Décision

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Modèle de décision CLP - avril 2013

Larivière et Terre des Jeunes de Ste-Julienne

2014 QCCLP 3654

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Joliette

23 juin 2014

 

Région :

Lanaudière

 

Dossiers :

451091-63-1110      451623-63-1110      452792-63-1110

458337-63-1112      484021-63-1210      486626-63-1211

488629-63-1211      491493-63-1301      491761-63-1301

536543-63-1403

 

Dossiers CSST :

135935898   138097696

 

Commissaire :

Daniel Pelletier, juge administratif

 

Membres :

Luc Dupéré, associations d’employeurs

 

Daniel Riportella, associations syndicales

 

 

Assesseure :

Huguette Dumais, médecin

______________________________________________________________________

 

 

 

 

451091          484021          486626

488629          491493

451623          452792          458337

491761

 

 

Denis Larivière

Terre des Jeunes de Ste-Julienne

Partie requérante

Partie requérante

et

et

Terre des Jeunes de Ste-Julienne

Denis Larivière

Partie intéressée

Partie intéressée

et

et

Commission de la santé

et de la sécurité du travail

Commission de la santé

et de la sécurité du travail

Partie intervenante

Partie intervenante

 

 

 

 

536543

 

 

 

Denis Larivière

 

Partie requérante

 

et

 

Terre des Jeunes de Ste-Julienne

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

Dossier CSST : 135935898 (événement du 23 janvier 2010)

Dossier 451091-63-1110

[1]           Le 6 octobre 2011, monsieur Denis Larivière (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 22 septembre 2011, à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 26 mai 2011 et déclare que le travailleur est capable d’exercer son emploi prélésionnel d’éducateur à compter du 25 mai 2011.

Dossier 451623-63-1110

[3]           Le 17 octobre 2011, Terre des Jeunes de Ste-Julienne (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 2 septembre 2011, à la suite d’une révision administrative.

[4]           Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 28 avril 2011 à la suite de l’avis du Bureau d’évaluation médicale (BEM) et déclare que l’entorse lombaire subie par le travailleur le 23 janvier 2010 est consolidée en date du 4 avril 2011, avec suffisance des soins à cette même date, que le travailleur n’a pas droit à une indemnité pour dommages corporels vu l’absence d’augmentation d’atteinte permanente à son intégrité physique et psychique, mais déclare que le travailleur conserve son droit à l’indemnité de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’elle se prononce sur sa capacité à exercer son emploi, considérant que la lésion professionnelle a entraîné des limitations fonctionnelles.

Dossier 486626-63-1211

[5]           Le 6 novembre 2012, monsieur Larivière (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 30 octobre 2012, à la suite d’une révision administrative.

[6]           Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 29 août 2012 et déclare que la CSST est bien fondée de réclamer au travailleur une somme de 6 058,24 $ versée en trop, durant la période du 17 février 2010 au 22 mars 2011.

Dossier 491493-63-1301

[7]           Le 7 janvier 2013, monsieur Larivière (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 12 décembre 2012, à la suite d’une révision administrative.

[8]           Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 30 octobre 2012 et déclare que la CSST est bien fondée de réclamer au travailleur une somme de 3 265 $ versée en trop, durant la période du mois de mars 2010 au 14 mai 2011.

Dossier CSST : 138097696 (événement du 2 juin 2011)

Dossier 452792-63-1110

[9]           Le 28 octobre 2011, Terre des Jeunes de Ste-Julienne (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 13 septembre 2011, à la suite d’une révision administrative.

[10]        Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 14 juillet 2011 et déclare que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 2 juin 2011.

Dossier 458337-63-1112

[11]        Le 27 décembre 2011, Terre des Jeunes de Ste-Julienne (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 29 novembre 2011, à la suite d’une révision administrative.

[12]        Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 19 septembre 2011 et déclare que les diagnostics d’entorse lombaire et de sciatalgie sont en relation avec la lésion professionnelle du 2 juin 2011.

Dossier 484021-63-1210

[13]        Le 9 octobre 2012, monsieur Larivière (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 28 septembre 2012, à la suite d’une révision administrative.

[14]        Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 18 juillet 2012 et déclare que le diagnostic d’entorse au genou gauche n’est pas en relation avec la lésion professionnelle du 2 juin 2011.

Dossier 488629-63-1211

[15]        Le 28 novembre 2012, monsieur Larivière (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 21 novembre 2012, à la suite d’une révision administrative.

[16]        Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 31 octobre 2012 et déclare que la CSST est bien fondée de réclamer au travailleur une somme de 300 $ versée en trop, entre le 26 et le 31 mai 2012.

Dossier 491761-63-1301

[17]        Le 10 janvier 2013, Terre des Jeunes Ste-Julienne (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision conjointe de la CSST et de la Société d’assurance automobile du Québec (la SAAQ) rendue le 10 décembre 2012, laquelle reconsidère la décision conjointe rendue le 15 novembre 2012 qui déclare que le droit de retour au travail du travailleur n’est pas expiré et que le travailleur n’a plus droit à l’indemnité de remplacement du revenu.

Dossier 536543-63-1403

[18]        Le 14 mars 2014, monsieur Larivière (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision du conciliateur décideur de la CSST, monsieur François Morand, rendue le 5 février 2014, déclarant irrecevable sa plainte formulée en vertu des dispositions de l’article 32 de la Loi sur les accidents du travail et maladies professionnelles[1] (la loi).

[19]        Trois journées d’audience sont tenues dans ces dossiers, les 8, 10 et 22 avril 2014 à Joliette. Le travailleur et l’employeur sont présents et représentés et la CSST est également représentée.

[20]        Le dossier est mis en délibéré le 22 avril 2014 à la suite de l’audience.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

Dossier CSST : 135935898 (événement du 23 janvier 2010)

Dossier 451091-63-1110

[21]        Dans ce dossier, le travailleur demande d’infirmer la décision rendue par la révision administrative, le 22 septembre 2011, et de déclarer qu’il n’était pas capable d’exercer son emploi prélésionnel d’éducateur à compter du 25 mai 2011, considérant ses limitations fonctionnelles.

Dossier 451623-63-1110

[22]        Dans ce dossier, l’employeur demande d’infirmer en partie la décision de la CSST rendue le 2 septembre 2011, à la suite d’une révision administrative, et demande que l’on retienne les conclusions suivantes : le diagnostic de la lésion est une entorse lombaire consolidée le 12 novembre 2010. Le déficit anatomophysiologique à retenir est 2 % pour les séquelles actuelles, qui est équivalent aux séquelles antérieures reconnues au travailleur. Il demande de déclarer que le travailleur conserve les mêmes limitations fonctionnelles que celles retenues pour les accidents du travail antérieurs et que le travailleur n’ait pas droit à l’indemnité de remplacement du revenu, étant donné qu’il était en mesure d’exercer son emploi prélésionnel depuis le 12 novembre 2010.

Dossier 486626-63-1211

[23]        Dans ce dossier, le travailleur demande d’infirmer la décision de la CSST rendue le 6 novembre 2012, à la suite d’une révision administrative, et de déclarer qu’il ne doit qu’une somme de 518 $ à titre de surpayé sur la somme de 6 058,24 $, qui lui est réclamée pour la période du 17 février 2010 au 22 mars 2011.

Dossier 491493-63-1301

[24]        Dans ce dossier, le travailleur demande d’infirmer la décision de la CSST rendue le 12 décembre 2012, à la suite d’une révision administrative, et de déclarer qu’il ne doit pas la somme de 3 265 $ qui lui est réclamée pour la période du mois de mars 2010 au 14 mai 2011.

Dossier CSST : 138097696 (événement du 2 juin 2011)

Dossier 452792-63-1110

[25]        Dans ce dossier, l’employeur demande d’infirmer la décision de la CSST rendue le 13 septembre 2011, à la suite d’une révision administrative, et de déclarer que le travailleur n’a pas subi de lésion professionnelle le 2 juin 2011.

Dossier 458337-63-1112

[26]        Dans ce dossier, l’employeur demande d’infirmer la décision de la CSST rendue le 29 novembre 2011, à la suite d’une révision administrative, et de déclarer que les diagnostics d’entorse lombaire et de sciatalgie gauche ne sont pas en relation avec la lésion professionnelle qui serait survenue le 2 juin 2011.

Dossier 484021-63-1210

[27]        Dans ce dossier, le travailleur demande d’infirmer la décision de la CSST rendue le 28 septembre 2012, à la suite d’une révision administrative, et de déclarer que le diagnostic d’entorse au genou gauche est en relation avec la lésion professionnelle du 2 juin 2011.

Dossier 488629-63-1211

[28]        Dans ce dossier, le travailleur demande d’infirmer la décision de la CSST rendue le 21 novembre 2012, à la suite d’une révision administrative, et de déclarer qu’il ne doit pas la somme de 300 $ qui lui est réclamé à titre de trop-perçu, pour la période du 26 au 31 mai 2012.

Dossier 491761-63-1301

[29]        Dans ce dossier, l’employeur demande de déclarer, sans objet, la décision conjointe rendue par la CSST et la SAAQ le 10 décembre 2012, laquelle reconsidère la décision conjointe rendue le 15 novembre 2012 déclarant que le droit de retour au travail du travailleur n’est pas expiré et que le travailleur n’a plus droit à l’indemnité de remplacement du revenu, considérant qu’aucune lésion professionnelle n’est survenue le 2 juin 2011.

Dossier 536543-63-1403

[30]        Dans ce dossier, le travailleur demande d’infirmer la décision du conciliateur décideur de la CSST rendue le 5 février 2014, de déclarer recevable sa plainte formulée en vertu des dispositions de l’article 32 de la loi, d’accueillir sa plainte, d’annuler son congédiement, d’ordonner qu’il soit compensé pour les pertes monétaires résultant de son congédiement et il demande à la Commission des lésions professionnelles (le tribunal) de conserver juridiction quant au quantum en lien avec cette réclamation, si la plainte est accueillie.

LA PREUVE

[31]        La preuve est composée des éléments habituellement contenus au dossier d’accidenté du travailleur, mais contient, en plus, un rapport d’enquête effectué par un enquêteur de la CSST et un rapport faisant suite à une filature effectuée par une firme privée qui s’accompagne de séquences vidéo.

[32]        L’enquête sur les activités du travailleur et la filature sont demandées par la CSST. Les parties conviennent de déposer ces deux rapports et reconnaissent qu’ils sont recevables en preuve. Le tribunal y référera au besoin dans l’exposé et son analyse de la preuve. Sont également entendus, le travailleur, madame Rioux responsable des finances pour l’employeur, et le directeur général de l’employeur, monsieur Marcel Pellerin.

[33]        Avant de subir un premier accident du travail chez l’employeur, le travailleur a, dans le passé, été victime de nombreux accidents du travail qui ont une certaine pertinence avec les événements en litige et qu’il convient de relater.

[34]        Les premiers antécédents documentés, concernant la région lombaire, remontent à l’année 1984.

[35]        Le 30 août 1990, le travailleur subit une autre lésion professionnelle alors qu’il travaille comme technicien ambulancier. Il retourne au travail le 20 octobre 1990. Le jour prévu pour son retour, il est victime d’un accident de la route. Il ne reprend le travail que le 11 mars 1991.

[36]        Le 15 septembre 1991, le travailleur subit une nouvelle lésion professionnelle. Il se blesse à la colonne lombaire.

[37]        À la suite de la consolidation de cette lésion professionnelle, on reconnaît que le travailleur conserve une atteinte permanente à son intégrité physique et psychique de 3,3 % pour une instabilité lombaire et les limitations fonctionnelles suivantes :

·          éviter de soulever des charges lourdes;

·          éviter les postures contraignantes;

·          éviter les mouvements brusques.

 

 

[38]        Le travailleur réintègre son emploi le 5 mai 1992. Dès 1992, le médecin traitant du travailleur fait référence à une réorientation, en raison d’une lombalgie récidivante et d’une instabilité lombaire.

[39]        Le 15 décembre 1998, le travailleur subit une nouvelle lésion professionnelle. Il présente des maux de dos et une sciatalgie gauche comme principaux problèmes.

[40]        Dans une expertise du 4 mai 1999, le docteur Claude Lapierre indique ce qui suit :

Antécédents pertinents

Depuis son embauche par Urgences-santé en juillet 1986, monsieur Larivière a présenté 29 réclamations différentes à la CSST dont 17 ont impliqué la région dorso-lombaire.

 

De plus, il s’est absenté à 7 autres reprises pour des problèmes lombaires, étant alors indemnisé par le régime d’assurance collective.

 

[41]        Le 8 juillet 1999, le docteur Georges-Henri Laflamme, membre du BEM, souligne le caractère chronique de la symptomatologie.

[42]        Le 5 octobre 1999, le travailleur est examiné par son médecin traitant, le docteur Jules Gauthier. Il décrit la condition du travailleur comme suit :

[…]

 

2. Plaintes et problèmes reliés à la lésion professionnelle : La douleur est augmentée le matin après son lever, il en a pour à peu près 20 minutes à faire des exercices d’étirement et posturaux pour soulager sa condition. Il peut marcher environ 20 minutes et par la suite une douleur s’installe à la région lombaire basse avec irradiation au niveau parafessier gauche. S’il descend un escalier ou une pente, il prend toujours appui sur sa jambe droite et non sa jambe gauche puisqu’à ce moment, s’il prend appui sur sa jambe gauche la douleur va s’installer rapidement à la région lombaire basse. La position assise peut être prise pour environ 60 minutes et la position debout, lorsqu’il peut déambuler, 15 à 20 minutes. Par contre, la position debout statique peut être prise que sur 10 minutes. Lorsqu’il circule, il utilise à ce moment sa canne, il fait référence ici à l’hiver s’il doit marcher en terrain inégal.

 

[…] Il peut soulever du sol environ 45 lbs mais ne le fait pas de façon régulière, ainsi il évite le plus possible de faire des mouvements de flexion avec le tronc lorsqu’il a à soulever des poids ou des charges. Il n’éprouve aucune difficulté à pousser ou tirer le panier d’épicerie ni les sacs mais il le fait avec parcimonie et comme il nous le dit il fait d’abord davantage livrer son marcher et c’est son épouse qui s’occupe des sacs d’épicerie habituellement. Par contre, il n’a pas de problème à transporter dans un sac à dos 10 à 15 lbs. Le patient n’éprouve aucun problème génito-sphintérien. L’épreuve à la toux est peu contributive.

 

3. Antécédents pertinents à la lésion professionnelle : le patient a eu à plusieurs reprises des douleurs à la région lombaire. Le premier accident de travail serait survenu en 1990 alors qu’il a eu une entorse lombo-sacrée. Un peu plus tard il aurait eu un accident d’automobile et on aurait mis en évidence une spondylose avec listhésis de 8 mm au niveau L5-S1. En 1991, il aurait eu une entorse lombaire avec sciatalgie gauche et aurait eu, par docteur Marie Péloquin, une atteinte permanente de 3% en regard d’une instabilité lombo-sacrée.

 

[…]

 

5. Examen physique : il s’agit d’un patient qui participe bien à l’examen. Aujourd’hui la flexion se fait librement, la distance doigts-sol étant évaluée à 15 cm, une perte de 10o est enregistrée. Le mouvement d’extension se voit amputé de 10o. Les rotations gauche et droite sont de bonne amplitude. Les flexions latérales droite et gauche sont de bonne amplitude mais provoquent une grimace en fin de mouvement. Le patient nous dit ressentir à ce moment une douleur à la région lombaire.

 

[…]

[sic]

 

 

[43]        Le 22 octobre 1999, le travailleur est examiné par le docteur Jacques Nolin, orthopédiste, qui rapporte ce qui suit :

PLAINTES ACTUELLES :

 

Monsieur Larivière se plaint de douleurs au niveau de la région lombaire avec douleurs également au niveau du membre inférieur gauche, soit au niveau de la fesse gauche, à la face externe de la cuisse gauche, à la face postérieure de la cuisse gauche, ainsi qu’au niveau du mollet gauche, jusqu’au niveau du talon gauche.

 

Il précise qu’il a de la difficulté à marcher dans la neige et qu’il doit marcher avec une canne depuis 1992.

 

[…]

 

Il ajoute qu’il a de la difficulté à porter une ceinture en raison des douleurs qu’il ressent et il mentionne que les douleurs évoluent en dents-de-scie.

 

La position assise ou la position debout stationnaire plus d’une heure augmentent les douleurs lombaires.

 

[…]

 

 

[44]        À son examen objectif de la colonne dorso-lombaire, le docteur Nolin retient une perte de 15° de flexion antérieure et de 20° d’extension. Les flexions latérales droite et gauche sont limitées de 10° de même que les rotations droite et gauche. L’élévation de la jambe gauche provoque une douleur au-delà de 70°.

[45]        Le 25 novembre 1999, le docteur Benoît Morin, membre du BEM, écrit :

ÉTAT ACTUEL :

 

Le patient est en arrêt de travail n’ayant travaillé que 3 jours en août 1999 depuis l’événement du 15 décembre 1998. Il dit s’être entraîné en septembre 1999 dans un gymnase et ceci aurait entraîné une exacerbation de sa symptomatologie.

 

Présentement, le patient rapport une lombalgie basse centrale et gauche sur une base journalière pire le matin au lever et/ou lorsqu’il est en position stationnaire assise ou debout prolongée. Il se dit soulagé par le port de cette ceinture élastique noire et l’utilisation de glace de même que de Tylenol quelques fois par semaine. Il se dit éveillé le matin par la douleur.

 

Les manœuvres de Valsalva augmenteraient occasionnellement sa lombalgie. Il ne rapporte aucun trouble sphinctérien.

 

 

Il mentionne la présence d’une sciatalgie gauche plus ou moins permanente sous forme de point dans la fesse gauche. Occasionnellement, cette irradiation se prolonge à la région de la face postérieure de la cuisse et très occasionnellement, au mollet et au talon gauches sous forme d’élancement. Il ne rapporte par ailleurs aucun trouble sphinctérien. La force du membre inférieur gauche serait normale sauf lors des épisodes de sciatalgie.

 

EXAMEN OBJECTIF :

 

Il s’agit d’un patient rapportant mesurer 5 pieds 11½ pouces et pesé aujourd’hui à 260 livres, qui nous apparaît en bon état général. Il nous apparaît confortable en position assise durant l’entrevue.

 

Dès son arrivée, il commence à présenter une respiration profonde et à soupirer durant l’entrevue, Il nous décrit une symptomatologie élaborée et invalidante. La collaboration à l’examen est qualifiable de métigé, le patient soupirant et gémissant de façon presque constante à chaque étape et chaque mobilisation réalisés. Il se dévêt et revêt fort lentement. [sic]

 

[…]

 

OPINION :

 

Il s’agit d’un patient qui dans le cadre de son travail comme technicien ambulancier rapportait l’apparition d’une lombalgie aiguë suite à la mobilisation d’un patient le 15 décembre 1998.

 

Préalablement, ce patient présentait de multiples antécédents professionnels reliés au rachis dorso-lombaire ceci depuis les années 1980 et depuis 1989, il aurait présenté 28 réclamations pour accidents de travail au rachis et 17 autres réclamations non reliées à son travail. Au total, il aurait été plus de 50 % de son temps en arrêt de travail depuis 1989. 

 

En cours d’évolution soit depuis 1990, une investigation radiologique démontrait la présence d’un spondylolisthésis L5-S1 à titre de condition personnelle.

 

[…]

 

[…] La mobilité rachidienne était tout à fait satisfaisante chez ce patient compte tenu de sa taille, de son obésité, de son déconditionnement physique, de cette condition personnelle consistant en un spondylolisthésis L5-S1 avec phénomènes dégénératifs secondaires.

 

Les quelques degrés de limitation d’amplitude dans différents plans étaient selon nous toute à fait compatibles avec les conditions préalablement mentionnées.

 

L’examen objectif réalisé aujourd’hui ne démontrait aucun signe suggestif d’une séquelle d’entorse lombaire ou dorso-lombaire chez ce patient.

 

Le tableau clinique était par ailleurs tout à fait compatible avec cette condition personnelle évoluant de fort longue date.

 

[…]

De plus, la manœuvre de tripode réalisée en position assise était selon nous paradoxale puisque le patient réalisait une flexion tronculaire antérieure au lieu d’une extension lors de sa réalisation alléguant des douleurs lombaires lors de cette manœuvre.

 

[…]

 

5-       EXISTENCE OU ÉVALUATION DES LIMITATIONS FONCTIONNELLES DU TRAVAILLEUR

 

[…]

 

Compte tenu de l’absence de signes objectivables francs suggérant une séquelle d’entorse lombaire chez ce patient;

 

Nous suggérons de ne retenir aucune limitation fonctionnelle en relation avec l’événement du 15 décembre 1998;

 

Par ailleurs, pour cette condition personnelle consistant en une instabilité lombo-sacrée sur spondylolisthésis L5-S1, nous sommes d’accord avec le docteur Lapierre de suggérer certaines limitations fonctionnelles de classe I, soit d’éviter :

 

- Soulever, porter, pousser ou tirer des charges excédant 15 kg;

- Éviter les mouvements répétitifs et fréquents de flexion, d’extension et de torsion du rachis lombaire.

 

 

[46]        En ce qui a trait à l’atteinte permanente, le docteur Morin retient 0 % d’atteinte pour une entorse lombaire sans séquelles et retient au chapitre des séquelles antérieures, selon l’expertise du docteur Péloquin du 4 mai 1992, un déficit anatomophysiologique de 3 % pour une instabilité lombosacrée avec listhésis et sciatalgie gauche récidivante.

[47]        Le travailleur conteste la décision qui fait suite à l’avis du BEM et ce litige se retrouve devant la Commission des lésions professionnelles.

[48]        Le 8 mai 2001, la Commission des lésions professionnelles entérine un accord qui comporte les éléments suivants[2] :

·            la lésion professionnelle du 15 décembre 1998 a entraîné une atteinte permanente de 2.2 % pour une entorse lombaire;

·            le travailleur conserve des limitations fonctionnelles de classe 1 (20 kg) libellées comme suit :

Éviter d’accomplir de façon répétitive ou fréquente des activités qui impliquent de soulever, porter, tirer, pousser des charges de plus de 20 kilos et éviter de travailler en position accroupie, de ramper, de grimper et d’effectuer des mouvements avec des amplitudes extrêmes de flexion, d’extension ou de torsion de la colonne lombaire.

 

·            on reconnaît qu’il est incapable d’effectuer le travail de technicien ambulancier;

·            il a droit à l’indemnité de remplacement du revenu;

·            il a droit à la réadaptation.

 

 

[49]        Par une transaction signée entre les parties, le travailleur, son ancien employeur et la CSST conviennent de déterminer que l’emploi d’instructeur en soins d’urgence, avec un revenu brut annuel de 26 000 $, est un emploi convenable pour le travailleur. Les parties conviennent également que le travailleur a droit à une année de recherche d’emploi et aura droit à une indemnité de remplacement du revenu réduite après ce délai. La CSST accepte de verser une somme de 6 000 $ au travailleur pour l’achat d’équipements.

[50]        Le travailleur exerce cet emploi d’instructeur en soins d’urgence jusqu’en 2006.

[51]        Le 19 octobre 2006, le travailleur est victime d’un accident d’automobile, soit une collision par l’arrière. L’autre véhicule est entré en collision avec le sien à une vitesse de 100 km/heure environ. Il est indemnisé par la SAAQ et fait l’objet d’un suivi médical durant un an, environ.

[52]        Le 7 novembre 2007, le docteur Guy Lebouthillier examine le travailleur, à la demande de la SAAQ. Il conclut que le travailleur conserve des séquelles permanentes pour le déplacement et le maintien du tronc de classe 2, ce qui correspond à sa condition avant l’accident d’automobile du 19 octobre 2006. La lésion cervicale n’est pas consolidée.

[53]        Le 8 janvier 2008, la SAAQ détermine que le travailleur conserve des séquelles pour le déplacement et le maintien de la tête de classe 1.

[54]        Le travailleur mentionne qu’il se « sent fragile » à cette époque. La sciatalgie est plus fréquente, elle s’accompagne d’élancements dans la fesse qui descendent dans la cuisse jusqu’au mollet gauche, durant les mauvaises journées. Les mouvements de rotation droite et gauche sont les plus difficiles à exécuter selon le travailleur.

La lésion professionnelle du 23 janvier 2010

[55]        Le travailleur est embauché comme éducateur chez l’employeur à la fin du mois d’août 2008. Dans le cadre de son travail, il doit prendre soin des bénéficiaires du centre. Il s’agit d’une clientèle handicapée intellectuelle qu’il connaît bien pour avoir déjà travaillé à l’hôpital Louis-H. Lafontaine.

[56]        Son horaire de travail est du vendredi au samedi de 17 h à 7 h et le dimanche de 17 h à 23 h. Il doit préparer des repas, faire la vaisselle, l’entretien ménager, superviser les bains, particulièrement pour un client aveugle. Il accompagne les clients dans leurs activités, telles que la danse, et leurs rendez-vous médicaux. L’hiver, il doit parfois pelleter la neige pour dégager les entrées et rentrer du bois de chauffage. Le travailleur mentionne que le travail de jour est plus lourd que sur le quart de soir.

[57]        Le 23 janvier 2010, le travailleur est victime d’un accident du travail alors qu’il chute dans un escalier après s’être pris le pied droit dans un tapis de plastique. Il aurait arraché la rampe dans sa chute et aurait été projeté dans le bas des marches. Il se blesse au côté gauche. Il a mal à un pied et ressent des engourdissements dans le dos. Il se dit très découragé.

[58]        Le 25 janvier 2010, il complète une réclamation du travailleur. Il précise qu’il occupe plus d’un emploi et sa lésion professionnelle l’empêche d’occuper ce deuxième emploi. Ce deuxième emploi est un emploi d’instructeur en secourisme, que le travailleur exerce en même temps que son emploi d’éducateur. Lors de son embauche chez l’employeur, ce dernier avait été avisé qu’il occupait cet emploi et qu’il recherchait un deuxième emploi à temps partiel pour combler ses heures libres.

[59]        Le 25 janvier 2010, la docteure Louise M. Légaré rédige une attestation médicale initiale. Elle retient le diagnostic d’entorse lombaire, de contusion au genou gauche et de contusion au talon droit. Elle prescrit un arrêt du travail et recommande le travailleur à la docteure Bozena Schaefer-Zieleniak.

[60]        Les 1er et 15 février 2010, la docteure Schaefer, médecin qui a charge du travailleur, reprend ces mêmes diagnostics et prolonge l’arrêt du travail.

[61]        Les 16 et 17 février 2010, le travailleur donne des cours de secourisme en milieu de travail à Ste-Agathe. Le travailleur n’avise ni la CSST ni son employeur qu’il continue à donner ces cours, malgré son accident du travail, et il ne le fera pas pour toutes les autres formations qu’il donnera par la suite.

[62]        Les 24 et 25 février 2010, le travailleur donne une autre formation, cette fois à St-Jérôme.

[63]        Le 1er mars 2010, la docteure Schaefer prescrit des traitements de physiothérapie. Le même jour, le travailleur donne une formation à Joliette pour la Fondation des maladies du cœur.

[64]        Dans les notes de l’agente Amélie Jolibois de la CSST, en date du 3 mars 2010, nous lisons ce qui suit :

En attente d’une autorisation de la Commission pour des Tx [traitements] de physio.

 

T [travailleur] dit avoir encore beaucoup de douleur au niveau lombaire et au niveau de son talon droit.

 

[…]

 

T dit que lors d’un ancien dossier à la Commission, il avait passer devant la CLP et celle-ci avait déterminer un emploi convenable chez E [employeur] comme formateur.

 

T dit qu’il avait accepté mais que finalement il n’était pas en mesure de faire cet emploi donc a dû se réorienter.

 

A aussi travaillé quelques années au CH Louis-H Lafontaine comme éducateur.

 

[…]

 

T dit qu’il sera en mesure de refaire son emploi pré-lésionnel lorsque sa lésion professionnelle sera consolidée.

 

Toutefois, T dit qu’il suivait des cours avant l’accident d’instructeur d’équitation thérapeutique et dit qu’il va les poursuivrent après sa consolidation.

 

Dit qu’il veut vraiment travailler comme instructeur d’équitation dans le futur.

 

ASPECT PSYCHOSOCIAL :

 

T dit qu’il prend des marches à l’extérieur.

 

[…]

[sic]

 

 

[65]        Les 15, 17 et 24 mars 2010, le travailleur donne des formations pour la Fondation des maladies du cœur à Repentigny.

[66]        Le 22 mars 2010, la docteure Schaefer demande une consultation en physiatrie pour la condition lombaire du travailleur.

[67]        Le 28 mars 2010, le physiothérapeute note une augmentation subjective de la douleur depuis deux jours, secondaire à une position assise prolongée.

[68]        Le 10 avril 2010, le travailleur donne une formation pour la Fondation des maladies du cœur à Joliette.

[69]        Le 12 avril 2010, la docteure Schaefer donne suite à un avis motivé du médecin qui a charge. Elle rapporte une très bonne amélioration pour le genou gauche et le pied droit et une amélioration progressive pour l’entorse lombaire.

[70]        Le 26 avril 2010, la docteure Schaefer constate une détérioration de l’entorse lombaire. Elle augmente la fréquence des traitements de physiothérapie.

[71]        Le 5 mai 2010, le docteur Claude Bouthillier, physiatre, administre des blocs facettaires sous scopie au travailleur. Un rapport de physiothérapie, en date du 19 mai 2010, indique que les blocs facettaires ont aidé, mais le travailleur a mentionné, dans son témoignage, que ces traitements n’ont pas eu d’effet à long terme, la même douleur étant revenue.

[72]        Le 6 mai 2010, le travailleur discute de sa condition avec son agente de la CSST. Il mentionne qu’il retournera à son emploi lorsqu’il sera guéri, que sa condition s’est améliorée de 50 %, mais affirme que son genou gauche et son talon droit sont guéris. Il mentionne que, lorsque son accident est survenu, il suivait une formation dans le but de se réorienter et l’employeur était avisé de son intention. Il mentionne que la clientèle a de graves troubles de comportement, qu’il n’y a pas de travaux légers chez l’employeur et qu’il désire changer de carrière.

[73]        Le 10 mai 2010, la docteure Schaefer indique que la condition lombaire du travailleur demeure la même. Elle refuse une assignation temporaire proposée par l’employeur. L’employeur proposait un travail deux à trois demi-journées par semaine, en évitant les escaliers et les interventions physiques auprès des résidents. L’assignation proposée comportait également la rédaction de rapports, la confection des listes d’épicerie, la préparation et la supervision des repas, la lessive et les commissions.

 

[74]        Lors de son témoignage, le travailleur indique qu’il était sous l’impression que la CSST le prendrait en charge et défraierait les coûts de sa formation en équithérapie, dans le but d’en faire un nouvel emploi convenable. Il indique avoir donné beaucoup à l’employeur. C’est lui qui a confectionné le programme de prévention, mais l’ex-directeur a refusé de le signer. Le travailleur ne cache pas qu’il était frustré de voir son projet d’équithérapie abandonné. Si on ajoute à cela ses problèmes de consommation, toutes ces raisons ont fait en sorte qu’il désirait changer d’emploi et il n’était pas très ouvert à l’idée de faire l’assignation temporaire que lui a proposée l’employeur à quelques reprises.

[75]        En ce qui a trait à ses problèmes de consommation, le travailleur reconnaît qu’il avait développé une dépendance au Supeudol, un narcotique, et qu’il a manipulé ses médecins pour s’en faire prescrire. Il mentionne que ça l’aidait également à compenser pour les douleurs qu’il ressentait lorsqu’il donnait des formations et qu’il « devait en payer le prix ». Il n’a pas rapporté ces formations à la CSST et à l’employeur, bien qu’il sache qu’il devait le faire. Pour lui, c’était le seul endroit où il pouvait se réaliser.

[76]        Les 18 et 19 mai 2010, le travailleur donne une formation à St-Jérôme. Les 25 et 26 mai 2010, il donne d’autres formations pour la Commission scolaire des Laurentides.

[77]        Le 29 mai 2010, le travailleur donne une formation pour la Fondation des maladies du cœur à Val-David.

[78]        Le 7 juin 2010, la docteure Schaefer prescrit la poursuite des traitements de physiothérapie, une canne et un lit orthopédique. Le paiement de la canne est autorisé par la CSST.

[79]        Le 8 juin 2010, madame Céline Bertrand, agente de la CSST, note que le travailleur manque de résistance et qu’il a développé une boiterie et que le médecin lui a prescrit une canne et un matelas orthopédique. Il ne se sentait pas capable d’effectuer du travail même léger. Même le déplacement en automobile est pénible, selon le travailleur.

[80]        Le 14 juin 2010, madame Bertrand note ce qui suit :

ASPECT FINANCIER

T m’informe qu’il occupait un 2e emploi pour une période de 6 semaines par année à la Commission scolaire de St-Hyancinthe. T donnait de la formation RCR. T a été contacté par E mais T ne sait pas s’il sera capable de refaire ce travail. [sic]

 

T n’a pas informé la CSST de ses revenus car il croyait être rétabli à l’automne. Il a néanmoins coché sur la RTR qu’il avait un 2e emploi.

 

[…]

 

 

[81]        En juin 2010, le travailleur conduit jusqu’à Rivière-du-Loup, en deux étapes, ponctuées par un arrêt à Québec où il couche chez sa mère. Il donne une formation pour la Fondation des maladies du cœur, les 18 et 19 juin 2010. Il fait le même arrêt à Québec lors du retour. À la même époque, il demande à son agente de se faire rembourser un matelas orthopédique parce qu’il a de la douleur au dos. La CSST refuse.

[82]        Le 22 juin 2010, la docteure Schaefer refuse d’autoriser une assignation temporaire comportant les mêmes tâches que lors de la première assignation. Elle spécifie que le travailleur a besoin de repos et de physiothérapie.

[83]        Questionné sur le fait que son besoin de repos était peut-être en lien avec le fait qu’il avait conduit pour aller et revenir de Rivière-du-Loup, le travailleur répond que ça n’avait sans doute pas aidé et que c’était à cause de cela qu’il devait prendre plus de morphine et qu’il avait besoin de repos.

[84]        Lors d’une rencontre avec mesdames Carole Parent et Sylvie Parent de la CSST, le 16 août 2010, le travailleur déclare avoir des difficultés avec la conduite automobile et, surtout, ne pas pouvoir conduire sur de longues distances. Il déclare aussi avoir été formateur, mais qu’il a cessé d’occuper cet emploi en raison des nombreux déplacements sur la route qui lui occasionnaient des engourdissements aux jambes. Pour cet emploi, il devait transporter des mannequins, une grosse boîte de livres de formation et un défibrillateur. Il discute de son projet de se réorienter pour devenir instructeur d’équitation et qu’il avait eu deux offres d’emplois pour enseigner à différents candidats.

[85]        Lors de son témoignage, le travailleur précise le poids des items qu’il doit transporter et manipuler lorsqu’il dispense des formations. Il a une poche avec attelle qui pèse 12 livres et 9 onces, quatre mannequins qui pèsent 8,8 livres chacun, une trousse orange dans laquelle il transporte deux défibrillateurs qui pèsent 9 livres chacun, un bac gris d’un poids de 7,9 livres dans lequel il met son triangulaire, Épipen, couvertures plastiques, etc. Il place, lui-même, son équipement dans son véhicule qui est une Mazda 3 dont les sièges peuvent être rabaissés.

 

[86]        La première journée de cours se fait avec les mannequins et la deuxième avec le reste du matériel. Ses élèves l’aident à sortir, transporter et remettre les équipements dans son véhicule. Il en transporte lui-même, tel qu’on peut le voir sur les séquences vidéo, parfois plus d’un item à la fois. Il doit également transporter son matériel en empruntant des escaliers pour se rendre ou sortir de sa salle de classe.

[87]        Durant ses cours, la première partie est consacrée à l’explication des lois. Le travailleur présente un DVD, en étant assis. Par la suite, il présente la technique de réanimation cardio-respiratoire (RCR) en présentant un autre DVD. Après, il enseigne la méthode d’Heimlich comprenant la poussée thoracique. Dans l’après-midi, il donne une deuxième formation en utilisant le mannequin sur une table pour montrer la façon de faire. Il est, à ce moment, en station debout pour une période de 20 minutes, mais il peut bouger. Le lendemain, c’est le volet médical. Il utilise un tableau, présente un DVD expliquant le lavage des mains qui dure 14 minutes, une formation sur les brûlures et sur les hémorragies qui dure quatre minutes. Il enseigne également la technique pour les bandages, cette partie du cours se faisant en position assise. Par la suite, il présente un DVD sur l’utilisation de la planche dorsale d’une durée de 10 minutes, ne manipulant pas la planche. Finalement, il enseigne la technique pour les fractures que les étudiants pratiquent. À la fin de la formation, il remet son matériel dans le véhicule avec l’aide des étudiants, retourne chez lui et rentre le matériel à son domicile. Le lavage du matériel est fait par le fils de sa conjointe qu’il paie.

[88]        Le 17 août 2010, la docteure Schaefer note l’absence d’amélioration de l’état du travailleur. Ce dernier est référé à un psychologue et à un programme de développement des capacités de travail. Elle refuse une autre demande d’assignation temporaire.

[89]        Le 18 août 2010, la CSST reçoit un document intitulé « Bilan des expériences » rédigé par le travailleur qui indique avoir travaillé comme formateur en secourisme, à titre de travailleur autonome de 2000 à 2008. Il mentionne également une expérience de bénévolat en équithérapie en 2009.

[90]        Le 5 octobre 2010, la docteure Schaefer revoit le travailleur. Elle pose le diagnostic d’entorse lombaire et note que le travailleur débute son processus de réadaptation le lendemain. Elle lui fixe un rendez-vous six semaines plus tard.

[91]        Le 6 octobre 2010, un rapport d’évaluation des capacités du travailleur est rédigé dans le cadre de son programme de retour au travail. Il est indiqué que le travailleur utilise une canne, qu’il porte à gauche ou à droite, selon le genou qui lui cause le plus d’inconfort. Il est noté que le travailleur se déplace avec sa canne à l’arrivée, mais ne l’utilise pas lors de l’évaluation de ses capacités. Le travailleur rapporte avoir fait une chute sur le genou droit autour du 26 août dernier. Comme objectif, le travailleur indique : « retrouver sa condition prélésionnelle ». On retrouve également les mentions suivantes :

Activités quotidiennes et domestiques

 

[…]

 

En ce qui a trait aux activités de la vie domestique, il relate qu’il peut faire différentes tâches comme la vaisselle et l’époussetage. Il participe à l’épicerie en poussant le chariot. Il affirme toutefois qu’il a de la difficulté à transporter les sacs et les boîtes. Il laisse cette partie de l’épicerie à sa conjointe.

 

Monsieur indique qu’il peut marcher pendant une période d’environ 10 minutes, après quoi la douleur commence à apparaître. Selon lui, il peut continuer de marcher jusqu’à environ 20 à 30 minutes où les irradiations au fessier gauche deviennent dérangeantes. Monsieur indique toujours marcher avec sa canne.

 

[…]

 

CONCLUSION

 

À la lumière des informations recueillies dans les différentes évaluations, nous sommes d’avis que monsieur Larivière n’a pas les capacités physiques et fonctionnelles requises pour tenter un retour au travail prélésionnel. […]

 

[notre soulignement]

 

 

[92]        Lors de son témoignage, le travailleur mentionne, qu’en octobre 2010, il a toujours les mêmes problèmes de dos similaires à ceux ressentis à l’été 2010. Il décrit sa condition comme étant « aléatoire » ou « en dents de scie ». Elle demeure ainsi en 2011 et même en 2012. Le travailleur mentionne qu’il peut être performant dans l’exécution de certaines tâches en gymnase, mais c’est à la fin de la journée que la douleur se manifeste.

[93]        Les 20 et 21 octobre 2010, le travailleur donne une formation à Ste-Adèle. Il facture quatre fois 92 km pour son déplacement, soit deux allers et retours, ses repas et ses heures de travail, par l’intermédiaire de LP Excellence, une entreprise immatriculée par sa conjointe. Il mentionne être accompagné d’un deuxième formateur pour cette formation. Questionné sur la raison pour laquelle il ne dort pas dans un hôtel de la région afin d’éviter un aller-retour, le travailleur répond que ce ne serait pas rentable de payer pour une chambre d’hôtel, même s’il utilise les sommes facturées pour son déplacement.

[94]        Le 28 octobre 2010, le travailleur donne une formation à Joliette.

[95]        Le 10 novembre 2010, l’employeur communique avec la CSST pour indiquer que le travailleur semble réticent à se présenter à un rendez-vous pour un examen médical demandé par l’employeur, pour le 12 novembre 2010. L’agente communique avec le travailleur qui lui fait part de son anxiété face à cette convocation, n’ayant pas de moyen de transport. Il mentionne qu’il connaît peu ce coin de la ville. Il assure toutefois qu’il sera présent, évoquant la possibilité de payer lui-même les coûts reliés à un déplacement en taxi. Lors de son témoignage, le travailleur mentionne qu’il n’a pas de souvenir de cette discussion.

[96]        Le 12 novembre 2010, le docteur Joseph Kornacki, chirurgien-orthopédiste, examine le travailleur à son bureau de Pointe-Claire, à la demande de l’employeur. Le docteur Kornacki indique que le travailleur a connu plusieurs épisodes d’entorses lombaires entre 1985 et 2000 et qu’il est connu pour un spondylolisthésis en L5-S1, avec un listhésis relativement important au moins de grade II, qui est considéré comme une condition dégénérative préexistante et totalement personnelle.

[97]        Le travailleur rapporte avoir de la difficulté à conduire sur de longues distances, comme le fait de se rendre de Joliette à Pointe-Claire. Il mentionne ne pas consommer de drogues et utiliser quelques médicaments, dont un analgésique, possiblement narcotique qu’il ne peut identifier.

[98]        L’examen physique est décrit comme difficile. Le docteur Kornacki rapporte que le travailleur marche très lentement, en utilisant une canne dans la main droite pour soutenir sa jambe gauche et reprendre son équilibre. Il peut marcher sans difficulté sur la pointe des pieds, mais quelques pas seulement. Le travailleur indique que son problème au genou gauche est pratiquement rentré dans l’ordre et que c’est sa condition lombaire qui est la plus incapacitante. Il rapporte des douleurs lombaires avec irradiation à gauche et lui décrit son état comme variable et irritable, durant l’examen.

[99]        Le docteur Kornacki rapporte également que le travailleur demeure assis en position statique pendant 45 minutes sans se déplacer ou adopter de position antalgique au moment de l’examen. Les amplitudes articulaires sont difficiles à quantifier. La flexion est évaluée à 75°, mais, en se redressant, il saute disant que cela est très douloureux. L’extension, les flexions latérales et les rotations sont impossibles à quantifier selon le médecin.

 

 

[100]     Quant à la consolidation de la lésion professionnelle, le docteur Kornacki mentionne :

Le patient n’est pas encore consolidé, pour plusieurs raisons :

 

a)  Le patient démontre beaucoup d’irritation de la colonne lombo sacrée,

b)  Il n’a pas été adéquatement investigué afin de voir s’il y a eu détérioration, depuis les dernières résonances magnétiques qui ont eu lieu en 2000 selon ses dires. Il peut spécifier que cette ancienne investigation a eu lieu à la Clinique Laennec.

 

Une nouvelle imagerie par résonance magnétique doit être effectuée, afin d’évaluer la différence entre ses anciennes investigations et les présentes, avant de décider une consolidation.

 

 

[101]     Durant son témoignage, le travailleur décrit sa douleur comme étant variable à cette époque, mais, depuis un certain temps, elle augmente en intensité.

[102]     Le 15 novembre 2010, le travailleur donne une formation à Joliette le 30 novembre 2010 à la Commission scolaire des Laurentides, le 17 décembre 2010 à la Commission scolaire de St-Hyacinthe, le 29 décembre 2010 à Joliette et le 5 janvier 2011 à l’organisme Cœur de l’amitié à Joliette.

[103]     Le 25 novembre 2010, la docteure Schaefer, après avoir pris connaissance du rapport du docteur Kornacki, s’est dit d’accord pour cesser la physiothérapie et l’ergothérapie et pour obtenir un nouvel examen d’imagerie par résonance magnétique (IRM), qu’elle prescrit.

[104]     Le 6 janvier 2011, le travailleur passe une nouvelle résonance magnétique. Après en avoir pris connaissance, le docteur Kornacki rapporte ce qui suit dans un rapport complémentaire du 31 janvier 2011:

Lors de son examen physique, le patient ne collaborait pas bien à l’examen objectif. Il a réussi une flexion à 75o vers l’antérieur, mais il est devenu trop douloureux et il n’a pas pu continuer l’examen objectif.

 

Un état d’obésité morbide a également été trouvé, comme une autre condition préexistante, chronique et personnelle.

 

Ma conclusion était que le patient était porteur d'une entorse lombaire, qu’il a certainement de lourds antécédents et je voulais une nouvelle imagerie par résonance magnétique, ainsi que voir les anciennes investigations qu’il a connues lors de ses nombreux dossiers antérieurs, à la CSST et le dossier à la SAAQ.

 

La nouvelle imagerie par résonance magnétique, réalisée le 6 janvier 2011 et interprétée par le Dr Anna Sinsky, radiologiste qui a conclu que le patient est porteur d’une spondylolyse bilatérale, sans évidence de listhésis. Des discopathies dégénératives en L2-L3, L4-L5 et L5-S1.

 

[…]

 

Les IRM ne démontrent aucune évidence d’une nouvelle lésion, soit une hernie discale soit une sténose, et le spondylolyse qui existait antérieurement est toujours là, comme prévu.

 

En conséquence, je dois conclure que le patient est atteint d'un problème lombaire chronique et de longue date.

 

Il a reçu, maintenant, près d’un an de traitements conservateurs échoués et inefficaces.

 

Ma conclusion est donc qu’il y a certainement consolidation, à la lumière de ces constats sur son imagerie par résonance magnétique.

 

Malheureusement, encore une fois, je n’ai pas d’information sur ses séquelles permanentes antérieures, mais on lui a certainement accordé 2%, pour une entorse lombaire chronique.

 

Il n’y a pas eu d’aggravation de cette atteinte, ni des limitations fonctionnelles.

 

 

[105]     Après avoir pris connaissance du résultat de l’IRM, le docteur Kornacki produit un autre rapport complémentaire en date du 31 janvier 2011. Il indique que, compte tenu de l’information dont il dispose maintenant, il consolide la lésion professionnelle du travailleur, en date du 12 novembre 2010, les traitements n’étant plus nécessaires, considérant que le travailleur a déjà bénéficié de près d’un an de traitements conservateurs qui se sont avérés inefficaces, que l’IRM ne démontre aucune nouvelle lésion, si ce n’est la condition de dégénérescence discale prélésionnelle qui est toujours présente. Il conclut que le travailleur est atteint d’un problème lombaire chronique de longue date.

[106]     Sans avoir pris connaissance des séquelles antérieures qui ont été reconnues au travailleur, le docteur Kornacki est d’avis qu’on a dû lui reconnaître une atteinte permanente de 2 % qui est existante depuis longtemps et qu’il n’y a pas eu augmentation de cette atteinte, ni des limitations fonctionnelles de classe 1 qui lui avaient déjà été reconnues avec une limite de poids de 15 à 20/25 kilogrammes. Il confirme le tout, le 7 février 2011, après avoir pris connaissance des séquelles antérieures reconnues au travailleur.

 

[107]     Le 2 février 2011, le travailleur est de nouveau évalué dans le cadre de son programme de retour en emploi. Dans le rapport d’évolution produit, il rapporte des difficultés à maintenir une activité de conduite de longue durée de plus de une heure quinze. Il rapporte des difficultés à prendre place dans son automobile et lors d’activités nécessitant le maintien d’une flexion antérieure du rachis. À cette même date, l’ergothérapeute note une incohérence entre les résultats obtenus lors des questionnaires et les perceptions du travailleur. Elle mentionne que le travailleur rapporte une amélioration de 85 % de ses capacités fonctionnelles lors de la rencontre avec l’ergothérapeute, alors qu’il présente des résultats inférieurs aux résultats de la dernière réévaluation pour ce qui est de la perception de la douleur. Elle rapporte aussi les attentes du travailleur vis-à-vis une réorientation et une absence de possibilité de retour au travail d’éducateur.

[108]     Le travailleur mentionne que, durant ce programme, il lui arrivait de « barrer ». On devait le descendre des appareils et on le manipulait pour le « débarrer ». Il précise qu’il était en mesure d’exécuter certains exercices, mais, à la fin d’une journée, il avait beaucoup de douleurs et cela pouvait durer trois jours. Il se dit toutefois satisfait de l’utilité de ce programme. Il s’est muni d’un ballon d’exercice à la maison même s’il demeure, selon lui, incapable de reprendre son travail chez l’employeur.

[109]     En mars 2011, le travailleur dispense d’autres formations, soit les 1er et 2 mars 2011 à Ste-Adèle et une autre, le 8 mars 2011.

[110]     Le 4 mars 2011, il fait l’objet d’une évaluation finale en ergothérapie. On rapporte une diminution des épisodes de faiblesse du membre inférieur gauche et que le travailleur est fonctionnel dans ses activités quotidiennes et ses activités de vie domestique. Il peut conduire pendant 45 minutes sans douleur, mais au maximum pendant une heure quinze. Sa perception de ses capacités est encore diminuée et sa kinésiophobie est en hausse. Il peut soulever des charges de 45 livres du sol à la taille et une charge de 35 livres de la taille à la tête pendant 20 fois. Son niveau est en deçà des exigences. Sa flexion antérieure se rend à 7 cm du sol et son extension est à 15º. Ses rotations droite et gauche sont normales à 30º. Les flexions latérales demeurent inchangées, mais moins douloureuses. Il peut faire un squat complet sans douleur et remonte sans appui. Son équilibre unipodal est encore difficile à gauche et négatif à droite. Il peut travailler en position penchée durant 3 minutes 16 secondes, en position statique (vaisselle)  5 minutes 13 secondes. Il marche un mille en 18 minutes 51 secondes avec une fréquence cardiaque de 130 battements/minute, ce qui est considéré comme un effort valable. Pour ce qui est de l’atteinte des objectifs, on considère qu’il tolère une position debout trois heures, mais ne peut marcher pendant une heure. Il tolère une marche de 25 minutes consécutives avec une vitesse de 3,0 mi/h. Il peut monter et descendre 20 marches à deux ou trois reprises pendant les séances, toutefois, il présente toujours une difficulté à effectuer ce mouvement avec vitesse. Il tolère le transport de charges de 50 livres. Quant à l’examen objectif, on retient un « straight leg raising » positif à 70º à droite et à 55º à gauche. Cela tire en lombaire seulement. On note comme obstacle à la réinsertion au travail que le travailleur ne se voit pas retourner à son emploi prélésionnel et qu’il est très motivé à débuter son centre de thérapeute équestre.

[111]     Durant son témoignage, le travailleur mentionne que sa condition s’est très améliorée à cette période.

[112]     Le 8 mars 2011, le travailleur discute avec son agente de la CSST et se questionne sur son avenir professionnel. Il se dit déçu de la décision de l’employeur d’avoir abandonné le service d’équitation thérapeutique. Il se demande ce qu’il pourra faire comme emploi s’il ne peut reprendre l’emploi prélésionnel.

[113]     Le 5 avril 2011, la docteure Schaefer rédige un rapport final. Elle consolide la lésion professionnelle du travailleur en date du 4 avril 2011 avec une atteinte permanente à l’intégrité physique et existence de limitations fonctionnelles et elle précise que la lésion professionnelle a aggravé des limitations fonctionnelles antérieures. Elle indique également qu’elle recommande le travailleur au docteur Dufresne qui procédera à l’évaluation du travailleur et à la production du rapport d’évaluation médicale.

[114]     Le 12 avril 2011, la docteure Schaefer rédige un rapport complémentaire. Elle indique que l’entorse lombaire avec sciatalgie est consolidée en date du 4 avril 2011. Elle demande une réorientation et une évaluation de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles qui sera faite par le docteur Dufresne.

[115]     Le dossier est dirigé au BEM où le travailleur est examiné par le docteur Gilles Maurais qui produit son rapport en date du 21 avril 2011. Ce dernier retient un diagnostic d’entorse lombaire et fixe la date de consolidation au 4 avril 2011. Au chapitre des antécédents, le docteur Maurais rapporte ce qui suit :

Monsieur a été victime d’un accident du travail le 15 septembre 1991 pour lequel il a présenté une atteinte permanente de 3% pour une instabilité lombaire et les limitations fonctionnelles suivantes :

 

·         Éviter de soulever des charges lourdes;

·         Éviter les postures contraignantes;

·         Éviter les mouvements brusques;

 

 

 

 

[116]     Le docteur Maurais retient, qu’à la suite de sa chute dans l’escalier, le travailleur n’a pas repris le travail. Il présente toujours des douleurs lombaires basses résiduelles pour lesquelles il aurait cessé la médication. Son examen objectif de la colonne dorsolombaire révèle ce qui suit :

COLONNE DORSO-LOMBAIRE

 

 

Normale

Retenu

Flexion antérieure

90o

90o

Extension

30o

  0o (douleur en fin d’excursion)

Flexion latérale droite

30o

10o (douleur en fin d’excursion)

Flexion latérale gauche

30o

10o (douleur en fin d’excursion)

Rotation droite

30o

30o (douleur en fin d’excursion)

Rotation gauche

30o

30o (douleur en fin d’excursion)

 

Les signes de mise en tension sciatique sont négatifs. Les manœuvres de Lasègue, tripode et Bowstring sont négatives. La manœuvre de « straight leg raising » reproduit des lombalgies à 40o bilatéralement.

 

[…]

 

Existence ou pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique :

 

Le 23 janvier 2010, monsieur a présenté une entorse lombaire. Il présente un syndrome douloureux résiduel et des phénomènes d’ankylose. Il présente des séquelles d’une entorse lombaire.

 

 

 

Existence ou évaluation des limitations fonctionnelles

 

Le 23 janvier 2010, monsieur a présenté une entorse lombaire. Il présente un syndrome douloureux résiduel et des phénomènes d’ankylose au niveau du rachis lombo-sacré. Il présente des limitations fonctionnelles de classe 2 de l’IRSST avec une limite de charge à 15 kg.

 

 

[117]     Les limitations fonctionnelles sont décrites ainsi :

Colonne dorso-lombo-sacrée :

 

Classe 2 : restrictions modérées :

 

Éviter les activités qui impliquent de :

 

·         soulever, porter, pousser, tirer de façon répétitive ou fréquente des charges de plus de 15 kg;

·         effectuer des mouvements répétitifs ou fréquents de flexion, d’extension ou de torsion de la colonne lombaire même de faible amplitude;

·         monter fréquemment plusieurs escaliers;

·         marcher en terrain accidenté ou glissant.

[118]     À la suite de l’avis émis par le docteur Maurais, une décision est rendue par la CSST le 28 avril 2011, entérinant les conclusions de cet avis. Cette décision sera confirmée par la CSST en révision administrative le 2 septembre 2011, à la suite d’une demande de révision de l’employeur. L’employeur conteste devant la Commission des lésions professionnelles cette dernière décision.

[119]     Lors de son témoignage, le travailleur mentionne que ses principales douleurs sont ressenties lors de l’exécution des mouvements de rotations gauche et droite. Questionné sur le fait que le docteur Maurais obtient une amplitude de rotation normale au niveau lombaire, il n’a pas d’explications.

[120]     Le tribunal reproduit un tableau des ankyloses réalisé par différents examinateurs jusqu’à l’évaluation du docteur Maurais.

 

Physiothérapie

Physiothérapie

Dr Kornacki

Physiothérapie

Dr Maurais

Dates

12.09.2010

6.10.2010

12.11.2010

4.03.2011

4.04.2011

Flexion

AA complètes avec dlr

14 cm doigt-sol

75°

7 cm doigts-sol

90°

Extension

 

12°

Difficile à quantifier

15°

Rotation droite

 

25°

Difficile à quantifier

30°

30°

Rotation gauche

 

15°

Difficile à quantifier

30°

30°

Flexion latérale droite

 

9 cm au-dessus genou

Difficile à quantifier

57 cm doigts-sol

10°

Flexion latérale gauche

 

10 cm au-dessus genou

Difficile à quantifier

58 cm doigts-sol

10°

 

 

[121]     À la suite de la décision rendue par la CSST, le 28 avril 2011, le travailleur est pris en charge par le service de réadaptation de la CSST.

[122]     De façon concomitante, le travailleur continue à dispenser des formations en secourisme, soit les 1er, 6 et 10 mai 2011, à Joliette et le 11 mai 2011 à St-Hyacinthe.

[123]     Une visite de poste est organisée à deux résidences chez l’employeur le 9 mai 2011. Selon les notes évolutives, lors de cette visite à la première résidence, le travailleur se présente avec une canne. Il fait le trajet en voiture lors de la visite de la seconde résidence et reste ensuite sur le seuil de la porte. Le travailleur explique dans son témoignage qu’il n’est pas rentré à cause de difficultés avec une collègue qui l’avait harcelé et que, de toute façon, dès qu’il est entré, la décision était prise et c’était terminé.

[124]     Quant au harcèlement dont il se dit victime, le travailleur fait référence au fait que la collègue, qui est en charge de la résidence, lui aurait mentionné qu’elle essaierait de le faire congédier se référant à ses limitations fonctionnelles. Il mentionne, qu’après un retour de vacances, il a été transféré à la résidence L’Orchidée, par l’ancien directeur, monsieur Morin, à cause de ce problème de harcèlement puisqu’au début, son poste était à la résidence Le Sentier.

[125]     Dans son rapport du 9 mai 2011, Claude Bougie, ergothérapeute, écrit :

Lors de la rencontre, M. Larivière se déplace en utilisant une canne simple. Monsieur a mentionné que n’eut été une entente verbale avec un supérieur il aurait quitté cet emploi car cela lui était difficile compte tenu de ses limitations fonctionnelles antérieures.

 

 

[126]     L’ergothérapeute Bougie conclut que le travail à la résidence L’Orchidée ne respecte pas les limitations fonctionnelles émises. À la résidence Le Sentier, les limitations fonctionnelles pourraient être respectées, moyennant un réaménagement des tâches relatives au déneigement et à l’entretien.

[127]     Le travailleur n’est pas d’accord avec l’évaluation de l’ergothérapeute Bougie qui considère le travail d’éducateur comme un travail de « gardiennage ». Le travailleur mentionne que le travail d’éducateur ne permet pas de périodes de repos, qu’il y a toujours des tâches à faire et le rythme est intense. Il reconnaît que cela fait partie des raisons pour lesquelles il voulait se trouver un autre emploi. Quant à sa canne, il l’a apportée parce qu’il savait qu’il allait devoir se déplacer sur le terrain qui est accidenté. Le travailleur s’est dit déçu de cette visite, il aurait réalisé là, qu’il n’y aura pas de projet d’équithérapie, l’ancien directeur étant décédé et la nouvelle direction n’ayant pas l’intention de relancer ce programme.

[128]     Le 24 mai 2011, madame Marie Rioux, responsable des finances, informe la CSST de l’ouverture de l’employeur à réintégrer le travailleur à la résidence Le Sentier, moyennant le retrait de la tâche du pelletage et prévoyant la mise en place d’une alternance des tâches d’entretien ménager.

[129]     Le lendemain, soit le 25 mai 2011, la conseillère en réadaptation du travailleur l’avise qu’elle considère que l’exécution de ses tâches à la résidence Le Sentier respecte toutes ses limitations fonctionnelles, dans la mesure où il devra alterner les tâches d’entretien avec d’autres tâches plus légères. Elle note qu’elle n’a pu terminer sa discussion, le travailleur lui mentionnant qu’il a compris, il la remercie et raccroche.

[130]     Le 26 mai 2011, la CSST rend une décision confirmant la capacité du travailleur d’exercer son emploi, après un réaménagement de ses tâches d’entretien ménager qui devront être entrecoupées d’autres tâches plus légères et le retrait de la tâche de pelletage.

[131]     Le travailleur considère qu’il n’a pas la capacité de reprendre son ancien emploi ou l’emploi réaménagé que lui propose l’employeur. Il considère que cet emploi est incompatible avec les limitations fonctionnelles de classe 2 qui lui ont été reconnues puisque ce travail, même à la résidence Le Sentier, implique d’emprunter des escaliers à plus de 20 reprises durant un quart de travail. Il souligne que la clientèle s’est alourdie et présente des risques d’agression. Il ne pourrait intervenir adéquatement s’il était agressé. Finalement, il considère que les nombreuses tâches à faire ne lui permettent pas d’exécuter, à son rythme, les tâches d’entretien ménager, telles que proposé par l’employeur. Il conteste la décision rendue le 26 mai 2011 et cette décision sera maintenue en révision administrative, le 22 septembre 2011. Le travailleur la conteste également.

L’accident du 2 juin 2011

[132]     À la suite de la décision rendue par la CSST le 26 mai 2011, relativement à la capacité du travailleur de refaire l’emploi avec les réaménagements acceptés par l’employeur, un retour au travail est organisé.

[133]     Le 30 mai 2011, le travailleur rencontre l’employeur avec son représentant syndical en vue de préparer son retour au travail. Le travailleur constate que la clientèle a changé depuis son accident et qu’elle s’est alourdie.

[134]     Le 30 mai 2011, le travailleur dispense une formation pour la Commission scolaire des Laurentides, selon la preuve documentaire au dossier.

[135]     Les 31 mai et 1er juin 2011, il est en orientation à la résidence Le Sentier. Le travailleur a peu de tâches manuelles à exécuter et il est jumelé à un autre travailleur. Son collègue de travail aurait calculé qu’il a eu à emprunter les escaliers de la résidence 21 fois au cours du quart de travail qui est qualifié de tranquille, le soir en question.

[136]     Le 2 juin 2011, à 16 h 11, Diane Beaupied, chef d’équipe de la CSST, rapporte une conversation téléphonique avec le travailleur. Ce dernier lui fait part de son insatisfaction à la suite de la décision de capacité rendue. Il prétend qu’on n’a pas considéré la disponibilité d’un tel emploi et qu’il doit monter et descendre plusieurs escaliers. Le travailleur est informé de son droit de contester la décision rendue.

[137]     Le 2 juin 2011, à 17 h 00, le travailleur débute son quart de travail. Après quelques minutes, il déclare s’être blessé en faisant une chute. Dans son témoignage, il explique que la chute est survenue alors qu’il lavait une table avec sa main droite, en position de flexion vers l’avant, au-dessus de la table. C’est en appuyant sa main gauche sur une chaise pour se soutenir, alors qu’il s’étire pour laver l’extrémité de la table, que la chaise bascule et cause sa chute violente sur le plancher, tel qu’il le rapporte dans l’avis de l’employeur et demande de remboursement. Lors de son témoignage, le travailleur mentionne s’être blessé à la région lombaire, à la région cervicale, à la hanche gauche et au poignet droit. Il se serait fait une coupure au poignet droit en heurtant probablement le calorifère sur le mur.

[138]     Lorsqu’il décrit le fait accidentel à la CSST, le 11 juillet 2011, il indique qu’une résidente était présente dans la pièce, mais elle lui faisait dos. Il ne mentionne pas qu’un autre éducateur travaillait avec lui à ce moment. Questionné sur ce qu’a pu voir cet autre éducateur, il répond qu’il n’a peut-être pas vu l’accident, mais qu’il a peut-être vu qu’il s’était coupé.

[139]     Le travailleur rapporte s’être frappé la tête sur l’îlot et avoir fait un mouvement de torsion. Il mentionne qu’il croit s’être aussi frappé la hanche sur quelque chose qu’il ne peut identifier et, lorsqu’il a percuté le sol, il aurait ressenti une douleur importante à la hanche. Il mentionne être tombé sur le côté gauche au sol. Il rapporte également s’être coupé à la base du pouce à l’intérieur de sa main droite, mais précise, qu’à l’hôpital, ils n’ont rien fait pour ça. Il pense qu’il a pu frapper le calorifère avec sa main droite, ce qui aurait pu causer sa coupure.

[140]     Le travailleur mentionne qu’il quitte l’établissement de l’employeur en pleurant. Il croise l’ancien directeur de l’établissement. Il se rend à l’hôpital en conduisant son propre véhicule. Le trajet prend 45 minutes environ, il roule lentement.

[141]     Selon les notes de triage, il arrive à l’hôpital à 18 h 29. L’infirmière au triage et le médecin notent une douleur à la hanche gauche, une douleur lombaire (connue) et une douleur cervicale. Des radiographies sont demandées pour ces trois sièges de lésion qui ne démontrent aucune fracture, mais de l’ostéophytose lombaire avec des signes compatibles avec un spondylolyse en L5. Aucune mention n’est faite d’une blessure à la main droite. Les notes font référence à une chute de sa hauteur, du fait qu’il n’était pas en mesure de déplier sa jambe gauche, qu’il pleure sur la civière. Lorsqu'il quitte, après avoir reçu sa sédation, il circule seul avec sa canne et la démarche est bonne.

[142]     Dans son témoignage, le travailleur indique qu’il ne pense pas avoir montré sa coupure à la main. Après qu’il ait obtenu une prescription de Supeudol (narcotique), il quitte l’hôpital vers 22 h 05. Le travailleur ne pense pas avoir pris du Supeudol avant son accident, mais il précise qu’il en a toujours dans ses poches.

[143]     Le 2 juin 2011, le docteur Marc-André Amyot diagnostique des contusions, sans plus de précisions, et autorise un arrêt de travail pour une durée de deux semaines. Le travailleur indique, dans son témoignage, qu’il n’allait pas bien après son accident, qu’il avait mal au dos et se « gelait » pour enlever la douleur.

[144]     Le 4 juin 2011, le travailleur donne une formation à Val-David pour la Commission Scolaire des Laurentides. Il conduit, pour aller et revenir de Val-David, sur une distance de 92 km par trajet.

[145]     Le 6 juin 2011, il complète sa réclamation du travailleur. Il ne mentionne pas, cette fois, qu’il occupe un deuxième emploi.

[146]     Les 7 et 8 juin 2011, le travailleur donne d’autres formations pour la Commission Scolaire des Laurentides. Il facture un déplacement de 361 km pour ces deux jours.

[147]     Le 13 juin 2011, la docteure Schaefer diagnostique une contusion à la suite d’une chute et maintient l’arrêt de travail. Ses notes indiquent que le travailleur rapporte une douleur au genou et à la jambe gauches, qu’il présente une obésité importante et qu’il marche avec une canne. Il n’y a pas de mention de blessure au pouce ou au poignet droit. Du Supeudol est prescrit.

[148]     Le 5 juillet 2011, la docteure Schaefer diagnostique une entorse lombaire, une entorse cervicale, une sciatalgie gauche et des contusions.

 

[149]     Le 12 juillet 2011, le travailleur a une conversation téléphonique avec madame Laurie Boudreau de la CSST. Il lui mentionne que son médecin le considère invalide et qu’il veut faire des démarches auprès de la Régie des rentes du Québec. Il lui parle aussi de son projet d’équithérapie, que c’est la raison pour laquelle il a continué à travailler chez l’employeur, parce que l’ancien directeur lui avait laissé entendre qu’il pourrait offrir un programme. Il n’a pu terminer sa formation par manque de finances et à cause de ses accidents. Il aurait aimé suivre un programme d’attelage où il n’aurait pas à monter des chevaux et où il y a des bénévoles qui les préparent. Le travailleur ajoute ce qui suit :

ASPECT PSYCHOSOCIAL :

 

T explique qu’il a actuellement beaucoup de douleur à la jambe et au genou l’empêchant de marcher. Il ne fait aucune activité durant la journée, il se voit comme une loque humaine. Il prend des bains pour aider sa douleur.

 

T a fait quelques exercices à la maison pour l’aider dans sa douleur.

 

 

[150]     Le 30 août 2011, la docteure Schaefer diagnostique une entorse cervicale, une entorse lombaire avec sciatalgie gauche et une entorse au genou gauche. Elle poursuit l’arrêt de travail et prescrit de la physiothérapie.

[151]     Le 27 septembre 2011, elle maintient le même diagnostic et la même recommandation de traitements de physiothérapie.

[152]     Un rapport de physiothérapie, en date du 18 octobre 2011, fait état d’une augmentation de sa douleur, que le travailleur se déplace avec une posture en bloc et que le médecin a coupé le Supeudol.

[153]     Le 24 octobre 2011, le travailleur devait être vu en expertise par le docteur Tohmé. Cet examen est annulé parce que le travailleur n’avait pas confiance au médecin et qu’il voulait l’enregistrer.

[154]     Les diagnostics d’entorse lombaire, de sciatalgie gauche et d’entorse cervicale continuent d’être posés, dans les mois qui suivent, par la docteure Schaefer. Une condition « en dents de scie » est décrite.

[155]     Le 1er décembre 2011, le travailleur transmet son Curriculum vitae (CV) à la Maison Clémentine, une maison de répit. Dans son CV, on retrouve la liste de ses employeurs précédents, mais pas le nom de l’employeur duquel il est au service présentement. Il déclare posséder une bonne forme physique, ce qui est un mensonge, reconnaît-il lors de son témoignage et il mentionne avoir expédié plusieurs CV à cette époque. Il mentionne qu’il ne considérait pas qu’il ne fût approprié d’indiquer l’employeur comme référence dans ses emplois antérieurs, « il voulait se sortir de tout ça ». Il ne parle pas à son médecin qu’il a postulé sur cet emploi, elle ne le saura qu’après qu’il avait été remercié.

[156]     Le 6 décembre 2011, la docteure Schaefer rapporte dans une information médicale complémentaire qu’il est toujours très souffrant.

[157]     Le 12 décembre 2011, le travailleur est examiné par le docteur Paul Moïse, à la demande de la CSST. Le travailleur ne rapporte aucune douleur à la région cervicale. Il rapporte avoir des douleurs lombaires basses, de la sciatalgie lombo fessière gauche. Il fait état de douleur en barre qui le réveille la nuit et qu’il évalue à une intensité de trois à quatre sur 10. Il se plaint de difficulté à marcher plus de 15 à 20 minutes et de difficulté à garder une position assise prolongée. Ses activités quotidiennes et domestiques sont restreintes et son fils doit l’aider. Il dit être inconfortable après son trajet pour se rendre à l’expertise. Le docteur Moïse rapporte trois signes de Waddell positifs. Sur le formulaire d’évaluation des problèmes à la colonne dorsolombaire et aux membres inférieurs, le travailleur indique notamment qu’il lui est difficile de marcher, de conduire l’automobile, de faire la cuisine et la vaisselle. Il lui est très difficile de se pencher, de monter ou descendre des escaliers. Il lui est impossible de faire l’épicerie, le ménage et du bénévolat.

[158]     Son examen de la colonne dorsolombaire est limité dans tous les axes, sauf la flexion antérieure qui est à la limite de la normale avec une légère flexion des genoux. Les mouvements de la colonne cervicale sont normaux en flexion antérieure, mais limités de 10o en extension, en déviations droite et gauche, en rotations droite et gauche. L’examen des épaules est normal, il n’y a pas d’atrophie des membres supérieurs. Les mouvements des hanches sont complets et non douloureux. Le docteur Moïse conclut que l’entorse cervicale est consolidée avec un déficit anatomophysiologique de 2 % pour entorse consolidée avec séquelles. Il est d’avis que l’entorse lombaire n'est pas consolidée.

[159]     Les 14 et 15 février 2012, le travailleur donne des cours de formation.

[160]     Les 10, 17 et 18 février 2012, le travailleur travaille à la Maison Clémentine. Selon son témoignage, il n’aurait fait que de la formation. Par ailleurs, des personnes interrogées par des enquêteurs ont rapporté qu’il a effectué certaines tâches de cuisine et de ménage. Le travailleur, lui-même, a reconnu en fin de témoignage avoir fait quelques tâches.

[161]     La Maison Clémentine met fin à l’emploi du travailleur après avoir contacté l’employeur pour des références, qui l’informe de la situation du travailleur qui est en accident du travail. Le travailleur mentionne qu’il y aurait mis fin par lui-même, de toute façon, puisque les exigences de cet emploi n’étaient pas compatibles avec sa condition.

[162]     Le 21 février 2012, la physiothérapeute a une conversation téléphonique avec l’agente de la CSST. Elle explique que le travailleur ressent beaucoup de douleur, s’il demeure en position statique prolongée ou lors d’efforts soutenus. Elle relate que, dans la semaine du 5 février 2012, le travailleur rapportait une douleur plus importante que la normale, à la suite d’un épisode de blocage. Elle mentionne que le travailleur se déplace lentement, un pas à la fois, en utilisant toujours sa canne, qu’elle estime nécessaire en raison de son instabilité.

[163]     Ce même 21 février 2012, le travailleur mentionne à son agente CSST ne pas aller très bien et se remettre d’un épisode difficile de douleur. Il n’aurait pas été en mesure de marcher durant trois jours, mais il n’est pas en mesure d’identifier le site de la douleur. Il a grandement diminué ses activités à la maison. Il doit toujours utiliser sa canne et il dit ne rien faire de ses journées. Dans la même période, le travailleur dispense des cours de formation en secourisme, les 16 février, 2 mars, 28 mai et 29 et 30 juin 2012, où il donne une formation à Rivière-du-Loup;

[164]     Dans le rapport de filature et la preuve vidéo qui l’accompagne, on voit le travailleur marcher avec une canne et difficulté lorsqu’il quitte la clinique de physiothérapie, le 30 mars 2012. Cependant, il marche sans canne pour aller à la pharmacie, quelques minutes plus tard.

[165]     Le 3 avril 2012, la physiothérapeute note que, subjectivement, le travailleur présente des difficultés à la marche avec douleur lombaire et à la fesse gauche. Elle indique que, si le travailleur fait beaucoup de voiture, ses douleurs augmentent et que les escaliers sont difficiles. Objectivement, elle rapporte des déplacements difficiles. Les douleurs sont qualifiées d’importantes.

[166]     Le 13 avril 2012, la preuve vidéo montre le travailleur qui se déplace avec sa canne et avec difficulté lorsqu’il se rend à la clinique de physiothérapie. Il est cependant capable de marcher, sans canne, pour aller faire des emplettes à la tabagie, cette même journée. On peut également voir le travailleur se déplacer sans canne, lorsqu’il se rend à l’épicerie le 14 avril 2012.

[167]     Le 24 avril 2012, les déplacements sont toujours très difficiles, selon la physiothérapeute.

[168]     Le 11 mai 2012, le travailleur mentionne à son agente que, la veille, il a pensé se rendre aux urgences, à la suite d’un traitement en piscine qui se serait mal déroulé. Il dit que sa condition est « en dents de scie ». Sur recommandation de son neurochirurgien, il utilise toujours sa canne pour se déplacer et vu qu’il s’y appuie fort, il ressent des engourdissements à la main droite. Il peut marcher 10 minutes sans canne et une heure avec sa canne en prenant des pauses. Sa condition serait améliorée de 50 %. Il indique que son médecin envisage une réorientation. Il aurait diminué ses activités domestiques pour se concentrer sur des activités extérieures comme la marche et il reçoit de l’aide de son frère qui est éducateur spécialisé.

[169]     Le 15 mai 2012, la physiothérapeute rapporte que le travailleur marche avec une canne, qu’il peut effectuer une flexion antérieure du tronc ++.

[170]     Les 28 et 29 mai 2012, le travailleur donne une formation à Ste-Adèle. La preuve vidéo le montre qu’il se déplace sans canne et sans difficulté notable.

[171]     Le 31 mai 2012, la docteure Schaefer suggère une réorientation, à prévoir prochainement.

[172]     Le 31 mai 2012, le dossier indique que le travailleur fait l’objet d’une suspension de ses indemnités de remplacement du revenu, en vertu des dispositions de l’article 142 de la loi. Il est également l’objet d’une saisie du Ministère du Revenu (direction des pensions alimentaires).

[173]     Le 7 juin 2012, une conversation avec son agente révèle que le travailleur s’absente de la physiothérapie. Il indique que c’est parce qu’il aurait eu un accident vasculaire cérébral ou une crise d’angine, la semaine précédente, qu’il a été hospitalisé, mais qu’il se présentera à ses traitements le lendemain, soit le 8 juin 2012. Le travailleur mentionne qu’il a un litige avec ses ex-propriétaires, qu’il doit passer en cour le 31 août 2012, que, depuis le mois d’avril 2012, il a dû déménager trois fois. Il donne son adresse actuelle et explique qu’à cause de ses problèmes personnels, il n’avait pas la tête à aviser la CSST de son changement d’adresse.

[174]     Le 12 juin 2012, on indique au dossier que le travailleur s’absente sans justification de ses traitements de physiothérapie. Le travailleur se justifie en mentionnant qu’il n’a plus d’argent pour mettre de l’essence. L’agente l’invite à prendre le transport en commun. S’il ne se présente pas à ses traitements, ses indemnités seront suspendues.

[175]     Le 6 juillet 2012, le docteur Morel note qu’il doit discuter avec la docteure Schaefer de la condition du travailleur et de sa capacité physique, possiblement meilleure qu’elle n’y paraît.

[176]     Le 16 juillet 2012, on demande au travailleur de transmettre des preuves de revenus, copie de chèques, relevés d’emploi et confirmation d’employeurs pour ses prestations de services. Le travailleur dit comprendre la demande. Le rapport d’enquête et de filature est remis à la CSST et fait état des activités de formation du travailleur.

[177]     Le 17 juillet 2012, la CSST rend une décision et elle refuse de reconnaitre que le nouveau diagnostic d’entorse au genou gauche est en relation avec la lésion professionnelle.

[178]     Le 19 juillet 2012, la docteure Schaefer est rencontrée par mesdames Christine De L’Étoile-Martin et Diane Beaupied de la CSST. Les résultats de l’enquête de la CSST lui sont communiqués. Après avoir pris connaissance du résultat de cette enquête, la docteure Schaefer rédige un rapport final. Elle consolide la lésion en date du 19 juillet 2012 avec atteinte permanente et limitations fonctionnelles, estimant qu’un plateau thérapeutique est atteint et elle dirige le travailleur vers un autre médecin pour la détermination de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.

[179]     Le 19 juillet 2012, la CSST demande une expertise en orthopédie au docteur Mario Giroux, chirurgien orthopédiste, pour déterminer s’il y a existence d’une atteinte permanente et de limitations fonctionnelles.

[180]     Le 25 juillet 2012, monsieur Sylvain Boulanger, enquêteur, rédige son rapport d’enquête et le transmet à l’agente au dossier.

[181]     Le 31 août 2012, le travailleur subit un accident d’automobile, alors qu’il est piéton. On suspecte un traumatisme crânien cérébral (TCC), mais la tomodensitométrie s’avère négative. Le travailleur se plaint de douleurs cervicales, lombaires et à la cheville gauche. Les notes des ambulanciers réfèrent à des abrasions légères et à de la douleur au genou droit. Ses douleurs seraient améliorées par le Supeudol.

[182]     On retient finalement un diagnostic de contusion. Le diagnostic de TCC est refusé par la SAAQ considérant l’absence de signes caractéristiques. On mentionne que le travailleur aurait fait une tentative de suicide. C’est en se rendant à un rendez-vous avec une travailleuse sociale que le travailleur aurait été heurté par une automobile circulant à environ 15 km/heure.

[183]     Dans une note au dossier, l’agente Carole Parent de la CSST indique avoir vu le travailleur au magasin Walmart de Joliette, le 21 septembre 2012 en avant-midi. Il a ouvert un emballage de sacs à poubelle. Lorsque la commis lui a demandé s’il allait acheter le sac, il lui a répondu qu’il donnait des cours et que les sacs servaient de tube de glissement.

[184]     Le 24 septembre 2012, le docteur Giroux examine le travailleur à la demande de la CSST. Le travailleur explique être en mésentente avec la docteure Schaefer. Dans son témoignage, il précise que cette mésentente résulte du fait que la docteure Schaefer s’est laissée manipulée par les intervenants de la CSST.

[185]     Le travailleur mentionne au docteur Giroux qu’il sort peu de la maison, qu’il a de nombreuses difficultés avec les activités de la vie quotidienne et domestiques. Il rapporte une augmentation importante des douleurs cervicales et lombaires à la suite de l’événement du 31 août 2012, soit l’accident d’automobile. Après revue de son examen objectif et du rapport de filature, qui a été porté à son attention, le docteur Giroux émet l’opinion suivante :

[…]

 

De plus, nous devons considérer que la description du vidéo tourné en date du 28 mai 2012 démontre que monsieur Larivière circule avec aisance, qu’il ne semble pas souffrant, qu’il est capable de monter les escaliers avec aisance, qu’il se penche en flexion à 90o et demeure dans cette position sans aucun signe de souffrance. Il est capable de transporter son matériel.

 

On ne note aucun signe de ralentissement de douleur, que ce soit la marche ou la position debout stationnaire ou dans ses capacités à se pencher. Nous devons donc considérer que la situation visualisée sur le vidéo ne correspond pas à l’évaluation subjective faite ce jour et à l’évaluation subjective telle que notée avant l’événement accidentel du 31 août 2012 et lors des deux expertises (Dr Moïse et Dr Maurais).

 

Nous croyons que monsieur Larivière devrait retourner à un emploi rémunérateur sans limitation fonctionnelle au niveau de la région cervicale et lombaire. Nous avons noté de nombreux signes de discordance subjective-objective notamment lorsque nous comparons les expertises du Dr Moïse et du Dr Maurais, et notre propre expertise. Nous considérons que les éléments subjectifs ne sont pas corroborés par ce que nous pouvons visionner sur le vidéo et lors de notre examen objectif.

 

[…]

 

Après revue du vidéo de filature, nous croyons que les capacités fonctionnelles de monsieur peuvent être considérées comme étant normales. Nous ne recommandons aucune limitation fonctionnelle au niveau de la région cervicale.

 

[…]

Après revue du vidéo de filature, nous croyons que les capacités fonctionnelles de monsieur peuvent être considérées comme étant normales. Nous ne recommandons aucune limitation fonctionnelle au niveau de la région lombaire.

 

[sic]

 

 

[186]     Le 26 septembre 2012, l’agente de la SAAQ tente de joindre le travailleur. Ce dernier est absent. La conjointe du travailleur prend l’appel et indique que le travailleur est allé faire réparer son auto, qu’il est à Montréal. Elle demande si on peut le rappeler une autre journée dans la semaine. L’agente soupçonne que le travailleur est au travail. Le même jour, nous retrouvons, au dossier du travailleur, une facture pour un cours de RCR et premiers soins, donné à la résidence Mémoire d’Antan à Joliette.

[187]     Le 24 octobre 2012, l’enquêteur Boulanger écrit à l’agente De L’Étoile-Martin pour lui faire part des conclusions de son complément d’enquête, relativement à la conformité des pièces justificatives relatives aux formations dispensées.

[188]     Le 29 octobre 2012, le travailleur consulte la docteure Schaefer pour obtenir une prescription de médicaments pour sa condition cardiaque. Il lui indique, qu’étant bénéficiaire de l’aide sociale, ses médicaments lui seront remboursés. Il ne lui parle pas de son accident d’automobile du 31 août 2012 ni de sa condition cervicale et lombaire.

[189]     Le 2 novembre 2012, une nouvelle rencontre a lieu avec la docteure Schaefer et les représentants de la CSST. Le rapport du docteur Giroux est communiqué à la docteure Schaefer qui fait également état de la visite du travailleur, le 29 octobre 2012. Après avoir pris connaissance du rapport d’évaluation du docteur Giroux, la docteure Schaefer se dit d’accord avec cette évaluation du 24 septembre 2012 et elle rédige un rapport complémentaire en conséquence.

[190]     Dans une note du 4 novembre 2012, madame Parent de la CSST rapporte ainsi la rencontre avec la docteure Schaefer :

[…]

 

Après avoir pris connaissance de ces informations, le Dr Scheafer se dit en accord avec l’absence d’AP et de LF tant au niveau lombaire que cervicale et complète le R.C. dans ce sens. Le T l’a consulté le 29 octobre afin d’obtenir des px de médicaments pour sa condition cardiaque. Il lui a relaté, qu’étant bénéficiaire d’aide social, ceux-ci lui seront remboursés. En aucun temps le T a fait part de l’événement du 31 août, ni de sa condition cervicale ou lombaire. Elle dit qu’il marchait sans canne sans boiterie. [sic]

 

 

[191]     En ce qui a trait aux indemnités versées au travailleur, le dossier indique qu’il y a eu arrêt du versement de l’indemnité de remplacement du revenu lorsque la CSST a pris connaissance des activités de travail du travailleur, pendant qu’il recevait une pleine indemnité de remplacement du revenu et dans l’attente de recevoir les pièces justificatives demandées au travailleur. Ce n'est que le 24 octobre 2012 que le versement de l’indemnité de remplacement du revenu a été repris, après vérification de la conformité des pièces justificatives. Une décision à cet effet est transmise au travailleur le 1er novembre 2012.

[192]     Après avoir pris connaissance de l’opinion du docteur Giroux et du rapport complémentaire de la docteure Schaefer, en date du 2 novembre 2012, la CSST et la SAAQ rendent une décision conjointe qui confirme la capacité du travailleur à reprendre son emploi et mettent fin au versement de l’indemnité de remplacement du revenu. Des explications à ce sujet sont données au représentant du travailleur, le 5 novembre 2012.

[193]     Le 6 novembre 2012, la CSST reconsidère sa décision du 1er novembre 2012 et met fin aux indemnités de remplacement du revenu du travailleur.

[194]     Le 14 novembre 2012, l’employeur est avisé de la décision rendue relative à la capacité du travailleur de reprendre son emploi. L’employeur mentionne qu’il ne sait pas si un emploi sera offert au travailleur.

[195]     Le 15 novembre 2012, la CSST rend une décision qui reconnaît le droit au travailleur à une indemnité en vertu des dispositions de l’article 48 de la loi, soit une année de recherche d’emploi, vu l’expiration du droit de retour au travail du travailleur. On informe le travailleur de la reprise de ses indemnités de remplacement du revenu rétroactivement au 2 novembre 2012.

[196]     Le 6 décembre 2012, l’employeur communique avec la CSST qu’il y a erreur dans la précédente décision et que le droit de retour au travail du travailleur n’est pas expiré, considérant que l’employeur est une entreprise qui embauche plus de 20 travailleurs. La CSST reconsidère sa décision et met fin à l’indemnité de remplacement du revenu du travailleur, considérant que celui-ci peut exercer son droit de retour au travail chez l’employeur.

Le témoignage de Marie Rioux

[197]     Madame Rioux témoigne lors de l’audience. Elle est à l’emploi de l’employeur depuis 1998 et est responsable des finances. Elle a la responsabilité de tenir le dossier des employés et de faire les paies. C’est le directeur général qui a la responsabilité de congédier les employés, si nécessaire.

[198]     Madame Rioux explique que l’employeur héberge une clientèle souffrant de déficience intellectuelle, dont l’âge moyen se situe entre 40 et 55 ans. Il y a six résidences construites sur le site de Terre des Jeunes de Ste-Julienne qui hébergent 45 résidents. Les chemins qui relient les résidences, les unes aux autres, sont en terre.

[199]     La clientèle nécessite une surveillance constante, 24 heures sur 24. L’éducateur doit veiller à l’alimentation, aux soins d’hygiène et aux soins médicaux des bénéficiaires (c.-à-d. leur donner leur médication) et les accompagne dans leurs sorties. Il fait également l’entretien de la résidence.

[200]     À la résidence Le Sentier, deux personnes sont assignées sur le quart de jour et un seul éducateur est en présence, le soir et la nuit.

[201]     Madame Rioux indique qu’elle a rencontré le travailleur lors de son embauche. Il a mentionné avoir déjà eu un accident du travail dans le passé alors qu’il travaillait comme technicien ambulancier. À cause de cet accident, il lui a mentionné qu’il ne pouvait plus travailler dans ce domaine, il n’aurait pas dit toute la vérité en ce qui a trait à ses limitations fonctionnelles. En contre-interrogatoire, elle reconnaît toutefois qu’il n’y a pas eu de questions spécifiques posées relativement aux limitations fonctionnelles du travailleur et pas de questions précises sur les accidents du travail antérieurs ou la nature exacte des problèmes de dos du travailleur. L’employeur n’a pas fait procéder à un examen médical du travailleur.

[202]     Elle précise que le travailleur a mentionné qu’il donnait des cours de secourisme et qu’il recherchait un poste à temps partiel pour combler son horaire de travail. Il a donc été embauché.

[203]     En janvier 2010, le travailleur subit un accident du travail et s’absente. Madame Rioux indique que le travailleur l’a informé de l’évolution de sa condition. En tant que représentante de l’employeur, elle a offert des assignations temporaires au travailleur, soit le 7 mai 2010 et le 15 juin 2010, qui ont été refusées par son médecin. Pour celle du 15 juin 2010, le motif de refus indiqué par le médecin est « repos et physiothérapie ». L’absence du travailleur a duré jusqu'à la fin du mois de mai 2011.

[204]     En avril 2011, le docteur Maurais émet des limitations fonctionnelles de classe 2 de l’IRSST. À la suite de cet avis, une rencontre est fixée pour réintégrer le travailleur, en présence de celui-ci, d’un représentant de l’employeur, d’un ergothérapeute monsieur Bougie, du représentant syndical du travailleur et de la conseillère en réadaptation.

[205]     Lors de cette rencontre, madame Rioux indique que le travailleur se déplace lentement à l’aide de sa canne. Le groupe visite deux résidences, soit l’Orchidée et Le Sentier. L’ergothérapeute explique la nature du travail et les exigences physiques qui sont requises. Après avoir visité la résidence L’Orchidée, l’ergothérapeute considère que le poste à cette résidence ne respecte pas les limitations fonctionnelles du travailleur, à cause des escaliers qui doivent être empruntés trop souvent, considérant la disposition des lieux.

[206]     Les participants visitent ensuite la résidence Le Sentier. La résidence est disposée différemment, selon madame Rioux, il y a plus de pièces sur le premier plancher, de sorte que les escaliers sont empruntés moins souvent. Elle se souvient que l’ergothérapeute a pris des mesures de l’escalier, mais ne peut préciser le type de mesures prises, ni si celui-ci a calculé le nombre de fois où un travailleur devait emprunter les escaliers.

[207]     Madame Rioux indique que l’ergothérapeute a posé des questions quant aux tâches à exécuter et leurs fréquences. Il a conclu, qu’en répartissant les tâches relatives à l’entretien ménager, le poste à la résidence Le Sentier respectait les limitations fonctionnelles du travailleur.

[208]     Madame Rioux rapporte que la décision de monsieur Bougie ne semblait pas convenir au travailleur qui a soulevé beaucoup d’objections. Il a fait référence à la clientèle qui était à risque d’agression et il soulevait des arguments pour démontrer que les tâches n’étaient pas compatibles avec ses capacités physiques. L’ergothérapeute lui aurait répondu qu’il ne pouvait ajouter de nouvelles limitations fonctionnelles.

[209]     À la suite de cette visite, madame Rioux a reçu le rapport écrit de l’ergothérapeute et sa conclusion, voulant que le travailleur pouvait exercer l’emploi d’éducateur à la résidence Le Sentier, à la condition qu’on retire la tâche de pelletage l’hiver et qu’il puisse faire alterner ses tâches d’entretien avec d’autres tâches.

[210]     Madame Rioux mentionne que les tâches ménagères sont exécutées sur les trois quarts de travail et qu’il y a possibilité, pour le travailleur, de les faire alterner avec d’autres tâches, raison pour laquelle l’employeur s’est dit d’accord avec la recommandation de l’ergothérapeute. Madame Rioux souligne également que le poste détenu par le travailleur, lors de son embauche, était un poste à la résidence Le Sentier. Le travailleur avait été transféré à la résidence L’Orchidée, à la suite d’un conflit avec la responsable de la résidence.

[211]     C’est dans ce contexte qu’une décision de la CSST, confirmant la capacité du travailleur à reprendre l’emploi à la résidence Le Sentier, est transmise aux parties.

[212]     À la suite de cette décision, une rencontre est fixée avec le travailleur et son représentant syndical, afin de mettre en place le retour au travail du travailleur. Cette rencontre a lieu le 31 mai 2012 à 15 h 00. Le lendemain soir, soit le 1er juin 2012, le travailleur rencontre la responsable de la résidence pour faire une mise à jour des dossiers, rencontrer les résidents et réviser leur routine. Il n’a pas de tâches manuelles à faire.

[213]     Le 2 juin 2012 vers 17 h 00, le travailleur se présente au travail. Il est jumelé avec un autre éducateur. C’est le travailleur qui doit toutefois prendre le groupe en charge. C’est ce soir-là que le travailleur, à 17 h 30, déclare un nouvel accident du travail et va consulter à l’urgence. Madame Rioux confirme que le travailleur aurait croisé l’ex-directeur général, monsieur Crête, en quittant la résidence.

[214]     Dans les jours qui suivent, le travailleur remet, à madame Rioux, son rapport médical de consultation, le formulaire Avis de l’employeur et demande de remboursement dont il avait complété sa partie et le formulaire Réclamation du travailleur. Madame Rioux ajoute le nom de monsieur Luc Lachapelle comme témoin, étant l’éducateur qui était jumelé avec le travailleur le soir de l’accident. Il n’aurait toutefois été témoin de rien puisqu’il n’était pas dans la même pièce que le travailleur au moment de l’incident. Elle ne se souvient pas si c’est elle qui a demandé sa version à monsieur Lachapelle, ce n’est pas elle qui s’occupait de l’enquête d’accident et elle ne peut identifier la source de son information.

[215]     Madame Rioux mentionne que c’est elle qui reçoit la correspondance émanant de la CSST dans le dossier des travailleurs. Elle indique qu’elle a informé le directeur général du suivi du dossier du travailleur.

[216]     Madame Rioux confirme que c’est elle qui a pris l’appel de la directrice de la Maison Clémentine qui demandait des références sur le travailleur, en février 2012. C’est à ce moment qu’elle a appris que le travailleur avait posé sa candidature en juillet 2011 pour occuper un emploi similaire à celui occupé chez l’employeur durant son absence. Elle mentionne qu’elle connaît cet organisme comme desservant une clientèle qui présente une déficience intellectuelle.

[217]     En septembre 2012, on demande à madame Rioux de compléter la partie de l’employeur sur un formulaire de la SAAQ. Elle informe le directeur général de la réception de ce document et classe le dossier en le mettant dans les choses à faire. Elle complète le formulaire en octobre 2012 seulement, y joint le descriptif de fonction et expédie le tout à la SAAQ.

[218]     Le 15 novembre 2012, une décision conjointe est rendue par la SAAQ et la CSST, déclarant que le travailleur conserve son droit à l’indemnité de remplacement du revenu, étant donné que la décision statuant sur sa capacité à refaire son emploi prélésionel a été rendue le 2 novembre 2012, après l’expiration de son droit de retour au travail et considérant que son employeur ne peut le réintégrer.

[219]     Dans les jours qui suivent, madame Rioux prend connaissance de la décision conjointe de la SAAQ et de la CSST rendue le 15 novembre 2012 et elle avise la CSST que cette décision comporte une erreur, étant donné que l’établissement de l’employeur embauche plus de 20 travailleurs, le droit de retour au travail n’expire qu’après deux ans et non après une année, tel que mentionné dans ladite décision.

[220]     Le 10 décembre 2012, la CSST et la SAAQ reconsidèrent leur décision rendue le 15 novembre 2012 en vertu des dispositions de l’article 365 de la loi et déclarent que le travailleur peut exercer son droit de retour au travail. Pour ce motif, il n’a pas droit à ses indemnités de remplacement du revenu. On l’avise également qu’il n’aura pas à rembourser les indemnités de remplacement du revenu reçues entre les 2 et 29 novembre 2012.

[221]     Le travailleur communique avec madame Rioux pour connaître les modalités de son retour. Elle lui répond qu’elle discutera avec le directeur général et verra à lui faire un horaire. Elle transmet l’information à monsieur Pellerin qui communique avec le travailleur. Madame Rioux est également informé que le travailleur a communiqué directement avec la résidence Le Sentier pour annoncer son retour, ce qui n’est pas habituel. Un bénéficiaire se serait alors désorganisé en apprenant cette nouvelle.

[222]     Madame Rioux discute du dossier avec monsieur Pellerin. Elle indique également qu’elle a communiqué avec l’avocate de l’employeur, le 12 décembre 2012 vers 13 h 30, afin d’obtenir un avis légal dans le dossier du travailleur. Une note a été prise dans son agenda relativement à cette conversation. À la suite de cet avis, monsieur Pellerin prend la décision de congédier le travailleur et elle procède au calcul du préavis. C’est également noté dans son agenda.

[223]      Madame Rioux explique que le relevé d’emploi est préparé en date du 24 décembre 2012 parce que c’est la période de paie qui suit le congédiement du travailleur.

[224]     Relativement aux motifs de congédiement, madame Rioux mentionne que la direction a considéré que le travailleur avait un « comportement douteux » incompatible avec le lien de confiance qui doit exister entre l’employé et du type de clientèle qu’elle dessert.

[225]     Appelée à préciser ce que la direction entend par un « comportement douteux », madame Rioux répond que c’est l’attitude du travailleur adoptée face à son retour au travail. À la suite de son accident du travail du mois de janvier 2010, le travailleur avait également indiqué qu’il ne voulait pas revenir au travail chez l’employeur et avait, là aussi, demandé à l’employeur d’indiquer qu’il n’avait pas de poste à lui offrir à cause de sa condition. De plus, le fait que le travailleur avait postulé pour un emploi à la Maison Clémentine démontre qu’il ne voulait pas revenir chez l’employeur. Dans les circonstances, l’employeur n’était pas vraiment intéressé à reprendre, à son service, un travailleur qui avait une telle attitude face à son emploi. Selon elle, c’est ce qui a motivé la décision de la direction de congédier le travailleur, le 12 décembre 2012.

[226]     Madame Rioux n’a pas eu de contact avec le travailleur après le 10 décembre 2012, avant de lui transmettre son relevé d’emploi en date du 24 décembre 2012.

Le témoignage de monsieur Pellerin

[227]     Monsieur Pellerin occupe le poste de directeur général pour le compte de l’employeur depuis le 18 juillet 2012. Auparavant, il s’occupait de l’entretien des infrastructures et n’avait pas accès aux informations contenues dans le dossier des employés dans ce poste.

[228]     Les responsabilités de monsieur Pellerin sont de voir à l’ensemble des opérations de l’employeur et il est également responsable de l’application de la convention collective aux salariés visés par la convention collective.

[229]     Il n’a jamais rencontré personnellement le travailleur. Monsieur Pellerin aurait tenté de le voir lorsqu’il est passé au centre pour faire remplir son formulaire de la SAAQ à l’automne 2012, mais, lors de son arrivée au bureau, il avait quitté.

[230]     Monsieur Pellerin se souvient que, quelques jours avant Noël 2012, il y a eu désorganisation d’un bénéficiaire après qu’il eut appris que le travailleur revenait au travail.

[231]     Le 10 décembre 2012, le travailleur communique avec monsieur Pellerin par téléphone. Au cours de cette conversation, le travailleur le félicite pour l’obtention de son nouveau poste de directeur général. Il lui mentionne à la fois être capable de retourner au travail, mais être en invalidité à la suite d’un accident d’automobile.

[232]     Le travailleur lui mentionne également que monsieur Pellerin n’a probablement pas plus le goût de le reprendre à son service, que lui-même d’y retourner. Il lui demande une lettre indiquant qu’il ne peut pas faire son emploi en raison de ses limitations fonctionnelles et lui dit, qu’en contrepartie de cette lettre, il n’entendra plus parler de lui.

[233]     Monsieur Pellerin est surpris par cette attitude et se sent manipulé par le travailleur. Il prend le dossier du travailleur et le passe en revue. Il constate que le médecin du travailleur a refusé toutes les assignations temporaires proposées alors que le travailleur donne des cours de formation.

[234]     Monsieur Pellerin discute également avec madame Rioux, la responsable des dossiers des accidentés du travail. Il lui demande pourquoi l’employeur n’a pas agi lorsqu’ils ont été informés que le travailleur avait postulé un emploi durant son absence pour un accident du travail. On lui répond qu’on ne pouvait imposer des mesures à un travailleur qui est en absence pour un accident du travail.

[235]     Monsieur Pellerin apprend également que le syndicat ne veut plus représenter le travailleur. Il demande conseil à l’avocate de l’employeur qui lui mentionne que, considérant les faits exposés, il y a bris du lien de confiance. L’appel à l’avocate s’est fait le 12 décembre 2012. À la suite de cet avis, il prend la décision de congédier le travailleur.

[236]     Le 12 décembre 2012, monsieur Pellerin appelle le travailleur et il l’informe de la décision prise de mettre fin à son emploi puisque le lien de confiance entre l’employeur et lui est rompu.

[237]     Questionné par le tribunal sur le contenu exact des propos échangés lors de cette conversation, monsieur Pellerin répond ce qui suit :

J’ai dit : Écoutez monsieur Larivière, il y a bris du lien de confiance comme quoi vous avez travaillé ailleurs pendant que vous étiez en accident du travail chez nous et votre manque de volonté de revenir travailler chez nous et le fait que ce n’est pas la première fois que vous exprimez le fait que vous ne voulez pas revenir.

[238]     Monsieur Pellerin est formel. Il n’a jamais été question de « poste » non disponible pour le travailleur. Il lui a bien indiqué qu’il était dans l’obligation de le congédier à cause du bris du lien de confiance.

[239]     Le bris du lien de confiance est motivé ainsi par l’employeur : le travailleur a été embauché en 2008 à titre d’éducateur chez l’employeur. Cet employeur héberge des personnes souffrant de déficience intellectuelle.

[240]     L’éducateur est responsable des résidents. Il doit s’assurer que leurs besoins primaires sont comblés. Il leur prodigue les traitements requis, les surveille, les nourrit et s’occupe de l’entretien de la résidence. Plusieurs bénéficiaires ne peuvent parler, de sorte que l’employeur doit avoir une totale confiance à son employé qui intervient seul en présence des bénéficiaires.

[241]     En mai 2011, l’employeur prend les mesures requises pour adapter un poste respectant les limitations fonctionnelles du travailleur à la suite de sa lésion professionnelle subie le 23 janvier 2010. Il permet au travailleur de choisir le poste et le quart de travail qu’il désire occuper.

[242]     Le 2 juin 2011, le travailleur fait une réclamation pour un nouvel accident du travail survenu la troisième journée de son retour au travail et la première où il est assigné à des tâches. Il s’absente à nouveau du travail et ne revient pas.

[243]     L’employeur apprend que le travailleur a posé sa candidature et travaillé à la Maison Clémentine, en février 2012, sans le déclarer à la CSST et sans le lui dire, alors qu’il se prétend incapable de travailler pour l’employeur. Selon l’employeur, les tâches à effectuer à la Maison Clémentine présentent plusieurs similitudes avec celles effectuées par les éducateurs de l’employeur. L’employeur a été informé de cette situation par un appel d’un responsable de la Maison Clémentine qui désirait des références relatives au travailleur.

[244]     La CSST a transmis plusieurs lettres et décisions au travailleur dont copies ont également été transmises à l’employeur qui est une partie intéressée dans le dossier du travailleur. La transmission de ces lettres a permis à l’employeur de prendre connaissance du fait que le travailleur donne des formations en secourisme pendant qu’il reçoit une pleine indemnité de remplacement du revenu, alors que son médecin refuse les assignations temporaires proposées par l’employeur. L’employeur apprend, par la même occasion, que le travailleur ne déclare pas ses revenus gagnés à la CSST.

[245]     L’employeur est informé que le travailleur s’absente de ses traitements de physiothérapie sans justification et ce dernier voit ses prestations interrompues pour ce motif.

[246]     Dans sa décision de congédier le travailleur, l’employeur prend en considération la réaction d’un bénéficiaire, lors de l’annonce, par la responsable de la résidence, du retour du travailleur à l’emploi en décembre 2012. Ce bénéficiaire souffrant d’autisme s’est désorganisé en apprenant cette nouvelle, ce qui a nécessité l’intervention de plusieurs personnes pour le calmer. Le directeur n’est toutefois pas en mesure de préciser les raisons qui ont justifié une telle désorganisation et ne peut identifier de gestes répréhensibles commis par le travailleur dans le passé à l’égard de ce bénéficiaire, particulièrement parce que ce bénéficiaire ne peut parler. Il reconnaît que, parfois, il doit déplacer des bénéficiaires ou des travailleurs parce qu’il y a incompatibilité entre les deux, sans qu’il n’y ait pour autant des gestes inadéquats commis.

[247]     L’employeur reconnaît que le travailleur n’a aucun dossier disciplinaire et aucune réprimande à son dossier. Il admet également que la convention collective prévoit un processus de gradation des sanctions, sauf s’il y a faute grave.

[248]     Finalement, l’employeur prend en considération l’attitude du travailleur, quant à sa volonté réelle de revenir au travail qui se manifeste lors de leur conversation du 10 décembre 2012.

[249]     Monsieur Pellerin indique que c’est à partir du 18 juillet 2012, soit sa date d’entrée en fonction comme directeur général, qu’il a pris connaissance des éléments contenus au dossier du travailleur et particulièrement aux mois d’octobre et novembre 2012, où il a été informé par madame Rioux de l’évolution de ce dossier et du fait que le travailleur avait fait l’objet d’une enquête et d’une filature demandées par la CSST. Il ne peut dire la date précise où il a été informé de ce fait.

 

[250]     L’employeur mentionne qu’il n’a pas agi dans la période contemporaine à la prise de connaissance de ces faits parce qu’il a obtenu un avis de ses avocats, voulant qu’il ne peut prendre de mesures disciplinaires pendant que le travailleur est en arrêt de travail et reçoit des indemnités de remplacement du revenu.

[251]     L’employeur mentionne également que, bien qu’il était persuadé que le travailleur ne voulait pas revenir au travail, il ne pouvait indiquer « démission », comme motif de fin d’emploi sur le relevé d’emploi parce que « ça n’aurait pas passé ».

[252]     Du côté du travailleur, ce dernier n’est pas aussi formel. Selon lui, lorsque monsieur Pellerin l’a appelé le 12 décembre 2012, c’était pour lui indiquer qu’il n'avait pas de poste à lui offrir pour le moment. C’est la raison pour laquelle il a discuté de cette question avec son représentant syndical qui lui a dit de ne pas s’en faire, qu’il pourrait postuler sur un poste lors d’un prochain affichage.

[253]     Le 13 décembre 2012, monsieur Gilles Lapierre, qui agit à cette époque comme représentant syndical du travailleur, appelle madame De L’Étoile-Martin, agente de la CSST. La note se lit ainsi :

T a contacté E (monsieur Pellerin) et celui-ci l’a informé qu’il n’avait pas de poste à lui offrir. E aurait parlé de la perte du lien de confiance. T se demande quoi faire. J’explique que T a des recours en vertu de l’art. 32 s’il se sent lésé en raison de sa lésion professionnelle.

 

Monsieur Lapierre ne sait pas si T a contacté la SAAQ, mais il l’encouragera à débuter ses démarches rapidement pour voir s’il a droit à des indemnités de la part de cet organisme.

 

 

[254]     Le 24 décembre 2012, un relevé d’emploi est émis. Le motif de la fin d’emploi indiqué sur le relevé est « bris du lien de confiance ».

[255]     Le 9 janvier 2013, le travailleur écrit à la CSST pour réclamer son droit au versement d’une indemnité de remplacement du revenu pour recherche d’emploi, considérant que l’employeur le met à pied et ne veut pas le reprendre.

[256]     Le 15 janvier 2013, le travailleur transmet à la CSST une plainte en vertu de l’article 32 de la loi. Il invoque avoir fait l’objet d’un congédiement, sa plainte est libellée ainsi :

Le CLP en 2000 me donne le droit d’offrir de la formation. En 2008 je suis embauché à Terre des Jeunes où j’ai 2 accidents de travail, après consolidation la CSST autorise le retour au travail. (Pendant ce temps j’ai donné quelques cours. C’est pour cela que je suis congédié) […]

[257]      Le 16 janvier 2013, le travailleur envoie une lettre à son employeur dont le contenu est le suivant :

Je vous fait parvenir ma contestation du congédiement, qui d’après moi est une raison injustifiée. Oui j’ai offert quelques cours chose que j’avais dit à l’embauche autorisé par la CLP en 2000 et accepter par la CSST le litige est sur la manière de déclaré les revenus et non sur le fait d’avoir diffuser le cours.

 

Si la raison serait que vous n’avez pas d’emploi ajuster à mes incapacités comme entendu par Mme Marie Rioux et la CSST la je serais d’accord avec vous, mais la raison que vous m’avez donné contrevient à l’art. 32 de la LATMP. Donc je suis prêt à laisser tomber ma plainte pour un motif convenable et par écrit.

 

            [sic]

 

 

[258]     Le 5 février 2014, le conciliateur décideur rend sa décision sur la plainte du travailleur et la déclare irrecevable pour le motif qu’elle a été transmise hors délai, soit plus de 30 jours après que le travailleur ait pris connaissance de la mesure, soit le 12 décembre 2012.

[259]     Les dispositions de la convention collective relatives à la procédure disciplinaire sont les suivantes :

Mesures disciplinaires

 

6.11     La personne salariée doit recevoir une copie de tout avis, mesure disciplinaire ou de réprimande déposé à son dossier. L’employeur avise le syndicat par écrit.

 

6.12     La réprimande verbale, écrite, la suspension et le congédiement sont des mesures disciplinaires pouvant être imposées par l’employeur, en tenant compte, entre autres, de la gravité, de la fréquence des offenses et des circonstances, pour l’établissement d’une cause juste et suffisante.

 

6.13     La personne salariée convoquée à une rencontre avec l’employeur relativement à son lien d’emploi, son statut ou une question disciplinaire ne subit pas de diminution de salaire et peut se faire accompagner d’une personne représentante syndicale.

 

6.14     L’employeur qui congédie ou suspend une personne salariée doit, dans les 5 jours ouvrables subséquents, informer par écrit la personne salariée des motifs qui ont provoqué le congédiement ou la suspension.

 

L’employeur avise par écrit le syndicat de tout congédiement ou de toute suspension dans le délai prévu au paragraphe précédent.

 

 

6.15     Aucune offense ne peut être opposée à une personne salariée après 12 mois de sa commission, auquel cas l’avis ou la mesure est automatiquement retirée du dossier.

 

6.16     La décision d’imposer un avertissement écrit, une suspension ou un congédiement est communiquée à la personne salariée concernée dans les 30 jours de l’incident y donnant lieu ou, au plus tard dans les 30 jours à compter du jour où l’employeur a pris connaissance de l’incident; un avis écrit est remis à la personne salariée contenant les faits à l’origine de la sanction disciplinaire. Une copie de cet avis est transmise au syndicat.

 

6.17     À moins de faute grave, les mesures disciplinaires doivent être appliquées de manière progressive. Les mesures disciplinaires sont :

 

- l’avis verbal;

- l’avis écrit;

- la suspension;

- le congédiement.

 

 

[260]     Questionné par le tribunal sur l’apparente contradiction entre la demande du travailleur d’être réintégré dans son emploi, si le tribunal fait droit à sa plainte, et la prétention du travailleur voulant qu’il ne soit pas capable de reprendre son emploi prélésionnel, ou même l’emploi aménagé par l’employeur à la résidence Le Sentier, le travailleur répond qu’il veut avoir la possibilité de « l’essayer ».

[261]     C’est la preuve dont dispose le tribunal.

L’AVIS DES MEMBRES

[262]     Pour ces motifs, le membre issu des associations d’employeurs est d’avis que la décision conjointe, portant sur le droit de réintégration du travailleur, devient sans objet puisque le travailleur n’a pas subi de lésion professionnelle le 2 juin 2011.

[263]     Quant à la plainte en vertu de l’article 32 de la loi, il est d’avis que cette plainte est irrecevable, le travailleur ayant été avisé de son congédiement le 12 novembre 2012, par téléphone. Il est d’avis que cette forme de congédiement est valide, la Commission des lésions professionnelles n’étant pas le forum approprié pour l’application des dispositions de la convention collective. Par ailleurs, si cette plainte était déclarée recevable, il est d’avis que l’employeur a fait la preuve qu’il avait une cause juste et suffisante pour congédier le travailleur et il a renversé la présomption dont pourrait bénéficier le travailleur. Pour ces motifs, il est d’avis que la plainte du travailleur doit être rejetée.

[264]     Quant aux trop-perçus réclamés au travailleur, il considère que la CSST a fait la preuve des montants versés en trop au travailleur, mais, pour les motifs exprimés par le juge administratif, il considère qu’il est équitable de réduire cette réclamation du 1/3 pour tenir compte des dépenses encourues par le travailleur pour gagner ces revenus. Il est d’avis que le travailleur n’a pas été en mesure de démontrer qu’il a droit à des déductions supérieures à ce pourcentage.

[265]     Le membre issu des associations syndicales est, quant à lui, d’avis de retenir les conclusions du membre du BEM quant aux questions médicales en lien avec la lésion professionnelle subie par le travailleur, le 23 janvier 2010. Il est d’avis que le diagnostic de la lésion professionnelle subie par le travailleur est une entorse lombaire et que cette lésion était consolidée le 4 avril 2011 avec suffisance de soins à cette même date. Il est également d’avis de retenir les conclusions du BEM quant aux limitations fonctionnelles conservées par le travailleur, soit des limitations de classe 2 pour la colonne lombaire.

[266]     Considérant son avis sur les questions précédentes, le membre issu des associations syndicales est d’avis que le travailleur n’était pas en mesure d’exercer son emploi prélésionnel ou l’emploi réaménagé offert par l’employeur à la résidence Le Sentier, puisque cet emploi impliquait que le travailleur devait monter et descendre plusieurs escaliers, ce qui est incompatible avec ses limitations fonctionnelles. Le travailleur doit, de plus, intervenir physiquement avec des bénéficiaires handicapés ou violents, ce qui est également incompatible avec ses limitations fonctionnelles. Pour ce motif, il infirmerait la décision de capacité rendue par la CSST et retournerait le dossier à cette dernière afin que le processus de réadaptation soit repris. Entretemps, il est d’avis que le travailleur est en droit de récupérer ses indemnités de remplacement du revenu.

[267]     Quant à l’événement survenu le 2 juin 2011, le membre issu des associations syndicales est d’avis que le travailleur a fait la preuve des éléments permettant l’application de la présomption de l’article 28 de la loi, soit qu’il a subi une blessure, en l’occurrence, une entorse lombaire, une entorse cervicale et une entorse au genou gauche. La déclaration immédiate de l’événement et la consultation, le même jour, font preuve que cette blessure est bien survenue sur les lieux de son travail alors que le travailleur exerçait son travail. Il est d’avis qu’il y a lieu de retenir la version du travailleur, quant à l’événement qui s’est produit le 2 juin 2011, et la chute du travailleur a vraisemblablement causé les blessures diagnostiquées. La présomption étant applicable, il est d’avis que l’employeur n’a pas renversé la présomption de lésion professionnelle. Pour ces motifs, il ferait droit à la requête du travailleur dans ce dossier de même qu’à la décision portant sur la reconnaissance des diagnostics d'entorse lombaire, sciatalgie et entorse au genou gauche, comme étant en relation avec cette même lésion professionnelle. Ce dernier diagnostic a été posé le 30 août 2011. Il n’y a, selon lui, aucune preuve qui permet de croire que cette lésion n’est pas survenue le 2 juin 2011, tel que le déclare le travailleur.

[268]      le membre issu des associations syndicales est d’avis, quant à la décision conjointe portant sur le droit de réintégration du travailleur dans son emploi, vu la non-expiration du droit de retour au travail du travailleur, qu’elle doit être confirmée, étant donné que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 2 juin 2011. Il était en droit d’exercer son droit de retour au travail prévu à la loi. Toutefois, considérant la décision rendue sur la capacité du travailleur, ce droit devra s’exercer à l’égard du premier emploi convenable ou équivalent qui deviendra disponible ou qui pourra être offert par l’employeur au travailleur. Entretemps, le travailleur a droit aux indemnités de remplacement du revenu qui résultent de son incapacité à refaire son emploi prélésionnel.

[269]     Quant à la plainte, en vertu de l’article 32 de la loi, il est d’avis que celle-ci est recevable pour le motif que la convention collective prévoit qu’un avis écrit doit être transmis au travailleur pour l’informer de son congédiement. Or, le seul écrit transmis au travailleur l’informant de son congédiement lui a été transmis le 24 décembre 2012, soit son relevé d’emploi. La plainte du travailleur transmise à la CSST, le 15 janvier 2013, l’a donc été dans les délais prescrits.

[270]     Sur le fond de ce dossier, il est d’avis que le travailleur a droit au bénéfice de la présomption, ayant tenté d’exercer son droit de retour au travail à la suite de sa lésion professionnelle, subie le 2 juin 2011, ou ayant exercé d’autres droits prévus à la loi, en contestant diverses décisions rendues en octobre et novembre 2012. L’employeur n’a pas fait la preuve d’une cause juste et suffisante de congédiement. Les contradictions entre les différents témoins de l’employeur, quant aux véritables motifs de ce congédiement, ne permettent pas d’écarter la présomption et démontrent que les motifs invoqués ne sont pas sérieux et ne sont que des prétextes. Ce n’est seulement qu’après la reconsidération conjointe de la CSST et de la SAAQ, qui déclarent que le droit de retour au travail du travailleur n’est pas expiré, que le processus de congédiement fut enclenché, ce qui permet de penser que c’est véritablement à cause de l’exercice du droit de retour au travail du travailleur que ce dernier a été congédié. Pour ces motifs, il accueillerait la plainte et annulerait le congédiement. Quant aux sommes dues au travailleur, considérant les avis précédents, il est d’avis que le travailleur a droit à une indemnité de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’un nouvel emploi lui soit déterminé, selon les conditions de la loi. Il a également droit aux bénéfices et avantages dont l’a privé le congédiement.

 

 

[271]     Quant aux trop-perçus réclamés au travailleur, il considère que la CSST a fait la preuve des montants versés en trop au travailleur, que ce dernier a d’ailleurs reconnu avoir reçus. Il considère, toutefois, que la CSST devrait réduire cette réclamation du 1/3 afin de prendre en considération les dépenses engagées par le travailleur pour gagner ces revenus, étant donné son statut de travailleur autonome. Il est d’avis que le travailleur n’a pas été en mesure de démontrer qu’il a droit à des déductions supérieures à ce pourcentage.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[272]     Ce dossier comporte plusieurs contestations. Afin de conserver une certaine logique pour disposer de chacune de ces contestations, le tribunal procède dans l’ordre suivant.

[273]     Le tribunal disposera, en premier lieu, du litige portant sur les questions médicales qui demeurent litigieuses entre les parties et qui découlent de l’événement du 23 janvier 2010, soit la date de consolidation de cette lésion professionnelle, la suffisance des soins et la question des limitations fonctionnelles, puisque la survenance de cette lésion professionnelle n’est pas en litige. Par la suite, le tribunal disposera du litige portant sur la capacité du travailleur à reprendre son emploi prélésionnel à la suite de cette première lésion professionnelle.

[274]     Le tribunal disposera ensuite des litiges portant sur l’événement survenu le 2 juin 2011 et la plainte du travailleur, en vertu des dispositions de l’article 32 de la loi. Les trois litiges concernant les trop-perçus seront traités en bloc à la fin de la présente décision.

La consolidation et la suffisance des traitements

[275]     L’employeur conteste la décision de la CSST faisant suite à l’avis du BEM qui fixe la date de consolidation de la lésion professionnelle au 4 avril 2011, déclare que le travailleur n’a pas subi d’atteinte permanente à son intégrité physique additionnelle, mais conclut à la nécessité de reconnaître au travailleur des limitations fonctionnelles de classe 2 de l’IRSST pour la colonne lombaire. Il convient donc, dans un premier temps, de disposer de la question de la date de consolidation de la lésion survenue le 23 janvier 2010. Le tribunal discutera, par la suite, de la question des limitations fonctionnelles.

 

 

[276]     La loi prévoit à l’article 2 la notion de consolidation d’une lésion professionnelle :

2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :

 

« consolidation » : la guérison ou la stabilisation d'une lésion professionnelle à la suite de laquelle aucune amélioration de l'état de santé du travailleur victime de cette lésion n'est prévisible;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.

 

 

[277]     Dans l’affaire Beausoleil et Construction Mabri[3], la Commission des lésions professionnelles a défini comme suit la notion de consolidation d’une lésion professionnelle :

[39]      Le tribunal, dans l’affaire Bacon et General Motors du Canada ltée2, rappelait que la consolidation ne sera atteinte que lorsque la lésion sera ou bien guérie ou encore lorsqu’elle sera stabilisée sans qu’aucune amélioration de l’état de santé du travailleur ne soit prévisible. Il est clair, disait-il, en l’espèce, que la chirurgie recommandée au travailleur améliorera son sort, du moins c’est l’avis de plusieurs experts au dossier.

 

[40]      Le tribunal dans une autre affaire, soit Sélection Du Pâtissier inc. et Brousseau3 , soulignait :

 

[22]        De l’avis de la Commission des lésions professionnelles, la question à résoudre n’est pas de savoir si un traitement donné a été un succès, mais bien celle de savoir si un traitement donné était adéquat et susceptible d’améliorer la condition du travailleur, victime d’une lésion professionnelle. Tel est vraisemblablement la mesure de l’objectif de réparation, dans son aspect thérapeutique, qui est énoncé à l’article 1 de la loi.

 

[41]      De plus, le tribunal soulignait que la définition du terme consolidation devait se lire de façon combinée notamment avec les articles 188 et 189 de la loi concernant le droit du travailleur à l’assistance médicale que requiert son état.

 

[42]      Dans l’affaire Côté et Cartons Northrich inc.4, le tribunal notait :

 

[100]      La jurisprudence enseigne qu’il ne faut pas confondre la guérison d’une lésion d’avec sa consolidation et qu’il y a consolidation lorsqu'il n'y a plus d'amélioration prévisible, que la lésion atteint un seuil thérapeutique et qu'aucun traitement ne peut prévisiblement apporter une amélioration à l’état du travailleur.

 

 

 

 

 

[101]      De même, la Cour d’appel du Québec a rappelé que la notion de consolidation est essentiellement médicale et que le législateur a voulu dans la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles statuer sur l'état de santé d'un travailleur en fonction d'un protocole médical qui doit avoir une certaine objectivité. En ce sens, l'espoir d'amélioration de l'état d'un travailleur doit s'appuyer sur des règles médicales objectives.

 

[…]

 

[106]      Comme l’enseigne la jurisprudence citée précédemment, le tribunal constate que la notion de « traitement » est au cœur de l’évaluation de la date de consolidation d’une lésion. Les traitements doivent être prodigués aux fins de l’amélioration de la lésion et, si l’on ne doit pas évaluer la consolidation en fonction des résultats des traitements (affaire Sélection du pâtissier), encore faut-il que des traitements soient reçus pour que ceux-ci puissent « prévisiblement apporter une amélioration de l’état du travailleur », quitte à en constater l’échec par la suite mais également, que ces traitements soient en lien avec la lésion professionnelle reconnue.

 

_______________

2              C.L.P. 226939-04-0402, 17 novembre 2004, J.-F. Clément.

3              C.L.P. 345210-31-0804, 30 janvier 2009, G. Tardif.

4              C.L.P. 407694-62B-1003, 21 février 2011, M. Watkins.

 

 

[278]     La crédibilité et la fiabilité des affirmations d’un travailleur doivent être considérées lorsque vient le temps de déterminer la date de consolidation d’une lésion professionnelle et la nécessité des soins et traitements, tel que nous l’enseigne la jurisprudence dans l’affaire STM (Gestion des lésions professionnelles) et Santizo[4], où nous pouvons lire :

[70]      Le tribunal partage l’avis de la Commission des lésions professionnelles, dans l’affaire Constructions LJP inc. et Cloutier7:

 

[107]       (…) La crédibilité du travailleur est pertinente dans l’évaluation de la mobilité d’une articulation, surtout lorsqu’il y a discordance significative entre les allégations subjectives et les constatations objectives, ou contradiction entre les mouvements obtenus à l’examen et ceux observés lors des gestes spontanés du travailleur.

[71]      En conclusion, le tribunal doit considérer les éléments de preuve qui permettent d’évaluer la crédibilité de la travailleuse.

 

[72]      En l’instance, le tribunal constate que la vidéo de filature démontre que la travailleuse était bel et bien capable d’effectuer certains mouvements qu’elle était pourtant incapable de faire à l’examen du docteur Trudeau et à l’examen du docteur Leclaire. 

 

[…]

 

[103]     Le tribunal estime que, en l’absence de crédibilité de la travailleuse, les signes et les pertes d’amplitudes articulaires trouvées aux examens cliniques ne peuvent pas être considérés comme des éléments objectifs. Tel que l’a rappelé la Commission des lésions professionnelles en concluant à l’absence d’atteinte permanente et de limitations fonctionnelles dans l’affaire M.B.I. Corexcel inc. et Larocque8 invoquée par le procureur de l’employeur, des manœuvres et des tests diagnostiques impliquant des mouvements ou des tests de palpation pourront être considérés comme des signes objectifs seulement lorsqu’un travailleur est crédible, mais pas chez un travailleur non crédible et non collaborateur.

 

[…]

 

[105]     Non seulement l’évolution atypique de la lésion professionnelle, mais les signes discordants et de non-organicité rapportés par le docteur Trudeau à l’examen, permettent de conclure que la travailleuse a simulé, ou grandement exagéré ses symptômes.

 

[106]     Le tribunal croit que, dans les faits, dans la réalité qui a été mise en lumière particulièrement par la vidéo de filature, dès le 15 juin 2009, la lésion professionnelle à l’épaule droite, à la région inguinale droite et au genou droit, était consolidée. La travailleuse n’avait pas les symptômes et les difficultés qu’elle alléguait alors. […] »

                         

[références omises]

 

 

[279]     Tel qu’on le constate, outre les rapports médicaux au dossier, le tribunal doit également tenir compte de la crédibilité du travailleur dans ce dossier, particulièrement lorsqu’il donne de l’information aux médecins examinateurs quant à ses capacités réelles.

[280]     Dans le présent dossier, la crédibilité du travailleur est nulle. Le tribunal retient de la preuve que, tout au long de ce dossier, le travailleur a menti. C’est d’ailleurs le travailleur, lui-même, qui reconnaît avoir menti à ses médecins pour obtenir du Supeudol, substance à laquelle il était devenu dépendant. Le travailleur a menti à la CSST en leur mentionnant qu’il ne pouvait plus donner des cours de secourisme, alors que c’était faux ou en mentionnant qu’il n’était plus en mesure de faire aucune activité à la maison, alors qu’il pouvait conduire durant des périodes de deux heures consécutives pour donner des cours à Rivière-du-Loup. Durant cette même période, en juin 2010, il manipulait son propre médecin afin qu’elle refuse des assignations temporaires parce qu’il était frustré contre l’employeur, à cause de l’abandon de son programme d’équithérapie. Le travailleur reconnaît, lors de son témoignage, que les agissements de l’employeur, à son égard, ne l’ont pas motivé à envisager un retour au travail. Ses véritables intentions n’étaient pas de reprendre son emploi prélésionnel, mais qu’on lui détermine un emploi convenable de son choix, soit instructeur en équithérapie.

 

[281]     Cette manipulation s’est, sans doute, étendue aux autres médecins examinateurs, ce qui explique la disparité des données recueillies d’un examen à l’autre et le résultat paradoxal de certains examens. Pratiquement tous les médecins examinateurs relèvent des discordances lors de leur examen du travailleur. À titre d’exemple, lors de l’audience, le travailleur mentionne que les mouvements lombaires les plus problématiques, encore aujourd’hui, sont les rotations gauche et droite, alors qu’elles sont rapportées comme normales par le docteur Maurais.

[282]     Le travailleur a menti à tout le monde, à la CSST, à son médecin et aux différents médecins examinateurs. Dans les circonstances, le tribunal ne peut accorder une grande crédibilité à son témoignage lorsqu’il décrit ses douleurs ou sa propre condition. Ceci étant exposé, examinons maintenant la preuve médicale au dossier.

[283]     L’employeur demande de reconnaître la date du 12 novembre 2010 comme date de consolidation de l’entorse lombaire, seul diagnostic accepté par la CSST, alors que le docteur Maurais consolide la lésion professionnelle en date du 4 avril 2011, soit à la date de son examen. Quant à la docteure Schaefer, après avoir pris connaissance de l’avis du BEM, elle produit son rapport final prévoyant une date de consolidation au 5 avril 2011.

[284]     Après avoir considéré la preuve au dossier, le tribunal est d’avis de retenir la date du 31 janvier 2011 comme étant la date de consolidation de la lésion professionnelle, avec suffisance de soins et traitements à cette date.

[285]     La décision du tribunal s’appuie, en premier lieu, sur les rapports du docteur Kornacki, étant le seul médecin qui a pris en considération l’ensemble de l’histoire médicale du travailleur et a comparé la condition du travailleur, à la date de son examen du 12 novembre 2010, à sa condition prélésionnelle.

[286]     La preuve révèle que les symptômes, dont se plaint le travailleur en 2010 et 2011, sont connus et préexistants. À la suite de l’accident du travail du 15 décembre 1998, tous les examens médicaux rapportent que les principaux problèmes du travailleur étaient des maux de dos et une sciatalgie gauche.

[287]     Le 4 mai 1999, le docteur Lapierre relève que, depuis 1986, le travailleur a présenté 29 réclamations différentes à la CSST dont 17 ont impliqué la région dorsolombaire. Il s’est absenté à sept autres reprises pour des problèmes lombaires, étant alors indemnisé par le régime d’assurance collective.

 

[288]     Le 8 juillet 1999, le docteur Laflamme souligne le caractère chronique de la symptomatologie lombaire du travailleur. Dès octobre 1999, le travailleur rapporte au docteur Nolin qu’il a de la difficulté à marcher dans la neige et qu’il doit marcher avec une canne depuis 1992.

[289]     Le 25 novembre 1999, le docteur Benoit Morin note également que le travailleur présente de multiples antécédents professionnels reliés au rachis dorsolombaire. Au total, il aurait été plus de 50 % de son temps en arrêt de travail depuis 1989. Il en vient à la conclusion que c’est l’évolution de la condition personnelle de spondylolyse qui explique la symptomatologie du travailleur et il reconnaît des limitations fonctionnelles en lien avec cette condition.

[290]     Devant ce portrait historique de la condition dorsolombaire du travailleur, le tribunal est d’avis que c’est l’opinion exprimée par le docteur Kornacki, dans son rapport complémentaire du 31 janvier 2011, qui doit être retenue.

[291]     Le tribunal rappelle que le docteur Kornacki considérait, le 12 novembre 2010, qu’il était nécessaire de faire passer une nouvelle IRM au travailleur afin de pouvoir comparer sa condition actuelle avec sa condition prélésionnelle et déterminer s’il y avait eu aggravation de sa condition. La docteure Schaefer s’est dit d’accord avec cette recommandation et celle de cesser les traitements de physiothérapie et d’ergothérapie en date du 25 novembre 2010, dans l’attente du résultat de l’IRM.

[292]     Après avoir pris connaissance du résultat de l’IRM, le docteur Kornacki produit son rapport complémentaire du 31 janvier 2011 dans lequel il indique que, compte tenu de l’information dont il dispose maintenant, il consolide le travailleur en date du 12 novembre 2010. Les traitements ne sont plus nécessaires, considérant que le travailleur a déjà bénéficié de près d’un an de traitements conservateurs qui se sont avérés inefficaces, que l’IRM ne démontre aucune nouvelle lésion, si ce n’est la condition de dégénérescence discale prélésionnelle qui est toujours présente. Il conclut que le travailleur est atteint d’un problème lombaire chronique de longue date, qu’il conserve une atteinte permanente de 2 % qui est existante depuis longtemps et qu’il n’y a pas eu augmentation de cette atteinte, ni des limitations fonctionnelles de classe 1 qui lui avaient déjà été reconnues avec une limite de poids de 15 à 20/25 kilogrammes.

[293]     Le tribunal constate qu’il était nécessaire d’obtenir cet examen d’IRM pour confirmer qu’il n’y avait plus d’amélioration prévisible de l’état du travailleur après cette date, considérant les résultats de cet examen. Ce n’est que le 31 janvier 2011 que ce constat est effectué et cela correspond à la date qui doit être retenue comme étant la date de consolidation de la lésion professionnelle.

[294]     Le tribunal ne retient pas la date du 4 avril 2011 proposée par le docteur Maurais. Le docteur Maurais n’objective pas une amélioration de la condition du travailleur après le 31 janvier 2011. Entre le 31 janvier 2011 et le 4 avril 2011, il n’y pas eu de traitements, ces derniers ayant été interrompus depuis le mois de novembre 2010. Pour ces mêmes motifs, le tribunal considère qu’il y avait suffisance de traitements à cette même date du 31 janvier 2011.

La question des limitations fonctionnelles

[295]     La question de l’existence d’un déficit anatomophysiologique additionnel n’étant pas en litige, il reste à décider de la question des limitations fonctionnelles résultant de la lésion professionnelle du 23 janvier 2010 en lien avec l’entorse lombaire subie par le travailleur.

[296]     La crédibilité et la fiabilité du travailleur doivent également être considérées pour l’évaluation de l’atteinte permanente à l’intégrité physique d’un travailleur et des limitations fonctionnelles en lien avec la lésion professionnelle, comme le souligne la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire STM (Gestion des lésions professionnelles) et Santizo[5] :

[109]     Quant à l’existence de séquelles, la jurisprudence veut qu’elles s’établissent, sauf pour des cas exceptionnels, par la présence de séquelles objectivées à l’examen et non par de simples allégations de douleur. Tel que décidé dans l’affaire M.B.I. Corexcel inc. et Larocque9, des douleurs qui ne sont pas confirmées par des signes cliniques objectivables ne pourront servir d’assise à l’octroi d’une atteinte permanente ou de limitations fonctionnelles. Une simple symptomatologie douloureuse ne constitue pas une séquelle indemnisable à moins de correspondre à des signes cliniques mesurables10 :

 

[110]     Tel que souligné dans l’affaire Gareau et Coopérative de solidarité d’aide domestique Marteau et Plumeau11 invoquée par l’employeur :

 

[28]   Pour se voir accorder une atteinte permanente, la travailleuse doit donc démontrer par une preuve médicale prépondérante qu’elle présente de façon permanente des signes cliniques objectifs tels que des spasmes musculaires, des diminutions d’amplitudes articulaires ou encore des anomalies neurologiques. De simples allégations de douleurs sont considérées comme des signes subjectifs et sont insuffisantes.

[111]     Cela est encore plus vrai lorsqu’un travailleur n’est pas crédible et exagère ou simule ses symptômes, comme en l’instance, et que les diminutions d’amplitudes articulaires trouvées, comme la légère perte de 10 degrés pour la rotation interne de l’épaule droite notée par la docteure Desloges, ne sont pas fiables et ne constituent donc nullement des signes objectifs.

 

[112]     Le tribunal conclut qu’aucune atteinte permanente et aucune limitation fonctionnelle n’est justifiée, les douleurs et symptômes allégués par la travailleuse étant non fiables et exagérés, voire inexistants. D’ailleurs, l’observation indirecte de la travailleuse par le docteur Pantel lorsqu’elle est dans la salle d’attente, le 4 mars 2010, permet de constater qu’elle marche sans boiterie et avec aise, enlève son manteau normalement, et a des mouvements fluides, sans signes de souffrance. De plus, dans son Rapport complémentaire du 6 mai 2010, le médecin de la travailleuse lui-même, le docteur Desmarais, prévoyait que la travailleuse ne conserverait pas d’atteinte permanente suite à sa lésion professionnelle.

                         

[références omises]

 

 

[297]     Ces principes étant exposés, le tribunal précise qu’il ne nie pas le fait que le travailleur présente certaines limitations fonctionnelles lui résultant d’événements antérieurs, mais, ce qu’il retient, c’est que la preuve ne permet pas d’objectiver une aggravation de la condition du travailleur en lien avec la lésion professionnelle survenue le 23 janvier 2010.

[298]     Les plaintes subjectives du travailleur sont les mêmes, il se plaint toujours des mêmes douleurs à la région lombaire basse qui irradient dans son membre inférieur gauche. Les mesures d’ankyloses ne sont pas vraiment significatives pour objectiver une aggravation. La variabilité des résultats d’un examinateur à un autre et le peu de crédibilité du travailleur ne permettent pas d’objectiver cette aggravation.

[299]     Dans les faits, le docteur Maurais ne retient qu’une perte de 30o d’extension lors de son examen objectif des amplitudes articulaires de la colonne dorsolombaire, toutes les autres mesures étant dans les limites de la normale.

[300]     Le tribunal constate, toutefois, qu’en physiothérapie l’extension de la colonne dorsolombaire est mesurée à 12° le 6 octobre 2010 et à 15° le 4 mars 2011. Ces mesures sont identiques à la perte d’extension de 20° constatée par le docteur Nolin en 1999. On ne peut donc retenir que le travailleur a objectivement aggravé sa condition prélésionnelle.

[301]     Le tribunal rappelle que le fardeau, de démontrer la nécessité de reconnaître des limitations fonctionnelles additionnelles, appartient au travailleur qui doit également démontrer que cette aggravation résulte de la lésion professionnelle et non de l’évolution de sa condition personnelle.

 

[302]     Le tribunal est d’avis que cette preuve n’a pas été faite. L’opinion du docteur Maurais est trop succincte pour être retenue. Le docteur Maurais ne discute pas suffisamment de la condition antérieure du travailleur, de l’impact de la condition personnelle et de ce qui justifie que l’on devrait reconnaître au travailleur des limitations fonctionnelles additionnelles en lien avec sa lésion professionnelle.

[303]     Le tribunal constate que le comportement du travailleur n’a pas changé dans ce dossier, même dans les jours suivant son accident du 23 janvier 2010, que celui-ci décrit comme grave. Le tribunal rappelle que le travailleur a indiqué avoir chuté dans le bas d’un escalier, il aurait arraché la rampe. Pourtant, ce grave accident ne l’a pas empêché de donner des formations les 16 et 17 février 2010 à Ste-Agathe, trois semaines après la survenance de cet événement. Pour se rendre à Ste-Agathe, le travailleur a dû conduire durant plus d’une heure trente consécutive, aller et retour, ce qui n’est pas très compatible avec la lésion professionnelle subie par le travailleur lors de cet événement.

[304]     Normalement une entorse lombaire se manifeste par des douleurs aigües et handicapantes qui iront en s’atténuant sur une période d’environ six semaines. Or, trois semaines après la survenance de cette entorse lombaire, le travailleur donne des cours de formation à plus de 90 km de son domicile et il s’y rend en automobile et fait l’aller-retour à deux reprises, ce qui implique quatre trajets de plus d’une heure trente. Les 24 et 25 février 2010, le travailleur donne une autre formation, cette fois à St-Jérôme.

[305]     Également, le tribunal tient compte de l’opinion de la docteure Schaefer qui en vient à la conclusion qu’il n’y a pas lieu de reconnaître des limitations fonctionnelles additionnelles, empêchant le travailleur de reprendre son emploi prélésionnel à la suite de l’événement du 2 juin 2011, après qu’elle ait eu connaissance du vidéo de filature et du rapport du docteur Giroux.

[306]     L’opinion de la docteure Schaefer est importante dans ce dossier puisque c’est elle qui assure le suivi du travailleur depuis le mois de janvier 2010, qui prend note de ses plaintes et de l’évolution de sa condition. C’est elle, également, qui refuse les assignations temporaires proposées par l’employeur sur la base des plaintes du travailleur, alors que ce dernier l’a induit en erreur sur sa réelle condition.

[307]     Pour ces différents motifs, le tribunal en vient à la conclusion que le travailleur ne conserve aucun déficit anatomophysiologique additionnel ou limitations fonctionnelles en lien avec sa lésion professionnelle survenue le 23 janvier 2010.

La capacité

[308]     Le tribunal est saisi d’une contestation du travailleur, quant à sa capacité à refaire son emploi prélésionnel. La décision contestée déclare que le travailleur est capable de reprendre son emploi prélésionnel à compter du 25 mai 2011. Cette décision a été rendue à la suite de l’avis du BEM du docteur Maurais, de la visite du poste de travail du travailleur et de l’intervention de l’ergothérapeute Bougie.

[309]     Après cette intervention, la CSST rend une décision déclarant que le travailleur peut reprendre son emploi prélésionnel sous réserve des aménagements acceptés par l’employeur, afin que le poste soit conforme aux limitations fonctionnelles de classe 2 de l’IRSST pour la colonne lombaire, reconnues par le docteur Maurais dans son avis.

[310]      Or, la loi prévoit que le travailleur a droit à la réadaptation si la lésion professionnelle qu’il a subie l’empêche de reprendre son emploi prélésionnel. C’est l’article 145 de la loi qui le prévoit :

145.  Le travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit, dans la mesure prévue par le présent chapitre, à la réadaptation que requiert son état en vue de sa réinsertion sociale et professionnelle.

__________

1985, c. 6, a. 145.

 

 

[311]     Compte tenu de la décision à laquelle en vient le tribunal relativement à l’absence d’atteinte permanente et de de limitations fonctionnelles additionnelles, résultant de la lésion professionnelle, et que cette lésion était consolidée en date du 31 janvier 2011, sans nécessité de soins après cette date, il en découle que le travailleur était capable d’exercer son emploi prélésionnel en date du 31 janvier 2011.

[312]     Bien que l’employeur n’ait pas contesté la décision de capacité rendue par la CSST, le travailleur l’a fait et le tribunal est saisi de cette contestation. L’employeur a contesté la décision de la CSST faisant suite à l’avis du BEM et la décision de capacité découle de cette décision.

[313]     La Commission des lésions professionnelles procède de novo sur les litiges qui lui sont soumis et l’article 377 de la loi lui donne le pouvoir de rendre la décision qui aurait dû être rendue.

377.  La Commission des lésions professionnelles a le pouvoir de décider de toute question de droit ou de fait nécessaire à l'exercice de sa compétence.

 

Elle peut confirmer, modifier ou infirmer la décision, l'ordre ou l'ordonnance contesté et, s'il y a lieu, rendre la décision, l'ordre ou l'ordonnance qui, à son avis, aurait dû être rendu en premier lieu.

__________

1985, c. 6, a. 377; 1997, c. 27, a. 24.

 

 

[314]     Dans les circonstances, considérant la décision du tribunal sur les questions médicales découlant de la lésion professionnelle du travailleur, le tribunal n’a d’autres choix que de conclure que le travailleur avait la capacité de reprendre son emploi prélésionnel à la date de consolidation de la lésion professionnelle, soit le 31 janvier 2011.

[315]     Encore ici, le tribunal ne conteste pas le fait que le travailleur présente des limitations fonctionnelles, qui lui sont reconnues depuis l’accident de 1998, et il ne conteste pas que ces limitations fonctionnelles peuvent rendre l’exercice d’un travail d’éducateur problématique. Mais pour avoir droit à la réadaptation, le travailleur doit démontrer qu’il conserve une atteinte permanente additionnelle lui résultant de sa nouvelle lésion professionnelle, ce qui n’est pas le cas, en l’espèce.

[316]     Le tribunal se permet certains commentaires additionnels relativement à la capacité du travailleur de refaire son emploi d’éducateur pour le compte de l’employeur.

[317]     L’ergothérapeute Bougie a conclu que le poste de travail du travailleur, à la résidence L’Orchidée, ne respecte pas les limitations fonctionnelles du travailleur reconnues par le docteur Maurais à cause, principalement, de la nécessité de monter et descendre plusieurs escaliers.

[318]     Le tribunal souligne que cette difficulté du travailleur, à monter et descendre des escaliers, était présente à la suite de la lésion professionnelle de 1998. Le docteur Gauthier notait dans un rapport du mois d’octobre 1999 que, si le travailleur descend un escalier ou une pente, il prend toujours appui sur sa jambe droite et non sur sa jambe gauche puisqu’à ce moment, s’il prend appui sur sa jambe gauche, la douleur va s’installer rapidement à la région lombaire basse. Cette limitation n’était donc pas nouvelle et était présente avant l’événement du mois de janvier 2010.

[319]     Le tribunal ne voit pas en quoi la condition du travailleur a évolué depuis cette époque. Malgré cette contrainte, le travailleur a occupé son emploi chez l’employeur pendant un an et demi avant de subir son premier accident du travail. De toute évidence, ses limitations fonctionnelles préexistantes ne l’empêchaient pas de faire ce travail.

[320]     Le tribunal se questionne également sur la position du travailleur, qui, même avant l’événement du 23 janvier 2010, considérait qu’il était incapable de faire cet emploi. Le travailleur a exprimé cela à l’ancien directeur général en 2009. Il en a discuté à plusieurs reprises avec son agente de la CSST. Il a même développé un projet pour se réorienter vers un nouvel emploi.

[321]     Pourtant, alors qu’il est en arrêt de travail à la suite de l’événement de juin 2011, le travailleur postule un emploi similaire à celui occupé chez l’employeur, à la Maison Clémentine, emploi qu’il occupe durant trois jours. Ce n’est pas lui qui quitte cet emploi, mais son nouvel employeur qui y met fin, parce qu’il a été informé du fait que le travailleur était en accident du travail durant cette période.

[322]     Le travailleur conteste la décision de la CSST qui le déclare apte à refaire son emploi prélésionnel, mais conteste également son congédiement et demande sa réintégration dans ce même emploi, qu’il se dit incapable d’occuper. Les prétentions du travailleur se contredisent. Le tribunal a beaucoup de difficulté à suivre le raisonnement du travailleur dans ce dossier.

[323]     Pour ces différents motifs, le tribunal conclut que le travailleur était capable d’exercer son emploi prélésionnel en date du 31 janvier 2011, eu égard à la preuve  présentée.

Les réclamations portant sur un nouvel événement survenu le 2 juin 2011

Dossier 452792-63-1110

[324]     Dans ce premier dossier portant sur l’événement survenu le 2 juin 2011, le tribunal doit disposer de la requête de l’employeur du 28 octobre 2011, par laquelle il conteste la décision de la révision administrative du 13 septembre 2011, déclarant que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 2 juin 2011. L’employeur conteste la survenance de cet accident, question dont le tribunal doit tout d’abord disposer.

[325]     Pour disposer de cette première question, il convient de préciser les diagnostics qui lient le tribunal. Ces derniers ont été énoncés dans le rapport médical du 5 juillet 2011, signé par la docteure Schaefer, où elle retient le diagnostic d’entorse lombaire, d’entorse cervicale et de sciatalgie gauche et de contusions, sans préciser le siège de ces dernières. Nous reviendrons plus loin sur la question du diagnostic d’entorse au genou gauche posé plus tard dans ce dossier.

[326]     Les dispositions pertinentes de la loi sont les suivantes :

2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :

 

« accident du travail » : un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle;

 

[…]

 

« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation;

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.

 

 

28.  Une blessure qui arrive sur les lieux du travail alors que le travailleur est à son travail est présumée une lésion professionnelle.

__________

1985, c. 6, a. 28.

 

 

[327]     Tel qu’on le constate, le législateur a prévu qu’un travailleur sera dispensé de faire la preuve qu’il a subi une lésion professionnelle s’il fait la preuve qu’il a subi une blessure sur les lieux de son travail alors qu’il est à son travail.

[328]     Dans l’affaire Boies et CSSS Québec Nord[6], une formation de trois juges administratifs a revu les conditions d’application de la présomption. Cette décision nous enseigne, qu’au stade de l’application de la présomption, la crédibilité du travailleur doit également être appréciée.

[329]     Dans Ville de Gatineau et Ménard et CSST[7], l’employeur invoquait la piètre crédibilité de la travailleuse pour demander que sa réclamation soit rejetée. Après avoir cité la décision Boies, la Commission des lésions professionnelles énonce ce qui suit :

[156]     Dans la présente affaire, le tribunal en vient à la conclusion que la version de la travailleuse jumelée à la preuve documentaire et aux résultats de la filature ne permet pas d’appliquer la présomption de lésion professionnelle.

 

[…]

 

[158]     Le tribunal est d’avis que la crédibilité de la travailleuse est sérieusement entachée en tenant compte de la preuve vidéo présentée à l’audience. En effet, les trois premières journées de filature sont effectuées environ deux semaines après l’expertise du docteur Couturier et deux semaines avant celle du docteur Giroux. Par surcroit, la dernière journée de filature a lieu la journée même où le docteur Giroux examine la travailleuse. Il s’agit donc d’une preuve contemporaine aux examens. Il aurait été normal de voir la travailleuse effectuer une gestuelle semblable à celle qu’elle décrit aux médecins évaluateurs. Or, les gestes et les mouvements que la travailleuse exécute lorsqu’elle est filmée à son insu sont bien différents à plusieurs occasions de ce que les médecins constatent lors de leurs questionnaires et de leurs examens cliniques. Le docteur Giroux dira qu’il ne s’agit pas de la même personne que celle qu’il a examinée. 

 

 

[330]     Dans CSSS Haut-Richelieu/Rouville et Langlois[8], nous pouvons lire :

[147]     Dans la décision Boies10, rendue par une formation de trois juges administratifs, la Commission des lésions professionnelles apporte des éclaircissements au sujet de la présomption prévue à l’article 28 de la loi :

 

3.3       La démonstration de l’existence des trois conditions d’ouverture à la présomption de l’article 28 de la loi

[104]    Ceci amène le tribunal à distinguer, comme il l’énonçait précédemment, le fardeau de la preuve des indices factuels présentés par le travailleur visant à démontrer l’existence des trois conditions de l’article 28 de la loi.

[105]    Dans le cadre de cet exercice d’analyse de la preuve, le tribunal aura à apprécier l’intégralité du dossier, à jauger les témoignages, leur crédibilité et à jongler avec certaines contradictions apparues en cours de route. Cet exercice d’appréciation permettra ultimement au juge d’être convaincu, selon la prépondérance de la preuve, que le travailleur a démontré ou non l’existence des trois conditions de l’article 28 de la loi, soit une blessure qui est arrivée sur les lieux du travail alors qu’il est à son travail.

[148]     Le tribunal partage ce point de vue : il doit dans le cadre de l’exercice d’analyse de la preuve, apprécier l’intégralité du dossier, jauger les témoignages et leur crédibilité et jongler avec les contradictions apparues en cours de route.

 

[…]

 

[166]     Le tribunal est d’avis que la crédibilité du travailler est sérieusement entachée en tenant compte de la preuve vidéo présentée à l’audience. [...]

 

[…]

 

[172]     Les contradictions mise en évidence par la preuve documentaire et vidéo ne permettent pas de retenir que le travailleur a subi le 24 février 2013 une blessure sur les lieux du travail alors qu’il se trouvait à son travail.

 

[173]     Pour ces raisons, le travailleur ne peut bénéficier de la présomption de lésion professionnelle de l’article 28 de la Loi.

 

 

[331]     Dans CSSS Jeanne-Mance et Mentor[9], nous pouvons lire :

[82]      La Commission des lésions professionnelles note ainsi qu’à compter du 25 octobre 2011, il y a une évolution de l’événement accidentel. Comme il a été dit auparavant, la travailleuse n’a pas à décrire qu’il est survenu un événement imprévu et soudain pour qu’on puisse appliquer la présomption de lésion professionnelle. Toutefois, dans une décision rendue par une formation de trois juges le 14 avril 20112 la Commission des lésions professionnelles précise ce qui suit :

 

[185]       Il n’existe aucune condition d’application de la présomption de l’article 28 de la loi, autre que celles énoncées à cette disposition. Toutefois, certains indices peuvent être pris en compte par le tribunal dans le cadre de l’exercice d’appréciation de la force probante de la version du travailleur visant la démonstration de ces trois conditions, notamment :

[…]

 

-              la crédibilité du travailleur (lorsque les versions de l’événement en cause ou les circonstances d’apparition de la blessure sont imprécises, incohérentes, voire contradictoires, ou lorsque le travailleur bonifie sa version à chaque occasion);

[83]      Or, c’est le cas qu’on retrouve ici alors que le tribunal constate que la travailleuse a bonifié sa version à plusieurs occasions, ce qui affecte la force probante de la qualité de son témoignage reçu en audience.

 

[84]      L’accumulation de ces diverses imprécisions et additions conduit le tribunal à mettre en doute la crédibilité de la travailleuse. Ne sachant démêler le vrai du faux, le présent tribunal ne peut porter foi à la version fournie par la travailleuse et estime que la preuve prépondérante ne permet pas de conclure que les douleurs sont survenues au travail.

 

[85]      C’est ainsi que la Commission des lésions professionnelles ne peut déterminer que l’entorse des épaules et/ou l’entorse cervicale s’est produite le 9 février 2011 alors que la travailleuse exécutait ses tâches de travail. La présomption de lésion professionnelle, telle qu’elle est décrite à l’article 28 de la loi, ne peut donc trouver son application. Pour les mêmes motifs, le tribunal ne peut davantage déclarer que la travailleuse a subi un accident du travail à cette même date, l’événement imprévu et soudain décrit par la travailleuse n’étant pas crédible.

                         

2      2011 QCCLP 2775.

[332]     Appliquant ces principes aux faits de la présente affaire, le tribunal retient les éléments suivants.

[333]     Dans son témoignage, le travailleur indique s’être blessé à la hanche gauche, au dos et s’être fait une coupure à la main droite, lors de sa chute alors qu’il lavait une table de cuisine.

[334]     Selon le dossier hospitalier, l’infirmière au triage et le médecin ont noté que le travailleur se plaignait d’une douleur à la hanche gauche, une douleur lombaire (connue) et une douleur cervicale.

[335]     La jurisprudence du tribunal a bien établi qu’un diagnostic de « douleur », sans plus de précision, n’était pas un diagnostic de blessure au sens de l’article 28 de la loi. Le tribunal ne peut donc retenir le diagnostic de douleur à la hanche comme étant un diagnostic de blessure, en l’absence de précisions quant à cette douleur alléguée.

[336]     Quant au diagnostic de douleur lombaire, il a été précisé dans les rapports médicaux de la docteure Schaefer, en date du 5 juillet 2011, comme étant une entorse lombaire. Toutefois, dans les notes de l’établissement hospitalier, on réfère à une douleur lombaire connue. Il est clairement en preuve que le travailleur était symptomatique de sa condition lombaire avant la survenance de la lésion professionnelle du 2 juin 2011. Des radiographies demandées pour les douleurs lombaires ne démontrent aucune fracture, mais de l’ostéophytose lombaire avec des signes compatibles avec un spondylolyse en L5.

[337]     Il en est de même pour la condition cervicale. La preuve révèle que le travailleur s’est vu reconnaître, par la SAAQ, une atteinte permanente en lien avec des séquelles d’entorse cervicale, le 8 janvier 2008, à la suite d’un accident d’automobile. Il faut donc en déduire que la condition cervicale du travailleur était symptomatique bien avant l’événement du 2 juin 2011.

[338]     Dans son témoignage, le travailleur indique qu’après son accident du 2 juin 2011, il n’allait pas bien, il avait « mal au dos » et se « gelait » pour enlever la douleur. Il n’a pas fait mention d’une douleur cervicale.

[339]     Normalement, une entorse cervicale et une entorse lombaire survenues en même temps, lors d’un même événement, auraient dû handicaper sérieusement le travailleur le jour même de l’accident et dans les jours suivants immédiatement cet accident. Ce ne fut pas le cas.

[340]     Le 4 juin 2011, soit deux jours après l’événement allégué, le travailleur donne une formation à Val-David pour la Commission scolaire des Laurentides. Il conduit son véhicule aller-retour deux jours consécutifs sur une distance de 92 km par trajet, selon sa propre facturation.

[341]     Les 7 et 8 juin 2011, il donne d’autres formations pour la Commission scolaire des Laurentides. Le travailleur facture un déplacement de 361 km pour ces deux jours également, et ce, cinq jours après son accident.

[342]     Le tribunal considère que l’adoption d’une position assise prolongée durant près d’une heure trente consécutive, qu’implique la conduite d’un véhicule automobile pour se rendre et revenir de cette destination, est incompatible avec une entorse lombaire tout comme elle l’est pour un diagnostic d’entorse cervicale récente, la conduite automobile impliquant d’être en mesure de bouger la tête pour vérifier ses angles morts. Ces faits rendent peu crédible la version du travailleur, voulant qu’il se soit infligé une nouvelle entorse cervicale et lombaire le 2 juin 2011. Il semble plutôt qu’il s’agisse des séquelles des entorses lombaires et cervicales connues du travailleur et préexistantes à un événement, qui serait survenu le 2 juin 2011.

[343]     Dans ce contexte, le tribunal considère que le travailleur ne peut bénéficier de la présomption de lésion professionnelle prévue à l’article 28 de la loi puisqu’il n’a pas fait la preuve qu’il a subi une blessure sur les lieux de son travail alors qu’il exerçait son travail.

[344]     Le travailleur a-t-il établi qu’il avait subi un accident du travail selon les dispositions de l’article 2 de la loi. Pour des raisons similaires, le tribunal est d’avis que non.

[345]     Le tribunal a beaucoup de difficulté à croire la version du travailleur quant à la survenance du fait accidentel survenu le 2 juin 2011. Tout d’abord, cette version comporte son lot d’invraisemblances.

[346]     Le travailleur indique que c’est en appuyant sa main gauche sur une chaise pour se soutenir, alors qu’il s’étire pour laver l’extrémité de la table avec sa main droite, que la chaise bascule et cause sa chute violente sur le plancher. Le tribunal ne comprend pas pourquoi, si la chaise s’est renversée, alors qu’il s’étirait au-dessus de la table pour la laver, qu’il n’ait pas heurté la table en premier, puisque tout le poids de son corps est au-dessus de la table à ce moment précis. Le travailleur n’a jamais mentionné qu’il avait heurté la table, ce qui semble peu probable.

[347]     Également, le tribunal trouve étrange que le travailleur allègue s’être coupé à la main droite alors que ni le dossier hospitalier ni aucun certificat médical n’en font état. Il s’agit, de l’avis du tribunal, de la lésion la plus apparente qui serait passée inaperçue à l’hôpital et chez le médecin du travailleur. Il est également assez étrange que le collègue de travail, auquel était jumelé le travailleur le soir en question, n’ait rien vu, ni rien entendu qu’il n’a pas été appelé pour constater la coupure, prodiguer les premiers soins ou même pour simplement appeler de l’aide.

[348]     Certaines coïncidences dans ce dossier rendent la version du travailleur peu crédible. Outre le fait que le travailleur compte maintenant plus de 30 réclamations pour des accidents du travail, ce qui est le reflet d’une malchance qui défie toute statistique, on nous demande de croire à une coïncidence, si ce dernier accident survient, dès le moment où le travailleur débute ses premières tâches manuelles et qu’il est seul dans la cuisine et alors, qu’une heure trente plus tôt, il manifeste à la chef d’équipe Diane Beaupied de la CSST son insatisfaction quant à la décision, le déclarant apte à refaire son emploi.

[349]     Le tribunal constate que le travailleur, qui se voit confronter à l’obligation de retourner dans un emploi qu’il ne désire plus, est victime d’un autre accident du travail. Il en sera de même pour l’accident d’automobile qui survient le 31 août 2011, alors qu’il est piéton. C’est quelques jours, après la rédaction du rapport d’enquête de la CSST et de la communication du rapport de filature qui révèlent les mensonges et omissions du travailleur, qui ont motivé son abandon par son médecin traitant, ayant été informé par la CSST de ses agissements.

[350]     Étrange également que le travailleur obtienne la même médication à la suite de son accident du travail du 2 juin 2011 et de son accident d’automobile du 31 août 2011, soit du Supeudol, alors qu’il a admis, dans son témoignage, être dépendant de cette substance et avoir manipulé ses médecins pour en obtenir.

[351]     Le tribunal constate également que le travailleur s’est relativement bien sorti de son accident d’automobile, puisqu’on a retenu comme diagnostic que des abrasions légères et un diagnostic de contusion alors que l’on soupçonnait un TCC. Ce qui explique, sans doute, qu’il a pu continuer à s’acheter du matériel au magasin Walmart de Joliette, le 21 septembre 2012, soit trois semaines après cet accident, afin de lui permettre de continuer à donner ses cours de formation, alors qu’il est indemnisé par la SAAQ et la CSST.

[352]     Le comportement du travailleur est caractéristique d’un individu, qui, au fil des années, a appris à bien connaître le système et à l’utiliser à son bénéfice. Pour ce faire, il manipule ses médecins, les agents de la CSST, les médecins examinateurs et même son employeur, ce qu’il tente, d’ailleurs, de faire lorsque la CSST lui impose un retour au travail en novembre 2012 et qu’il tente d’obtenir de son employeur une lettre de complaisance lui permettant de continuer à recevoir des prestations de la CSST, sans avoir à se présenter au travail.

[353]     Malheureusement, pour lui, sa crédibilité était son atout le plus précieux et il l’a perdue. De façon candide, le travailleur reconnaît qu’il a menti, qu’il a triché et qu’il a manipulé ses médecins. Il impute un tel comportement à son problème de consommation qu’il serait en train de régler. Il demande qu’on le croie maintenant. Malheureusement pour lui, tout ce dossier est teinté par le mensonge, la manipulation et la duperie et le tribunal n’est pas en mesure de séparer le vrai du faux, le bon grain de l’ivraie et le travailleur devra vivre avec les conséquences des gestes qu’il a posés.

[354]     Pour ces motifs, le tribunal ne croit pas le travailleur et conclut qu’il n’a pas fait la preuve qu’un accident du travail est survenu le 2 juin 2011 qui aurait pu lui causer une lésion professionnelle, sa réclamation est donc rejetée.

Dossier 458337-63-1112

[355]     Dans ce dossier, le tribunal doit se prononcer sur la requête de l’employeur qui conteste une décision de la CSST rendue le 29 novembre 2011, à la suite d’une révision administrative, déclarant que les diagnostics d’entorse lombaire et de sciatalgie sont en relation avec la lésion professionnelle du 2 juin 2011.

[356]     Considérant la décision rendue dans le dossier précédant, la décision de la CSST devient sans objet, vu l’absence de lésion professionnelle survenue le 2 juin 2011, et le tribunal n’a reçu aucune preuve lui démontrant que ces diagnostics sont en relation avec une autre lésion professionnelle.

Dossier 484021-63-1210

[357]     Dans ce dossier, le tribunal doit se prononcer sur la requête du travailleur qui conteste une décision de la CSST rendue le 28 septembre 2012, à la suite de la révision administrative, déclarant que le diagnostic d’entorse au genou gauche n’est pas en relation avec la lésion professionnelle du 2 juin 2011.

[358]     Le diagnostic d’entorse au genou gauche étant un diagnostic de blessure au sens de la loi, le tribunal doit, dans un premier temps, déterminer si le travailleur peut bénéficier de la présomption prévue à l’article 28 de la loi.

[359]     Selon la preuve au dossier, le travailleur était symptomatique de son genou gauche avant l’événement allégué du 2 juin 2011. Dans un rapport portant sur les capacités du travailleur, confectionné le 6 octobre 2010, on retrouve une mention voulant que le travailleur utilise sa canne en fonction du genou qui le fait le plus souffrir.

[360]     Dans ce même rapport, le travailleur rapporte avoir fait une chute sur son genou gauche le 26 août 2010, alors qu’il n’est pas au travail. À plusieurs reprises dans son témoignage, le travailleur a reconnu utiliser une canne pour ses déplacements. Force est d’admettre que le travailleur était symptomatique de sa condition au genou gauche avant le 2 juin 2011, ce qui est un indice qui pourrait nous amener à conclure que l’entorse du genou gauche n’est pas survenue au travail, alors que le travailleur exerce son travail, puisque cette condition était déjà symptomatique avant l’événement du 2 juin 2011.

[361]     Le diagnostic d’entorse au genou gauche n’est posé que le 30 août 2011 par la docteure Schaefer, soit près de trois mois après l’incident allégué du 2 juin 2011, ce qui est inhabituel pour un diagnostic d’entorse. Le tribunal n’a pas d’explications pour justifier un aussi long délai.

[362]     La preuve révèle que le travailleur a quitté l’établissement de son employeur en marchant pour se rendre à l’hôpital. Aucun témoignage n’a établi que sa démarche était anormale. Les notes de l’infirmière indiquent que le travailleur a de la difficulté à déplier sa jambe gauche, mais elles indiquent également que le travailleur quitte l’hôpital, par ses propres moyens, après avoir reçu une sédation. Il est noté qu’il circule seul avec sa canne et « la démarche est bonne », ce qui n’est pas très compatible avec une entorse au genou récente.

[363]     Mais ce qui est le plus déterminant, selon le tribunal, c’est le fait que le travailleur déclare à son agente de la CSST, le 12 juillet 2011, qu’il a tellement de douleur à la jambe et au genou gauche que ça l’empêche de marcher et de faire toute activité durant la journée, qu’il se voit comme une loque humaine, que son médecin songe même à le faire reconnaître invalide par la Régie des rentes du Québec, alors qu’il donne des formations les 4, 7 et 8 juin 2011 à plus de 90 km de chez lui. Il peut conduire pour s’y rendre et en revenir, entrer et sortir de son local avec du matériel et de l’équipement dans les mains, monter et descendre des escaliers, garder une position debout pour certaines présentations, alors qu’il dit s’être infligé une entorse au genou gauche, deux jours plus tôt. Cela est invraisemblable. Le travailleur a peut-être des douleurs au genou gauche, mais, de toute évidence, cette blessure n’est pas survenue sur les lieux du travail, alors qu’il exerce son travail.

 

[364]     Pour ces différents motifs, le tribunal ne croit pas que le travailleur s’est infligé une entorse au genou gauche sur les lieux de son travail le 2 juin 2011 et conclut que le travailleur ne peut bénéficier de la présomption prévue à l’article 28 de la loi pour cette blessure alléguée.

[365]     Quant à savoir si le travailleur a subi un accident du travail à cette même date ayant pu lui causer une entorse au genou gauche, en application de l’article 2 de la loi, pour les motifs précédemment expliqués, le tribunal est d’avis que le travailleur n’a pas fait la preuve qu’il a subi un accident du travail le 2 juin 2011 ayant pu lui causer une entorse au genou gauche.

[366]     Le tribunal confirme donc la décision de la CSST déclarant qu’il n’y a pas de relation entre l’entorse au genou gauche du travailleur et un accident du travail qui serait survenu le 2 juin 2011.

Dossier 491761-63-1301

[367]     Dans ce dossier, le tribunal doit disposer de la requête de l’employeur, déposée à la Commission des lésions professionnelles le 10 janvier 2013, qui conteste une décision conjointe de la CSST et de la SAAQ, rendue le 10 décembre 2012, laquelle reconsidère la décision conjointe rendue le 15 novembre 2012, qui déclare que le droit de retour au travail du travailleur n’est pas expiré et que le travailleur n’a plus droit à l’indemnité de remplacement du revenu.

[368]     Le droit de retour au travail, dont il est question dans ce dossier, résulte d’une lésion professionnelle qui serait survenue le 2 juin 2011.

[369]     Compte tenu de la décision du tribunal quant à l’inexistence de cette lésion professionnelle, le tribunal considère que la décision conjointe rendue dans ce dossier, quant au droit de retour au travail du travailleur, devient sans objet puisqu’il ne peut y avoir de droit de retour au travail, en l’absence de lésion professionnelle.

Dossier 536543-63-1403

[370]     Dans ce dossier, le tribunal doit disposer de la requête du travailleur, déposée à la Commission des lésions professionnelles le 14 mars 2014, par laquelle il conteste une décision du conciliateur décideur de la CSST rendue le 5 février 2014, déclarant irrecevable sa plainte formulée en vertu des dispositions de l’article 32 de la loi.

[371]     Les dispositions pertinentes de la loi à la solution de ce litige sont les suivantes :

 

32.  L'employeur ne peut congédier, suspendre ou déplacer un travailleur, exercer à son endroit des mesures discriminatoires ou de représailles ou lui imposer toute autre sanction parce qu'il a été victime d'une lésion professionnelle ou à cause de l'exercice d'un droit que lui confère la présente loi.

 

Le travailleur qui croit avoir été l'objet d'une sanction ou d'une mesure visée dans le premier alinéa peut, à son choix, recourir à la procédure de griefs prévue par la convention collective qui lui est applicable ou soumettre une plainte à la Commission conformément à l'article 253.

__________

1985, c. 6, a. 32.

 

 

252.  La Commission a compétence exclusive pour disposer de toute plainte soumise en vertu de l'article 32 et de toute demande d'intervention faite en vertu des articles 245, 246 et 251.

__________

1985, c. 6, a. 252; 1997, c. 27, a. 9.

 

 

253.  Une plainte en vertu de l'article 32 doit être faite par écrit dans les 30 jours de la connaissance de l'acte, de la sanction ou de la mesure dont le travailleur se plaint.

 

Le travailleur transmet copie de cette plainte à l'employeur.

__________

1985, c. 6, a. 253.

 

 

254.  Si le travailleur qui soumet une plainte en vertu de l'article 32 y consent, la Commission peut tenter de concilier ce travailleur et son employeur.

__________

1985, c. 6, a. 254.

 

 

255.  S'il est établi à la satisfaction de la Commission que le travailleur a été l'objet d'une sanction ou d'une mesure visée dans l'article 32 dans les six mois de la date où il a été victime d'une lésion professionnelle ou de la date où il a exercé un droit que lui confère la présente loi, il y a présomption en faveur du travailleur que la sanction lui a été imposée ou que la mesure a été prise contre lui parce qu'il a été victime d'une lésion professionnelle ou à cause de l'exercice de ce droit.

 

Dans ce cas, il incombe à l'employeur de prouver qu'il a pris cette sanction ou cette mesure à l'égard du travailleur pour une autre cause juste et suffisante.

__________

1985, c. 6, a. 255.

 

 

257.  Lorsque la Commission dispose d'une plainte soumise en vertu de l'article 32, elle peut ordonner à l'employeur de réintégrer le travailleur dans son emploi avec tous ses droits et privilèges, d'annuler une sanction ou de cesser d'exercer des mesures discriminatoires ou de représailles à l'endroit du travailleur et de verser à celui-ci l'équivalent du salaire et des avantages dont il a été privé.

__________

1985, c. 6, a. 257.

 

 

349.  La Commission a compétence exclusive pour examiner et décider toute question visée dans la présente loi, à moins qu'une disposition particulière ne donne compétence à une autre personne ou à un autre organisme.

__________

1985, c. 6, a. 349; 1997, c. 27, a. 12.

 

 

[372]     Dans un premier temps, le tribunal doit décider de la recevabilité de la plainte. Le conciliateur décideur, après avoir entendu la preuve, en vient à la conclusion que le travailleur a été informé de son congédiement le 12 décembre 2012, lors d’une conversation téléphonique avec le directeur général de l’employeur, soit monsieur Pellerin.

[373]     Sur cette question, la preuve demeure contradictoire. Le tribunal est enclin à croire en partie les deux versions données, tant celle du directeur général que celle du travailleur.

[374]     Le tribunal retient de la preuve que le directeur général, lors de la conversation téléphonique du 12 décembre 2012, a sans doute utilisé les mots « bris du lien de confiance » parce que le travailleur les a rapportés à son représentant syndical, monsieur Lapierre, qui en a lui-même fait part à madame De L’Étoile-Martin, agente de la CSST, lors de la conversation du 13 décembre 2012 dont le verbatim a été transcrit dans les notes évolutives.

[375]     Mais monsieur Pellerin a, sans doute également, indiqué au travailleur qu’il n’avait pas de poste à lui offrir, sans utiliser le mot « congédiement ». Le tribunal ne doute pas que, dans l’esprit de l’employeur, ces deux expressions avaient la même signification, mais, dans l’esprit du travailleur, on a créé une confusion. Cette confusion s’est confirmée lorsque le représentant syndical mentionne au travailleur que cela n’était pas trop grave si l’employeur n’avait pas de poste à offrir au travailleur pour le moment, qu’il pourrait en obtenir un, lors d’un prochain affichage de poste.

[376]     Malgré le fait que la crédibilité du travailleur soit faible, le tribunal retient cette version, particulièrement parce qu’elle est corroborée par les propos tenus par le représentant syndical à l’agente de la CSST, le 13 décembre 2012. Il est également raisonnable de croire que le syndicat n’a pas cru être en présence d’un véritable congédiement du travailleur puisque le syndicat n’a pas été informé par écrit du congédiement du travailleur, tel que le prévoient les dispositions des articles 6.14 et 6.16 de la convention collective.

[377]     Ne l’ayant pas été et le travailleur n’ayant reçu aucune lettre confirmant son congédiement, en date du 12 décembre 2012, il était raisonnable pour le syndicat de croire que le travailleur n’était pas définitivement congédié et, tel que le rapporte le travailleur, qu’on ne lui avait qu’indiqué que l’employeur n’avait pas de poste disponible à lui offrir, pour le moment.

[378]     On peut arguer que le fait que l’employeur n’offre pas de poste est également une mesure de représailles qui aurait pu être contestée par le biais de l’article 32 de la loi, c’est un fait. Mais le droit de contester une mesure appartient au travailleur, il peut choisir de ne pas contester le fait qu’on ne lui offre pas de poste, à un moment précis, parce que ça lui convient, sans pour autant renoncer à contester la rupture définitive de son lien d’emploi.

[379]     Il est en preuve que le travailleur n’a jamais renoncé à contester la décision de l’employeur de le congédier puisque, dès qu’il a reçu le relevé d’emploi, transmis par l’employeur le 24 décembre 2012 faisant clairement état de son congédiement, il a déposé une plainte en vertu de l’article 32, dans le délai de 30 jours prévu par la loi.

[380]     Le tribunal souligne également qu’il doit tenir compte de l’environnement juridique dans lequel évoluent les parties qui sont liées par une convention collective. Cette dernière est claire quant au fait qu’un travailleur doit être informé, par écrit, de son congédiement et des motifs qui le justifient.

[381]     Le tribunal a pris connaissance d’un certain courant jurisprudentiel de la Commission des lésions professionnelles, voulant que le tribunal n’agisse pas comme un arbitre de griefs et que la Commission des lésions professionnelles n’est pas l’endroit approprié pour exiger l’application des dispositions de la convention collective. Avec égards, le tribunal ne croit pas que l’on doive ignorer les dispositions de la convention collective conclue entre les parties.

[382]     Tout d’abord, parce que plusieurs dispositions de la loi y réfèrent et exigent qu’on en tienne compte. À titre d’illustration, les dispositions de l’article 238 de la loi prévoient que le droit à la réintégration d’un travailleur s’exerce, en tenant compte des dispositions pertinentes de la convention collective :

238.  Lorsqu'un employeur lié par une convention collective ne réintègre pas un travailleur qui est redevenu capable d'exercer son emploi pour le motif que ce travailleur aurait été déplacé, suspendu, licencié, congédié ou qu'il aurait autrement perdu son emploi s'il avait été au travail, les dispositions pertinentes de la convention collective s'appliquent comme si ce travailleur avait été au travail lors de ce déplacement, de cette suspension, de ce licenciement, de ce congédiement ou de cette perte d'emploi.

__________

1985, c. 6, a. 238.

 

 

[383]     Comment ne pas considérer la principale disposition de la loi sur cette question, soit son article 4, qui prévoit qu’une convention collective peut prévoir des dispositions plus avantageuses que la loi.

4. La présente loi est d'ordre public.

 

Cependant, une convention ou une entente ou un décret qui y donne effet peut prévoir pour un travailleur des dispositions plus avantageuses que celles que prévoit la présente loi.

__________

1985, c. 6, a. 4.

 

 

[384]     L’employeur plaide qu’un congédiement peut être communiqué verbalement. Le tribunal en convient, sauf si les parties ont convenu que, pour être valide, il devait prendre la forme écrite, ce qui est le cas en l’espèce.

[385]     Le tribunal peut-il ignorer cette disposition de la convention collective, sous prétexte que le travailleur a choisi de déposer une plainte en vertu de l’article 32 de la loi plutôt que la voie du grief? Le tribunal est d’avis que non. La jurisprudence, portant sur l’interprétation de dispositions similaires à celles liant le travailleur à l’employeur, est très claire quant au fait qu’un avis de congédiement verbal n’est pas valide s’il n’est pas communiqué par écrit et qu’il est contesté par le dépôt d’un grief.

[386]     Retenir une interprétation voulant qu’un tel avis de congédiement soit valide, si le travailleur choisit de déposer une plainte en vertu de l’article 32 de la loi plutôt qu’un grief, conduit à une situation absurde, comme dans le présent cas. Il faudrait conclure que le travailleur a moins de droits que celui qui choisit l’option du grief, puisqu’il ne pourrait invoquer le non-respect de formalités prévues par sa convention collective, dans le cas d’une plainte en vertu de l’article 32 de la loi. Nous ne pensons pas que c’est ce que le législateur a voulu, en offrant une option aux travailleurs liés par une convention collective.

[387]     Le tribunal considère que le droit de recevoir un avis écrit l’informant de son congédiement est, comme le permet l’article 4 de la loi, une disposition plus avantageuse que ce que prévoit la loi. L’avis écrit dissipe tout doute quant à la nature de la mesure imposée, quant au moment où le travailleur en prend connaissance et si la convention collective oblige l’employeur à communiquer ses motifs de congédiement, l’énonciation de ces derniers circonscrit le débat devant le décideur sur les motifs de la mesure.

[388]     Dans un tel contexte, le tribunal considère qu’il n’a pas d’autre choix que d’en tenir compte et d’appliquer ce qui constitue la loi des parties, soit la procédure d’imposition des mesures disciplinaires convenue entre les parties. Le tribunal considère avoir les pouvoirs de le faire, tel que le mentionne la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Dionne et Ville de Montréal[10], où nous pouvons lire :

[35]      CONSIDÉRANT que dans un tel contexte l’interprétation de certains articles de la convention collective peut aider à décider si la plainte de la travailleuse est recevable et non à invalider l’une de ces dispositions;

 

[36]      CONSIDÉRANT que la travailleuse a choisi de ne pas recourir à la procédure de grief prévue par la convention collective ce qui est, en vertu de la loi, son droit le plus légitime;

 

[37]      CONSIDÉRANT que la travailleuse a plutôt opté pour déposer une plainte à la CSST;

 

[38]      CONSIDÉRANT que dans le cadre de cette demande le tribunal peut et doit prendre connaissance des dispositions de la convention collective;

 

[39]      CONSIDÉRANT que le représentant de l’employeur réfère lui-même aux dispositions de la convention collective dans son argumentation écrite amenant d’une certaine façon la soussignée à examiner ces dispositions et à les interpréter;

 

[40]      CONSIDÉRANT que la jurisprudence à laquelle il réfère est de peu d’utilité pour régler le présent litige compte tenu des dispositions de la loi et du contexte dans lequel la soussignée doit interpréter la convention collective;

 

[41]      CONSIDÉRANT que le représentant de l’employeur n’a par ailleurs soumis aucun commentaire concernant le libellé même de l’article 32 qui prévoit expressément le choix pour un travailleur d’opter entre une procédure de grief ou soumettre une plainte à la CSST conformément à l’article 253 de la loi;

 

[42]      CONSIDÉRANT que pour l’ensemble de ces motifs, la Commission des lésions professionnelles déclare qu’elle peut interpréter certaines dispositions de la convention collective liant les parties.

[389]     Ces principes étant exposés, le tribunal en vient à la conclusion que la demande du travailleur est recevable puisqu’aucun avis écrit n’a été communiqué au travailleur dans les cinq jours ouvrables suivant la conversation téléphonique du 12 décembre 2012, lors de laquelle l’employeur prétend avoir congédié le travailleur. En l’absence de cet avis exigé par l’article 6.14 de la convention collective, communiqué dans le délai prescrit, le travailleur pouvait considérer qu’il ne faisait pas l’objet d’un congédiement puisque les formalités prévues à la convention collective n’étaient pas suivies.

[390]     Le tribunal réitère qu’il ne peut y avoir deux procédures pour imposer un congédiement à un travailleur visé par une convention collective, selon que le travailleur choisisse de déposer son recours en vertu de la convention collective ou en vertu de l’article 32 de la loi. La procédure prévue à la convention doit être appliquée et la contravention à cette obligation doit être sanctionnée par le tribunal, qui est appelé à disposer de la plainte du travailleur.

[391]     Après avoir fait une revue de la jurisprudence sur cette question, le tribunal retient qu’il ne s’agit pas ici d’une simple question de procédure. Dans l’affaire Syndicat des travailleurs et travailleuses du Cimetière Notre-Dame-des-Neiges (CSN) c. Ladouceur[11], la Cour supérieure révise et annule une décision d’un arbitre de griefs qui n’avait pas considéré des dispositions similaires comme étant impératives.

[392]     Après une révision exhaustive de la jurisprudence sur la question, la Cour Supérieure en vient à la conclusion que ces exigences procédurales prévues à la convention collective sont, en fait, des règles d’équité procédurale et de justice naturelle, dont le non-respect vicie tout le processus et la mesure imposée. Elle casse la décision de l’arbitre qu’elle considère, dans les circonstances, comme étant déraisonnable[12] :

[64]      Dans le cas sous étude, le tribunal estime que la dérogation à la règle prévue à l’article 8.02 a) et b) fait en sorte que le plaignant n’a pas eu en temps utile, soit lors de la rencontre, l’information essentielle à son droit de se défendre et de donner son point de vue avant le congédiement. Cette étape fait partie du processus mis de l’avant par les parties dans la convention collective et portant sur les faits qui feront l’objet du débat devant l’arbitre de manière à pouvoir préparer une défense pleine et entière.

 

[65]      La décision de l’arbitre sur ce point est déraisonnable. La sanction applicable est l’annulation du congédiement.

 

[…]

 

[72]      D’une part, que l’on soit en matière disciplinaire ou administrative, il est acquis que ce qu’il faut considérer à partir du texte de cet article est que la décision d’imposer un congédiement soit communiquée dans un délai de 15 jours de la connaissance par l’employeur des faits liés à l’incident. Si on retient l’interprétation de l’arbitre, cette disposition ne s’appliquerait que dans les cas de mesures disciplinaires référant à des faits ou incidents. Ici, la décision de congédier a été prise par suite de la condamnation.

 

[…]

 

[210]    L’imposition d’une mesure telle un congédiement, doit respecter ce que les parties se sont elles-mêmes entendues d’imposer, soit la convention collective. Si les règles permettaient de congédier sans donner de motifs et de mettre en preuve tout ce que l’on considère pertinent au congédiement et que l’arbitre ait pu se prononcer sur tout ce qui a été mis en preuve (sans obligation de déterminer au départ les motifs du congédiement) dans un tel cas, la conclusion du présent tribunal serait, on le comprend, bien différente.

  

[211]    La réalité juridique est très différente. L’arbitre devait s’assurer que le processus établi par la convention collective était bien suivi et devait respecter les règles d’équité procédurale et de justice naturelle. Cela n’a pas été respecté et doit entraîner la conclusion à l’effet que la requête introductive présentée est bien fondée.

 

            [notre soulignement]

[393]     Le seul avis écrit, transmis au travailleur l’informant de son congédiement, est le relevé d’emploi communiqué au plus tôt, en date du 24 décembre 2012, puisqu’il est daté de ce jour. La convention collective prévoit la transmission d’un avis écrit informant le travailleur de la mesure. Au stade de la recevabilité de la plainte, ce relevé peut constituer l’avis écrit requis par l’article 6.14 de la convention. Le tribunal discutera, ci-après, de sa validité quant au contenu et à sa suffisance.

[394]     Le 15 janvier 2013, le travailleur dépose sa plainte invoquant avoir fait l’objet d’un congédiement. Sa plainte est donc formulée dans le délai de 30 jours prévu par la loi et elle est donc recevable.

La preuve d’une cause juste et suffisante

[395]     La preuve révèle que le travailleur a subi une sanction disciplinaire, soit un congédiement, dans les six mois de la date où il a été victime d’une lésion professionnelle ou de l’exercice d’un droit prévu à la loi. Il est en preuve que le travailleur exerçait son droit de retour au travail ou, à tout le moins, son droit de contester certaines décisions rendues par la CSST dans son dossier.

[396]     Bien que le tribunal en vienne à la conclusion qu’il n’y a pas eu de lésion professionnelle subie par le travailleur, le 2 juin 2011, il est reconnu que l’exercice du droit de contestation d’une décision rendue par la CSST constitue l’exercice d’un droit prévu à la loi[13].

[397]     Or, dans la période contemporaine à son congédiement, le travailleur a contesté plusieurs décisions rendues quant aux trop-perçus qui lui étaient réclamés, soit les 30 octobre, 5 et 28 novembre 2012. Il a également contesté, le 9 octobre 2012, la décision qui refusait de reconnaître que son entorse au genou gauche était en relation avec l’événement du 2 juin 2011. Il est donc en preuve que le travailleur a subi une sanction disciplinaire dans les six mois de l’exercice d’un droit prévu à la loi et qu’il a déposé sa plainte dans les 30 jours suivants cette sanction. Le travailleur est donc en droit de bénéficier de la présomption prévue à l’article 255 de la loi, il y a donc présomption que la sanction imposée au travailleur l’a été à cause de l’exercice de ce droit. Il incombe donc à l’employeur de prouver qu’il a pris cette sanction pour une autre cause juste et suffisante.

[398]     La question qui se pose maintenant est de savoir si cette cause juste et suffisante est la même que celle qui est prévue à l’article 6.12 de la convention collective et si elle est sujette aux mêmes formalités. Le tribunal est d’avis que oui.

[399]     Pour les mêmes raisons que celles explicitées précédemment, le tribunal est d’avis que le travailleur ne bénéficie pas de moins de droits ou de moins de moyens de défense que s’il avait procédé en utilisant la procédure de grief. Or, la convention collective prévoit que les « motifs » de l’employeur doivent être communiqués par écrit au travailleur et ces motifs doivent être communiqués dans les 30 jours de l’incident y donnant lieu ou, au plus tard, dans les 30 jours à compter du jour où l’employeur a pris connaissance de l’incident. La convention prévoit expressément qu’un avis écrit est remis à la personne salariée contenant les faits à l’origine de la sanction disciplinaire.

La suffisance de l’avis

[400]     Le relevé d’emploi indique que le travailleur est congédié et, comme motif, on ajoute : « bris du lien de confiance ».

[401]     Lors de l’audience, l’employeur est venu exposer devant le tribunal ce qui motivait ce « bris du lien de confiance ». Dans son témoignage, monsieur Pellerin a fait référence au fait que le travailleur a donné des cours de formation sans en informer la CSST ou l’employeur et sans déclarer ses revenus à la CSST. Il a également fait référence au fait que le travailleur a postulé et occupé un emploi à la Maison Clémentine durant trois jours pendant qu’il recevait des prestations de CSST.

[402]     L’employeur invoque, également, les données recueillies par la CSST dans son rapport d’enquête et de filature, le comportement « douteux du travailleur » qui ne voulait pas vraiment revenir au travail et sa tentative d’obtenir une lettre de l’employeur, confirmant qu’il n’avait pas d’emploi disponible qui respecte ses limitations fonctionnelles.

[403]     Dans leurs témoignages, monsieur Pellerin et madame Rioux font également état de la réaction d’un bénéficiaire à qui on avait annoncé le retour au travail du travailleur et qui a décompensé. On a référé à cet incident pour justifier la nécessité du lien de confiance qui doit exister entre l’employeur et le travailleur particulièrement parce que ce dernier travaille, souvent seul, auprès d’une clientèle vulnérable qui, parfois, ne peut verbaliser les agissements de l’éducateur.

[404]     Madame Rioux a même fait référence à une saisie de salaire effectué par la Ministère du Revenu pour une question de pension alimentaire.

[405]     Plusieurs des raisons invoquées pour congédier le travailleur ne lui ont pas été exposées lors de la conversation téléphonique du 12 décembre 2012 et ne figurent pas sur le relevé d’emploi qui ne contient que la mention : bris du lien de confiance.

[406]     Questionné par le tribunal sur les mots exacts utilisés lors de la conversation avec le travailleur, le 12 décembre 2012, monsieur Pellerin a mentionné avoir fait référence au bris du lien de confiance, au fait que le travailleur a travaillé ailleurs pendant qu’il était accidenté, à son manque de volonté de revenir au travail, et que ce n’était pas la première fois que ça se manifestait, et sa tentative d’avoir une lettre confirmant qu’il n’y avait pas d’emploi disponible.

 

[407]     Le tribunal constate une certaine disparité entre les témoignages de monsieur Pellerin et de madame Rioux sur la question des motifs de congédiement. Dans son argumentation, la procureure de l’employeur demande au tribunal de considérer d’autres motifs qui n’ont pas nécessairement été communiqués au travailleur lors de la conversation du 12 décembre 2012 et qui n’ont pas été communiqués dans le délai prévu à la convention collective. À titre d’exemple, elle se réfère aux décisions relatives à des absences à des traitements de physiothérapie. L’employeur aurait eu connaissance de ces faits en prenant connaissance des décisions rendues par la CSST dans le dossier du travailleur. Or, ces faits n’ont pas été mentionnés au travailleur.

[408]     Le tribunal retient que la plupart des faits, qui motivent la décision de congédier le travailleur, étaient connus de l’employeur bien avant le mois de novembre 2012. Le fait que le travailleur a travaillé à la Maison Clémentine était connu depuis le mois de février 2012. Madame Rioux a reconnu avoir été contactée par cette maison pour obtenir des références au sujet du travailleur pendant qu’il travaillait là.

[409]     Le fait que le travailleur a continué à donner des formations, sans déclarer ses revenus, était connu de l’employeur depuis au moins le mois d’août 2012 puisque l’employeur a reçu copie des trois décisions de la CSST relatives aux surpayés au mois d’août 2012. Monsieur Pellerin a reconnu avoir pris connaissance du dossier du travailleur après son entrée en fonction en juillet 2012 et il a été tenu informé de l’évolution de ce dossier jusqu’à la date de congédiement.

[410]     Monsieur Pellerin a admis qu’il savait que le travailleur avait continué à donner de la formation et qu’il avait travaillé à la Maison Clémentine, peu de temps après son entrée en fonction en juillet 2012. Il reconnaît, même, avoir posé des questions sur les raisons pour lesquelles l’employeur n’avait pas agi, lorsqu’il en a été informé. On lui aurait répondu que les conseillers légaux (juridiques) étaient d’avis qu’on ne pouvait imposer de mesures disciplinaires à un travailleur en accident du travail qui recevait une pleine indemnité de remplacement du revenu.

[411]     Cette opinion est évidemment inexacte, rien n’empêche un employeur de sévir contre un employé, même s’il est en accident du travail. Le lien d’emploi n’est pas rompu parce que le travailleur reçoit des prestations de la CSST. Si l’employeur apprend que son travailleur fraude ou reçoit des prestations auxquelles il n’a pas droit, il est en droit d’intervenir et il doit intervenir si la convention prévoit qu’il doit le faire à l’intérieur d’un certain délai, comme c’est le cas en l’espèce, à défaut de quoi, il sera forclos de le faire.

 

[412]     Tel qu’on le constate, la plupart des motifs invoqués par l’employeur pour justifier le congédiement du travailleur ne pourraient l’être devant un arbitre, tout d’abord, parce qu’ils ont été communiqués au travailleur à l’extérieur du délai de 30 jours prévu par la convention collective et ils n’ont pas été communiqués par écrit, comme l’exige la convention.

[413]     La mention « bris du lien de confiance » sur le relevé d’emploi, constitue-t-elle une communication des faits et des motifs du congédiement? De toute évidence, non.

[414]     L’article 6.16 de la convention collective mentionne que l’employeur doit communiquer par écrit « les faits à l’origine de la sanction disciplinaire ». Or, la mention « bris du lien de confiance » ne respecte pas cette exigence. Le bris du lien de confiance n’est pas un fait. C’est plutôt la motivation de l’employeur qui résulte du comportement du travailleur.

[415]     Il faut faire une distinction entre les faits, motifs et raisons qui motivent une mesure disciplinaire. Les auteurs Morin et Blouin[14], dans leur ouvrage, traitent de la question ainsi:

Sous-section 4.2-          Le contrôle de la régularité de la procédure d'imposition d'une sanction :

 

[…]

 

            IX.63 - Les problèmes relatifs aux irrégularités se concentrent avant tout dans la teneur et les délais de l'avis. Ainsi, lorsqu'il est prévu qu'un avis doit être donné par écrit, cet avis doit énoncer tous les faits justifiant la mesure. À ce sujet, la Cour d'appel a jugé que la preuve de la connaissance de faits non énoncés dans l'avis que pourrait vouloir soulever l'employeur en arbitrage doit être écartée37. L'avis peut, par ailleurs, être jugé insuffisant s'il énonce la raison de la mesure qu'en termes généraux. La Cour d'appel a déjà rappelé qu'il peut être nécessaire que l'avis mentionne les actes ou omissions qui constituent une négligence38 Notons cependant un jugement récent de la Cour Supérieure où on décida que même si un avis ne mentionne pas en détail l'incident et les raisons de l'imposition d'une mesure, la référence dans cet avis à une rencontre préalable sur la question bonifie le défaut de l'avis, de sorte que les salariés ne peuvent invoquer préjudice39. Mais encore faut-il que l'avis comporte, à tout le moins, suffisamment de faits précis pour permettre une défense pleine et entière. Enfin, notons que l'article 41 de la Charte de la langue française n'a pas pour effet d'imposer à un salarié un avis de congédiement rédigé dans la langue officielle. L'employeur serait tenu de la communiquer en français que si le salarié l'avait exigé. En l'espèce, le grief avait aussi été rédigé en langue anglaise.

 

            IX.64 - En définitive, il ressort que la procédure d'imposition d'une mesure disciplinaire est généralement perçue comme devant être observée.

                         

37               Hôpital de Régina, supra note 73 p. 380.

38               Syndicat des employés de la Traverse de Matane (C.S.N.) c. Société des traversiers du Québec, C.A. Québec, no 200-09-000531-80, 12 mai 1981 (JJ. Owen, Bélanger et Bisson, p. 5 des notes du juge Bisson; Syndicat professionnel des infirmières et infirmiers de Chicoutimi c. Centre hospitalier de Jonquière et Alliance des infirmières du Saguenay (C.S.N.), C.A. Québec, no 200-09-000277-803, 25 janvier 1982, p. 8 des notes du juge Dubé et p. 7 des notes du juge Mayrand.

39        La Fraternité des chauffeurs d'autobus, opérateurs de métro de la C.T.C.U.M. c. La Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal, (1983) R.L. 276 (C.S.).

 

 

[416]     À la lecture du relevé d’emploi, le travailleur ne peut préparer une défense pleine et entière et pour ce seul motif. L’avis n’est pas conforme aux exigences de la convention collective et la mesure qui s’en suit doit être annulée. Tel que mentionné également dans ce passage, la preuve que le travailleur connaissait les faits et les motifs de son congédiement ne valide pas un avis irrégulier.

[417]     Au surplus, la preuve démontre que la connaissance du travailleur était partielle puisque plusieurs éléments invoqués, au soutien du congédiement du travailleur pour motiver son bris du lien de confiance, n’ont pas été communiqués à ce dernier lors de la conversation téléphonique avec le directeur général.

[418]     Comme les parties ont convenu dans leur convention collective que l’employeur ne peut faire la preuve d’une cause juste et suffisante, si les faits qui la soutiennent n’ont pas été dénoncés par écrit dans un certain délai, le tribunal ne peut considérer que l’employeur a renversé la présomption qui s’applique en l’instance et il conclut que le travailleur a fait l’objet d’un congédiement à cause de l’exercice d’un droit.

[419]     Dans les circonstances, le tribunal n’a d’autre choix que d’annuler le congédiement du travailleur.

La mesure de redressement

[420]     L’article 257 de la loi prévoit que, lorsque la CSST dispose d'une plainte soumise en vertu de l'article 32, elle peut ordonner à l'employeur de réintégrer le travailleur dans son emploi avec tous ses droits et privilèges, d'annuler une sanction ou de cesser d'exercer des mesures discriminatoires ou de représailles à l'endroit du travailleur et de verser à celui-ci l'équivalent du salaire et des avantages dont il a été privé.

[421]     L’annulation d’un congédiement implique généralement une ordonnance de réintégration et une condamnation de l’employeur à verser à celui-ci l’équivalent du salaire perdu. Mais le présent dossier est particulier.

[422]     Le tribunal retient que la preuve ne permet pas de conclure de façon prépondérante que le travailleur est capable de reprendre l’emploi qu’il serait en droit d’occuper, n’eut été de son congédiement. Considérant les décisions rendues dans les précédents dossiers, le travailleur devrait réintégrer son emploi à la résidence l’Orchidée, puisque le tribunal a décidé qu’il n’y a pas eu d’augmentation des limitations fonctionnelles du travailleur par rapport à sa condition antérieure à l’événement du 23 janvier 2010. Or, lors de la survenance de son accident du 23 janvier 2010, son poste était à la résidence L’Orchidée, même s’il est titulaire d’un poste à la résidence Le Sentier.

[423]     Le travailleur a soutenu, dans son témoignage, qu’il n’était pas capable de faire l’emploi déterminé à la résidence Le Sentier, à cause, principalement, des escaliers qu’il devait emprunter à plusieurs reprises pendant un quart de travail. La preuve établit qu’il y aurait plus d’escaliers à emprunter à la résidence L’Orchidée, à cause de la disposition des lieux.

[424]     Lorsque le tribunal a questionné le travailleur sur l’apparente contradiction entre sa contestation de la décision déterminant sa capacité de travail à la résidence Le Sentier et sa demande de réintégrer son emploi, dans le contexte de sa plainte en vertu de l’article 32 de la loi, il a répondu qu’il voulait avoir l’opportunité d’essayer l’emploi que lui proposait l’employeur.

[425]     Lorsque le travailleur a été questionné sur le fait qu’il avait postulé un emploi à la résidence Clémentine, qui semblait en apparence aussi exigeant que son emploi chez l’employeur, il a répondu que, même si cet employeur n’avait pas mis fin à son emploi, il l’aurait quitté parce qu’il a réalisé qu’il était trop exigeant physiquement.

 

[426]     Le tribunal retient que le travailleur présente également une condition personnelle qui évolue et qui peut, de fait, le rendre incapable de reprendre son emploi. Dans ce contexte, il serait injuste d’imposer à l’employeur de verser au travailleur l’équivalent du salaire perdu, pour un emploi que le travailleur n’est peut-être pas en mesure d’exercer, selon son propre témoignage.

[427]     Pour ces motifs, le tribunal fait droit à la demande du travailleur et lui permet d’essayer de refaire son emploi, mais n’ordonne pas le versement d’une indemnité en compensation du salaire perdu. Il ordonne, toutefois, à l’employeur de reconnaître au travailleur ses autres droits et avantages comme s’il avait été au travail durant cette période, à l’exclusion du versement du salaire.

LES FAITS ET MOTIFS SUR LA QUESTION DES TROP-PERÇUS

[428]     Le 1er juin 2012, la CSST rend une première décision suspendant les indemnités de remplacement du revenu du travailleur parce qu’elle a été informée que le travailleur recevait des revenus de travail sans les déclarer. Elle demande au travailleur de fournir les pièces justificatives à cet égard.

[429]     Le travailleur fournit certaines informations que la CSST considère insuffisantes et, par une lettre datée du 3 août 2012, elle informe le travailleur qu’elle maintient la suspension de ses indemnités.

[430]     Le 29 août 2012, la CSST rend une décision établissant que le travailleur a reçu une somme de 6 058.24 $ en trop pour la période du 17 février 2010 au 22 mars 2011. Cette décision est confirmée par la révision administrative le 30 octobre 2012.

[431]     Le 30 octobre 2012, la CSST informe le travailleur qu’il a reçu en trop une somme de 3 265 $ pour la période du mois de mars 2010 au mois de mai 2011. Ladite réclamation prend en considération les revenus reçus par le travailleur, d’après les pièces justificatives produites par ce dernier, et en appliquant ces revenus à l’indemnité journalière versée pour chacune de ces périodes. Cette décision est confirmée par la révision administrative le 12 décembre 2012. Le tribunal constate toutefois qu’une erreur de calcul semble avoir été faite par l’agente au dossier, puisque, selon les revenus colligés, le total devrait être de 2 965 $.

[432]     Le 31 octobre 2012, la CSST avise le travailleur qu’elle a été informée qu’il a reçu des revenus de travail de 350 $ de la Commission scolaire des Laurentides, via une compagnie appartenant à sa conjointe, LP Excellence, pour la période du 26 au 31 mai 2012. Sa base d’indemnité journalière étant de 95,02 $, cette dernière aurait dû être de 45,02 $. Une fois ce montant appliqué aux six jours d’indemnités de remplacement du revenu reçues durant cette période, la CSST détermine que le travailleur a reçu en trop une somme de 300 $.

[433]     Par ailleurs, la CSST avise également le travailleur qu’elle a été informée qu’il a reçu des revenus de travail de 770 $ de la clinique dentaire de la docteure Julie Beaudoin pour la période du 29 et 30 juin 2012 et une somme de 400 $ pour le travail effectué à la résidence Cœur de l’Amitié, le 26 septembre 2012. Considérant que les indemnités de remplacement du revenu étaient suspendues durant cette période, la CSST se réservait le droit de réclamer le trop versé si une instance venait à accorder au travailleur le droit à des indemnités de remplacement du revenu pour cette période. Ces décisions sont confirmées par la révision administrative de la CSST le 21 novembre 2012.

[434]     Les dispositions pertinentes de la loi pertinentes à la solution de ces litiges sont les suivantes :

44.  Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit à une indemnité de remplacement du revenu s'il devient incapable d'exercer son emploi en raison de cette lésion.

 

Le travailleur qui n'a plus d'emploi lorsque se manifeste sa lésion professionnelle a droit à cette indemnité s'il devient incapable d'exercer l'emploi qu'il occupait habituellement.

__________

1985, c. 6, a. 44.

 

 

142.  La Commission peut réduire ou suspendre le paiement d'une indemnité :

 

1°si le bénéficiaire :

 

a) fournit des renseignements inexacts;

 

b) refuse ou néglige de fournir les renseignements qu'elle requiert ou de donner l'autorisation nécessaire pour leur obtention;

 

[…]

__________

1985, c. 6, a. 142; 1992, c. 11, a. 7.

 

 

278.  Un bénéficiaire doit informer sans délai la Commission de tout changement dans sa situation qui peut influer sur un droit que la présente loi lui confère ou sur le montant d'une indemnité.

__________

1985, c. 6, a. 278.

 

351.  La Commission rend ses décisions suivant l'équité, d'après le mérite réel et la justice du cas.

 

Elle peut, par tous les moyens légaux qu'elle juge les meilleurs, s'enquérir des matières qui lui sont attribuées.

__________

1985, c. 6, a. 351; 1997, c. 27, a. 13.

 

 

377.  La Commission des lésions professionnelles a le pouvoir de décider de toute question de droit ou de fait nécessaire à l'exercice de sa compétence.

 

Elle peut confirmer, modifier ou infirmer la décision, l'ordre ou l'ordonnance contesté et, s'il y a lieu, rendre la décision, l'ordre ou l'ordonnance qui, à son avis, aurait dû être rendu en premier lieu.

__________

1985, c. 6, a. 377; 1997, c. 27, a. 24.

 

 

430.  Sous réserve des articles 129 et 363, une personne qui a reçu une prestation à laquelle elle n'a pas droit ou dont le montant excède celui auquel elle a droit doit rembourser le trop-perçu à la Commission.

__________

1985, c. 6, a. 430.

 

 

431.  La Commission peut recouvrer le montant de cette dette dans les trois ans du paiement de l'indu ou, s'il y a eu mauvaise foi, dans l'année suivant la date où elle en a eu connaissance.

__________

1985, c. 6, a. 431.

 

 

[435]     Le travailleur ne conteste pas le fait qu’il a reçu des revenus de travail dans les périodes concernées par les décisions précédemment mentionnées. Ce qu’il conteste, c’est le fait que l’on ne tienne pas compte de ses dépenses, puisque ses revenus ont été gagnés en tant que travailleur autonome.

[436]     Le tribunal rappelle que, depuis la conférence préparatoire et lors de chaque audience qui a été tenue dans ce dossier, il a été demandé au travailleur de produire un état de ses revenus et dépenses, accompagné des pièces justificatives au soutien desdites dépenses. La CSST, lors de la suspension de ses indemnités en juin 2012, avait également demandé au travailleur de produire des pièces justificatives aux fins d’établir son revenu de travail.

[437]     En date du 12 novembre 2013, le travailleur a fourni un état des résultats de ses revenus de travailleur autonome dont nous reproduisons le sommaire en annexe à la présente décision.

[438]     En date du 15 avril 2014, le travailleur a transmis au tribunal certaines pièces justificatives.

[439]     Le travailleur a également produit des rapports d’impôt pour les années 2010 à 2012, comprenant un autre état des revenus et dépenses, dont nous reproduisons également le sommaire en annexe à la présente. À noter que ces rapports d’impôt ont été faits quelques jours avant la tenue de la dernière audience de ce dossier. Ils n’avaient pas, à ce moment, été transmis à Revenu Québec et à l’Agence du Revenu du Canada, de sorte qu’aucun avis de cotisation n’a été émis par les autorités concernées.

[440]     Les états du travailleur étaient accompagnés de certaines pièces justificatives, mais pas pour chaque dépense. Le travailleur mentionne, dans son témoignage, qu’il recevait ses revenus au noir, qu’il payait ses dépenses en argent comptant et qu’il n’a jamais déclaré ses revenus aux agences concernées. Il a tenté de reconstituer certaines factures, particulièrement des factures de nettoyage de son équipement qui aurait été effectué par le fils de sa conjointe, qu’il payait également comptant. Un examen de ces factures révèle que les dates ne correspondent pas aux dates de cours dispensés et les montants nous semblent exagérés. Il est difficile de croire que le travailleur ait versé environ 100 $ par jour pour le nettoyage de son matériel, quand certains cours ne lui rapportaient que 130 $, 150 $ ou 175 $ net, après déduction des frais de transport et de repas sur la route.

[441]     Le statut du travailleur a varié. Si, au début, il percevait lui-même ses revenus, à un certain moment, il a utilisé la corporation de sa conjointe, LP Excellence, pour facturer ses clients. Cette corporation avait également pour but d’éviter la saisie de ses revenus par le Ministère du Revenu pour une question de pension alimentaire. Le tribunal ignore si les revenus du travailleur étaient les seuls de la corporation LP Excellence et si cette dernière a produit des déclarations fiscales, dans lesquelles elle réclame peut-être des dépenses pour le logement locatif, utilisé en partie comme bureau ou entreposage. Aucune facture n’a été déposée pour faire la preuve des frais de communication réclamés.

[442]     Autre particularité des rapports d’impôt produits par le travailleur, c’est qu’ils présument que le travailleur n’avait que ces seuls revenus. On ne prend pas en compte les revenus de travail de certaines années, comme en 2010, 2011 et 2012. Il ne s’agit pas d’un amendement de la déclaration fiscale déjà produite, mais d’une nouvelle déclaration qui ne tient compte que des revenus de formation dispensés par le travailleur.

[443]     Ainsi, le travailleur réclame pour chacune de ces années, une déduction personnelle de base et une déduction pour la pension alimentaire versée. Le tribunal souligne qu’il n’a reçu aucune preuve quant à la nature de cette pension alimentaire. S’agit-il d’une pension alimentaire pour enfants, auquel cas elle ne serait pas déductible ou d’une pension payable pour les besoins alimentaires de l’ex-conjointe uniquement, auquel cas, elle le serait? Le tribunal l’ignore.

[444]     Que dire également de certaines dépenses réclamées par le travailleur comme déductions. À titre d’exemple, dans l’état des résultats joint à son rapport d’impôt, il demande de déduire de ses revenus une somme de 1 500 $ par année à titre de publicité.

[445]     Cette publicité, ce serait son site Web qui aurait été réalisé par sa conjointe et qui le modifie à l’occasion. Évidemment, aucune pièce justificative n’a été produite au soutien de cette dépense et aucune preuve n’a établi la date de mise en ligne de ce site. Le travailleur donne des cours de formation depuis bien avant 2010. Il est probable que ce site ait été mis en ligne avant 2010, de telle sorte qu’il n’y a pas eu de dépenses de conception pour les années 2010 à 2012. Des frais de 1 500 $ pour le maintien d’une page web ou certaines modifications occasionnelles semblent nettement exagérés. Au surplus, dans l’état des résultats transmis par le travailleur qui est distinct de son rapport d’impôt, cette dépense n’y figure pas, ce qui permet de conclure qu’elle n’est pas réelle.

[446]     Le tribunal retient également que certains montants passés à la dépense ne seraient pas autorisés par les agences du revenu. À titre d’exemple, le travailleur réclame une dépense de 2 350 $ pour l’achat d’un deuxième véhicule consacré exclusivement aux besoins de son entreprise. L’achat d’une automobile, si tant est qu’il soit vrai qu’elle ne sert qu’aux activités de l’entreprise, est une dépense amortissable selon certaines règles spécifiques, elle ne peut être déduite en totalité, l’année de l’acquisition. C’est la même chose pour l’achat d’un ordinateur que le travailleur a passé à la dépense en totalité.

[447]     Dans son témoignage, le travailleur mentionne que les revenus de son travail autonome avaient été facturés par la compagnie LP Excellence, mais, qu’aux fins du présent dossier, il se les a attribués de même que toutes les dépenses. Le travailleur n’est pas à même de justifier plusieurs de ses dépenses, il mentionne que c’est surtout sa conjointe qui a préparé ses rapports et qu’ils y sont allés selon ce qui leur semblait correct.

 

[448]     Pour ces diverses raisons, le tribunal accorde très peu de fiabilité aux rapports déposés par le travailleur, particulièrement parce qu’ils ne sont pas appuyés par des pièces justificatives. Le tribunal constate également une grande disparité dans les revenus bruts que le travailleur reconnaît avoir reçus pour ces mêmes années, soit un écart de près de 4 000 $ entre l’état des résultats produit à part et les données de l’état des résultats apparaissant aux rapports d’impôt. Aucune explication n’a été fournie pour justifier ces écarts.

[449]     Le tribunal a tenté de reconstituer les revenus et dépenses à partir des factures qui se retrouvent au dossier, mais certaines factures sont manquantes ou incomplètes quant aux frais. L’exercice s’est avéré inutile.

[450]     Ceci étant, le tribunal reconnaît que, pour gagner ses revenus de travailleur autonome, le travailleur a dû encourir certaines dépenses comme ses frais de déplacement ou de repas et certains autres frais. Il semble que la CSST ait établi le trop perçu du travailleur sur la base des revenus bruts reçus, sans tenir compte de ses dépenses. Il serait inéquitable de ne pas reconnaître au travailleur certaines dépenses, en dépit du fait qu’il n’a pas fourni toutes les pièces justificatives pour justifier ce qu’il aimerait qui soit déduit de ses revenus.

[451]     Le tribunal, devant disposer de ces litiges malgré une preuve incomplète et considérant les dispositions des articles 351 et 377 de la loi qui lui permettent de rendre des décisions suivant l’équité, est d’avis qu’il serait raisonnable que la CSST applique sa politique relative aux travailleurs autonomes et qu’elle retranche l’équivalent de 33 1/3 % des revenus du travailleur pour tenir compte de ses dépenses, tel que l’a reconnu notre tribunal dans l’affaire Cloutier et Ch. Fer Nationaux du Canada et CSST[15].

[452]     Le travailleur n’ayant pas démontré qu’il a encouru des dépenses supérieures à ce pourcentage, le tribunal fixe le montant à retrancher de l’indemnité de remplacement du revenu à 66 2/3 % des montants réclamés par la CSST au travailleur, après correction du montant de l’erreur de calcul fait dans la décision du 30 octobre 2012 qui devrait se lire 2 965 $ plutôt que 3 265 $.

[453]     Aux fins de déterminer le surpayé, la CSST effectue une répartition de ces montants sur les différentes périodes d’indemnités de remplacement du revenu reçues, ce qui implique une application technique de calcul. Dans ce contexte, le tribunal retourne le dossier à la CSST afin que, dans la détermination du surpayé, elle tienne compte de ce nouveau montant reçu pour les formations dispensées par le travailleur duquel devra être déduit, conformément à sa politique, des dépenses correspondant à un montant équivalant à 33 1/3 % de ce montant. Cette réduction ne s’applique toutefois pas au salaire versé par la Maison Clémentine qui devra être traité comme tout salaire reçu par un salarié.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

Dossier 451091-63-1110

REJETTE la requête de monsieur Denis Larivière, le travailleur;

MODIFIE la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 22 septembre 2011, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur est capable d’exercer son emploi à compter du 31 janvier 2011.

Dossier 451623-63-1110

ACCUEILLE en partie la requête de Terre des Jeunes Ste-Julienne, l’employeur;

MODIFIE la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 2 septembre 2011, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que l’entorse lombaire est consolidée en date du 31 janvier 2011 avec suffisance des soins à cette même date;

DÉCLARE que le déficit anatomophysiologique, résultant de la lésion professionnelle subie par le travailleur le 23 janvier 2010, s’établit à 2 % pour une entorse lombaire avec séquelles et que l’on doit déduire les séquelles antérieures équivalentes reconnues au travailleur;

DÉCLARE que le travailleur n’a pas droit à une indemnité pour dommages corporels, vu l’absence d’augmentation d’atteinte permanente à son intégrité physique et psychique;

DÉCLARE que le travailleur n’a pas droit à l’indemnité de remplacement du revenu après le 31 janvier 2011, vu l’absence d’atteinte permanente et de limitations fonctionnelles additionnelles lui résultant de sa lésion professionnelle.

486626-62-1211

ACCUEILLE en partie la requête de monsieur Denis Larivière, le travailleur;

ANNULE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 5 novembre 2012, en révision administrative;

RETOURNE le dossier à la Commission de la santé et de la sécurité du travail afin qu’elle calcule ce surpayé en fonction du montant reçu par monsieur Denis Larivière, soit la somme de 6 058,24 $, de laquelle doivent être déduites des dépenses correspondant à 33 1/3 % de ce montant, le solde devant être remboursé par le travailleur.

488629-63-1211

ACCUEILLE en partie la requête de monsieur Denis Larivière, le travailleur;

ANNULE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 21 novembre 2012, en révision administrative;

RETOURNE le dossier à la Commission de la santé et de la sécurité du travail afin qu’elle calcule ce surpayé en fonction du montant reçu par monsieur Denis Larivière, soit la somme de 300 $, de laquelle doivent être déduites des dépenses correspondant à un montant équivalent à 33 1/3 % de ce montant, pour les six jours d’indemnité versées entre le 26 mai et le 31 mai 2012, le solde devant être remboursé par le travailleur.

491493-63-1301

ACCUEILLE en partie la requête de monsieur Denis Larivière, le travailleur;

ANNULE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 12 décembre 2012, en révision administrative;

RETOURNE le dossier à la Commission de la santé et de la sécurité du travail afin qu’elle calcule ce surpayé en fonction du montant reçu par monsieur Denis Larivière, soit la somme de 2 965 $, de laquelle doivent être déduites des dépenses correspondant à un montant équivalent à 33 1/3 % de ce montant que le travailleur doit rembourser à la Commission de la santé et sécurité du travail.

Dossier 452792-63-1110

ACCUEILLE la requête de Terre des Jeunes Ste-Julienne, l’employeur;

INFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 13 septembre 2011, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur n’a pas subi de lésion professionnelle le 2 juin 2011.

Dossier 458337-63-1112

ACCUEILLE la requête de Terre des Jeunes Ste-Julienne, l’employeur;

DÉCLARE que ladite décision est devenue sans objet, vu l’absence de lésion professionnelle survenue le 2 juin 2011.

Dossier 484021-63-1210

REJETTE la requête du travailleur;

DÉCLARE que ladite décision est devenue sans objet, vu l’absence de lésion professionnelle qui serait survenue le 2 juin 2011.

Dossier 491761-63-1301

ACCUEILLE la requête de Terre des Jeunes Ste-Julienne, l’employeur;

DÉCLARE que la décision conjointe rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail et la Société de l’assurance automobile du Québec, le 10 décembre 2012, est devenue sans objet, vu l’absence de lésion professionnelle survenue le 2 juin 2011.

Dossier 536543-63-1403

ACCUEILLE la requête de monsieur Denis Larivière, le travailleur;

INFIRME la décision rendue par le conciliateur décideur, le 5 février 2014;

DÉCLARE recevable la plainte formulée par monsieur Denis Larivière, le travailleur, en vertu des dispositions de l’article 32 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles;

ACCUEILLE la plainte de monsieur Denis Larivière;

ANNULE le congédiement du travailleur;

ORDONNE à l’employeur de réintégrer le travailleur dans son emploi dans les huit jours de la réception de la présente décision avec tous ses droits et privilèges, sauf pour ce qui est du salaire et autres indemnités dont aurait pu le priver son congédiement;

CONSERVE juridiction, en cas de litige entre les parties, pour définir les droits et avantages dont a été privé le travailleur depuis son congédiement;

 

 

 

Daniel Pelletier

 

 

Me Éric Lemay, avocat

Représentant du travailleur

 

 

Me Isabelle Auclair

Monette Barakett & Ass.

Représentante de l’employeur

 

 

Me Marie-France Quintal

Vigneault, Thibodeau, Bergeron

Représentante de la partie intervenante

 


 

ANNEXE



[1]           RLRQ, c. A-3.001.

[2]          Larivière et Urgences Santé et CSST, C.L.P. 138384-62-0005, L. Vallières.

[3]           2011 QCCLP 5474.

[4]           2011 QCCLP 6893.

[5]           Précitée note 4.

[6]           2011 QCCLP 2775.

[7]           2012 QCCLP 4879.

[8]           2014 QCCLP 2363.

[9]           2014 QCCLP 9.

[10]         C.L.P. 367918-63-0901, 19 mars 2010, L. Morissette.

[11]         2013 QCCS 1144.

[12]         Précitée, note 10.

[13]         Ranaudo et Villa du Ravioli (La), C.L.P. 337452-71-0801, 17 juillet 2008, M. Denis.

 

[14]          Rodrigue BLOUIN et Fernand MORIN, L’arbitrage des griefs, 3e édition, Montréal, Éditions Yvon Blais, 1986, p. 420 et 421.

 

[15]         C.L.P. 388409-03B-0909, 11 août 2010, M. Lamarre.

AVIS :
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