Décision

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Gabarit de jugement pour la cour d'appel

Université McGill c. McGill University Non Academic Certified Association (MUNACA)

2015 QCCA 1943

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

MONTRÉAL

N° :

500-09-023513-138

(500-17-066521-116)

 

DATE :

 LE 24 NOVEMBRE 2015

 

 

CORAM :

LES HONORABLES

FRANÇOIS PELLETIER, J.C.A.

MARIE-FRANCE BICH, J.C.A.

JEAN-FRANÇOIS ÉMOND, J.C.A.

 

 

UNIVERSITÉ McGILL

APPELANTE - Défenderesse

c.

 

McGILL UNIVERSITY NON ACADEMIC CERTIFIED ASSOCIATION (MUNACA)

INTIMÉE - Demanderesse

et

ANDRÉ BERGERON, en sa qualité d'arbitre de griefs

MIS EN CAUSE - Défendeur

et

COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL (CSST)

INTERVENANTE

 

 

ARRÊT

 

 

[1]           L'appelante se pourvoit contre le jugement par lequel la Cour supérieure, district de Montréal (l'honorable Stéphane Sansfaçon), en date du 20 mars 2013, accueille la requête en révision judiciaire de l'intimée, déclare que l'arbitre mis en cause a compétence sur les griefs qui lui ont été soumis et lui renvoie le dossier afin qu'il statue sur le fond de ceux-ci.


[2]           Pour les motifs de la juge Bich, auxquels souscrivent les juges Pelletier et Émond, LA COUR :

[3]           REJETTE l'appel, avec dépens.

 

 

 

 

FRANÇOIS PELLETIER, J.C.A.

 

 

 

 

 

MARIE-FRANCE BICH, J.C.A.

 

 

 

 

 

JEAN-FRANÇOIS ÉMOND, J.C.A.

 

Me André Baril

McCARTHY TÉTRAULT

Pour l'appelante

 

Me Sibel Ataogul

MELANÇON, MARCEAU, GRENIER & SCIORTINO

Pour l'intimée

 

Me Lucille Giard

VIGNEAULT THIBODEAU BERGERON

Pour l'intervenante

 

Date d’audience :

Le 8 octobre 2014


 

 

MOTIFS DE LA JUGE BICH

 

 

[4]           Une convention collective peut-elle accorder au salarié des droits qui surpassent ceux qu'énonce la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (« L.a.t.m.p. »)? Dans l'affirmative, à quelles conditions? Comment, le cas échéant, harmoniser dispositions conventionnelles et législatives? Comment, en particulier, délimiter les compétences respectives de l'arbitre de griefs, d'une part, et, d'autre part, des instances spécialisées chargées de la mise en œuvre de la L.a.t.m.p.?

[5]           Ces questions soulèvent une certaine controverse jurisprudentielle, controverse nourrie, d'ailleurs, par quelques arrêts de la Cour et sur laquelle il convient de faire le point.

I.          Contexte

[6]           Je laisse au juge de première instance la description du contexte général de l'affaire :

[1]        McGill University Non Academic Certified Association (MUNACA) présente une requête en révision judiciaire d’une décision arbitrale [renvoi omis] par laquelle l’arbitre décline sa juridiction pour statuer sur une série de griefs portant, premièrement, sur la réintégration par l’employeur, Université McGill, d’un salarié, M. Ron Zahorak, à la suite d’un congé invalidité de longue durée, deuxièmement, sur le refus de l’employeur de lui accorder certains postes et, finalement, sur son congédiement.

[2]        M. Zahorak, employé comme technicien en communications à l’Université McGill (l’employeur), subit le 3 mars 2003 une lésion professionnelle qui lui cause certaines limitations fonctionnelles permanentes, lesquelles sont détaillées dans les notes de la Commission de la santé et sécurité du travail (CSST) [renvoi omis] et reprises aux pages 11 et 12 de la décision de l’arbitre visée par la demande de révision judiciaire.

[3]        L’Employeur conteste les diagnostics, l’existence de ces limitations et les liens entre elles et l’accident, et la Commission des lésions professionnelles statuera par la suite en faveur du travailleur [renvoi omis].

[4]        La CSST rend de son côté le 6 octobre 2006 une première décision à l’effet que l’employé n’est plus en mesure d’occuper son emploi pré-lésionnel. Elle décide aussi que si elle ne réussit pas à lui trouver un emploi convenable chez son employeur avant le 11 novembre de la même année [renvoi omis], elle déterminera alors un emploi convenable que le travailleur sera susceptible d’occuper mais ailleurs sur le marché du travail, en évaluant et en prenant en compte, en outre et tel que le prévoit la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles [renvoi omis] (la Loi), sa capacité résiduelle et ses qualifications professionnelles.

[5]        Le 27 janvier 2007, la CSST complète ses démarches et son analyse et détermine que cet emploi convenable ailleurs sur le marché du travail est celui de « réparateur de commandes électriques ». Aucun appel ne sera logé de cette décision.

[6]        La période qui suit, qui s’étend jusqu’au 26 novembre 2010, est ponctuée de retours au travail lors desquels l’employeur permet à l’employé d’effectuer des tâches légères, et d’un long congé de maladie en raison d’une dépression majeure non reliée à la lésion professionnelle. Aussi, certains postes qui ne sont pas en lien avec son emploi pré-lésionnel ni avec ses qualifications professionnelles sont affichés et sont attribués à d’autres personnes : M. Zahorak s’en plaint et MUNACA loge des griefs alléguant que ces postes auraient dû lui être attribués en vertu de dispositions de la convention collective.

[7]        Finalement, peu après son retour en 2010, une fois encore assigné à des tâches légères, l’employeur congédie M. Zahorak au motif que, près de cinq ans après la détermination par la CSST de l’emploi convenable, ce poste n’existe toujours pas chez l’employeur. Le Syndicat conteste aussi ce congédiement par un grief [renvoi omis].

[8]        Au début de l’audition des griefs, la question de la compétence de l’arbitre est soulevée par la partie patronale [renvoi omis] et les parties conviennent de la traiter de façon préliminaire. [...]

[7]           L'intimé (« Syndicat ») invite l'arbitre mis en cause à ne pas se dessaisir des griefs qui lui ont été déférés, sur lesquels il aurait pleine compétence. Il appuie d'abord ses prétentions sur l'article 4 L.a.t.m.p. Le second alinéa de cette disposition (reproduite plus loin) énonce qu'une convention « peut prévoir pour un travailleur des dispositions plus avantageuses que celles que prévoit la présente loi » (« may provide more favourably for a worker than does this Act »). Or, affirme le Syndicat, ce serait précisément le cas en l'espèce, la clause 38.05 de la convention qui unit les parties stipulant que :

38.05   Le salarié qui redevient capable de travailler, mais qui demeure avec une limitation fonctionnelle permanente l'empêchant d'occuper le poste qu'il occupait antérieurement est replacé, sans affichage, à un autre poste que son état de santé lui permet d'occuper, compte tenu des postes disponibles à combler.[2]

[8]           À son avis, cette disposition ajouterait aux droits que la L.a.t.m.p. confère au travailleur victime d'une lésion professionnelle. Dans ses grandes lignes, rappelle le Syndicat, cette loi, au chapitre du droit au retour au travail, met sur pied un régime en vertu duquel, conformément aux articles 166 et 234 et s. L.a.t.m.p., le salarié peut, selon sa capacité de travail et ses limitations fonctionnelles (s'il en est), être appelé à réintégrer l'entreprise de son employeur soit en y reprenant son emploi prélésionnel, soit en y occupant un « emploi équivalent » (au sens de l'art. 2 L.a.t.m.p.), soit encore en y obtenant un « emploi convenable » (au sens du même art. 2), si un tel emploi existe et qu'il est disponible. La clause 38.05 de la convention irait plus loin que la L.a.t.m.p. en obligeant l'appelant (« Employeur »), en l'absence d'un emploi convenable au sein de l'entreprise, à offrir tout autre emploi disponible au salarié incapable de reprendre son emploi prélésionnel. Il suffirait que cet autre emploi réponde aux exigences de son état de santé et que ses compétences lui permettent d'en accomplir les tâches, sans égard aux autres critères qui définissent l'« emploi convenable » au sens de la L.a.t.m.p.

[9]           Cela étant, poursuit le Syndicat, advenant que l'Employeur ne se conforme pas à cette disposition conventionnelle, la procédure de grief s'impose pour résoudre le désaccord. L'arbitre a toute compétence pour statuer sur un tel grief, étant entendu que, dans ce cadre, il n'a pas à remettre en cause les déterminations de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (« CSST ») ou de la Commission des lésions professionnelles (« CLP ») au sujet de la capacité de travail et des limitations fonctionnelles du salarié ou de l'emploi convenable.

[10]        L'Employeur estime pour sa part que l'arbitre ne peut aucunement se prononcer sur de tels griefs, qui l'obligeraient en effet immanquablement à revoir les déterminations de la CSST ou de la CLP en matière de capacité de travail, de limitations fonctionnelles ou de droit au retour au travail, sujets qui échappent entièrement à la compétence du premier et relèvent exclusivement de celle des secondes. L'Employeur met en relief le fait que la L.a.t.m.p. crée un régime d'indemnisation complet et autonome, géré à tous égards par la CSST, ce qui, selon un premier courant jurisprudentiel, « prive donc l'arbitre de toute juridiction sur la capacité d'un travailleur victime d'un accident du travail ayant entraîné des limitations fonctionnelles permanentes, à exercer un emploi chez son employeur »[3].

[11]        L'Employeur se dissocie ainsi d'un second courant jurisprudentiel, qui, sur le fondement de l'article 4 L.a.t.m.p., décide qu'un arbitre, si la convention collective le lui permet, est autorisé à statuer sur la question de savoir si le salarié victime d'une lésion professionnelle peut occuper chez son employeur un emploi autre que l'emploi prélésionnel, l'emploi équivalent ou l'emploi convenable. Selon l'Employeur, l'article 4 L.a.t.m.p., dont la portée serait limitée par l'article 244, ne saurait conférer aucune compétence à l'arbitre en cette matière, sauf à enfreindre les articles 1 et 349 L.a.t.m.p.

[12]        L'Employeur conclut que (et j'extrais ce qui suit du résumé que fait l'arbitre des arguments qui lui ont été présentés) :

[59]      Ainsi, selon le procureur patronal, même si la loi prévoit qu’un salarié perd son ancienneté après deux ans d’absence à la suite d’un accident de travail, une convention collective pourrait prolonger ce délai à trois ans. Dans un tel cas, d’expliquer le procureur, l’arbitre aurait juridiction pour décider du sort d’un grief contestant la fin d’emploi d’un salarié après deux ans et demi d’absence à la suite d’un accident de travail.

[60]      En l’espèce, de soutenir le procureur, la CSST a jugé que l’employeur n’avait aucun « emploi convenable » à offrir au plaignant à la suite de son accident de travail, alors que par ses griefs, ce dernier réclame soit sa réintégration chez l’employeur dans quelque emploi que ce soit, soit certains emplois bien précis.

[61]      Pour trancher le litige, d’expliquer le procureur, l’arbitre devrait donc, dans un premier temps, décider si le plaignant a la capacité nécessaire pour exercer les tâches inhérentes aux postes qu’il réclame.

[62]      Or, au dire du procureur, la CSST a déjà fait cet exercice - puisque les postes en question existaient à l’époque - et elle en a conclu qu’aucun « emploi convenable » n’existait chez l’employeur. La preuve a par ailleurs démontré, d’ajouter le procureur, qu’aucun poste de réparateur de commandes électroniques, emploi estimé « convenable » par la CSST, n’existait chez l’employeur.

[63]      Par conséquent, de conclure le procureur, l’arbitre n’a pas compétence pour décider du sort des griefs que le syndicat a portés à l’arbitrage.

[13]        Se fondant sur l'arrêt Société des établissements de plein air du Québec c. Syndicat de la fonction publique du Québec[4], l'arbitre mis en cause rejette le point de vue du Syndicat et décline compétence. Il écarte ainsi les affaires Montréal-Est (Ville de) et Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, section locale 301[5] et Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 3993 (unité croupiers) et Société des casinos du Québec inc. (Danielle Meunier)[6], la première parce qu'elle ne serait pas pertinente et la seconde parce qu'il ne partage pas l'opinion qu'on y exprime.

[14]        Dans cette dernière affaire, l'arbitre Nadeau décide, entre autres choses, qu'une convention collective, aux termes de l'article 4 L.a.t.m.p., peut imposer à l'employeur d'offrir au salarié victime d'une lésion professionnelle un emploi qui n'est ni l'emploi prélésionnel, ni l'emploi équivalent, ni l'emploi convenable dont parle la L.a.t.m.p. Le désaccord relatif à l'application d'une telle mesure, qui est plus avantageuse que ce que prévoit la L.a.t.m.p., peut faire l'objet d'un grief, grief sur lequel l'arbitre a pleine compétence. En pareil cas, l'arbitre n'a pas à réviser les déterminations faites par la CSST relativement à la capacité de travail ou aux limitations fonctionnelles du salarié, ces déterminations servant plutôt de « point de départ »[7] à l'application de la disposition conventionnelle.

[15]        L'arbitre mis en cause n'est pas de cet avis et s'en explique ainsi :

[102]    Avec déférence, je ne crois pas que cette distinction que fait l’arbitre entre « autre emploi » et « emploi équivalent » ou « convenable » soit significative en matière d’accidents de travail, car un salarié affligé de limitations fonctionnelles est forcément limité dans le choix d’emploi qu’il peut occuper, en ce sens qu’il ne peut occuper qu’un emploi qui convient à ses capacités limitées, d’où l’expression « emploi convenable » utilisée par le législateur.

[103]    Sans doute est-ce pour cette raison que dans l’affaire SEPAQ, la Cour d’appel écrit que « [l]a compétence que […] confère [à l’arbitre] l’article 244 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles pour régler les modalités de retour au travail n’inclut pas celle de décider la capacité d’exercer un emploi à la suite d’une lésion professionnelle, question réservée à la CSST et à la CLP en appel », sans faire référence à l’« emploi du salarié », à un « emploi équivalent » ou à un « emploi convenable ».

[104]    Autoriser un arbitre à vérifier s’il existe chez l’employeur quelque emploi que ce soit permettant d’accommoder un salarié atteint de limitations fonctionnelles à la suite d’un accident de travail signifierait exiger qu’il refasse l’évaluation des postes disponibles chez l’employeur à la lumière des capacités du salarié, évaluation déjà effectuée par la CSST qui a compétence exclusive en cette matière.

[105]    Je ne partage donc pas l’opinion de l’arbitre Nadeau selon laquelle, au chapitre des accidents de travail, la référence dans une convention collective à un « autre emploi » soit de portée plus large que l’expression « emploi convenable » que l’on trouve à la loi.

[106]    En l’espèce, j’estime donc que les conditions relatives à la mise en application du droit de retour au travail prévues au paragraphe 38.05 de la convention collective ne sont pas plus avantageuses que celles prévues à la LATMP.

[16]        Pour l'arbitre, tout ce qui se rapporte à la capacité de travail du salarié victime d'une lésion professionnelle relève exclusivement de la L.a.t.m.p. Il fait donc droit aux prétentions de l'Employeur et décline compétence.

[17]        Le Syndicat se pourvoit en révision judiciaire. La Cour supérieure lui donne raison, casse la sentence arbitrale et renvoie les griefs devant le mis en cause « afin qu'il se prononce sur le mérite des griefs »[8]. Appliquant à l'exercice de révision la norme de la décision correcte (puisqu'il s'agit de vérifier ici la compétence de l'arbitre de griefs et de la départager de celle de la CSST et de la CLP), le juge conclut pour l'essentiel que :

-           L'article 4 L.a.t.m.p. « donne ouverture à la possibilité qu'une convention collective puisse prévoir des dispositions plus avantageuses que celles que prévoit la Loi »[9] et, en particulier, qu'une telle convention « puisse prévoir un régime de retour au travail d'un employé victime d'une lésion professionnelle plus avantageux que celui que lui accorde la Loi »[10].

-           L'arbitre saisi d'un grief relatif à une telle disposition conventionnelle a toute la compétence voulue pour en assurer l'application, quoiqu'il ne puisse, dans l'exercice de cette compétence, réviser les déterminations de la CSST au sujet de la capacité résiduelle de travail du salarié, de ses limitations fonctionnelles, de l'existence chez l'employeur, le cas échéant, d'un emploi convenable et, plus généralement, du droit au retour au travail tel que défini par la L.a.t.m.p., déterminations qui relèvent exclusivement de cette instance en vertu de l'article 349.

-           Plus exactement, la CSST, en vertu de la L.a.t.m.p., vérifie que le salarié a été victime d'une lésion professionnelle, voit à l'indemnisation et à la réadaptation de l'individu le cas échéant, évalue sa capacité de travail et, s'il y a lieu, ses limitations fonctionnelles, statue sur la question de savoir s'il est en mesure de reprendre son emploi prélésionnel ou un emploi équivalent et, dans la négative, décide de l'emploi convenable et de la disponibilité d'un tel emploi chez l'employeur.

-           S'agissant d'« emploi convenable », défini par l'article 2 L.a.t.m.p., la CSST doit tenir compte des qualifications professionnelles du travailleur, « ce qui fait que, à titre d'exemple, l'enseignant à McGill ne se verra pas attribuer par la CSST à titre d'“emploi convenable” un emploi de préposé à l'entretien ménager, ce qui est logique et juste vu les objectifs du système compensatoire que vise la Loi »[11].

-           Or, c'est là précisément ce que prévoit la clause 38.05 de la convention collective, disposition plus avantageuse que celles de la loi, au sens de l'article 4 L.a.t.m.p., en ce que le salarié s'y voit en effet « offrir un plus large éventail d'emplois que ne peut le faire la Commission, puisque l’article 38.05 de la convention collective accorde au travailleur le droit d’occuper tout emploi permis par son état de santé alors que les seuls emplois analysés et donc couverts par la décision de la CSST sont ceux qui tiennent en compte les critères plus restrictifs compris à la définition de l’“emploi convenable” dont elle a la charge de décider »[12].

-           L'arbitre possède la compétence nécessaire à la mise en œuvre de cette disposition conventionnelle, ce qui se fera sans remise en question des déterminations de la CSST sur les sujets que lui confie la loi.

[18]        Le juge précise en outre que :

[61]      Or, cette alternative est précisément celle qu’autorise l’article 38.05 de la convention collective : la Loi étant d’ordre public, le travailleur pourra évidemment bénéficier du régime légal qui y est prévu, dans l’éventualité où il peut être replacé à son poste, qu’il puisse occuper un « emploi équivalent » ou encore qu’il puisse occuper un « emploi convenable », de façon à mettre à profit ses qualifications professionnelles (diplomation, expérience professionnelle, etc.).

[62]      Le travailleur pourra en plus, si le régime légal lui est moins favorable, par exemple si la décision de la CSST ne lui permet pas d’occuper l’un ou l’autre de ces types d’emplois chez son employeur mais seulement un « emploi convenable » ailleurs sur le marché du travail, ce qui dans les faits peut vouloir dire rechercher en vain un tel emploi, choisir d’ « être replacé, sans affichage, à un autre poste que son état de santé lui permet d’occuper, compte tenu des postes disponibles à combler », et ce, sans égard à ses qualifications professionnelles, même si cela est susceptible d’entraîner une diminution de sa rémunération.

[63]      L’article 38.05 lui accorde une alternative à la recherche d’un emploi, avec les aléas qu’une telle tâche comporte. Cette alternative ne s’oppose en rien au régime légal : elle s’y ajoute.

[64]      L’employeur soumet que reconnaître en cet article 38.05 une disposition plus avantageuse que le régime prévu à la Loi emportera la reprise de l’évaluation des capacités résiduelles du travailleur, analyse qui relève de la compétence exclusive de la CSST en application de l’article 349 de la Loi.

[65]      D’abord, il est utile de souligner qu’à cette étape, l’évaluation des capacités résiduelles du travailleur aura déjà été complétée et qu’elle gardera toute sa pertinence. Il ne sera alors pas question de recommencer cet exercice ni de tenter de contredire les conclusions de la Commission.

[66]      Ensuite, il est à présumer que le travailleur devra évidemment rencontrer tous les critères du « poste que son état de santé lui permet[tra] d’occuper » et que l’évaluation qui sera alors faite sera du même type, sans être nécessairement plus lourde ou onéreuse, que l’évaluation qui sera faite des autres candidats à ce poste.

[19]        L'employeur a été autorisé à faire appel de ce jugement et la CSST, à intervenir au débat.

II.         Analyse

[20]        Je l'écris sans attendre : j'estime qu'il y a lieu de rejeter l'appel. Les raisons qui m'amènent à suggérer que la Cour statue ainsi sont essentiellement celles du juge de première instance, auxquelles je n'ajouterai guère, sinon pour dissiper l'ambiguïté qui paraît résulter des arrêts de la Cour dans Société des établissements de plein air du Québec c. Syndicat de la fonction publique du Québec[13] et Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, section locale 427 c. Tembec, usine de Matane[14], ainsi que dans Syndicat des travailleuses et travailleurs des postes c. Société canadienne des postes[15].

* *

[21]        Les questions litigieuses s'inscrivant dans le cours d'un processus de révision judiciaire, quelques commentaires sur la norme de contrôle sont de mise.


[22]        À mon avis, l'affaire soulève une problématique à deux volets :

-           L'article 4 L.a.t.m.p.[16] permet-il aux parties à une convention collective de prévoir, au bénéfice du travailleur, des conditions plus avantageuses que celles de la L.a.t.m.p. et, dans l'affirmative, qui a compétence pour régler les mésententes résultant de telles dispositions conventionnelles?

-           En l'espèce, et dans la mesure où la première question recevrait une réponse affirmative, la convention collective unissant les parties contient-elle pareille disposition?

[23]        Le premier volet se rattache 1° à l'interprétation de la L.a.t.m.p., loi d'ordre public, 2° aux rapports entre cette loi et la convention collective, 3° à la compétence (au sens vires du terme[17]) de l'arbitre de se saisir de questions relatives à un salarié victime d'une lésion professionnelle et, conséquemment, 4° aux champs d'intervention respectifs de la CSST et de la CLP, d'une part, et de l'arbitre de griefs, d'autre part. Il s'agit là d'éléments indissociables, le dernier dépendant entièrement des trois premiers. Le débat portant en définitive sur les compétences respectives d'instances potentiellement concurrentes, il y a lieu d'appliquer la norme de la décision correcte[18].

[24]        À l'instar du juge de première instance, et comme on le verra, je conclurai que l'article 4 autorise l'insertion à la convention collective de dispositions plus avantageuses pour le travailleur, dispositions dont l'interprétation et l'application relèvent de la compétence arbitrale.


[25]        Le second volet requiert plutôt l'application de la norme de la décision raisonnable. Comme le rappelle l'arrêt Mouvement laïque québécois c. Saguenay (Ville)[19], sous la plume majoritaire du juge Gascon, il est tout à fait possible que les diverses questions que soulève un litige doivent être examinées en fonction de normes différentes. C'est ici le cas. Ayant conclu que c'est de l'arbitre que relève l'application de l'article 4, 2e al., L.a.t.m.p., c'est encore à lui que reviendra de répondre à la question de décider si, en l'espèce, la convention collective contient bel et bien une disposition plus avantageuse pour le salarié que la L.a.t.m.p. et, le cas échéant, de la mettre en œuvre. La détermination du sens et de la portée, dans les faits, d'une disposition conventionnelle particulière est en effet au cœur de la mission que lui confie le législateur et, sur ce point, sa sentence ne pourra être révisée que sous l'angle de la décision raisonnable, aucune des exceptions prévues par la jurisprudence n'étant pertinente.

[26]        La question de savoir si une convention collective particulière comporte, dans les faits, une disposition accordant au travailleur plus de droits que la L.a.t.m.p. n'est en effet pas une question constitutionnelle, elle ne se rapporte pas à la compétence de tribunaux concurrents et elle n'a pas les caractéristiques de la question de droit revêtant une importance capitale pour le système juridique et étrangère à la compétence du tribunal spécialisé[20]. Il ne s'agit pas non plus d'une question de compétence stricto sensu (c.-à-d. au sens vires du terme)[21] : l'arbitre chargé de statuer sur cette question ne s'arroge pas de compétence en décidant que la convention contient une disposition plus avantageuse que la L.a.t.m.p., pas plus qu'il ne refuse d'exercer sa compétence lorsqu'il statue que la convention n'en contient pas. Dans les deux cas, il exerce sa compétence décisionnelle et, en révision judiciaire, on ne peut que se demander s'il a statué de manière raisonnable.

* *

[27]        Les articles 1, 4, 25, 349, 358, 359, 359.1, 369 et 438 L.a.t.m.p. tracent le cadre législatif général de la présente affaire :


 

1.         La présente loi a pour objet la réparation des lésions profession-nelles et des conséquences qu'elles entraînent pour les bénéficiaires.

            Le processus de réparation des lésions professionnelles comprend la fourniture des soins nécessaires à la consolidation d'une lésion, la réadaptation physique, sociale et professionnelle du travailleur victime d'une lésion, le paiement d'indemnités de remplace­ment du revenu, d'indemnités pour préjudice corporel et, le cas échéant, d'indemnités de décès.

            La présente loi confère en outre, dans les limites prévues au chapitre VII, le droit au retour au travail du travailleur victime d'une lésion professionnelle.

1.        The object of this Act is to provide compensation for employ­ment injuries and the consequences they entail for beneficiaries.

            The process of compensation for employment injuries includes provision of the necessary care for the consolidation of an injury, the physical, social and vocational rehabilitation of a worker who has suffered an injury, the payment of income replacement indemnities, compensation for bodily injury and, as the case may be, death benefits.

            This Act, within the limits laid down in Chapter VII, also entitles a worker who has suffered an employment injury to return to work.

4.         La présente loi est d'ordre public.

            Cependant, une convention ou une entente ou un décret qui y donne effet peut prévoir pour un travailleur des dispositions plus avantageuses que celles que prévoit la présente loi.

4.         This Act is a public Act.

            Notwithstanding the first paragraph, any covenant or any agreement or order giving effect thereto may provide more favourably for a worker than does this Act.

25.       Les droits conférés par la présente loi le sont sans égard à la responsabilité de quiconque.

25.       Rights vested under this Act are conferred without regard to any personal liability.

349.     La Commission a compétence exclusive pour examiner et décider toute question visée dans la présente loi, à moins qu'une disposition particulière ne donne compétence à une autre personne ou à un autre organisme.

349.     The Commission has exclusive jurisdiction to examine and decide any question contemplated in this Act unless a special provision gives the jurisdiction to another person or agency.

358.     Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission en vertu de la présente loi peut, dans les 30 jours de sa notification, en demander la révision.

            Cependant, une personne ne peut demander la révision d'une question d'ordre médical sur laquelle la Commission est liée en vertu de l'article 224 ou d'une décision que la Commission a rendue en vertu de la section III du chapitre VII, ni demander la révision du refus de la Commission de reconsidérer sa décision en vertu du premier alinéa de l'article 365.

            Une personne ne peut demander la révision de l'acceptation ou du refus de la Commission de conclure une entente prévue à l'article 284.2 ni du refus de la Commission de renoncer à un intérêt, une pénalité ou des frais ou d'annuler un intérêt, une pénalité ou des frais en vertu de l'article 323.1.

            Une personne ne peut demander la révision du taux provisoire fixé par la Commission en vertu de l'article 315.2.

358.     A person who believes he has been wronged by a decision rendered by the Commission under this Act may, within 30 days of notification of the decision, apply for review thereof.

            However, a person may not apply for the review of any matter of a medical nature in respect of which the Commission is bound under section 224, for the review of a decision made by the Commission under Division III of Chapter VII or for the review of the refusal of the Commission to reconsider its decision pursuant to the first paragraph of section 365.

            No person may apply for the review of the Commission's decision to accept or refuse to enter into an agreement under section 284.2, or to refuse to waive or cancel interest, a penalty or fees under section 323.1.

            A person may not apply for the review of a provisional rate fixed by the Commission under section 315.2.

359.     Une personne qui se croit lésée par une décision rendue à la suite d'une demande faite en vertu de l'article 358 peut la contester devant la Commission des lésions professionnelles dans les 45 jours de sa notification.

359.     A person who believes he has been wronged by a decision made following an application under section 358 may, within 45 days of being notified of the decision, contest it before the Commission des lésions professionnelles.

359.1   Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission en application de la section III du chapitre VII peut la contester devant la Commission des lésions professionnelles dans les 45 jours de sa notification.

359.1   A person who believes he has been wronged by a decision made by the Commission under Division III of Chapter VII may, within 45 days of being notified of the decision, contest it before the Commission des lésions professionnelles.

369.     La Commission des lésions professionnelles statue, à l'exclusion de tout autre tribunal :

  1° sur les recours formés en vertu des articles 359, 359.1, 450 et 451;

  2° sur les recours formés en vertu des articles 37.3 et 193 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (chapitre S-2.1).

369.     The board shall, to the exclusion of any other tribunal, make determinations on

  (1)  proceedings brought under section 359, 359.1, 450 or 451;

  (2)  proceedings brought under section 37.3 or 193 of the Act respecting occupational health and safety (chapter S-2.1).

438.     Le travailleur victime d'une lésion professionnelle ne peut intenter une action en responsabilité civile contre son employeur en raison de sa lésion.

438.     No worker who has suffered an employment injury may institute a civil liability action against his employer by reason of his employment injury.

[28]        La L.a.t.m.p. pourvoit donc à la mise sur pied d'un régime « sans faute » visant à indemniser les travailleurs victimes d'une lésion professionnelle, mais également à assurer, selon diverses modalités, leur réadaptation et, si possible, leur retour au travail, prioritairement chez l'employeur et, à défaut, sur le marché. Ce régime, dont l'administration et l'application sont, à quelques exceptions près[22], confiées en exclusivité à la CSST et, lorsque les décisions de celle-ci sont contestées, à la CLP, est d'ordre public (art. 4, 1er al., L.a.t.m.p.). L'on ne peut donc y déroger.

[29]        Le régime mis en place par la L.a.t.m.p. se substitue par ailleurs au régime de responsabilité civile qui s'appliquerait autrement et auquel les employeurs, mais aussi les travailleurs, échappent dans la mesure prévue par les articles 438 et s. L.a.t.m.p.[23]. À cet égard, comme le rappelle le juge Gonthier dans Béliveau St-Jacques c. Fédération des employées et employés de services publics inc.[24], il se distingue par « sa large autonomie face au droit commun »[25], se pose en « compromis social, longuement mûri entre diverses forces contradictoires »[26], établissant un « système d'indemnisation fondé sur les principes d'assurance et de responsabilité collective sans égard à la faute, axé sur l'indemnisation et donc sur une forme de liquidation définitive des recours »[27].

[30]        Cela dit, si ce régime est d'ordre public, sans qu'on puisse s'y soustraire, et si, en contrepartie du droit des travailleurs à l'indemnisation, à la réadaptation et au retour au travail, il exempte les employeurs de la responsabilité civile qui pourrait leur échoir du fait d'une lésion professionnelle, il n'empêche pas pour autant travailleurs et employeurs de convenir de mesures plus favorables aux premiers. C'est ce que permet explicitement le second alinéa de l'article 4 L.a.t.m.p., reproduit plus haut : « une convention ou une entente […] peut prévoir pour un travailleur des dispositions plus avantageuses que celles que prévoit la présente loi » (« any covenant or any agreement (…) may provide more favourably for a worker than does this Act »).

[31]        Certes, on ne peut contraindre l'employeur à faire mieux. La nature du compromis est celle-là : le travailleur a droit à tout ce que prévoit la L.a.t.m.p., en échange de quoi l'employeur ne peut être tenu d'accorder plus. Mais si on ne peut l'y forcer, l'employeur demeure toutefois libre - à la différence du travailleur, qui n'a pas la même latitude de renoncer à ses droits - de consentir davantage que ce à quoi l'oblige la L.a.t.m.p et de s'entendre en ce sens avec le travailleur ou avec le syndicat qui représente ses salariés.

[32]        On peut donc concevoir, par exemple, qu'un contrat individuel de travail ou une convention collective stipule que l'employeur paiera le plein salaire du travailleur victime d'une lésion professionnelle, et ce, pendant tout ou partie de la période au cours de laquelle ce travailleur aurait autrement reçu l'indemnité de remplacement du revenu prévue par la loi[28], ou encore qu'il paiera la différence entre cette indemnité et le salaire normal du travailleur (voir du reste l'art. 126 L.a.t.m.p.). C'est un avantage que l'on trouve assez couramment dans les conventions collectives du secteur public ou parapublic (mais rarement au privé), ainsi qu'en fait foi la jurisprudence de la CLP[29], et qu'illustre d'ailleurs la convention unissant ici les parties. La clause 38.01 prescrit en effet que :

38.01   (a)  En cas d'accidents du travail ou de maladies professionnelles couverts par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, l'Université doit verser au salarié son salaire régulier moins toutes les déductions habituelles pendant les cinquante-deux (52) premières semaines d'invalidité, en autant que le salarié soit admissible à l'indemnité de remplacement du revenu selon la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST). Pendant les cinquante-deux (52) premières semaines d'invalidité complète, les indemnités octroyées par la CSST sont versées directement à l'Université.

            […]

            (c)  Après les cinquante-deux (52) premières semaines, si le salarié est toujours dans l'incapacité de reprendre ses fonctions en raison de son invalidité, toutes les indemnités applicables sont versées directement par la CSST au salarié, conformément aux règlements applicables.

[33]        Notons que, au cours de l'audience, l'avocat de l'Employeur a reconnu que de telles clauses salariales n'enfreignent pas la L.a.t.m.p. et qu'elles sont valables et contraignantes.

[34]        Peut-on envisager que, de même, une convention collective (ou un contrat individuel de travail) confère au salarié, en matière de retour au travail, des droits plus étendus que ceux de la L.a.t.m.p.? À première vue, rien ne s'y oppose, le second alinéa de l'article 4 ne restreignant pas la nature des avantages qu'une convention peut accorder au travailleur en plus de ceux que prévoit la loi.

[35]        Pour répondre mieux à la question cependant, il convient de rappeler d'abord ce qu'il en est du droit au retour au travail.

* *

[36]        Sous réserve d'exceptions ou de modalités dont il n'est pas utile de parler ici, les articles 236 et 239 L.a.t.m.p. posent le principe :

236.     Le travailleur victime d'une lésion professionnelle qui redevient capable d'exercer son emploi a droit de réintégrer prioritairement son emploi dans l'établissement où il travaillait lorsque s'est manifestée sa lésion ou de réintégrer un emploi équivalent dans cet établissement ou dans un autre établissement de son employeur.

236.     A worker who has suffered an employment injury and again becomes able to carry on his employment is entitled to be reinstated by preference to others in his employment in the establishment where he was working when the employment injury appeared or reassigned to equivalent employment in that establishment or in another establishment of his employer.

239.     Le travailleur qui demeure incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle et qui devient capable d'exercer un emploi convenable a droit d'occuper le premier emploi convenable qui devient disponible dans un établissement de son employeur.

            Le droit conféré par le premier alinéa s'exerce sous réserve des règles relatives à l'ancienneté prévues par la convention collective applicable au travailleur.

239.     A worker who remains unable to carry on his employment as a result of an employment injury and who becomes able to carry on suitable employment is entitled to hold the first suitable employment that becomes available in an establishment of his employer.

            The right conferred by the first paragraph is exercised subject to the rules respecting seniority prescribed by the collective agreement applicable to the worker.

[37]        Ce droit au retour au travail chez l'employeur doit en principe être exercé à l'intérieur du délai que fixe l'article 240 L.a.t.m.p.[30], délai qui peut s'allonger en raison de l'article 241 :

240.     Les droits conférés par les articles 236 à 239 peuvent être exercés :

  1° dans l'année suivant le début de la période d'absence continue du travailleur en raison de sa lésion professionnelle, s'il occupait un emploi dans un établissement comptant 20 travailleurs ou moins au début de cette période; ou

  2° dans les deux ans suivant le début de la période d'absence continue du travailleur en raison de sa lésion professionnelle, s'il occupait un emploi dans un établissement comptant plus de 20 travailleurs au début de cette période.

            Le retour au travail d'un travailleur à la suite d'un avis médical n'interrompt pas la période d'absence continue du travailleur si son état de santé relatif à sa lésion l'oblige à abandonner son travail dans la journée du retour.

240.     The rights conferred by sections 236 to 239 may be exercised

  (1)  within one year following the beginning of the period of continuous absence of the worker as a result of an employment injury if he held employment in an establishment numbering twenty workers or fewer at the beginning of the period; or

  (2)  within two years following the beginning of the period of continuous absence of the worker as a result of an employment injury if he held employment in an establishment numbering more than twenty workers at the beginning of the period.

            The fact that a worker returns to work following medical advice does not interrupt his period of continuous absence if, as a consequence of his injury, the state of his health related to his injury forces him to leave his work the day he returns.

241.     Une demande de révision faite en vertu de l'article 358 ou un recours formé en vertu de l'article 359 qui a pour objet l'incapacité du travailleur d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle suspend la période d'absence continue prévue par l'article 240 si la décision finale conclut que le travailleur était capable d'exercer son emploi à l'intérieur de cette période.

241.     An application for review filed under section 358 or a proceeding brought under section 359 in respect of the inability of a worker to carry on his employment by reason of an employment injury suspends the period of continuous absence contemplated in section 240 if the final decision is to the effect that the worker was able to carry on his employment during that period.

[38]        Pour bien comprendre ces dispositions, il faut dire quelques mots des notions d'« emploi équivalent » (« equivalent employment ») et d'« emploi convenable » (« suitable employment »), termes que l'article 2 L.a.t.m.p. définit ainsi[31] :

2.   […]

« emploi convenable » : un emploi approprié qui permet au travailleur victime d'une lésion professionnelle d'utiliser sa capacité résiduelle et ses qualifications professionnelles, qui présente une possibilité raisonnable d'embauche et dont les conditions d'exercice ne comportent pas de danger pour la santé, la sécurité ou l'intégrité physique du travailleur compte tenu de sa lésion;

2.   (…)

suitable employment” means appropriate employment that allows a worker who has suffered an employment injury to use his remaining ability to work and his vocational qualifications, that he has a reasonable chance of obtaining and the working conditions of which do not endanger the health, safety or physical well-being of the worker, considering his injury;

« emploi équivalent » : un emploi qui possède des caractéristiques semblables à celles de l'emploi qu'occupait le travailleur au moment de sa lésion professionnelle relativement aux qualifications professionnelles requises, au salaire, aux avantages sociaux, à la durée et aux conditions d'exercice;

equivalent employment” means employment of a similar nature to the employment held by the worker when he suffered the employment injury, from the standpoint of vocational qualifications required, wages, social benefits, duration and working conditions;

[39]        Les articles 169 à 173, qui se trouvent au chapitre que la L.a.t.m.p. consacre à la réadaptation, prévoient pour leur part que :

169.     Si le travailleur est incapable d'exercer son emploi en raison d'une limitation fonctionnelle qu'il garde de la lésion professionnelle dont il a été victime, la Commission informe ce travailleur et son employeur de la possibilité, le cas échéant, qu'une mesure de réadaptation rende ce travailleur capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent avant l'expiration du délai pour l'exercice de son droit au retour au travail.

            Dans ce cas, la Commission prépare et met en œuvre, avec la collaboration du travailleur et après consultation de l'employeur, le programme de réadaptation professionnelle approprié, au terme duquel le travailleur avise son employeur qu'il est redevenu capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent.

169.     Where a worker is unable to carry on his employment because he retains a functional disability resulting from his employment injury, the Commission shall inform the worker and his employer of the existence, where that is the case, of a rehabilitation measure that may enable the worker to carry on his employment or an equivalent employment before the expiry of the period for the exercise of his right to return to work.

            In the case of the first paragraph, the Commission, with the worker's collaboration and after consulting the employer, shall prepare and implement the appropriate vocational rehabilitation program, at the end of which the worker shall inform his employer that he is again able to carry on his employment or equivalent employment.

170.     Lorsqu'aucune mesure de réadaptation ne peut rendre le travailleur capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent, la Commission demande à l'employeur s'il a un emploi convenable disponible et, dans l'affirmative, elle informe le travailleur et son employeur de la possibilité, le cas échéant, qu'une mesure de réadaptation rende ce travailleur capable d'exercer cet emploi avant l'expiration du délai pour l'exercice de son droit au retour au travail.

            Dans ce cas, la Commission prépare et met en œuvre, avec la collaboration du travailleur et après consultation de l'employeur, le programme de réadaptation professionnelle approprié, au terme duquel le travailleur avise son employeur qu'il est devenu capable d'exercer l'emploi convenable disponible.

170.     Where no rehabilitation measure exists that may enable a worker to carry on his employment or equivalent employment, the Commission shall ask the employer whether he has any suitable employment available and, if so, the Commission shall inform the worker and his employer of the existence, where that is the case, of a rehabilitation measure that may enable the worker to carry on that employment before the expiry of the period for the exercise of his right to return to work.

            In the case of the first paragraph, the Commission, with the worker's collaboration and after consulting the employer, shall prepare and implement the appropriate vocational rehabilitation program, at the end of which the worker shall inform his employer that he has become able to carry on the available suitable employment.

171.     Lorsqu'aucune mesure de réadaptation ne peut rendre le travailleur capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent et que son employeur n'a aucun emploi convenable disponible, ce travailleur peut bénéficier de services d'évaluation de ses possibilités professionnelles en vue de l'aider à déterminer un emploi convenable qu'il pourrait exercer.

            Cette évaluation se fait notamment en fonction de la scolarité du travailleur, de son expérience de travail, de ses capacités fonctionnelles et du marché du travail.

171.     Where no rehabilitation measure exists that may enable the worker to carry on his employment or equivalent employment and his employer has no available suitable employment, the worker may have his vocational potential evaluated to help him to determine what employment would be suitable for him.

            The main factors of the evaluation are the worker's formal training, his work experience, his functional aptitudes and the labour market.

172.     Le travailleur qui ne peut redevenir capable d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle peut bénéficier d'un programme de formation profession­nelle s'il lui est impossible d'accéder autrement à un emploi convenable.

            Ce programme a pour but de permettre au travailleur d'acquérir les connaissances et l'habileté requises pour exercer un emploi convenable et il peut être réalisé, autant que possible au Québec, en établissement d'enseignement ou en industrie.

172.     A worker who remains unable to carry on his employment again by reason of his employment injury may follow a vocational training program where it is otherwise impossible for him to obtain suitable employment.

            The purpose of the program is to enable the worker to acquire the knowledge and skills required to carry on a suitable employment and the worker may follow the program in an educational institution or in an industrial establishment, in Québec as far as possible.

173.     Le travailleur victime d'une lésion professionnelle qui redevient capable d'exercer son emploi peut recevoir des services de support en recherche d'emploi si le délai pour l'exercice de son droit au retour au travail est expiré et son employeur ne le réintègre pas dans son emploi ou dans un emploi équivalent.

            Le travailleur incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle qui devient capable d'exercer un emploi convenable peut aussi recevoir ces services si cet emploi n'est pas disponible.

173.     A worker who has suffered an employment injury and who becomes again able to carry on his employment may receive assistance in finding employment if the period for exercising his right to return to work has expired and his employer does not reinstate him in his employment or in equivalent employment.

            A worker who is unable to carry on his employment as a result of his employment injury and who becomes able to hold suitable employment also may receive assistance in finding employment where suitable employment is not available.

[40]        De façon générale, le travailleur qui, à l'intérieur du délai prescrit pour l'exercice du droit au retour au travail (art. 240 et 241 L.a.t.m.p.), recouvre la capacité d'exercer son emploi, c'est-à-dire son emploi prélésionnel, reprend donc celui-ci (ou un emploi équivalent[32]), avec le salaire et les avantages aux mêmes taux et conditions que ceux dont il aurait bénéficié s'il avait continué à exercer son emploi pendant son absence (art. 242, 1er al., et 235, paragr. 1, L.a.t.m.p.). Si le travailleur recouvre cette capacité postérieurement à l'expiration du droit au retour au travail, il a alors droit à des services de soutien à la recherche d'emploi (art. 173 et 174 L.a.t.m.p.) ainsi qu'au versement, pendant au plus une année, de l'indemnité de remplacement du revenu (art. 48 L.a.t.m.p.), son droit à cette indemnité s'éteignant pour le reste (art. 57, paragr. 1, L.a.t.m.p.).

[41]        S'il n'est pas en mesure d'exercer l'emploi prélésionnel ou équivalent, le travailleur qui est toujours dans le délai prescrit par les articles 240-241 L.a.t.m.p. occupera plutôt chez l'employeur le premier emploi convenable disponible, s'il en est, sous réserve des règles relatives à l'ancienneté que prévoit la convention collective, le cas échéant. Il aura alors le droit de recevoir « le salaire et les avantages liés à cet emploi, en tenant compte de l'ancienneté et du service continu qu'il a accumulés » pendant son absence (art. 242, 2e al., et 235, paragr. 1, L.a.t.m.p.). Il recevra également une indemnité de remplacement du revenu réduite, dans la mesure prévue par les articles 49, 1er al., et 50 et s. L.a.t.m.p., le tout sous réserve des art. 53 et s.

[42]        Si l'emploi convenable n'est pas disponible chez l'employeur (que ce soit parce qu'il n'existe pas dans l'entreprise, auquel cas l'employeur n'est pas tenu de le créer[33], ou qu'il existe, mais est occupé, auquel cas l'employeur n'a pas à le libérer), les articles 171 (détermination d'un emploi convenable sur le marché), 172 (formation) et 173, 2e al. (support en recherche d'emploi) prennent le relais. Que ce soit avant ou après l'expiration du droit au retour au travail, la CSST continue donc la prise en charge du travailleur en lui fournissant les mesures de soutien (réadaptation, formation, recherche d'emploi, etc. - voir l'art. 167) destinées à lui permettre d'occuper un emploi convenable sur le marché du travail. Le versement de l'indemnité de remplacement du revenu obéit alors aux prescriptions des articles 49 et s. L.a.t.m.p.

[43]        Soulignons enfin que l'emploi convenable, qu'il s'exerce chez l'employeur ou ailleurs, n'est pas défini en fonction de la seule capacité du travailleur à l'occuper. Ce n'est donc pas parce qu'un travailleur est en mesure d'accomplir les tâches d'un emploi que celui-ci peut aussitôt être qualifié d'emploi convenable. Aux termes de l'article 2 L.a.t.m.p., il s'agit plutôt d'un emploi, qui, bien sûr, permet au travailleur d'user de sa capacité résiduelle de travail, dans le respect de ses limitations fonctionnelles, mais qui lui permet aussi d'utiliser ses qualifications professionnelles, tout en présentant une possibilité raisonnable d'embauche. Il doit en outre s'agir d'un emploi approprié. Voici comment la CLP résumait assez récemment la notion d'« emploi convenable », dont la détermination requiert un exercice de pondération éminemment factuel et hautement personnalisé :

[65]      Pour être « convenable », un emploi doit respecter les conditions suivantes :

-     être approprié, soit de respecter dans la mesure du possible les intérêts et les aptitudes du travailleur;

-     permettre au travailleur d’utiliser sa capacité résiduelle, soit, plus particulièrement de respecter ses limitations fonctionnelles, qu’elles soient d’origine professionnelle ou personnelle;

-     permettre au travailleur d’utiliser ses qualifications professionnelles dans la mesure du possible, en tenant compte de sa scolarité et de son expérience de travail;

-     présenter une possibilité raisonnable d’embauche;

-     ne pas comporter de danger pour la santé, la sécurité ou l’intégrité du travailleur étant donné sa lésion.[34]

[44]        Sur la question du caractère approprié de l'emploi, la CLP a par ailleurs maintes fois rappelé que cette « caractéristique vise à tenir compte de diverses réalités individuelles qui ont pour effet de particulariser la situation d’un travailleur et qui ne peuvent être couvertes par les autres caractéristiques servant à qualifier un emploi de “convenable” »[35] (par exemple, certaines contraintes personnelles[36] ou sa capacité de gain).

[45]        Une précision s'impose, qui se rattache à un sujet que j'aborderai plus loin. Il ressort de la jurisprudence relative à l'emploi convenable que l'on n'imposera bien sûr pas au travailleur un emploi qui dépasse ses qualifications professionnelles. C'est d'ailleurs là l'un des motifs les plus fréquents de contestation, devant la CLP, des décisions de la CSST en matière d'emploi convenable. Mais qu'en est-il de l'inverse? Peut-on considérer comme convenable au sens de l'article 2 L.a.t.m.p. l'emploi qui ne permet pas l'utilisation, c'est-à-dire la mise à profit, des qualifications professionnelles de l'individu? Plus exactement, peut-on considérer comme convenable l'emploi qui respecte les limitations fonctionnelles du travailleur et présente des possibilités d'embauche, mais ne fait appel qu'aux plus élémentaires de ses qualifications professionnelles? Autrement dit, et pour emprunter un exemple-choc au jugement de première instance, la CSST peut-elle décider que l'emploi de préposé à l'entretien est un emploi convenable pour le travailleur dont l'emploi prélésionnel est celui de professeur[37]?

[46]        La question n'est pas sans importance puisque le fait d'être en mesure d'exercer à temps plein un emploi convenable entraîne la réduction de l'indemnité de remplacement du revenu, et ce, peu importe que, dans les faits, le travailleur occupe ou non cet emploi convenable déterminé (voir les art. 47, 49, 1er al., et 50 L.a.t.m.p., sous réserve du délai de grâce d'une année que prévoit le 2e al. de l'art. 49[38]). La détermination d'un emploi convenable a donc sur le travailleur un impact majeur, d'où l'intérêt de savoir si l'emploi convenable peut être un emploi qui ne met aucunement à profit des qualifications professionnelles d'un individu. La question intéresse tout autant l'employeur, puisque l'obligation qui lui incombe en vertu de l'article 170 L.a.t.m.p. est limitée à l'« emploi convenable » et non pas à tout emploi disponible dans son entreprise (sans parler de la question de l'imputation des coûts résultant de la lésion professionnelle - art. 326 et s. L.a.t.m.p.).

[47]        Considérant la définition que la L.a.t.m.p. donne à l'emploi convenable et considérant la jurisprudence de la CLP en la matière[39], on doit répondre à cette question par la négative. Si le législateur avait voulu que le travailleur victime d'une lésion professionnelle d'où découlent des limitations fonctionnelles soit tenu d'exercer tout emploi que sa capacité de travail résiduelle lui permet d'accomplir, c'est de cette façon qu'il aurait défini l'« emploi convenable » et non pas en fonction des critères qu'il énumère à l'article 2 L.a.t.m.p. et qu'appliquent les décisions de la CLP.

[48]        Bien sûr, les qualifications professionnelles et la capacité résiduelle de travail du travailleur victime d'une lésion professionnelle ne concordent souvent plus, de sorte que, vu l'exercice de pondération qu'impose l'article 2 L.a.t.m.p., l'« emploi convenable » sera parfois (quoique pas nécessairement) en deçà des qualifications (scolarité et expérience) du travailleur, et ce, en raison des limitations fonctionnelles de celui-ci. Il ne peut toutefois s'agir de n'importe quel emploi, la loi exigeant que l'on respecte, autant que possible, les qualifications professionnelles de l'individu et que cet emploi soit par ailleurs approprié.

[49]        Dans un tout autre ordre d'idées, signalons enfin que, dans un arrêt récent[40], la Cour a statué que, tant dans la détermination de la capacité d'occuper l'emploi prélésionnel, l'emploi équivalent ou l'emploi convenable qu'aux fins d'établir la disponibilité de ce dernier, la CSST doit considérer les obligations qu'impose la Charte des droits et libertés de la personne[41] en matière de lutte contre la discrimination pour cause de handicap, incluant le devoir d'accommodement qui incombe à l'employeur. Cet aspect de la dynamique de la réintégration au travail n'est pas en cause ici.

* *

[50]        C'est donc là l'état général du droit en matière de retour au travail, ce qui nous ramène à la question de savoir si les parties à une convention (collective en l'occurrence) peuvent y stipuler des conditions de retour au travail plus avantageuses pour le travailleur.

[51]        J'ai indiqué déjà que, à première vue, l'article 4, 2e al., La.t.m.p. le permet[42]. Comme on l'a vu, la chose est du reste acquise en ce qui concerne la dimension salariale et indemnitaire[43]. Pourquoi n'en irait-il pas de même en matière de retour au travail? Pourquoi les parties seraient-elles empêchées de conférer au travailleur un droit au retour au travail là où la L.a.t.m.p. n'en donne pas? Pourquoi les parties ne pourraient-elles, par exemple :

-           convenir d'une prolongation du délai de retour au travail prévu par l'article 240 L.a.t.m.p. et donc obliger l'employeur à réintégrer le travailleur soit dans l'emploi prélésionnel (ou l'emploi équivalent), soit dans l'emploi convenable, et ce, au delà de la période prescrite par cette disposition;

-           alourdir, au bénéfice du travailleur, l'obligation qui incombe à l'employeur en vertu de l'article 170 L.a.t.m.p. en lui imposant de créer ou de rendre disponible un emploi convenable au sein de son entreprise, s'il n'en est pas qui existe déjà ou soit disponible;

-           dans les cas où aucun emploi convenable, au sens de la L.a.t.m.p. n'existe ou n'est disponible au sein de l'entreprise, obliger l'employeur à offrir au travailleur incapable de reprendre l'emploi prélésionnel (ou équivalent) tout autre emploi correspondant à la capacité de travail de l'individu?

[52]        L'Employeur soutient cependant que la portée du second alinéa de l'article 4 serait limitée par l'article 244, dont voici le texte :

244.     Une convention collective peut prévoir des dispositions relatives à la mise en application du droit au retour au travail prévu par la présente section.

      Le droit au retour au travail d'un travailleur est mis en application de la manière prévue par la convention collective qui lui est applicable, si celle-ci contient des dispositions prévues par le premier alinéa ou des dispositions relatives au retour au travail après un accident ou une maladie.

      Dans ce cas, le travailleur qui se croit lésé dans l'exercice de son droit au retour au travail peut avoir recours à la procédure de griefs prévue par cette convention.

244.     A collective agreement may contain clauses respecting the implementation of the right to return to work provided for in this division.

      The right to return to work of a worker is implemented in the manner prescribed by the collective agreement applicable to him, if the agreement contains the clauses provided for in the first paragraph or clauses respecting the return to work after accident or disease.

      In the case of this section, a worker who believes he has been wronged in exercising his right to return to work may have recourse to the grievance procedure prescribed by the agreement.

[53]        Par « mise en application » du droit au retour au travail (« implementation » dans la version anglaise), le législateur entendrait ici les modalités du retour au travail, c'est-à-dire la manière dont se fera, en pratique, la réinsertion du travailleur dans l'entreprise (pensons ici, par exemple, à un retour progressif, à l'aménagement d'un horaire, à une formation, à l'application de l'art. 239, 1er al., L.a.t.m.p.). Selon l'Employeur, il ressortirait toutefois du texte de cette disposition que la convention collective, si elle peut prévoir ainsi les modalités du retour au travail, ne peut toutefois modifier de quelque façon (que ce soit en le restreignant ou en l'élargissant) la substance du droit au retour au travail, lequel est strictement défini par la loi. La restreindre serait contraire au premier alinéa de l'article 4 et au caractère d'ordre public de la loi. Quant à l'élargir, le second alinéa de cet article ne saurait le permettre puisque, s'agissant d'une disposition générale, il doit céder le pas à l'article 244, une disposition particulière, qui limite aux seules modalités du retour au travail la nature des stipulations conventionnelles acceptables.

[54]        L'argument ne convainc pas.

[55]        L'article 244, tout comme les articles 245 et 246, avec lesquels il forme un tout, se trouve dans la section I (« droits du travailleur ») du chapitre VII (« droit au retour au travail ») de la L.a.t.m.p., section dans laquelle le législateur énonce le droit au retour au travail (art. 236, 237 et 239) et en aménage l'exercice dans ses grandes lignes (art. 234, 235, 238, 240, 241, 242). Les modalités pratiques de cet exercice, elles, peuvent être régies par la convention collective ou encore, à défaut de dispositions conventionnelles, confiées au comité de santé et de sécurité de « l'établissement où est disponible l'emploi que le travailleur a droit de réintégrer ou d'occuper » (art. 245), ou même, si un tel comité n'existe pas, laissées au bon jugement du travailleur et de l'employeur (art. 246). Les articles 244, 245 et 246 reposent donc tous les trois sur la prémisse que le travailleur exerce, dans le délai prescrit par les articles 240 et 241, le droit au retour au travail que prévoient les articles 234 à 239, le tout selon les déterminations faites par la CSST (ou la CLP) à propos de sa capacité d'occuper l'emploi prélésionnel ou, s'il en est incapable, l'emploi convenable.

[56]        En cas de désaccord (c'est-à-dire si le travailleur « se croit lésé dans l'exercice de son droit au retour au travail »), l'article 244 prévoit le recours à l'arbitrage de grief alors que les articles 245 et 246 prévoient plutôt l'intervention de la CSST[44]. Il va de soi que, saisi d'une telle dispute, l'arbitre de griefs ou la CSST, selon le cas, n'a pas à reprendre l'exercice d'évaluation de la capacité d'exercer l'emploi prélésionnel ou des limitations fonctionnelles de l'individu pas plus que les déterminations déjà faites, le cas échéant, au sujet de l'emploi convenable. Ces déterminations n'ont en effet pas à être remises en cause à ce stade, où l'on se préoccupe seulement de leur mise en œuvre dans le cadre de l'exercice du droit au retour au travail régi par les articles 234 et s. L.a.t.m.p., droit dont les paramètres ont été établis par la CSST et, le cas échéant, la CLP. C'est ce que confirme l'arrêt Société des établissements de plein air du Québec c. Syndicat de la fonction publique du Québec[45] :

[18]      L'arbitre a eu raison de décliner compétence. La compétence que lui confère l'article 244 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles pour régler les modalités de retour au travail n'inclut pas celle de décider la capacité d'exercer un emploi à la suite d’une lésion professionnelle, question réservée à la CSST et à la CLP en appel [renvoi omis].

[57]        Cela dit, toutes ces dispositions forment ce qu'on pourrait qualifier de « droit commun » du droit au retour au travail et elles ne sont applicables que lorsque le travailleur exerce ce droit tel que « prévu par la présente section », comme le précise l'article 244 L.a.t.m.p., c'est-à-dire conformément aux articles 234 à 246 L.a.t.m.p. Or, les dispositions constitutives de ce droit commun sont chapeautées par l'article 4, dont le premier alinéa empêche les dérogations à la loi, mais dont le second édicte aussitôt que « [c]ependant, une convention ou une entente […] peut prévoir pour un travailleur des dispositions plus avantageuses que celles que prévoit la présente loi » (« (n)otwithstanding the first paragraph, any covenant or any agreement (…) may provide more favourably for a worker than does the Act »).

[58]        La localisation de l'article 4 dans la loi de même que son texte ne laissent aucun doute sur le fait que le législateur permet les stipulations conventionnelles plus avantageuses que celles de la loi, y compris, donc, en matière de retour au travail. Les articles 244, 245 et 246 L.a.t.m.p. n'ont pas pour fonction, ni effet, de limiter cette possibilité. On ne voit d'ailleurs pas pourquoi le législateur aurait voulu empêcher les parties à une convention collective ou à un contrat individuel de travail de s'entendre pour conférer au travailleur plus de droits que la loi ne lui en donne en cette matière.

[59]        Il ne s'agit pas ici d'établir un régime parallèle à celui de la L.a.t.m.p., mais simplement d'y ajouter, perspective que l'article 4, 2e al., envisage en toutes lettres.

[60]        Rien dans cette conclusion ne contredit les enseignements de la Cour dans les arrêts Société des établissements de plein air du Québec[46] et Tembec[47], affaires dans lesquelles les conventions collectives ne contenaient, au chapitre du droit au retour au travail, aucune disposition plus avantageuse que celles de la L.a.t.m.p.

[61]        Dans la première (où le salarié réclame d'être réintégré, avec accommodement[48], dans un emploi de journalier que, selon la CSST, il n'est pas apte à accomplir vu ses limitations fonctionnelles[49]), nulle mention n'est faite de l'existence d'une telle clause dans la convention[50]. Dans la seconde (où le salarié réclame également d'être réintégré dans son emploi prélésionnel, avec accommodement[51], plutôt que dans l'emploi convenable identifié par la CSST et disponible chez l'employeur), la juge Thibault constate expressément que « [l]a convention collective en cause ne contient aucune disposition spécifique relative à la mise en application du droit de retour au travail à la suite d'une lésion professionnelle »[52].

[62]        La Cour suprême elle-même paraît bien avoir reconnu, discrètement, qu'une convention collective peut, en matière de retour au travail, être plus généreuse que la loi. On connaît l'arrêt Béliveau St-Jacques[53], dans lequel le juge Gonthier, au nom des juges majoritaires, décide que les articles 438 et s. L.a.t.m.p., qui excluent toute poursuite civile contre l'employeur ou le cotravailleur de la victime d'une lésion professionnelle, excluent également le recours en responsabilité fondé sur l'article 49 de la Charte des droits et libertés de la personne. Dans un passage peu cité, toutefois, il ajoute ce qui suit :

136      En raison de la conclusion à laquelle j'en suis arrivé quant à la disponibilité du recours en responsabilité civile en l'espèce, il ne me sera pas nécessaire de traiter en profondeur de l'étendue de la compétence de l'arbitre de griefs. Par voie d'appel incident, les intimées soutenaient en effet que si un recours fondé sur la Charte était disponible, il devait être exercé devant l'arbitre de griefs. Il suffit, pour disposer du présent pourvoi et de l'appel incident, de constater que les tribunaux de droit commun ne pouvaient décider du recours en responsabilité civile fondé sur les événements ayant donné lieu à compensation en vertu de la LATMP. Je m'abstiens donc de déterminer s'il aurait pu y avoir dépôt d'un grief en l'espèce. Si tel avait été le cas, cependant, il est entendu que l'arbitre n'aurait pu octroyer des dommages-intérêts en raison du préjudice subi suite à la lésion professionnelle. L'exclusion du recours en responsabilité civile vaut également pour l'arbitre de griefs. Ceci dit, il n'est pas inconcevable qu'un arbitre saisi dans ces circonstances ait pu ordonner, si la convention collective l'avait permis, d'autres mesures réparatrices, comme par exemple la réintégration ou la réaffectation.

[Je souligne.]

[63]        L'observation est compatible avec l'idée que le régime législatif mis sur pied par la L.a.t.m.p. n'exclut pas l'apport conventionnel voulu par les parties à la relation de travail en matière de réintégration ou de réaffectation, c'est-à-dire de retour au travail. C'est précisément ce que permet l'article 4, 2e al., L.a.t.m.p., en énonçant - et donc en reconnaissant - qu'une convention (collective en l'occurrence) « peut prévoir pour un travailleur des dispositions plus avantageuses que celles que prévoit la présente loi ».

* *

[64]        Mais l'affaire ne s'arrête pas là. À supposer qu'une convention collective accorde des droits supplémentaires au travailleur ou élargisse les droits qu'énonce la L.a.t.m.p., il faut s'intéresser alors à l'autre volet du problème, qui est celui des compétences respectives de la CSST/CLP, d'une part, et de l'arbitre de griefs, d'autre part. Si l'article 4 L.a.t.m.p. permet qu'une convention collective comporte, en faveur du travailleur, des dispositions « plus avantageuses que celles que prévoit la présente loi », qui de l'arbitre ou de la CSST/CLP devra statuer sur les désaccords liés à l'exercice de ces droits conventionnels? Par ailleurs, à supposer que l'arbitre soit l'instance appropriée, comment harmoniser sa compétence avec celle de la CSST (ou de la CLP) et s'assurer de l'absence d'empiètement?

[65]        La réponse à la première question s'impose d'elle-même : c'est l'arbitre de griefs qui a compétence sur les désaccords relatifs à l'interprétation ou à l'application des dispositions par lesquelles la convention collective ajoute aux droits prévus par la L.a.t.m.p., et ce, conformément aux articles 100 et s. du Code du travail (« C.t.»).

[66]        Le législateur confie en effet à l'arbitre de griefs une mission particulière, spécialisée et exclusive sur « toute mésentente relative à l'interprétation ou à l'application d'une convention collective » (« any disagreement respecting the interpretation or application of a collective agreement »)[54], c'est-à-dire tout grief au sens de l'article 1 C.t., peu importe l'objet de ce grief. Si une telle mésentente porte sur l'interprétation et l'application de dispositions conventionnelles accordant au travailleur des droits qui s'ajoutent à ceux que lui confère la L.a.t.m.p., elle est sujette à la procédure de grief, qui culmine avec l'arbitrage. Pour paraphraser le juge Bastarache, au nom de la Cour suprême, dans Regina Police Assn. Inc. c. Regina (Ville) Board of Police Commissioners[55], l'essence du litige concernant une matière visée par la convention collective et qui n'existe que grâce à celle-ci, l'arbitre a compétence et, même, compétence exclusive.

[67]        Cela n'a rien de surprenant. Le législateur, d'ailleurs, dans le cadre plus restreint de l'article 244 L.a.t.m.p., prévoit déjà, comme on le sait, le recours à la procédure de grief, et donc à l'arbitrage, lorsque la convention comporte des dispositions relatives à la mise en application du droit au retour au travail prévu par les articles 234 et s. L.a.t.m.p., ou susceptibles de s'y appliquer, et que le travailleur s'estime lésé dans l'exercice de ce droit. En ce sens, l'article 244 L.a.t.m.p. est entièrement compatible avec les articles 100 et s. C.t. et en respecte la logique. A fortiori, le travailleur devra également recourir au processus prévu par les articles 100 et s. C.t. lorsqu'il revendique, en vertu de l'article 4 L.a.t.m.p., les droits que lui reconnaît la convention en sus de ceux qui lui échoient de par la L.a.t.m.p.

[68]        Par exemple, si la convention collective prévoit que l'employeur, pendant un certain temps, doit verser au travailleur la différence entre l'indemnité de remplacement du revenu prévue par la L.a.t.m.p. et son salaire normal, et que l'employeur ne se conforme pas à cette obligation conventionnelle, c'est au moyen d'un grief qu'on pourra s'en plaindre, grief qui relèvera de la compétence exclusive de l'arbitre. C'est une situation de ce genre qui est en cause dans Syndicat des travailleuses et travailleurs des postes c. Société canadienne des postes[56]. La convention collective en jeu dans cette affaire accorde au salarié victime d'une lésion professionnelle une protection salariale « plus généreuse que celle offerte aux articles 59 à 61 de la LATMP »[57]. Les parties ne s'entendant pas sur le sens de la disposition en jeu, le Syndicat formule un grief. Le juge Rochette explique que :

[40]      La clause 24.01 de la convention collective n’octroie pas un congé payé par la Société jusqu’à ce que l’employé devienne capable d’exercer un emploi convenable à temps plein, à défaut de pouvoir reprendre son emploi, mais bien pendant la période d’incapacité à occuper son emploi ou à exercer ses fonctions. La clause n’indique nulle part que le congé accordé ne peut être plus large que celui prévu à la LATMP; c’est le cas à plusieurs égards.

[41]      L’arbitre aurait simplement dû faire le constat que le régime conventionnel est plus généreux que le régime législatif de la LATMP et que le risque financier découlant, à plus long terme, d’une perte de capacité de gain affectant un employé incapable de réintégrer son emploi d’origine, est pris à sa charge par la Société.

[69]        L'arrêt de la Cour n'indique pas que la compétence de l'arbitre sur le grief ait été contestée (et la lecture de la sentence arbitrale confirme l'absence d'une telle contestation[58]), mais il appert qu'elle n'aurait pu l'être, le litige découlant exclusivement de l'interprétation et de l'application d'une disposition conventionnelle accordant au travailleur des droits - salariaux en l'occurrence - plus étendus que ceux de la L.a.t.m.p.

[70]        Pareillement, si la convention collective impose à l'employeur des obligations plus lourdes que celles de la L.a.t.m.p. en matière d'emploi convenable, tout désaccord sur l'interprétation et l'application de ces dispositions se résoudra par la voie du grief et celle de l'arbitrage.

[71]        Mais comment, dans ce cadre, s'assurer que soit respectée la compétence de la CSST (et celle de la CLP)?

[72]        La réponse à cette seconde question relève du cas par cas.

[73]        Observons d'abord, et cela constitue déjà un indice, qu'il ne peut en l'espèce être question d'empiètement de la compétence arbitrale sur celle de la CSST (ou de la CLP). En effet, aucune des parties ne conteste ici les déterminations faites par la CSST (ou la CLP), qu'il s'agisse de l'existence d'un accident du travail ayant causé une lésion professionnelle, des limitations fonctionnelles qui, encore aujourd'hui, affectent le salarié et l'empêchent d'exercer son emploi prélésionnel, de la nature de l'emploi convenable auquel il pourrait aspirer ou de l'indisponibilité d'un tel emploi chez l'Employeur pendant la période d'exercice du droit au retour au travail prévu par la L.a.t.m.p., droit qui est d'ailleurs expiré depuis longtemps. Le lien d'emploi avec le salarié ayant toutefois été maintenu malgré l'expiration de ce droit[59], la seule question qui se pose est la suivante : l'article 38.05 de la convention oblige-t-il l'Employeur à offrir au salarié un poste qu'il est en mesure d'occuper, nonobstant que ce poste soit autre que l'emploi convenable identifié dans le passé par la CSST. Que l'arbitre réponde à cette question ne l'amènera pas à remettre en cause ou à réévaluer les déterminations précédentes de cet organisme, déterminations qui constitueront plutôt la toile de fond sur laquelle s'inscrira sa propre décision.

[74]        Comme on l'a vu plus tôt[60], lorsque l'arbitre est saisi d'un grief régi par l'article 244 L.a.t.m.p., c'est-à-dire un grief reposant sur une disposition conventionnelle relative à l'application du droit au retour au travail prévu par les articles 234 et s., il ne peut rejeter, réfuter ou discuter les déterminations de la CSST ou de la CLP au sujet de l'existence de la lésion professionnelle, de la capacité du salarié à reprendre son emploi prélésionnel, de ses limitations fonctionnelles ou de l'emploi convenable, déterminations qui sont du ressort exclusif de ces deux organismes en vertu des articles 349 (CSST) et 369 (CLP). L'arbitre est lié par ces déterminations, qu'il ne peut ni réviser ni contredire. Cela est tout à fait normal puisque, lorsqu'il agit en vertu l'article 244 L.a.t.m.p., l'arbitre se penche sur les modalités que prévoit la convention collective en rapport avec l'exercice du droit au retour au travail tel que défini par la L.a.t.m.p., droit dont les contours ont été précisés par la CSST (et la CLP, le cas échéant) et adaptés au cas particulier du travailleur. En pareil cas, l'intervention de l'arbitre s'intègre au cadre tracé par la CSST (et la CLP), en vertu de la loi, pour la mise en œuvre du droit en question et l'on comprend parfaitement qu'il ne puisse en modifier le périmètre, pour ainsi dire.

[75]        À l'autre bout du spectre, il y a le cas où la convention collective est muette sur la question du droit au retour au travail du salarié victime d'une lésion professionnelle. Dans cette hypothèse, on doit alors considérer l'enseignement de la Cour, sous la plume de la juge Thibault, dans Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, section locale 427 c. Tembec, usine de Matane[61]. Rappelons que, dans cette affaire[62], et par contraste avec celle qui nous occupe aujourd'hui, le travailleur avait été réintégré chez l'employeur, dans un emploi convenable, la CSST l'ayant jugé incapable de reprendre son emploi prélésionnel en raison de diverses limitations fonctionnelles. Se fondant sur les dispositions générales de la convention collective ainsi que sur le devoir d'accommodement incombant à l'employeur en vertu de la Charte des droits et libertés de la personne en matière de discrimination fondée sur le handicap, le syndicat prétendait toutefois que le travailleur, dont les limitations fonctionnelles n'étaient pas contestées, avait le droit de récupérer son emploi prélésionnel, mais pour n'en exercer, selon les termes du grief, « que les attributs […] compatibles avec ses limitations fonctionnelles »[63]. La juge Thibault écrit :

[42]      À mon avis, l'appelant a tort. Les questions sur lesquelles la CSST a compétence exclusive ne peuvent être remises en cause par un employeur ou un salarié que dans le cadre des mécanismes d'appel institués par la LATMP. Un employeur ne peut, lors de l'application d'une convention collective, remettre en cause la reconnaissance d'une lésion professionnelle, la durée de l'incapacité, la date de consolidation d'une lésion professionnelle, la détermination des limitations fonctionnelles, la capacité d'exercer l'emploi prélésionnel, la détermination de l'emploi convenable, etc. L'application d'une convention collective, lorsqu'elle implique une question sur laquelle la CSST a compétence exclusive, doit se faire en tenant la décision de la CSST pour acquise.

[Je souligne.]

[76]        Et un peu plus loin :

[44]      La position de l'appelant implique que les décisions de la CSST, à qui la LATMP reconnaît une compétence exclusive en certaines matières, peuvent être modifiées par un arbitre de griefs.

[45]      Cette proposition heurte la volonté clairement exprimée par le législateur de confier à la CSST, et à la CLP en appel, la mission exclusive de trancher certaines questions. Ces organismes sont hautement spécialisés pour décider de toutes les questions reliées à la reconnaissance d'un fait accidentel, à l'incapacité qui s'ensuit, au besoin d'assistance médicale, à la date de consolidation de la lésion, au besoin de réadaptation, à la capacité de reprendre son emploi ou un emploi convenable ainsi qu'à l'indemnisation de salarié. La CSST « accompagne » le salarié à compter du fait accidentel jusqu'à sa réinsertion sur le marché du travail. Pour atteindre ces fins, la CSST dispose de tous les moyens et outils que la LATMP donne à cet organisme.

[…]

[47]      Le fait que le retour au travail de M. Corneau a été réalisé après l'expiration du délai prévu par la LATMP pour exercer ce droit ne permet pas d'agir comme s'il n'y avait pas eu lésion professionnelle ni de gommer le travail réalisé par la CSST pour l'indemniser et le réinsérer au travail. Il ne faut pas oublier que, dès le mois d'avril 2005, soit un peu avant la date de la consolidation de la lésion, la CSST a entrepris auprès de l'intimée des démarches pour réintégrer M. Corneau dans son emploi ou dans un autre emploi convenable, et cela, en vertu des pouvoirs que lui reconnaît la LATMP. Le détail de ces diverses interventions, rencontres, évaluations ergonomiques, etc. est consigné dans les « Notes évolutives » de son dossier. On peut en retenir que la CSST a poursuivi ses démarches de réintégration de M. Corneau chez l'intimée avant la date de la consolidation de la lésion professionnelle jusqu'à ce que ce dernier soit réintégré. Ce n'est qu'après la réintégration de M. Corneau dans un emploi convenable que la CSST a rendu sa décision concernant son incapacité à occuper son emploi prélésionnel et sa capacité à exercer l'emploi convenable d'ouvrier papetier. Je ne vois pas comment, dans les circonstances, l'appelant peut soutenir que la réintégration de M. Corneau dans un emploi d'ouvrier papetier relève de l'application de la convention collective. Au contraire, elle est l'aboutissement de démarches et de décisions de la CSST.

[Je souligne.]

[77]        Ce point de vue s'imposait en effet dans les circonstances puisque 1° la convention collective, selon la juge Thibault, ne contenait aucune disposition relative au droit du salarié au retour au travail[64] et que 2° les limitations fonctionnelles du travailleur n'étaient pas contestées. C'est du reste pour cette double raison que les motifs de la juge Thibault commencent par la réserve suivante :

[21]      À mon avis, la question du droit d'un salarié victime d'une lésion professionnelle de récupérer son emploi prélésionnel, telle qu'elle se pose dans le présent dossier, échappe à la compétence d'un arbitre de griefs.

[Je souligne.]

[78]        On comprend en effet que, en l'absence de dispositions spécifiques dans la convention collective, et que ce soit avant ou après l'expiration du droit au retour au travail, l'employeur qui satisfait aux obligations lui incombant en vertu de la L.a.t.m.p.[65] ne peut être contraint de faire plus, ni de faire autrement. Le travailleur qui exerce de son côté les droits que lui donne cette loi ne peut exiger davantage. On comprend aussi qu'employeur et travailleur sont et demeurent alors liés par les déterminations de la CSST et, le cas échéant, de la CLP.

[79]        Par contre, lorsque, ainsi qu'on l'allègue en l'espèce, la convention collective contient des dispositions conférant spécifiquement des droits élargis, c'est-à-dire des droits surérogatoires, au travailleur victime d'une lésion professionnelle, cet enseignement n'est pas applicable. Lorsqu'on s'interroge sur ces droits et sur leur mise en œuvre, le litige ne se rapporte pas à la L.a.t.m.p., mais bien à la convention et concerne une matière entièrement régie par celle-ci, hors du champ de celle-là, pour reprendre le test proposé par la Cour suprême dans Regina Police Assn.[66]. Seul l'arbitre a donc compétence pour statuer.

[80]        Je rappelle par ailleurs ici que l'article 349 L.a.t.m.p., reproduit de nouveau par commodité, énonce que :

349.     La Commission a compétence exclusive pour examiner et décider toute question visée dans la présente loi, à moins qu'une disposition particulière ne donne compétence à une autre personne ou à un autre organisme.

349.     The Commission has exclusive jurisdiction to examine and decide any question contemplated in this Act unless a special provision gives the jurisdiction to another person or agency.

[Je souligne.]

 

[81]        À cette disposition fait écho l'article 369, qui réserve à la CLP l'exclusivité des contestations des décisions de la CSST sur les questions visées par la loi au sens de l'article 349 L.a.t.m.p. :

369.     La Commission des lésions professionnelles statue, à l'exclusion de tout autre tribunal :

  1° sur les recours formés en vertu des articles 359, 359.1, 450 et 451;

[…]

369.     The board shall, to the exclusion of any other tribunal, make determinations on

  (1)  proceedings brought under section 359, 359.1, 450 or 451;

(…)

[82]        La CSST et la CLP ont donc toute compétence sur les questions visées par la L.a.t.m.p., et tout ce qui y est sous-jacent, mais non pas sur les questions autres que celles-là. Lorsque des droits supplémentaires, non prévus par la loi, échoient au travailleur en raison de la convention collective, comme on affirme que c'est ici le cas, ce n'est pas la CSST (ou la CLP) qui peut en décider et il n'y a pas à déroger aux articles 100 et s. C.t. et à la compétence exclusive que le législateur confère à l'arbitre de statuer, en cas de mésentente, sur l'interprétation et l'application de ladite convention. Et, bien sûr, inutile d'insister sur le fait que, lorsque les parties ne s'entendent pas même sur la question de savoir si la convention contient des dispositions plus avantageuses que celles de la L.a.t.m.p., leur désaccord devra être résolu par la voie du processus de grief et relèvera de la compétence exclusive de l'arbitre.

[83]        Je me trouve donc en parfait accord avec le juge de première instance, mais aussi avec son collègue le juge Yergeau dans Montréal (Ville de) c. Hamelin[67] :

[24]      Le Tribunal estime que la solution au problème se trouve à l’article 349 de la Loi, déjà cité [renvoi omis].

[25]      En effet, il est acquis que la compétence appartient à la CSST de décider de toute question visée à la LATMP.

[26]      Par contre, la Loi précise aussi, à l’article 4, qu’une convention collective peut prévoir pour un travailleur des dispositions plus avantageuses que ce que prévoit la LATMP. Les termes utilisés par le législateur sont larges et englobants, sans réserve d’aucune sorte.

[27]      Mais alors, qui peut décider de cette question des dispositions plus avantageuses si ce n’est l’arbitre? Certainement pas la CSST à qui n’appartient pas la compétence d’interpréter une convention collective.

[28]      En effet, si de telles dispositions plus avantageuses se retrouvent dans la convention collective, c’est qu’elles ne sont pas incluses dans la Loi et que la CSST n’a pas compétence exclusive sur la question.

[29]      En incluant la notion de «dispositions plus avantageuses» dans le corps même de la Loi qui attribue compétence à la CSST, le législateur a expressément laissé aux négociateurs syndicaux et patronaux le soin d’inclure et de circonscrire des dispositions de ce type dans une convention collective. L’employeur ne peut ensuite invoquer l’absolutisme de la compétence de la CSST pour dénier à l’arbitre de griefs, dont c’est pourtant le rôle, le droit de déterminer si la convention collective contient de fait de telles «dispositions plus avantageuses» et si le salarié est en droit d’en bénéficier.

[30]      Suivre la Ville dans sa logique condamnerait le chien à courir indéfiniment après sa queue et viderait de sens l’article 4 de la LATMP.

[31]      En décidant comme il l’a fait, l’arbitre a interprété la convention collective à la lumière de ce que prévoit la Loi et dans le respect de la compétence exclusive de la CSST en matière de capacité du réclamant d’occuper un emploi [renvoi omis].

[84]        Ce point de vue est conforme à l'enseignement de la Cour suprême, qui, dans Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce, section locale 503 c. Compagnie Wal-Mart du Canada[68], réexaminait et réaffirmait encore récemment le caractère tout aussi exclusif qu'extensif de la compétence arbitrale.

[85]        Cela dit, dans bien des cas, les droits additionnels issus de la convention, s'il en est, seront formulés en des termes tels que les déterminations de la CSST seront respectées, et sa compétence également. Par exemple, la clause 38.01, paragr. (a), de la convention collective qui unit ici les parties, déjà reproduite au paragr. [32], supra, énonce que :

38.01   (a)  En cas d'accidents du travail ou de maladies professionnelles couverts par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, l'Université doit verser au salarié son salaire régulier moins toutes les déductions habituelles pendant les cinquante-deux (52) premières semaines d'invalidité, en autant que le salarié soit admissible à l'indemnité de remplacement du revenu selon la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST). Pendant les cinquante-deux (52) premières semaines d'invalidité complètes, les indemnités octroyées par la CSST sont versées directement à l'Université.

            (b)  En temps voulu (normalement au dixième (10e) mois d'invalidité), le salarié doit remplir les formulaires d'admissibilité aux prestations d'invalidité de longue durée de l'Université.

            (c)  Après les cinquante-deux (52) premières semaines, si le salarié est toujours dans l'incapacité de reprendre ses fonctions en raison de son invalidité, toutes les indemnités applicables sont versées directement par la CSST au salarié, conformément aux règlements applicables.

[86]        Comme on le voit, le paragraphe (a) de cette clause repose sur l'existence d'une lésion professionnelle au sens de la L.a.t.m.p., telle que déterminée par la CSST. Il fait dépendre le droit du travailleur de son admissibilité à l'indemnité de remplacement du revenu, décidée elle aussi par la CSST, aux conditions prévues par la loi. À supposer que l'arbitre soit saisi d'un grief relatif à l'application de cette disposition, il serait lié par les déterminations de la CSST sur l'existence de la lésion professionnelle et de l'invalidité qui en découle ou sur le montant de l'indemnité de remplacement du revenu, déterminations qui forment l'assise de la clause 38.01.

[87]        La clause 38.05 illustre tout aussi bien le fait qu'une disposition conventionnelle peut reposer sur les constats de la CSST :

38.05   Le salarié qui redevient capable de travailler, mais qui demeure avec une limitation fonctionnelle permanente l'empêchant d'occuper le poste qu'il occupait antérieurement est replacé, sans affichage, à un autre poste que son état de santé lui permet d'occuper, compte tenu des postes disponibles à combler.

[88]        Certainement, vu le contexte de la section dans laquelle se trouve cette clause, l'expression « limitation fonctionnelle […] l'empêchant d'occuper le poste qu'il occupait antérieurement » renvoie ici aux limitations fonctionnelles déterminées par la CSST (ou la CLP) en vertu de la L.a.t.m.p.

[89]        L'arbitre sera également lié, en principe, par les déterminations de la CSST lorsque la convention collective, par hypothèse, ne fait qu'allonger le délai prescrit par les articles 240 et 241 L.a.t.m.p. pour l'exercice du droit au retour au travail, sans modifier autrement les termes de celui-ci.

* *

[90]        En l'espèce, le débat tourne autour de l'interprétation et de l'application de la clause 38.05 de la convention collective, postérieurement à l'expiration du droit au retour au travail prévu par la L.a.t.m.p. Selon le Syndicat, cette disposition obligerait l'Employeur à offrir au travailleur tout emploi que l'état de santé de l'individu, c'est-à-dire sa capacité de travail et ses limitations, telles que déterminées par la CSST ou la CLP, lui permet d'occuper, sans égard aux autres critères de l'emploi convenable déterminé par ces organismes. Il s'agirait là d'une disposition plus généreuse que celles de la L.a.t.m.p. en ce qu'elle accroît les obligations de l'Employeur en matière de retour au travail et l'empêche de remercier le salarié de ses services faute d'un « emploi convenable » (au sens de la L.a.t.m.p.) dans l'entreprise. Dans ce contexte, le Syndicat, on peut le répéter, ne conteste aucune des déterminations antérieures de la CSST ou de la CLP au sujet de la lésion professionnelle, des limitations fonctionnelles, de l'emploi convenable, etc.

[91]        L'employeur n'est pas d'accord avec cette interprétation.

[92]        La dispute ne relève pas de la CSST ou de la CLP. Elle en relève d'autant moins que le droit au retour au travail du salarié est ici échu et que ces organismes, quel que puisse être leur point de vue sur la clause 38.05 de la convention, ne pourraient ordonner à l'employeur de s'y conformer. La détermination du sens et de la portée de cette disposition conventionnelle n'entre pas dans le champ de compétence de la CSST, tel que décrit par l'article 349 L.a.t.m.p., et il ne lui revient pas non plus de statuer sur son application, puisqu'il ne s'agit pas « d'une question visée dans la présente loi » ou qui en découle. La compétence de la CLP (art. 369 L.a.t.m.p.) est également exclue. L'arbitre mis en cause, et lui seul, avait donc compétence pour statuer sur l'interprétation ainsi que, le cas échéant, l'application de la clause 38.05 de la convention collective et ne pouvait voir là d'empiètement sur la compétence exclusive de la CSST ou de la CLP.

[93]        Bien sûr, il n'est pas impossible que, dans ce cadre, il y ait des points d'intersection (ou même des allers-retours) entre la compétence de l'arbitre et celle de la CSST (ou de la CLP), mais l'intégrité de chacune demeure néanmoins protégée. Par exemple, si l'arbitre, par hypothèse, donne gain de cause au salarié et ordonne à l'Employeur de lui offrir l'un ou l'autre des postes qui font l'objet des griefs, la compensation salariale reçue à cette occasion affectera l'indemnité de remplacement du revenu qui lui serait encore versable par la CSST[69]. Cette question ressortira de la compétence exclusive de la CSST et de ses rapports avec le salarié. Mais qu'il y ait intersection ne signifie pas qu'il y ait empiètement.

[94]        Ouvrons enfin, brièvement, une parenthèse : la situation de l'espèce, notons-le, ne se prête pas à l'application de l'article 32 L.a.t.m.p., puisque le débat opposant les parties ne porte pas sur l'exercice d'un droit que la L.a.t.m.p. confère au salarié. Le Syndicat ne prétend non plus pas que l'Employeur a agi de manière discriminatoire ou qu'il a entendu exercer des représailles contre le salarié en raison de la survenance de la lésion professionnelle[70]. Le cadre factuel dont la Cour est saisie ne se prêterait du reste aucunement à une telle allégation.

* *

[95]        Bref, et pour récapituler :

-           L'article 4, 2e al., L.a.t.m.p. permet aux parties à une convention collective d'y stipuler des dispositions plus avantageuses que celles que prévoit cette loi.

-           L'arbitre de griefs a compétence exclusive sur la question de savoir si une convention contient une telle clause (i.e. une clause conférant des avantages supérieurs à ceux de la L.a.t.m.p.) et, le cas échéant, compétence exclusive sur son interprétation et son application.

* *

[96]        Il faut s'attarder maintenant à la clause 38.05 L.a.t.m.p.

[97]        L'arbitre mis en cause a statué sommairement sur le sens de cette disposition : « En l'espèce », écrit-il au dernier paragraphe de ses motifs[71], j'estime donc que les conditions relatives à la mise en application du droit de retour au travail prévues au paragraphe 38.05 de la convention collective ne sont pas plus avantageuses que celles prévues par la LATMP ».

[98]        Cette conclusion est déraisonnable, et ce, pour deux raisons.

[99]        Tout d'abord, comme l'écrit le juge de première instance, la conclusion de l'arbitre sur la portée de la clause 38.05 est entièrement tributaire de sa décision de décliner compétence sur les griefs :

[71]      Malgré que l’arbitre possède une expertise certaine en cette matière et malgré la grande déférence qui lui est due, le Tribunal ne peut considérer que son analyse et le résultat qu’il atteint est raisonnable au sens donné à ce mot par la Cour suprême du Canada. Lu dans le contexte des paragraphes qui la précèdent, et tenant particulièrement compte de ce que l’arbitre écrit aux paragraphes 103 et 104, il apparaît que l’interprétation que fait l’arbitre de l’article 38.05 de la convention collective est donnée à la lumière de sa conclusion à l’effet qu’il ne possède pas compétence pour décider des griefs, et non le contraire, soit qu’après avoir décidé qu’il possède cette compétence, que l’article 38.05 de la convention collective n’est pas plus avantageuse que le régime prévu à la Loi.

[Je souligne.]

[100]     Cette observation est tout à fait justifiée et la lecture de la sentence ne permet pas d'autre conclusion que celle-là.

[101]     De plus, et soit dit avec égards, l'affirmation ultime de l'arbitre sur la portée de la clause 38.05 de la convention est également viciée par une erreur sur la notion d'emploi convenable au sens de la L.a.t.m.p.

[102]     En effet, selon ce qu'il appert du paragraphe 102 de la sentence, l'emploi convenable, selon l'arbitre, serait tout emploi que les capacités désormais limitées du travailleur lui permettent d'accomplir. Or, comme la clause 38.05 traite précisément d'un tel emploi, elle n'accorderait donc pas au travailleur des droits plus généreux que ceux de la L.a.t.m.p.

[103]     Toutefois, comme on l'a vu précédemment[72], cette manière de concevoir l'emploi convenable n'est pas conforme à l'article 2 L.a.t.m.p. et contredit l'état du droit sur le sujet. L'« emploi convenable », au sens de cette disposition, n'est pas n'importe quel emploi et il ne suffit pas que le travailleur soit en mesure d'exécuter les tâches rattachées à une fonction pour qu'aussitôt on parle d'emploi convenable. Pour mériter le qualificatif de convenable au sens de l'article 2 L.a.t.m.p., l'emploi doit aussi permettre au travailleur d'utiliser ses qualifications professionnelles, sans parler des autres critères, et notamment celui du caractère approprié. C'est d'ailleurs bien parce qu'il est convenable que l'indemnité de remplacement du revenu du travailleur qui devient capable de l'exercer à temps plein est réduite conformément à l'article 49 L.a.t.m.p., peu importe qu'il l'occupe ou non dans les faits[73] (conséquence qui a l'effet d'encourager le travailleur à accepter un tel emploi, s'il est disponible). Si aucun emploi convenable n'existe, l'article 57 L.a.t.m.p. s'applique et préserve le droit du travailleur à une pleine indemnité de remplacement du revenu, sous réserve de l'article 52 L.a.t.m.p.

[104]     Autrement dit, le motif avancé par l'arbitre au soutien de l'interprétation (lapidaire, il faut le dire) qu'il donne à l'article 38.05 ne peut tenir, puisqu'il repose sur une mauvaise conception de l'emploi convenable au sens de la L.a.t.m.p., conception que la norme de la raisonnabilité ne permet pas de tolérer.

[105]     L'arbitre se dissocie également du point de vue exprimé par l'arbitre Nadeau dans Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 3993 (unité croupiers) et Société des casinos du Québec inc. (Danielle Meunier)[74]. Dans cette affaire, on se penche sur une disposition conventionnelle prévoyant que « [l]orsqu'un salarié est handicapé ou souffre de limitations fonctionnelles l'empêchant de remplir toutes ses tâches, l'employeur doit examiner les possibilités raisonnables de l'accommoder entre autres en le relocalisant dans un autre emploi ». Selon l'arbitre Nadeau, qui fait notamment la distinction entre l'emploi convenable de l'article 2 L.a.t.m.p. et tout autre emploi, cette disposition avantage le travailleur en lui conférant plus de droits que la L.a.t.m.p. au chapitre de sa réintégration chez l'employeur. L'arbitre mis en cause, qui n'est pas d'accord, ajoute que :

[105]    Je ne partage donc pas l'opinion de l'arbitre Nadeau selon laquelle, au chapitre des accidents du travail, la référence dans une convention collective à un « autre emploi » soit de portée plus large que l'expression « emploi convenable » que l'on trouve à la loi.

[106]     La phrase est malheureuse, car elle paraît ériger en principe ce qui ne peut être qu'une question d'espèce et qui, d'ailleurs, est traitée comme telle par l'arbitre Nadeau. Celui-ci n'affirme pas que toute convention collective renvoyant à « un autre emploi » est plus avantageuse que la L.a.t.m.p. Il se contente de dire que la disposition conventionnelle qui lui est soumise est plus avantageuse que la L.a.t.m.p., pour les raisons qu'il expose. Il n'est pas impossible que la convention collective parlant d'un « autre emploi » ne confère en effet pas au travailleur des droits plus étendus que ceux de la L.a.t.m.p., mais il n'est pas impossible qu'elle soit plus généreuse : tout dépend de l'intention des parties, telle que dévoilée par le texte et le contexte de la convention.

[107]     Or, sauf pour déclarer que tout emploi que le travailleur est en mesure d'occuper est un emploi convenable au sens de la L.a.t.m.p. (ce qui n'est pas exact), l'arbitre, ici, n'a pas examiné la disposition conventionnelle dont il était saisi, ni son contexte, et ne s'est pas interrogé sur l'intention des parties. Il a statué de manière péremptoire, sans procéder à l'exercice interprétatif qui s'imposait.

[108]     Enfin, ni l'arrêt Société des établissements de plein air du Québec[75] ni l'article 244 L.a.t.m.p., auxquels renvoie l'arbitre[76], ne sont pertinents en l'espèce, dont ils se distinguent.

[109]     Pour ces raisons, en ce qui concerne le sens à donner à la clause 38.05 de la convention, la sentence arbitrale n'est pas raisonnable parce que le processus menant à cette conclusion est entaché d'erreurs dirimantes qui en affectent irrémédiablement l'issue, laquelle contredit elle-même le texte de la disposition litigieuse.

* *

[110]     Cela dit, que convient-il de faire à ce stade? Doit-on renvoyer le dossier à l'arbitrage afin qu'un autre arbitre se prononce sur le sens et la portée de la clause 38.05 et, le cas échéant, sur l'application qui doit en être faite ici? Doit-on plutôt confirmer l'interprétation que le juge de première instance donne à la clause - à savoir qu'il s'agit d'une disposition plus généreuse que la L.a.t.m.p. - et valider le renvoi de l'affaire au mis en cause, afin qu'il statue sur les griefs formulés à la lumière de cette interprétation?

[111]     Lorsque, en raison d'une objection préliminaire, le sens de la convention n'a pas été arrêté, la première hypothèse est généralement préférable : c'est à l'arbitre qu'appartient la compétence initiale sur l'interprétation des dispositions de la convention collective, et non aux tribunaux supérieurs, qui n'ont pas pour mission d'interpréter la convention en lieu et place de l'arbitre, mais plutôt, dans l'exercice de leur pouvoir de contrôle et de surveillance, de vérifier que l'interprétation arbitrale est raisonnable (ou, parfois, correcte).

[112]     En l'espèce, cependant, vu la nature du débat, l'arbitre, dans le cadre de l'objection préliminaire soulevée par l'Employeur, s'est prononcé sur la disposition litigieuse, bien que l'opinion qu'il exprime courtement soit incidente et arrive après coup, sans analyse véritable. Devrait-on pour autant lui renvoyer l'affaire (ou la renvoyer à un autre arbitre) pour qu'il fasse (ou refasse) l'exercice interprétatif requis?

[113]     En l'espèce, un tel renvoi relèverait de l'artifice et me paraît, en définitive, inutile.

[114]     Pour les motifs du juge de première instance, que je reprends à mon compte, ainsi que pour les raisons qui ressortent des présents motifs, on doit conclure que la clause 38.05 de la convention collective est plus avantageuse que la L.a.t.m.p. Cette disposition, dont le libellé est fort large, établit que l'employeur doit, sans affichage, offrir au salarié affecté des limitations fonctionnelles déterminées par la CSST et qui ne peut reprendre son emploi prélésionnel (ni, il va sans dire, un emploi équivalent) tout poste disponible que son état de santé et, bien sûr, ses compétences, lui permettent d'occuper.

[115]     On peut, d'une part, convenir avec l'Employeur que cette règle est susceptible de s'appliquer à l'emploi convenable : si pareil emploi, tel qu'identifié par la CSST (ou la CLP), est disponible chez l'Employeur, celui-ci sera tenu de l'offrir au salarié sans affichage. En ce sens, la clause 38.05 énonce une modalité du droit au retour au travail, ce que permettent les articles 239, 2e al., et 244 L.a.t.m.p. Cependant, la disposition, par sa généralité, va plus loin et élargit au delà de l'emploi convenable le droit du salarié d'être réintégré (ou maintenu) au sein de l'entreprise de l'Employeur, droit qui s'étend ici à tout emploi que le salarié est en mesure d'occuper compte tenu de ses limitations fonctionnelles. Le texte de la disposition va dans ce sens et rien dans les autres dispositions de la section dans laquelle se trouve la clause 38.05, ou dans la convention collective, n'est de nature à justifier que l'on statue autrement.

[116]     Cette interprétation ne contredit pas non plus la L.a.t.m.p. : lorsque la CSST détermine l'emploi convenable, elle ne condamne pas le travailleur à ce seul emploi pour le reste de ses jours professionnels. Elle n'empêche donc pas le travailleur d'occuper des emplois autres que convenables (que ce soit chez l'employeur ou ailleurs)[77].

[117]     Rien ne s'oppose donc à ce que les parties, et c'est ce qu'elles ont fait ici, conviennent d'une disposition qui élargit le droit au retour au travail du salarié en forçant l'Employeur à offrir au salarié tout emploi qu'il est capable d'accomplir nonobstant qu'il s'agisse d'un emploi en deçà de l'emploi convenable déterminé par la CSST[78].

[118]     Vu l'interrelation entre la question de la compétence de l'arbitre et celle de l'interprétation de la disposition conventionnelle, le choix du juge, que résume le paragraphe suivant de son jugement, ne requiert pas d'être réformé :

[72]      À l’instar de la décision de la Cour d’appel dans Syndicat des travailleuses et travailleurs des postes c. Société canadienne des postes [renvoi omis], le Tribunal conclut que l’arbitre possède la juridiction requise afin d’entendre et de décider des griefs et qu’il aurait simplement dû faire le constat que le régime que prévoit l’article 38.05 de la convention collective est plus généreux que le régime prévu à la Loi.

[119]     En évaluant la capacité du salarié à effectuer les tâches des postes visés par les griefs, à la fois sous l'angle de la santé et celui des autres aptitudes, l'arbitre ne se trouvera pas à remettre en cause et, même, devra respecter les déterminations de la CSST (ou de la CLP) au sujet de la survenance d'un accident du travail, de l'existence d'une lésion professionnelle dont découlent diverses limitations fonctionnelles, de la nature de l'emploi convenable, etc. Rien dans cet exercice d'application de la clause 38.05 n'usurpera la compétence de la CSST (ou de la CLP)[79].

III.        Conclusion

[120]     Pour ces motifs, je suggère le rejet de l'appel, avec dépens.

 

 

 

 

MARIE-FRANCE BICH, J.C.A.

 



[1]     RLRQ, c. A-3.001.

[2]     Pièce P-2, convention collective couvrant la période du 1er décembre 2007 au 30 novembre 2010. On notera que s'il existe une version anglaise de cette convention, elle n'a pas été reproduite au dossier d'appel.

[3]     Propos rapportés au paragr. 56 de la sentence arbitrale.

[4]     2009 QCCA 329, J.E. 2009-462 (requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée, 2009-09-10, 33135).

[5]     D.T.E. 2011T-141 (T.A., requête en révision judiciaire rejetée, J.E. 2012-920; requête pour permission d'appeler rejetée, 2012 QCCA 1118).

[6]     [2010] R.J.D.T. 1232 (requête en révision judiciaire rejetée, 2011 QCCS 6872).

[7]     Terme qu'emploie l'arbitre Nadeau au paragr. 69 de sa sentence.

[8]     Jugement de première instance, paragr. 75.

[9]     Jugement de première instance, paragr. 35.

[10]    Jugement de première instance, paragr. 35.

[11]    Jugement de première instance, paragr. 60.

[12]    Jugement de première instance, paragr. 54.

[13]    Précité, note 4.

[14]    2012 QCCA 179, [2012] R.J.D.T. 42.

[15]    2006 QCCA 1655, J.E 2007-201.

[16]    Notons au passage que l'art. 4 L.a.t.m.p. a son pendant dans la Loi sur la santé et la sécurité du travail, RLRQ, c. S-2.1 :

4.   La présente loi est d'ordre public et une disposition d'une convention ou d'un décret qui y déroge est nulle de nullité absolue.

      Cependant une convention ou un décret peut prévoir pour un travailleur, une personne qui exerce une fonction en vertu de la présente loi ou une association accréditée des dispositions plus avantageuses pour la santé, la sécurité ou l'intégrité physique du travailleur.

4.   This Act is of public order and any derogating provision of any agreement or decree is absolutely null.

      However, an agreement or decree may provide, in respect of a worker, a person performing functions under this Act or a certified association, more favourable provisions for the health, safety and physical well-being of the worker.

[17]    Voir par exemple : Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, [2011] 3 R.C.S. 654, notamment au paragr. 33.

[18]    Voir par ex.: Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Canada (Procureur général), [2014] 2 R.C.S. 135, paragr. 59, suivant en cela l'enseignement de l'arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, paragr. 61.

[19]    2015 CSC 16, paragr. 50 et 51.

[20]    En général, sur ces exceptions, voir : Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, précité, note 18; Mouvement laïque québécois c. Saguenay (Ville), précité, note 19; Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Canada (Procureur général), précité, note 18; Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 30 c. Pâtes & Papier Irving, Ltée, [2013] 2 R.C.S. 458.

[21]    Sur ce point, voir notamment : Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Canada (Procureur général), [2011] 3 R.C.S. 471, paragr. 18; Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, [2011] 3 R.C.S. 654, paragr. 33.

[22]    Voir notamment les art. 32, 2e al., et 244, 3e al., L.a.t.m.p.

[23]    Pour un récapitulatif de l'histoire du régime créé par la L.a.t.m.p., voir notamment : Béliveau St - Jacques c. Fédération des employées et employés de services publics inc., [1996] 2 R.C.S. 345.

[24]    Précité, note 23.

[25]    Id., paragr. 114.

[26]    Ibid.

[27]    Ibid.

[28]    Indemnité qui est calculée selon certains paramètres, dont un maximum annuel assurable (voir notamment les art. 45, 63, 65 et 66 L.a.t.m.p.).

[29]    Cette jurisprudence rapporte divers cas de figure. Voir par exemple : Dionne et Montréal (Ville de), 2008 QCCLP 5996; Sûreté du Québec, 2015 QCCLP 561, 2015EXPT-279; Allard et Bombardier Aéronautique inc., 2013 QCCLP 915; STM et Bouchard, 2011 QCCLP 2324, [2010] C.L.P. 962; Commission scolaire Portages-Outaouais et C.S.S.T. - Outaouais, SOQUIJ AZ-50185939 (CLP); Commission scolaire des Affluents et Dumont, SOQUIJ AZ-99305061, C.L.P.E. 99LP-230. Voir aussi : Syndicat des professionnelles en soins de Québec (SPSQ-FIQ) c. CSSS de Rivière-du-Loup, 2015 QCCA 1127, paragr. 15 et 19, ainsi que les notes infrapaginales 4 et 7; Syndicat des travailleuses et travailleurs des postes c. Société canadienne des postes, précité, note 15, paragr. 9, 15 et 35.

[30]    Sous réserve du cas particulier du retour au travail dans un emploi faisant l'objet d'un contrat de travail à durée déterminée (art. 237 L.a.t.m.p.).

[31]    Dans la L.a.t.m.p., les définitions de l'article 2 sont présentées dans un ordre alphabétique qui diffère selon la version anglaise ou française du texte. C'est un ordre auquel je déroge ici, dans la version anglaise, pour faciliter la comparaison.

[32]    Sur la notion d'« emploi équivalent » et son application, voir : Pierre-Louis et Hôpital Sacré-Coeur de Montréal, 2008 QCCLP 576, paragr. 100 et s.

[33]    Quoiqu'il le puisse, s'il le souhaite, à certaines conditions. Voir à ce propos : Dubé et Multi-Canevas 1997 inc., 2010 QCCLP 1923, paragr. 105; Bérard et Groupe Compass (Eurest/Chartwell), 2010 QCCLP 8644, notamment aux paragr. 117 et s; Thomas et Pro-Jet Démolition inc., 2011 QCCLP 2482. Il n'est pas impossible que l'arrêt Commission de la santé et de la sécurité du travail c. Caron, 2015 QCCA 1048, J.E. 2015-1108, ait un effet sur cette affirmation générale.

[34]    Audet et Structures Derek International SA, 2014 QCCLP 4877, 2014EXPT-1674. Voir aussi : Martel et Gentec inc., 2015 QCCLP 4146, paragr. 116 à 135; Bossé et Rebuts solides canadiens inc., 2015 QCCLP 1945, 2015EXPT-841 (requête en révision pendante (CLP, date non disponible) 520902-63-1308-R, 533495-63-1402-R et 535339-63-1402-R); Bériault et Commission de la santé et de la sécurité du travail, 2013 QCCLP 5585, paragr. 88 et s. Pour l'application de ces mêmes critères au cas où l'employeur offre un emploi convenable au travailleur en vertu de l'art. 170 L.a.t.m.p., voir : Anglehart et Construction & Expertise PG inc. (C.L.P., 2014-05-13), 2014 QCCLP 2857, 2014EXPT-1293, paragr. 26; Boivin et Dicom Express inc. (Gojit Montréal), [2005] C.L.P. 1678, paragr. 55 et s.

[35]    Boivin et Dicom Express inc. (Gojit Montréal), précité, note 34, paragr. 89.

[36]    L'affaire Costco (Boisbriand) et Laferrière, 2011 QCCLP 253, 2011EXPT-318, illustre bien ce qu'on entend par un emploi qui, pour être convenable, doit être approprié. Dans cette affaire, l'emploi offert à la travailleuse par l'employeur dans le cadre de l'art. 170 L.a.t.m.p. est jugé n'être pas convenable parce qu'il n'est pas approprié, c'est-à-dire, en l'occurrence, parce qu'« il doit s’exercer sur des quarts de travail affectant grandement sa situation personnelle et familiale » (paragr. 44; voir aussi les paragr. 59 et s.). On peut rattacher cette manière d'interpréter et d'appliquer le critère du caractère approprié à l'art. 351 L.a.t.m.p., qui impose à la CSST et, par ricochet, à la CLP, de rendre des décisions « suivant l'équité, d'après le mérite réel et la justice du cas » (« according to equity and upon the real merits and justice of the case »). Dans un autre registre, la CLP a déjà décidé que le caractère approprié d'un emploi convenable doit tenir compte d'éléments tels le fait que le travailleur a un casier judiciaire, ce qui influe d'ailleurs sur la possibilité raisonnable d'embauche (voir par ex.: Bouchard et Groupe Fieldturf Tarkett Québec inc., 2010 QCCLP 6507; Forget et Garage Joseph Jolicoeur inc., 2011 QCCLP 3082), ou encore les convictions religieuses de l'individu (Guevremont et Mil Tracy, [1994] C.A.L.P. 1142), et autres encore.

[37]    Jugement de première instance, paragr. 60.

[38]    L'indemnité résiduelle est révisable par la suite aux termes des art. 53 et 54 L.a.t.m.p.

[39]    Voir par exemple : Lapointe et Industries James McLaren inc., [1996] C.A.L.P. 162, p. 41 à 49; Labonté et Coiffure Chantal), SOQUIJ AZ-99302692 (CLP), paragr. 48 et s., notamment les paragr. 60 à 63. Voir aussi : Faille et Isolation Manson inc., SOQUIJ AZ-50349230 (CLP), notamment aux paragr. 149 à 151; Maheux et Les Déboisements MGP inc., SOQUIJ AZ-99303289 (CLP, requête en révision rejetée, 2000-12-11) 110156-03B-9902-R et 110156-03B-9902, SOQUIJ AZ-00304666), paragr. 38 et 39.

[40]    Voir : Commission de la santé et de la sécurité du travail c. Caron, précité, note 33.

[41]    Rlrq, c. C-12.

[42]    Voir supra, paragr. [34].

[43]    Voir supra, paragr. [32] et [33].

[44]    Interventions dont les modalités sont prévues notamment par les art. 252, 258, 259, 262, 263 et 264 L.a.t.m.p. La personne qui se croit lésée par une décision rendue en vertu de ces dispositions peut s'adresser à la Commission des lésions professionnelles (art. 359.1 L.a.t.m.p.).

[45]    Précité, note 4.

[46]    Précité, note 4.

[47]    Précité, note 14.

[48]    La demande d'accommodement étant fondée sur la Charte des droits et libertés de la personne.

[49]    Voir à ce sujet la sentence arbitrale : Syndicat de la fonction publique du Québec inc. et Société des établissements de plein air du Québec (SEPAQ), (Guy Roy), D.T.E. 2006T-496, notamment au paragr. 54.

[50]    C'est d'ailleurs ce qu'indique l'arbitre aux paragr. 48 à 52 de sa décision précitée, note 49. Le travailleur fondait son grief sur les dispositions que la convention collective consacre au rappel au travail des salariés saisonniers, dispositions qui n'énoncent pas, au sens de l'article 244 L.a.t.m.p., des modalités d'exercice du droit au retour au travail prévu par les art. 234 et s. L.a.t.m.p., et ne constituent pas davantage, pourrait-on ajouter, des dispositions conférant au travailleur victime d'une lésion professionnelle des droits plus généreux que ceux de la L.a.t.m.p.

[51]    Accommodement également fondé sur la Charte des droits et libertés de la personne. En l'occurrence, le travailleur souhaitait être réintégré dans son emploi prélésionnel, mais pour n'y effectuer que celles des tâches qu'il était physiquement capable d'accomplir, et non l'ensemble des tâches rattachées à la fonction.

[52]    Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, section locale 427 c. Tembec, usine de Matane, précité, note 14, paragr. 33.

[53]    Précité, note 23.

[54]    C'est là la définition du grief selon l'art. 1, paragr. f), du Code du travail.

[55]    [2000] 1 R.C.S. 360, paragr. 25. Voir aussi : Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Québec (Procureur général), [2004] 2 R.C.S. 185.

[56]    2006 QCCA 1655, J.E. 2007-201. Dans cette affaire, la convention collective est régie par le Code canadien du travail, mais la compétence de l'arbitre de griefs y est analogue à celle que l'on trouve dans le Code du travail.

[57]    Id., paragr. 35.

[58]    Voir : Société canadienne des postes et Syndicat des travailleuses et travailleurs des postes (André Ampleman), D.T.E. 2005T-289.

[59]    Et ce, jusqu'en novembre 2010, alors que l'employeur procède au congédiement administratif du salarié, puisque « ((a)lmost five years after that decision, the work of ″réparateur de commandes électriques″ still does not exist at McGill. Consequently, your employment is terminated, as of today ». Ce congédiement fait aussi l'objet d'un des griefs présentés à l'arbitre mis en cause.

[60]    Supra, paragr. [56].

[61]    Précité, note 14.

[62]    Dont les faits ont déjà été brièvement rapportés, supra, paragr. [61].

[63]    La teneur du grief est rapportée par le paragr. 11 de l'arrêt Tembec.

[64]    Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, section locale 427 c. Tembec, usine de Matane, précité, note 14, paragr. 33 (voir supra, paragr. [61]). Il est vrai que la convention en jeu dans cette affaire semblait contenir une disposition prolongeant l'exercice du droit au retour au travail (ce qui est plus avantageux que l'art. 240 L.a.t.m.p.), mais dans le respect des déterminations de la CSST.

[65]    Obligations qui incorporent celles que peut lui faire la Charte des droits et libertés de la personne, dont la CSST doit tenir compte dans ses déterminations, selon ce que décide la Cour dans Commission de la santé et de la sécurité du travail c. Caron, précité, note 33.

[66]    Précité, note 55.

[67]    2013 QCCS 6538, J.E. 2014-224.

[68]    [2014] 2 R.C.S. 323, paragr. 85 et s.

[69]    Effet qui découle des art. 52 et 55 L.a.t.m.p.

[70]    Notons en passant que l'arbitre saisi d'une plainte fondée sur l'art. 32 L.a.t.m.p. est lui aussi lié par les déterminations de la CSST (ou de la CLP), avec les réserves qu'explique le juge Forget, pour la Cour dans Syndicat du transport de Montréal c. Leboeuf, [1996] R.D.J. 187 (C.A. - requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée, 1996-09-05, 25226).

[71]    Sentence arbitrale, paragr. 106.

[72]    Voir supra, paragr. [43] à [48].

[73]    Sous réserve du délai de grâce prévu par le second al. de l'art. 49 L.a.t.m.p.

[74]    Précité, note 6.

[75]    Précité, note 4.

[76]    Sentence arbitrale, paragr. 103.

[77]    Ce qui, en vertu de l'art. 52 L.a.t.m.p., aura d'ailleurs un impact sur l'indemnité de remplacement du revenu qui lui serait toujours versée.

[78]    En général, sur ce point, voir : Syndicat québécois des employées et employés de service, section locale 298 (FTQ) et Hôpital Douglas (Marian Baynham), [2005] R.J.D.T. 988 (T.A.).

[79]    C'est à une conclusion de ce genre que vient, par exemple, l'arbitre Morin dans Syndicat des employées et employés de techniques professionnelles et de bureau d'Hydro-Québec, section locale 2000 SCFP-FTQ et Hydro-Québec (Nicole Deschambault), D.T.E. 2012T-593 (T.A.), paragr. 87 et 88, où l'on a affaire à une disposition conventionnelle plus avantageuse que la L.a.t.m.p.

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