Décision

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Commission de la construction du Québec c. Construction Talbon inc.

2011 QCCS 6636

JG 1488

 
COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT D'ABITIBI

 

 

N° :

605-17-000416-073

 

DATE :

 28 novembre 2011

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

LAURENT GUERTIN, j.c.s.

______________________________________________________________________

 

COMMISSION DE LA CONSTRUCTION DU QUÉBEC

 

Demanderesse

c.

 

CONSTRUCTION TALBON INC.

 

Défenderesse

 

ASSOCIATION DE LA CONSTRUCTION DU QUÉBEC

           Intervenante

et

 

CONSEIL PROVINCIAL DU QUÉBEC DES MÉTIERS DE LA CONSTRUCTION (INTERNATIONAL)

 

          Intervenant

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]           La demanderesse réclame la somme de 97 841,91 $. Après une enquête couvrant la période du 26 mars 2006 jusqu'au 28 avril 2007, elle réclame pour et à l'acquit des travailleurs de la défenderesse ayant travaillé sur le site de la mine Goldex 1) la somme de 1 660,36 $ à titre d'assurance-emploi, 2) 69 859,75 $ à titre de salaire et 3) 9 179,14 $ à titre d'indemnité de congés payés, pour un total de 80 699,25 $. Elle réclame également la somme de 1 334,84 $ représentant 20 % de la différence entre le salaire obligatoire, selon ses prétentions, et celui reçu par les salariés. Enfin, elle réclame pour elle-même la somme de 15 807,82 $ à titre de prélèvement, conformément au Règlement de prélèvement de la Commission de la construction du Québec.

[2]           La défenderesse a réalisé des travaux à la demande de Mines Agnico-Eagle limitée sur le site de la mine Goldex à proximité de Val-d'Or.

[3]           Par jugement du 20 septembre, Association de la Construction du Québec et Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (international) furent autorisés à intervenir au litige.

[4]           À l'exposé sommaire des questions en litige qu'elle a déposé, la demanderesse écrit:

[5]           La demanderesse réclame des défenderesses la prime de l'industrie lourde prévue à la convention collective, secteur industriel, prévue aux articles 1.01 paragraphes 20 et 22.8 de la convention collective.

[6]           À l'exposé des questions des faits et de droit en litige, la défenderesse écrit:

La demanderesse prétend que les travaux exécutés par la défenderesse, soit la mise en place d'une exploitation minière pour le compte de Mine Agnico-Eagle limitée, Division Goldex, sont visés par la prime de l'industrie lourde prévue à l'article 1.01 (paragraphes 20 et 28) de la convention collective du secteur industriel dans l'industrie de la construction.

La défenderesse nie ces prétentions et soutient principalement que les travaux exécutés sont rattachés directement à l'exploration et l'exploitation d'une mine et ne participent d'aucune façon à une usine métallurgique au sens des articles 1.01 (paragraphes 20 et 22.8) de la convention collective du secteur industriel. La défenderesse réclame en conséquence le rejet de la réclamation de la demanderesse.

[7]           Considérant que les paragraphes 20 et 22.8 de l'article 1.01 de la convention collective du secteur industriel sont au coeur du litige, il est nécessaire de citer ces deux paragraphes dès maintenant:

20)       "Industrie lourde"

-           la construction de raffinerie de pétrole, d'usines de produits chimiques, métallurgiques ou sidérurgiques, d'usines de pâtes et papier, d'usines de production et transformation de gaz, d'usines d'eau lourde;

-           la construction d'établissements destinés à la production d'énergie, soit les centrales électriques, thermiques ou nucléaires;

-           la construction de papeteries, de cimenteries, de dépôts de réservoirs (tank form) de produits reliés à l'industrie pétrochimique;

-           la construction d'usines de montage, d'automobiles, d'autobus et d'autres véhicules destinés au transport en commun, des camions et de véhicules aéronautiques;

22.8)    "Prime pour travaux dans l'industrie lourde"

1)         RÈGLE GÉNÉRALE: Dans l'industrie lourde, tout salarié affecté à des travaux de construction reçoit l'équivalent d'une demi-heure de salaire par jour, à son taux de salaire, pour chaque jour de présentation au travail, sauf lorsqu'il s'agit de travaux d'entretien effectués à l'extérieur de la région de l'agglomération montréalaise.

2)         RÈGLES PARTICULIÈRES:

a)         Calorifugeur, charpentier-menuisier, couvreur, électricien, ferblantier, ferrailleur, frigoriste, grutier (excepté grutier affecté à la pose de pilotis), mécanicien en protection-incendie, monteur d'acier de structure, serrurier de bâtiment, tuyauteur et soudeur en tuyauterie: Dans les conditions prévues au paragraphe 1), le salarié des métiers ci-dessus mentionnés reçoit l'équivalent d'une heure de salaire pour chaque jour de présentation au travail.

[8]           D'autres règles particulières semblables à celle qu'on retrouve au sous-alinéa a) sont prévues pour le chaudronnier et le mécanicien de chantier.

[9]           Pour être en mesure de déterminer si les paragraphes 20 et 22.8 de l'article 1.01 de la convention collective s'appliquent, il est nécessaire de connaître la nature des travaux réalisés sur le site de Goldex. Il est nécessaire de connaître la nature des travaux de construction afin de pouvoir déterminer s'il s'agit de la construction d'une usine métallurgique.

[10]        Préalablement à l'audition, la demanderesse a déposé le rapport d'expertise préparé par monsieur Frank Ajersch, ing. Ph. D. tandis que la défenderesse a déposé le rapport d'expertise préparé par monsieur Claude Bazin, ing. Ph. D. La qualité d'expert de ces deux personnes a été admise.

[11]        Le rapport de l'expert de la demanderesse nous donne la description suivante du site Goldex.

 

1.         Description détaillée du site GOLDEX (AGNICO EAGLE)

En 2004, Agnico-Eagle, qui exploite déjà la mine LaRonde, située dans la région de Val d'Or, décide d'exploiter le gisement GOLDEX qui se trouve à proximité du site LaRonde. Le gisement Goldex comprend environ 23,1 millions de tonnes de réserves minérales avec une teneur moyenne de 2,2 grammes d'or par tonne, ce qui représente 1,6 million (sic) d'onces d'or pour le gisement. Le gisement principal est localisé dans un dépôt mesurant environ 160 mètres par 250 mètres avec une profondeur de 300 mètres. Le fond de la mine est à environ 700 mètres. Une vue générale en 3-D des installations surfaciques et souterraines du site est présentée à l'Annexe 2.

Le site comprend également une usine de traitement de minerai d'or, laquelle fait l'objet du présent rapport, dont la construction a été achevée en 2008. Celle-ci a une capacité de production de 7 000 tonnes de minerai par jour. L'usine produit un concentré d'or brut représentant 30 % de la production, lequel est acheminé vers le site de LaRonde. La portion principale de la production (70%) est sous forme de lingots d'or brut qui sont acheminés aux installations de la Monnaie royale à Ottawa.

Au cours de l'exploitation, le gisement entier sera extrait par sautage dans une période de deux ans et le minerai sera entreposé dans les galeries souterraines. L'opération de traitement de ce minerai, la concentration et l'extraction se déroulera sur une période de 6 à 8 ans.

2.         Procédés utilisés

Le minerai brut de sautage est d'abord concassé au fond de la mine en dessous des galeries par un concasseur à mâchoires ou (sic) le minerai est réduit aux dimensions plus petites que 15 cm. Un schéma de la séquence de sautage et de l'entreposage est présenté à l'Annexe 3. Une représentation trois dimensionnelles des galeries et des cheminements de la mine est également en annexe (Annexe 4). On peut observer sur ces deux images que le minerai brut de sautage est concassé au fond de la mine en dessous des galeries. Le produit concassé est ensuite monté à la surface en utilisant la structure du chevalement, transporté par convoyeur et empilé sous un dôme qui protège les matériaux de l'environnement. Le minerai concassé est déposé au dessus (sic) de trois entonnoirs sous le plancher de la structure du dôme qui alimentent un convoyeur souterrain pour l'acheminer à l'usine.

L'usine comprend les broyeurs, les unités de séparation par gravité, les cellules de flottation, l'épaississeur et la raffinerie. Les étapes de la métallurgie extractive utilisée à l'usine Goldex à partir du minerai concassé jusqu'à concentration ou sa coulée en lingot d'or sont présentées sous forme de schéma à l'Annexe 5.

Le minerai concassé est d'abord acheminé par convoyeur aux deux broyeurs humides, un broyeur semi-autogène et un autre broyeur à boulets de fonte, qui réduisent le minerai en particules de taille inférieure à 300 microns dans une suspension d'eau de procédé. La suspension sortant du deuxième broyeur est ensuite traitée par des unités de séparation gravimétrique pour séparer la gangue (partie du minerai qui ne contient plus de valeurs) de la phase minéralisée et des petites particules d'or natif (métallique).

Cette étape comprend des tamis vibrants, des concentrateurs Knelson, des séparateurs magnétiques et des tables vibratoires de type Gemini. À la suite de l'opération gravimétrique, les particules d'or sont acheminées vers la raffinerie pour la fusion et la coulée des lingots d'or brut (95-96% or). Afin de mieux séparer la phase métallique de la phase non-métallique (sic), on ajoute des fondants de borax et de silice pour former une scorie liquide qui couvre la phase métallique (or fondu). Cette scorie est toujours recyclée pour récupérer les valeurs d'or restantes. La coulée d'or dans cette opération est soigneusement contrôlée avec une production de 1 à 2 lingots de 900 onces par semaine.

Le restant du minerai broyé qui n'est pas séparé par gravité est acheminé vers l'opération de flottation. Ce procédé concentre la phase minéralisée en forme de pyrite (FeS) dans laquelle se trouve l'or combiné chimiquement. Un agent hydrophobe et un agent de flottation récupère (sic) cette phase dans une mousse qui se forme à la surface des cellules de flottation. Cette mousse est ensuite écumée et concentrée dans un bac circulaire de décantation. L'eau de ce bac est recirculée et le concentré est transféré aux réservoirs d'entreposage. Des camions citernes (sic) transportent ce concentré à l'usine de LaRonde (Agnico-Eagle) pour le traitement subséquent par cyanuration. La plupart de la production de LaRonde ne se fait pas par ce procédé et l'ajout de concentré de GOLDEX, à courte distance de LaRonde, rend l'opération plus efficace.

[12]        L'expert de la défenderesse nous donne également une description des immeubles qu'on retrouve sur le site de Goldex. Il décrit le site de la façon suivante:

"2.2     Installation de surface

Les installations de surface du site minier de Goldex sont montrées à la figure 17. Ces installations comprennent:

·                    Le chemin d'accès;

·                    Les bâtiments d'administration et les vestiaires;

·                    L'entrepôt principal;

·                    L'entrepôt des produits dangereux;

·                    Les ateliers mécaniques et électriques;

·                    Le bâtiment des services mécaniques et électriques;

·                    Les chevalements;

·                    Le bâtiment des pompes à résidus;

·                    Le bâtiment pour l'entreposage; du minerai;

2.2.1    Accès à partir de la route 117

Un chemin d'accès au site minier a dû être construit à partir de la route 117. Le chemin d'une longueur de 1 km permet aux 130 mineurs, 70 entrepreneurs, 8 personnes des ressources humaines, 64 employés d'entretien mécanique et électriques (sic) ainsi qu'aux 33 employés du concentrateur de se rendre sur le site minier. Le chemin d'accès dessert toutes les installations et pas uniquement le concentrateur.

2.2.2    Bâtiment d'administration et vestiaires

Le bâtiment d'administration pour le site de Goldex abrite sous un même toit:

·                     Les vestiaires pour les travailleurs de la mine, la salle de contrôle pour l'opération de la mine, les bureaux de la supervision, de l'ingénierie et de l'administration.

·                     Ce bâtiment comporte deux étages:

o        Le premier étage est occupé principalement par les vestiaires et les bureaux des superviseurs de la mine, les services de premiers soins, les bureaux des formateurs, les salles de contrôle et les bureaux pour les sauveteurs miniers. Les vestiaires permettent d'accommoder tout le personnel du site y compris quelques contracteurs pour un total de 235 casiers;

o        Le deuxième étage regroupe des bureaux pour les géologues, les arpenteurs, les ingénieurs miniers et du personnel d'administration. Deux salles de conférence, deux voûtes et une salle à manger ont aussi été installées sur cet étage;

o        Des accès souterrains permettent de passer de ce bâtiment vers le chevalement qui abrite l'entrée de la mine, appelée collet du puits, et le concentrateur. Certaines lignes de transmission pour l'électricité, les communications, l'air comprimé, l'eau et le gaz passent aussi dans des conduits à l'intérieur de ces tunnels.

o        Aucun des ces bureaux n'est réservé à l'usage exclusif du personnel du concentrateur. Le bâtiment d'administration n'est pas une annexe au concentrateur.

2.2.3    Entrepôt principal

L'entrepôt principal est un bâtiment de 12 X 24 mètres qui permet un entreposage, à surface minimale, des équipements à durée de vie relativement courte pour la mine, les services d'entretien et le concentrateur. Le bâtiment inclut aussi un atelier de charpentier, deux bureaux et une salle à manger pour le personnel travaillant à la surface. Le concentrateur n'est pas l'unique utilisateur de l'entrepôt, ce qui fait que l'entrepôt ne doit pas être considéré comme une annexe au concentrateur.

 

2.2.4    Entrepôt des produits dangereux

 

Les produits chimniques comme les graisses et les huiles sont entreposés dans un bâtiment séparé de l'entrepôt principal. Les produits qui y sont entreposé (sic) servent autant à l'exploitation de la mine, qu'à l'opération du concentrateur. Cet entrepôt n'est donc pas à l'usage exclusif du concentrateur.

 

2.2.5    Ateliers mécaniques et électriques

 

Les ateliers pour l'entretien des équipements mécaniques et électriques sont situés dans le bâtiment du concentrateur. Ces ateliers sont équipés de ponts-roulant et servent autant à l'entretien des équipements de surface, que souterrains.

 

2.2.6    Bâtiment des services mécaniques et électriques

 

Ce bâtiment est construit près de la station électrique et sert à l'entreposage des transformateurs. Le bâtiment abrite aussi les générateurs (400 et 1000 kW) d'urgence et les compresseurs qui fournissent l'air comprimé utilisé dans la mine souterraine. Les réservoirs d'air comprimé, de glycol et de carburants sont placés à l'extérieur du bâtiment. Les équipements et matières entreposés dans ce bâtiment sont pratiquement tous dédiés au fonctionnement de la mine souterraine, ce qui implique que cette installation ne peut pas être considérée comme une annexe au concentrateur.

 

2.2.7    Chevalements

 

La mine Goldex est desservie par deux puits d'accès. Le premier qui a servi de puits d'exploration est muni d'un chevalet en bois et sert actuellement de puits de service pour le pompage de l'eau et le hissage du stérile de la mine. Il sert aussi de sortie d'urgence pour les mineurs. Le puits principal qui sert à la production de la mine est construit en béton et contient les équipements de hissage du minerai, ainsi que le treuil de service pour le transport du personnel. Le chevalement n'est pas une annexe au concentrateur.

 

2.2.8    Bâtiment des pompes

 

Le bâtiment des pompes à résidus est situé au sud du concentrateur et abrite les 6 pompes nécessaires au transport des résidus de Goldex vers le parc Manitou situé à 23 kilomètres de la mine. Les résidus servent à la réhabilitation du site de Manitou.

 

2.2.9    Bâtiment pour l'entreposage du minerai

 

Le dôme sert à l'entreposage du minerai qui sort de la mine souterraine. Il permet le contrôle des poussières dans l'environnement."

[13]        L'expert de la défenderesse décrit également de quelle façon est traité le minerai sur le site Goldex en ces termes:

 

2.3       Traitement du minerai au concentrateur de Goldex

 

Un schéma simplifié des opérations dans le concentrateur est montré à la figure 18. Le schéma présente la distribution des masses de solide dans le circuit pendant une journée d'opération. Ainsi, lorsque le concentrateur traite 7000 tonnes de minerai dans une journée, il produit moins de 1 kg d'or et 125 tonnes de concentré de pyrite sont récupérées. Ce qui n'est pas récupéré est composé principalement de roches sans valeur et compte pour près de 6875 tonnes qui sont envoyées dans un parc à résidus.

 

Le minerai extrait de la mine est d'abord fragmenté pour détacher les particules d'or et de pyrite de la roche sans valeur. Des séparateurs gravimétriques sont installés dans le circuit de broyage pour récupérer des particules riches en or de quelques millimètres de diamètre. Les particules d'or ainsi récupérées sont accompagnées de particules de roche sans valeur économique. Cette matière est alors retraitée pour produire un concentré d'or assez pur pour être fondu sous la forme d'une brique. La matière broyée qui n'est pas captée dans les séparateurs gravimétriques est envoyée dans le circuit de flottation de la pyrite où un concentré de pyrite est produit par flottation. La pyrite contient de l'or et est envoyée vers un autre concentrateur (sic) y être traitée afin de récupérer l'or associé à la pyrite. Les rejets de la flottation sont envoyés dans les parcs à résidus.

 

2.3.1    Schéma détaillé du circuit de traitement du minerai à Goldex

 

Le schéma détaillé des opérations du concentrateur est montré à la figure 19. Le broyage s'effectue en 2 étapes. Le minerai est d'abord envoyé avec de l'eau dans un broyeur. L'action de broyage provient d'impacts par des boulets qui cascadent suite à la rotation du broyeur (voir Annexe A pour plus de détails). Le premier broyage permet de réduire la taille des particules de 20 cm à moins de 1 mm. Le décharge du premier broyeur est envoyé dans des hydrocyclones qui séparent les particules fines des particules grossières (Annexe A). Les particules fines devraient avoir une taille permettant la séparation de la pyrite des minéraux sans valeur et sont envoyées vers la flottation. Les particules grossières sont envoyées dans un second broyeur qui poursuit la réduction granulométrique.

 

Le décharge (le produit broyé) du second broyeur est envoyée dans les séparateurs gravimétriques pour produire un concentré d'or. Ces appareils opèrent sur le principe des centrifuges. L'or et les particules lourdes s'entassent sur la paroi de l'appareil, alors que l'eau et les particules légères en ressortent et sont retournés vers le circuit de broyage (figure 19). L'or et les minéraux lourds captés par le séparateur gravimétrique sont envoyés dans des silos, puis sur des tables à secousses qui éliminent quelques impuretés ayant suivi l'or à la première étape de séparation. Le concentré produit par les tables contient environ 60 % d'or, et entreposé dans un coffre pour être éventuellement fondu dans un four à induction pour produire le doré qui sera vendu à un raffineur. Toutes les opérations de récupération gravimétrique sont effectuées dans des secteurs sécurisés parce qu'à ce stade, le concentré d'or pourrait être volé par une personne qui pourrait le refondre à sa maison pour produire des lingots grossiers, mais quand même échangeables sur le marché.

 

 

 

Les particules fines relâchées par l'hydrocyclone (voir figure 19) contiennent une bonne portion de la pyrite aurifère qui va être récupérée par flottation. Pour ce faire, le mélange de particules fines et d'eau est envoyé dans une cuve et les particules de pyrite sont sélectivement enduites d'huile pour les rendre hydrophobes. Le mélange d'eau-particules fines est envoyé dans les cellules de flottation où des bulles sont injectées à travers le mélange. Les particules de pyrite (riches en or) s'accrochent aux bulles d'air et montent à la surface du mélange où elles peuvent être récupérées et entreposées avant d'être envoyées par camion citerne (sic) à l'usine de LaRonde de Agnico Eagle."

[14]        Plusieurs photographies furent déposées lors de l'audition, notamment les pièces P-6, D-27 et D-33, lesquelles donnent une vue d'ensemble des immeubles construits sur le site de la mine Goldex.

[15]        Des rapports d'experts et des photographies déposés en preuve, on constate que les infrastructures suivantes furent construites sur le site de Goldex.

            1.         Chevalement;

            2.         Dôme d'entreposage du minerai;

            3.         Salle des compresseurs;

            4.         Sous-station électrique principale;

            5.         Bâtiment d'administration et vestiaire;

            6.         Bassin de sédimentation des eaux souterraines;

            7.         Bâtiment treuil temporaire;

            8.         Concentrateur;

            9.         Entrepôt;

10        Salles des pompes à résidus;

[16]        René Leclerc était inspecteur chez la demanderesse. Il affirme que, pour se rendre sur les lieux, on doit nécessairement se présenter à la guérite parce que tout le site est clôturé et il n'y a qu'un seul chemin d'accès.

[17]        Il reconnaît que, lorsqu'il s'est présenté sur le chantier, une directive existait déjà à l'effet que la prime d'industrie lourde s'appliquait à la totalité des travaux de construction effectués sur le site. Lors d'un interrogatoire avant défense, il déclarait que, si sur le site d'une mine il y a un concentrateur, la prime d'industrie lourde s'applique alors que s'il n'y a pas de concentrateur sur le site d'une mine, la prime d'industrie lourde n'est pas réclamée.

[18]        Serge Ross, inspecteur-chef chez la demanderesse, affirme également que la prime d'industrie lourde est réclamée dès l'instant où on constate la présence d'un concentrateur sur le site d'une mine.

[19]        Michel Charest est également à l'emploi de la demanderesse et il a été consulté quant à l'application de la prime au chantier Goldex. Il mentionne que, parce qu'il y a transformation du minerai, la prime d'industrie lourde s'applique.

[20]        Tel que mentionné précédemment, les rapports de deux experts furent déposés en preuve et ces deux experts ont également témoigné lors de l'audition.

[21]        Les deux experts nous ont donné une description du processus du traitement du minerai sur le site de Goldex, à l'intérieur de l'immeuble désigné comme étant le concentrateur.

[22]        L'expert Ajersch écrit à ce sujet:

"La première étape de la récupération de la phase métallisée du minerai est l'étape du concassage des morceaux de minerai généré par l'opération de sautage. Le concassage primaire se fait aux moyens des broyeurs à mâchoires, des broyeurs giratoires ou des moulins à impact. Chez GOLDEX, cette opération se fait par un concasseur à mâchoires situé au fond de la mine en dessous des galeries. La réduction de la taille du minerai par le concasseur souterrain rend le transport du minerai vers l'usine en surface plus efficace et économique.

Les opérations de l'usine GOLDEX qui s'effectuent à la surface sont des opérations classiques de la métallurgie extractive appliquée à la production de l'or. Les étapes métallurgiques qu'on y retrouvent (sic) sont les suivantes:

1)         Broyage à deux étapes;

2)         Concentration par gravité;

3)         Séparation magnétique;

4)         Conditionnement du minerai broyé;

5)         Cellules de flottaison;

6)         Décantation et séparation;

7)         Coulée de métal;

8)         Recyclage des eaux usées et scories produites;"

[23]        Pour l'expert Bazin, le traitement du minerai sur le site de Goldex (fragmentation et concentration) fait partie de la minéralurgie et non pas de la métallurgie. Il affirme que le traitement métallurgique débute lorsque le concentré est amené à une usine métallurgique ou que l'or coulé sur place est envoyé à une usine métallurgique.

[24]        En conclusion, il écrit:

Compte tenu de ce qui précède, le soussigné considère que:

·                     Les installations de surface de la mine Goldex n'ont pas été construites pour supporter l'opération d'un concentrateur. La mine Goldex est une exploitation minière et la présence d'un concentrateur ne change pas la nature de l'opération: Le concentrateur doit être considéré comme un équipement auxiliaire à l'opération d'une mine;

·                     Les opérations ayant cours dans le concentrateur et dans les installations de surface de la mine Goldex ne sont pas comparables (température, acidité, recyclage…) avec celles des usines métallurgiques ou sidérurgiques;

·                     Les rapports entre les masses de matière première traitée et les masses de produits récupérés à Goldex ne sont pas comparables avec ceux des usines métallurgiques;

·                     L'espace occupé par le concentrateur de la mine Goldex par rapport à la taille du site est très inférieur à l'espace occupé par les équipements d'extraction du métal dans une usine de produits métallurgiques;

·                     Le four à fusion du concentrateur occupe un espace minime du bâtiment et ne change pas la nature du concentrateur, puisque l'objectif de la fusion n'est pas l'extraction du métal, mais simplement son moulage dans une forme facile à peser, échantillonner et transporter;

·                     Les concentrateurs sont construits sur ou près des sites des mines, alors que les usines métallurgiques sont habituellement construites près des voies maritimes et ferroviaires;

·                     La mine Goldex est une exploitation minière et la présence du concentrateur ne change pas la nature de l'opération: Le concentrateur doit être considéré comme un équipement auxiliaire à l'opération de la mine. De la même façon, la présence d'un concentrateur sur le site de l'usine métallurgique de la fonderie Horne à Rouyn-Noranda ne change pas la nature de l'usine métallurgique même si le concentrateur est un bâtiment qui est habituellement rattaché aux exploitations minières. Le concentrateur dans ce cas est un accessoire de l'usine métallurgique.

[25]        En conséquence, il est conclu que le concentrateur et les installations de surface de la mine Goldex font partie intégrante de l'exploitation minière et ne constituent pas une usine métallurgique.

[26]        La défenderesse a assigné Paul-Henri Girard, lequel est à l'emploi de Agnico Eagle et celui-ci a identifié les documents suivants:

D-1:    Certiticat d'autorisation du 24 octobre 2005 concernant la mise en exploitation de la mine Goldex;

D-2:    Certificat d'autorisation du 22 mars 2007 concernant la construction et exploitation d'un parc à résidu minier de la mine Goldex;

D-3:    Certificat d'autorisation du 29 mai 2007 concernant la construction et l'opération d'un concentrateur de la mine Goldex;

D-4:     Bail minier du 18 avril 2008;

D-5:     Avis d'échéance annuelle d'un bail minier du 3 novembre 2008;

D-6      En liasse "Mining Duties Return" pour la période du 1er janvier au 31 juillet 2007 et annexes;

D-7     En liasse "Mining Duties Return" pour la période du 1er août au 31 décembre 2007 et annexes;

D-8     En liasse "Mining Duties Return" pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2008 et annexes;

D-9     En liasse, déclaration des droits sur les mines pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2009 et annexes;

D-21    Décision de classification pour l'année 2011 de la CSST;

D-22   En liasse, avis de cotisation du 28 mars 2010 et sommaire de compte du 27 juin 2010;

D-23   Documents explicatifs sur la classification des employeurs, décembre 2009;

D-24    Unités de classification 2009;

[27]        La partie défenderesse demande au Tribunal de tenir compte de plusieurs définitions qu'on retrouve dans les lois et les règlements adoptés par le législateur provincial.

1)         Loi concernant les droits sur les mines, L.R.Q. chapitre D-15.

Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par:

 

"concentration": tout traitement d'un minerai ou d'un résidu minier pour séparer une substance minérale de sa gangue et en obtenir un concentré;

 

"exploitation minière": l'ensemble des travaux reliés aux différentes phases du processus de développement minéral, soit l'exploration, la mise en valeur, l'aménagement minier, le réaménagement ou la restauration d'un terrain situé au Québec, l'extraction, le traitement, le transport, la manutention, l'entreposage et la commercialisation, d'une substance minérale provenant du sol du Québec, jusqu'à son aliénation ou son utilisation par l'exploitant […];

 

"mine" ensemble industriel situé au Québec ayant pour objet l'extraction et le traitement de substances minérales et qui peut comprendre une usine de traitement du minerai, un laboratoire et diverses infrastructures, telles que des installations portuaires et ferroviaires et un campement;

 

"traitement": toute activité de concentration, de fonte ou d'affinage d'une substance minérale et comprend toute activité de bouletage, de production de poudre ou de production de billettes d'acier ou toute autre activité prescrite par règlement;

 

"usine de traitement": la totalité ou une partie d'un bâtiment dans laquelle s'effectue le traitement d'une substance minérale et qui est utilisée uniquement à cette fin;

 

2.         Règlement sur les examens de la santé pulmonaire des travailleurs des mines

 

Dans le présent règlement, on entend par:

 

"mine": tout établissement, avec ou sans usine de traitement ou de transformation où s'effectuent des travaux d'exploration autres que le forage d'un puits artésien, ou des travaux d'extraction du sol ou du sous-sol, pour y retirer une substance minérale afin d'obtenir un produit commercial ou industriel;

 

            3.         Règlement sur la santé et la sécurité du travail dans les mines

 

                         Dans le présent règlement, on entend par:

 

"mine": tout établissement, avec ou sans usine de traitement ou de transformation où s'effectuent des travaux d'exploration autres que le forage d'un puits artésien, ou des travaux d'extraction du sol ou du sous-sol, pour y retirer une substance minérale afin d'obtenir un produit commercial ou industriel;

 

Les bâtiments, entrepôts, garages et ateliers situés en surface où s'effectuent des travaux reliés à l'exploration ou à l'extraction d'une substance minérale font partie d'une mine;

 

De même, les ateliers, usines de traitement, usines de bouletage ainsi que les ouvrages terrestres, tels que les convoyeurs, pipe-lines, routes, chemins de fer appartenant à une entreprise minière et utilisés aux fins de son exploitation, qui sont situés hors du site d'exploration ou d'extraction, font partie d'une mine.

 

[…]

[28]        Malgré toutes les définitions qu'on retrouve dans les lois et les règlements, on n'y retrouve pas la définition de ce que signifie le mot "métallurgie". Il nous faut donc consulter quelques dictionnaires afin d'obtenir la définition du mot métallurgie.

1)         Le petit Larousse 2003

"métallurgie": Ensemble de procédés et des techniques d'élaboration, de formage et de traitement des métaux et des alliages;

2)         Le grand Robert de la langue française, deuxième édition

"métallurgie": Fabrication des métaux, industrie, technique (ou ensemble d'industries et de techniques) permettant d'obtenir des métaux. […]

REM. Le mot métallurgie exclut en principe les opérations d'extraction du minerai ( mine), mais inclut l'enrichissement, la concentration et les divers traitements du minerai. Les économistes parlent souvent, dans cet emploi, de métallurgie lourde.

3)         Le petit Larousse 2007 nous donne également la définition suivante du mot "métallurgie":

"métallurgie" Ensemble de techniques d'extraction et de concentration des minéraux à partir de minerais bruts extraits des mines. SYN: valorisation des minerais.

[29]        Si nous examinons la preuve, il est évident que le minerai extrait du sous-sol du site Goldex est l'objet d'une transformation à la surface du site. D'ailleurs, aucune des parties ne prétend le contraire, puisque l'expert de la demanderesse affirme qu'il y a plusieurs étapes métallurgiques à l'intérieur du bâtiment désigné comme étant le concentrateur, tandis que l'expert de la défenderesse reconnaît qu'il y a fragmentation et concentration à l'intérieur de ce bâtiment.

[30]        Compte tenu de la nature des activités à l'intérieur du bâtiment désigné comme étant le concentrateur, on peut affirmer que la définition du mot "minéralurgie" couvre bien ces opérations. Il faut aussi reconnaître que la définition du mot "métallurgie" couvre également l'ensemble des activités ayant cours à l'intérieur du bâtiment désigné comme étant le concentrateur.

[31]        Le Tribunal croit nécessaire de rappeler que la principale question en litige est de savoir si une usine métallurgique fut construire sur le site Goldex. Le Tribunal n'a pas à déterminer s'il y a eu construction d'une usine minéralurgique ou s'il y a eu construction d'une usine métallurgique.

[32]        Compte tenu de la nature des opérations effectuées à l'intérieur du bâtiment désigné comme étant le concentrateur, le Tribunal en arrive à la conclusion qu'une usine de transformation, usine métallurgique, fut érigée sur le site Goldex.

[33]        La preuve démontre que la demanderesse ne réclame pas la prime d'industrie lourde pour les travaux de construction d'une mine où il n'y a aucune usine de transformation, où il n'y a pas de concentrateur. Cette décision de la demanderesse est conforme à la convention collective puisque celle-ci ne prévoit pas les travaux de construction d'une mine à la définition "industrie lourde" qu'on retrouve à la convention collective.

[34]        En ce qui concerne le site de Goldex, la demanderesse exige la prime d'industrie lourde pour tous les travaux de construction réalisés sur le site. Ainsi, selon les prétentions de la demanderesse, la prime d'industrie lourde est payable pour les travaux de construction du chevalement de la mine. Parce qu'il y a une usine de transformation, où s'effectuent des opérations classiques de la métallurgie extractive selon l'expert de la demanderesse, la construction du chevalement fait partie de l'usine métallurgique.

[35]        Ainsi, selon les prétentions de la demanderesse, la construction des infrastructures de la mine sur le site de Goldex devient assujettie à la prime d'industrie lourde, alors que cette prime n'est pas exigible en vertu de la convention collective.

[36]        La question qui se pose est donc la suivante: Est-ce que la prime d'industrie lourde est exigible pour tous les travaux de construction effectués sur le site de Goldex?

[37]        La convention collective ne fournit pas la réponse à cette question. La convention collective ne prévoit pas qu'une mine avec une usine de transformation, où des opérations classiques de la métallurgie extractive sont réalisées, devient par le fait même assujettie à la prime d'industrie lourde.

[38]        Le législateur québécois a cependant prévu qu'une mine demeure une mine même si elle comprend une usine de traitement du minerai. À la lecture des définitions ci-haut mentionnées qu'on retrouve à la Loi sur les mines, on peut affirmer que le législateur québécois n'a pas considéré qu'une mine devenait une usine métallurgique du seul fait qu'on retrouve sur le site une usine de transformation où sont réalisées des opérations classiques de la métallurgie extractive.

[39]        Il est intéressant de noter que dans la définition du mot "traitement", le législateur québécois parle de "toute activité de concentration". Enfin, il est également important de noter que le législateur québécois nous donne la définition des mots "usines de traitement". Par conséquent, pour le législateur québécois, sur le site d'une mine, il peut y avoir une usine de traitement, usine où des opérations classiques de la métallurgie extractives sont réalisées.

[40]        Il faut noter que l'expert de la demanderesse délimite clairement le site de l'usine de traitement qu'on retrouve chez Goldex. Il écrit:

"L'usine comprend les broyeurs, les unités de séparation par gravité, les cellules de flottation, l'épaississeur et la raffinerie."

[41]        Ainsi, pour l'expert de la demanderesse, l'usine de traitement correspond à la définition que le législateur québécois nous donne des mots usine de traitement.

[42]        Par conséquent, le Tribunal considère que l'usine de traitement du minerai est accessoire à la mine Goldex. L'accessoire ne modifie pas la nature de l'exploitation du site. Le site Goldex est le site d'une exploitation minière sur lequel on retrouve une usine de traitement.

[43]        Ainsi, la prime d'industrie lourde ne s'applique pas à la totalité des travaux de construction effectués sur le site de Goldex, mais seulement aux travaux de construction de l'usine de traitement où, il faut le rappeler, des opérations classiques de la métallurgie extractive sont effectuées.

[44]        Un examen attentif de la preuve documentaire de la demanderesse ne permet pas au Tribunal de connaître la proportion de la prime d'industrie lourde devant être payée pour la construction de l'usine de traitement. Par conséquent, le Tribunal ne peut condamner la défenderesse à payer quoi que ce soit à la demanderesse.

[45]        PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[46]        REJETTE le recours de la demanderesse avec dépens.

 

__________________________________

LAURENT GUERTIN, j.c.s.

 

Me Claude Fontaine

Fontaine, Descôteaux

Avocat de la partie demanderesse

 

Me Yves Turgeonr

Heenan. Blaikie

Avocat de la partie défenderesse

 

Me Normand Leblanc

Leblanc, Lamontagne et Associés

Avocat de l'intervenante

Association de la construction du Québec

 

Me André Dumais

1010, Sherbrooke Ouest, bureau 204

Montréal (Québec) H3A 2R7

Avocat de l'intervenant

Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (international)

 

Date d’audience :

10 juin 2011

 

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.