Odinstova c. Investissement Pasquale Germano inc. | 2022 QCCQ 3823 | ||||||
COUR DU QUÉBEC | |||||||
« Division administrative et d’appel » | |||||||
CANADA | |||||||
PROVINCE DE QUÉBEC | |||||||
DISTRICT DE | MONTRÉAL | ||||||
LOCALITÉ DE | MONTRÉAL | ||||||
« Chambre civile » | |||||||
N° : | 500-80-042623-224 | ||||||
| |||||||
DATE : | 13 juin 2022 | ||||||
______________________________________________________________________ | |||||||
| |||||||
SOUS LA PRÉSIDENCE DE | L’HONORABLE | DAVID L. CAMERON, J.C.Q. | |||||
______________________________________________________________________ | |||||||
| |||||||
| |||||||
Olga ODINSTOVA | |||||||
-et- | |||||||
Christian ROY | |||||||
Partie demanderesse/Requérante | |||||||
c. | |||||||
| |||||||
INVESTISSEMENT PASQUALE GERMANO INC. | |||||||
Partie défenderesse/Intimée | |||||||
| |||||||
-et- | |||||||
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT | |||||||
Partie mise en cause | |||||||
______________________________________________________________________ | |||||||
| |||||||
JUGEMENT | |||||||
______________________________________________________________________ | |||||||
| |||||||
[2] La décision accueille en partie la demande de la locatrice en résiliant le bail et, en ordonnant l’expulsion des locataires et de tous les occupants du logement. Elle condamne également les locataires à des dommages-intérêts de 661,11$ avec intérêts, indemnité et les frais.
[3] L’intimé, la locatrice, s’oppose à la requête comme étant tardive et, subsidiairement, parce qu’elle ne soulève aucune question susceptible d’appel.
[4] Sur le premier motif d’opposition, la tardiveté, l’intimé soulève le fait que la requête n’a été déposée et signifiée que le 15 mars 2022, plus de 30 jours de la signature de la décision, précisément une journée après l’expiration du délai.
[5] Les requérants soutiennent que leur procédure n’est pas tardive, ayant été signifiée et déposée à l’intérieur des 30 jours de leur réception, et donc de leur connaissance, de la décision, citant la jurisprudence majoritaire menant à Hardy c. Dufour[1] et généralement suivi depuis[2]. Cette jurisprudence interprète l’expression « date de la décision » se trouvant à l’article
[6] Le procureur de l’intimé, citant une jurisprudence récente[5], suggère au Tribunal de suivre une nouvelle approche qui adopte comme principe que le délai de 30 jours court à compter de la date de la signature de la décision, quel que soit le moment où la partie voulant la porter en appel en a reçu connaissance.
[7] Le débat, qui était d’actualité en 2013, portait, comme c’est le cas pour une nouvelle fois maintenant, sur l’intention du législateur en adoptant, en 1981, l’expression « date de la décision ». Dans l’affaire Hardy c. Dufour[6], on lit qu’en adoptant ce terme, le législateur a rendu le vocabulaire de la L.R.L. identique à celui du Code de procédure à l’article
[8] Cette expression « date du jugement » se retrouve dans toutes les anciennes versions de l’article 494 C.p.c depuis l’adoption de ce qui était alors le « nouveau » code de procédure en 1965.
[9] Lorsque le législateur a adopté cette expression dans la Loi sur la Régie du logement, il était conscient de l’interprétation constante de cette expression de la part de Cour d’appel. Voici le raisonnement du Tribunal dans l’affaire Hardy c. Dufour[7] :
[32] La Cour d'appel adhère, depuis l'adoption du « nouveau » Code de procédure civile de 1965, à l'interprétation de cette phrase qui est conforme à ce qui prévalait sous l'ancien code, exprimée ainsi:
Réduite à sa plus simple expression, la règle suivie par la Cour sur le point de départ de la computation du délai d'appel est celle de la date de la connaissance du jugement.
[33] Ne fait pas entrave à cette interprétation l'emploi d'un vocabulaire différent dans les dispositions traitant de la rétractation du jugement, où le point de départ du délai est établi par la « connaissance »:
484. La requête en rétractation, signifiée à toutes les parties en cause avec avis du jour où elle sera présentée à un juge pour réception, doit être produite dans les 15 jours, à compter, selon le cas, du jour où la partie a acquis connaissance du jugement, où est disparue la cause qui l'empêchait de produire sa défense, où la partie a acquis connaissance de la preuve nouvelle, de la fausseté de la pièce ou du dol de la partie adverse, où a été découverte la pièce décisive, ou encore du jour où a été rendu le jugement désavouant l'acte non autorisé.
[34] On retrouve le même vocabulaire, dans une forme simplifiée, dans les dispositions qui régissent le délai pour la requête en rétractation de la L.R.L.:
89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.
Demande en rétractation.
Une partie peut également demander la rétractation d'une décision lorsque la Régie a omis de statuer sur une partie de la demande ou s'est prononcée au-delà de la demande.
Délai.
La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l'empêchement.
Demande de rétractation.
La demande de rétractation suspend l'exécution de la décision et interrompt le délai d'appel ou de révision jusqu'à ce que les parties aient été avisées de la décision.
1979, c. 48, a. 89; 1984, c. 47, a. 139.
[35] Dans les nouvelles versions de la L.R.L., soit celles de 1981 et l'actuelle version, la dichotomie entre le vocabulaire utilisé pour le délai pour former la requête pour permission d'appeler et le délai pour la requête en rétractation est la même que le législateur a créée dans le Code de procédure civile.
[36] Il est donc permis de penser que le législateur a voulu standardiser la rédaction de la L.R.L pour la rendre cohérente avec celle du C.p.c. en ce que le calcul de ces deux délais est concerné. En remplaçant, en 1981, la phrase « réception de la décision » par « date de la décision », le législateur n'est pas censé avoir ignoré comment la Cour d'appel avait toujours, depuis plusieurs générations, interprété la phrase « la date du jugement ».
[37] Nous croyons que c'est le cas, même si le législateur a, plus tard, en 1996, supprimé la discrétion qu'avait autrefois la Cour du Québec, de permettre un appel en dehors du délai. En rendant le délai de rigueur, le législateur n'a pas touché à son calcul. [Notes de bas de page omises]
[10] Il devient alors difficile de suivre la nouvelle jurisprudence qui serait basée sur une modification du Code de procédure civile actuel qui ne s’applique pas au TAL, anciennement la Régie du Logement.
[11] Selon les tenants de la nouvelle approche, il serait temps de revenir sur l’interprétation téléologique de la Cour d’appel suivie par la Cour du Québec en faveur d’une interprétation plus littérale selon laquelle, la « date de la décision » équivaut à la date de la signature.
[12] Nous ne voudrions pas décortiquer et déconstruire toutes les étapes du raisonnement de la nouvelle jurisprudence, mais plutôt énoncer, en tout respect, les obstacles les plus importants à l’adoption de celle-ci.
[13] En premier lieu, un jugement, dans la tradition procédurale, était rendu séance tenante en présence des parties. La date de la décision est donc la date de la connaissance de la décision. Un jugement écrit peut être lu en salle de cour, mais, en matière civile, il est normalement expédié aux parties par la poste. Selon la Cour d’appel, la date du jugement est alors la date où les parties en sont informées dans les deux cas. La date de la signature du jugement n’est peut-être pas la seule interprétation textuelle de l’expression « date de la décision ». On pourrait dire que le jugement, avant tout un acte de communication, existe et à sa date lorsque la communication est reçue.
[14] En deuxième lieu, considérer comme sans pertinence la date de la connaissance de la réception de la décision peut faire perdre complètement un droit d’appel si une lenteur du service postal ou une incapacité de la partie l’empêche. Rappelons que, selon une jurisprudence constante, le délai en est un de déchéance d’une façon absolue, sans possibilité pour le juge de relever une poste de son défaut, à l’opposé de la norme générale en matière procédurale. C’est la lecture qui s’impose de l’article 93 L.T.A.L., la notion d’une date de rigueur qui emporte déchéance, sans aucune possibilité de relever une partie du défaut.
[15] Il n’est pas rare qu’une décision de la Régie du logement (maintenant connue sous le nom du TAL) n’est expédiée que des journées, voire des semaines après la signature.
[16] Il s’en suit que le délai d’appel est alors considérablement réduit, et ce, de façon inégale d’un cas à l’autre. Une inégalité devant la loi en résulte : certains justiciables auraient un délai effectif de 25 jours, d’autres de 20 jours et, dans un certain nombre de cas, un délai trop court pour être utile. Pourtant, l’intention manifeste du législateur était de créer un délai court, mais utile et égal à tous. En matière d’accès à la justice, on ne peut prêter une intention législative qui épouserait l’arbitraire et qui serait draconienne.
[17] Certes, l’intention du législateur était d’encadrer et de limiter le droit d’appel en l’assujettissant à un filtre. Rappelons que dans la procédure initiale créée pour la Régie du Logement, l’appel à la Cour du Québec était, en principe, de plano et de novo.
[18] Or, le droit à l’appel, même plus restreint, demeure un droit, lorsqu’un juge est de l’avis que « la question en jeu en est une qui devrait être soumise à la Cour du Québec », l’expression générale utilisée à l’article 91 L.T.A.L.
[19] Sans entrer en détail dans la déclination de ce concept général dans des normes plus spécifiques, il suffit de dire que les questions autorisées le sont d’une façon qui n’est pas trop large, ni trop étroite : le juge est guidé par une jurisprudence riche en exemples de questions méritoires, à autoriser et de questions sans intérêt à filtrer. À ce filtre, qui est substantiel, il n’est pas nécessaire d’ajouter un élément arbitraire.
[20] La nouvelle jurisprudence, prend comme direction, le nouveau point de départ du Code de procédure civile, une loi de portée générale, soit « la date de l’avis de jugement » qui se trouve maintenant dans l’article
[21] La portée de ce nouveau point de départ est définie par la Cour d’appel comme la date apparaissant à l’avis de jugement, lequel est généré lorsque le jugement est inscrit, et non la date du jugement dans l’ancien sens. Ce n’est pas non plus la date de signature. Il est vrai que la Cour d’appel dans Martineau c. Ouellet[9] a interprété l’expression « avis de jugement » d’une nouvelle façon, mais elle l’a fait en relation avec une nouvelle disposition législative portant une nouvelle intention législative et une nouvelle norme procédurale. Si la Cour d’appel n’avait pas donné cette interprétation au C.p.c. à la nouvelle disposition, celle-ci n’aurait pas eu d’effet de modification, car la date de la réception de l’avis fût la même que la date de la réception du jugement. La Cour d’appel confirme, par son interprétation, qu’en changeant le texte pour la date de « l’avis », le législateur avait comme intention de modifier la loi, une conclusion évidente.
[22] Le législateur, en optant pour ce nouveau point de départ, n’a quand même point introduit une règle similaire applicable aux appels du TAL. On le sait, parce qu’aucun amendement n’a été adopté dans la Loi sur le Tribunal administratif du logement. Il aurait été difficile pour le législateur de faire le même amendement, car, dans la procédure du TAL, il n’existe pas d’avis de jugement. Pourquoi, alors, penser qu’il y avait une intention législative de changer cette loi? Les principes très établis d’interprétation législative applicables ici nous enseignent que la modification d’une loi de portée générale, comme le Code de procédure civile, ne crée pas une modification corrélative d’une loi d’une portée spécifique comme la « L.T.A.L. » [10] :
1263. En principe donc, la loi postérieure l’emporte. Ce principe comporte une exception lorsque la loi antérieure apparait être de nature spéciale par rapport à la loi la plus récente. Dans ce cas, la loi générale postérieure est réputée ne pas déroger à la loi spéciale antérieure: generalia specialibus non derogant.
1264. Le raisonnement sur lequel on fait reposer cette présomption est le plus souvent présenté ainsi:
« [TRADUCTION] Lorsque le législateur, après avoir considéré une question particulière, édicte des dispositions, on présume qu’une loi générale postérieure n’est pas destinée à remettre en cause les dispositions particulières, à moins que cette intention ne soit manifestée clairement. » 345
1265. On peut également voir dans la priorité de la loi spéciale antérieure sur la loi générale plus récente une application du principe général de l'effet utile. En accordant préséance à la disposition spéciale, on se trouve à donner effet aux deux lois, a la loi antérieure pour les cas particuliers qu’elle a en vue et à la loi postérieure pour les autres cas, C’est en somme la solution d’économie qui est retenue.
1266. Bien que le Code civil ait, en droit privé, le caractère d’une loi fondamentale, il est bien établi qu’en principe, les dispositions du Code, une loi de portée générale, ne prévalent pas sur celles des lois particulières antérieures346, à moins, bien sûr que le législateur ne l’ait prévu formellement347.
1267. Si la loi spéciale l’emporte en principe sur la loi générale lorsqu’elle est antérieure à celle-ci, à plus forte raison aura-t-elle préséance sur la loi générale si elle lui est postérieure, tant et si bien qu’on peut affirmer un principe général de prédominance de la loi spéciale, dont les exemples d’application jurisprudentielle sont très nombreux348. On a, par exemple, jugé qu’une charte municipale déroge à la loi générale sur les municipalités349; qu'une loi applicable à certaines municipalités seulement l’emportait sur une loi applicable à l’ensemble de ces dernières350 ; qu’une disposition concernant l’appel sur une matière donnée déroge à un texte applicable à tous les appels351; qu’une loi qui déclare insaisissables certaines pensions particulières fait exception a des dispositions du Code de procédure civile concernant la saisissabilité des pensions352.
1268. Le principe de la primauté de la loi spéciale n’est pas applicable, faut-il le rappeler, si les lois en conflit apparent se révèlent compatibles ou si le législateur a édicté des dispositions expresses concernant la solution des conflits de lois,
1269. ll existe une situation où ces principes de hiérarchisation, dont generalia specialibus non derogant, ne trouvent pas application. Il s’agit de l’hypothèse où une des lois en conflit, qui peut par ailleurs être plus générale ou moins récente, consacre des droits fondamentaux. Exprimant des motifs concurrents dans l’arrêt Insurance Corporation of British Columbia c. Heerspink 353, le juge Lamer fut d’avis qu'une loi générale sur les droits et libertés de la personne devrait, sauf indication contraire claire, avoir préséance sur une autre loi en conflit, et ce, même si elle était spéciale. Cet obiter dans l’opinion majoritaire du juge Lamer a été consacré par la jurisprudence354. [Soulignements ajoutés]
______________
345 Lord Hobhouse dans Barber v. Edger, [1898] A.C. 748, 754, Cet extrait a été cité par Lord Wright dans City of Montreal v. Montreal Industrial Land Co., [1932] A.C. 700,707.
346 Perron-Malenfant c. Malenfant (Syndic de),
347 Doré c. Verdun (Ville),
348 Voir, entre autres, Québec (Procureure générale) c. E.D.,
349 City of Vancouver v. Bailey, (1895) 25 R.C.S. 62.
350 Carey c. Charron, [1966] B.R. 173,505555
351 Massicotte c. Boutin, {1969} R.C.S. 818; A.G. for Alberta v. Roskiwich, [1932] R.C.S,
352 Dionne c. Biron,
353 Insurance Corporation of British Columbia c. Heerspink,
354Voir notamment Canada (Chambre des communes) c. Vaid,
[23] En raison de la décision du législateur de ne pas modifier la L.T.A.L. pour la rendre conforme au Code de procédure civile il n’y a pas lieu pour les juges de notre cour de perturber l’interprétation de la notion de « date de la décision », interprétation qui est devenue constante et sans dissidence depuis 2013, sauf récemment.
[24] Bien qu’un juge de la Cour du Québec, en raison de son indépendance est libre d’exprimer son opinion sur un sujet dans son jugement, il n’y a pas nécessité pour les autres juges de même niveau de la suivre. Ceci étant, la norme, telle qu’évoquée dans l’affaire Hardy c. Dufour[11], était et demeure le résultat d’un travail collégial entrepris soigneusement par la Division administrative et d’appel[12].
[25] La question est présentement devant la Cour Supérieure dans deux dossiers de révision judiciaire[13]. Il est à espérer que les tribunaux supérieurs se prononceront bientôt sur la question maintenant qui, pour la première fois, a été portée devant ces juridictions. Le tout respectueusement soumis.
* * *
[26] Nous aborderons maintenant le deuxième moyen d’opposition, puisque le premier n’est pas maintenu.
[27] La décision que les locataires souhaitent porter en appel concerne les gestes et les comportements des locataires à l’égard de l’environnement des lieux. Il était question que les locataires nourrissaient des animaux, ce qui causait une nuisance et que M. Roy avait envers le locataire et envers le gestionnaire de l’immeuble un comportement qualifié de harcèlement.
[28] L’avocate des locataires énonce les questions à être débattues en appel comme suit :
Analyse
[29] Nous commençons par la troisième question portant sur la compétence. Il s’agit ici du problème de la source de la responsabilité invoquée. Le TAL n’a pas compétence pour statuer sur des recours extracontractuels entre différents locataires, ces recours ne découlant pas d’un bail. Il en est de même d’un recours pour des dommages-intérêts causés par un locataire à l’administrateur agissant pour le locateur pour le préjudice subi par l’administrateur pour du harcèlement ou de l’incivilité.
[30] La jurisprudence établit une distinction entre les matières extracontractuelles qui sont exclues de la compétence du TAL et les matières relevant du contrat de bail, tel le comportement de la locataire qui porte atteinte au droit de gérance du locateur et ne se conforme pas au devoir de bonne foi qui doit guider les parties dans leur relation contractuelle.
[31] Dans le dossier sous étude, le TAL, après une étude exhaustive des faits, vient à la conclusion qu’il avait juridiction, parce que les gestes commis démontraient de la mauvaise foi contractuelle et qu’ils constituaient une entrave à la gestion de l’immeuble par le gestionnaire pour le compte du locateur. Il s’agissait donc d’un recours contractuel basé sur le bail et sur les obligations de bonne foi implicites qui en découlent. L’analyse jurisprudentielle faite par le TAL, dans le présent dossier, ne laisse pas voir de faiblesse apparente. Cette importante distinction est manifestement bien comprise, et les faits ont été analysés par le TAL selon cette distinction.
[32] Les passages cités dans la décision Bourque c. Lajeunesse[14] qui cite la jurisprudence Immeubles Grondin inc. c. Hannaford [15] démontrent que le TAL a bien maitrisé les concepts applicables. Il n’y a donc pas de signes d’une possible erreur au niveau de la compétence du TAL ni d’erreurs au niveau de l’exercice de cette compétence à l’égard de la situation factuelle.
[33] Quant à la deuxième question, il n’y a pas d’indice que le TAL aurait mal appliqué la notion de bonne foi.
[34] L’exposé des requérants, quant à la première question, propose au juge de la Cour du Québec d’autoriser une deuxième analyse des faits pour obtenir une sorte de seconde opinion.
[35] À la lecture de la décision, le Tribunal ne voit aucune raison d’autoriser un réexamen des faits. L’examen qui a été effectué par le TAL mérite déférence. L’analyse des faits est systématique, démontrant la force de la preuve en demande et la faiblesse des réponses données par les locataires. On ne retrouve pas dans les arguments soumis des signes d’erreurs factuelles qui pourraient constituer des erreurs manifestes et dominantes. Il n’y a pas non plus dans le jugement quelques signes que ce soit qu’il y aurait eu un manquement au niveau de l’équité procédurale.
[36] La question juridique, qui concerne la compétence et l’application du principe de l’atteinte au droit de gérance, est une notion importante du droit en la matière. Il s’agit d’un droit bien encadré par la jurisprudence. Les requérants n’ont pas démontré qu’il y a une controverse non résolue qui nécessite une intervention de la Cour du Québec pour rendre cohérentes des notions d’intérêt général.
[37] En lisant la décision du TAL, on constate que le membre du dossier a examiné la preuve d’une façon méticuleuse et il a été à même de constater, par son appréciation de la crédibilité des témoins, le sérieux de la demande et le manque de sérieux de la défense. Il n’y a pas lieu pour le Tribunal d’assujettir ce conflit à un nouvel examen, qui serait redondant avec la première, cette fois-ci, sur la base d’une lecture des transcriptions. Le membre du TAL saisi du dossier était à même de considérer directement, en temps réel, les deux récits et de rendre jugement conformément à la preuve entendue. Il ne s’agit donc pas d’un cas où l’on peut considérer que les questions soulevées sont d’intérêt pour la Cour du Québec au sens de l’article
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[38] REJETTE le moyen d’irrecevabilité soulevé par l’intimé à l’égard de la requête quant aux délais de signification et de conclusion.
[39] REJETTE la requête pour permission d’appeler à l’encontre de la décision du TAL dans le dossier du logement concerné rendu par Me Stella Croteau le 10 février 2022.
[40] Avec frais de justice en faveur de l’intimée.
| ||
| __________________________________ David L. Cameron, J.C.Q. | |
| ||
Me Marie SANKHARÉ | ||
SDN LÉGAL | ||
Avocate de la partie demanderesse/requérante | ||
| ||
Me Simon-Pierre DAVIAULT | ||
RATELLE, RATELLE & ASSOCIÉS | ||
Avocat de la partie défenderesse/intimée | ||
| ||
Date d’audience : | 5 avril 2022 | |
[1] Hardy c. Dufour,
[2] Létourneau c. Piché,
[3] RLRQ, c. R-8.1 (ci-après « L.R.L »).
[4] RLRQ, c T-15.01, (ci-après « L.T.A.L. »).
[5] Caraballo c. 9376-7200 Québec inc.,
[6] Hardy c. Dufour, préc., note 1.
[7] Hardy c. Dufour, préc., note 1, par. 32-37.
[8] RLRQ, c-25.01 (ci-après « C.p.c. »).
[9] Martineau c. Ouellet,
[10] Pierre-André Côté,
[11] Hardy c. Dufour, préc., note 1.
[12] Voir à cet effet l’opinion dans Aly c. Chartrand, préc., note 2. Le juge y exprime son désaccord avec l’opinion majoritaire, mais il décide de s’y rallier dans l’intérêt de la « stabilité du droit et de sa certitude ».
[13] Fiorilli c. Adagbe,
[14] Bourque c. Lajeunesse,
[15] Immeubles Grondin inc. c. Hannaford,
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.