Décision

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[Texte de la décision]

Section des affaires sociales

En matière d'indemnisation

 

 

Date : 16 janvier 2015

Référence neutre : 2015 QCTAQ 01509

Dossiers : SAS-M-198140-1204 / SAS-M-200436-1206

Devant les juges administratifs :

PRESHA BOTTINO

JOSÉE CARON

 

C… B…

            et

J… D…

Parties requérantes

c.

SOCIÉTÉ DE L'ASSURANCE AUTOMOBILE DU QUÉBEC

Partie intimée

 


DÉCISION


[1]              Le Tribunal est saisi ici de deux recours intentés respectivement par les requérants à l’encontre de deux décisions, rendues en révision le 27 mars 2012 et le 12 avril 2012, par l’intimée, la Société de l’assurance automobile du Québec.

[2]              La requérante conteste la décision rendue en révision le 27 mars 2012. Cette décision maintient deux décisions, de première instance, des 16 et 17 février 2011.

[3]              Cette décision en révision porte sur le refus de reconnaître le fait accidentel qui serait survenu le 19 octobre 2009 et réclame à la requérante la somme de 32 591,16 $, versée sans droit.

[4]              Le requérant conteste la décision rendue en révision le 12 avril 2012. Cette décision confirme deux décisions, de première instance, du 16 février 2011.

[5]              Cette décision en révision porte sur le refus d’accorder au requérant les indemnités prévues par la Loi sur l’assurance automobile en raison du fait que l’accident, qui serait survenu le 19 octobre 2009, n’est pas reconnu par l’intimée et lui réclame la somme de 52 704,62 $, payée sans droit.

 

Témoignage de la requérante, madame C.B.

[6]              À l’audience, la requérante témoigne et raconte que le 19 octobre 2009, vers les 17 h, elle conduisait son véhicule Impala, 1967 ou 1969, bleu.

[7]              Elle précise que c’était un véhicule ancien, acheté par son conjoint, mais immatriculé à son nom. Il était toutefois en très bon état.

[8]              Elle décrit qu’elle était assise seule, sur le banc du conducteur, derrière le volant, le siège était bas, il n’y avait pas de ceinture de sécurité, de coussins gonflables ou d’appui-tête, le bras de vitesse se trouvait au niveau du volant, elle n’était donc pas attachée.

[9]              La requérante raconte qu’elle était alors étudiante en cuisine, à l’Institut du tourisme. Elle avait terminé ses cours à 16 h et elle revenait de chez sa mère qui gardait sa fille et qui habitait à Ville A. Elle se rendait à l’entreprise de son conjoint, Compagnie A, à Ville B.

[10]           Elle relate qu’elle roulait sur la route 343, à Ville B, et que lorsqu’elle est arrivée en face du garage de son conjoint, elle a freiné et s’est immobilisée pour attendre de pouvoir tourner à gauche. Son clignotant était en fonction.

[11]           Elle précise qu’il n’y avait pas d’arrêt et qu’il y avait une seule voie par direction.

[12]           Elle affirme qu’alors qu’elle attendait, les deux mains sur le volant, sa voiture a été emboutie par en arrière.

[13]           Elle indique que, suite à l’impact arrière, sa voiture a été projetée vers l’avant et elle a avancé dans la cour du garage de son conjoint.

[14]           Elle explique que sa voiture était légèrement tournée à gauche, lors de l’impact, car elle s’apprêtait à tourner dans cette direction.

[15]           Elle ne se souvient pas, toutefois, si son pied était sur la pédale des freins lors de l’impact.

[16]           La requérante déclare qu’elle n’a pas vu venir l’autre voiture, un « pick-up » Ram, noir.

[17]           Elle ajoute qu’après l’impact, l’autre voiture l’a suivie dans la cour du garage.

[18]           La requérante raconte qu’elle est par la suite sortie de sa voiture et elle est entrée dans le garage de son conjoint. Le conducteur de l’autre véhicule l’a également suivie dans le garage.

[19]           La requérante affirme qu’elle ne connaissait pas le requérant avant l’accident.

[20]           La requérante soutient qu’il n’y a pas eu de témoin de l’accident, aucune voiture ne s’est arrêtée sur la route, ni son conjoint ni les employés du garage n’ont vu la collision. Après l’impact, elle n’a pas vu de débris sur la rue.

[21]           La requérante souligne qu’elle a alors appelé le 911 qui l’a transférée au poste de police. Elle précise qu’on l’aurait alors informée que les policiers ne pouvaient se rendre sur les lieux de l’accident et qu’elle devrait donc remplir un constat à l’amiable.

[22]           La requérante soutient, qu’elle et le requérant, se sont échangés leurs coordonnées et écrit des documents à cet effet, car ni l’un ni l’autre n’avait de constat à l’amiable.

[23]           La requérante déclare qu’elle n’a pas ressenti de douleurs physiques lors de l’impact. Les douleurs sont apparues durant la nuit. Le lendemain, elle s’est rendue à l’hôpital de Joliette pour consulter pour des douleurs au niveau du dos.

[24]           Elle spécifie qu’elle n’a pu assister à ses cours pendant une semaine.

[25]           Elle confirme qu’elle a soumis une demande d’indemnité auprès de sa Société de l’assurance automobile du Québec le 26 octobre 2009.

[26]           Elle reconnaît avoir été payée pas ses assurances pour les dommages subis par son véhicule.

[27]           Elle signale que ce n’est qu’un an après, soit le 14 octobre 2010, que la Société de l’assurance automobile du Québec lui a demandé de rencontrer un enquêteur, monsieur Luc Juteau, qui l’a interrogée relativement à l’accident survenu le 19 octobre 2009.

 

Témoignage de monsieur Luc Juteau, enquêteur pour la Société de l’assurance automobile du Québec.

[28]           L’enquêteur, monsieur Luc Juteau, témoigne et raconte qu’il a rencontré la requérante, en date du 14 octobre 2010.

[29]           Il indique que c’était à la demande de l’enquêteur, monsieur Yves Thomassin, qui lui avait demandé de l’aide pour son enquête.

[30]           Il précise que la rencontre s’est faite sous enregistrement audio, sans qu’il y ait de déclaration écrite.

[31]           Il spécifie que les photos aux dossiers lui ont été remises par monsieur Thomassin, mais qu’il ne sait pas qui les avait prises. Il ajoute que c’est lui, par contre, qui a dessiné le croquis illustrant la position des véhicules lors de l’accident survenu le 19 octobre 2009.

[32]           Monsieur Juteau reconnaît qu’il n’a pas fait personnellement d’enquête dans les dossiers en l’instance.

[33]           Contre-interrogé, il admet qu’il n’a pas questionné les « voisins » du garage en question. Il ne s’est pas informé s’il y avait eu des témoins ou des « curieux » qui auraient vu l’accident.

[34]           Il souligne qu’il s’est rendu toutefois le 13 octobre 2010, en compagnie de monsieur Thomassin, à la Sûreté du Québec pour s’enquérir s’il y avait eu des appels concernant l’accident du 19 octobre 2009.

[35]           Il signale qu’on lui a répondu qu’il n’y avait eu aucun appel, logé à la Sûreté du Québec, relativement à un accident qui serait survenu à cette date. Aucun rapport d’accident n’avait été rédigé à cet effet.

 

Témoignage de Monsieur Yves Thomassin, enquêteur pour la Société de l’assurance automobile du Québec.

[36]           Monsieur Thomassin témoigne et indique qu’il a reçu un mandat, en juillet 2010, de la part de la Société de l’assurance automobile du Québec, pour effectuer une enquête relativement aux deux accidents d’automobile du requérant, soit celui du 19 octobre 2009 et celui de mars 2010.

[37]           Il reconnaît qu’il y a eu surveillance et filature des requérants, mais que les résultats n’ont pas été concluants.

[38]           Il raconte qu’il a rencontré le requérant le 14 octobre 2010. Il mentionne que la rencontre s’est faite sous enregistrement audio, mais il n’y a pas eu de déclaration écrite.

[39]           Monsieur Thomassin mentionne qu’il a rencontré des représentants de la compagnie Estimatech qui lui ont remis les photographies du véhicule, Dodge Ram 2006, noir, impliqué dans l’accident du 19 octobre 2009. Ces photos avaient été prises lors de l’estimation des dommages au véhicule par la Compagnie d’assurance Aviva.

[40]           Il relate qu’il s’est rendu, avec monsieur Pierre Bellemare, au garage, Compagnie A, à Ville B, où il a rencontré Monsieur J.L., propriétaire et conjoint de la requérante.

[41]           Contre-interrogé, il admet qu’il n’a toutefois pas questionné Monsieur J.L. pour s’informer s’il y avait eu des témoins de l’accident.

[42]           Monsieur Thomassin ajoute qu’ils se sont également rendus au garage voisin, soit Compagnie B.

[43]           Il indique avoir pris des photos du véhicule Chevrolet, Impala 1963, bleu.

[44]           Monsieur Thomassin soutient qu’il a, de plus, vérifié auprès de la Sûreté du Québec s’il y avait eu des appels concernant l’accident du 19 octobre 2009.

[45]           Il déclare qu’on lui aurait alors répondu qu’il n’y avait pas « de carte d’appel » à cet effet.

[46]           Monsieur Thomassin confirme avoir conclut dans son rapport d’enquête que les véhicules appartenant respectivement aux requérants n’ont pas été endommagés lors d’un accident survenu le 19 octobre 2009.

 

Témoignage de Monsieur R.D.

[47]           Monsieur R.D. témoigne et indique qu’il est le président directeur de la compagnie Estimatech 2000.

[48]           Il raconte qu’il a été mandaté par la Compagnie d’assurance Aviva pour évaluer, pour le compte de l’assureur, les dommages au véhicule Dodge Ram 2006, impliqué dans un accident du 19 octobre 2009.

[49]           Il précise qu’il a confié cette estimation à Monsieur E.L., évaluateur, qui a conclut que ledit véhicule était une perte totale.

[50]           Il ajoute que le véhicule, Chevrolet Impala a aussi été évalué pour le compte de l’assureur, mais par un autre évaluateur, soit Monsieur D.D. L’estimation des dommages s’élevait à environ 13 000,00 $

 

Témoignage de Monsieur E.L.

[51]           Monsieur E.L. témoigne et confirme qu’il a effectué une évaluation du véhicule Dodge Ram 2006 pour la compagnie Estimatech 2000 et qu’il a conclut à une perte totale.

[52]           Il précise qu’il s’est rendu à deux reprises au garage, Compagnie B, pour examiner ledit véhicule et prendre des photos.

[53]           Il reconnaît qu’il a indiqué dans son estimation écrite que « … il n’y a pas de courant…le véhicule a perdu le contrôle et a été dans le champ, il a du gazon sous le véhicule … »

[54]           Il admet toutefois qu’aucune vérification n’a été faite pour déterminer la source du gazon sous ledit véhicule.

 

Témoignage de Monsieur F.L.

[55]           Monsieur F.L. témoigne et indique qu’il est le propriétaire du garage, Compagnie B.

[56]           Il précise que son garage est voisin et qu’il est situé sur la même route que le garage, Compagnie A.

[57]           Il raconte que le véhicule Dodge Ram a été remorqué par Remorquage National pour être transporté à son garage.

[58]           Il ajoute que, par la suite, ledit véhicule a été complètement démantelé à la demande de la Compagnie d’assurance Aviva.

[59]           Il précise que le véhicule Chevrolet Impala a, par contre, été réparé. La partie arrière du véhicule a été changée au complet. Les réparations se sont terminées en octobre 2010 et se sont élevées à environ 16 600,00 $

 

Témoignage du requérant, Monsieur J.D.

[60]           À l’audience, le requérant témoigne et raconte que le 19 octobre 2009, il conduisait son « pick-up » Dodge Ram sur la route 343, à Ville B.

[61]           Il précise qu’il avait travaillé ce jour-là, mais qu’il ne se souvient pas où il était allé avant l’accident.

[62]           Il indique qu’il était seul dans le véhicule, qu’il portait sa ceinture de sécurité, qu’il roulait à environ 70 km à l’heure et qu’il suivait un véhicule devant lui.

[63]           Le requérant soutient qu’il a dû avoir un moment d’inattention, et qu’il a, peut-être, été ébloui par le soleil, qu’il a freiné, mais qu’il n’a pu éviter la voiture devant lui et l’a emboutie par en arrière.

[64]           Il admet qu’il a dû être distrait un moment et qu’il n’a jamais vu l’autre voiture freiner et s’arrêter pour tourner.

[65]           Le requérant reconnaît qu’il a causé la collision.

[66]           Il affirme que la partie arrière de l’autre voiture était « magané », et que le devant de son véhicule était « enfoncé ».

[67]           Il déclare qu’ « il pensait avoir tué » l’autre conductrice.

[68]           Il indique que, suite à l’impact, les coussins gonflables de son véhicule se sont déployés.

[69]           Il confirme qu’après l’accident, il a roulé jusque dans la cour du garage, Compagnie A, et qu’il est entré avec la requérante dans le bureau dudit garage où ils ont rempli des documents.

[70]           Il mentionne qu’il a laissé sa voiture là et que sa conjointe est venue le chercher. Après être parti, il est allé voir son médecin de famille et il s’est rendu à l’urgence, à l’hôpital de Joliette, le lendemain seulement.

 

Témoignage de Monsieur J.L.

[71]           Monsieur J.L. témoigne et indique qu’il est le propriétaire du garage, Compagnie A, et le conjoint de la requérante.

[72]           Il raconte que le 19 octobre 2009, alors qu’il était dans son garage, il a entendu le bruit d’une collision entre deux voitures.

[73]           Il ajoute que, peu de temps après l’impact, sa conjointe est entrée dans son commerce. Il est alors sorti dehors, et il a vu les deux voitures, l’une à côté de l’autre, stationnées sur son terrain.

[74]           Il précise que sa conjointe conduisait une Chevrolet Impala 1963 et l’autre véhicule était une Dodge Ram conduite par monsieur J.D.

[75]           Il affirme que sa conjointe a appelé la police au 911, avec son cellulaire, il y a également eu un échange de coordonnées entre elle et monsieur J. D.

[76]           Il soutient qu’il a demandé à un de ses employés, monsieur S.D., de nettoyer et ramasser les débris laissés sur la chaussée suite à l’impact entre les deux voitures.

[77]           Il relate que les deux voitures ont été par la suite déplacées et amenées à l’arrière de la cour du garage. Il n’a toutefois pas assisté personnellement à ces déplacements.

[78]           Monsieur J.L. souligne que le lendemain de l’accident, comme il y avait de la fumée qui sortait du moteur du Dodge Ram, on a dû utiliser un « loader » pour ouvrir avec ses pinces le capot dudit véhicule et pouvoir couper les fils du moteur.

[79]           Il ajoute que le véhicule a dû être déplacé en urgence pour éviter que le feu se propage aux autres voitures sur le terrain.

[80]           Il ajoute qu’il a appelé par la suite pour le remorquage des deux voitures chez le garage voisin, Compagnie B.

[81]           Il confirme qu’en octobre 2010, il a eu la visite au garage des deux enquêteurs de la Société de l’assurance automobile du Québec, messieurs Luc Juteau et Yves Thomassin.

[82]           Il spécifie que la Chevrolet Impala était une perte totale, mais que sa compagnie d’assurance l’a obligé à réparer ladite voiture.

 

Témoignage de Monsieur Y.D.

[83]           Monsieur Y.D. témoigne et indique qu’il travaille pour monsieur J.L., le propriétaire du garage, Compagnie A.

[84]           Il raconte que le 19 octobre 2009, il travaillait dans la cour arrière du garage et que, par conséquent, il n’a pas été témoin de l’accident.

[85]           Il précise toutefois, qu’à la demande de son employeur, c’est lui qui a nettoyé, avec une pelle et un balai, les débris qui étaient restés sur la route, suite à l’impact.

 

Témoignage de monsieur Pierre Bellemare, consultant pour la compagnie L’Équipe Collision Expert Inc.

[86]           Monsieur Bellemare témoigne et indique qu’il a reçu, en date du 3 novembre 2010, un mandat par monsieur Yves Thomassin, enquêteur pour la Société de l’assurance automobile du Québec.

[87]           Il explique que ce mandat a été donné dans le cadre d’une enquête relativement è une collision qui serait survenue, selon la version des impliqués, sur une route en ligne droite. Cette collision serait survenue au moment où un véhicule Chevrolet Impala 1963, immobilisé, car voulant effectuer un virage à gauche, aurait été frappé à l’arrière par un « pick-up » Dodge Ram, 2006.

[88]           Il confirme que le but de son mandat était, tel que spécifié dans son rapport, soit :

« Effectuer une analyse de la collision à partir des photos des véhicules impli-qués et déterminer si les deux véhicules en présence ont effectivement été impli-qués l’un avec l’autre dans une collision, telle que prétendue par les impliqués. »

[89]           Monsieur Bellemare précise qu’il a rédigé un rapport, daté du 4 novembre 2010, et que celui-ci était basé sur les informations, photos, documents et notes recueillis suite à l’investigation de l’enquêteur, monsieur Yves Thomassin, ainsi que l’information recueillie par lui-même dans les présents dossiers.

[90]           Monsieur Bellemare signale qu’il a basé son rapport sur les photographies des deux véhicules impliqués. Photographies qui lui avait été transmises par monsieur Thomassin.

[91]           Il confirme que, suite à l’analyse des dommages aux véhicules impliqués, les conclusions de son rapport étaient à l’effet que l’impact n’avait pu se produire selon la version donnée par les impliqués.

[92]           Il confirme qu’il a effectivement indiqué dans son rapport :

 « Les empreintes observées au pare-chocs avant du véhicule Dodge Ram ne trouvent pas de correspondance sur le véhicule Chevrolet Impala.

[…]

 Aucune aspérité démontrant des arêtes pouvant s’apparenter à celles observées sur le pare-chocs du Dodge Ram n’est présente sur … le pare-chocs arrière du Chevrolet 1963. 

[…]

Finalement, la force qui a engendré les dommages du véhicule Chevrolet n’est compatible avec la force qui a engendré les dommages au véhicule Dodge Ram. Les dommages observés sur le véhicule Dodge Ram sont trop importants pour être le résultat d’un impact avec un coffre arrière comme celui du véhicule Chevrolet du présent dossier. »

[93]           Monsieur Bellemare réitère les conclusions de son rapport, notamment :

-         « Deux empreintes clairement définies sont présentes sur le pare-chocs avant du véhicule Dodge Ram;

-         Les dommages au véhicule Chevrolet se situent principalement au-dessus de sa structure inférieure et directement au niveau des tôles du coffre arrière;

-         Les forces observées sur chacun des véhicules ne sont pas compatibles l’une avec l’autre.

Ainsi compte tenu des éléments précités, le véhicule Dodge Ram n’est pas entré en contact avec le véhicule Chevrolet du présent dossier. »

[94]           Or, contre-interrogé, monsieur Bellemare admet n’avoir reçu aucune information relativement aux incidents qui seraient survenus suite au fait accidentel du 19 octobre 2009.

[95]           Il admet n’avoir pas été informé quant à un début d’incendie qui se serait déclenché dans le moteur du Dodge Ram après l’accident, soit le 20 octobre 2009, ni que celui-ci aurait été remorqué et déplacé, avec l’utilisation de fourches avants d’un « loader » ou d’un chariot élévateur.

[96]           Il reconnaît n’avoir jamais été mis au courant des manipulations post-accident, subies par le Dodge Ram et qu’il s’est basé sur des photos, toutes prises après le 20 octobre 2009.

[97]           Monsieur Bellemare concède donc que, considérant les faits post accidentels, il est donc possible que le Dodge Ram ait causé les dommages observés au Chevrolet Impala et que les dommages subis par le Dodge Ram aient été causés par le Chevrolet Impala.

[98]           Monsieur Bellemare reconnaît que si, suite à l’accident, le Dodge Ram a été déplacé, avec l’aide de fourches mécaniques, ceci expliquerait la présence des encoches observées sur son pare-chocs avant.

[99]           Contrairement aux conclusions de son rapport, il admet que les forces observées sur chacun des véhicules seraient alors compatibles l’une avec l’autre et que le Dodge Ram serait entré en collision avec le Chevrolet Impala, selon la version donnée par les requérants.

[100]        Contrairement aux conclusions de son rapport, Monsieur Bellemare admet que l’étendue des dommages aux deux véhicules serait donc ici compatible avec la version donnée par les requérants.

 

Témoignage de monsieur Olivier Bellavigna-Ladoux, ingénieur et consultant pour la compagnie Prolad >xperts.

[101]        Monsieur Bellavigna-Ladoux, témoigne et indique qu’il a effectué un rapport d’inspection, daté du 9 janvier 2012.

[102]        Il confirme que son mandat était d’analyser les dommages à un véhicule Dodge Ram 1500, 2006, et à une voiture Chevrolet Impala 1963, afin de valider la possibilité d’une collision entre ces deux véhicules, en date du 19 octobre 2009, dans la région de ville B.

[103]        Il précise que l’objectif de son investigation était de vérifier la validité des conclusions du rapport de l’entreprise l’Équipe Collision Expert qui stipulent que la possibilité d’une collision entre lesdits véhicules ne peut techniquement être retenue.

[104]        Il reconnaît que sa propre analyse est également principalement basée sur la même série de photographies des deux véhicules accidentés, utilisée par l’entreprise Équipe Collision Expert.

[105]        Or, monsieur Bellavigna-Ladoux estime que les conclusions du rapport de l’Équipe Collision Expert Inc. ne sont pas valides.

[106]        Il souligne que les deux traces d’indentations visibles sur le parc-chocs avant du Dodge Ram sont fort probablement des dommages post-collision résultant des manipulations du véhicule sur les terrains du garage, Compagnie A.

[107]        Il ajoute que l’analyse des photographies démontre que le pare-chocs arrière du véhicule Dodge Ram présente également une zone de dommage par indentation.

[108]        Il explique que le personnel dudit garage utilisait un chargeur sur roues ainsi qu’un chariot élévateur pour déplacer les véhicules accidentés sur les terrains de l’entreprise.

[109]        Il soutient que ces équipements, munis de fourches mécaniques, peuvent causer souvent des dommages physiques aux véhicules accidentés, manipulés dans les entreprises de recyclage de pièces automobiles.

[110]        Il souligne que ceci pourrait donc expliquer les zones de dommages présentés dans les photos.

[111]        Il ajoute que les propriétaires des deux garages, soit Compagnie A et Compagnie B, lui ont confirmé que le lendemain de la collision, soit le 20 octobre 2009, un début d’incendie électrique serait survenu dans la région de la batterie située dans le compartiment moteur du véhicule Dodge Ram. Ledit véhicule aurait alors été déplacé d’urgence pour l’éloigner à une distance sécuritaire avant que l’incendie ne soit éteint.

[112]        Il précise que des équipements de manutention, équipés de fourches mécaniques, auraient été utilisés pour, à la fois, déplacer le Dodge Ram et pour ouvrir le capot dudit véhicule.

[113]        Monsieur Bellavigna-Ladoux conclut qu’il est fort plausible que les indentations, encoches, visibles sur le pare-chocs avant du véhicule Dodge Ram soient le résultat direct de ces manipulations précitées.

[114]        Il signale qu’il est d’accord avec Monsieur Pierre Bellemare que ces indentations ne sont pas compatibles avec ladite collision.

[115]        Il souligne toutefois qu’il est fort plausible que « cet élément technique ne soit pas valide car étant relié à un événement post-Impact. »

[116]        Il indique qu’en effet les photos des véhicules accidentés ont toutes été prises après le début d’incendie du 20 octobre 2009.

[117]        Il affirme que, considérant les manipulations post-accident, les dommages au pare-chocs avant du Dodge Ram sont donc compatibles avec ceux qui auraient pu être causés par des fourches mécaniques.

[118]        Il conclut que les profils des dommages indiquent qu’il s’agit potentiellement ici d’une collision par l’arrière, légèrement déportée vers la droite, soit l’intrusion de la portion avant du véhicule Ram dans la structure arrière du coffre du véhicule Impala, au-dessus de son pare-chocs arrière.

[119]        Il réitère les conclusions de son rapport, soit :

« De même, notre propre analyse des dommages aux véhicules indique que la nature et le profil des enfoncements à la section avant du véhicule Ram ainsi qu’à la section arrière du véhicule Impala sont potentiellement compatibles avec une collision par l’arrière légèrement déportée vers la droite entre ces deux véhicules. »

[120]        Contre-interrogé, monsieur Bellavigna-Ladoux soutient que, pour lui, « potentiellement » signifie « probablement » et non « possiblement ».

[121]        Il déclare que, par conséquent, il n’est pas en accord avec les conclusions du rapport de monsieur Pierre Bellemare de l’Équipe Collision Expert Inc.

[122]        Monsieur Bellavigna-Ladoux estime que, techniquement, une collision s’est donc probablement produite entre les deux véhicules accidentés, telle que rapportée par la version des requérants.

 

[123]        Après avoir pris connaissance de la preuve documentaire, entendu les témoi-gnages et les arguments des procureurs, et sur le tout dûment délibéré, le Tribunal conclut que les recours des requérants devraient être accueillis, et ce, pour les motifs suivants.

[124]        En l’instance, les requérants contestent deux décisions rendues respectivement en révision les 27 mars et 12 avril 2012.

[125]        La requérante conteste le refus de l’intimée de reconnaître le fait accidentel qui serait survenu le 19 octobre 2009 et la réclamation de la somme de 32 591,16 $, versée sans droit.

[126]        Le requérant conteste le refus de l’intimée de lui accorder les indemnités prévues par la Loi, en raison du fait que ledit accident du 19 octobre 2009 n’est pas reconnu, ainsi que la réclamation de la somme de 52 704,62 $, payée sans droit.

[127]        L’intimée a jugé que suite à l’analyse des dossiers, il a été démontré que les deux véhicules impliqués dans la collision, selon la version des requérants, ne sont jamais venus en contact pour causer les dommages constatés.

[128]        Soulignons qu’ici le fardeau de la preuve incombait à l’intimée. L’intimée devait donc démontrer, par une preuve prépondérante, le bien-fondé de ses décisions.

[129]        Or, en l’instance, les décisions de l’intimée se fondent sur les conclusions de deux rapports d’enquête et d’une expertise en collision. Les éléments rapportés dans ces documents concluaient que les requérants n’ont pas été impliqués dans un accident d’automobile en date du 19 octobre 2009, tel que rapporté par ses derniers.

[130]        Premièrement, ici l’enquête a été confiée par l’intimée à l’enquêteur, monsieur Yves Thomassin. Ce dernier a fait appel à l’enquêteur, monsieur Luc Juteau, pour l’aider dans son enquête.

[131]        Monsieur Thomassin concluait dans ses deux rapports d’enquête, datés respectivement des 14 et 25 janvier 2011, que l’analyse de la collision a démontré que les deux véhicules impliqués dans la collision, selon la version des requérants, ne sont jamais venus en contact pour causer les dommages constatés.

[132]        Il basait ses conclusions sur les données suivantes :

-      Dans le cas du requérant, le dossier de l’assureur Aviva indiquait que l’accident se serait produit en date du 20 octobre 2010, au coin des rues Rosemont et Papineau, à Montréal;

-      Contrairement à ce qui précède, les deux requérants ont déclaré que l’accident d’automobile serait survenu le 20 octobre 2009, sur la route 343, à Ville B;

-      Le rapport d’évaluation de monsieur Levac, estimateur, précisait que le véhicule du requérant aurait perdu le contrôle et qu’il aurait été dans le champ, car il y avait présence de gazon sous le véhicule;

-      Il n’y a pas eu d’appel inscrit aux bureaux de la Sûreté du Québec, à Joliette, concernant l’accident du 19 octobre 2010;

-      Il n’y a jamais eu de rapport d’accident ou de demande de rapport faite à un service de police, le jour même ou dans les jours suivants;

-      Le constat à l’amiable présenté ne comporte pas les renseignements habituels.

[133]        Deuxièmement, l’intimée a mandaté monsieur Pierre Bellemare, de l’Équipe Collision Expert Inc., pour vérifier si les deux véhicules en question ont effectivement été impliqués l’un avec l’autre dans une collision, tel que rapporté par les requérants.

[134]        Or, monsieur Bellemare indiquait dans son expertise en collision, datée du 4 novembre 2010, que son opinion était basé, entre autres, sur les notes recueillies lors de l’investigation par l’enquêteur, monsieur Thomassin.

[135]        Monsieur Bellemare concluait dans son rapport que l’analyse des dommages directs versus les dommages indirects aux deux véhicules indiquait que l’impact n'a pu se produire selon la version des requérants.

[136]        Il estimait que le véhicule Dodge Ram n’est pas entré en contact avec le véhicule Chevrolet Impala pour les motifs suivants :

-       La force qui a engendré les dommages au véhicule Chevrolet Impala n’était pas compatible avec la force qui a engendré les dommages au véhicule Dodge Ram;

-       La présence de deux empreintes clairement définies sur le pare-chocs avant du véhicule Dodge Ram n’a pu être causée par la collision;

-       Les dommages au véhicule Chevrolet Impala ne correspondaient pas à ceux retrouvés au véhicule Dodge Ram.

[137]        Or, en l’espèce, le Tribunal ne peut retenir comme concluants ni les éléments de preuves recueillis lors des enquêtes ni les conclusions des rapports soumis en preuve par l’intimée.

[138]        Le Tribunal estime que l’intimée ne s’est pas déchargée de son fardeau de la preu-ve. Elle n’a pas démontré, par une preuve prépondérante, le bien-fondé de ses décisions.

[139]        Effectivement, les conclusions auxquelles arrive l’enquêteur, monsieur Thomassin, sont basées sur des faits qui n’ont jamais été vérifiés par ce dernier.

[140]        Monsieur Thomassin n’a jamais vérifié si, dans les faits, il y aurait réellement eu un accident au coin des rues Rosemont et Papineau, à Montréal, en date du 19 octobre 2010.

[141]        Également, il s’avère que l’évaluateur, monsieur Éric Levac, n’a jamais fait d’enquête pour vérifier la provenance du gazon trouvé sous le véhicule du requérant. De plus, aucun champ ne se trouve à proximité de l’intersection des rues Rosemont et Papineau.

[142]        De même, monsieur Thomassin a fait fi et n’a aucunement tenu compte des éléments de preuve soumis par les requérants, soit :

-       Le relevé de compte du cellulaire du conjoint de la requérante, indiquant qu’un appel a été logé le 19 octobre 2009, à 17h40, à l’urgence, au 911;

-       La transcription écrite de cet appel logé au 911, en date du 19 octobre, à 17h40, du cellulaire de monsieur J.L. L’appelante y rapportant qu’il y a eu un accident d’automobile et demandant que la police se rende sur les lieux;

-      Les déclarations des requérants expliquant qu’ils avaient échangé leurs coordonnées respectives, en guise de constat à l’amiable, vu l’absence d’un formulaire officiel à cet effet.

[143]        De plus, monsieur Thomassin et monsieur Bellemare ont témoigné avoir rencontré les propriétaires respectifs des deux garages où ont séjourné, suite à l’accident, les voitures accidentées.

[144]        Or, ils ont reconnu que, lors de ces visites, ils ne se sont pas informé s’il y avait eu de témoins de l’accident, ils n’ont pas questionné les employés ni les voisins immédiats des deux garages.

[145]        Aucune enquête n’a été faite par eux pour vérifier si, effectivement, il n’y avait eu aucun témoin de l’accident en question, ou des dommages causés par ledit accident.

[146]        Monsieur Deschênes, employé du garage, Compagnie A, n’a, par conséquent, jamais été questionné par eux.

[147]        Soulignons que monsieur Bellemare a admis qu’il n’avait pas été informé, lors de la rédaction de son expertise, qu’il y avait eu, post-accident, des déplacements et des manipulations du véhicule Dodge Ram.

[148]        Il a reconnu n’avoir pas été mis au courant quant à un début d’incendie électrique qui se serait déclenché dans le compartiment moteur du Dodge Ram après l’accident, soit le 20 octobre 2009.

[149]        Il a été mis en preuve qu’il avait appris, seulement depuis une dizaine de jours, le dépôt en preuve de l’expertise de monsieur Bellavigna-Ladoux.

[150]        À l’audience, par conséquent, monsieur Bellemare a changé d’opinion et a concédé que si, suite à l’accident, le Dodge Ram avait été manipulé, remorqué, ou déplacé, avec l’aide de fourches mécaniques, ceci expliquerait la présence des encoches ou empreintes observées sur son pare-chocs avant.

[151]        Contrairement aux conclusions de son rapport, il a admis que les forces observées sur chacun des véhicules seraient alors compatibles, et que les encoches seraient donc compatibles avec les manipulations post-accident.

[152]        Monsieur Bellemare a déclaré qu’il était donc d’accord avec les conclusions de monsieur Bellavigna-Ladoux et qu’il était par conséquent probable que l’étendue des dommages aux deux véhicules était donc compatible avec la version donnée par les requérants.

[153]        Par conséquent, le Tribunal retient donc l’expertise de monsieur Olivier Bellavigna-Ladoux comme étant prépondérante.

[154]        Effectivement, selon les conclusions du rapport de monsieur Bellavigna-Ladoux, il était fort probable que les indentations, encoches, visibles sur le pare-chocs avant du véhicule Dodge Ram aient été le résultat direct de ces manipulations précitées suite au déclenchement d’un début d’incendie, le 20 octobre 2009, dans le moteur dudit véhicule.

[155]        Considérant ces manipulations post-accident, l’expert des requérants concluait que les dommages au pare-chocs avant du Dodge Ram étaient donc potentiellement compatibles avec ceux qui auraient pu être causés par des fourches mécaniques pour ouvrir le capot dudit véhicule ou pour déplacer celui-ci. Ce dernier ayant indiqué au Tribunal que pour lui « potentiellement » signifiait « probablement ».

[156]        Le Tribunal retient donc les conclusions de l’expert des requérants, monsieur Bellavigna-Ladoux, qui estimait qu’une collision s’était donc probablement produite entre les deux véhicules accidentés, telle que rapportée par la version des requérants.

[157]        Par conséquent, le Tribunal est d’avis qu’il y a lieu de reconnaître l’accident d’automobile, survenu le 19 octobre 2009.

[158]        Or, en vertu des articles 83.31 de la Loi sur l’assurance automobile[1] et 57 du Règlement d'application de la Loi sur l'assurance automobile[2] sur le remboursement de certains frais, seuls les coûts d’une expertise médicale écrite, soumise à l’appui d’une demande, sont remboursables lorsque le recours formé devant le Tribunal Administratif du Québec est accueilli.

[159]        Compte tenu des articles précités, le Tribunal ne peut donc faire droit à la demande de remboursement des frais pour l’expertise de monsieur Olivier Bellavigna-Ladoux.

[160]        Également, aucun remboursement n’est prévu à la Loi ou au Règlement relativement aux coûts pour la présence d’un expert à l’audience.

 

POUR CES MOTIFS, le Tribunal :

·       ACCUEILLE les recours des requérants; et

·        INFIRME les deux décisions rendues respectivement en révision par l’intimée le 27 mars et le 12 avril 2012.

 


 

PRESHA BOTTINO, j.a.t.a.q.

 

 

JOSÉE CARON, j.a.t.a.q.


 

Lacoste, St-Laurent & Associés

Me Claude St-Laurent

Procureur de la requérante

 

Fréchette, Avocats

Me Sylvain Fréchette

Procureur du requérant

 

Société de l'assurance automobile du Québec

Me Mathieu Decelles

Procureur de la partie intimée


 



[1] RCRL chapitre A-25.

[2] RCRL chapitre A-25, r. 1

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Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.