Demers-Diaz c. Bauer Hockey Corporation |
2017 QCCQ 14913 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre civile » |
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N° : |
500-32-152610-160 |
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DATE : |
Le 19 décembre 2017 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
YVES HAMEL, J.C.Q. |
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Christian Demers-Diaz, |
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Partie demanderesse |
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c. |
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Bauer Hockey CorpORATION -et- 3753271 Canada inc., faisant affaires sous le nom « Sports Rousseau », |
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Partie défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Christian Demers-Diaz (Demers-Diaz)[1] réclame solidairement à Bauer Hockey Corporation (Bauer) et à 3753271 Canada inc., faisant affaires sous le nom « Sports Rousseau » (Rousseau), 15 000,00 $ qu’il détaille comme suit[2] :
« […]
Dépenses directes :
Taxis - Hôpital (HMR)
14-12 - aller-retour
total - 57,05 (aréna - HMR - maison)
15-12 - aller-retour total - 59,00 (R-Vs endocrinol - Rx- maison)
7-1 - aller-retour total - 58,70 (R-Vs orthoped - Rx- maison)
21-1 - aller-retour total - 58,05 (R-Vs orthoped - maison)
14-12 - Bâton
hockey brisé - 299,99 + Tx = 344.99 - (CCM-Superfast Bergeron)
en entrant dans la bande.
23-12 - Play
it Again Sports - 160,95 - Lames Bauer Fusion, hors garantie,
(home patin brisée) 15 mois après achat.
14-12 - Location béquilles (3 sem. 4 jrs) - 20.00 - Pharmaprix
14-12 - Achat Zimmer - 69.00 - Stabiliser jambe
(4 mai au 23 nov.) - Le Palier Juridique - 1064.63 - Conseils juridiques
01-9 - Lettre
du médecin - 50.00 Suite à la réaction de Bauer
spécialiste confirmant et Sports
Rousseau
impossibilité de jouer
31-5 - Petites créances - 200.00
Sous-Total : 2142.37
Dépenses indirectes :
· Perte de toutes pratiques du 14-12 au 28-2 et mars en entier
· A joué 15 des 36 matches réguliers
· A joué 2 des 16 matches régionaux
· A joué 2 des 4 matches séries
Total 19 sur 46 matches
Coût de la saison 650$
Donc 19 x 650 = 268$ de jouer
46
650$ - 268$ = Perte de 382$ 382.00
·
Pratiques extras recommandés par soigneur :
YMCA - Hochelaga 6 x 4$ = 24.00
·
Perte du Tournoi Shawinigan
- Chambre payée 95.00
- Vente billets 100.00 - obligation d’achat 195.00
même blessé pr. Payer frais de tournois
Shawinigan (fin Janv.) et Blainville (début Janvier)
·
Perte de gymnase au Collège Marie-Victorin
150$ annuel pr. Étudiant = 3 x 150 - 37,50
12
Sous-Total → 638.50
Pertes directes 2142.37
Pertes indirectes 638.50
2780.87
+ dommages -
→ Après cette saison-là, il s’est démotivé peu à peu.
→ Il avait 18 ans au moment de la blessure. »
[2] Essentiellement, Demers-Diaz soutient que les patins acquis le 13 septembre 2014 de Rousseau et manufacturés par Bauer sont affectés d’un vice caché en ce que la lame a été remplacée à trois reprises par Rousseau par l’intermédiaire de Bauer dans un intervalle de moins de 15 mois.
[3] Le dernier bris de la lame de patin est survenu le 14 décembre 2015.
[4] Au moment du bris, Demers-Diaz patine rapidement lors d’un échappé en direction du filet adverse et chute sur la glace.
[5] Lors de sa chute, Demers-Diaz frappe violemment la bande et il se fracture la rotule du genou droit.
[6] Bauer nie le bien-fondé en fait et en droit de la réclamation de Demers-Diaz.
[7] Bauer produit au dossier de la Cour une Contestation[3] en ces termes :
« […]
- Claimant’s skates show signs of abuse & pour maintenance
- Claimant did not retain broken skate runner - spoliation
- Claimant played hockey game immediately following alleged date of injury, calling into question severity of injury & lack of mitigation of risk.
[…] »
[8] Au moment de l’instruction de la présente affaire, le Tribunal est informé que des procédures devant le tribunal United States Bankruptcy Court for the District of Delaware, ont été entreprises par Bauer, occasionnant la suspension temporaire des présentes procédures à son endroit[4].
[9] Rousseau nie également le bien-fondé en fait et en droit de la réclamation de Demers-Diaz.
[10] Rousseau produit une Contestation[5] au dossier de la Cour dans laquelle elle plaide :
« […]
La partie défenderesse conteste la réclamation pour les motifs suivants :
1. La partie défenderesse conteste les faits : La Défenderesse, 3753271 Canada inc., faisant affaires sous le nom Sports Rousseau (ci-après « Sports Rousseau ») n’a commis aucune faute susceptible d’engager sa responsabilité à l’endroit du demandeur;
Sports Rousseau soumet respectueusement qu’il n’existe aucun lien de causalité entre l’accident du demandeur M. Demers-Diaz et la prétendue faute que celui-ci attribue à Sports Rousseau;
2. La partie défenderesse conteste le montant réclamé pour les raisons suivantes : Les dommages réclamés par le demandeur M. Demers-Diaz sont grossièrement exagérés et illégalement réclamés, le tout tel qu’il sera démontré lors de l’audition.
[…] »
QUESTIONS EN LITIGE
[11] Les lames de patins acquis le 13 septembre 2014 de Rousseau et remplacées par cette dernière et Bauer à deux (2) reprises avant le troisième bris survenu le 14 décembre 2015 sont-elles affectées par un vice caché engageant la responsabilité civile de Bauer et Rousseau?
[12] Dans l’affirmative, quel est le montant des dommages auxquels Demers-Diaz a droit d’être indemnisé, s’il en est?
CONTEXTE
[13] Le ou vers le 13 septembre 2014, Demers-Diaz achète des patins Bauer (Patins) auprès de Rousseau pour la somme de 689,84 $[6].
[14] Entre le moment de l’accident survenu le 14 décembre 2015 et l’achat des Patins, Rousseau procède au remplacement des lames de ceux-ci à deux (2) reprises, suite à des bris survenus de façon fortuite[7].
[15] En effet, le ou vers le 30 mars 2015, Rousseau remplace sous garantie, par l’intermédiaire de Bauer, sans frais, une lame de Patins qui brise soudainement, soit un peu plus de six (6) mois après l’achat des Patins.
[16] Le ou vers le 17 août 2015, Rousseau procède au remplacement, encore une fois par l’intermédiaire de Bauer, pour une deuxième fois, d’une lame de Patins qui a brisée également soudainement.
[17] Le remplacement effectué par Rousseau sous garantie en août 2015 s’effectue sans frais, moins de quatre (4) mois après un premier remplacement de la lame de Patins.
[18] Finalement, le 14 décembre 2015, survient un troisième bris soudain d’une lame du Patin de Demers-Diaz.
[19] Lors de sa chute, Demers-Diaz frappe durement la bande et se fracture la rotule du genou droit[8].
[20] En effet, Demers-Diaz, dans le cadre d’une partie amicale, procède à un échappé en direction du filet de la partie adverse et tombe à la suite du bris de la lame de son Patin.
[21] Un rapport Rapport d’accident[9] est complété auprès de la Ville de Montréal.
[22] Dans celui-ci, à la section 7 Description de l’accident, il y est mentionné « Du(sic) à une lamme(sic) défectueuse il a glissé et foncé dans la bande », et à la section 6 Blessure soupçonnée, « genou », « Droit » et « Rotule » sont cochés [10].
[23] Pour la période comprise entre le 14 décembre 2015 au 21 janvier 2016, Demers-Diaz est en « incapacité totale temporaire »[11].
[24] Le ou vers le 16 décembre 2015, Demers-Diaz procède au remplacement de la lame brisée pour une troisième fois, cette fois-ci auprès de Play It Again Sports pour la somme de 160,95 $[12], compte tenu des bris antérieurs des lames remplacées par Rousseau et Bauer.
[25] Le ou vers les 28 février 2016 et 3 mars 2016, Demers-Diaz tente un retour au jeu, mais sans succès, compte tenu que son genou droit le fait souffrir.
[26] Au moment de sa tentative de retour au jeu, Demers-Diaz signe une Décharge de responsabilité[13] auprès de son équipe Les Sharp de l’Est.
[27] Ainsi, il ne peut participer aux parties régulières de la saison avant fin mars 2016, début avril 2016.
[28] Le ou vers le 29 mars 2016, Demers-Diaz met en demeure Rousseau et Bauer[14].
[29] Ainsi, Demers-Diaz recommence à jouer fin mars, début avril 2016 et constate qu’il n’a plus la même habilité et capacité physique au niveau de son genou droit.
[30] En effet, celui-ci lui fait mal et l’empêche de poursuivre sa carrière de joueur de Hockey junior plus amplement, compte tenu des douleurs ressenties lorsqu’il est revenu au jeu.
[31] Demer-Diaz prend la décision de ne plus jouer au hockey avec contact, compte tenu de la fragilité de son genou droit.
[32] Le ou vers le 12 avril 2016, Bauer demande à Demers-Diaz de pouvoir examiner le Patin et la lame brisés le 14 décembre 2015.
[33] Le père de Demers-Diaz, Monsieur Michel Demers (Père), se rend rencontrer un représentant de Bauer le 4 mai 2016, afin que cette dernière puisse examiner le Patin et la lame brisée.
[34] À la suite de cette rencontre, Bauer conserve la lame brisée et remet le Patin au Père.
[35] Le 31 mai 2016, Demers-Diaz intente le présent recours.
LE DROIT
[36] Pour une bonne compréhension de la présente affaire, le Tribunal croit qu’il est approprié de reproduire les articles 1458, 1726, 1728, 2803 et 2804 du Code civil du Québec[15] (C.c.Q.) lesquels prévoient :
« […]
1458. Toute personne a le devoir d’honorer les engagements qu’elle a contractés.
Elle est, lorsqu’elle manque à ce devoir, responsable du préjudice, corporel, moral ou matériel, qu’elle cause à son cocontractant et tenue de réparer ce préjudice; ni elle ni le cocontractant ne peuvent alors se soustraire à l’application des règles du régime contractuel de responsabilité pour opter en faveur de règles qui leur seraient plus profitables.
[…]
1726. Le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l’usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné si haut prix, s’il les avait connus.
Il n’est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l’acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.
[…]
1728. Si le vendeur connaissait le vice caché ou ne pouvait l’ignorer, il est tenu, outre la restitution du prix, de réparer le préjudice subi par l’acheteur.
[…]
2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.
Celui qui prétend qu’un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée.
2804. La preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante.
[…] »
[37]
De plus, les articles
« […]
37. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à l’usage auquel il est normalement destiné.
[…]
38. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien.
[…]
53. Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d’exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur un vice caché du bien qui a fait l’objet du contrat, sauf si le consommateur pouvait déceler ce vice par un examen ordinaire.
Il en est ainsi pour le défaut d’indications nécessaires à la protection de l’utilisateur contre un risque ou un danger dont il ne pouvait lui-même se rendre compte.
Ni le commerçant, ni le fabricant ne peuvent alléguer le fait qu’ils ignoraient ce vice ou ce défaut.
Le recours contre le fabricant peut être exercé par un consommateur acquéreur subséquent du bien.
[…] »
[38] Ainsi, il appartient à Demers-Diaz d'établir, selon le critère de la prépondérance de la preuve[17], que les lames de Patins manufacturées par Bauer et acquis de Rousseau sont affectées d’un vice caché, au sens du C.c.Q. et de la LPC[18], et, le cas échéant, les dommages subis à la suite du vice caché affectant les lames de Patins lors de l’accident survenu le 14 décembre 2015.
[39] De la même façon, Rousseau et Bauer doivent établir que les trois (3) bris de lames des Patins survenus en moins de 15 mois ne constituent pas un vice caché, selon le critère de la prépondérance de la preuve.
[40] Dans ce contexte, la LPC[19] prévoit une garantie légale de qualité, celle-ci se décompose en une garantie d’usage normale[20], de durabilité raisonnable[21] et de sécurité du bien[22].
[41] Cette garantie légale de qualité, offerte aux termes de la LPC[23], constitue une application particulière de la notion de « vice caché », laquelle renvoie au Droit commun[24].
[42] Dans ce contexte, Demers-Diaz doit établir les conditions d’ouverture de son recours invoquant la garantie de qualité, c’est-à-dire de démontrer le caractère non apparent (occulte) du vice, qu’il est inconnu de sa part lors de l’achat, qu’il est antérieur à la vente et suffisamment grave[25].
[43] Toutefois, comme nous l’enseigne la Cour d’appel dans l’arrêt Fortin c. Mazda Canada inc.[26], le régime de preuves pour faire valoir une garantie de qualité en Droit de la consommation[27] est différent de celui du Droit commun[28] en raison de différentes présomptions qui aident à la démonstration de certains critères.
[44] Notamment, il y a lieu de souligner, en l’espèce, la présomption de connaissance du vice prévue à l’article 53, alinéa 3 de la LPC[29] qui prévoit que tant Rousseau que Bauer sont présumés connaître le vice dont est affecté le bien qu’ils vendent et qu’il s’agit d’une présomption absolue qu’ils ne peuvent renverser[30].
[45] De même, il existe aux paragraphes 37 et 38 de la LPC[31] une présomption selon laquelle le vice existait au moment de la vente, si Demers-Diaz prouve une absence de durabilité raisonnable ou si le vice rend l’usage difficile ou impossible[32].
[46] Ainsi, la LPC[33] a pour objet, entre autres, d’aider le consommateur, en l’espèce Demers-Diaz à établir la preuve du vice par un mécanisme de présomptions.
[47] À cet effet, l’auteur Pierre-Claude LAFOND commente la preuve nécessaire comme suit [34]:
« […]
414. Le grand avantage de cette garantie (38 de la LPC) pour le consommateur est l’absence d’exigence de faire la preuve, direct et indirect, d’un vice caché. La seule preuve que le consommateur doit présenter est que le bien n’a pas servi normalement pendant une durée raisonnable, compte tenu des trois (3) critères de l’article 38 : son prix, le respect des clauses du contrat et les conditions normales d’utilisation.
[…] »
[48] En d'autres mots, chacune des parties doit établir par une prépondérance de preuve leurs prétentions.
[49] Ainsi, dans l'arrêt Parent c. Lapointe[35], Monsieur le juge Taschereau de la Cour suprême du Canada déclare :
« C'est par la prépondérance de la preuve que les causes doivent être déterminées et c'est à la lumière de ce que révèle les faits les plus probables que les responsabilités doivent être établis. »
[50] Dans le volume La preuve civile[36], l’auteur fait la distinction entre ce qui constitue une simple possibilité par rapport à une probabilité en ces termes :
« Ainsi, le plaideur doit démontrer que le fait litigieux est non seulement possible mais est probable. »
[51] La Cour suprême du Canada, dans l'arrêt F.H. c. McDougall[37], écrit relativement à la valeur probante d'une preuve :
« De même, la preuve doit toujours être claire et convaincante pour satisfaire aux critères de la prépondérance des probabilités. »
ANALYSE DE LA PREUVE
[52] La prépondérance de la preuve révèle que les Patins acquis par Demers-Diaz ont subi un bris de lames à trois (3) reprises en l’espace de 15 mois.
[53] Le premier bris survient à un peu plus de six (6) mois après l’achat des Patins.
[54] Ainsi, Rousseau remplace la lame sous garantie, par l’intermédiaire de Bauer, sans frais, et près de quatre (4) mois plus tard, la lame brise à nouveau.
[55] Lors des différents remplacements de lames, Rousseau a eu la possibilité d’examiner celles-ci et d’évaluer la ou les causes de leur bris, s’il en est.
[56] Finalement, la lame remplacée sous garantie en août 2015 et fournie par Bauer brise moins de quatre (4) mois plus tard pour une troisième fois, c’est-à-dire le 14 décembre 2015.
[57] Bref, la prépondérance de la preuve amène le Tribunal à conclure qu’aux termes des articles 37, 38 et 53 de la LPC[38], les lames de Patins ont brisé de façon anormale.
[58] En effet, aucune des lames neuves fournies par Rousseau, par l’intermédiaire de Bauer, n’a duré plus de six (6) mois, ce qui est anormal.
[59] Une lame de patin doit avoir une durée de vie utile de plus de quatre (4) mois, voire de plus de six (6) mois.
[60] D’ailleurs, Rousseau reconnaît qu’il est anormal que les lames de Patins se soient brisées trois (3) fois en près de 15 mois.
[61] De l’aveu même du représentant de Rousseau, il est extrêmement rare que les lames de patin se brisent à une telle fréquence.
[62] Le remplacement des lames de Patins effectuées en mars et août 2015 ne révèle aucune utilisation anormale ou entretien non standard de la part de Demers-Diaz.
[63] D’ailleurs, Rousseau et Bauer ne s’objectent pas au remplacement des lames de Patins en mars 2015 et août 2015, au motif de mauvais usage ou entretien des Patins de la part de Demers-Diaz.
[64] La preuve révèle qu’en tout temps pertinent aux présentes, Demers-Diaz effectue le même usage et entretien de ses Patins à compter de l’achat de ceux-ci jusqu’au troisième bris de lames survenu le 14 décembre 2015.
[65] Aux termes de la preuve offerte, la prépondérance de la preuve ne permet pas au Tribunal de conclure à des conditions anormales d’utilisation des Patins de la part de Demers-Diaz.
[66] Ceci étant, le Tribunal conclut de l’ensemble de la preuve offerte que les lames offertes par Rousseau et Bauer sous garantie et remplacées par ces dernières à deux (2) reprises sont affectées d’un vice caché engageant leur responsabilité civile.
[67] Aux termes de la LPC[39], il importe peu que Demers-Diaz établisse la cause exacte du bris des lames de Patins survenu à trois (3) reprises[40] en si peu de temps.
[68] En effet, la LPC[41] crée une présomption de connaissance du vice caché, tant par le manufacturier (Bauer) que par le distributeur (Rousseau) des produits affectés d’un vice caché.
[69] Il convient de souligner que Bauer a eu, entre autres, l’opportunité d’examiner et de procéder à des tests, le cas échéant, sur la lame brisée le 14 décembre 2015 du patin de Demers-Diaz.
[70] Par ailleurs, Rousseau, tel que mentionné précédemment, a eu l’opportunité d’examiner les lames affectées du même vice caché que celles brisées le 14 décembre 2015 à deux (2) reprises.
[71] D’ailleurs, la lame brisée le 14 décembre 2015 et affectée d’un vice caché est toujours en possession de Bauer depuis mai 2016, qui a gardé celle-ci plutôt que de la remettre à Demers-Diaz.
[72] Les faits et gestes de Bauer ne peuvent être imputables à Demers-Diaz et porter préjudice à son recours dirigé à l’endroit de Rousseau.
[73] Rousseau avait tout le loisir de contacter Bauer afin d’examiner la lame de Patin brisée le 14 décembre 2015, ce qu’elle n’a pas fait.
[74] Au surplus, Rousseau n’a pas plus requis à Demers-Diaz, contrairement à Bauer, d’examiner la lame de Patin brisée à la suite de la réception de la mise en demeure, et ce, avant l’instruction de la présente affaire.
[75] À tout événement, force est de constater que Rousseau a été à même d’examiner à au moins deux (2) reprises les lames de Patins de Demers-Diaz brisées, c’est-à-dire lors du remplacement sous garantie le ou vers le 30 mars 2015 et le ou vers le 17 août 2015.
[76] L’ensemble de la preuve amène le Tribunal à conclure que le vice caché affectant la lame brisée le 14 décembre 2015 est le même vice caché affectant les lames brisées le ou vers le 30 mars 2015 et le ou vers le 17 août 2015.
[77] Ainsi, Rousseau n’a rien constaté de spécial relativement aux lames brisées ainsi qu’à l’usage ou l’entretien des Patins lors des remplacements intervenus en mars et août 2015, comme d’ailleurs lors du bris survenu en décembre 2015.
[78] Ceci étant, quel est le montant des dommages que Demers-Diaz a droit de recevoir, compte tenu que Rousseau et Bauer sont présumées connaître le vice caché affectant les lames de Patins brisées le 14 décembre 2015?
[79] Le Tribunal accueillera, en partie, la demande d’indemnisation de Demers-Diaz.
[80] Le Tribunal accorde la somme de 232,80 $ à titre de remboursement pour les frais de taxis, lors des déplacements de Demers-Diaz à ses différents rendez-vous médicaux.
[81] Le remboursement du bâton de hockey brisé n’est pas accordé, dans la mesure où il s’agit d’un dommage indirect et pour lequel le Tribunal ne peut conclure à un lien entre le bris de la lame et le bris du bâton.
[82] Le Tribunal accorde le remplacement de la lame de Patin au coût de 160,95 $ auprès de Play It Again Sports.
[83] De même, le Tribunal accorde la location de béquilles et l’achat d’un « Zimmer » pour le genou de Demers-Diaz aux montants respectifs de 20,00 $ et 69,00 $.
[84] Au niveau des frais d’avocats, le Tribunal rejette cet item de la réclamation, dans la mesure où la preuve offerte ne permet pas de conclure à un mauvais usage de la procédure de la part de Rousseau ou Bauer ou d’une contestation frivole et dilatoire de leurs parts.
[85] Le Tribunal accorde à Demers-Diaz la somme de 50,00 $ pour l’obtention du rapport du médecin orthopédiste.
[86] Le Tribunal ne peut accorder le remboursement des frais payés pour la saison de hockey que Demers-Diaz n’a pu terminer ainsi que les frais de tournois auxquels il n’a pu participer, dans la mesure où aucune preuve documentaire probante n’a été fournie afin d’établir les divers montants payés et réclamés par Demers-Diaz, outre l’affirmation de ce dernier.
[87] Au niveau des dommages, troubles, ennuis, inconvénients et perte de jouissance à la suite du bris de la rotule au genou droit, le Tribunal arbitre[42] ceux-ci à la somme de 3 500 $.
[88] Pour ce faire, le Tribunal prend en considération que Demers-Diaz est en incapacité totale temporaire pour la période du 14 décembre 2015 au 21 janvier 2016.
[89] De même, le Tribunal prend également en considération qu’à la suite de bris de la rotule de son genou droit, Demers-Diaz n’a pu poursuivre sa carrière de Hockey Junior comme avant, compte tenu d’une douleur résiduelle à celui-ci et une faiblesse marquée au niveau de son genou droit lorsqu’il joue au hockey.
[90] Tous les autres items de la réclamation de Demers-Diaz sont rejetés.
[91] Compte tenu que Bauer bénéficie de la protection de la Loi, aux termes des procédures de faillite entreprises auprès du United States Bankruptcy Court for the District of Delaware, le Tribunal réserve les droits et recours de Demers-Diaz et Rousseau à l’égard de Bauer, advenant la reprise des opérations de cette dernière.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
ACCUEILLE, en partie, la réclamation de Monsieur Christian Demers-Diaz;
CONDAMNE
3753271 Canada inc., faisant affaires sous le nom « Sports
Rousseau » à payer Monsieur Christian Demers-Diaz la somme
de 4 032,75 $, avec intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle
prévue à l'article
RÉSERVE tous les droits et recours de Monsieur Christian Demers-Diaz et 3753271 Canada inc., faisant affaires sous le nom « Sports Rousseau » à l’égard Bauer Hockey Corp., dépendamment de l’issue des procédures de faillite entreprises par cette dernière auprès du United States Bankruptcy Court for the District of Delaware;
LE TOUT avec les frais de justice.
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__________________________________ YVES HAMEL, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
Le 13 octobre 2017 |
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[1] L'utilisation des prénoms ou des noms de famille dans le jugement vise à alléger le texte et non à faire preuve de familiarité ou de prétention.
[2] Pièce P-8 (Sommaire de la réclamation du demandeur).
[3] Extrait du dossier de la Cour (Contestation de Bauer Hockey Corp.)
[4] Extrait du dossier de la Cour (In the United States Bankruptcy Court for the District of Delaware, Chapter 11, Case Number 16-12373 (KJC), Ref. Docket No. 1369, 1418).
[5] Extrait du dossier de la Cour (Contestation de « Sports Rousseau ».)
[6] Pièces P-1 et P-1-A.
[7] Idem, note 6.
[8] Extrait des pièces P-3 et P-3-A.
[9] Extrait de la pièce P-2.
[10] Idem, note 9.
[11] Extrait de la pièce P-3-A (Lettre du 1er septembre 2016 de Dr. Patrick Lavigne, Chirurgien Orthopédiste).
[12] Supra, note 2.
[13] Pièce P-5.
[14] Pièce P-4 en liasse.
[15] RLRQ, c. CCQ-1991.
[16] RLRQ, c. P-40.1
[17]
Article
[18] Supra, note 16.
[19] Supra, note 16.
[20]
Article
[21]
Article
[22]
Article
[23] Supra, note 16.
[24]
Claude MASSÉ,
[25] Nicole l’Heureux et Marc LACOURSIÈRE, Droit de la consommation, Cowansville, Édition Yvon Blais, 2011, pages 101 à 105.
[26]
[27] Supra, note 25
[28] Supra, note 24.
[29] Supra, note 16.
[30]
Godbout c. Caravane Joubert inc.,
[31] Supra, note 16.
[32] Supra, note 24, pages 259 et 277.
[33] Supra, note 16.
[34]
P.-C. LAFOND,
[35] 1952 1 (RCS), pages 376 et ss., p. 380.
[36] 4e édition, no 174, p. 126.
[37] 2008, 3 (RCS) 41.
[38] Supra, note 16.
[39] Supra, note 16.
[40]
Tinmouth c. Général Motors du Canada ltée, (1988) R.G.Q. 1982
(CQ); Confirmée en appel : Général Motors du Canada ltée c. Tinmouth,
[41] Supra, note 16.
[42] Jacob Pollack c. The Canadian Imperial Bank of Commerce, C.A. Montréal, no 500-09-000208-778, 20 mai 1981, J. J. Kaufman, L'Heureux-Dubé, Laflamme, pp. 4-5.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.