Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

            RÉGION :

MONTÉRÉGIE

MONTRÉAL, LE 13 AVRIL 2000

 

 

 

 

 

 

 

            DOSSIER :

92532-62-9711-R2C

DEVANT LA COMMISSAIRE :

Me Doris Lévesque

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

Suzanne Blais

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Raynald Haché

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

            DOSSIER             CSST/DRA :

006968960

AUDIENCE TENUE LE :

26 janvier 2000

 

EN DÉLIBÉRÉ LE :

17 mars 2000

 

 

 

 

            DOSSIER             BR :

62568037

À :

Longueuil

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE PRÉSENTÉE EN VERTU DE L’ARTICLE 429.56 DE LA LOI SUR LES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET LES MALADIES PROFESSIONNELLES [L.R.Q., C. A-3.001]

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

GÉRARD MICKEL

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ACIER MÉTROPOLITAIN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA

SÉCURITÉ DU TRAVAIL - MONTÉRÉGIE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTERVENANTE

 

 

 

 

DÉCISION  CORRIGÉE

 

[1]        Le 29 septembre 1999, monsieur Gérard Mickel (le travailleur) par l’entremise de son procureur, dépose une requête en révision à l’encontre d’une décision rendue le 30 août 1999 par la Commission des lésions professionnelles.

[2]        L’audition sur cette requête a eu lieu à Longueuil le 26 janvier 2000 devant la Commission des lésions professionnelles et la décision a été rendue le 31 mars 2000.

[3]        À la page 4, aux sections « Avis des membres » paragraphe [12] et « les motifs de la décision » paragraphe [14], une erreur cléricale s’est glissée de sorte qu’on lit le mot « employeur au lieu de travailleur » alors qu’il faut lire ces paragraphes comme suit :

« L'AVIS DES MEMBRES

 

[12]      Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales sont tous les deux d’avis que le travailleur n’a pas démontré que la première décision en révision était entachée d’une erreur manifeste et déterminante correspondant à un vice de fond de nature à l’invalider.  Il y a donc lieu de rejeter cette deuxième requête en révision.

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

 

[14]      En l’instance, les motifs de révision allégués par le procureur du travailleur correspondent à ceux prévus au troisième paragraphe de l’article 429.56, soit la présence de vices de fond de nature à invalider la décision.

 

 

 

 

Me Doris Lévesque

 

Commissaire

 

 

Parenteau, Archambault, Fisette

(Me François Fisette)

268, rue St-Patrice Ouest

Magog (QUÉBEC)

J1X 1W3

 

Représentant de la partie requérante

 

Panneton, Lessard

(Me Sylvana Markovic)

25, boul. Lafayette, 5ième étage

Longueuil (QUÉBEC)

J4K 5B7

 

Représentante de la partie intervenante

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

MONTÉRÉGIE

MONTRÉAL, LE 31 MARS 2000

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

92532-62-9711-R2

DEVANT LA COMMISSAIRE :

Me Doris Lévesque

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

Suzanne Blais

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Raynald Haché

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST/DRA :

006968960

AUDIENCE TENUE LE :

26 janvier 2000

 

EN DÉLIBÉRÉ LE :

17 mars 2000

 

 

 

 

DOSSIER BR :

62568037

À :

Longueuil

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE PRÉSENTÉE EN VERTU DE L’ARTICLE 429.56 DE LA LOI SUR LES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET LES MALADIES PROFESSIONNELLES [L.R.Q., C. A-3.001]

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

GÉRARD MICKEL

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ACIER MÉTROPOLITAIN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA

SÉCURITÉ DU TRAVAIL - MONTÉRÉGIE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTERVENANTE

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 29 septembre 1999, monsieur Gérard Mickel (le travailleur) par l’entremise de son procureur, dépose une requête en révision à l’encontre d’une décision rendue le 30 août 1999 par la Commission des lésions professionnelles.

[2]               Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles rejette la requête en révision présentée par le travailleur de la décision rendue le 29 mars 1999.

[3]               Cette décision du 29 mars 1999 avait rejeté l’appel du travailleur, confirmé une décision rendue par le Bureau de révision de Longueuil du 7 novembre 1997 et déclaré que la demande de révision du 3 octobre 1996, reçue à la CSST le 7 octobre 1996, était irrecevable.

[4]               Une audience a lieu à Longueuil le 26 janvier 2000 à laquelle assiste le travailleur représenté par Me François Fisette.  La Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) est représentée par Me Sylvana Markovic. 

[5]               Une date de fin d’enquête est fixée au 17 mars 2000 afin de permettre aux parties de produire une argumentation additionnelle.

L'OBJET DE LA REQUÊTE

[6]               Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’accueillir sa requête en révision, de réviser la décision du 30 août 1999 au motif que le commissaire en révision a commis une erreur de droit dans sa décision, en appuyant la thèse de la commissaire initiale, qui constitue un vice de fond de nature à invalider la décision.

[7]               Plus précisément, il reproche au commissaire le fait qu’il aurait dû étudier et analyser seulement la notion de motifs raisonnables, en fonction de la jurisprudence pertinente, et non la diligence d’une partie.  Or, d’avoir ajouté ce critère de diligence au texte de loi constitue un vice de fond de nature à invalider la décision.

[8]               Dans sa requête écrite en révision, le procureur du travailleur précise plus amplement ses motifs :

« 1.  Le 20 août 1999, monsieur le commissaire Camille Demers rendait une décision sur une requête déposée par le travailleur en vertu de l’article 429.56 de la loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles ;

 

2.     Monsieur le commissaire conclut à la page six (6) de la décision, rubrique 19 :

 

       "En réalité, le représentant du travailleur demande une nouvelle appréciation de la preuve, différente de celle de la première commissaire.  Or, la jurisprudence nous enseigne que le recours en révision ne permet pas à un commissaire, en l’absence de preuve d’une erreur manifeste et déterminante, de substituer son appréciation de la preuve à celle du commissaire précédent"

 

3.         Le commissaire écrit aussi à la page cinq (5) de sa décision que : "la commissaire analyse davantage la preuve offerte et la jurisprudence au cas en litige" ;

 

4.     À la rubrique 18, page six (6) de la décision, le commissaire écrit :

 

       "En l’espèce, le tribunal en révision ne relève aucune erreur manifeste et déterminante dans la décision de la première commissaire.  La décision attaquée est claire, logique et cohérente.  L’appréciation des éléments de la preuve a été faite de manière logique, méticuleuse et détaillée.  Elle tient compte de la jurisprudence pertinente qu’elle analyse à la lumière de d’autres décisions rendues par la Commission d’appel en matière des lésions professionnelles; il n’a pas été démontré que son interprétation de cette jurisprudence était erronée."

 

5.     Or, justement cette interprétation est erronée et elle constitue une erreur de droit, un vice de fonds de nature à invalider la décision;

 

6.         La décision de monsieur le Juge Claude Benoît dans l’affaire Lussier c. Godin [1987] CALP 283 .0285 n’indique pas comme le prétendait la commissaire Perron dans la décision du 29 mars 1999 qu’il est maintenant reconnu que l’arrêt Pont-Viau n’établit pas que l’erreur ou la négligence de la part d’un procureur est suffisante pour relever une partie des conséquences de son défaut d’avoir agit dans les délais légaux, il faut que la partie elle-même ait fait preuve de diligence;

 

7.         Le Juge Benoît dans le "ratio decidendi" de sa décision indique qu’il n’y a rien de déraisonnable à juger que la seule intention d’un appel ne constitue pas un motif raisonnable;

 

8.     Le Juge Benoît ne mentionne pas que la partie elle-même doit faire preuve de diligence afin de pouvoir être excusé d’un hors délai;

 

9.     C’est la notion de motifs raisonnables qui doit être étudiée et analysée en fonction de la jurisprudence pertinente et non la diligence d’une partie;

 

10.   Le Juge Pratte dans l’arrêt Cité de Pont Viau [1978] 2 R.C.S. 516 et ss : nous enseigne que : "la dernière partie de l’article 523 C.p.c. a été édictée en faveur de la partie elle-même de façon à tempérer la rigueur de la déchéance automatique du droit d’appel lorsque le titulaire de ce doit - la partie elle-même - n’a pas pu agir à temps l’impossibilité d’agir doit donc s’apprécier du point de vue de celui qui aura à supporter les conséquences de la forclusion s’il n’en est pas relevé." (sic)

 

11.   Le texte de l’article 429.19 est clair, on doit apprécier le caractère raisonnable du motif et non la diligence d’une partie;

 

12.   Le dictionnaire Petit Robert définit le mot raisonnable comme suit : conforme à la raison - qui pense selon la raison, se conduit avec bon sens et mesure, d’une manière réfléchie."

 

13.   En ajoutant le critère de diligence au texte de loi, ceci constitue un vice de fonds de nature à invalider la décision;

 

14.   Le commissaire Demers commet une erreur qui constitue un vice de fonds en appuyant la thèse de la commissaire Perron;

 

15.   Le requérant ne demande pas une nouvelle interprétation de la preuve mais l’application de la règle de droit;

16.   POUR CES MOTIFS et autre motif, nous vous demandons de reformer la décision du commissaire Demers et de relever le travailleur du défaut d’avoir respecté le délai.»

 

 

[9]                À l’audience, le procureur du travailleur reprend les mêmes motifs.  Il fait à nouveau référence aux affaires Lussier de la Cour supérieure et Cité de Pont Viau de la Cour suprême ainsi qu’à l’article 429.19 pour appuyer ses prétentions à l’effet que le tribunal devait apprécier le caractère raisonnable du motif et non la diligence d’une partie.

[10]           Le procureur du travailleur souligne également que lorsqu’on examine le dossier du travailleur, on ne peut conclure, comme l’a fait la première commissaire dans sa décision confirmée par le deuxième commissaire en révision, que le travailleur n’a pas agi de façon raisonnable.  Il s’en réfère ainsi à la définition usuelle du mot « raisonnable » que l’on retrouve au dictionnaire.

[11]           Il ajoute également que lorsque la commissaire initiale a fait état du témoignage du travailleur entendu au bureau de révision, elle a commis une erreur importante puisque l’audience devant la Commission des lésions professionnelles est une audience de novo.  Or, il existe aucun enregistrement de l’audition auprès du bureau de révision et c’est erronément que la commissaire initiale s’est servie de la décision du bureau de révision pour l’extrapoler et prétendre dans sa décision que le travailleur avait changé sa version au cours de l’audience auprès de la Commission des lésions professionnelles.

L'AVIS DES MEMBRES

[12]           Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales sont tous les deux d’avis que l’employeur n’a pas démontré que la première décision en révision était entachée d’une erreur manifeste et déterminante correspondant à un vice de fond de nature à l’invalider.  Il y a donc lieu de rejeter cette deuxième requête en révision.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[13]           La Commission des lésions professionnelles doit décider s’il y a lieu de réviser la décision rendue le 30 août 1999 relative à une première requête en révision présentée en vertu de l’article 429.56 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

[14]           En l’instance, les motifs de révision allégués par le procureur de l'employeur correspondent à ceux prévus au troisième paragraphe de l’article 429.56, soit la présence de vices de fond de nature à invalider la décision.

[15]           Cet article 429.56, prévoyant le pouvoir de révision d’une décision en énonçant les motifs spécifiques donnant ouverture à une requête en révision, se lit ainsi :

429.56. La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :

 

1° lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;

 

2° lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;

 

3° lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.

 

Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.

___________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[16]           La révision d’une décision est exceptionnelle puisque le législateur a prévu à l’article 429.49 de la loi qu’une décision de la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel.  Le but visé est d’assurer ainsi la stabilité juridique des décisions rendues par ce tribunal.

[17]           La Commission des lésions professionnelles, à la suite de l’analyse de la jurisprudence de la Commission des affaires sociales sur l’article 24 de la Loi sur la Commission des affaires sociales[2], disposition similaire au troisième alinéa de l’article 429.56 de la loi, a retenu qu’un « vice de fond » pouvait comprendre une erreur manifeste de faits ou de droit ayant un effet déterminant sur le litige[3].

[18]           Cette notion d’erreur manifeste a été définie dans le cadre de l’ancien article 406 de la loi, remplacé[4] par notre article actuel 429.56 de la loi qui vise les mêmes objectifs, notamment dans l’affaire C.U.M. et Propriété Guenter Kaussen[5] :

« Suivant une jurisprudence constante, il y a erreur manifeste lorsque la décision méconnaît une règle de droit, applique un faux principe, statue sans preuve, néglige un élément de preuve important ou adopte une méthode qui crée une injustice certaine. »

 

 

[19]           En l’instance, le procureur du travailleur reproche au commissaire en révision d’avoir appuyé la thèse de la commissaire initiale qui aurait ajouté le critère de diligence au texte de loi en se fondant sur une interprétation erronée de la jurisprudence, ce qui constitue manifestement une erreur en droit.  Il souligne que c'est la notion de motif raisonnable qui doit être étudiée et analysée en fonction de la jurisprudence pertinente et non la diligence d'une partie.  D’autre part, il souligne que si on regarde attentivement le dossier du travailleur on ne peut pas conclure, comme l’a fait la première commissaire, que celui-ci n’a pas agi de façon raisonnable.

[20]           Cet argument soulevé par le procureur comporte deux volets puisqu’il fait référence à deux notions juridiques différentes.  Examinons-les chacune.

[21]           Quant au premier moyen soulevé à l’effet que le commissaire en révision aurait commis une erreur en appuyant la thèse de la commissaire initiale qui avait tenu compte du critère de la diligence, ceci ne constitue pas une erreur en droit permettant la révision.

[22]           Contrairement aux prétentions du travailleur, la lecture de la décision Cité de Pont Viau c. Gauthier Mfg. ltd[6] permet de constater que ce critère de diligence d’une partie n’a pas été ignoré ou éliminé losque la Cour suprême avait établi le principe relatif à une impossibilité relative d’agir de la part des procureurs de l’appelante.  Dans cette cause, c’est à la suite d’une omission s’expliquant par le fait que le protonotaire de la Cour supérieure avait répété une erreur commise à la dernière page du jugement de la Cour supérieure qui avait erronément désigné dans son avis un cabinet juridique comme les procureurs de l’intimée.  L’inscription en appel n’avait donc pas été signifiée à l’intimée elle-même ni à ses procureurs.  Par sa requête, l’appelante invoquant le bénéfice de l’article 523 du Code de procédure civile, demandait à la Cour d’appel de lui permettre de signifier l’inscription en appel au véritable procureur de l’intimée malgré le délai.  L’honorable juge Pratte s’exprime ainsi :

« Il n’est pas possible de préciser à l’avance chacun des faits d’où peut résulter l’impossibilité relative : chaque espèce doit être jugée selon les circonstances qui lui sont propres, puisque c’est vraiment d’une impossibilité de fait qu'il s’agit.

 

Dans l’espèce qui nous est soumise, la forclusion a été encourue uniquement à cause de l’erreur des procureurs de l’appelante.  La partie elle-même a agi avec diligence et je ne vois pas ce qu’elle aurait pu faire elle-même pour « agir plus tôt ». » (page 527)

(nos italiques)

 

 

[23]           D’autre part, le juge Claude Benoît de la Cour supérieure, alors qu’il analysait l’interprétation donnée par la Commission d’appel à l’article 419 (correspondant à notre article actuel 429.19), s’est penché sur la portée de cette décision de la Cour suprême du Canada dans la cause Lussier c. Godin[7] :

« Il n'est pas déraisonnable de juger qu’une erreur n’est pas nécessairement un motif raisonnable justifiant une prolongation de délai.  Il n’est pas davantage déraisonnable de juger que l’erreur émanant de l’avocat n’est pas nécessairement excusable et qu’elle ne justifie pas l’octroi d’un délai.  Aucun texte de loi n’exonère le mandant de l’erreur ou de la négligence du mandataire.  Jamais la Cour suprême n’a émis l’avis que l’erreur de l’avocat n’affectait pas le client. »

(nos italiques)

 

 

[24]           Dans le présent dossier, la Commission des lésions professionnelles le 29 mars 1999 conclut que la contestation du travailleur avait été déposée hors délai.  Puis, elle examine si le travailleur avait présenté un motif raisonnable pouvant permettre de le relever des conséquences de son défaut d’avoir respecté le délai conformément à l’article 429.19 de la loi.  Dans l’appréciation des motifs raisonnables, la Commission des lésions professionnelles en première instance a tenu compte de la non diligence du travailleur dans le dépôt tardif de sa contestation.

[25]           Ce critère de diligence, contrairement aux prétentions du travailleur, ne constitue pas du droit nouveau puisqu’il a été à maintes fois reconnues par la jurisprudence[8].  Ainsi, la Commission d’appel dans l’appréciation du motif raisonnable tient généralement compte de la diligence d’une partie à déposer son recours.  Par conséquent, le fait de tenir compte de la présence ou non de la diligence d’une partie dans le cadre d’une contestation soumise hors délai ne constitue pas, conformément à la jurisprudence, une erreur en droit.

[26]           Quant au deuxième volet de cet argument, soit l’appréciation de cette notion de diligence du travailleur dans le présent dossier, ceci relevait clairement de la compétence de la commissaire initiale d’apprécier et d’évaluer la preuve à ce sujet.  C’est donc à juste titre que le commissaire en révision avait conclu qu’il ne relevait aucune erreur manifeste et déterminante dans la décision de la première commissaire.  Le commissaire en révision, dans ce contexte, était justifié de refuser de substituer son appréciation de la preuve à celle de la commissaire initiale.  En effet, il n’y avait aucune erreur manifeste puisque la commissaire initiale n’avait pas statué sans preuve ni négligé un élément de preuve important.

[27]           Quant à l’appréciation des motifs raisonnables, la soussignée ne retient pas l’argument soulevé en révision à l’effet que la commissaire initiale, siégeant de novo, ne pouvait extrapoler la décision du bureau de révision et prétendre dans sa décision que le travailleur avait changé sa version lors de son audience initiale à la Commission des lésions professionnelles.  À ce sujet, deux remarques s’imposent. 

[28]           D’une part, la commissaire initiale était bien fondée de tenir compte des éléments factuels, tels que rapportés dans la décision du bureau de révision, puisqu’ils faisaient parties du dossier dont elle était saisie et dont disposait également le travailleur.  L’évaluation de la preuve et de la crédibilité du travailleur faisait partie de la compétence dévolue à la commissaire initiale par le législateur à l’article 377 de la loi, soit de décider de la question de droit ou de fait nécessaire à l’exercice de sa compétence.

[29]           À ce sujet, la jurisprudence des tribunaux supérieurs[9] est également sans équivoque sur la nature du recours en révision à l’effet qu’il ne peut permettre la substitution d’une appréciation de la preuve soumise à celle du premier commissaire.  Or, la commissaire a apprécié adéquatement la preuve au dossier et a également tenu compte de la version du travailleur avant d’en arriver à sa conclusion qu’il n’y avait pas de motifs raisonnables dans le présent dossier.  Le commissaire lors de la première révision était donc justifié de ne pas donner droit aux prétentions du travailleur à cet égard.

[30]           Une deuxième remarque s’impose à l’effet que si l’on retenait la prétention du procureur du travailleur, cela reviendrait à dire qu’à chaque fois qu’une partie présente des motifs qu’il faudrait tenir son témoignage pour avéré et que le tribunal n’aurait pas la discrétion d’apprécier ces motifs à la lumière du dossier dont il dispose. 

[31]           Quant à l’argument à l’effet que lorsque la commissaire rapportait le témoignage du travailleur à l’audience devant le bureau de révision que cela constituait du ouï-dire, cette affirmation n’est pas conforme au principe de droit administratif puisque, d’une part, la décision du bureau de révision faisait partie intégrante du dossier dont disposait le travailleur pour son audience et que, d’autre part, le travailleur a eu l’occasion de faire valoir ses prétentions et se faire entendre devant la Commission des lésions professionnelles. 

[32]           Quant au motif soulevé relativement au fait que la commissaire initiale n’a pas tenu compte de la question du préjudice grave subi par l’autre partie, le commissaire en révision a également disposé de ce moyen.  Il a précisé que la commissaire initiale avait d’abord discuté du motif raisonnable pour en arriver à la conclusion que le travailleur n’avait pas démontré ou fourni des motifs raisonnables permettant de le relever des conséquences de son défaut de l’avoir respecté et qu’il n’était donc plus nécessaire d’aborder la question du préjudice grave subi par l’autre partie.  Il n’y a là aucun motif de révision.

[33]           Le deuxième commissaire (en révision) était donc bien fondé de rejeter la requête en révision, puisque la première commissaire n’avait commis aucune erreur manifeste et déterminante dans sa décision.

[34]           La soussignée n’est donc pas plus justifiée d’intervenir à la suite d’une deuxième requête en révision, puisque le commissaire en révision (lors d’une première requête en révision) n’a commis aucune erreur manifeste et déterminante dans sa décision.

[35]           Pour conclure, la soussignée fait siens les propos tenus par la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Industries Cedan inc.[10] :

« La Commission des lésions professionnelles tient à souligner qu'une requête en révision ne constitue pas un processus de contestation en plusieurs tomes ni que l'on peut multiplier les requêtes autant de fois qu'on le juge à propos en invoquant à chaque fois un nouvel argument ou un argument présenté sous une autre forme.

 

Il ne faut pas oublier qu'une décision de la Commission d'appel est finale et sans appel et que ce n'est que dans des circonstances bien précises, prévues à la loi, que l'on peut demander la révision ou la révocation d'une décision.

 

Lorsqu'une décision fait l'objet d'un recours en révision, il faut être en mesure de démontrer clairement l'erreur que comportait la première décision en révision avant de s'aventurer sur le terrain d'une autre requête.

 

Autrement on peut multiplier à l'infini le nombre de requêtes espérant peut-être qu'à l'usure on finira par avoir raison.

 

La Commission des lésions professionnelles estime que c'est vicier le processus de finalité des décisions et celui de la révision que de multiplier indûment le nombre de requêtes en révision.

 

Survient un moment où on doit réfréner les ardeurs et inviter les parties concernées à s'adresser à une autre instance, si malgré les décisions défavorables, elles estiment toujours que la décision initiale comporte une erreur que personne d'autre n'a pu constater. »

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête présentée par monsieur Gérard Mickel le 29 septembre 1999.

 

 

 

 

 

Me Doris Lévesque

 

Commissaire

 

Parenteau, Archambault, Fisette

(Me François Fisette)

268, rue St-Patrice Ouest

Magog (QUÉBEC)

J1X 1W3

 

Représentant de la partie requérante

 

 

 

Panneton, Lessard

(Me Sylvana Markovic)

25, boul. Lafayette, 5ième étage

Longueuil (QUÉBEC)

J4K 5B7

 

Représentante de la partie intervenante

 



[1]    L.R.Q., c. A-3.001.

[2]    L.R.Q., c. C-34.

[3]    Produits forestiers Donohue inc. et Villeneuve, [1998] C.L.P. 733 ; Franchellini et Sousa, [1998] C.L.P. 783 .

[4]    Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives, L.Q., 1997, c. 27, entrée en vigueur le 1er avril 1998.

[5]    [1987] R.J.Q. 2641 (C.P.).

[6]    [1978] 2 S.C.R. 527.

[7]    [1987] CALP 283 .

[8]    Club nautique & plein air de Montréal et Légaré, [1989] CALP 163 ; Leblanc et Centre hospitalier régional de Lanaudière, CALP 10983-63-8812, 26 mars 1990, R. Brassard, commissaire; Succession Jules Arsenault et Q.I.T. Fer et Titane inc., CALP 15555-09-8911, 13 septembre 1994, B. Lemay, commissaire; Quesnel et Les Aliments Maple Leaf, CALP 52929-62-9308, 24 novembre 1994, F. Dion-Drapeau, commissaire; Dancereau et Hôpital Maisonneuve-Rosemont [1993] CALP 737 (requête en évocation rejetée [1993] CALP 1074 (C.S.)); Morin et Société des traversiers du Québec [1994] CALP 185 (révision rejetée [1994] CALP 188 , requête en évocation rejetée [1994] CALP 449 (C.S.)).

[9]    Vincenzo Fierimonte et C.L.P., C.S. Montréal, 500-05-045146-980, 11 décembre 1998, madame la juge Hélène Lebel;  Sivaco-Québec et C.L.P., C.S. Montréal, 500-05-035213-972, le 16 juin 1998, monsieur le juge Pierre Dalphond.

 

 

[10] Industries Cedan inc. et C.S.S.T., CALP, 75963-62-9512, 26 mai 1999, N. Lacroix, commissaire.

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