Décision

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Lespinasse et Courrier Purolator ltée

2011 QCCLP 5246

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Montréal

3 août 2011

 

Région :

Montréal

 

Dossiers :

389556-71-0909-R  401369-71-1001-R

 

Dossiers CSST :

126822857   128993821

 

Commissaire :

Michèle Juteau, juge administratif

 

Membres :

Guy Lemoyne, associations d’employeurs

 

Christian Pitel, associations syndicales

______________________________________________________________________

 

 

 

Gerry Lespinasse

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Courrier Purolator ltée

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE EN RÉVISION OU EN RÉVOCATION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 25 novembre 2010, Gerry Lespinasse, le travailleur, dépose une requête en révision et en révocation de la décision rendue le 7 octobre 2010 par la Commission des lésions professionnelles.

[2]           Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles rejette deux  contestations du travailleur. Elle conclut ainsi :

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

 

Dossier 389556-71-0909

 

REJETTE la requête de monsieur Gerry Lespinasse, le travailleur ;

 

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 10 septembre 2009, à la suite d’une révision administrative ;

 

DÉCLARE irrecevable la demande de révision déposée par le travailleur, le 9 juin 2009 ;

 

Dossier 401369-71-1001

 

REJETTE la requête du travailleur ;

 

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 26 janvier 2010, à la suite d’une révision administrative ;

 

DÉCLARE conformes à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles les ajustements à l’indemnité de remplacement du revenu due au travailleur effectués par la Commission de la santé et de la sécurité du travail et dont les détails apparaissent aux avis de paiement émis les 9 octobre ainsi que les 2 et 5 novembre 2009.

 

 

[3]           À l’audience tenue à Montréal le 24 mai 2011, seul le travailleur est présent. 

L’OBJET DE LA REQUÊTE

[4]           Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que sa requête en révision ou en révocation est recevable.

[5]           Il requiert que la Commission des lésions professionnelles reconsidère sa première décision pour déclarer que la demande de révision du 9 juin 2009 est recevable. Il souhaite une révision du calcul des indemnités auxquelles il a droit. Il demande également qu’on lui accorde le droit au remboursement de ses frais de déplacement.

L’AVIS DES MEMBRES

[6]           Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales rejetteraient la requête du travailleur. Ils considèrent que celui-ci n’a pas fait valoir de motifs justifiant la révision de la décision rendue par le premier juge administratif. Ils voient dans la demande du travailleur un appel à réapprécier la preuve et les arguments ce qui ne peut être fait dans le cadre d’une requête en révision ou en révocation.

LES FAITS ET LES MOTIFS

[7]           Dans le présent dossier, la première question qui se pose a trait à la recevabilité de la requête en révision et en révocation.

[8]           Suivant le premier alinéa de l’article 429.57 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi), pour être recevable la requête du travailleur doit avoir été déposée dans un délai raisonnable à partir de la décision visée :   

429.57.  Le recours en révision ou en révocation est formé par requête déposée à la Commission des lésions professionnelles, dans un délai raisonnable à partir de la décision visée ou de la connaissance du fait nouveau susceptible de justifier une décision différente. La requête indique la décision visée et les motifs invoqués à son soutien. Elle contient tout autre renseignement exigé par les règles de preuve, de procédure et de pratique.

 

La Commission des lésions professionnelles transmet copie de la requête aux autres parties qui peuvent y répondre, par écrit, dans un délai de 30 jours de sa réception.

 

La Commission des lésions professionnelles procède sur dossier, sauf si l'une des parties demande d'être entendue ou si, de sa propre initiative, elle le juge approprié.

__________

1997, c. 27, a. 24.

 

(Notre soulignement)

 

 

[9]           La jurisprudence enseigne qu’un délai raisonnable peut aller jusqu’à 45 jours[2]. Le point de départ de ce délai correspond à la date de notification de la décision de la Commission des lésions professionnelles.

[10]        Dans le présent dossier, la décision a été transmise au travailleur par courrier le vendredi 8 octobre 2010 tel qu’il appert des renseignements tirés du plumitif du tribunal.  Celle-ci en a vraisemblablement reçu notification quelques jours plus tard. Considérant un délai postal normal, on peut situer cette notification, au plus tard, le vendredi suivant, soit le 15 octobre 2010.  

[11]        La requête du travailleur est datée du 1er novembre 2010 et elle a été reçue par la Commission des lésions professionnelles le 25 novembre 2010. Force est de constater qu’elle a été déposée dans le délai requis, soit environ 41 jours après la notification présumée de la décision attaquée.     

[12]        On en vient maintenant à l’examen des motifs de révision soumis par le travailleur. Mais auparavant, voyons les règles de droit applicables.

[13]        Les décisions de la Commission des lésions professionnelles sont finales et sans appel comme le stipule le dernier alinéa de l’article 429.49 de la loi :

429.49.  Le commissaire rend seul la décision de la Commission des lésions professionnelles dans chacune de ses divisions.

 

Lorsqu'une affaire est entendue par plus d'un commissaire, la décision est prise à la majorité des commissaires qui l'ont entendue.

 

La décision de la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel et toute personne visée doit s'y conformer sans délai.

__________

1997, c. 27, a. 24.

 

[Notre soulignement]

 

[14]        Par ailleurs, la loi prévoit un recours qui fait exception à ce principe, voulant que la décision de la Commission des lésions professionnelles soit l’ultime résultat d’un litige et qu’elle s’impose aux parties. Il s’agit de la révision ou révocation dont l’application est encadrée par l’article  429.56 de la loi :

429.56.  La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :

 

1° lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;

 

2° lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;

 

3° lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.

 

Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.

__________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[15]        Les reproches formulés par le travailleur à l’encontre de la décision du premier juge administrtif sont de l’ordre du vice de fond ou de procédure de nature à invalider la décision.

[16]        Selon la jurisprudence constante de la Commission des lésions professionnelles, ce type de manquement correspond à une erreur manifeste de droit ou de fait ayant un effet déterminant sur l’issue du litige.[3]

[17]        Ce principe a été réaffirmé par les tribunaux supérieurs et notamment par la Cour d’appel du Québec qui a rappelé que la Commission des lésions professionnelles devait agir avec grande retenue en accordant une primauté à la première décision et se garder de réapprécier la preuve et de réinterpréter les règles de droit.[4]

[18]        Or dans le présent dossier, le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de refaire l’analyse de la preuve et de revoir l’application des règles de droit en lieu et place du premier juge administratif. Pareil exercice ne peut avoir lieu.

[19]        À l’audience, le travailleur réitère qu’il était en retard parce qu’il devait analyser la décision de la CSST à la lumière de la loi. Il était également pris par l’arrivée d’un nouvel enfant. 

[20]        Aux paragraphes 27 à 33 de la décision, le premier juge administratif apprécie la preuve et dispose des arguments du travailleur. Il rend une décision intelligible basée sur le droit applicable. À cet égard, la requête du travailleur est non fondée.

[21]        Par ailleurs, le travailleur ajoute d’autres motifs pour être excusé de son retard. Il soutient qu’il s’agit de faits nouveaux qui justifient une décision différente de celle rendue par le premier juge administratif. 

[22]        Il soumet qu’il n’a pas demandé la révision de la décision de la CSST sur sa base salariale parce que tout son temps était consacré au problème de harcèlement au travail. Pour ce motif, il n’a pas regardé son dossier en profondeur en temps utile.

[23]        De toute évidence, les faits que le travailleur soumet maintenant étaient connus de lui lorsqu’il s’est présenté en audience devant le premier juge administratif. Le travailleur ne peut pas aujourd’hui bonifier sa preuve et requérir une nouvelle décision. Comme mentionné précédemment, le caractère final de la décision de la Commission des lésions professionnelles doit prévaloir.

[24]        Le travailleur soumet que les conclusions du premier juge administratif sur la base salariale et le remboursement des frais de déplacement ne sont pas appuyées sur les règles de droit .  

[25]        Avec égard pour le travailleur, le tribunal constate que les motifs exprimés par le premier juge administratif reposent sur le droit applicable. Celui-ci réfère aux dispositions législatives et réglementaires pertinentes. Son raisonnement est intelligible et ne souffre d’aucune faille.

[26]        Le travailleur propose au tribunal une interprétation des règles de droit que le premier juge administratif a écartée en s’expliquant abondamment. Il n’y a pas lieu de revenir sur ces questions.

[27]           Le travailleur suggère que les textes réglementaires auxquels le premier juge administratif réfère n’existent pas parce qu’il ne les a pas retracés en consultant la Gazette officielle du Québec. Le tribunal considère que cette affirmation est pour le moins étonnante puisque les références aux textes réglementaires et législatifs sont indiquées dans le texte et aux notes de bas de pages de la décision.

[28]        Le travailleur allègue que les intérêts payés par la CSST ne sont pas correctement calculés et que le premier juge administratif aurait dû remédier à cette situation. Le tribunal constate encore une fois que la réponse à cette question a été donnée par le premier juge administratif aux paragraphes 65 à 72 de la décision.

[29]        Considérant ce qui précède, le tribunal juge que la requête en révision ou en révocation du travailleur est non fondée.        

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

DÉCLARE que la requête en révision ou en révocation du travailleur, monsieur Gerry Lespinasse, a été déposée dans le délai requis par la loi;

REJETTE la requête en révision ou en révocation du travailleur.  

 

 

__________________________________

 

Michèle Juteau

 

 

 



[1]          L.R.Q., c. A-3.001.

[2]          Systèmes Polymère Structural Canada et Manseau, [2007] C.L.P. 1496 ; Bich Do et Café Romy,   C.L.P. 301489-71-0610, 26 juin 2008, J.-F. Clément; Moschin et Communauté urbaine de             Montréal, [1998] C.L.P. 860 ; Récupération Grand-Portage inc. et Lavoie, C.L.P. 86045-01A-9702, 5 février 1999, J.-L. Rivard; Godbout et Les Spécialités MB 1987 inc., C.L.P. 90735-62B-9708,           19 mars 1999, C. Lessard.

[3]          Donohue inc. et Villeneuve, [1998] C.L.P., 733; Franchellini et Sousa, [1998] C.L.P.; CSST et      Viandes & Aliments Or-Fil, C.L.P. 86173-61-9702, 24 novembre 1998, S. Di-Pasquale; Louis-      Seize et CLSC-CHSLD de la Petite-Nation, C.L.P. 214190-07-0308, 20 décembre 2005, L. Nadeau.

[4]          Bourassa et Commission des lésions professionnelles, [2003] C.L.P. 601 , C.A.; CSST et            Fontaine, [2005] C.L.P. 626 , C.A; CSST et Touloumi, [2005] C.L.P. 921 , C.A.

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