Thirau ltée et Larocque |
2013 QCCLP 3634 |
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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES |
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Montréal |
20 juin 2013 |
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Région : |
Laurentides |
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434940-64-1103 437466-64-1104 439103-64-1105 444396-64-1107 453428-64-1111 |
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Dossier CSST : |
135129849 |
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Commissaire : |
Lucie Nadeau, juge administrative |
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Membres : |
Pierre Gamache, associations d’employeurs |
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Stéphane Marinier, associations syndicales |
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437466 |
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Thirau ltée |
Bernard Larocque |
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Partie requérante |
Partie requérante |
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et |
et |
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Bernard Larocque |
Thirau ltée |
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Partie intéressée |
Partie intéressée |
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DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE EN RÉVISION OU EN RÉVOCATION
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[1] Le 10 mai 2012, Thirau ltée (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête en révision d’une décision rendue, par cette dernière, le 29 mars 2012.
[2] Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles se prononce sur cinq contestations. Elle rejette les quatre contestations soumises par l’employeur, de même que celle soumise par monsieur Bernard Larocque (le travailleur). Elle déclare que le travailleur conserve une atteinte permanente à l’intégrité physique de 2,20 % de même que des limitations fonctionnelles de classe I et qu’il a droit à la réadaptation. Elle déclare également que le travailleur est capable d’exercer un emploi convenable d’opérateur de pelle hydraulique à compter du 30 avril 2011.
[3] L’audience sur la présente requête s’est tenue à Saint-Jérôme le 5 février 2013 en présence des procureurs des deux parties. Le travailleur ne s’y est pas présenté et, au cours de celle-ci, il a avisé son procureur de son absence.
L’OBJET DE LA REQUÊTE
[4] L’employeur demande de réviser la décision de la Commission des lésions professionnelles du 29 mars 2012 et de déclarer que le travailleur ne conserve pas d’atteinte permanente ni de limitations fonctionnelles et, par conséquent, qu’il n’a pas droit à la réadaptation et à la détermination d’un emploi convenable.
[5] Dans l’éventualité où la décision du 29 mars 2012 serait révoquée, les deux procureurs demandent à la présente formation de rendre une décision quant au fond en considérant la preuve et les argumentations déjà soumises au dossier.
L’AVIS DES MEMBRES
[6] Les membres issus des associations syndicales et des associations d’employeurs sont d’avis d’accueillir la requête de l’employeur. Ils estiment que la décision du 29 mars 2012 est entachée de deux erreurs. D’une part, la décision est insuffisamment motivée. D’autre part, l’affirmation du premier juge administratif quant à la préférence devant être généralement accordée aux avis des membres du Bureau d’évaluation médicale constitue une erreur manifeste et déterminante.
[7] Quant au fond, les deux membres sont d’avis de rejeter les requêtes de l’employeur. Ils estiment que la preuve prépondérante démontre que le travailleur conserve une atteinte permanente à l’intégrité physique et des limitations fonctionnelles à la suite de sa lésion professionnelle.
LES FAITS ET LES MOTIFS DE LA DÉCISION EN RÉVOCATION
[8] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer s’il y a lieu de réviser ou de révoquer la décision rendue le 29 mars 2012.
[9] Le pouvoir de révision et de révocation est prévu à l’article 429.56 de la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) :
429.56. La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :
1° lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;
2° lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;
3° lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.
Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.
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1997, c. 27, a. 24.
[10] Dans le présent dossier, l’employeur allègue que la décision du 29 mars 2012 est entachée d’erreurs manifestes et déterminantes. Ces erreurs doivent donc être analysées en vertu du troisième paragraphe de l’article 429.56 de la loi. La notion de « vice de fond (...) de nature à invalider la décision » a été interprétée par la Commission des lésions professionnelles dans les affaires Donohue et Franchellini[2] comme signifiant une erreur manifeste, de droit ou de fait, ayant un effet déterminant sur l’issue de la contestation. Ces décisions ont été reprises de manière constante par la jurisprudence.
[11] Il a été maintes fois réitéré que ce recours ne peut constituer un appel déguisé compte tenu du caractère final d’une décision de la Commission des lésions professionnelles énoncé au troisième alinéa de l’article 429.49 de la loi :
429.49.
(…)
La décision de la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel et toute personne visée doit s'y conformer sans délai.
__________
1997, c. 27, a. 24.
[12] La Cour d’appel a également été appelée à plusieurs reprises à se prononcer sur l’interprétation de la notion de vice de fond. En 2003, dans l’affaire Bourassa[3], elle rappelle la règle applicable en ces termes :
[21] La notion [de vice de fond] est suffisamment large pour permettre la révocation de toute décision entachée d'une erreur manifeste de droit ou de fait qui a un effet déterminant sur le litige. Ainsi, une décision qui ne rencontre pas les conditions de fond requises par la loi peut constituer un vice de fond.
[22] Sous prétexte d'un vice de fond, le recours en révision ne doit cependant pas être un appel sur la base des mêmes faits. Il ne saurait non plus être une invitation faite à un commissaire de substituer son opinion et son appréciation de la preuve à celle de la première formation ou encore une occasion pour une partie d'ajouter de nouveaux arguments (4).
_______________
(4) Yves Ouellette. Les tribunaux administratifs au Canada : procédure et preuve. Montréal : Éd. Thémis, 1997. P. 506-508; Jean-Pierre Villaggi. « La justice administrative », dans École du Barreau du Québec. Droit public et administratif. Volume. 7 (2002-2003). Cowansville : Y. Blais, 2002. P. 113, 127-129.
[13] La Cour d’appel a de nouveau analysé cette notion dans l’affaire CSST c. Fontaine[4] alors qu’elle devait se prononcer sur la norme de contrôle judiciaire applicable à une décision en révision. Procédant à une analyse fouillée, le juge Morissette rappelle les propos du juge Fish dans l’arrêt Godin[5] et réitère qu’une décision attaquée pour motif de vice de fond ne peut faire l’objet d’une révision interne que lorsqu’elle est entachée d’une erreur dont la gravité, l’évidence et le caractère déterminant ont été démontrés par la partie qui demande la révision.
[14] De l’avis de la soussignée, comme exposé dans l’affaire Louis-Seize et CLSC-CHSLD de la Petite-Nation[6], la Cour d’appel nous invite à faire preuve d’une très grande retenue en indiquant qu’il ne faut pas utiliser la notion de vice de fond à la légère et en insistant sur la primauté à accorder à la première décision et sur la finalité de la justice administrative. La première décision rendue par la Commission des lésions professionnelles fait autorité et ce n'est qu'exceptionnellement que cette décision pourra être révisée.
[15] Qu’en est-il en l’espèce?
[16] Le 5 octobre 2009, le travailleur, un manœuvre spécialisé, se blesse au travail. La CSST accepte sa réclamation et reconnaît qu’il a subi une lésion professionnelle ayant causé une entorse lombaire.
[17] Un premier avis d’un membre du Bureau d’évaluation médicale est rendu le 19 avril 2010 par le Dr Gilles Maurais, chirurgien orthopédiste. Celui-ci retient un diagnostic d’entorse lombaire, mais il estime que la lésion professionnelle n’est pas consolidée. Cet avis du Bureau d’évaluation médicale fait suite à une contestation initiée par l’employeur. Celui-ci conteste l’opinion du médecin traitant du travailleur, le Dr François Trudel, après avoir obtenu une opinion contraire du Dr Carl Farmer, chirurgien orthopédiste.
[18] La reconnaissance de cette lésion professionnelle, le diagnostic et la date de consolidation de celle-ci ont fait l’objet de contestations par les parties et d’une première décision de la Commission des lésions professionnelles rendue le 4 mars 2011[7].
[19] Dans cette décision, la Commission des lésions professionnelles reconnait que le travailleur a bel et bien subi une lésion professionnelle le 5 octobre 2009. Elle retient un diagnostic d’entorse lombaire et déclare que le diagnostic de hernie discale L4-L5 gauche n’est pas en relation avec la lésion professionnelle du 5 octobre 2009. Quant à la date de consolidation, elle déclare que la lésion professionnelle était consolidée le 17 février 2010 sans nécessité d’autres soins ou traitements. Elle retient à ce sujet l’opinion du Dr Farmer.
[20] Dans le dossier qui nous occupe, le premier juge administratif était saisi des contestations à l’encontre des décisions donnant suite à un second avis du Bureau d’évaluation médicale. En effet, le 23 février 2011, un avis est rendu par le Dr Karl Fournier, chirurgien orthopédiste. Celui-ci doit donner son avis sur l’atteinte permanente à l’intégrité physique et les limitations fonctionnelles résultant de la lésion professionnelle. Il retient un déficit anatomophysiologique de 2 % pour une entorse lombaire avec séquelles fonctionnelles objectivées et des limitations fonctionnelles de classe I selon la classification de l’IRSST[8].
[21] Dans sa décision du 29 mars 2012, le premier juge administratif rejette les contestations de l’employeur et conclut que le travailleur demeure avec une atteinte permanente de 2.2 % et des limitations fonctionnelles de classe I. Ces motifs, à ce sujet, se lisent ainsi :
[30] La Commission des lésions professionnelles doit donc décider dans un premier temps si le travailleur est effectivement porteur d’une atteinte permanente et de limitations fonctionnelles.
[31] Par son témoignage le docteur Farmer a expliqué de façon fort articulée sa position et son avis eu égard à cette question. Cependant, les faits du dossier ne supportent pas ses conclusions. En effet, plusieurs médecins se sont penchés sur le cas du travailleur et concluent à la présence de limitations fonctionnelles et d’une atteinte permanente dont deux médecins agissant à titre de membre du Bureau d’évaluation médicale, qui œuvrent de façon indépendante des parties.
[32] Les avis de ces derniers doivent bénéficier généralement d’une préférence au niveau de l’objectivité de leurs constats, ce qui est le cas dans la présente affaire. Leurs avis demeurent complets et supportés par les faits. Ils sont préférés par le tribunal.
[33] De plus, les professionnelles de la santé, dont des ergothérapeutes et des physiothérapeutes notent la présence de limitations fonctionnelles et de douleurs chez le travailleur, à plusieurs occasions. Malgré, un témoignage imprécis à ce sujet, le travailleur éprouve néanmoins des difficultés, et cette preuve est non-contredite. Il a consulté à de nombreuses occasions sur une période relativement importante en physiothérapie afin de traiter son mal.
[34] Pour ces raisons et compte tenu de la preuve objective de problèmes éprouvés par le travailleur, comme conséquence de sa lésion professionnelle, la Commission des lésions professionnelles conclut à la présence de limitations fonctionnelles et une atteinte permanente telle que fixée par l’avis du membre du Bureau d’évaluation médicale.
[22] Lors de l’audience tenue devant le premier juge administratif, le travailleur a témoigné de même que le Dr Farmer.
[23] L’employeur allègue que la décision du 29 mars 2012 est entachée de deux erreurs. Il reproche d’abord au premier juge administratif de ne pas avoir motivé suffisamment sa décision. Il prétend que les motifs de ce dernier ne permettent pas de comprendre pourquoi il a rejeté l’opinion de son médecin expert et a préféré celle du médecin membre du Bureau d’évaluation médicale. Il avance que le premier juge administratif n’a pas procédé à une analyse et à une appréciation objective des différents rapports médicaux.
[24] Il allègue également que le premier juge administratif commet une erreur manifeste et déterminante au paragraphe 32 de sa décision en énonçant qu’une préférence doit être accordée à l’opinion du membre du Bureau d’évaluation médicale. Il plaide que rien dans la loi ne permet de soutenir une telle affirmation.
[25] La Commission des lésions professionnelles a effectivement l’obligation de motiver ses décisions en vertu de l’article 429.50 de la loi:
429.50. Toute décision de la Commission des lésions professionnelles doit être écrite, motivée, signée et notifiée aux parties et à la Commission.
Dans la division de la prévention et de l'indemnisation des lésions professionnelles, le commissaire fait état dans la décision de l'avis exprimé par les membres visés à l'article 374 qui siègent auprès de lui ainsi que des motifs de cet avis.
__________
1997, c. 27, a. 24.
[26] L’obligation de motiver est également une composante des règles de justice naturelle[9]. Les balises de cette obligation sont établies par la jurisprudence. Les tribunaux supérieurs ont développé le test de l’intelligibilité; une décision doit être suffisamment motivée pour qu’on puisse comprendre ses fondements[10]. Un décideur n’a pas à commenter tous les faits mis en preuve devant lui, mais son raisonnement doit être compréhensible. La jurisprudence a aussi distingué entre une absence totale de motivation et une motivation succincte ou abrégée pour autant que les motifs soient intelligibles[11].
[27] Les deux erreurs alléguées par l’employeur sont étroitement liées. L’affirmation faite par le premier juge administratif concernant les avis du Bureau d’évaluation médicale doit être analysée en tenant compte de la motivation de la décision. Analysant d’abord cette affirmation que nous reproduisons de nouveau :
[32] Les avis de ces derniers doivent bénéficier généralement d’une préférence au niveau de l’objectivité de leurs constats, ce qui est le cas dans la présente affaire. Leurs avis demeurent complets et supportés par les faits. Ils sont préférés par le tribunal.
[Nos soulignements]
[28] L’employeur fait valoir que le premier juge administratif n’apprécie d’aucune manière la valeur probante de l’avis du membre du Bureau d’évaluation médicale et le retient uniquement sur la base d’un « préjugé favorable ». Il plaide que le rôle de la Commission des lésions professionnelles est de trancher le litige dont elle est saisie sur une question médicale et que rien dans la loi n’accorde une préférence à l’opinion du membre du Bureau d’évaluation médicale.
[29] La Commission des lésions professionnelles siégeant en révision considère qu’effectivement le premier juge administratif commet une erreur manifeste et déterminante en faisant une telle affirmation.
[30] Il fait un énoncé général selon lequel une préférence doit être accordée généralement à l’opinion des membres du Bureau d’évaluation médicale. Cette affirmation ne se situe pas dans un exercice d’appréciation de la valeur probante de l’opinion du médecin du Bureau d’évaluation médicale. Il lui accorde une préséance simplement du fait qu’il provient du Bureau d’évaluation médicale en écrivant que les avis de ces derniers « doivent bénéficier généralement d’une préférence au niveau de l’objectivité de leurs constats ».
[31] Le procureur de l’employeur a raison de prétendre que rien dans la loi ne justifie une telle affirmation.
[32] La procédure d’évaluation médicale est prévue au chapitre VI de la loi. La loi accorde d’abord une primauté à l’opinion du médecin qui a charge du travailleur, en ce sens où celle-ci a un effet liant pour la CSST. Pour rendre ses décisions, la CSST est liée par l’opinion du médecin qui a charge du travailleur sur les questions médicales énumérées à l’article 212 (diagnostic, date de consolidation, soins et traitements, atteinte permanente, limitations fonctionnelles) :
224. Aux fins de rendre une décision en vertu de la présente loi, et sous réserve de l'article 224.1, la Commission est liée par le diagnostic et les autres conclusions établis par le médecin qui a charge du travailleur relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212 .
__________
1985, c. 6, a. 224; 1992, c. 11, a. 26.
[33] L’opinion du médecin traitant peut cependant être contestée tant par l’employeur que par la CSST. En vertu des articles 209 et 204 de la loi, ils peuvent obtenir qu’un professionnel de la santé examine le travailleur. Si le rapport de ce médecin infirme les conclusions du médecin traitant, une contestation peut être déposée (art. 205.1 et 212) au Bureau d’évaluation médicale.
[34] Le membre du Bureau d’évaluation médicale doit alors rendre un avis conformément à l’article 221 :
221. Le membre du Bureau d'évaluation médicale, par avis écrit motivé, infirme ou confirme le diagnostic et les autres conclusions du médecin qui a charge du travailleur et du professionnel de la santé désigné par la Commission ou l'employeur, relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212, et y substitue les siens, s'il y a lieu.
Il peut aussi, s'il l'estime approprié, donner son avis relativement à chacun de ces sujets, même si le médecin qui a charge du travailleur ou le professionnel de la santé désigné par l'employeur ou la Commission ne s'est pas prononcé relativement à ce sujet.
__________
1985, c. 6, a. 221; 1992, c. 11, a. 23.
[35] Les membres du Bureau d’évaluation médicale sont ainsi nommés :
216. Est institué le Bureau d'évaluation médicale.
Sur recommandation des ordres professionnels concernés, le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre soumet annuellement au ministre, avant le 15 mars, une liste des professionnels de la santé qui acceptent d'agir comme membres de ce Bureau.
Le ministre peut ajouter à cette liste le nom d'autres professionnels de la santé.
À défaut par le Conseil consultatif de soumettre cette liste, le ministre la dresse lui-même.
La liste des professionnels de la santé qui acceptent d'agir comme membres de ce Bureau pour une année reste en vigueur jusqu'à ce qu'elle soit remplacée.
__________
1985, c. 6, a. 216; 1992, c. 11, a. 18.
[36] Quel est l’effet de son avis? L’opinion du membre du Bureau d’évaluation médicale devient à son tour liante pour la CSST :
224.1. Lorsqu'un membre du Bureau d'évaluation médicale rend un avis en vertu de l'article 221 dans le délai prescrit à l'article 222, la Commission est liée par cet avis et rend une décision en conséquence.
(…)
__________
1992, c. 11, a. 27.
[37] Toutefois, le travailleur et l’employeur peuvent demander la révision de cette décision. En révision administrative, la CSST demeure cependant liée par l’avis du membre du Bureau d’évaluation médicale :
358. Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission en vertu de la présente loi peut, dans les 30 jours de sa notification, en demander la révision.
Cependant, une personne ne peut demander la révision d'une question d'ordre médical sur laquelle la Commission est liée en vertu de l'article 224 ou d'une décision que la Commission a rendue en vertu de la section III du chapitre VII, ni demander la révision du refus de la Commission de reconsidérer sa décision en vertu du premier alinéa de l'article 365 .
(…)__________
1985, c. 6, a. 358; 1992, c. 11, a. 31; 1996, c. 70, a. 40; 1997, c. 27, a. 14; 2006, c. 53, a. 26.
[Nos soulignements]
[38] L’article 359 de la loi permet de contester devant la Commission des lésions professionnelles une décision rendue en vertu de l’article 358. Devant la Commission des lésions professionnelles, aucune disposition de la loi n’accorde une valeur particulière à l’avis du membre du Bureau d’évaluation médicale. Les parties peuvent soumettre leur preuve, et plus particulièrement en ce qui a trait aux questions médicales, déposer des expertises et faire entendre des témoins experts.
[39] Lorsque les conclusions du membre du Bureau d’évaluation médicale sont contestées à la Commission des lésions professionnelles, elles cessent d’avoir un effet liant. Il n’y a aucune indication dans la loi accordant une préséance à l’opinion du membre du Bureau d’évaluation médicale. L’opinion du membre du Bureau d’évaluation médicale doit être appréciée, comme les autres opinions médicales, à la lumière de l’ensemble de la preuve factuelle et médicale. Sa valeur probante doit être appréciée, comme toute autre. Les prémisses factuelles sont-elles conformes à la preuve? L’examen clinique est-il complet? Les examens radiologiques sont-ils analysés à la lumière des signes cliniques observés? Ce sont là quelques-unes des questions qu’un juge administratif doit analyser pour apprécier les différentes opinions médicales au dossier.
[40] Comme pour tous les litiges qu’elle tranche, y compris ceux portant sur des questions médicales, la Commission des lésions professionnelles a de larges pouvoirs. Elle peut confirmer, infirmer ou rendre la décision qui aurait dû être rendue. Elle procède de novo et elle peut actualiser la preuve au dossier :
377. La Commission des lésions professionnelles a le pouvoir de décider de toute question de droit ou de fait nécessaire à l'exercice de sa compétence.
Elle peut confirmer, modifier ou infirmer la décision, l'ordre ou l'ordonnance contestée et, s'il y a lieu, rendre la décision, l'ordre ou l'ordonnance qui, à son avis, aurait dû être rendu en premier lieu.
__________
1985, c. 6, a. 377; 1997, c. 27, a. 24.
[41] Dans les dossiers concernant des questions médicales, la Commission des lésions professionnelles reçoit souvent en preuve de nouveaux rapports médicaux, des rapports d’imagerie médicale et des expertises qui sont postérieurs à l’avis du membre du Bureau d’évaluation médicale. Le juge administratif doit se livrer à un exercice d’appréciation, sur les questions médicales comme sur tout élément de preuve, et retenir les conclusions qui sont prépondérantes.
[42] Si l’opinion du membre du Bureau d’évaluation médicale avait préséance sur celles des autres médecins (traitant, évaluateur ou expert), le législateur l’aurait indiqué. De plus, le droit du travailleur ou de l’employeur de contester la décision donnant suite à l’avis du Bureau d’évaluation médicale deviendrait à peu près illusoire s’il y avait une préférence accordée à cette opinion.
[43] Certes, l’objectivité et l’impartialité sont des critères qui peuvent être utilisés par un décideur dans l’appréciation de la valeur probante d’une opinion, dont celle du membre du Bureau d’évaluation médicale.
[44] Par exemple, la Commission des lésions professionnelles dans le groupe NGB inc. et Viel[12] note dans son analyse que l’opinion du membre du Bureau d’évaluation médicale « est empreinte d’un caractère de neutralité certain ». Il est intéressant de constater toutefois que ce commentaire s’inscrit dans une appréciation minutieuse de la preuve médicale et de la comparaison des constats des différents médecins au dossier. D’ailleurs, la Commission des lésions professionnelles retient l’opinion du membre du Bureau d’évaluation médicale quant à l’atteinte permanente et aux limitations fonctionnelles, mais l’écarte en ce qui a trait à la date de consolidation, compte tenu de son appréciation de l’ensemble de la preuve au dossier.
[45] Dans Armatures Bois-Francs inc. et Syvrais[13], la Commission des lésions professionnelles écrit ceci au sujet de l’opinion du membre du Bureau d’évaluation médicale :
[42] Le tribunal souligne, d’emblée accorder une grande force probante à l’avis du membre du Bureau d’évaluation médicale, lequel agit en toute impartialité, à la manière d’un arbitre. Ce principe a d’ailleurs été reconnu à plusieurs reprises par le tribunal 2.
___________
2. Voir notamment St-Pierre et Dollorama, C.L.P. 190899-08-0209, 24 septembre 2003, J.-F. Clément, révision rejetée, 3 mars 2004, M. Carignan, requête en révision judiciaire rejetée, C.S. Val-d'Or, 615-17-000199-041, 12 janvier 2005, j. Lachance.
[46] Deux commentaires s’imposent. Cette affirmation est faite dans un contexte où la Commission des lésions professionnelles constate que le médecin désigné par l’employeur, qui témoigne devant elle, apparaît partial, « insistant beaucoup sur tout ce qui favorise son client, semblant avoir un parti pris et une cause à gagner et étant manifestement réticent à reconnaître des éléments ou des théories plus favorables au travailleur ». En deuxième lieu, ce commentaire s’ajoute ici aussi à une analyse fouillée de la preuve factuelle et médicale au dossier. D’ailleurs la juge administrative apporte une nuance au diagnostic retenu par le membre du Bureau d’évaluation médicale à la lumière de la preuve prépondérante au dossier.
[47] La Commission des lésions professionnelles s’appuie sur l’énoncé fait dans St-Pierre et Dollorama[14] qui s’inscrit dans un contexte où une travailleuse prétendait que le membre du Bureau d’évaluation médicale ne l'avait examinée que pendant quelques minutes. Le juge administratif conclut que le témoignage de la travailleuse n’a aucune crédibilité en notant entre autres que cela « s'avère impossible quand on prend connaissance de l'expertise et de toutes les données qui y sont colligées ». Il ajoute que « le tribunal ne voit pas pourquoi un médecin spécialiste du Bureau d’évaluation médicale qui n’a aucun intérêt dans le litige et qui est parfaitement neutre pourrait faire de telles choses ».
[48] Encore récemment, dans Gauthier et Aristide Brousseau & Fils ltée[15], la Commission des lésions professionnelles réitère un commentaire sur l’impartialité du membre du Bureau d’évaluation médicale :
[52] Il faut également tenir compte du fait que le docteur Grenier, en sa qualité de membre du Bureau d’évaluation médicale, bénéficie d’un statut d’impartialité incontestable par rapport aux autres médecins, qui agissent à la demande expresse d’une partie. Ce principe a été reconnu à plusieurs reprises par le tribunal 1.
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1. Voir notamment : St-Pierre et Dollorama, C.L.P. 190899-08-0209, 24 septembre 2003, J.-F. Clément, révision rejetée, 3 mars 2004, M. Carignan, requête en révision judiciaire rejetée, C.S. Val-d'Or, 615-17-000199-041, 12 janvier 2005, j. Lachance; Armatures Bois-Francs inc. et Syvrais, C.L.P. 312618-01B-0703, 25 juillet 2008, L. Desbois; Ménard et Structures RBR inc., 2011, QCCLP 895.
[49] De nouveau, ce commentaire s’ajoute à une analyse bien étayée de la preuve au dossier : les diagnostics posés de manière contemporaine, les constats de l’imagerie médicale, les signes cliniques notés à l’examen neurologique, etc.
[50] En résumé, le critère de neutralité peut être utilisé dans l’appréciation de la preuve. Toutefois, un énoncé général ne peut remplacer l’exercice d’appréciation de la preuve. Dans le présent dossier, l’affirmation générale du premier juge administratif est problématique parce qu’elle se substitue à l’analyse de la preuve.
[51] Le premier juge administratif ne procède pas à une appréciation de la preuve médicale, au terme de laquelle, il pourrait conclure en retenant l’opinion du membre du Bureau d’évaluation médicale parce qu’elle lui semble empreinte de plus d’objectivité que la preuve soumise par les parties. Il n’analyse pas les constats du membre du Bureau d’évaluation médicale. Par exemple, à la lecture de la décision, on ne peut savoir à partir de quels constats cliniques et de quelles considérations, le Dr Fournier était d’avis que le travailleur conservait une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.
[52] Le procureur du travailleur plaide que la deuxième phrase du paragraphe 32 complète la première. Le premier juge administratif écrit : « Leurs avis demeurent complets et supportés par les faits ». Le procureur du travailleur fait valoir que cette phrase constitue une explication intelligible et suffisante pour comprendre pourquoi l’opinion du membre du Bureau d’évaluation médicale est retenue.
[53] Le Tribunal n’est pas de cet avis. Cet énoncé est vague et il ne peut constituer une motivation suffisante. En quoi les avis sont-ils complets? Par quels faits sont-ils supportés? La décision ne permet pas de le savoir.
[54] Le premier juge administratif résume aux paragraphes 26 et 27 de sa décision le témoignage du Dr Farmer. Toutefois, on ne sait pas quels sont les éléments qui l’ont incité à retenir l’opinion du Dr Fournier et à écarter celle du Dr Farmer.
[55] Le premier juge administratif affirme que plusieurs médecins se sont penchés sur le cas du travailleur et concluent à la présence de limitations fonctionnelles et d’une atteinte permanente. Qui sont ces médecins et surtout quels sont leurs constats cliniques? Le lecteur l’ignore. Il ne fait aucune mention dans sa décision des examens, des constats et des opinions du Dr Trudel, médecin traitant du travailleur, ou du Dr Giroux, qui a effectué une expertise pour le travailleur. Ces éléments de preuve ne sont ni rapportés ni commentés.
[56] Il ajoute que deux médecins agissant pour le Bureau d’évaluation médicale ont conclu à la présence d’une atteinte permanente et de limitations fonctionnelles. Cela est erroné. Un seul avis a été rendu sur la question, par le Dr Fournier. Le premier avis rendu par le Dr Maurais du Bureau d’évaluation médicale en avril 2010 portait sur le diagnostic, la date de consolidation et la nécessité de traitements. Celui-ci était alors d’avis que la lésion professionnelle n’était pas consolidée. Il ne s’est donc pas prononcé sur les séquelles ou les limitations fonctionnelles.
[57] Il n’y a aucune analyse comparative des différents examens médicaux au dossier. Le lecteur ne peut pas savoir si le juge administratif a soupesé l’ensemble de la preuve et quels sont les éléments qu’il en retient comme étant prépondérants. En somme, le premier juge administratif conclut sans s’expliquer si ce n’est par une préférence accordée de manière générale à l’avis d’un membre du Bureau d’évaluation médicale.
[58] Cette seule affirmation, sans autre motif, ne peut constituer une motivation suffisante telle qu’exigée par la jurisprudence.
[59] Au paragraphe 33, le premier juge administratif retient de la preuve les constats des ergothérapeutes et des physiothérapeutes. Le procureur de l’employeur fait valoir que le premier juge administratif commet une erreur en affirmant que les ergothérapeutes et les physiothérapeutes sont des professionnels de la santé. Il plaide que la notion de professionnel de la santé est définie à l’article 2 de la loi comme signifiant « un professionnel de la santé au sens de la Loi sur l'assurance maladie (chapitre A-29) ». Or, dans cette loi, un professionnel de la santé est défini comme étant « tout médecin, dentiste, optométriste ou pharmacien légalement autorisé à fournir des services assurés ».
[60] Le Tribunal estime qu’il est donc erroné de qualifier les ergothérapeutes et physiothérapeutes de professionnels de la santé au sens de la loi. Toutefois, cette erreur de qualification n’est pas déterminante puisque le premier juge administratif pouvait tout de même apprécier les constats de nature médicale de ces intervenants aux fins de décider de l’existence d’une atteinte permanente ou de limitations fonctionnelles.
[61] La Commission des lésions professionnelles siégeant en révision l’a rappelé encore tout récemment dans Lopraino et Systèmes de contrôle Goodrich ltée[16]. Dans cette affaire, la CSST reprochait au premier juge administratif d’avoir basé sa conclusion quant à la date de consolidation sur les constatations des physiothérapeutes. La Commission des lésions professionnelles énonce qu’il ne faut pas nécessairement obtenir une opinion d’un médecin sur une question médicale, mais que la preuve doit être de « nature médicale ». Elle indique, à juste titre, que «les conclusions des physiothérapeutes, des ergothérapeutes et des kinésiologues sont des éléments de « nature médicale ». Le juge administratif peut donc les considérer dans sa prise de décision.
[62] En l’espèce, le premier juge administratif retient que les ergothérapeutes et les physiothérapeutes ont noté « la présence de limitations fonctionnelles et de douleurs chez le travailleur, à plusieurs occasions ». Mais il ne nous dit pas quelles limitations fonctionnelles ont été notées et à quel moment, avant ou après la consolidation de la lésion professionnelle.
[63] Le premier juge administratif retient au paragraphe 34 « la preuve objective de problèmes éprouvés par le travailleur ». Il ne nous dit pas toutefois, quelle est cette preuve objective. Il n’en discute pas.
[64] Lors de l’audience sur la requête en révision, le procureur du travailleur a identifié au dossier constitué par la Commission des lésions professionnelles des rapports médicaux pour démontrer que cette affirmation est exacte. Cela ne peut pas pallier au manque de motivation de la décision. L’employeur n’invoque pas qu’il y a absence de preuve, il prétend qu’il y a insuffisance de motivation et qu’il ne sait pas pour quels motifs sa preuve a été écartée.
[65] La Commission des lésions professionnelles siégeant en révision en arrive effectivement à cette conclusion.
[66] Le procureur de l’employeur dépose le jugement rendu dans Rodrigue c. Commission des lésions professionnelles[17] dans lequel la Cour supérieure a annulé une décision de la Commission des lésions professionnelles pour absence de motivation. La Cour conclut ainsi :
[44] Le Tribunal conclut donc qu'il s'agit d'un cas où la commissaire a écarté capricieusement une preuve qui peut être déterminante pour l'issue du litige, ce qui constitue une erreur manifestement déraisonnable, donnant ouverture à la révision judiciaire.
[45] En effet, il s'agit d'une entorse à l'équité procédurale, et ce d'autant plus que par sa Loi Constitutive, la CLP doit rendre des décisions motivées; il s'agit en l'espèce de s'intéresser non pas tant au fondement même de la décision, qu'à sa formulation.
[46] Bref, ce n'est pas tant la brièveté des explications ou des motifs de la décision qui pose problème, mais l'absence d'introspection pertinente et d'analyse cognitive qu'elle omet de faire; cela équivaut à un manque de transparence. C'est donc le critère de l'intelligibilité pour comprendre les fondements de la décision qui trouve application.
[47] Bien qu'indiscutablement la commissaire pouvait exercer sa prérogative de mettre de côté l'expertise du Dr SABOURET ou encore le témoignage de RODRIGUE qu'elle avait entendu; mais pour y arriver, elle n'a d'autre choix, que d'expliquer clairement le raisonnement juridique l'ayant conduit à une telle appréciation.
[48] Et, force est de constater que sa décision ne contient aucune appréciation de la preuve entendue et analysée.
[49] L'analyse et l'introspection étant un exercice obligatoire lorsque le décideur décide de mettre de côté des éléments de preuve pertinente pour établir le lien de causalité, un manquement équivaut en l'espèce à une absence de motivation.
[Nos soulignements]
[67] Le même constat vaut pour le présent dossier; la décision ne contient aucune appréciation de la preuve entendue et analysée.
[68] Dans Industries J. Hamelin et Laramée[18], la Commission des lésions professionnelles siégeant en révision rappelle que l’absence totale de motivation sur une question en litige contrevient non seulement à l’obligation de motiver, mais constitue aussi un manquement à la règle audi alteram partem qui entraîne la nullité de la décision et conduit à sa révocation. Elle écrit :
[41] Dans plusieurs cas, la Commission des lésions professionnelles a considéré qu’il y avait une insuffisance telle que cela équivalait à une absence totale de motifs conduisant à la révocation de toute la décision 12.
[42] Lorsqu’une disposition législative oblige un tribunal administratif à motiver sa décision, comme c’est le cas pour la Commission des lésions professionnelles 13, les motifs doivent être suffisants 14.
[43] Même en tenant compte du principe selon lequel le décideur n’est pas tenu de tout rapporter et de tout discuter et même en considérant que certains motifs s’infèrent parfois implicitement 15, ceux-ci doivent être exposés de manière intelligible pour permettre au lecteur d’en comprendre les fondements ou le raisonnement 16.
[44] De même, une motivation ne doit pas être lacunaire au point de rendre illusoire tout contrôle judiciaire 17. C’est pourquoi il doit exister un lien rationnel entre l’analyse de la preuve et la motivation de la décision, laquelle doit s’appuyer sur des faits démontrés. Et, à juste titre, le professeur Yves Ouellette rappelait à ce propos :
En s’abstenant d’indiquer les faits pertinents considérés comme prouvés et évalués, au soutien de ses conclusions finales, un tribunal administratif rendrait difficile ou illusoire le contrôle de la légalité des décisions prises après « enquête » .18
[45] La suffisance des motifs doit s’analyser dans le contexte de la question à décider, de sa complexité et de la nature de la preuve présentée, tel qu’il appert des propos suivants du professeur Ouellette :
Le degré de précision de la motivation en fait pourra varier en fonction de divers facteurs, comme la complexité des questions débattues (58) et le caractère plus ou moins rapide de la procédure envisagée. (59)
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(58) Petro Canada c. Canada-Newfoundland Offshore Petroleum Board (1995)127 D.L.r. (4 th) 483 (Nfld S.c.)
(59) Dome Petroleum Ltd c. Grekul, (1984) 5 Admin L.R. 252 ( Alta Q.B.) 19
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12 Voir : Emballage Workman inc. et Martinez, [2002] C.L.P. 139 ; Lombardi et Construction Dosca inc., C.L.P. 164437-71-0106, 4 novembre 2002, L. Boucher; Fortier et Hydro-Québec, C.L.P. 189935-71-0208, 13 juillet 2004, C.-A. Ducharme; Alary et Fer Ornemental Waverly inc., C.L.P. 260376-64-0504, 20 novembre 2006, L.Nadeau.
13 Voir article 429.50 de la loi.
14 Cité de la santé et Heynemand, C.L.P. 69547-64-9505, 26 octobre 1999, Anne Vaillancourt
15. Boulanger c. Commission des affaires sociales, C.S. Québec, 200-05-002317-902, 11 octobre 1990, j. Moisan; Brasserie Molson O’Keefe ltée c. Boucher, C.S. Montréal, 500-05-009440-932, 29 septembre 1993, j. Gomery; Drouin et Goodyear Canada inc. et Commission de la santé et de la sécurité du travail, C.L.P. 295637-62C-0608, 22 novembre 2007, J.-F. Clément.
6 Ozanam inc. c. Commission municipale du Québec, [1994] R.J.Q. 364 .
17 Dupont et Université du Québec à Trois-Rivières, 200-09-006306-085, 19 novembre 2008, Les Honorables Thibault, Morin et Dutil, j.C.A.
18. Yves OUELLETTE, les tribunaux administratifs au Canada : procédure et preuve, Montréal, Éditions Thémis, 1997, 755 p.444
19. Précitée, note 18.
[69] Dans cette affaire, la Commission des lésions professionnelles a conclu que la décision dans son ensemble manquait de motivation, celle-ci était parfois absente, parfois insuffisante et des éléments importants de la preuve n’avaient pas été rapportés ni discutés. Dans un tel cas, à l’instar des principes développés par la jurisprudence, elle a conclu à une absence de motivation et elle a révoqué la décision.
[70] Il en va de même dans le présent dossier. La preuve pertinente sur l’existence de limitations fonctionnelles et de séquelles n’est pas discutée ni soupesée. Une bonne partie de cette preuve n’est pas rapportée. Ainsi, à la lecture de la décision, on ne peut comprendre le raisonnement du premier juge administratif pour conclure comme il l'a fait et on ignore pourquoi la preuve de l'employeur n'a pas été retenue
[71] comme l'a établi la jurisprudence[19], l'absence totale de motivation constitue un vice de fond qui donne ouverture à la révocation d'une décision. Comme le rappelle encore récemment la Commission des lésions professionnelles dans Paris et Pièces d’Auto Agd inc.[20], « le manquement à une règle de justice naturelle entraîne la révocation de la décision sans qu’il y ait lieu d’examiner si ce manquement a eu un effet déterminant sur le sort du litige ».
[72] En général, la révocation a comme conséquence que les parties sont de nouveau convoquées pour être entendues. La révocation a pour effet de remettre les parties dans l’état où elles étaient avant l’audience.
[73] Toutefois, cela peut varier selon les circonstances, selon la nature du manquement constaté. Dans le présent cas, le manquement ne concerne pas l’audience comme telle ou un empêchement de produire une preuve ou des arguments. L’accroc est au niveau de la décision elle-même. Dans le présent dossier, les parties ont été pleinement entendues devant le premier juge administratif et elles ont eu l’occasion de faire leur preuve et soumettre leurs arguments. La reprise de l’audience entrainerait inutilement des délais et des coûts.
[74] Dans l’éventualité où il y aurait révocation, les procureurs des deux parties ont donné leur accord pour que le présent tribunal rende une décision à partir de la preuve faite au dossier et des argumentations soumises. La soussignée a donc procédé à l’écoute de l’enregistrement de l’audience tenue devant le premier juge administratif le 9 février 2012 et a pris connaissance du dossier constitué et de la preuve documentaire produite.
LES FAITS ET LES MOTIFS DE LA DÉCISION SUR LE FOND
[75] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur conserve une atteinte permanente à l’intégrité physique et des limitations fonctionnelles de la lésion professionnelle subie le 5 octobre 2009.
[76] Rappelons d’abord que le diagnostic de cette lésion professionnelle de même que la date de consolidation ont été déterminés par la Commission des lésions professionnelles dans une décision rendue le 4 mars 2011[21]. Le seul diagnostic retenu est celui d’entorse lombaire.
[77] La Commission des lésions professionnelles déclare également dans cette décision que le diagnostic de hernie discale L4-L5 gauche n’est pas en relation avec la lésion professionnelle. Ce diagnostic avait été posé par le Dr Trudel, médecin ayant charge du travailleur, à la suite d’une résonance magnétique démontrant une petite hernie en contact avec la racine L4 gauche. Rappelant qu’il faut mettre en corrélation les symptômes et les signes cliniques avec les résultats de l’imagerie, la juge administrative conclut ainsi :
[48] En l’espèce, la symptomatologie du travailleur est à droite alors que la hernie démontrée à l’imagerie est à gauche.
[49] Le travailleur ne présente que des fourmillements dans la fesse et la cuisse droites, soit une irradiation proximale qui ne correspond à aucun problème neurologique, mais s’apparente davantage à une entorse.
[50] Qui plus est, tant le docteur Maurais que le docteur Giroux ne relatent dans leurs examens de signes cliniques, à savoir une quelconque irritation ou atteinte radiculaire pouvant corroborer cliniquement le diagnostic de hernie discale symptomatique.
[51] Force est donc pour le tribunal de conclure que le travailleur n’a pas présenté, suite à sa lésion professionnelle du 5 octobre 2009, une hernie discale L4-L5 gauche.
[78] Signalons que la résonance magnétique du 13 mai 2010 a aussi révélé la présence d’une dégénérescence discale L3-L4, L4-L5 et L5-S1. La Commission des lésions professionnelles s’est donc interrogée à savoir si l’entorse lombaire subie par le travailleur avait rendu symptomatique cette condition de dégénérescence. Elle a conclu par la négative.
[79] Finalement, elle consolide la lésion professionnelle au 17 février 2010, retenant à ce sujet l’opinion du Dr Farmer.
[80] C’est donc en fonction du seul diagnostic d’entorse lombaire que la Commission des lésions professionnelles doit aujourd’hui déterminer si le travailleur conserve une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles. C’est aussi à partir de la date de consolidation du 17 février 2010 qu’il faut principalement analyser la preuve médicale pour répondre à cette question.
[81] Toutefois, le présent tribunal doit procéder à sa propre appréciation de l’ensemble de la preuve pour répondre aux questions qu’il doit trancher. Il faut comprendre que le processus d’évaluation médicale s’était poursuivi avant même que la Commission des lésions professionnelles ne rende sa décision en mars 2011.
[82] Ainsi le Dr Trudel rédige tant son rapport final que son rapport d’évaluation médicale du 15 octobre 2010 sur la base d’un diagnostic de hernie discale lombaire L4-L5. Il émet des limitations fonctionnelles de classe I et il évalue les séquelles à 2 % pour une hernie discale lombaire non opérée.
[83] Le travailleur a également obtenu une expertise auprès du Dr Marc-F. Giroux, neurochirurgien. Dans son évaluation du 22 octobre 2010, ce dernier conclut à un diagnostic d’entorse lombaire ayant aggravé une condition asymptomatique de dégénérescence discale étagée. Il évalue l’atteinte permanente à 2 % pour l’entorse lombaire et émet lui aussi des limitations fonctionnelles de classe I.
[84] L’employeur a contesté l’opinion du Dr Trudel en soumettant un rapport complémentaire du Dr Farmer daté du 2 décembre 2010. Ce dernier ne procède pas à un nouvel examen du travailleur et il maintient les conclusions qu’il avait déjà émises à la suite de sa première évaluation en février 2010. Il est d’opinion qu’il n’y a pas d’atteinte permanente ni de limitations fonctionnelles découlant de l’évènement du 5 octobre 2009.
[85] C’est à la suite de cette contestation que le Dr Karl Fournier rend un avis à titre de membre du Bureau d’évaluation médicale. Il évalue les séquelles permanentes à 2 % en raison d’une ankylose qui persiste et de douleurs encore persistantes. Il recommande des limitations fonctionnelles de classe 1.
[86] Lors de son témoignage, le Dr Farmer revient d’abord sur le fait qu’au moment de son examen, en février 2010, le travailleur décrit une amélioration importante de sa condition. Sur le plan objectif, son examen clinique est normal. Le travailleur bouge rapidement. Il n’y aucune douleur à la palpation. Il n’observe pas de déformation. Tous les mouvements du rachis dorsolombaire sont complets. Il n’y a pas, à son avis, de critères objectifs pour reconnaître une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.
[87] Il prend ensuite en considération le critère de gravité de la lésion. Il conclut que dans le présent cas l’indice de gravité est très faible. Il retient qu’à l’attestation médicale du 5 octobre 2009, le médecin prévoyait une consolidation de moins de 60 jours. À la première évaluation en physiothérapie, on note que le patient est asymptomatique et que l’examen est sans particularité. Le 4 décembre 2009, le Dr Jacques Paradis qui examine le travailleur, à la demande de l’employeur, rapporte un examen quasi normal et estime que la lésion est sur le point d’être consolidée. Il ne prévoit aucune atteinte permanente à l’intégrité physique ni limitations fonctionnelles.
[88] Les trouvailles observées à l’imagerie médicale (tomodensitométrie et résonance magnétique) apparaissent au Dr Farmer comme normales pour l’âge du travailleur (46 ans au moment de son expertise).
[89] Le Dr Farmer analyse également l’évolution de la condition du travailleur pour conclure à des discordances qu’il ne peut expliquer. Passant en revue les examens des autres médecins, il note une grande variation des ankyloses observées particulièrement lors des examens des Drs Trudel et Giroux qui ont lieu à quelques jours d’intervalle (15 et 22 octobre 2010). Tout en reconnaissant que les ankyloses peuvent varier légèrement, les différences observées ici lui apparaissent difficilement explicables. De plus, les variations impliquent différents mouvements. Il note aussi que les médecins évaluateurs n’expliquent pas pourquoi après l’amélioration qu’il a lui-même notée, la condition se serait détériorée. À son avis, l’évolution est très inhabituelle pour une entorse lombaire.
[90] Après analyse de l’ensemble de la preuve, le Tribunal conclut que le travailleur conserve une atteinte permanente à l’intégrité physique de même que des limitations fonctionnelles. Au-delà des conclusions retenues par les différents examinateurs, il faut s’attarder à leurs constats cliniques. Or, à la lumière de cet exercice, la preuve prépondérante démontre que le travailleur demeure avec des ankyloses de même qu’avec des douleurs persistantes.
[91] Il est vrai qu’il y a des variations au niveau des amplitudes entre les différents examens. Le tableau suivant présente les amplitudes observées par les différents examinateurs depuis la consolidation de la lésion professionnelle :
Médecins |
Normale |
Dr Farmer 17/02/10 |
Dr Maurais 6/04/10 |
Dr Trudel 15/10/10 |
Dr Giroux 22/10/10 |
Dr Fournier 14/02/11 |
Flexion |
90° |
95° |
90° |
70° |
90° |
70° |
Extension |
30° |
30° |
20° |
10° |
30° |
30° |
Flexion latérale gauche |
30° |
35° |
20° |
40° |
25° |
20° grande douleur |
Flexion latérale droite |
30° |
35° |
20° |
40° |
25° |
25° |
Rotation gauche |
30° |
35° |
30° |
30° |
30° |
30° |
Rotation droite |
30° |
35° |
30° |
30° |
30° |
30° |
[92] Le Tribunal note d’abord que le Dr Farmer est le seul à mesurer des amplitudes complètes. Le Dr Trudel fait lui aussi bande à part. Il est le seul à noter une limitation aussi importante en extension et des flexions latérales à 40°, soit au-delà de la normale.
[93] Par contre, on constate que les Drs Maurais, Giroux et Fournier observent tous des limitations en flexion latérale droite et gauche, à plus ou moins 5° de différence, ce qui ne constitue pas un écart significatif. C’est également le constat fait au rapport de fin d’intervention en ergothérapie du 16 août 2010. L’ergothérapeute note que la mobilité du tronc est normale « sauf en flexions latérales » et en rotation droite.
[94] La preuve prépondérante démontre plus tôt que le travailleur conserve des ankyloses. Le seul fait qu’il y ait des variations, ce que l’on observe d’ailleurs souvent, ne peut suffire à écarter cette preuve. De plus, d’autres éléments militent dans le sens d’une atteinte permanente.
[95] À la palpation, le Dr Maurais fait état d’un point douloureux en regard de la crête iliaque postéro supérieure droite. Le Dr Trudel ne fait aucune mention à ce sujet. Le Dr Giroux rapporte une douleur à la palpation des apophyses de L3 à S1. Le Dr Fournier indique que « la palpation lombaire est douloureuse en mi-lombaire près de ce qu’on pourrait supposer être L3-L4 ou L4-L5 ».
[96] Le Dr Farmer est le seul à constater qu’il n’y a aucune douleur reproduite à la palpation, tant en superficiel qu’en profondeur. Lors de son témoignage, il souligne que la douleur rapportée par les autres examinateurs n’est pas toujours au même endroit.
[97] Le Tribunal ne peut retenir cet argument. La douleur ne se localise pas nécessairement en un seul point bien précis. Ce qui est décrit ici demeure à peu près dans la même région.
[98] Le Tribunal retient aussi qu’aucun des médecins ayant examiné le travailleur, y compris le Dr Farmer, n’a noté d’éléments permettant de douter de la fiabilité de leurs constats.
[99] Le Dr Farmer insiste sur le fait que la condition du travailleur était améliorée en février 2010 et qu’il ne retrouve pas d’explication pour l’évolution clinique qu’a connue celui-ci.
[100] Or, l’analyse de la preuve médicale met en lumière le fait que la condition du travailleur évolue en dents de scie. Le 17 février 2010, le travailleur déclare au Dr Farmer que sa condition s’est améliorée. Il ne prend plus de médicaments, mais depuis sept jours seulement. Deux jours plus tard, le Dr Trudel note lui aussi une amélioration et, le 10 mars, il autorisera un retour au travail progressif, qui n’a pas eu lieu.
[101] Toutefois le 18 mars, au rapport de suivi en ergothérapie, on note que la mobilité du tronc a régressé et que l’évolution est difficile et irrégulière. À l’examen du 6 avril suivant, le Dr Maurais rapporte que le travailleur présente des douleurs lombaires résiduelles, principalement aux efforts et localisés en para lombaire droit. Le travailleur lui déclare prendre des analgésiques (tylénol)) qui ne le soulagent pas complètement.
[102] Par la suite, la condition douloureuse persiste. Le Dr Giroux et le Dr Fournier rapportent que le travailleur se plaint d’une douleur lombaire irradiant dans la fesse droite. Le travailleur déclare prendre une médication pour soulager sa douleur : Robaxacet et Tylénol lorsqu’il voit le Dr Giroux et Arthrotec lorsqu’il rencontre le Dr Fournier.
[103] Le travailleur témoigne dans le même sens. Depuis février 2010, il demeure avec une douleur lombaire à droite qui irradie dans la fesse droite et parfois même un peu plus bas dans le membre inférieur droit. Il prend du Lyrica le soir et du Motrin le matin. Il témoigne des mouvements qui exacerbent sa douleur; le fait d’être penché ou de soulever des poids.
[104] En raison de ses douleurs persistantes, il a suivi des traitements d’ostéopathie et d’acupuncture qu’il a défrayés lui-même, et ce, après sa consolidation. Il dépose une note de Mme Rémy, ergothérapeute et ostéopathe, indiquant qu’elle a prodigué au travailleur des traitements par approche ostéopathique à six reprises, de décembre 2010 à janvier 2012 afin de le soulager de ses douleurs lombaires. Il dépose également une note de Mme Charlebois, acupunctrice, indiquant que le travailleur a reçu 11 traitements, de février à novembre 2010, pour lombalgie.
[105] Le Tribunal retient de la preuve qu’après l’amélioration constatée par le Dr Farmer, la condition du travailleur n’a pas connu une évolution favorable.
[106] L’employeur a déposé de la jurisprudence, notamment l’affaire Trudel et C.S. de l’Estuaire[22], pour faire valoir « qu’il ne peut être question d’atteinte permanente en présence de simples douleurs non objectivées médicalement ». Or, ce n’est pas le cas dans le présent dossier. Au contraire, la preuve démontre que le travailleur conserve des séquelles de son entorse lombaire. Il demeure avec des ankyloses et des douleurs persistantes.
[107] Par conséquent, il y a lieu de lui reconnaître une atteinte permanente à l’intégrité physique de 2,2 %, soit un déficit anatomo-physiologique de 2 % pour une entorse lombaire avec séquelles fonctionnelles objectivées, auquel s’ajoute 0,2 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie, le tout conformément au Règlement sur le barème des dommages corporels[23].
[108] Compte tenu des séquelles que le travailleur conserve, le Tribunal estime également qu’il ya lieu d’émettre des limitations fonctionnelles de classe I de l’IRSST. C’est ce que recommandent les Drs Giroux et Fournier. Le Dr Trudel était du même avis quoique son opinion repose sur un diagnostic non reconnu de hernie discale.
[109] Les limitations fonctionnelles sont donc les suivantes :
Éviter d’accomplir de façon répétitive ou fréquente les activités qui impliquent de :
- soulever, porter, pousser, tirer des charges de plus de 15 à 25 kg;
- travailler en position accroupie;
- ramper, grimper;
- effectuer des mouvements avec des amplitudes extrêmes de flexion, d’extension ou de torsion de la colonne lombaire;
- subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale
Dossier 437466-64-1104
[110] La décision rendue dans le dossier 437466-64-1104 nécessite d’être traitée de manière distincte.
[111] L’employeur a déposé une requête en révision ou en révocation en vertu de l’article 429.56 de la loi à l’encontre de la décision rendue le 29 mars 2012 dans laquelle le premier juge administratif se prononçait sur cinq contestations. L’une d’elles avait été faite par le travailleur et portait sur la détermination d’un emploi convenable.
[112] Les erreurs alléguées par l’employeur visent uniquement les questions de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles. Aucune erreur n’est alléguée par l’employeur quant à la détermination de l’emploi convenable. Le sort de ce litige devait cependant suivre celui des autres dossiers dans l’éventualité où le présent tribunal aurait conclu, quant au fond, à l’absence d’atteinte permanente et de limitations fonctionnelles, ce qui n’est pas le cas.
[113] Le Tribunal a accueilli la requête en révocation de l’employeur, mais a rejeté ses prétentions quant au fond. Il en arrive à la conclusion que le travailleur conserve une atteinte permanente à l’intégrité physique et des limitations fonctionnelles.
[114] Quant au travailleur, il n’a pas demandé la révision ou la révocation de cette décision déclarant que l’emploi d’opérateur de pelle hydraulique avec un revenu potentiel de 35 642,98 $ est un emploi convenable pour lui et qu’il est capable de l’exercer à compter du 30 avril 2011.
[115] Dans ces circonstances, la requête en révision ou en révocation de l’employeur dans ce dossier est rejetée.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
Dossiers 434940-64-1103, 439103-64-1105, 444396-64-1107 et 453428-64-1111
ACCUEILLE la requête en révocation de Thirau ltée, l’employeur;
RÉVOQUE la décision rendue par la Commission des lésions professionnelles le 29 mars 2012;
REJETTE les requêtes de l’employeur ;
CONFIRME les décisions de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendues les 16 mars, 26 avril, 7 juillet et 26 octobre 2011 à la suite de révisions administratives;
DÉCLARE que le travailleur conserve une atteinte permanente à l’intégrité physique de 2,20 %;
DÉCLARE que le travailleur conserve les limitations fonctionnelles suivantes :
Éviter d’accomplir de façon répétitive ou fréquente les activités qui impliquent de :
- soulever, porter, pousser, tirer des charges de plus de 15 à 25 kg;
- travailler en position accroupie;
- ramper, grimper;
- effectuer des mouvements avec des amplitudes extrêmes de flexion, d’extension ou de torsion de la colonne lombaire;
- subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale
DÉCLARE que le travailleur a droit à la réadaptation et à la détermination d’un emploi convenable d’opérateur de pelle hydraulique.
Dossier 437466-64-1104
REJETTE la requête en révocation de l’employeur.
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Lucie Nadeau |
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Me Jean-François Bélisle |
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BOURQUE TÉTREAULT ASS. |
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Représentant de l’employeur |
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Me Éric Lemay |
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CONSEIL SANTÉ SÉCURITÉ |
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Représentant du travailleur |
[1] L.R.Q., c. A-3.001.
[2] Produits forestiers Donohue inc. et Villeneuve, [1998] C.L.P. 733 ; Franchellini et Sousa, [1998] C.L.P. 783 .
[3] Bourassa c. Commission des lésions professionnelles, [2003] C.L.P. 601 (C.A.).
[4] [2005] C.L.P. 626 (C.A.). La Cour d’appel réitère cette interprétation quelques semaines plus tard dans CSST c. Touloumi, [2005] C.L.P. 921 (C.A).
[5] Tribunal administratif du Québec c. Godin, [2003] R.J.Q. 2490 (C.A.).
[6] C.L.P. 214190-07-0308, 20 décembre 2005, L. Nadeau.
[7] C.L.P. 404328-64-1002, 4 mars 2011, S. Moreau.
[8] Institut de recherche en santé et en sécurité du travail.
[9] Société des services Ozanam inc. c. Commission municipale du Québec, [1994] R.J.Q. 364 .
[10] Brasserie Molson O’Keefe ltée c. Boucher, C.S. Montréal, 500-05-009440-932,93-09-29, j. Gomery, D.T.E. 93T-1279 .
[11] Manufacture Lingerie Château inc. c. C.L.P., C.S Montréal, 500-05-065039-016,01-1001, j. Poulin (01LP-92); Mitchell inc. c. C.L.P., C.S., Montréal, 500-05-046143-986,99-0621, j. Courville, D.T.E. 99T-711 .
[12] C.L.P. 295690-01A-0608, 10 avril 2008, M. Racine.
[13] C.L.P. 312618-01B-0703, 25 juillet 2008, L. Desbois.
[14] C.L.P. 190899-08-0209, 24 septembre 2003, J.-F. Clément, révision rejetée, 3 mars 2004, M. Carignan, requête en révision judiciaire rejetée, C.S. Val-d'Or, 615-17-000199-041, 12 janvier 2005, j. Lachance.
[15] 2012 QCCLP 7787 .
[16] 2012 QCCLP 8195 .
[17] [2007] C.L.P. 1926 (C.S.).
[18] 2011 QCCLP 3687 .
[19] En plus des décisions citées dans l’affaire Hamelin, voir aussi : Lomex inc. et Gonzales, C.L.P. 254852-71-0502, 11 janvier 2008, S. Di Pasquale.
[20] 2012 QCCLP 8224.
[21] Précitée note 6.
[22] C.L.P. 224977-09-0401, J-F Clément, 25 août 2004.
[23] R.R.Q., c. A-3.001, r. 2.
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