du chapitre six des Statuts de 1869 et par l'article huit du chapitre vingt et un des Statuts de 1874, considérée comme ayant droit à la détention, l'usage ou la jouissance des terres et autres biens immobiliers appartenant aux tribus, bandes ou groupes d'Indiens au Canada, ou affectés à leur usage, b) elle est membre d'une bande (i) à l'usage et au profit communs de laquelle des terres ont été mises de côté ou, depuis le vingt-six mai mil huit cent soixante-quatorze, ont fait l'objet d'un traité les mettant de côté, ou (ii) que le gouverneur en conseil a déclaré une bande aux fins de la présente loi, c) elle est du sexe masculin et descendante directe, dans la ligne masculine, d'une personne du sexe masculin décrite à l'alinéa a) ou b), d) elle est l'enfant légitime (i) d'une personne du sexe masculin décrite à l'alinéa a) ou b), ou (ii) d'une personne décrite à l'alinéa c), e) elle est l'enfant illégitime d'une personne du sexe féminin décrite à l'alinéa a), b) ou d), à moins que le registraire ne soit convaincu que le père de l'enfant n'était pas un Indien et n'ait déclaré que l'enfant n'a pas le droit d'être inscrit, ou
f) elle est l'épouse ou la veuve d'une personne ayant le droit d'être inscrite aux termes de l'alinéa a), b), c), d) ou e).
12. (1) Les personnes suivantes n'ont pas le droit d'être inscrites, savoir: a) une personne qui (i) a reçu ou à qui il a été attribué, des terres ou certificats d'argent de métis, (ii) est un descendant d'une personne décrite au sous-alinéa (i), (ii) est émancipée, ou (iii) est née d'un mariage contracté après l'entrée en vigueur de la présente loi et a atteint l'âge de vingt et un ans, dont la mère et la grand-mère paternelle ne sont pas des personnes décrites à l'alinéa a), b) ou d) ou admises à être inscrites en vertu de l'alinéa e) de l'article onze, sauf si, étant une femme, cette personne est l'épouse ou la veuve de quelqu'un décrit à l'article onze, et b) une femme qui a épousé une personne non indienne. (2) Le Ministre peut délivrer à tout Indien auquel la présente loi cesse de s'appliquer, un certificat dans ce sens.
13. (1) Sous réserve de l'approbation du Ministre, une personne dont le nom apparaît sur une liste générale peut être admise au sein d'une bande avec le consentement de la bande ou du conseil de la bande.
(2) Sous réserve de l'approbation du Ministre, un membre d'une bande peut être admis parmi les membres d'une autre bande avec le consentement de cette dernière ou du conseil de celle-ci.
14. Une femme qui est membre d'une bande cesse d'en faire partie si elle épouse une personne qui n'en est pas membre, mais si elle épouse un membre d'une autre bande, elle entre dès lors dans la bande à laquelle appartient son mari.»
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«2. (1) In this Act, […] g) «Indian» means a person who persuant to this Act is registered as an Indian or is entitled to be registered as an Indian; […] m) «registered» means registered as an Indian in the Indian Register; n) «Registrar» means the officer of the Department who is in charge of the Indian Register;
[…]
5. An Indian Register shall be maintained in the Department, which shall consist of Band Lists and General Lists and in which shall be recorded the name of every person who is entitled to be registered as an Indian.
6. The name of every person who is a member of a band and is entitled to be registered shall be entered in the Band List for that band, and the name of every person who is not a member of a band and is entitled to be registered shall be entered in a General List.
7. (1) The Registrar may at any time add to or delete from a Band List or a General List the name of any person who, in accordance with the provisions of this Act, is entitled or not entitled, as the case may be, to have his name included in that List.
(2) The Indian Register shall indicate the date on which each name was added thereto or deleted therefrom.
8. Upon the coming into force of this Act, the band lists then in existence in the Department shall constitute the Indian Register, and the applicable lists shall be posted in a conspicuous place in the superintendent's office that serves the band or persons to whom the list relates and in all other places where band notices are ordinarily displayed.
9. (1) Within six months after a list has been posted in accordance with section eight or within three months after the name of a person has been added to or deleted from a Band List or a General List pursuant to section seven (a) in the case of a Band List, the council of the band, any ten electors of the band, or any three electors if there are less than ten electors in the band, (b) in the case of a posted portion of a General List, any adult person whose name appears on that posted portion,
and (c) the person whose name was included in or omitted from the list referred to in section eight, or whose name was added to or deleted from a Band List or a General List, may, by notice in writing to the Registrar, containing a brief statement of the grounds therefor, protest the inclusion, omission, addition, or deletion, as the case may be, of the name of that person.
(2) Where a protest is made to the Registrar under this section he shall cause an investigation to be made into the matter and shall render a decision, and subject to a reference under subsection three, the decision of the Registrar is final and conclusive. (3) Within three months from the date of a decision of the Registrar under this section (a) the council of the band affected by the Registrar's decision, or (b) the person by or in respect of whom the protest was made, may, by notice in writing, request the Registrar to refer the decision to a judge for review, and thereupon the Registrar shall refer the decision, together with all material considered by the Registrar in making his decision, to the judge of the county or district court of the county or district in which the band is situated or in which the person in respect of whom the protest was made resides, or such other county or district as the Minister may designate, or in the Province of Quebec, to the judge of the Superior Court for the district in which the band is situated or in which the person in respect of whom the protest was made resides, or such other district as the Minister may designate.
(4) The judge of the county, district or Superior Court, as the case may be, shall inquire into the correctness of the Registrar's decision, and for such purposes may exercise all the powers of a commissioner under Part I of the Inquiries Act; the judge shall decide whether the person in respect of whom the protest was made is, in accordance with the provisions of this Act, entitled or not entitled, as the case may be, to have his name included in the Indian Register, and the decision of the judge is final and conclusive.
10. Where the name of a male person is included in, omitted from, added to or deleted from a Band List or a General List, the names of his wife and his minor children shall also be included, omitted, added or deleted, as the case may be.
11. Subject to section twelve, a person is entitled to be registered if that person
(a) on the twenty-sixth day of May, eighteen hundred and seventy-four, was, for the purposes of An Act providing for the organization of the Department of the Secretary of State of Canada, and for the management of Indian and Ordnance Lands, chapter forty-two of the statutes of 1868, as amended by section six of chapter six of the statutes of 1869, and section eight of chapter twenty-one of the statutes of 1874, considered to be entitled to hold, use or enjoy the lands and other immovable property belonging to or appropriated to the use of the various tribes, bands or bodies of Indians in Canada,
(b) is a member of a band (i) for whose use and benefit, in common, lands have been set apart or since the twenty-sixth day of May, eighteen hundred and seventy-four have been agreed by treaty to be set apart, or (ii) that has been declared by the Governor in Council to be a band for the purposes of this Act,
(c) is a male person who is a direct descendant in the male line of a male person described in paragraph (a) or (b),
(d) is the legitimate child of (i) a mal person described in paragraph (a) or (b), or (ii) a person described in paragraph (c), (e) is the illegitimate child of a female person described in paragraph (a), (b) or (d), unless the Registrar is satisfied that the father of the child was not an Indian and the Registrar has declared that the child is not entitled to be registered, or
(f) is the wife or widow of a person who is entitled to be registered by virtue of paragraph (a), (b), (c), (d) or (e).
12. (1) The following persons are not entitled to be registered, namely, (a) a person who (i) has received or has been allotted half-breed lands or money scrip, (ii) is a descendant of a person described in sub-paragraph (i), (iii) is enfranchised, or (iv) is a person born of a marriage entered into after the coming into force of this Act and has attained the age of twenty-one years, whose mother and whose father's mother are not persons described in paragraph (a), (b), (d), or entitled to be registered by virtue of paragraph (e) of section eleven, unless, being a woman, that person is the wife or widow of a person described in section eleven, and
(b) a woman who is married to a person who is not an Indian. (2) the Minister may issue to any Indian to whom this Act ceases to apply, a certificate to that effect.
13. (1) Subject to the approval of the Minister, a person whose name appears on a General List may be admitted into membership of a band with the consent of the band or the council of that band.
(2) Subject to the approval of the Minister, a member of a band may be admitted into membership of another band with the consent of the latter band or the council of that band.
14. A woman who is a member of a band ceases to be a member of that band if she marries a person who is not a member of that band, but if she marries a member of another band, she thereupon becomes a member of the band of which her husband is a member.» |
3. Loi modifiant la Loi sur les Indiens, S.C. 1956, c. 40, art. 3:
«3. (1) L'alinéa e) de l'article 11 de ladite loi est abrogé et remplacé par ce qui suit:
«e) elle est l'enfant illégitime d'une personne du sexe féminin décrite à l'alinéa a), b) ou d); ou».
(2) L'article 12 de ladite loi est modifié par l'adjonction, immédiatement après le paragraphe (1), du paragraphe suivant:
«(1a) L'addition, à une liste de bande, du nom d'un enfant illégitime décrit à l'alinéa e) de l'article 11 peut faire l'objet d'une protestation en tout temps dans les douze mois de l'addition et si, à la suite de la protestation, il est décidé que le père de l'enfant n'était pas un Indien, l'enfant n'a pas le droit d'être inscrit selon l'alinéa e) de l'article 11».
(3) Le présent article ne s'applique qu'aux personnes nées après l'entrée en vigueur de la présente loi.»
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«3. (1) Paragraph (e) of section 11 of the said Act is repealed and the following substituted therefor:
«(e) is the illegitimate child of a female person described in paragraph (a), (b) or (d); or».
(2) Section 12 of the said Act is amended by adding thereto, immediately after subsection (1) thereof, the following subsection:
«(1a) The addition to a Band List of the name of an illegitimate child described in paragraph (e) of section 11 may be protested at any time within twelve months after the addition, and if upon the protest it is decided that the father of the child was not an Indian, the child is not entitled to be registered under paragraph (e) of section 11».
(3) This section applies only to persons born after the coming into force of this Act.» |
4. Loi modifiant la Loi sur les Indiens, S.C. 1985, c. 27, art. 4:
4. Sections 5 to 14 of the said Act arc repealed and the following substituted therefor:
"lndian Register
5. ( 1) There shall be maintained in the Department an Indian Register in which shall be recorded the name of every person who is entitled to be registered as an lndian under this Act.
(2) The names in the Indian Register immediately prior to April 17, 1985 shall constitute the Indian Register on April 17, 1985.
(3) The Registrar may at any time add to or delete from the Indian Register the name of any person who, in accordance with this Act, is entitled or not entitled, as the case may be, to have his name included in the Indian Register.
(4) The lndian Register shall indicate the date on which each name was added thereto or deleted therefrom.
(5) The name of a person who is entitled to be registered is not required to be recorded in the Indian Register unless an application for registration is made to the Registrar.
6. ( l) Subject to section 7, a person is entitled to be registered if
(a) that person was registered or entitled to be registered immediately prior to April 17, 1 985; (b) that person is a member of a body of persons that has been declared, by the Governor in Council on or after April 17, 1985 to be a band for the purposes of this Act; (c) the name of that person was omitted or deleted from the Indian Register, or from a band list prior to September 4, 1951, under subparagraph 12(l)(a)(iv), paragraph 12(l)(b) or subsection 12(2) or under subparagraph 12(1)(a)(iii) pursuant to an order made under sub section 109(2), as each provision read immediately prior to April 17, 1985, or under any former provision of this Act |
4. Les articles 5 à 14 de la même loi sont abrogés et remplacés par ce qui suit :
«Registre des 1ndiens
5. (l) Est tenu au ministère un registre des Indiens où est consigné le nom de chaque personne ayant droit d'être inscrite comme Indien en vertu de la présente loi.
(2) Les noms figurant au registre des Indiens immédiatement avant le 17 avril 1985 constituent le registre des Indiens au 17 avril 1985.
(3) Le registraire peut ajouter au registre des Indiens, ou en retrancher, le nom de la personne qui, aux termes de la présente loi, a ou n'a pas droit, selon le cas, à l'inclusion de son nom dans ce registre.
(4) Le registre des Indiens indique la date où chaque nom y a été ajouté ou en a été retranché.
(5) Il n'est pas requis que le nom d'une personne qui a droit d'être inscrite soit consigné dans le registre des Indiens, à moins qu'une demande à cette effet soit présentée au registraire.
6. (1) Sous réserve de l'article 7, une personne a droit d'être inscrite si elle remplit une des conditions suivantes : a) elle était inscrite ou avait droit de l'être immédiatement avant le 17 avril 1985; b) elle est membre d'un groupe de personnes déclaré par le gouverneur en conseil après le 16 avril 1985 être une bande pour l'application de la présente loi; c) son nom a été omis ou retranché du registre des Indiens ou, avant le 4 septembre 1951, d'une liste de bande, en vertu du sous-alinéa 12(1 )a)(iv), de l'alinéa 12(1 )b) ou du paragraphe 12(2) ou en vertu du sous-alinéa 12(1 )a)(iii) conformément à une ordonnance prise en vertu du paragraphe 109 (2), dans leur version précédant immédiatement
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relating to the same subject-matter as any of those provisions;
(d) the name of that person was omitted or deleted from the Indian Register, or from a band list prior to September 4, 1951, under subparagraph 12(1)(a)(iii) pursuant to an order made under subsection 109(1), as each provision read immediately prior to April 17, 1985, or under any former provision of this Act relating to the same subject-matter as any of those provisions;
(e) the name of that person was omitted or deleted from the Indian Register, or from a band list prior to September 4,1951,
(i) under section 13, as it read immediately prior to September 4, 1951, or under any former provision of this Act relating to the same subject-matter as that section, or
(ii) under section III, as it read immediately prior to July 1, 1920, or under any former provision of this Act relating to the same subject matter as that section; or
(f) that person is a person both of whose parents are or, if no longer living, were at the time of death entitled to be registered under this section.
(2) Subject to section 7, a person is entitled to be registered if that person is a person one of whose parents is or, if no longer living, was at the time of death entitled to be registered under subsection (1).
(3) For the purposes of paragraph ( 1 )(f) and subsection (2), (a) a person who was no longer living immediately prior to April 17, 1985 but who was at the time of death entitled to be registered shall be deemed to be entitled to be registered under paragraph (l)(a); and (b) a person described in paragraph (1)(c),(d) or (e) who was no longer living on April 17, 1985 shall be deemed lobe entitled to be registered under that paragraph.
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le 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui d'une de ces dispositions;
d) son nom a été omis ou retranché du registre des Indiens ou, avant le 4 septembre 1951, d'une liste de bande en vertu du sous-alinéa 12(1)a)(iii) conformément à une ordonnance prise en vertu du paragraphe 109(1), dans leur version précédant immédiatement le 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui d'une de ces dispositions; e) son nom a été omis ou retranché du registre des Indiens ou, avant le 4 septembre 1951, d'une liste de bande :
(i) soit en vertu de l'article 13, dans sa version précédant immédiatement le 4 septembre 1951, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet article, (ii) soit en vertu de l'article III, dans sa version précédant immédiatement le 1er juillet 1920, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet article; f) ses parents ont tous deux droit d'être inscrits en vertu du présent article ou, s'ils sont décédés, avaient ce droit à la date de leur décès.
(2) Sous réserve de l'article 7, une personne a droit d'être inscrite si l'un de ses parents a droit d'être inscrit en vertu du paragraphe (1) ou, s'il est décédé, avait ce droit à la date de son décès.
(3) Pour l'application de l'alinéa ( 1 ) f) et du paragraphe (2) : a) la personne qui est décédée avant le 17 avril 1985 mais qui avait droit d'être inscrite à la date de son décès est réputée avoir droit d'être inscrite en vertu de l'alinéa (I)a); b) la personne visée aux alinéas (l)c), d) ou e) qui est décédée avant le 17 avril 1985 est réputée avoir droit d'être inscrite en vertu de ces alinéas.
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7. ( 1) The following persons are not entitled to be registered: (a) a person who was registered under paragraph 11 (l)(f), as it read immediately prior to April 17, 1985, or under any former provision of this Act relating to the same subject-matter as that paragraph, and whose name was subsequently omitted or deleted from the Indian Register under this Act; or
(b) a person who is the child of a person who ·was registered or entitled to be registered under paragraph 11 ( 1 )(f), as it read immediately prior to April 17,1985, or under any former provision of this Act relating to the same subject matter as that paragraph, and is also the child of a person who is not entitled to be registered.
(2) Paragraph ( l )(a) does not apply in respect of a female person who was, at any time prior to being registered under paragraph 11 ( 1 ) f), entitled to be registered under any other provision of this Act.
(3) Paragraph (l)(b) does not apply in respect of the child of a female person who was, at any time prior to being registered under paragraph Il ( l )(f), entitled to be registered under any other provision of this Act.
Band Lists
8. There shall be maintained in accordance with this Act for each band a Band List in which shall be entered the name of every person who is a member of that band.
9. ( 1) Until such time as a band assumes control of its Band List, the Band List of that band shall be maintained in the Department by the Registrar.
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7. (1) Les personnes suivantes n'ont pas droit d'être inscrites : a) celles qui étaient inscrites en vertu de l'alinéa Il (1)f), dans sa version précédant immédiatement le 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet alinéa, et dont le nom a ultérieurement été omis ou retranché du registre des 1ndiens en vertu de la présente loi; b) celles qui sont les enfants d'une personne qui était inscrite ou avait droit de l'être en vertu de l'alinéa 11 (1)f), dans sa version précédant immédiatement le 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui de cet alinéa, et qui sont également les enfants d'une personne qui n'a pas droit d'être inscrite.
(2) L'alinéa ( 1 )a) ne s'applique pas à une personne de sexe féminin qui, avant qu'elle ne soit inscrite en vertu de l'alinéa 11( 1 )f), avait droit d'être inscrite en vertu de toute autre disposition de la présente loi. (3) L'alinéa (l)b) ne s'applique pas à l'enfant d'une personne de sexe féminin qui, avant qu'elle ne soit inscrite en vertu de l'alinéa 11 ( 1 )f), avait droit d'être inscrite en vertu de toute autre disposition de la présente loi.
Listes de bande
8. Est tenue conformément à la présente loi la liste de chaque bande où est consigné le nom de chaque personne qui en est membre.
9. ( 1) Jusqu'à ce que la bande assume la responsabilité de sa liste, celle-ci est tenue au ministère par le registraire.
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(2) The names in a Band List of a band immediately prior to April 17, 1985 shall constitute the Band List of that band on April l7, 1985.
(3) The Registrar may at any time add to or delete from a Band List maintained in the Department the name of any person who, in accordance with this Act, is entitled or not entitled, as the case may be, to have his name included in that List.
(4) A Band List maintained in the Department shall indicate the date on which each name was added thereto or deleted therefrom.
(5) The name of a person who is entitled to have his name entered in a Band List maintained in the Department is not required to be entered therein unless an application for entry therein is made to the Registrar.
10. ( 1) A band may assume control of its own membership if it establishes membership rules for itself in writing in accordance with this section and if, after the band has given appropriate notice of its intention to assume control of its own membership, a majority of the electors of the band gives its consent to the band's control of its own membership.
(2) A band may, pursuant to the consent of a majority of the electors of the band, (a) after it has given appropriate notice of its intention to do so, establish membership rules for itself; and (b) provide for a mechanism for reviewing decisions on membership.
(3) Where the council of a band makes a by-law under paragraph 81(l)(p.4) bringing this subsection into effect in respect of the band, the consents required under subsections ( 1) and (2) shall be given by a majority of the members of the band who are of the full age of eighteen years.
( 4) Membership rules established by a band under this section may not deprive any person who had the right to have his
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(2) Les noms figurant à une liste d'une bande immédiatement avant le 17 avril 1985 constituent la liste de cette bande au 17 avril 1985.
(3) Le registraire peut ajouter à une liste de bande tenue au ministère, ou en retrancher, le nom de la personne qui, aux termes de la présente loi, a ou n'a pas droit, selon le cas, à l'inclusion de son nom dans cette liste.
(4) La liste de bande tenue au ministère indique la date où chaque nom y a été ajouté ou en a été retranché.
(5) Il n'est pas requis que le nom d'une personne qui a droit à ce que celui-ci soit consigné dans une liste de bande tenue au ministère y soit consigné à moins qu'une demande à cet effet soit présentée au registraire.
10. ( 1) La bande peut décider de l'appartenance à ses effectifs si elle en fixe les règles par écrit conformément au présent article et si, après qu'elle a donné un avis convenable de son intention de décider de cette appartenance, elle y est autorisée par la majorité de ses électeurs.
(2) La bande peut, avec l'autorisation de la majorité de ses électeurs : a) après avoir donné un avis convenable de son intention de ce faire, fixer les règles d'appartenance à ses effectifs; b) prévoir une procédure de révision des décisions portant sur l'appartenance à ses effectifs.
(3) Lorsque le conseil d'une bande établit un statut administratif en vertu de l'alinéa 81 (l) p.4) mettant en vigueur le présent paragraphe à l'égard d'une bande, l'autorisation requise en vertu des paragraphes (1) et (2) doit être donnée par la majorité des membres de la bande qui ont dix-huit ans révolus.
(4) Les règles d'appartenance fixées par une bande en vertu du présent article ne peuvent priver quiconque avait droit à ce
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name entered in the Band List for that band, immediately prior to the time the rules were established, of the right to have his name so entered by reason only of a situation that existed or an action that was taken before the rules came into force.
(5) For greater certainty, subsection (4) applies in respect of a person who was entitled to have his name entered in the Band List under paragraph 11 (1)(c) immediately before the band assumed control of the Band List if that person does not subsequently cease to be entitled to have his name entered in the Band List.
(6) Where the conditions set out in subsection ( 1) have been met with respect to a band, the council of the band shall forth with give notice to the Minister in writing that the band is assuming control of its own membership and shall provide the Minister with a copy of the membership rules for the band.
(7) On receipt of a notice from the council of a band under subsection {6), the Minister shall, if the conditions set out in subsection (1) have been complied with, forthwith (a) give notice to the band that it has control of its own membership; and (b) direct the Registrar to provide the band with a copy of the Band List maintained in the Department.
(8) Where a band assumes control of its membership under this section, the membership rules established by the band shall have effect from the day on which notice is given to the Minister under subsection (6), and any additions to or deletions from the Band List of the band by the Registrar on or after that day are of no effect unless they are in accordance with the membership rules established by the band.
(9) A band shall maintain its own Band List from the date on which a copy of the Band List is received by the band under paragraph (7)(b), and, subject to section
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que son nom soit consigné dans la liste de bande immédiatement avant la fixation des règles du droit à ce que son nom y soit consigné en raison uniquement d'un fait ou d'une mesure antérieurs à leur prise d'effet.
(5) Il demeure entendu que le paragraphe (4) s'applique à la personne qui avait droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de bande en vertu de l'alinéa 11 (1)c) immédiatement avant que celle-ci n'assume la responsabilité de la tenue de sa liste si elle ne cesse pas ultérieurement d'avoir droit à ce que son nom y soit consigné.
(6) Une fois remplies les conditions du paragraphe ( 1 ), le conseil de la bande, sans délai, avise par écrit le Ministre du fait que celle-ci décide désormais de l'appartenance à ses effectifs et lui transmet le texte des règles d'appartenance.
(7) Sur réception de l'avis du conseil de bande prévu au paragraphe (6), le Ministre, sans délai, s'il constate que les conditions prévues au paragraphe ( 1) sont remplies: a) avise la bande qu'elle décide désormais de l'appartenance à ses effectifs; b) ordonne au registraire de transmettre à la bande une copie de la liste de bande tenue au ministère.
(8) Lorsque la bande décide de l'appartenance à ses effectifs en vertu du présent article, les règles d'appartenance fixées par celle-ci entrent en vigueur à compter de la date où l'avis au Ministre a été donné en vertu du paragraphe (6); les additions ou retranchements de la liste de la bande effectués par le registraire après cette date ne sont valides que s'ils ont été effectués conformément aux règles d'appartenance fixées par la bande.
(9) À compter de la réception de l'avis prévu à l'alinéa (7)b), la bande est responsable de la tenue de sa liste. Sous réserve de l'article 13.2, le ministère, à compter de
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13.2, the Department shall have no further responsibility with respect to that Band List from that date.
(10) A band may at any ti me add to or delete from a Band List maintained by it the name of any person who, in accordance with the membership rules of the band, is entitled or not entitled, as the case may be, to have his name included in that list.
(11) A Band List maintained by a band shall indicate the date on which each name was added thereto or deleted therefrom.
11. (1) Commencing on April 17, 1985, a person is entitled to have his name entered in a Band List maintained in the Department for a band if (a) the name of that person was entered in the Band List for that band, or that person was entitled to have his name entered in the Band List for that band, immediately prior to April 17, 1985; (b) that person is entitled to be registered under paragraph 6( l )( b) as a member of that band; (c) that person is entitled to be registered under paragraph 6(l)(c) and ceased to be a member of that band by reason of the circumstances set out in that paragraph; or (d) that person was born on or after April 17, 1985 and is entitled to be registered under paragraph 6( 1 )(f) and both parents of that person are entitled to have their names entered in the Band List or, if no longer living, were at the time of death entitled to have their names entered in the Band List.
(2) Commencing on the day that is two years after the day that an Act entitled An Act to amend the Indian Act, introduced in the House of Commons on February 28, 1985, is assented to, or on such earlier day as may be agreed to under section 13.1, where a band does not have control of its Band List under this Act, a person is entitled to have his name entered in a Band List maintained in the Department for the band
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cette date, est dégagé de toute responsabilité à l'égard de cette liste.
( 10) La bande peut ajouter à la liste de bande tenue par elle, ou en retrancher, le nom de la personne qui, aux termes des règles d'appartenance de la bande, a ou n'a pas droit, selon le cas, à l'inclusion de son nom dans la liste.
(11) La liste de bande tenue par celle-ci indique la date où chaque nom y a été ajouté ou en a été retranché.
11. (1) À compter du 17 avril 1985, une personne a droit à ce que son nom soit consigné dans une liste de bande tenue pour cette dernière au ministère si elle remplit une des conditions suivantes : a) son nom a été consigné dans cette liste, ou elle avait droit à ce qu'il le soit immédiatement avant le 17 avril 1985; b) elle a droit d'être inscrite en vertu de l'alinéa 6(1)b) comme membre de cette bande; c) elle a droit d'être inscrite en vertu de l'alinéa 6(1 )c) et a cessé d'être un membre de cette bande en raison des circonstances prévues à cet alinéa; d) elle est née après le 16 avril 1985 et a droit d'être inscrite en vertu de l'alinéa 6(1) f) et ses parents ont tous deux droit à ce que leur nom soit consigné dans la liste de bande ou, s'ils sont décédés, avaient ce droit à la date de leur décès.
(2) À compter du jour qui suit de deux ans le jour où la loi intitulée Loi modifiant la Loi sur les Indiens, déposée à la Chambre des communes le 28 février 1985, a reçu la sanction royale ou de la date antérieure choisie en vertu de l'article 13.1, lorsque la bande n'a pas la responsabilité de la tenue de sa liste prévue à la présente loi, une personne a droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de bande tenue au ministère pour cette dernière :
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(a) if that person is entitled to be registered under paragraph 6(1 )(d) or (e) and ceased to be a member of that band by reason of the circumstances set out in that paragraph; or (b) if that person is entitled to be registered under paragraph 6( 1 )(f) or subsection 6(2) and a parent referred to in that provision is entitled to have his name entered in the Band List or, if no longer living, was at the time of death entitled to have his name entered in the Band List.
(3) For the purposes of paragraph (1)(d) and subsection (2), a person whose name was omitted or deleted from the Indian Register or a band list in the circumstances set out in paragraph 6(1)(c), (d) or (e) who was no longer living on the first day on which he would otherwise be entitled to have his name entered in the Band List of the band of which he ceased to be a member shall be deemed to be entitled to have his name so entered.
(4) Where a band amalgamates with another band or is divided so as to constitute new bands, any person who would otherwise have been entitled to have his name entered in the Band List of that band under this section is entitled to have his name entered in the Band List of the amalgamated band or the new band to which he has the closest family ties, as the case may be. 12. Commencing on the day that is two years after the day that an Act entitled An Act to amend the Indian Act, introduced in the House of Commons on February 28, 1985, is assented to, or on such earlier day as may be agreed to under section 13.1, any person who
(a) is entitled to be registered under section 6, but is not entitled to have his name entered in the Band List maintained in the Department under section 11, or
(b) is a member of another band, is entitled to have his name entered in the Band List maintained in the Department
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a) soit si elle a droit d'être inscrite en vertu des alinéas 6( 1 )d) ou e) et qu'elle a cessé d'être un membre de la bande en raison des circonstances prévues à l'un de ces alinéas; b) soit si elle a droit d'être inscrite en vertu de l'alinéa 6(1) f) ou du paragraphe 6(2) et qu'un de ses parents visés à l'une de ces dispositions a droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de bande ou, s'il est décédé, avait ce droit à la date de son décès.
(3) Pour l'application de l'alinéa (I )d) et du paragraphe (2), la personne dont le nom a été omis ou retranché du registre des Indiens ou d'une liste de bande dans les circonstances prévues aux alinéas 6( 1 )c), d) ou e) et qui est décédée avant le premier jour où elle a acquis le droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de bande dont elle a cessé d'être membre est réputée avoir droit à ce que son nom y soit consigné.
(4) Lorsqu'une bande fusionne avec une autre ou qu'elle est divisée pour former de nouvelles bandes, toute personne qui aurait par ailleurs eu droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de la bande en vertu du présent article a droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de la bande issue de la fusion ou de celle de la nouvelle bande à l'égard de laquelle ses liens familiaux sont les plus étroits.
12. À compter du jour qui suit de deux ans le jour où la loi intitulée Loi modifiant la Loi sur les Indiens, déposée à la Chambre des communes le 28 février 1985, a reçu la sanction royale ou de la date antérieure choisie en vertu de l'article 13.1, la personne qui,
a) soit a droit d'être inscrite en vertu de l'article 6 sans avoir droit à ce que son nom soit consigné dans une liste de bande tenue au ministère en vertu de l'article 1 1 ,
b) soit est membre d'une autre bande, a droit à ce que son nom soit consigné dans la liste d'une bande tenue au ministère |
for a band if the council of the admitting band consents.
13. Notwithstanding sections 11 and 12, no person is entitled to have his name entered at the same time in more than one Band List maintained in the Department.
13.1 (1) A band may, at any time prior to the day that is two years after the day that an Act entitled An Act to amend the Indian Act, introduced in the House of Commons on February 28, 1985, is assented to, decide to leave the control of its Band List with the Department if a majority of the electors of the band gives its consent to that decision.
(2) Where a band decides to leave the control of its Band List with the Department under subsection (1 ), the council of the band shall forthwith give notice to the Minister in writing to that effect.
(3) Notwithstanding a decision under subsection (1), a band may, at any time after that decision is taken, assume control of its Band List under section 10.
13.2 ( 1) A band may, at any time after assuming control of its Band List under section 10, decide to return control of the Band List to the Department if a majority of the electors of the band gives its consent to that decision.
(2) Where a band decides to return control of its Band List to the Department under subsection ( 1 ), the council of the band shall forthwith give notice to the Minister in writing to that effect and shall provide the Minister with a copy of the Band List and a copy of all the membership rules that were established by the band under subsection 10(2) while the band maintained its own Band List.
(3) Where a notice is given under subsection (2) in respect of a Band List, the maintenance of that Band List shall be the responsibility of the Department from the date on which the notice is received and from that time the Band List shall be maintained in accordance with the membership rules set out in section 11.
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pour cette dernière si le conseil de la bande qui l'admet en son sein y consent.
13. Par dérogation aux articles Il et 12, nul n'a droit à ce que son nom soit consigné en même temps dans plus d'une liste de bande tenue au ministère.
13.1 (l) Une bande peut, avant le jour qui suit de deux ans le jour où la loi intitulée Loi modifiant la Loi sur les Indiens, déposée à la Chambre des communes le 28 février 1985, a reçu la sanction royale, décider de laisser la responsabilité de la tenue de sa liste au ministère à condition d'y être autorisée par la majorité de ses électeurs.
(2) Si la bande décide de laisser la responsabilité de la tenue de sa liste au ministère en vertu du paragraphe ( 1), le conseil de la bande, sans délai, avise par écrit le Ministre de la décision.
(3) Malgré la décision visée au paragraphe (1), la bande peut, en tout temps après cette décision, assumer la responsabilité de la tenue de sa liste en vertu de l'article 10.
13.2 ( 1) La bande peut, en tout temps après avoir assumé la responsabilité de la tenue de sa liste en vertu de l'article 10, décider d'en remettre la responsabilité au ministère à condition d'y être autorisée par la majorité de ses électeurs.
(2) Lorsque la bande décide de remettre la responsabilité de la tenue de sa liste au ministère en vertu du paragraphe ( l ), le conseil de la bande, sans délai, avise par écrit le Ministre de la décision et lui transmet une copie de la liste et le texte des règles d'appartenance fixées par la bande conformément au paragraphe 10 (2) pendant qu'elle assumait la responsabilité de la tenue de sa liste.
(3) Lorsqu'est donné l'avis prévu au paragraphe (2) à l'égard d'une liste de bande, la tenue de cette dernière devient la responsabilité du ministère à compter de la date de réception de l'avis. Elle est tenue, à compter de cette date, conformément aux règles d'appartenance prévues à 1 'article 11. |
13.3 A person is entitled to have his name entered in a Band List maintained in the Department pursuant to section 13.2 if that person was entitled to have his name entered, and his name was entered, in the Band List immediately before a copy of it was provided to the Minister under subsection 13.2(2), whether or not that person is also entitled to have his name entered in the Band List under section II.
Notice of Band Lists
14. ( 1) Within one month after the day an Act entitled An Act to amend the Indian Act, introduced in the House of Commons on February 28, 1985, is assented to, the Registrar shall provide the council of each band with a copy of the Band List for the band as it stood immediately prior to that day.
(2) Where a Band List is maintained by the Department, the Registrar shall, at least once every two months after a copy of the Band List is provided to the council of a band under subsection (1 ), provide the council of the band with a list of the additions to or deletions from the Band List not included in a list previously pro vided under this subsection.
(3) The council of each band shall, forthwith on receiving a copy of the Band List under subsection ( l ), or a list of additions to and deletions from its Band List under subsection (2), post the copy or the list, as the case may be, in a conspicuous place on the reserve of the band.
Inquiries
14.1 The Registrar shall, on inquiry from any person who believes that he or any person he represents is entitled to have his name included in the lndian Register or a Band List maintained in the Department, indicate to the person making the inquiry whether or not that name is included therein.
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13.3 Une personne a droit à ce que son nom soit consigné dans une liste de bande tenue par le ministère en vertu de l'article 13.2 si elle avait droit à ce que son nom soit consigné dans cette liste, et qu'il y a effectivement été consigné, immédiatement avant qu'une copie en soit transmise au Ministre en vertu du paragraphe 13.2(2), que cette personne ait ou non droit à ce que son nom soit consigné dans cette liste en vertu de l'article II.
Affichage des listes de bande
14. (1) Au plus tard un mois après la date où la loi intitulée Loi modifiant la Loi sur les Indiens, déposée à la Chambre des communes le 28 février 1985, a reçu la sanction royale, le registraire transmet au conseil de chaque bande une copie de la liste de la bande dans son état précédant immédiatement cette date.
(2) Si la liste de bande est tenue au ministère, le registraire, au moins une fois tous les deux mois après la transmission prévue au paragraphe ( 1) d'une copie de la liste au conseil de la bande, transmet à ce dernier une liste des additions à la liste et des retranchements de celle-ci non compris dans une liste antérieure transmise en· vertu du présent paragraphe.
(3) Le conseil de chaque bande, dès qu'il reçoit copie de la liste de bande prévue au paragraphe (1) ou la liste des additions et des retranchements prévue au paragraphe (2), affiche la copie ou la liste, selon le cas, en un lieu bien en évidence dans la réserve de la bande.
Demandes
14.1 Le registraire, à la demande de toute personne qui croit qu'elle-même ou que la personne qu'elle représente a droit à l'inclusion de son nom dans le registre des Indiens ou une liste de bande tenue au ministère, indique sans délai à l'auteur de la demande si ce nom y est inclus ou non.
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Protests
14.2 (1) A protest may be made in respect of the inclusion or addition of the name of a person in, or the omission or deletion of the name of a person from, the Indian Register, or a Band List maintained in the Department, within three years after the inclusion or addition, or omission or deletion, as the case may be, by notice in writing to the Registrar, containing a brief statement of the grounds therefor.
(2) A protest may be made under this section in respect of the Band List of a band by the council of the band, any member of the band or the person in respect of whose name the protest is made or his representative.
(3) A protest may be made under this section in respect of the Indian Register by the person in respect of whose name the protest is made or his representative.
(4) The onus of establishing the grounds of a protest under this section lies on the person making the protest.
(5) Where a protest is made to the Registrar under this section, he shall cause an investigation to be made into the matter and render a decision.
(6) For the purposes of this section, the Registrar may receive such evidence on oath, on affidavit or in any other manner, whether or not admissible in a court of law, as in his discretion he sees fit or deems just.
(7) Subject to section 14.3, the decision of the Registrar under subsection (5) is final and conclusive.
14.3 (1) Within six months after the Registrar renders a decision on a protest under section 14.2,
(a) in the case of a protest in respect of the Band List of a band, the council of the band, the person by whom the protest was made, or the person in respect
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Protestations
14.2 ( l) Une protestation peut être formulée, par avis écrit au registraire renfermant un bref exposé des motifs invoqués, contre l'inclusion ou l'addition du nom d'une personne dans le registre des Indiens ou une liste de bande tenue au ministère ou contre l'omission ou le retranchement de son nom de ce registre ou d'une telle liste dans les trois ans suivant soit l'inclusion ou l'addition, soit l'omission ou le retranchement.
(2) Une protestation peut être formulée en vertu du présent article à l'égard d'une liste de bande par le conseil de cette bande, un membre de celle-ci ou la personne dont le nom fait l'objet de la protestation ou son représentant.
(3) Une protestation peut être formulée en vertu du présent article à l'égard du registre des Indiens par la personne dont le nom fait l'objet de la protestation ou son représentant.
(4) La personne qui formule la protestation prévue au présent article a la charge d'en prouver le bien-fondé.
(5) Lorsqu'une protestation lui est adressée en vertu du présent article, le registraire fait tenir une enquête sur la question et rend une décision.
(6) Pour l'application du présent article, le registraire peut recevoir toute preuve présentée sous serment, sous déclaration sous serment ou autrement, si celui-ci, à son appréciation, l'estime indiquée ou équitable, que cette preuve soit ou non admissible devant les tribunaux.
(7) Sous réserve de l'article 14.3 la décision du registraire visée au paragraphe (5) est finale et péremptoire.
14.3 (1) Dans les six mois suivant la date de la décision du registraire sur une protestation prévue à l'article 14.2 : a) soit, s'il s'agit d'une protestation formulée à l'égard d'une liste de bande, le conseil de la bande, la personne qui a formulé la protestation ou la personne |
of whose name the protest was made or his representative, or (b) in the case of a protest in respect of the Indian Register, the person in respect of whose name the protest was made or his representative, may, by notice in writing, appeal the decision to a court referred to in subsection (5).
(2) Where an appeal is taken under this section, the person who takes the appeal shall forthwith provide the Registrar with a copy of the notice of appeal.
(3) On receipt of a copy of a notice of appeal under subsection (2), the Registrar shall forthwith file with the court a copy of the decision being appealed together with all documentary evidence considered in arriving at that decision and any recording or transcript of any oral proceedings related thereto that were held before the Registrar. (4) The court may, after hearing an appeal under this section, (a) affirm, vary or reverse the decision of the Registrar; or (b) refer the subject-matter of the appeal back to the Registrar for reconsideration or further investigation.
(5) An appeal may be heard under this section
(a) in the Province of Prince Edward Island, the Yukon Territory or the Northwest Territories, before the Supreme Court; (b) in the Province of New Brunswick, Manitoba, Saskatchewan or Alberta, before the Court of Queen's Bench; (c) in the Province of Quebec, before the Superior Court for the district in which the band is situated or in which the person who made the protest resides, or for such other district as the Minister may designate; or
(d) in any other province, before the county or district court of the county or district in which the band is situated or in which the person who made the protest resides, or of such other county or district as the Minister may designate.» |
dont le nom fait l'objet de la protestation ou son représentant, b) soit, s'il s'agit d'une protestation formulée à l'égard du registre des Indiens, la personne dont le nom a fait l'objet de la protestation ou son représentant, peuvent, par avis écrit, interjeter appel de la décision à la cour visée au paragraphe (5).
(2) Lorsqu'il est interjeté appel en vertu du présent article, l'appelant transmet sans délai au registraire une copie de l'avis d'appel.
(3) Sur réception de la copie de l'avis d'appel prévu au paragraphe (2), le registraire dépose sans délai à la cour une copie de la décision en appel, toute la preuve documentaire prise en compte pour la décision, ainsi que l'enregistrement ou la transcription des débats devant le registraire. (4) La cour peut, à l'issue de l'audition de l'appel prévu au présent article : a) soit confirmer, modifier ou renverser la décision du registraire; b) soit renvoyer la question en appel au registraire pour réexamen ou nouvelle enquête.
(5) L'appel prévu au présent article peut être entendu : a) dans la province de l'Île-du-Prince-Édouard, le territoire du Yukon et les territoires du Nord-Ouest, par la Cour suprême; b) dans la province du Nouveau-Brunswick, du Manitoba, de la Saskatchewan ou d'Alberta, par la Cour du Banc de la Reine; c) dans la province de Québec, par la Cour supérieure du district où la bande est située ou dans lequel réside la personne qui a formulé la protestation, ou de tel autre district désigné par le Ministre;
d) dans les autres provinces, par un juge de la cour de comté ou de district du comté ou du district où la bande est située ou dans lequel réside la personne qui a formulé la protestation, ou de tel autre comté ou district désigné par le Ministre.» |
5. Loi favorisant l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens en donnant suite à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), L.C. 2010, c. 18:
«1. This Act may be cited as the Gender Equity in Indian Registration Act.
INDIAN ACT
2. (1) The portion of subsection 6(1) of the French version of the Indian Act before paragraph (a) is replaced by the following:
6. (1) Sous réserve de l’article 7, toute personne a le droit d’être inscrite dans les cas suivants :
(2) Paragraph 6(1)(a) of the Act is replaced by the following:
(a) that person was registered or entitled to be registered immediately prior to April 17,1985;
(3) Paragraph 6(1)(c) of the Act is replaced by the following: (c) the name of that person was omitted or deleted from the Indian Register, or from a band list prior to September 4, 1951, under subparagraph 1 2 ( 1 ) ( a ) (iv) , paragraph 12(1)(b) or subsection 12(2) or under sub- paragraph 12(1)(a)(iii) pursuant to an order made under subsection 109(2), as each provision read immediately prior to April 17, 1985, or under any former provision of this Act relating to the same subject-matter as any of those provisions;
(c.1) that person (i) is a person whose mother’s name was, as a result of the mother’s marriage, omitted or deleted from the Indian Register, or from a band list prior to September 4, 1951, under paragraph 12(1)(b) or under subparagraph 12(1)(a)(iii) pursuant to an order made under subsection 109(2), as each provision read immediately prior to April 17, 1985, or under any former provision of this Act relating to the same subject-matter as any of those provisions,
(ii) is a person whose other parent is not entitled to be registered or, if no longer living, was not at the time of death entitled to be registered or was not an Indian at that time if the death occurred prior to September 4, 1951,
(iii) was born on or after the day on which the marriage referred to in subparagraph (i) occurred and, unless the person’s parents married each other prior to April 17, 1985, was born prior to that date, and
(iv) had or adopted a child, on or after September 4, 1951, with a person who was not entitled to be registered on the day on which the child was born or adopted;
(4) Subsection 6(3) of the Act is amended by striking out “and” at the end of paragraph (a), by adding “and” at the end of paragraph (b) and by adding the following after paragraph (b):
(c) a person described in paragraph (1)(c.1) and who was no longer living on the day on which that paragraph comes into force is deemed to be entitled to be registered under that paragraph.
3. Section 11 of the Act is amended by adding the following after subsection (3):
(3.1) A person is entitled to have the person’s name entered in a Band List maintained in the Department for a band if the person is entitled to be registered under paragraph 6(1)(c.1) and the person’s mother ceased to be a member of that band by reason of the circumstances set out in subparagraph 6(1)(c.1)(i).
REPORT TO PARLIAMENT
3.1 (1) The Minister of Indian Affairs and Northern Development shall cause to be laid before each House of Parliament, not later than two years after this Act comes into force, a report on the provisions and implementation of this Act.
(2) Such committee of Parliament as may be designated or established for the purposes of this subsection shall, forthwith after the report of the Minister is tabled under subsection (1), review that report and shall, in the course of that review, undertake a review of any provision of this Act.
RELATED PROVISIONS
4. In sections 5 to 8, “band”, “Band List”, “council of a band”, “registered” and “Registrar” have the same meaning as in subsection 2(1) of the Indian Act.
5. For greater certainty, subject to any deletions made by the Registrar under subsection 5(3) of the Indian Act, any person who was, immediately before the day on which this Act comes into force, registered and entitled to be registered under paragraph 6(1)(a) or (c) of the Indian Act continues to be registered.
6. For greater certainty, for the purposes of paragraph 6(1)(f) and subsection 6(2) of the Indian Act, the Registrar must recognize any entitlements to be registered that existed under paragraph 6(1)(a) or (c) of that Act immediately before the day on which this Act comes into force.
7. For greater certainty, subject to any membership rules established by a band, any person who, immediately before the day on which this Act comes into force, was entitled to be registered under paragraph 6(1)(a) or (c) of the Indian Act and had the right to have their name entered in the Band List maintained by that band continues to have that right. 8. For greater certainty, subject to any membership rules established by a band on or after the day on which this Act comes into force, any person who is entitled to be registered under paragraph 6(1)(c.1) of the Indian Act, as enacted by subsection 2(3), and who had, immediately before that day, the right to have their name entered in the Band List maintained by that band continues to have that right.
9. For greater certainty, no person or body has a right to claim or receive any compensation, damages or indemnity from Her Majesty in right of Canada, any employee or agent of Her Majesty, or a council of a band, for anything done or omitted to be done in good faith in the exercise of their powers or the performance of their duties, only because
(a) a person was not registered, or did not have their name entered in a Band List, immediately before the day on which this Act comes into force; and
(b) one of the person’s parents is entitled to be registered under paragraph 6(1)(c.1) of the Indian Act, as enacted by subsection 2(3).
COMING INTO FORCE
10. This Act comes into force, or is deemed to have come into force, on a day, on or after April 5, 2010, to be fixed by order of the Governor in Council.»
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«1. Loi sur l’équité entre les sexes relativement à l’inscription au registre des Indiens.
LOI SUR LES INDIENS
2. (1) Le passage du paragraphe 6(1) de la version française de la Loi sur les Indiens précédant l’alinéa a) est remplacé par ce qui suit :
6. (1) Sous réserve de l’article 7, toute personne a le droit d’être inscrite dans les cas suivants :
(2) L’alinéa 6(1)a) de la même loi est remplacé par ce qui suit :
a) elle était inscrite ou avait le droit de l’être le 16 avril 1985;
(3) L’alinéa 6(1)c) de la même loi est remplacé par ce qui suit: c) son nom a été omis ou retranché du registre des Indiens ou, avant le 4 septembre 1951, d’une liste de bande, en vertu du sous-alinéa 12(1)a)(iv), de l’alinéa 12(1)b) ou du paragraphe 12(2) ou en vertu du sous-alinéa12(1)a)(iii) conformément à une ordonnance prise en vertu du paragraphe 109(2), dans leur version antérieure au 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui d’une de ces dispositions;
c.1) elle remplit les conditions suivantes : (i) le nom de sa mère a été, en raison du mariage de celle-ci, omis ou retranché du registre des Indiens ou, avant le 4 septembre 1951, d’une liste de bande, en vertu de l’alinéa 12(1)b) ou en vertu du sous-alinéa 12(1)a)(iii) conformément à une ordonnance prise en vertu du paragraphe 109(2), dans leur version antérieure au 17 avril 1985, ou en vertu de toute disposition antérieure de la présente loi portant sur le même sujet que celui d’une de ces dispositions,
(ii) son autre parent n’a pas le droit d’être inscrit ou, s’il est décédé, soit n’avait pas ce droit à la date de son décès, soit n’était pas un Indien à cette date dans le cas d’un décès survenu avant le 4 septembre 1951,
(iii) elle est née à la date du mariage visé au sous-alinéa (i) ou après cette date et, à moins que ses parents se soient mariés avant le 17 avril 1985, est née avant cette dernière date,
(iv) elle a eu ou a adopté, le 4 septembre 1951 ou après cette date, un enfant avec une personne qui, lors de la naissance ou de l’adoption, n’avait pas le droit d’être inscrite;
(4) Le paragraphe 6(3) de la même loi est modifié par adjonction, après l’alinéa b), de ce qui suit :
c) la personne visée à l’alinéa (1)c.1) et qui est décédée avant l’entrée en vigueur de cet alinéa est réputée avoir le droit d’être inscrite en vertu de celui-ci.
3. L’article 11 de la même loi est modifié par adjonction, après le paragraphe (3), de ce qui suit :
(3.1) Toute personne a droit à ce que son nom soit consigné dans une liste de bande tenue pour celle-ci au ministère si elle a le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa 6(1)c.1) et si sa mère a cessé d’être un membre de la bande en raison des circonstances prévues au sous-alinéa 6(1)c.1)(i).
RAPPORT AU PARLEMENT
3.1 (1) Au plus tard deux ans après la date d’entrée en vigueur de la présente loi, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien fait déposer devant chaque chambre du Parlement un rapport sur les dispositions de la présente loi et sa mise en œuvre. (2) Le comité parlementaire désigné ou constitué pour l’application du présent paragraphe examine sans délai le rapport visé au paragraphe (1) après son dépôt. Dans le cadre de l’examen, le comité procède à la révision des dispositions de la présente loi.
DISPOSITIONS CONNEXES
4. Aux articles 5 à 8, « bande », « conseil de bande », « inscrit », « liste de bande » et « registraire » s’entendent au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur les Indiens.
5. Il est entendu que, sous réserve de tout retranchement effectué par le registraire en vertu du paragraphe 5(3) de la Loi sur les Indiens, toute personne qui, à l’entrée en vigueur de la présente loi, était inscrite et avait le droit de l’être en vertu des alinéas 6(1)a) ou c) de la Loi sur les Indiens le demeure.
6. Il est entendu que, pour l’application de l’alinéa 6(1)f) et du paragraphe 6(2) de la Loi sur les Indiens, le registraire est tenu de reconnaître tout droit d’être inscrit qui existait en vertu des alinéas 6(1)a) ou c) de cette loi à l’entrée en vigueur de la présente loi.
7. Il est entendu que, sous réserve des règles d’appartenance fixées par la bande, toute personne qui, à l’entrée en vigueur de la présente loi, avait le droit d’être inscrite en vertu des alinéas 6(1)a) ou c) de la Loi sur les Indiens et avait droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de bande tenue par celle-ci conserve le droit à ce que son nom y soit consigné. 8. Il est entendu que, sous réserve des règles d’appartenance fixées par la bande à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente loi, toute personne qui a le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa 6(1)c.1) de la Loi sur les Indiens, édicté par le paragraphe 2(3), et qui, à cette date, avait droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de bande tenue par celle-ci conserve le droit à ce que son nom y soit consigné.
9. Il est entendu qu’aucune personne ni aucun organisme ne peut réclamer ou recevoir une compensation, des dommages-intérêts ou une indemnité de l’État, de ses préposés ou mandataires ou d’un conseil de bande en ce qui concerne les faits — actes ou omissions — accomplis de bonne foi dans l’exercice de leurs attributions, du seul fait qu’une personne n’était pas inscrite — ou que le nom d’une personne n’était pas consigné dans une liste de bande — à l’entrée en vigueur de la présente loi et que l’un de ses parents a le droit d’être inscrit en vertu de l’alinéa 6(1)c.1) de la Loi sur les Indiens, édicté par le paragraphe 2(3).
ENTRÉE EN VIGUEUR
10. La présente loi entre en vigueur ou est réputée être entrée en vigueur à la date fixée par décret, laquelle ne peut être antérieure au 5 avril 2010.»
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6. Loi sur les Indiens, L.R.C. (1985), c. I-5, art. 6 (tel qu'en vigueur actuellement):
(2) Sous réserve de l’article 7, une personne a le droit d’être inscrite si l’un de ses parents a le droit d’être inscrit en vertu du paragraphe (1) ou, s’il est décédé, avait ce droit à la date de son décès.
(3) Pour l’application de l’alinéa (1)f) et du paragraphe (2) :
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(2) Subject to section 7, a person is entitled to be registered if that person is a person one of whose parents is or, if no longer living, was at the time of death entitled to be registered under subsection (1).
(3) For the purposes of paragraph (1)(f) and subsection (2),
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[1] 2009 BCCA 153.
[2] L.C. 1985, c. 27. Afin de faciliter la compréhension du présent jugement, il sera référé à cette loi comme « La Loi de 1985 ». De même, il sera référé aux lois suivantes comme suit: - Loi sur les Indiens, S.R.C. 1927, c.98 « la Loi de 1927 »; - Loi sur les Indiens, S.C. 1951, c. 29, « la Loi de 1951 »; - Loi favorisant l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens en donnant suite à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Norther Affairs), L.C. 2010, c. 18, « la Loi de 2010 »; - Loi sur les Indiens, L.R.C. (1985), c. I-5, soit la Loi sur les Indiens telle qu'en vigueur actuellement, « la Loi ».
[3] McIvor c. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), précité, note 1, par. 14 à 23.
[4] Loi de 1927, alinéa 2 e) dans la version française, reproduite plus haut, et 2 d) dans la version anglaise. L'enfant pouvait toutefois être exclu de la bande suivant l'art. 12, à moins qu'il ait bénéficié de sommes attribuées à la bande avec le consentement de celle-ci pour une période de deux ans.
[5] C'est l'interprétation donnée par la Cour suprême de l'alinéa 11(1)(c) dans la décision très partagée rendue dans l'affaire Martin c. Chapman, [1983] 1 R.C.S. 365.
[6] 2000 BCCA 642, par. 38 à 43.
[7] Id., par. 44.
[8] McIvor v. The Registrar Indian and Northern Affairs Canada, 2007 BCSC 827, des motifs additionnels quant au remède étant publiés à 2007 BCSC 1732.
[9] C'est du moins l'interprétation que la CACB a faite du remède accordé par la juge de première instance aux paragraphes 152 et 153 de sa décision dans McIvor. Le Tribunal a quelques réserves à l'égard de cette caractérisation mais cette question n'a pas d'impact ici.
[10] McIvor c. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), précité, note 1, par. 93, 122, 151, 154 à 156, 161 et 165.
[11] McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), 2010 BCCA 168, par. 14.
[12] McIvor c. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), 2010 BCCA 338, par. 6 et 8.
[13] Huitième requête introductive d'instance amendée, 6 février 2015, p. 28. Le Tribunal note au passage que le PGC s'était objecté aux amendements faits à l'audience et que ceux-ci ont été permis tout en réservant au PGC la possibilité de demander l'administration d'une preuve additionnelle à leur sujet. Le PGC a choisi de ne pas faire une telle demande.
[14] Pièce P-59, cette décision mentionnant explicitement n'avoir aucun impact sur son statut en droit civil.
[15] Huitième requête introductive d'instance amendée, 6 février 2015, p.28-29.
[16] Que le mariage de Susan Yantha soit valide ou non n'a pas d'importance à cet égard. Le Tribunal reviendra sur la question de la validité du mariage soulevée en défense plus loin, lorsqu'il sera question de la discrimination à l'endroit de Susan et Tammy Yantha.
[17] Par. 303 de la défense ré-amendée du PGC.
[18] Hall c. Hébert, [1993] 2 R.C.S. 159, p. 202.
[19] 2015 CSC 5, par. 44.
[20] [1993] 3 R.C.S. 519.
[21] Carter c. Canada (Procureur général), précité, note 19, par. 48.
[22] [2011] 1 R.C.S. 396.
[23] R. c. Kapp, [2008] 2 R.C.S. 483, par.17. Voir aussi le jugement de la juge Abella, majoritaire en ce qui concerne l'ar.15, dans Québec (P.G.) c. A., [2013] 1 R.C.S. 61, par. 323 à 330.
[24] [1999] 1 R.C.S. 497.
[25] Voir, par exemple, les paragraphes 199 à 220 de la decision de la CSCB en première instance, McIvor c. The Registrar Indian and Northern Affairs Canada, précité note 8.
[26] McIvor v. The Registrar, Indian and Northern Affairs Canada, précité note 8, par. 176 à 193.
[27] McIvor c. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), précité, note 1, par. 70 à 74 et 91 à 94.
[28] McIvor v. The Registrar, Indian and Northern Affairs Canada, précité, note 8, par. 144 à 158.
[29] McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), précité, note 1, par. 47 à 62.
[30] Withler c. Canada (P.G.), précité, note 22, par.30.
[31] Première Nation de Kahkewistahaw c. Taypotat, 2015 CSC 30, par. 16 à 21.
[32] Withler c. Canada (Procureur général), précité note 22, par. 39 et 40.
[33] Ceci n'implique pas pour autant que le législateur ne puisse considérer les impacts parfois différents de la Loi sur des personnes apparentées, par exemple des cousins, pour des raisons d'équité même sans qu'il soit question de discrimination. Le rôle du Tribunal se limite cependant à contrôler la constitutionnalité de l'article 6 sans égard aux questions pouvant relever de l'équité.
[34] McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), précité note 1, par. 76 à 79, 154, 161 et 165.
[35] Id., par. 137.
[36] Les demandeurs Descheneaux et Tammy Yantha n'ont pas allégué la discrimination dans leur capacité de transmettre le statut d'Indien à leurs petits-enfants. En conséquence, ils n'ont pas demandé à considérer comme groupe comparateur des personnes devant être exclues suivant la règle de la double-mère et qui se seraient mariées à une non-Indienne avant leurs 21 ans et avant 1985. La présente décision ne traite donc pas de cette question. Il faut par ailleurs souligner que la plupart des personnes devant être exclues suivant la règle de la double-mère ne se sont probablement mariées qu'après 21 ans, si elles l'ont fait. Dans une telle hypothèse, elles ne pouvaient donner le statut d'Indienne à leur épouse non-Indienne, l'ayant déjà perdu au moment de leur mariage. Les personnes mariées après 1985 ne le pouvaient évidemment plus non plus. Chose certaine, la possibilité de reporter à une autre génération des avantages conférés par la Loi de 1985 aux personnes à qui la règle de la double-mère s'appliquait et qui se sont mariées avant 1985 devient irréaliste à un moment.
[37] Sous réserve d'exemptions, tel que déjà mentionné.
[38] Grismer s'est marié en 1999 avec une non-Indienne, mais leurs enfants sont nés en 1991 et en 1993. Voir la décision de première instance dans McIvor, McIvor v. The Registrar, Indian and Northern Affairs Canada, précitée note 8, au paragraphe 97.
[39] McIvor c. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), précité, note 1, par. 72 à 74, 83 à 86, 90 à 93, 111, 112 , 117, 154 à 156, 161 et 165.
[40] Id., par. 141-142.
[41] Précitée, note 5.
[42] Voir la note 40 du présent jugement et le texte correspondant.
[43] [1986] 1 R.C.S. 103.
[44] Voir Carter c. Canada (Procureur général), précité note 19, par. 102, et la jurisprudence mentionnée à ce paragraphe.
[45] McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), précité note 1, par. 123 à 133.
[46] Voir la décision de la CSCB dans McIvor, McIvor v. The Registrar, Indian and Northern Affairs Canada, précité note 8, par. 312 à 314.
[47] Corbière c. Canada (Ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), [1999] 2 R.C.S. 203, par. 17 et 18.
[48] Voir sur cette question l'analyse nuancée du juge Binnie qui a rédigé les motifs de la Cour suprême dans Terre-Neuve (Conseil du Trésor) c. N.A.P.E., [2004] 3 R.C.S. 381, aux paragraphes 59 et suivants, invitant notamment les tribunaux à continuer de faire « montre d'un grand scepticisme à l'égard des tentatives de justifier, par des restrictions budgétaires, des atteintes à des droits garantis par la Charte » puisqu'il « y a toujours des restrictions budgétaires et que le gouvernement a toujours d'autres priorités urgentes » tout en indiquant que ceux-ci ne peuvent fermer les yeux sur les crises financières périodiques (par. 72).
[49] Dans le présent dossier, les impacts de la Loi de 1985 de même que différents scénarios d'augmentation de la population des personnes ayant droit à l'inscription et leurs impacts budgétaires en tenant pour acquis le maintien des mêmes avantages sur le plan de la santé et des bénéfices reliés à l'éducation postsecondaire ont été examinés par l'expert Stewart Clatworthy dans son rapport D-276 modifié et ont fait l'objet de son témoignage à l'audience en défense. L'aspect coûts n'a pu être examiné quant à tous les scénarios soumis et comporte plusieurs réserves. Les scénarios examinés ne correspondent pas nécessairement exactement à ce qui est envisagé dans le présent jugement et sont libellés comme s'il y avait lieu de modifier rétroactivement les lois antérieures à 1985, ce qui n'est pas le cas, tel que vu précédemment. Cet expert a également produit un autre rapport plus récent sous D-277 mais la question des coûts n'y a pas été mise à jour. Par ailleurs, rien au dossier n'indique que le législateur a considéré une analyse détaillée des coûts avant de légiférer en 1985. Notons que le même expert a également témoigné pour la partie demanderesse sur une autre question.
[50] McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), précité note 1, par. 132 à 134.
[51] Carter c. Canada (Procureur général), précité note 19, par. 102.
[52] McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), précité note 1, par. 140 à 143.
[53] Notes et autorités du PGC, par. 106 à 108.
[54] Voir notamment le par. 62 des représentations écrites du PGC soumises quant à la question soulevée par le juge Groberman lors de l'audience, pièce P-50.
[55] Voir les paragraphes 189 à 196 de la huitième requête amendée et les conclusions de celle-ci.
[56] Centre québécois du droit de l'environnement c. Junex, J.E. 2014-850 (C.A.), par. 28, Québec (Ville) c. Québec (Curateur public), [2001] R.J.Q. 954 (C.A.), par. 41 et 42 et Syndicat canadien des communications de l'énergie et du papier c. St-Jean, J.E. 2006-591 (C.A.), par. 43.
[57] Schachter c. Canada, [1992] 2 R.C.S. 679, p. 715-716.
[58] Voir les notes 48 et 49 et le texte correspondant.
[59] Pièces P-20 et P-21 et témoignage de Stewart Clatworthy à l'audience en demande.
[60] La juge de première instance fait état, dans ses motifs additionnels sur le remède, de discussions à ce sujet dès le début des années 70, McIvor v. The Registrar Indian and Northern Affairs Canada, précité, note 8.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.