Décision

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Lac-du-Cerf (Municipalité de) c. Ménard

2016 QCCS 4616

JD2646

 
 COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE LABELLE

 

 

N° :

560-17-001491-130

 

 

 

DATE :

26 septembre 2016

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

PIERRE DALLAIRE, J.C.S.

______________________________________________________________________

 

 

MUNICIPALITÉ DE LAC-DU-CERF

Demanderesse

 

c.

 

ROXANNE MÉNARD

 

et

 

GUYLAINE FORTIN

Défenderesses

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Il arrive parfois qu’un projet de rénovation ou de construction tourne au cauchemar, que les travaux effectués en vue de transformer un chalet décrépit et dans un état pitoyable (pour ne pas dire vétuste) en un bâtiment qui a de la gueule et qui est solidement érigé[1] ouvre les portes de l’enfer pour les propriétaires[2].

 

[2]           C’est le cas ici.

 

[3]           En effet, le Tribunal est saisi d’une Requête introductive d’instance en démolition du chalet rénové ou reconstruit, c’est selon, déposée par la partie demanderesse (dorénavant : « la Municipalité »), au motif que les travaux de construction effectués l’ont été dans un contexte où le chalet, dérogatoire parce que construit à l’intérieur de la marge de recul de 20 mètres du lac[3], aurait perdu ses droits acquis vu la démolition  effectuée délibérément et non par une cause fortuite[4].

 

[4]           Il faut comprendre que la « démolition » réfère aux travaux qui ont été effectués en vue de réparer ou remplacer la structure existante par un chalet fort différent de ce qui existait à l’origine.

 

[5]           Selon la preuve, le chalet d’origine, qualifié de « camp de chasse » dans certains documents[5], a été construit bien avant que la Municipalité ne se dote de son premier règlement de zonage et, par conséquent, malgré le fait qu’il est construit à peine à un mètre du lac, il jouit de droits acquis sur cette base.

 

[6]           Si ce vieux chalet était resté tel qu’il était, il n’y aurait pas eu de litige.

 

[7]           Toutefois,  avec le passage du temps qui fait son œuvre, détériore et détruit tout ce qui existe, qu’il s’agisse des bâtiments, des humains ou de tout ce qu’on trouve dans la nature, la question de l’avenir du chalet s’est posée, semble-t-il, en 2012.

 

[8]           Il ressort toutefois du dossier que ce ne sont pas les propriétaires qui ont pris l’initiative de voir ce qui pouvait ou ce qui devait être fait pour le chalet.

 

[9]           Celles-ci, Guylaine Fortin et sa fille Roxanne Ménard, ont purement et simplement abdiqué et abandonné toute initiative ou contrôle de la situation en faveur de Bruno Ménard (dorénavant : « Ménard »[6]), époux de Guylaine et père de Roxanne,  par une procuration qui se lit comme suit :

 

 

PROCURATION

 

06/07/2012

 

j’AUTORISE BRUNO MÉNARD À RÉGLER OU

DISCUTER DE TOUT CE QUI CONCERNE

 

LA TERRE ET LA MAISON DU […] (sic)

AU LAC DU CERF

 

INCLUANT LES PERMITS (sic) ET CONTRAVENTION.. (sic)

 

 

SIGNÉ A st jean sur richelieu LE SIX JUILLET

2012

                                                

                                                 Roxanne Ménard (s)

propriétaire

Roxanne ménard  (sic)[7]

 

[10]        Depuis le contrat de Faust avec le diable en vertu duquel il lui cédait son âme en échange de retrouver la jeunesse, rarement le Tribunal aura-t-il vu la signature d’une personne avoir des conséquences aussi potentiellement terribles et dramatiques pour celle qui confie ainsi le sort de sa propriété à quelqu’un à qui elle fait confiance : son père Bruno Ménard.

 

[11]        En effet, après avoir entendu la preuve pendant deux jours dans cette affaire, il ressort clairement que le responsable de cet imbroglio qui a forcé la Municipalité à entreprendre des procédures judiciaires pour faire respecter ses règlements est Ménard.

 

[12]        S’il avait agi dès le départ avec un minimum d’humilité et de bon sens au lieu de se comporter comme s’il était omniscient et tout puissant, il aurait peut-être pu éviter à sa femme, sa fille et son gendre[8] cette aventure judiciaire coûteuse et susceptible de conséquences désastreuses.

 

[13]        Par son attitude arrogante et fermée, il aura raté toutes les chances de mener le projet de rénovation ou de remplacement du chalet à bon port en respectant la réglementation municipale applicable.

 

[14]        Pour ce faire, il aurait toutefois fallu qu’il soit capable d’écoute de ce qui lui était communiqué par l’inspectrice en bâtiment et en environnement de la Municipalité, Mme Marilyne Fraser (dorénavant « Fraser »). 

 

[15]        Il aurait fallu qu’il consulte un architecte en temps utile pour se faire confirmer la vétusté du chalet afin de pouvoir le démolir et le reconstruire.

 

[16]         Il aurait aussi fallu qu’il soit capable d’informer la Municipalité de ce qui se passait avec le projet, lorsqu’il dit avoir découvert que les murs en bois rond étaient pourris, ce qu’il a failli lamentablement de faire. 

 

[17]        À ce sujet, contre-interrogée par le procureur des défenderesses qui, au moyen d’une question très suggestive (ce qui est tout à fait légal en contre-interrogatoire), tentait de lui faire dire que les communications avec Ménard étaient bonnes, Fraser, après ce qui a semblé un long moment de silence, a répondu : « Non, pas vraiment ».

 

[18]        Toute autre réponse aurait été un mensonge.

 

[19]        Dans ses rapports avec l’inspectrice, Ménard se comportait de toute évidence avec condescendance, donnait peu ou pas d’informations sur les travaux projetés, ne s’informait pas des contraintes réglementaires et, généralement, faisait à sa guise sans se préoccuper de la Municipalité.

 

[20]        Pourtant, il s’est vanté devant le Tribunal d’avoir une longue expérience de plus de 20 ans dans le domaine de la construction et de la rénovation[9]. Il ne pouvait pas ne pas savoir qu’il existe un cadre juridique réglementaire qui pose des exigences au propriétaire qui veut entreprendre des travaux.

 

[21]        Le portrait sévère que le Tribunal peint de Ménard n’est pas fait de gaieté de cœur.

 

[22]        Il aurait été tellement plus agréable de décrire quelqu’un qui aurait collaboré avec la Municipalité, qui l’aurait tenue au courant des problèmes encourus au cours des travaux, qui aurait obtenu son permis avant d’entreprendre les travaux, qui aurait informé la Municipalité des changements rendus nécessaires par la découverte de pourriture dans la structure des murs et qui aurait cherché une solution avec l’inspectrice au lieu de s’arroger le droit de continuer les travaux comme si de rien n’était malgré l’émission d’un avis de cessation des travaux émis par cette dernière.

 

[23]        En deux mots, Ménard s’est comporté comme s’il était au-dessus des lois et des règlements, s’arrogeant le droit de faire les choses à sa guise et se faisant justice à lui-même, sans aucune considération pour la représentante des autorités municipales.

 

[24]        Mais il y a plus. En agissant de la sorte, Ménard a entraîné dans son sillage sa femme, sa fille et son gendre, qui ne semblaient pas plus informés que l’inspectrice municipale de ses agissements débridés et irresponsables.

 

[25]        Ni l’une ni l’autre des défenderesses n’a témoigné. Le Tribunal a toutefois vu deux femmes d’âges différents assises dans la dernière rangée de la salle d’audience qui semblaient de plus en plus mal à l’aise et inquiètes à mesure que le procès avançait.

 

[26]        Par ailleurs, le gendre, Yan Arcand (dorénavant : « Arcand »), a témoigné.

 

[27]        Il a admis n’avoir jamais vu le permis de construction, signé par Ménard[10], et ne pas avoir la moindre idée des exigences municipales. Questionné sur son ignorance du projet en contre-interrogatoire, il répondra, le visage défait et la mine déconfite : « Pour le permis, je l’ai pas vu. J’ai fait confiance à Bruno. Dans ma tête, tout était beau. Il a l’expérience. Je lui fais confiance ».

 

[28]        Le Tribunal en conclut que le gendre, comme probablement les défenderesses, n’avait pas la moindre idée de la façon dont Ménard menait les choses, armé de ses procurations.

 

[29]        Par ailleurs, avant de passer à autre chose, le Tribunal tient à souligner qu’il n’accorde pas la moindre crédibilité au témoignage de Ménard.

 

[30]        Il s’est révélé un témoin louvoyant, incapable de donner des dates précises de peur de s’incriminer, prêt à dire n’importe quoi pour se disculper et se faire bien paraître en tentant entre autres de faire porter l’odieux de la situation à l’inspectrice Fraser qui, le Tribunal tient à le dire, a témoigné avec franchise, clarté, dignité, et fiabilité malgré son expérience limitée[11].

 

[31]        Les notes de suivi de Fraser, qui sont contemporaines aux rencontres avec Ménard et qui semblent en décrire fidèlement le contenu, constituent une preuve beaucoup plus plausible et crédible que les affirmations de Ménard devant le Tribunal.

 

[32]        À titre d’exemple, le 13 août 2012, Fraser note que Ménard lui a dit qu’il demanderait l’avis d’un architecte pour faire considérer vétuste le chalet, ce qui lui aurait alors permis de le reconstruire en préservant les droits acquis.

 

[33]        Devant le Tribunal, Ménard ergote sur le sens du mot « vétuste » et laisse entendre qu’il se demande alors s’il va consulter un ingénieur. Il laisse aussi entendre que Fraser lui donne une définition du mot « vétuste » assez improbable : ça voudrait dire « non habitable…abandonné » et que, dans ce contexte, il n’a pas poursuivi ses démarches.

 

[34]        Pour le Tribunal, il est clair que Fraser a guidé correctement Ménard quant à l’application du règlement en lui disant que c’est sur la base d’un rapport d’architecte que la Municipalité s’appuie pour permettre la démolition et la reconstruction en fonction de la vétusté et que Ménard a alors indiqué à Fraser qu’il allait consulter un architecte sur cette question, ce qu’il a décidé par la suite de ne pas faire[12]. Il aurait pu le dire franchement.

 

[35]        Autre exemple : Ménard modifie sa défense à la dernière minute pour alléguer une rencontre avec Fraser le 26 avril 2013. Il témoigne en ce sens.

 

[36]        Pourtant, les notes de Fraser, qui semblent complètes en ce que toutes les dates de rencontres sont indiquées, révèlent que la première rencontre en 2013 a eu lieu le 29 avril. C’est d’ailleurs la date que l’on retrouve à la défense d’origine pour cette première rencontre.

 

[37]        Il ressort de la preuve que Ménard a commencé à faire des travaux le 26 avril sans permis. Le Tribunal en conclut que Ménard modifie sa défense et allègue maintenant de façon mensongère une rencontre le 26 avril pour tenter de montrer qu’il n’a pas commencé les travaux avant de rencontrer l’inspectrice. 

 

[38]        Ce ne sont là que deux exemples parmi d’autres. En résumé, Ménard n’est tout simplement pas digne d’être cru. Et ce n’est pas parce qu’il pontifie avec morgue, toujours prêt à blâmer les autres[13] que ceci  augmente sa crédibilité.

 

[39]        Cette longue introduction vise à mettre le dossier en contexte à partir des observations qu’a pu faire le Tribunal pendant le procès.

 

[40]        Il s’agit maintenant de se pencher sur la trame factuelle, telle qu’elle ressort de la preuve entendue au cours de l’audition, et de lui appliquer les principes juridiques qui s’imposent.

 

Les faits et le droit qui leur est applicable

 

[41]        Selon le témoignage de Ménard, le chalet est dans sa famille depuis les années 50 alors qu’il appartenait à son grand-père. Il a par la suite été acquis par son oncle et, vers 2006[14], son épouse en devient propriétaire.

 

[42]        Ménard indique qu’il a amené son épouse voir le chalet, où il n’était pas allé depuis 20 ans, et ajoute : « j’ai vendu ma résidence dans l’État de New York… on achète le chalet… plus de tranquillité… moins de taxes ».

 

[43]        À part la vente par son épouse, d’une demie indivise du chalet à sa fille Roxanne en 2008, il ne se passe rien en ce qui concerne le chalet, une cabane en bois rond qui a vu des jours meilleurs[15], jusqu’en 2012.

 

[44]        Dans son témoignage, Ménard laisse entendre qu’il y a eu des démarches en 2010 pour des rénovations. Il aurait rencontré à la Municipalité le prédécesseur de Fraser. Il décrit ainsi la situation : « Mme Fraser était pas là… (il y avait) un homme expérimenté de Kiamika… il était urbaniste ». Cette tentative à peine voilée de diminuer Fraser n’a pas impressionné le Tribunal.

 

[45]        Quoiqu’il en soit, c’est à l’été 2012 que s’enclenche la problématique de la rénovation ou de la reconstruction du chalet. Selon Ménard, en 2012, il « fait venir (Fraser) pour lui faire visiter le chalet ». Il dira : « je montre le chalet… les entrées électriques… la plomberie… le chalet… était beaucoup non règlementaire. Pas de solage… il était fatigué… surtout la toiture… on met une toile pour arrêter la pluie… ».

 

[46]        Son témoignage est remarquablement vaseux en ce qui concerne les échanges sur la question de la vétusté du chalet et la possibilité de reconstruire dans la zone riveraine si le chalet est déclaré vétuste.

 

[47]        En particulier, lors de son contre-interrogatoire, Ménard tente de laisser croire que la question de la vétusté est bien obscure, que Fraser lui donne une définition (c’est « abandonné… non habitable ») qui semble le confondre et qu’il ne sait trop s’il consultera un ingénieur à ce sujet.

 

[48]        En fait, les notes de suivi de Fraser révèlent qu’il y a eu à l’été 2012 pas moins de 10 rencontres entre elle et Ménard. Il en ressort très clairement que la question de vétusté dépend de l’opinion d’un architecte et que Ménard, le 13 août 2012 lui dit « qu’il demanderait l’avis d’un architecte pour le (chalet) faire considérer vétuste »[16].

 

[49]        Toutefois, le 16 novembre, lors du dernier contact entre elle et Ménard en 2012, elle note que ce dernier « ne semblait pas encore certain de ce qu’il voulait faire ».

 

[50]        Une chose est claire : si Ménard avait alors obtenu l’opinion d’un architecte, il aurait pu dès lors obtenir de la Municipalité un certificat de démolition pour le vieux chalet et un permis de construction pour un nouveau chalet bénéficiant des droits acquis.

 

[51]        Pourquoi cette question est-elle si importante dans le présent dossier?

 

[52]        Tout simplement parce que le règlement municipal[17] permettant de faire déclarer un immeuble vétuste pour le reconstruire en préservant ses droits acquis, qui était en vigueur à l’été 2012,  allait être amendé en 2013 afin de supprimer cette option.

 

[53]        Le Tribunal a compris des explications de Fraser que cette disposition était difficile à appliquer car dans certains cas, un architecte pouvait déclarer vétuste un bâtiment qui, de toute évidence, ne l’était pas, afin de permettre au propriétaire de se construire un nouveau bâtiment[18].

 

[54]         Selon le témoignage de Fraser, de même que selon le plan d’argumentation des procureurs de la Municipalité[19], c’est le 1er mai 2013 que le nouveau règlement[20] prend effet.

 

[55]        Il en ressort que la position de la Municipalité est que si la demande de certificat de démolition et de permis de construction (pour démolir le chalet vétuste et reconstruire avec droits acquis) avait été déposée avant le 1er mai 2013, il n’y aurait pas eu de problème[21].

 

[56]        Toutefois, on le verra, aucune telle demande n’a été déposée avant le 1er mai 2013.

 

[57]        C’est en avril 2013 que tout s’est joué et que la situation s’est cristallisée.

 

[58]        Ménard prétend maintenant[22] s’être rendu à la Municipalité le 26 avril 2013 « pour le lancement du projet de rénovation », sans plus.

 

[59]        La défense initiale indiquait plutôt qu’il s’y était rendu le 29 avril[23] et qu’on l’a à ce moment informé du processus de modification règlementaire entrepris (suppression de la notion de vétusté pour maintenir les droits acquis).

 

[60]        Ménard a prétendu pendant son témoignage n’avoir été informé du changement règlementaire entrepris que le 29 mai 2013… même chiffre, autre mois. Plus tard dans son témoignage, il dira qu’il l’aurait su entre le 20 et le 29 mai.

 

[61]        En fait, tout cela n’est qu’un tissu de mensonges.

 

[62]        La première rencontre avec Fraser n’a pas eu lieu le 26 avril comme le prétend maintenant, et tardivement, Ménard. Elle a eu lieu le 29 avril comme le confirme les notes de Fraser[24].

 

[63]        Le Tribunal croit Fraser quand elle dit qu’elle a alors, le 29 avril,  informé Ménard du processus de modification du règlement, ce qui est d’ailleurs reconnu par Ménard dans sa défense initiale[25] avant qu’il ne prétende, sans aucune explication plausible pour ce changement de cap, qu’il aurait été informé le 29 mai.

 

[64]        Pourquoi ces mensonges?

 

[65]        Probablement parce que Ménard tente de camoufler le fait qu’avant le 29 avril,  soit au cours de la fin de semaine du 26 au 28 (du vendredi au dimanche), il a commencé les travaux de construction sans permis et même sans avoir pris contact avec la Municipalité à ce sujet[26].

 

[66]        La preuve à ce sujet est accablante.

 

[67]        C’est bien le 29 avril que Ménard rencontre Fraser pour l’informer de « son nouveau projet du chalet », selon les notes et le témoignage, fiables, de Fraser.

 

[68]        À cette date, Ménard indique qu’il a décidé de refaire le toit au complet, de ré-isoler les murs de l’extérieur sur la structure existante (en bois rond), d’ajouter un revêtement extérieur en planches de pin teintes et de remplacer toutes les fenêtres.

 

[69]        Il s’agit, à n’en pas douter, de « rénovations majeures au chalet » et ce sont ces mots que Fraser inscrira sur le permis de rénovation[27] car pour elle, refaire le toit constitue une rénovation majeure.

 

[70]        Ménard remet alors à Fraser un plan sommaire montrant les fermes de toit[28], préparé par l’entreprise qui les a produites et qui, selon son témoignage, doivent prendre appui sur la structure qu’il a érigée les 27 et 28 avril des deux côtés du chalet.

 

[71]        Ménard, dans son témoignage, tentera de convaincre le Tribunal que lors de la rencontre du 26 avril (qu’il invente dans sa défense modifiée et qui n’a pas eu lieu), il a parlé à Fraser de la mezzanine qu’il entend construire en-dessous des fermes de toit. 

 

[72]        Il ajoute en avoir reparlé de nouveau lors de la rencontre du 29 avril. Avec assurance, il affirme que  « moi et mon gendre (Arcand), on explique tout ce qu’on va faire ».

 

[73]        Le Tribunal ne le croit pas. Non seulement son gendre n’est-il pas là le 29 avril (il n’accompagnera Ménard que le 6 mai pour aller chercher le permis), mais il est tout à fait improbable que Ménard ait donné d’autres précisions quant aux travaux à être effectués que ceux qui ont été inscrits dans la demande de permis.

 

[74]        Pourquoi Fraser aurait-elle omis d’inclure au permis des travaux annoncés? Quel avantage en tirerait-elle?

 

[75]        Par contre, Ménard, qui a commencé les travaux sans permis en mentant à ce sujet, a certainement avantage à prétendre avoir expliqué tous les travaux qu’il fera et qui ne sont indiqués ni dans le permis, ni visibles sur le plan des fermes de toit[29] qu’il dépose le 29 avril. Ainsi, il tente de transporter le blâme pour le silence du permis sur ces autres travaux sur les épaules de Fraser.

 

[76]        Il tente par ailleurs de s’attribuer la paternité des mots « rénovations majeures du chalet » que l’on retrouve à la page 1 du permis mais le Tribunal croit plutôt Fraser qui dit avoir résumé ainsi les travaux décrits plus loin dans le permis.

 

[77]        Ménard tentera d’utiliser ces mots dans son témoignage pour justifier tous les travaux qu’il fera par la suite sans les avoir fait inclure dans sa demande de permis. Il dira :

C’est pas marqué (dans le permis) pour l’électricité… mais je l’ai dit… la plomberie… les footing… et bases de ciment… si j’ai un permis qui dit de suivre code du bâtiment… je suis le code du bâtiment… je sais que c’était « rénovations majeures ».

 

[78]        En d’autres mots, il prétend avoir parlé de tous les autres travaux envisagés lors de la demande de permis… mais ajoute que les mots « rénovations majeures » l’autorisent à faire tous les travaux permettant de rendre le chalet conforme au code du bâtiment.

 

[79]        Lors de la rencontre du 29 avril, Ménard et Fraser conviennent que Ménard viendra chercher le permis le lendemain, 30 avril, selon le témoignage de Fraser qui ajoute que le 30, Ménard ne se présente pas.

 

[80]         Ménard commencera par prétendre que le permis n’est pas disponible parce que Fraser « a des commissions à faire… ou je ne sais pas quoi » avant d’admettre plus tard qu’il est possible qu’il ait convenu d’aller le chercher le 30 avril, ce qu’il n’a pas fait[30].

 

[81]        C’est donc le 6 mai que le permis sera signé lors d’une rencontre avec Fraser à laquelle assistent aussi le gendre Arcand et la fille de ce dernier (et petite-fille de Ménard).

 

[82]        Signalons au passage que le 30 avril, à défaut de voir Ménard venir chercher son permis, Fraser se rend sur place, au chalet, et constate que les travaux sont bel et bien commencés sans permis et sans autorisation, même verbale[31].

 

[83]        Les photos[32] qu’elle produit sont éloquentes. On voit la structure, de chaque côté du chalet, qui doit recevoir les fermes de toit (dont elle a reçu le plan sommaire la veille), des indices d’une démolition des séparations intérieures et des accumulations de débris. Tout cela, sans permis.

 

[84]        Il est maintenant temps de se pencher un peu plus longuement sur le permis de rénovation[33] en question, qui est au cœur du litige.

 

 

 

 

 

 

 

 

[85]        Les engagements du propriétaire semblent clairs. Si des travaux non mentionnés au permis sont envisagés, une nouvelle demande doit être faite à la Municipalité[34].

 

[86]        Aussi : « si les murs sont démolis, en une fois ou de façons successives, à plus de 50% par un acte non fortuit, » ce sera considéré comme un abandon volontaire des droits acquis. C’est indiqué en toutes lettres.

 

[87]        Mais que ce soit clair ou non importe peu.

 

[88]        Ménard, avec une désinvolture et une inconscience qui laissent pantois, témoignera qu’il n’a pas lu le permis qu’il a signé. Venant d’un individu qui se vante d’une expérience de plus de 20 ans dans le domaine de la construction, c’est difficilement croyable…mais c’est son témoignage.

 

[89]        Il faut dire que l’alternative, à savoir admettre avoir lu le permis, le place dans une position encore plus intenable : comment justifier ne pas avoir avisé la Municipalité des travaux non mentionnés au permis ou avoir démoli plus de 50% des murs quand il est clair que cela entraîne la perte des droits acquis, alors que tout ceci est écrit noir sur blanc dans le permis?

 

[90]        Il faut ajouter, dans la chronologie des évènements, qu’entre le 29 avril et le 6 mai (date à laquelle il ira chercher le permis), Ménard continue les travaux. Il dira : « Elle me dit que je peux aller chercher le permis le 30….pour nous on est en business…on peut commencer…. ». 

 

[91]        En fait, il continue les travaux qui ont débuté le 26 avril.

 

[92]        À partir du 29 avril, jamais Ménard n’informera Fraser de changements dans les plans ou dans les travaux prévus dans le permis de construction. Lorsqu’il va signer et chercher le permis le 6 mai, il ne signale aucune lacune dans le permis quant à la liste des travaux qu’il entend effectuer.

 

[93]        Pourtant, il a témoigné avoir constaté la présence de moisissure dans les murs de bois rond entre le 3 et le 5 mai, une information cruciale pour ajuster le permis à la lumière de cette information.

 

[94]        Par la suite, fidèle à lui même, il dira : « je me trompais quand j’ai dit que j’ai connaissance de la moisissure entre le 3 et le 5 mai» et il réajuste maintenant le tir pour dire par la suite que c’est « entre le 7 et le 10 mai » (après l’émission du permis) qu’il a découvert le problème de moisissure[35].

 

[95]        Quoi qu’il en soit, ce qu’il est important de souligner, c’est que cette information n’a jamais été communiquée à Fraser. Cette dernière ira sur le chantier le 10 mai. Ménard ne semble pas être là. Elle prend des photos[36] et inscrit dans ses notes que le mur avant, du côté du lac, a été détruit et de façon prémonitoire, elle ajoute : « Si le reste du bâtiment est refait de la même façon, le droit acquis sera perdu »[37]. On en comprend que plus de 50% des murs seraient alors détruits volontairement.

 

[96]        Fraser retourne sur le chantier le 15 mai pour constater que tous les murs extérieurs en bois rond ont été démolis. Il y a des tas de billots ici et là sur le terrain. Quant au toit, il est soutenu par la structure qui avait été érigée entre le 26 et le 29 avril. Les murs de côté et à l’arrière sont remplacés par des vides béants. Il n’y a plus de murs, sauf le nouveau mur côté lac.[38]

 

[97]        Mais il y a plus.

 

[98]        Ménard, sans aviser la Municipalité, a pris l’initiative non seulement de « démonter » ou détruire les murs en bois rond à cause de la moisissure, mais il a aussi entrepris de remplacer une partie du plancher de bois (pourri et pas au niveau) et de faire couler une dalle en béton qui constitue non seulement un nouveau plancher mais aussi un agrandissement du bâtiment du côté du chemin (pas du côté du lac).

 

[99]        Rien de tout ceci n’est indiqué au permis de rénovation.

 

[100]     À ce stade, il ne reste du chalet originel qu’une partie du plancher de bois, l’autre partie étant remplacée par une dalle de béton.

 

[101]     Le 16 mai, Fraser consulte Madame Raymond de la MRC et Me Soucy, le procureur de la Municipalité et le 17 mai, émet un avis d’infraction[39]. Il en ressort qu’elle souligne la perte de droits acquis pour construire dans la bande riveraine (vu la démolition de plus de 50% des murs) et  que, dans ce contexte, la dalle de béton et tout autre composante du bâtiment ne peuvent être construits qu’à 20 mètres de la rive.

[102]     L’avis de cessation des travaux est placardé sur le chalet le 17 mai[40] en présence de Ménard qui conteste « le fait qu’il n’avait pas respecté le permis »[41] et qui se défend en disant qu’un conseiller est même venu voir les débris et noté que le chalet était « tout pourri »[42].

 

[103]     Par la suite, comme il fallait s’y attendre de Ménard[43], les travaux continuent sans vergogne. C’est ce qui ressort des photos prises[44] lors de l’inspection du 21 mai[45]. Ménard est sur place et insiste pour montrer les billots pourris et demande « ce qui s’applique (au niveau règlementaire) quand il fait des travaux de rénovation et qu’il se rend compte pendant les travaux que les murs sont pourris »[46].

 

[104]      Le Tribunal a tendance à penser que c’est une excellente question qu’il aurait dû poser avant de jeter les murs par terre et qu’il aurait peut-être dû explorer lorsque la possibilité de faire déclarer l’immeuble vétuste était ouverte, soit avant le 1er mai 2013.

 

[105]      Notons que le 22 mai 2013 une réunion spéciale du conseil de la Municipalité est tenue pour ce dossier.

 

[106]     Selon le procès-verbal, Ménard et son gendre y assistaient et « expliquent leur point de vue et posent des questions », à la suite de quoi le conseil mandate ses procureurs « de prendre les mesures appropriées pour faire respecter sa règlementation » [47], ce qui signifie, vu la perte de droits acquis, demander la démolition du chalet.

 

[107]     Suite à l’adoption de la résolution, Ménard a continué les travaux après une brève trêve et les a complétés par la suite.

 

[108]      C’est sur la base de cette résolution que les procédures ont été entreprises en vue de faire démolir le chalet dépouillé de ses droits acquis, ou à tout le moins l’obliger à se relocaliser à 20 mètres de la rive.

 

[109]     Quel gâchis.

 

 

[110]     Selon la preuve, Arcand a dépensé pas moins de 200 000 $ pour les travaux[48], incluant plus de 30 000 $ pour les nouvelles fenêtres, car il semble bien que ce soit lui, son épouse Roxanne et leurs enfants qui soient les véritables usagers[49] de ce chalet bien que l’épouse de Ménard soit propriétaire d’une demie indivise.

 

[111]      Par ailleurs, l’architecte Jutras, reconnu comme expert en tant qu’architecte avec une expérience particulière en enveloppe de bâtiments, a témoigné que les coûts d’un éventuel déplacement du bâtiment pour le relocaliser à 20 mètres de la rive seraient prohibitifs et que l’enlèvement de la dalle, coulée à l’endroit précis où le droit acquis existait,  serait de nature à poser des problèmes plus graves pour l’intégrité de la rive que le fait de la laisser en place.

 

[112]      En fait, le caractère très onéreux du déplacement d’un bâtiment est pratiquement un fait notoire.

 

[113]      Mais là n’est pas la véritable question qui se pose au Tribunal. Que ça coûte cher ou non, que le déménagement du chalet soit difficile ou onéreux, importe peu.

 

[114]     Ce que le Tribunal doit décider, c’est la question juridique de savoir si, en vertu des règlements applicables et du permis émis, les défenderesses ont conservé leurs droits acquis à un chalet implanté en partie dans la zone riveraine de 20 mètres malgré la démolition de plus de 50% des murs du rez-de-chaussée?

 

[115]      À ce sujet, la preuve est concluante. Les murs extérieurs ont été entièrement démolis. Sans doute étaient-ils grugés par la moisissure et les fourmis charpentières, mais ils ont été démolis.

 

[116]     En ce sens, les prétentions de Ménard, qui affirme les avoir « démontés » et remontés et en avoir conservé plus de 50% ne tiennent pas la route.

 

[117]     Ces billots constituaient la structure extérieure du chalet, aussi déficiente puisse-t-elle avoir été, et cette structure n’existe plus.

 

[118]     La preuve révèle qu’avec créativité, les billots non pourris ont été nettoyés et par la suite sciés en planches décoratives qui ont été appliquées sur les murs intérieurs du chalet sur une surface qui dépasse possiblement 50% des murs.

 

[119]     À ce niveau, l’architecte Jutras, dont le degré d’impartialité et d’objectivité est forcément diminué par le fait qu’il a, par le passé, rempli différents mandats pour les rénovations des restaurants de Ménard et qui a été impliqué ici spécifiquement pour l’aider à se sortir du bourbier dans lequel il s’est vautré dans le présent dossier, n’est guère utile pour éclairer le Tribunal.

 

[120]     Il n’a sans doute pas tort quand il indique que plus de 50% de la surface intérieure des murs est couverte de planches décoratives sciées à même les billots non pourris.

 

[121]     Il n’a certainement pas tort non plus quand il affirme que les murs en bois rond, datant des années cinquante, ne pouvaient soutenir le toit (Ménard avait d’ailleurs, entre le 26 et le 29 avril 2013, érigé des structures de chaque côté du chalet pour supporter le toit) et qu’il n’était pas acceptable, au niveau architectural et des règles de l’art en construction, de garder des murs pourrissants ou pourris.

 

[122]      Toutefois, ceci ne permet pas de conclure que 50% des murs ont été conservés, comme l’exige le règlement en vigueur au moment de la demande de permis de rénovation.

 

[123]     Par ailleurs, le commentaire de Jutras à l’effet que Ménard s’est trouvé pris dans une souricière sans issue quand il a découvert que les murs étaient pourris et qu’il n’avait d’autre choix que de les enlever trouverait plus de résonnance auprès du Tribunal si Ménard ne s’était pas lui-même confiné dans la souricière en agissant sans informer la Municipalité et en bafouant le règlement alors que l’adage voulant que nul ne  peut ignorer la loi prend ici tout son sens.

 

[124]     Le constat que le Tribunal fait est que 100% des murs extérieurs ont été démolis. Ils n’ont pas été démontés et remontés. Ils ont été détruits et les débris récupérables ont servi à faire des planches décoratives qui ont été appliquées sur la surface interne des nouveaux murs qui constituent la structure du chalet.

 

[125]     En ce sens, Fraser a tout à fait raison de conclure à la perte des droits acquis le 15 mai 2015 quand elle constate que les murs sont disparus.

 

[126]     Encore là, Ménard n’en avait rien dit. Il n’avait pas pris la précaution élémentaire avant de jeter les murs par terre d’informer la Municipalité du problème encouru et de s’enquérir quant à la possibilité de trouver une solution. Non. Il démolit de son propre chef sans consulter qui que ce soit.

 

 

 

 

[127]     Bien sûr, la situation serait bien différente si Ménard, à l’été 2012 ou avant le 1er mai 2013, avait déposé une demande de démolition et reconstruction fondé sur un rapport d’architecte établissant le caractère vétuste du chalet[50]. Il aurait eu son certificat de démolition et son permis de construction et préservé les droits acquis.

 

[128]      Mais Ménard, pour des motifs qui lui appartiennent, a manqué l’opportunité qui lui était offerte en 2012[51], ainsi que jusqu’au 1er mai 2013[52], de démolir le vieux chalet vétuste et reconstruire avec les droits acquis préservés. 

 

[129]     Par ailleurs, les arguments proposés par le procureur des défenderesses quant à l’imprécision de l’avis de motion du nouveau règlement reviennent ni plus ni moins qu’à défoncer une porte ouverte dans la mesure où la Municipalité ne plaide pas l’effet de gel à partir de l’avis de motion du 21 janvier 2013 mais bien, comme le plaident aussi les défenderesses[53], que le règlement a pris effet le 1er mai 2013, supprimant à partir de cette date l’option de faire déclarer vétuste un immeuble. Tous s’entendent pour la date du 1er mai 2013.

 

[130]     Quant à l’argument voulant que l’article 17.10 du règlement de zonage, depuis le 1er mai 2013, repose sur une disposition ambigüe, il n’a aucun mérite.

 

[131]     Pour des motifs qui ne sont pas clairs, le texte utilisé dans le Plan d’argumentation des défenderesses n’est tout simplement pas celui de l’article 17.10 tel que modifié par le règlement 297-2013. Il est vrai que ce texte[54] pourrait porter à confusion mais ce n’est pas celui qui a été adopté[55].

 

[132]     L’article en question, tel qu’il se lit depuis l’abrogation de la possibilité de reconstruire avec droits acquis si l’immeuble est vétuste, ne permet le maintien des droits acquis qu’aux cas énumérés à l’article 17.9 (détruit par le feu, explosion ou un autre acte fortuit à plus de 50% de sa valeur marchande).

 

[133]     La démolition à plus de 50% des murs de fondation ou du rez-de-chaussée par un acte autre que ceux énumérés à 17.9 oblige à reconstruire selon les règlements d’urbanisme alors en vigueur. Cela peut difficilement être plus clair.

 

[134]     Il n’y a donc là aucun argument sérieux pour soulever l’ambigüité du règlement[56].

 

[135]     Un autre argument sans mérite découle des commentaires de l’architecte Jutras qui se propose de mesurer la responsabilité respective de Ménard et de la Municipalité relativement à l’imprécision qu’il dénonce en ce qui concerne les travaux identifiés au permis.

 

[136]     Pour lui, s’il s’agit de « rénovations majeures », il aurait dû y avoir des plans plus détaillés. Il lance qu’il aurait quant à lui préparé environ cinq plans. Il en arrive à la conclusion que Ménard et la Municipalité sont également responsables de cette imprécision quant à la nature et à la portée des travaux à faire. Pour lui, Fraser aurait dû poser des questions et exiger plus de détails.

 

[137]     Il faut toutefois comprendre que Jutras tient pour acquis que Ménard a décrit à Fraser en détails les travaux qu’il entend exécuter. Toutefois, le Tribunal conclut au contraire, à la lumière de la preuve, que Ménard n’a indiqué à Fraser que les travaux qui sont énumérés au permis. Pour le reste, il ment.

 

[138]     Dans ce contexte, il n’est pas raisonnable de blâmer Fraser de ne pas avoir posé de questions. Elle avait une énumération de travaux et un plan pour le toit.

 

[139]      Le Tribunal ne retient pas ce « partage des responsabilités » proposé par Jutras  et conclut, à la lumière de la preuve, que Ménard est le seul responsable de cette catastrophe.

 

[140]     Dans le même sens, le Tribunal considère sans mérite les analyses de Jutras pour distinguer ce qui, à son avis, est obligatoire dans le permis et ce qui est optionnel.

 

[141]     Pour lui, les mots «la structure et le plancher seront conservés » ne constituent pas une obligation s’imposant au propriétaire. « C’est ma compréhension » dit-il.

 

[142]     Le Tribunal n’est pas d’accord. C’est une question de droit. Décider de ne pas conserver les murs ou le plancher exigeait une modification au permis. Il n’y a pas lieu de perdre plus de temps sur ce point. 

 

[143]     Il est peut-être vrai que Fraser aurait pu exiger plus d’informations de Ménard. Toutefois, ce n’est pas facile à faire avec quelqu’un qui ne donne que les informations qu’il veut bien donner et qui, pour le reste, ignore complètement la Municipalité et son inspectrice.

 

[144]     D’ailleurs, à ce sujet, Ménard fera un aveu qui n’est pas dénué de vérité. Il dira : « Je veux sauver le chalet…. c’est western un peu ce qu’on a fait… mais on n’avait pas le choix… on ne veut pas garder la moisissure… je demande à la ville de venir voir… ».

 

[145]     Il n’a pas tort de dire qu’il s’est comporté en véritable cow-boy. Par contre, il ne peut s’empêcher de mentir encore. Il est faux qu’il a demandé à la ville de venir voir. En fait, Fraser y va pour inspecter et constate la démolition des murs sans avoir eu la moindre communication de Ménard.

 

[146]     Tout ceci pour dire que la démolition de plus de 50% des murs mène irrémédiablement à la perte des droits acquis en vertu du règlement de zonage de la Municipalité.

 

[147]     La prétention des défenderesses que les murs ont été « démontés » et « remontés » et qu’ils n’ont pas été démolis ne tient pas la route. Ces murs qui constituaient les assises des droits acquis n’existent plus. Il n’en reste que des planches décoratives appliquées à l’intérieur de la nouvelle structure.

 

[148]     Sur ce point, le Tribunal retient les autorités déposées par la Municipalité. Ainsi, il y a perte des droits acquis s’il y a démolition volontaire, même si la reconstruction se fait avec des matériaux provenant de l’immeuble démoli[57].

 

[149]     De la même manière, dépendant du règlement, même si l’immeuble s’effondre par lui-même et non par un acte volontaire, les droits acquis peuvent être perdus. On y souligne que toute modification de l’état préexistant, base de l’émission du permis de rénovation, nécessite une nouvelle demande de permis de la part du constructeur, spécialement si l’immeuble s’écroule et devient une perte totale[58].

 

[150]      Il en est de même lorsque la reconstruction se fait entièrement avec des matériaux neufs à l’exception des fondations. Il s’agit alors d’une « nouvelle entité » qui ne peut bénéficier des droits acquis[59].

 

[151]      Ces jugements s’apparentent à la présente situation dans la mesure où la démolition des murs existants (même si elle était rendue nécessaire à cause de la pourriture) peut faire en sorte que le chalet qui en ressort est une nouvelle entité[60].

 

[152]     Le seul jugement[61] soumis par les défenderesses sur la question du « démontage » et « remontage » des murs avec des matériaux d’origine n’est malheureusement pas très éclairant.

 

[153]     On y lit que « La preuve révèle que l’intimée a utilisé tous les matériaux du bâtiment original qui étaient encore en état de servir. Rien n’indique qu’on ait démoli le bâtiment original »[62]. Ici, évidemment, on constate que le bâtiment original a été essentiellement démoli. Il n’en reste qu’une partie du plancher.

 

[154]      Tout ceci pour dire qu’en l’espèce, compte tenu de la démolition de plus de 50% des murs, malgré l’article 17.10 du règlement et l’inscription très claire au permis avisant le propriétaire de la perte des droits acquis dans un tel cas,  le Tribunal ne peut que constater la perte des droits acquis découlant de cette démolition des murs du chalet[63].

 

[155]     Par ailleurs, le Tribunal souligne que le procureur des défenderesses a raison lorsqu’il propose que, dans le présent dossier, la Municipalité a le fardeau de prouver la perte des droits acquis.

 

[156]     En effet, au départ, le droit acquis de maintenir la construction dans la bande de protection riveraine de 20 mètres est indiscutable car le bâtiment a été construit bien avant que le premier règlement en cette matière ne soit adopté.

 

[157]     C’est donc à la partie qui plaide l’extinction d’un droit d’en faire la preuve[64].

 

[158]     Or, en l’espèce, une preuve prépondérante permet de conclure qu’il y a perte des droits acquis vu la démolition de plus de 50% des murs du rez-de-chaussée du chalet, une condition prévue au règlement pour la survie des droits acquis, et qui a été explicitement indiquée au permis de rénovation.

 

La question de la marge latérale est

 

[159]     Il y a lieu de dire quelques mots sur un autre élément qui, selon la Municipalité, justifierait la perte de droits acquis.

 

[160]     Il s’agit du fait qu’en remplaçant le plancher existant par une dalle de béton, Ménard a agrandi le bâtiment en direction du chemin de quelques pieds.

 

[161]     Ce faisant, il aurait rendu le bâtiment plus dérogatoire en diminuant la marge latérale déjà dérogatoire du côté est. En effet, la ligne de propriété n’étant pas précisément perpendiculaire avec le côté est du bâtiment, le prolongement du bâtiment devrait avoir pour conséquence de réduire de quelques pouces la marge de recul déjà dérogatoire de ce côté.

 

[162]     La preuve à ce sujet n’est pas particulièrement impressionnante. Quand le procureur de la Municipalité en est réduit à demander au Tribunal de calculer l’hypoténuse des deux lignes au lieu de fournir la preuve des chiffres de la marge latérale avant le coulage de la dalle de béton et celle d’après le coulage, il y a un problème.

 

[163]     De plus, la preuve révèle que les défenderesses pourraient facilement acquérir du lot voisin à l’est les pouces qui pourraient manquer vu que l’une des deux est propriétaire de ce lot adjacent.

 

[164]     Dans ce contexte, le Tribunal refuse de considérer comme un facteur significatif susceptible de mener à la perte de droits acquis cette supposée réduction de la marge de recul du côté est du bâtiment.

 

[165]     Toutefois, vu la conclusion à laquelle le Tribunal est arrivé dans la section précédente, ceci ne peut être d’un grand réconfort pour les défenderesses.

 

L’exécution de travaux non précisés au permis de rénovation

 

[166]     Réitérons d’emblée que le Tribunal considère que seuls les travaux spécifiquement énumérés au permis pouvaient légalement être faits en vertu de ce permis.

 

[167]     Les affirmations de Ménard voulant qu’il avait énuméré à Fraser tous les travaux qu’il entendait faire ne sont que des propos mensongers. Il n’a déclaré que ce qui est indiqué au permis.

 

[168]     Par conséquent, tous les autres travaux ne peuvent être considérés comme étant faits légalement en vertu de ce permis.

 

[169]     On parle ici de la nouvelle fondation (dalle en béton), des nouveaux murs en 2 x 6, de l’érection de la mezzanine en-dessous des fermes de toit, des travaux d’électricité et de plomberie et de tous les autres travaux non mentionnés au permis.

 

[170]     Est-ce à dire que ces travaux effectués sans permis justifient automatiquement une demande de démolition du bâtiment?

 

[171]     La réponse doit être non dans les cas où les travaux en question ont été effectués en respectant les dispositions des règlements municipaux en matière de zonage et de construction.

 

[172]     Si les travaux sont conformes disent les auteurs Lorne Giroux, de la Cour d’appel, et Isabelle Chouinard « la démolition sera fréquemment refusée lorsque la seule contravention consiste à ne pas avoir obtenu de permis »[65].

 

[173]     La sanction est alors simplement d’imposer l’obligation de faire une demande de permis pour ces travaux afin de permettre à la Municipalité de vérifier et de s’assurer que les travaux respectent toutes les dispositions de ses règlements.

 

[174]     En l’espèce, la preuve révèle que tous les travaux en question auraient pu être effectués légalement en respectant la règlementation municipale. Le Tribunal n’a pas à reprendre chaque élément de façon détaillée.

 

[175]     Qu’il suffise de dire que Fraser, en réponse aux questions du procureur des défenderesses, a confirmé que la réfection du solage par le coulage d’une dalle pouvait se faire en vertu de l’article 17.11 du règlement, que le bâtiment dérogatoire pouvait être agrandi vers le chemin et avec la mezzanine selon l’article 17.8 en autant que le bâtiment agrandi ne dépasse pas 8% de la superficie du terrain, ce qui ne semble pas un problème ici[66].

 

[176]     Elle reconnaît aussi que la réfection du toit respecte également la règlementation.

 

[177]     Quant aux travaux d’électricité et de plomberie, Fraser a affirmé, et c’est un peu surprenant, qu’ils n’ont pas à être indiqués au permis de construction ou de rénovation. Par conséquent, le fait qu’ils ne sont pas mentionnés dans le permis émis ne poserait pas problème.

 

[178]     Bref, les travaux effectués sans permis ne contreviennent pas (sauf pour la question de l’émission du permis) à la règlementation municipale. À ce sujet, la preuve  convainc le Tribunal que les travaux en question auraient pu être effectués en respectant la règlementation pour peu qu’ils soient validés par un permis.

 

[179]     Ceci ne veut pas dire que le Tribunal voit d’un bon œil les gestes de Ménard visant d’une part à effectuer ces travaux sans les dénoncer à la Municipalité et les faire inclure dans le permis et, d’autre part, de tenter d’en faire supporter le blâme ou la responsabilité à Fraser.

 

[180]     Ceci est tout à fait déplorable.

 

[181]     Toutefois, s’il n’était pas question du problème de perte des droits acquis, la sanction d’avoir fait des travaux conformes aux règlements mais effectués sans permis, pourrait être une ordonnance d’obtenir, en payant les droits appropriés, un nouveau permis portant sur ces travaux en vue d’en valider la réalisation.

 

L’ordonnance de démolition

 

[182]     Par contre, en principe, la sanction applicable à la perte des droits acquis portant sur la présence du chalet dans la bande riveraine de 20 mètres peut être la démolition ou le déplacement du bâtiment devenu non conforme en vertu de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme[67].

 

[183]     Il faut souligner que la démolition est « le recours extrême que les tribunaux n’ordonnent qu’en dernier ressort » écrivent les auteurs Giroux et Chouinard[68]. Ils notent par ailleurs que le législateur lui-même ne l’autorise que « s’il n’existe pas d’autre remède utile » aux articles 227 et 229 L.A.U.[69].

 

[184]     Dit autrement, la démolition est la peine capitale en matière d’urbanisme et elle ne doit être ordonnée que s’il n’existe aucune autre façon de solutionner le problème de non conformité.

 

[185]     Par ailleurs, il faut souligner qu’en matière de droits acquis, l’objectif du législateur est généralement de les encadrer, de les limiter dans leur expansion et de favoriser à long terme la disparition de ces dérogations aux lois et règlements qui s’appliquent à tous.

 

[186]     Comme l’a déjà souligné le juge Arsenault, « l’idée sous-jacente à la théorie des droits acquis en matière de zonage vise certes l’élimination à long terme des usages et constructions dérogatoires dans une zone donnée » [70].

 

[187]     C’est pour ce motif que la capacité de reconstruire ou rénover un bâtiment dérogatoire est généralement encadrée par des règles qui visent à préciser les cas où cela peut se faire et à les limiter à ces seules situations.

 

[188]     Or, ici, le problème est justement que le résultat des travaux effectués, de la façon dont ils ont été effectués et au moment où ils ont été effectués, a pour conséquence, en vertu de la règlementation applicable, de faire perdre les droits acquis à la présence du bâtiment dans la bande de protection riveraine.

 

Le pouvoir discrétionnaire et son exercice

 

[189]     La seule avenue qui demeure ouverte est la possibilité de faire appel au pouvoir discrétionnaire qui est reconnu à la Cour supérieure de refuser la démolition dans certains cas très exceptionnels.

 

[190]     À ce sujet, les auteurs précités notent ce qui suit :

 

Aux yeux de la Cour d’appel, il est normal que les tribunaux gardent une certaine marge de pouvoir discrétionnaire de façon à pallier les injustices qu’une application stricte, rigoureuse et aveugle de la règlementation pourrait entraîner.[71]

 

[191]     Ceci dit, qu’en est-il des critères applicables à l’exercice de la discrétion judiciaire pouvant permettre de refuser la démolition?

 

[192]      L’arrêt phare en la matière est l’arrêt Chapdelaine.[72]

 

[193]     Il est vrai que le pouvoir discrétionnaire de la Cour supérieure avait déjà été reconnu auparavant en 1986 quand la Cour d’appel[73] a indiqué qu’elle était d’avis que le mot « peut » dans l’article 227 L.A.U. est non seulement attributif de juridiction mais également attributif de discrétion.

 

[194]      Dans l’arrêt Chapdelaine, la Cour d’appel entreprend d’encadrer l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire en érigeant des balises visant à éviter les dérives et l’exercice capricieux ou arbitraire de ce pouvoir discrétionnaire.

 

[195]     Au moment d’écrire ces lignes, le Tribunal est bien conscient de l’importance et de la nécessité de ces balises.

 

[196]     Avant l’arrêt Chapdelaine, l’auteur Marc-André LeChasseur s’était déjà prononcé avec vigueur en faveur « d’une discrétion judiciaire limitée, pour ne pas dire inexistante », pour reprendre le commentaire du juge Chamberland dans Chapdelaine[74]. La crainte de l’auteur, selon le juge Chamberland, était qu’une discrétion judiciaire générale « entraînerait la possibilité, selon lui, que des facteurs purement subjectifs interviennent dans le respect d’une règlementation dont la mise en œuvre en milieu municipal n’est soumise qu’à des critères objectifs »[75].

 

[197]     Ce n’est pas une préoccupation sans fondement.

 

[198]     Comme en toutes choses, le défi consiste à trouver, dans l’exercice de la discrétion judiciaire, un équilibre entre l’application des critères objectifs qui découlent de la loi et des règlements d’une part et, d’autre part,  la capacité de tenir compte des circonstances extraordinaires et rares qui justifient exceptionnellement de les mettre de côté.

 

[199]     À ce sujet, le juge Chamberland reprend l’idée exprimée par son collègue le juge Baudouin dans une autre affaire alors qu’il indiquait qu’il lui semblait normal que les tribunaux gardent une certaine marge de pouvoir discrétionnaire de façon à pallier les injustices qu’une application stricte, rigoureuse et aveugle de la règlementation pourrait parfois entraîner[76].  

 

[200]     Une longue citation de l’analyse des principes applicables à l’exercice de cette discrétion judiciaire par les auteurs Giroux et Chouinard s’impose ici :

 

Dans un premier temps, et de façon plus globale, la Cour a établi que l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire passe « par un examen sérieux de la violation invoquée au règlement de zonage et par l'établissement d'une équivalence raisonnable entre l'importance de cette violation et la rigueur du remède recherché ». Le tribunal doit d'abord qualifier la dérogation et ensuite, si elle est mineure, décider, eu égard aux circonstances, s'il doit exercer son pouvoir discrétionnaire.

 

Ainsi, lorsque la violation n'est pas mineure et de peu d'importance, ni commise par inadvertance ou lorsque l'intimé a fait preuve d'une « insouciance téméraire » du respect du règlement de zonage et d'un « désintéressement reprochable » à l'égard du droit des résidents du secteur à un environnement sain et paisible, les tribunaux n'hésiteront pas à sanctionner la violation de la règlementation. À plus forte raison lorsque la conduite du contrevenant est empreinte de mauvaise foi, notamment lorsque les usages dérogatoires qui sont à l'origine des procédures résultent essentiellement de ses comportements trompeurs et dissimulateurs8. Il en est de même lorsque la situation dérogatoire est de nature à menacer la santé ou la sécurité publique. Dans un tel cas, le coût élevé des travaux ne peut influencer le sort du litige.[77] (soulignements ajoutés)

 

 

 

[201]     Dire que la discrétion judiciaire dont jouit la Cour supérieure en la matière, pour refuser d’ordonner la démolition ou le déplacement d’un bâtiment non conforme, est limitée et ne peut être exercée que dans des cas exceptionnels résume bien l’état du droit.

 

[202]     Avec éloquence et habileté, le procureur des défenderesses a souligné,  autorités à l’appui, plusieurs cas où la Cour supérieure a refusé d’ordonner la démolition d’un bâtiment malgré son caractère dérogatoire.

 

[203]     Ainsi, dans l’affaire Gauthier[78], la Cour d’appel confirme une décision de première instance refusant d’ordonner la démolition d’un bâtiment non conforme (quant aux marges de recul) vu que des « infractions mineures aux règlements municipaux ne peuvent justifier une telle ordonnance »[79] .

 

[204]     Notons que les travaux avaient été entrepris après l’obtention du permis nécessaire à cette fin. De plus, le Tribunal souligne l’évidente bonne foi de celui qui a procédé aux travaux.

 

[205]     Ici, les travaux ont été entrepris sans permis, ils ont continué malgré un ordre de cesser les travaux, et Ménard, malgré la présomption de bonne foi[80] dont bénéficient tous les citoyens, a agi dans cette affaire avec une mauvaise foi et un comportement mensonger et malhonnête qui renversent cette présomption irrémédiablement.

 

[206]     Le procureur des défenderesses a attiré l’attention du Tribunal sur des cas[81] où il a été décidé de refuser la démolition car celle-ci aurait eu des effets plus néfastes sur l’environnement que de laisser la construction dérogatoire en place.

 

[207]     Il affirme que c’est le cas ici dans la mesure où enlever la dalle de béton, comme le souligne l’expert Jutras, serait plus dommageable pour la bande riveraine que de la laisser en place.

 

[208]     Toutefois, dans les deux cas, il ne s’agit là que d’un élément parmi d’autres tenus en compte par le Tribunal. Ce qui ressort surtout, c’est que dans ces cas,  le Tribunal conclut à « une violation mineure et de peu d’importance » et que la bonne foi du citoyen n’est jamais mise en doute.

 

[209]     Ici, encore une fois, l’attitude de Ménard est teintée de mauvaise foi. Il ne déclare pas les travaux qu’il entend réaliser, il débute les travaux sans permis et ne tient pas la Municipalité au courant des développements qui interviennent.

 

[210]      S’il est vrai que les travaux effectués dans le présent dossier n’ont pas empiré la situation dérogatoire (le bâtiment n’empiète pas plus dans la bande riveraine qu’auparavant), il n’en demeure pas moins que le véritable problème est la question de savoir si les droits acquis peuvent survivre à la démolition de plus de 50% des murs du rez-de-chaussée vu le libellé du règlement de zonage et du permis émis. Ceci, en soi, ne peut être considéré comme une question « mineure et de peu d’importance ».

 

[211]     Tout ceci pour dire qu’aucune des causes citées par les défenderesses n’est de nature à justifier l’exercice de la discrétion judiciaire pour refuser la démolition dans un cas où la perte des droits acquis découle des agissements ou de l’incurie du mandataire des défenderesses.

[212]     En ce sens, il y a lieu de rappeler que dans le présent dossier, aucun reproche ne peut être fait à la Municipalité ou à l’inspectrice, alors que dans presque tous les dossiers où la Cour supérieure a refusé la démolition, il y a généralement des indices d’une gestion déficiente ou négligente du dossier par la Municipalité, donc faute de la Municipalité[82]. Ceci est particulièrement vrai dans l’affaire Chapdelaine.

 

[213]      Ici, Ménard a pris sur lui de commencer les travaux sans permis, de ne pas déclarer adéquatement les travaux prévus lorsqu’il va subséquemment déposer une demande de permis et de ne pas informer l’inspectrice de l’avancement des travaux et des problèmes encourus. Dans un tel contexte, prétendre que la Municipalité est également responsable, comme l’a affirmé l’expert Jutras, ne tient pas la route.

 

[214]     En résumé, malgré la sympathie que le Tribunal peut avoir pour les défenderesses qui ne semblent pas avoir participé aux actions entreprises par Ménard, leur mandataire[83],  la Cour supérieure ne pourrait, sans déconsidérer l’administration de la justice, exercer sa discrétion judiciaire pour écarter l’application des règlements municipaux en présence d’agissements qui sont empreints de mauvaise foi et qui dénotent une négligence inacceptable quant l’obligation d’obtenir un permis conforme aux travaux envisagés, un mépris total à l’égard des avis de cessation des travaux et, plus généralement, un manque de franchise qui le prive de toute crédibilité.

 

[215]     En l’espèce, pour éviter la démolition, il est peut-être possible de déplacer le chalet en dehors de la zone de protection riveraine et, si c’est le cas, les défenderesses doivent bénéficier de cette option[84] qui est par ailleurs prévue de façon subsidiaire aux conclusions de la requête introductive d’instance de la Municipalité.

 

[216]     Pour ce qui est des délais, la décision que devront prendre les défenderesses relativement au déplacement ou à la démolition du chalet exige qu’une période de temps raisonnable leur soit accordée pour examiner leurs options et consulter ceux qui peuvent exécuter de tels travaux. La période hivernale arrive par ailleurs à grands pas et ceci aussi doit être tenu en compte relativement aux délais qu’il y a lieu de fixer.

 

[217]     Il va sans dire que la Municipalité pourra,  dépendant des  circonstances, prolonger les délais accordés si elle le juge approprié dans le meilleur intérêt de ses citoyens.

 

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

 

[218]      ACCUEILLE en partie la requête introductive d’instance ré-amendée;

 

[219]      DÉCLARE dérogatoire à la règlementation d’urbanisme de la demanderesse le chalet nouvellement construit sur la propriété des défenderesses située au […], Lac-du-Cerf, connue et désignée comme étant :

 

Description

 

Un immeuble connu et désigné comme étant les LOTS […] du Rang […], au cadastre officiel du Canton de Dudley, circonscription foncière de Labelle.

 

Afin d’assurer la conformité à la règlementation d’urbanisme, le Tribunal permet aux défenderesses d’opter entre les ordonnances ci-dessous dans les délais spécifiés.

 

A)        ORDONNANCE DE DÉPLACEMENT DU CHALET

 

ORDONNE aux défenderesses de déplacer ledit chalet à un autre endroit approprié sur le terrain des défenderesses situé au-delà de la marge de recul de vingt (20) mètres de la ligne des hautes eaux du lac;

 

ORDONNE à cette fin aux défenderesses de déposer auprès de la demanderesse, dans les quatre-vingt-dix (90) jours du présent jugement, en payant les droits requis, une demande conforme pour l’émission d’un permis autorisant le déplacement dudit chalet, d’une manière conforme, ailleurs sur leur propriété;

 

ORDONNE aux défenderesses de procéder à la remise en état et à la renaturalisation de la rive et à cette fin, de fournir à la demanderesse, dans les quatre-vingt-dix (90) jours un plan de renaturalisation comprenant les travaux correctifs projetés, lesquels devront être exécutés dans les trente (30) jours suivant l’acceptation par la demanderesse de ce plan de renaturalisation;

 

ORDONNE aux défenderesses de déplacer ledit chalet et d’effectuer les travaux de renaturalisation dans le délai indiqué dans le permis autorisant le déplacement du bâtiment faisant l’objet du présent litige;

 

 

B)        ORDONNANCE DE DÉMOLITION DU CHALET À DÉFAUT, PAR LES       DÉFENDERESSES, D’OPTER POUR LE DÉPLACEMENT DU CHALET

 

ORDONNE aux défenderesses de déposer auprès de la demanderesse, dans les quatre-vingt-dix (90) jours du présent jugement et en payant les droits requis, une demande conforme de démolition dudit chalet;

 

ORDONNE aux défenderesses de procéder à la démolition complète dudit chalet dans les trente (30) jours de l’émission du permis de démolition ou dans tout autre délai additionnel consenti par la demanderesse;

 

ORDONNE aux défenderesses de procéder à la remise en état et à la renaturalisation de la rive et à cette fin, de fournir à la demanderesse, dans les quatre-vingt-dix (90) jours un plan de renaturalisation comprenant les travaux correctifs projetés, lesquels devront être exécutés dans les trente (30) jours suivant l’acceptation par la demanderesse de ce plan de renaturalisation;

 

LE TOUT sous peine des pénalités prévues par la loi en cas de violation de l’ordonnance et avec les frais de justice contre les défenderesses.

 

ADVENANT QUE LES DÉFENDERESSES SOIENT EN DÉFAUT D’OBTEMPÉRER AUX ORDONNANCES DU TRIBUNAL DANS LES DÉLAIS IMPARTIS :

 

AUTORISE la demanderesse ainsi que ses employés, fonctionnaires, représentants et mandataires à pénétrer sur ladite propriété des défenderesses et d’être accompagnée de policiers, s’il y a lieu, afin :

 

a)            De procéder à la démolition complète dudit chalet;

 

b)            De procéder à la remise en état et à la renaturalisation de la rive;

 

 

 

 

DÉCLARE, conformément à l’article 233 de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, que le coût des travaux qui seront ainsi exécutés par la Municipalité demanderesse, aux frais des défenderesses, constitue une créance prioritaire sur l’immeuble et est également garanti par une hypothèque légale sur ledit immeuble;

 

LE TOUT avec frais de justice.

 

 

 

    

 

 

 

 

 

__________________________________

      PIERRE DALLAIRE, J.C.S.

 

Me Rino Soucy

Me Pierre-Hugues Miller

Procureurs de la demanderesse

 

Me Sébastien Laprise

Procureur des défenderesses

 

 

Date d’audience :

18 et 19 avril 2016

 



[1] Voir la pièce D-5, photo D, pour le résultat final des travaux.

[2] Les propriétaires sont les défenderesses Roxanne Ménard et Guylaine Fortin. Elles seront dorénavant identifiées collectivement comme « les propriétaires ». Voir l’index aux immeubles concernant leur titre de propriété (Pièce P-1).

[3] Règlement de zonage 198-2000, art. 7.2.3.

[4] La requête introductive d’instance a été amendée et ré-amendée pour ajouter ou préciser des motifs justifiant la demande de démolition mais le fondement de la demande demeure le même : il y a perte de droits acquis si le bâtiment, et plus particulièrement les murs, devaient être démolis à plus de cinquante pour cent (50%) par un acte volontaire (requête ré-amendée, par. 9).

[5] Pièce P-21. Notes de l’inspectrice municipale. Il aurait été construit en 1940 selon les notes en question.

[6] L’utilisation des noms de famille ne doit pas être considérée comme un manque de respect ou de courtoisie, mais un moyen d’alléger le texte.

[7] Pièce D-1. Le document, qui aurait été signé en juillet 2012 a été reproduit fidèlement avec les majuscules et les fautes de français.

[8] Yan Arcand, le gendre de Ménard et époux de Roxanne, a témoigné. Nous y reviendrons.

[9] Entre autres, il s’est vanté avec une fierté évidente être « maître franchiseur…qui contrôle 30 restaurants de la chaîne La belle province... et qui, dans la restauration, a besoin de connaître les règlements »

[10] Pièce P-3.1.

[11] Fraser a déposé toutes ses notes de suivi dans ce dossier entre juin 2012 et août 2013. (Pièces P-9 et P-21 en liasse)

[12] Pièce P-21.

[13] Ainsi, dans les notes de suivi de Fraser, Ménard menace d’assigner un membre du conseil à un interrogatoire hors cour. Il le décrit, avec sarcasme, comme « l’intelligent qui a fait le règlement ».

[14] Selon le registre foncier, c’est le 17 novembre 2005 que la propriété est acquise, pour 260 000 $, par Guylaine Fortin, l’épouse de Ménard. Elle en vendra par la suite une demie indivise à sa fille Roxanne Ménard (Pièce P-1).

[15] Pièce P-6, pages 1 et 2. Les photos prises par Fraser en 2012 montrent l’état pitoyable du chalet.

[16] Pièce P-21, entrée du 13 août 2012.

[17] Pièce P-11, Règlement de zonage 198-2000, art. 17.10.

[18] Pièce D-9, Interrogatoire avant défense, par. 131.

[19] Entre autres aux pages 3 (par.4.) et 6 (par. 34).

[20] Pièce P-11.1 Règlement de zonage 297-2013,  art. 13.2 (modifiant l’art. 17.10 pour supprimer la notion de vétusté).

[21] Le Tribunal note que l’argument aurait pu être fait par la Municipalité que de tels permis n’auraient pu être émis à partir du dépôt de l’avis de motion le 21 janvier 2013 (Pièce P-15, pages 325 et 352) à cause de l’effet de gel mais la Municipalité s’en tient à dire que la date butoir est le 1er mai 2013.

[22] Défense modifiée du 15 avril 2016, par. 32.

[23]  Défense du 3 février 2014, par. 32.

[24] P-21. Ces notes, remarquablement complètes, couvrent l’ensemble des communications de Fraser avec Ménard.

[25]  Défense, par. 32.

[26] Le Tribunal soupçonne que Ménard n’a pris contact avec la Municipalité le 29 avril pour obtenir un permis que parce qu’il a appris qu’un citoyen avait dénoncé le fait qu’il avait entrepris des travaux sans permis. Les notes de Fraser du 30 avril confirment qu’un citoyen, à cette date, avait déjà avisé la Municipalité des travaux entrepris au […] (Pièce P-21). Dans une petite Municipalité, on le voit, tout se sait… rapidement.

[27] Pièces P-3 et P-3.1.

[28] Pièce D-6. Un plan plus élaboré de la structure des fermes de toit sera déposé par Ménard lorsqu’il ira chercher le permis de rénovation le 6 mai (Pièce D-7). Ni l’un, ni l’autre ne donnent d’indice du projet de mezzanine.

[29] Id.

[30] Il prétendra aussi avoir convenu aller chercher le permis le vendredi suivant : « je lui dis que je  reviendrai le vendredi…j’ai peut-être dit que je reviendrais le 30 ». Encore là, la fiabilité laisse à désirer.

[31] L’architecte Jutras, témoin expert des défenderesses, affirmera qu’il arrive couramment que des travaux commencent sans permis en autant qu’il y ait une autorisation, même verbale, de la Municipalité. C’est vrai. Toutefois, ici, il n’y a pas un iota de preuve d’une telle autorisation ou même d’une demande pour avoir une telle autorisation. Même Ménard, qui prétend faussement avoir rencontré Fraser le 26 avril, n’a pas osé affirmer avoir eu une autorisation verbale d’entreprendre les travaux.

[32]  Pièce P-6, pages 2 à 5.

[33]  Pièces P-3 et P-3.1.

[34] Voir, au même effet, l’article 4.3.4 du Règlement relatif aux permis et certificats (Pièce P-5).

[35] À sa décharge, notons que, dans la Défense, il est indiqué que c’est « vers le 9 mai » que la pourriture a été constatée. Par ailleurs, il n’est pas sans intérêt de noter que Fraser, en contre-interrogatoire, dit que Ménard lui a montré, en juin 2012, un an auparavant, « de la moisissure » lors de la visite du chalet (lorsqu’il est question de vétusté). La « découverte » de la moisissure en mai 2013 devient douteuse dans ce contexte.

[36] Pièce P-6, pages 5 à 7.

[37] Pièce P-21. Entrée du 10 mai 2013.

[38] Voir les photos. Pièce P-6, pages 8 à 10 et page 12.

[39] Pièce P-4.

[40] Pièce P-6, page 11.

[41] Ceci est pour le moins paradoxal compte tenu qu’il dit ne pas avoir lu le permis.

[42] Pièce P-21. Notes de suivi de Fraser, entrée du 17 mai 2013. Ménard reviendra souvent, dans son témoignage, sur le fait que quatre conseillers demeurent sur la rue du chalet et ont pu voir en passant les travaux qu’il faisait. Pour lui, il faudrait y voir une approbation municipale des travaux.

[43] Rappelons, au cas où ce ne serait pas suffisamment clair, qu’il a entrepris les travaux, au départ, sans avoir pris la peine d’obtenir un permis.

[44] P-6, pages 13 à 16.

[45] P-21, entrée du 21 mai 2013.

[46] Id.

[47] Pièce P-18.

[48] Malgré une objection qui n’était pas sans légitimité portant sur la règle de la meilleure preuve, le Tribunal a permis à Arcand de parler de l’ordre de grandeur des montants payés pour les travaux. Il a aussi indiqué avoir dû obtenir une marge de crédit substantielle pour financer le coût des travaux. La règle de la proportionnalité exige qu’on évite de se perdre inutilement dans des précisions inutiles. Il ne s’agit pas ici d’une réclamation de deniers. Par ailleurs, les photos du chalet, après les travaux, valent aussi mille mots (Pièce D-5).

[49] Ménard n’a aucunement parlé de son implication financière dans ces travaux. C’est le gendre et sa fille qui semblent avoir écopé.

[50] Il n’aurait eu aucune difficulté à l’obtenir de Jutras qui a témoigné avoir constaté, simplement en regardant les photos, la vétusté du chalet en 2012.

[51] Il avait pourtant affirmé à Fraser qu’il allait consulter un architecte à cette époque.

[52] Le 29 avril 2013, il est informé par Fraser du changement de règlement mais maintient sa décision de procéder à des « rénovations majeures » qui impliquent, tant avant le 1er mai 2013 qu’après, que plus de 50% des murs existants soient préservés pour maintenir les droits acquis.

[53] Plan d’argumentation des défenderesses, page 4, par. 2.10.

[54] Plan d’argumentation des défenderesses, page 4, par. 3.1. D’où sort ce texte demeure, à la date de la rédaction de ce jugement, un mystère.

[55]  Pièce P-11.1, page 324.

[56] En ce sens, les autorités à l’appui de cet argument, bien que fort pertinentes s’il y a réellement ambigüité,  ne sont ici d’aucun secours aux défenderesses. Voir : Municipalité régionale de comté Chutes-de-la-Chaudière c. Compagnie 1846-0832 Québec inc., 1994 CanLII 5419 (QC CA) ; Municipalité régionale de comté de la Vallée du Richelieu C. Gareau, EYB 1991-75961 (CS).

[57] Municipalité régionale de comté de Francheville c. Sauvé, AZ-91021404 (CS).

[58] Ville de Montréal c. Chatzioannou, 1990 CanLII 3632 (QC CA).

[59] Municipalité de l’Île-d’Anticosti c. Lelièvre, 2011 QCCS 4293.

[60] En l’espèce, le seul élément conservé est une partie du plancher. Tous les murs et le toit sont refaits.

[61] La Prairie (Ville de) c. Renaud Fournier, 500-05-113644-842, 1985 (CS).

[62] Id.

[63] Soulignons que le règlement ne prévoit pas que la présence de pourriture dans les murs permet de les démolir en conservant les droits acquis.

[64] Art. 2803 C.c.Q.

[65] Lorne GIROUX et Isabelle CHOUINARD, « La sanction des règlements d’urbanisme », dans Collection de droit 2015-2016, École du Barreau du Québec, vol.7, Droit public et administratif, Cowansville, Éditions Yvon Blais Inc. 2015, p. 499. Voir aussi : Tawell c. St-Léon-de-Stanton 2010 QCCA 1127.

[66] Pièce P-11. Extrait du Règlement relatif au zonage.

[67] RLRQ, chapitre A-19.1. Soulignons que L.A.U. est la forme abrégée de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme.

[68] Lorne GIROUX et Isabelle CHOUINARD, « La sanction des règlements d’urbanisme », préc. note 66. Voir aussi : Gauthier c. Froment, 1999 CanLII 12860 (QC CA).

[69] Id.

[70] Municipalité régionale de comté de la Vallée-du-Richelieu c. Gareau, EYB 1991-75961 (CS), par. 10.

[71] Id., p. 500-501.

[72] Montréal (Ville de) c. Chapdelaine, 2003 CanLII 28303 (QC CA).

[73] Legris c. Doucet, AZ-86011112, (QC CA).

[74] Montréal (Ville de) c. Chapdelaine, préc. note  73, par.27.

[75] Id.

[76] Id., par. 32.

[77] Lorne GIROUX et Isabelle CHOUINARD, « La sanction des règlements d’urbanisme », préc. note 65, page 501 (références omises) .

[78] Gauthier c. Froment, 1999 CanLII 13860 (QC CA).

[79] Id., page 23.

[80] Art. 2805 C.c.Q.

[81] Saint-Alphonse-Rodriguez (Municipalité de) c. Brown, AZ-93021591 (QC CS); Municipalité régionale de comté de l’Érable c. Lamontagne, AZ-98021396 (QC CS).

[82] Voir, entre autres : Montréal (Ville de) c. Chapdelaine, préc. note 73; Municipalité régionale de comté de l’Érable c. Lamontagne, préc. note 82; Chertsey (Municipalité de) c. Henry, 2007 QCCS 2 ; L’Islet (Municipalité de) c. Adam, 2010 QCCA 215, par. 44.    

[83] En vertu des règles du mandat, le mandant est tenu, envers les tiers, pour les actes accomplis par le mandataire dans l’exécution et les limites de son mandat. Art. 2130 et 2160 C.c.Q. Il lie aussi le mandant même à l’égard de gestes malicieux. Voir: 9121-4528 Québec Inc. c. 9204-6994 Québec Inc. 2016 QCCS 2678, par. 52 et suivants.

[84] Rappelons que la démolition « est le recours extrême que les tribunaux n’ordonnent qu’en dernier ressort ». Le déplacement du chalet assurerait la conformité au règlement par une mesure moins extrême.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.