Décision

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Spa Le Finlandais et D'Arcy

2011 QCCLP 3979

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Laval

9 juin 2011

 

Région :

Laval

 

Dossier :

419938-61-1009

 

Dossier CSST :

135805828

 

Commissaire :

Philippe Bouvier, juge administratif

 

Membres :

Francine Huot, associations d’employeurs

 

Paul Auger, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Spa Le Finlandais

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Maud D’Arcy

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 22 septembre 2010, le Spa Le Finlandais (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 15 septembre 2010 à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 1er juin 2010 et déclare que madame Maud D’Arcy (la travailleuse) a subi une lésion professionnelle le 6 janvier 2010 dont le diagnostic est une épicondylite bilatérale.

[3]           L’audience s’est tenue à Laval les 6 avril et 18 mai 2011 en présence de l’employeur et de sa procureure. La travailleuse est également présente. La cause a été mise en délibéré à cette date.

L’OBJET DE LA REQUÊTE

[4]           L’employeur demande au tribunal de déclarer que la travailleuse n’a pas subi de lésion professionnelle.

LA PREUVE

[5]           Massothérapeute depuis un peu plus de dix ans, la travailleuse est à l’emploi de l’employeur depuis mars 2007. Elle travaille de cinq à six jours par semaine selon l’achalandage. Son horaire varie de 8 heures 30 à 15 heures 45 ou encore de 16 heures à 22 heures.

[6]           La travailleuse dispense cinq types de massage : le massage suédois, le massage avec pression, le massage thérapeutique, le massage avec pierres chaudes et le massage destiné aux femmes enceintes.

[7]           Le massage suédois est d’une durée variant entre 45 minutes et 1 heure 30 minutes. La travailleuse mentionne qu’il s’agit d’un massage de détente pour le dos et les jambes. Après avoir fait un bilan de santé durant cinq minutes, la travailleuse entreprend le massage. Elle explique qu’elle effectue des effleurements avec les deux mains alors que ses coudes sont en flexion. Elle appuie également ses mains à plat sur le corps du client en effectuant des mouvements de déviation radiale et cubitale des poignets, et ce, en appliquant une pression.

[8]           Dans le cadre de ce type de massage, elle effectue également le mouvement du râteau en maintenant une pression avec une main, le poignet en extension alors que son autre main tient le poignet de la main en flexion. Certains mouvements de palpé-roulé et de pointe digitale sollicitent les fléchisseurs des doigts des deux mains qui épousent la forme du corps. Pour le massage du cou, la travailleuse montre des gestes d’extension des poignets avec pression de l’éminence thénar. Il ressort des explications de la travailleuse que dans l’exécution de l’ensemble de ces mouvements, les coudes sont généralement en position fléchie.

[9]           La travailleuse indique que pour le massage avec pression forte, elle applique une plus grande pression avec ses mains, les poignets en extension. De plus, avec ses deux mains, elle exécute des mouvements de rotation en appliquant une pression. Un massage de ce type peut durer de 1 heure à 1 heure 30 minutes. Elle mentionne qu’elle ne peut en faire que quatre dans une journée en raison de l’énergie demandée par ce type de massage.

[10]        Le massage thérapeutique répond à un besoin particulier d’une partie du corps. La travailleuse explique qu’il nécessite des mobilisations et des tractions avec des pressions fortes sur les points douloureux. Elle indique que les gestes posés sont sensiblement les mêmes que pour le massage suédois. Il dure entre 60 et 90 minutes.

[11]        La travailleuse explique que le massage à pierres chaudes est un massage de détente globale qui dure environ 90 minutes. Elle prend des pierres chaudes qu’elle applique sur le corps du client. Elle effectue certains mouvements avec la pierre qui impliquent une supination des poignets. Elle précise qu’elle utilise également les mêmes techniques que pour le massage suédois.

[12]        Quant au massage pour les femmes enceintes, il s’agit d’un massage empruntant les mêmes techniques que le massage suédois mais appliquées avec plus de douceur.

[13]        La travailleuse bénéficie d’environ 15 minutes entre deux clients. Elle indique que cette période sert à raccompagner le client et à monter la salle pour le prochain client. Dans le cas des massages à la pierre chaude, elle indique que cette période est de 30 minutes afin de lui permettre de nettoyer les pierres.

[14]        En janvier 2010, la travailleuse ressent des douleurs au niveau de l’avant-bras et du poignet principalement à droite. À cette époque, elle cesse les massages thérapeutiques en raison de l’intensité de ses douleurs. Elle prend une semaine de congé au début du mois de février en raison de sa condition. Elle arrête de travailler vers le 23 février 2010.

[15]        Sur le plan médical, c’est le docteur Brizard qui assure le suivi. Dans une attestation médicale du 24 février 2010, il retient les diagnostics de kyste synovial du poignet droit et d’épicondylite bilatérale. Ces diagnostics seront maintenus par le docteur Brizard à l’occasion des rencontres subséquentes. Le docteur Pellemans voit également la travailleuse. Dans un rapport du 25 mars 2010, il retient également les diagnostics de kyste synovial du poignet droit et d’épicondylite bilatérale. Il suggère une résonance magnétique.

[16]        La travailleuse passe donc une résonance magnétique du poignet droit le 18 mai 2010. L’opinion du docteur François Hudon, radiologiste est la suivante :

1.     Pas de lésion osseuse focalisée significative ou atteinte des plans musculo-graisseux péri-articulaire.

2.     Minime épanchement intra-articulaire non spécifique au compartiment radio-cubital distal.

 

 

[17]        Malgré des traitements de physiothérapie et d’ergothérapie, la travailleuse indique qu’elle conserve encore aujourd’hui des douleurs. Le docteur Brizard remplit un rapport final dans lequel il consolide la lésion le 22 juillet 2010 sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles. La travailleuse n’exerce plus le métier de massothérapeute en raison de sa condition.

[18]        Dans une note du 1er juin 2010, le docteur Jean Gagnon, médecin régional de la CSST, écrit :

- ASPECT MÉDICAL :

Considérant les mouvements répétés avec efforts sur une période de temps prolongée, considérant les contraintes répétées au niveau des extenseurs, nous sommes d’avis qu’il existe une relation de causalité entre le travail exécuté et l’épicondylite bilatérale.

 

 

[19]        Madame Cynthia Lamoureux, directrice des opérations, témoigne pour le compte de l’employeur.  Elle explique les différentes étapes suivies lorsqu’il y a un client qui se présente chez l’employeur. Dans un premier temps, la massothérapeute vient chercher le client pour le diriger vers la salle de massage et trace le bilan de santé du client. Par la suite, la massothérapeute laisse le client seul quelques minutes afin qu’il se déshabille. De retour dans la salle, la massothérapeute procède au massage et à la fin de celui-ci, le client est à nouveau seul et par la suite elle le raccompagne.

[20]        Madame Lamoureux confirme qu’il y a 15 minutes d’intervalle entre deux clients et que ce laps de temps est de 30 minutes lorsqu’il s’agit d’un massage à la pierre chaude. Cette période est consacrée à refaire la salle et à consulter la fiche du prochain client.

[21]        De plus, l’employeur dépose une fiche de temps de la travailleuse pour la période du 2 février 2009 au 21 février 2010. Ce document établit les heures travaillées par la travailleuse et le nombre et la nature des massages dispensés par celle-ci. Les heures travaillées varient d’environ 24 à 31 heures par semaine avec des pointes à 35 heures. Par ailleurs, ce document révèle que la travailleuse effectue principalement des massages suédois.

[22]        La semaine du 18 au 24 janvier 2010 illustre cette prépondérance des massages suédois. Au cours de cette semaine, elle travaille près de 30 heures. Elle fait 22 massages suédois, quatre massages pour femmes enceintes, deux massages thérapeutiques et un massage à la pierre chaude. Les massages avec pression forte sont inclus dans les massages suédois.


L’AVIS DES MEMBRES

[23]        Le membre issu des associations d’employeurs est d’avis d’accueillir la requête de l’employeur. Selon lui, la travailleuse exécute une variété de mouvements qui ne sollicitent pas de façon répétée les épicondyliens. De plus, il estime que le fait que la travailleuse conserve encore des douleurs alors qu’elle n’effectue plus le travail de massothérapeute démontre qu’il n’y a pas de lien avec le travail.

[24]        Le membre issu des associations syndicales est d’avis de rejeter la requête de l’employeur. Selon lui, la preuve démontre des risques particuliers de développer une épicondylite. Il estime que même si la travailleuse exécute plusieurs types de massage, ce sont les mêmes groupes musculaires qui sont sollicités, soit ceux reliés aux épicondyliens.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[25]        La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si la travailleuse a subi une lésion professionnelle vers le 6 janvier 2010.

[26]        La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) définit la lésion professionnelle comme suit :

2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :

 

« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.

 

 

[27]        La loi définit également la maladie professionnelle :

2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :

 

« maladie professionnelle » : une maladie contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui est caractéristique de ce travail ou reliée directement aux risques particuliers de ce travail;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.

[28]        Sur le plan du diagnostic, le médecin qui a charge retient celui d’épicondylite bilatérale et de kyste synovial du poignet droit. En vertu de l’article 224 de la loi, le tribunal est lié aux conclusions du médecin traitant lorsqu’il n’y a pas de contestation à l’égard du diagnostic. Dans sa décision rendue à la suite d’une révision administrative, la CSST ne reconnaît que l’épicondylite bilatérale. Or, la travailleuse n’ayant pas contesté cette décision à l’égard du refus du kyste synovial, le tribunal conclut que le diagnostic au cœur du présent litige est celui d’épicondylite bilatérale.

[29]        L’admissibilité de l’épicondylite bilatérale à titre de lésion professionnelle requiert l’analyse des dispositions relatives à la maladie professionnelle puisqu’aucun fait accidentel n’est allégué. Outre la définition de l’article 2 de la loi, cette notion fait l’objet de deux dispositions législatives spécifiques :

29.  Les maladies énumérées dans l'annexe I sont caractéristiques du travail correspondant à chacune de ces maladies d'après cette annexe et sont reliées directement aux risques particuliers de ce travail.

 

Le travailleur atteint d'une maladie visée dans cette annexe est présumé atteint d'une maladie professionnelle s'il a exercé un travail correspondant à cette maladie d'après l'annexe.

__________

1985, c. 6, a. 29.

 

 

30.  Le travailleur atteint d'une maladie non prévue par l'annexe I, contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui ne résulte pas d'un accident du travail ni d'une blessure ou d'une maladie causée par un tel accident est considéré atteint d'une maladie professionnelle s'il démontre à la Commission que sa maladie est caractéristique d'un travail qu'il a exercé ou qu'elle est reliée directement aux risques particuliers de ce travail.

__________

1985, c. 6, a. 30.

 

 

[30]        L’épicondylite n’est pas une maladie énumérée à l’annexe I de la loi. De plus, aucune preuve n’a été administrée, selon laquelle une épicondylite pourrait être assimilée à une tendinite. Dans ce contexte, la présomption de maladie professionnelle consacrée par l’article 29 de la loi ne s’applique pas.

[31]        Au chapitre de l’application de l’article 30 de la loi, le tribunal ne peut retenir que l’épicondylite du coude droit de la travailleuse est une maladie caractéristique du travail de massothérapeute. En effet, aucune preuve, notamment une preuve épidémiologique, n’a été présentée au tribunal qui lui aurait permis de conclure dans ce sens.

[32]        Toutefois, la Commission des lésions professionnelles juge que l’épicondylite bilatérale qui afflige la travailleuse est une maladie reliée aux risques particuliers du travail au sens de l’article 30 de la loi.

[33]        Un travail présente des risques particuliers lorsque celui-ci constitue, de par sa nature et ses conditions d’exercice, un risque particulier d’induire une maladie spécifique[2]. La preuve des risques particuliers du travail se fait par une analyse des structures anatomiques atteintes et par une identification des facteurs biomécaniques, physiques ou organisationnels sollicitant ces structures. Le tribunal devra également tenir compte, dans son analyse, des caractéristiques personnelles de la travailleuse, de l’importance de l’exposition aux facteurs de risques en terme de durée, d’intensité ou de fréquence[3].

[34]        Dans le présent dossier, la preuve comporte une illustration des gestes effectués par la travailleuse lorsqu’elle exécute différents massages. Toutefois, aucune preuve médicale n’identifie quels sont les facteurs de risque susceptibles de contribuer au développement d’une épicondylite. Dans ce contexte, le tribunal est justifié tel que l’édicte le Règlement sur la preuve et la procédure de la Commission des lésions professionnelles[4] (le règlement), de puiser à même sa connaissance spécialisée pour qualifier les gestes effectués par la travailleuse et déterminer si ceux-ci peuvent constituer des facteurs de risque d’induire une pathologie d’épicondylite.

[35]        L’article 26 du règlement crée l’obligation suivante :

La Commission prend connaissance d’office des faits généralement reconnus, des opinions et des renseignements qui relèvent de sa spécialisation.

 

 

[36]        Dans l’affaire Blanchard c. Control Data Canada Limitée[5], la Cour suprême du Canada cerne la place de la connaissance spécialisée dans le processus décisionnel des tribunaux administratifs :

En effet, faut-il le rappeler, les tribunaux administratifs répondent au besoin d’apporter des solutions à des conflits qui se prêtent mieux à un procédé décisionnel autre que celui qu’offrent les tribunaux judiciaires. Souvent aussi, le juge administratif est mieux formé et mieux renseigné sur le milieu où il exerce sa compétence, et a accès à des renseignements qui ne se retrouvent pas, plus souvent qu’autrement, au dossier soumis à la cour.

 


[37]        La jurisprudence[6] de la Commission des lésions professionnelles retient que la connaissance spécialisée du tribunal comprend les notions de base généralement reconnues par la communauté scientifique, ne faisant pas l’objet de controverse scientifique et qui ne relèvent pas d’une expertise particulière et qui ont pu être exposées à maintes reprises devant le tribunal.

[38]        La connaissance spécialisée du tribunal ne peut lui servir de sauf-conduit pour pallier à une preuve insuffisante ou pour faire appel à une preuve extrinsèque. En somme, la connaissance d’office élargie ou connaissance spécialisée constitue un outil permettant au tribunal de comprendre et d’analyser la preuve[7].

[39]        Dans le présent dossier, le tribunal s’appuie notamment sur sa connaissance spécialisée pour identifier quels sont les gestes ne suscitant aucune controverse médicale, susceptibles d’occasionner une épicondylite. De plus, cette connaissance spécialisée permet au tribunal de qualifier médicalement les gestes effectués par la travailleuse qui ont été mis en preuve lors de l’audience.

[40]        Dans cette perspective, le tribunal retient que les mouvements susceptibles de causer une épicondylite sont ceux sollicitant les muscles supinateurs de l’avant-bras et les muscles extenseurs du poignet et des doigts[8]. Dans son analyse de la preuve, le tribunal doit donc considérer les mouvements ou efforts en supination de l’avant-bras, les mouvements d’extension du poignet et des doigts, ceux de préhension et les déviations radiales ou cubitales.

[41]        En l’espèce, le tribunal constate que la travailleuse, dans le cadre de ses différents massages qu’elle accomplit, exécute des mouvements sollicitant les épicondyliens. En effet, il ressort de la preuve que dans le cadre des massages suédois, la travailleuse effectue principalement des mouvements d’extension des poignets et des déviations radiale et cubitale lorsqu’elle effectue différentes manœuvres. De plus, le tribunal retient que la travailleuse exerce une pression avec ses mains sur le corps du patient alors que ses poignets sont en extension.

[42]        La Commission des lésions professionnelles considère que ces gestes exécutés par la travailleuse dans le cadre des massages suédois combinés à la pression appliquée par la travailleuse et au nombre de massages suédois exécutés par la travailleuse dans une semaine de travail ont contribué de façon significative à l’apparition de l’épicondylite de la travailleuse.

[43]        D’ailleurs, dans l’affaire Roy et Komatsu International (Canada) Inc[9], la Commission des lésions professionnelles écrit au chapitre du fardeau de preuve :

[100]    L’analyse de la Commission des lésions professionnelles est encadrée par la Loi.  Or, le législateur a choisi de ne pas faire cette exclusion.  Le législateur reconnaît comme maladie professionnelle, non seulement les maladies causées par un travail mais aussi les maladies reliées à des facteurs de risque présents au travail (article 30).

 

[…]

 

[102]    Le législateur reconnaît donc la possibilité qu’une maladie musculo-squelettique soit reliée à un travail exercé. […] Légalement, on pourra la qualifier de «maladie professionnelle» lorsque la preuve permet de conclure que le travail a contribué de façon significative et déterminante à l’apparition ou au développement de la maladie.  C’est une preuve prépondérante qui permet de conclure en ce sens, sans l’exigence d’une preuve de niveau scientifique.  C’est le cadre d’analyse de l’article 30 de la Loi.

 

 

[44]        La preuve statistique déposée par l’employeur permet de conclure que les principaux massages dispensés par la travailleuse sont de type suédois. De plus, le tribunal tient compte du fait que les massages à pression forte nécessitent une plus grande force et que ceux-ci sont inclus dans les statistiques des massages suédois.

[45]        Quant aux autres types de massages dispensés par la travailleuse, la preuve établit, notamment par son témoignage non contredit, qu’ils nécessitent les mêmes mouvements d’extension et de déviation radiale et cubitale des poignets puisqu’ils empruntent les mêmes techniques que le massage suédois. C’est notamment le cas pour les massages thérapeutiques et les massages pour les femmes enceintes. Au chapitre des massages à la pierre chaude, la travailleuse effectue des mouvements de supination des poignets qui ont contribué au développement de son épicondylite bilatérale.

[46]        Le tribunal tient également compte dans son analyse de l’opinion du médecin régional de la CSST.

[47]        La procureure de l’employeur soutient qu’il n’y a pas de cadence ni de fréquence dans les tâches de la travailleuse. Au contraire, le tribunal juge que la travailleuse est exposée de façon prépondérante aux facteurs de risque qui ont contribué significativement au développement de son épicondylite bilatérale. Cette exposition se caractérise par le nombre de clients vus par la travailleuse dans une journée, par la durée des massages qui varient de 30 à 90 minutes et par le fait que la travailleuse doit respecter un horaire de rendez-vous.

[48]        Les pauses de 15 minutes entre les massages pour monter la salle ne constituent pas une période de récupération nécessaire. Cette période de temps doit s’apprécier en fonction de l’ensemble des activités exercées par la travailleuse. Or, en tenant compte, encore une fois du nombre de massages et de la durée de ceux-ci, cette période de 15 minutes est insuffisante.

[49]        Par ailleurs, le fait que la travailleuse soit encore aux prises avec des douleurs aux coudes ne permet pas de remettre en question le lien entre l’épicondylite bilatérale de la travailleuse et son travail de massothérapeute. Certes, il s’agit d’un élément à considérer qui toutefois être apprécié dans l’ensemble de la preuve. Or, dans le présent dossier, il y a une adéquation entre les gestes posés par la travailleuse et les douleurs ressenties. Dans ce contexte, la persistance des douleurs ne constitue pas un élément prépondérant permettant de remettre en question le lien entre l’épicondylite bilatérale et le travail de la travailleuse.

[50]        En conséquence, le tribunal considère que l’épicondylite de la travailleuse est reliée aux risques particuliers de son travail.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête du Spa Le Finlandais, l’employeur;

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 15 septembre 2010 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que madame Maud D’Arcy, la travailleuse, a subi une lésion professionnelle.

 

 

__________________________________

 

Philippe Bouvier

 

 

 

Me Ingrid E. Mazzola

DUFRESNE HÉBERT COMEAU

Représentante de la partie requérante

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           Bouchard et Québec (ministère de la Justice) [2006] C.L.P. 913 ; Beaudouin et Super C, division Métro-Richelieu, C.L.P. 219888-07-0311, 31 octobre 2005, M. Langlois, (2005LP-196).

[3]           Précitée, note 2, [2006] C.L.P. 913 .

[4]           (2000) 132 G.O. II, 1627.

[5]           [1984] 2 R.C.S. 476 .

[6]           Dallaire et Jeno Neuman & Fils inc. [2000] C.L.P. 1146 ; Valois et services d’entretien Maco ltée [2001] C.L.P. 823 ; Tremblay et P.N. Lamoureux ltée, C.L.P. 133533-09-9909, 24 janvier 2006, G. Marquis; Construction Raoul Pelletier inc., C.L.P. 221878-03B-0311, 1er août 2006, M. Beaudouin; Petit et IAMGOLD-Mine Doyon, C.L.P. 332659-08-0711, 19 juin 2009, A. Vaillancourt.

[7]           Petit et IAMGOLD-Mine Doyon, précitée note 6.

[8]           Verreault et Groupe Compass, C.L.P. 283025-31-0602, 15 septembre 2006, G. Tardif; Bédard et Claude Miville inc., C.L.P. 320712-31-0706, 12 juin 2008, S. Sénéchal.

[9]          C.L.P.126914-62-9911, 6 juillet 2001, L. Vallières.

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