Décision

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Gabarit EDJ

Kerdougli c. Les Aliments Multibar inc.

2018 QCTDP 19

TRIBUNAL DES DROITS DE LA PERSONNE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

 

 

N° :

500-53-000466-175

 

 

DATE :

22 juin 2018

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

MARIO GERVAIS

AVEC L’ASSISTANCE DES ASSESSEURES :

 

Me Carolina Manganelli

Me Djénane Boulad, avocate à la retraite

______________________________________________________________________

 

 

SALIM KERDOUGLI

Partie demanderesse

c.

LES ALIMENTS MULTIBAR INC.

Partie défenderesse

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]       M. Salim Kerdougli réclame des dommages et intérêts à Les Aliments Multibar inc. (Multibar) au motif qu’un de ses représentants lui a posé une question sur son origine ethnique ou nationale lors de son entrevue d’embauche et a ainsi compromis son droit à l’égalité dans la reconnaissance et l’exercice de son droit à un processus d’embauche sans discrimination. Il allègue au surplus un refus d’embauche discriminatoire; le tout, en contravention aux articles 4, 10, 16 et 18.1 de la Charte des droits et libertés de la personne[1] (Charte).

[2]       La demande est instituée en vertu de l’article 84 de la Charte étant donné que la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Commission), après avoir reçu la plainte de M. Kerdougli et l’avoir considérée comme fondée dans son volet processus d’embauche discriminatoire, a par la suite exercé sa discrétion de ne pas s’adresser à un tribunal.

[3]       Par ailleurs, la Commission a conclu que la preuve relative au refus d’embauche discriminatoire est insuffisante  et a cessé d’agir sur cet aspect du dossier.

[4]       La demande introductive d’instance de M. Kerdougli soulève toutefois les deux volets de sa plainte à la Commission.

[5]       Le Tribunal a donc informé M. Kerdougli qu’il n’avait pas compétence pour statuer sur les allégations de sa demande relatives à un refus d’embauche pour un motif discriminatoire[2], ce à quoi il s’est conformé dans la présentation de sa preuve.

[6]       Dans ses conclusions, M. Kerdougli demande au Tribunal de condamner Multibar à lui verser une somme de 500 000 $, répartie comme suit :

Ø    250 000 $ à titre de dommages moraux;

Ø    250 000 $ à titre de dommages punitifs.    

[7]       Multibar admet que son représentant a interrogé M. Kerdougli lors de son entrevue d’embauche afin de connaître « l’origine de son accent ». Multibar nie que cette question ait été discriminatoire. Elle soumet que la question a été posée pour un motif valable selon l’article 18.1 de la Charte et que la demande devrait être rejetée.

[8]       Subsidiairement, Multibar conteste les montants réclamés, les considérant exagérés et abusifs.

I.          QUESTIONS EN LITIGE

 

1°   Multibar a-t-elle compromis le droit de M. Kerdougli à un processus d’embauche exempt de discrimination en contravention avec les articles 4, 10, et 18.1 de la Charte en l’interrogeant sur son origine ethnique ou nationale?

              2°   Dans l’affirmative, les sommes réclamées par M. Kerdougli pour dommages moraux et punitifs contre la défenderesse sont-elles justifiées?

II.         LE CONTEXTE

[9]         En juin 2015, M. Kerdougli pose sa candidature pour un poste de superviseur à la réception et à l’expédition auprès de Multibar.

[10]       M. Kerdougli passe à travers les différentes étapes du processus de sélection, dans l'ordre suivant :

Ø  Une entrevue téléphonique avec une conseillère en ressources humaines;

Ø  Un test écrit;

Ø  Une vérification de ses antécédents judiciaires;

Ø  Une entrevue en personne avec la même conseillère en ressources humaines;

Ø  Une deuxième entrevue en personne menée cette fois par le directeur senior à la logistique et au service à la clientèle, M. Francis Rinfret, tenue le 17 juin 2015.

[11]       À cours de cette dernière entrevue, M. Rinfret interroge M. Kerdougli pour connaître son origine ethnique ou nationale. Sans pouvoir en rapporter les termes exacts, M. Kerdougli indique que la question a été formulée dans le sens de « quelle est l’origine de votre nom? » ou « de quel pays venez-vous? ».

[12]        M. Kerdougli est secoué par la question qu’il trouve « difficile à digérer ». Il y répond néanmoins sans opposition en mentionnant être originaire de l’Algérie. Ébranlé, il ne se sent plus en mesure de bien défendre sa candidature. Déjà qu’au départ, il se sentait nerveux, voilà que cette question le rend dans une situation encore plus inconfortable. Il poursuit néanmoins l’entrevue du mieux qu’il peut.

[13]       M. Kerdougli remarque qu’à la suite de l'échange sur son origine ethnique ou nationale, l’ambiance s’alourdit. Une certaine tension s’installe et le déroulement de l’entrevue est moins convivial, bien qu’elle se termine correctement.

[14]       De son côté, M. Rinfret mentionne avoir interrogé M. Kerdougli, non pas sur l’origine de son pays ou de son nom, mais sur l’origine de son accent. Il soulève deux motifs pour avoir posé cette question :

Ø  D’une part, en raison de l’accent de M. Kerdougli qu’il considère très prononcé;

Ø  D’autre part, compte tenu que M. Kerdougli s’adresse à lui en le tutoyant et qu’il persiste à le faire malgré que M. Rinfret lui ait demandé à plusieurs reprises de le vouvoyer.

[15]       M. Rinfret considère que le tutoiement est inapproprié en entrevue d’embauche et constitue un manque de respect, tant envers lui qu’auprès de la clientèle que M. Kerdougli aura à desservir.

[16]       M. Rinfret cherche alors à savoir si ce tutoiement relève plutôt d’un « problème linguistique », plus particulièrement une méconnaissance du français en matière de tutoiement ou de vouvoiement.

[17]       Une fois informé que M. Kerdougli est originaire de l’Algérie, M. Rinfret en conclut que le tutoiement constitue un manque de respect de sa part.

[18]       M. Rinfret ne perçoit aucune réaction particulière de M. Kerdougli à la suite de cette question. Pendant toute l’entrevue, M. Kerdougli semble à l’aise, s’exprime calmement et répond spontanément à l’ensemble des questions.

[19]       Quelques heures plus tard, M. Kerdougli transmet un courriel à M. Rinfret lui demandant : « Est-ce que tu peux me dire quelle était la pertinence de la question sur l’origine de mon nom lors de l’entrevue? ».

[20]       Le lendemain, M. Rinfret lui répond par courriel ce qui suit :

Tel que répondu hier, simple curiosité faisant partie de l’apprentissage de qui est le candidat (valeurs, origine, chemin parcouru, etc..). Le côté humain est aussi important que le côté professionnel pour nous. Tentative également de le relier à l’accent perceptible en français.

            Encore une fois, vous devriez vouvoyer les gens que vous ne connaissez pas.

[21]       Outre M. Kerdougli, deux autres candidats sont sélectionnés pour une deuxième entrevue avec M. Rinfret. L’un est de nationalité française et obtient le poste. Quant à l’autre candidat, M. Rinfret n’en a aucun souvenir[3].

[22]       Le 30 juin 2015, une personne œuvrant au département des ressources humaines de Multibar informe M. Kerdougli par courriel que sa candidature n’est pas retenue.

III.        LE DROIT APPLICABLE

[23]       Les dispositions de la Charte pertinentes à la résolution du litige sont :

4.      Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation.

10.     Toute personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l'utilisation d'un moyen pour pallier ce handicap.

Il y a discrimination lorsqu'une telle distinction, exclusion ou préférence a pour effet de détruire ou de compromettre ce droit.

18.1.  Nul ne peut, dans un formulaire de demande d'emploi ou lors d'une entrevue relative à un emploi, requérir d'une personne des renseignements sur les motifs visés dans l'article 10 sauf si ces renseignements sont utiles à l'application de l'article 20 ou à l'application d'un programme d'accès à l'égalité existant au moment de la demande.

20.     Une distinction, exclusion ou préférence fondée sur les aptitudes ou qualités requises par un emploi, ou justifiées par le caractère charitable, philanthropique, religieux, politique ou éducatif d'une institution sans but lucratif ou qui est vouée exclusivement au bien-être d'un groupe ethnique est réputée non discriminatoire.

49.     Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnue par la présente Charte confère à la victime le droit d’obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte.

En cas d’atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des dommages-intérêts punitifs.

[24]       Dans les récentes décisions Kerdougli c. La Vie en Rose inc.[4] et Kerdougli c. GE Renewable Energy Canada Inc. (Alstom réseau Canada Inc.)[5], le Tribunal énonce le droit applicable et fait une revue de la jurisprudence pertinente à la résolution des questions en litige qui sont, somme toute, identiques aux enjeux soulevés dans la présente affaire.

[25]       Dans Kerdougli c. La Vie en Rose inc.[6], le Tribunal écrit :

[22] Plusieurs jugements[7] ont établi que l’article 18.1 de la Charte vise à enrayer, à la source, la discrimination dans l’embauche et dans l’emploi en interdisant les questions concernant des caractéristiques personnelles ne portant pas sur les qualités et les capacités du candidat.

[23] Le Tribunal a reconnu à maintes reprises que le droit protégé à l’article 18.1 de la Charte est un droit autonome[8] et que le simple fait de poser une question liée à un motif énuméré à l’article 10 entraîne une violation de l'article 18.1[9]. La Cour d’appel a confirmé cette interprétation[10].

[24] La partie demanderesse doit établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle a dû répondre à une ou des questions portant sur l'un des motifs visés par l'article 10 de la Charte[11].

[25] Une fois cette preuve établie à première vue, la partie défenderesse peut justifier sa conduite en invoquant l’une des exceptions prévues à l’article 18.1, soit que l’information était requise pour l'application de l'article 20 de la Charte ou pour l'application d'un programme d'accès à l'égalité existant au moment de la demande.

[26] En vertu de l’article 20 de la Charte, la partie défenderesse peut justifier sa conduite en démontrant, par une preuve prépondérante, que les questions qui portaient sur un motif énuméré à l’article 10 de la Charte étaient fondées sur une « aptitude ou qualité requise par l’emploi »[12].

[27] Pour ce faire, la jurisprudence établit que :

[l]’employeur doit démontrer que les renseignements sont requis dans un but rationnellement lié à l’exécution du travail en cause et qu’ils sont raisonnablement nécessaires pour réaliser ce but légitime lié au travail ».[13]

                                                                                               (Soulignements reproduits)

[28] La partie défenderesse ne peut repousser sa responsabilité en expliquant les raisons pour lesquelles la candidature du demandeur n’a pas été retenue ou en démontrant que les renseignements illégalement obtenus n’ont pas été pris en compte dans sa décision de rejeter la candidature de celui-ci.

[29] Le fait que les questions aient été posées « par curiosité, pour casser la glace, ou pour détendre l’atmosphère, ne suffit pas pour atténuer ni pour justifier l’atteinte au droit protégé à l'article 18.1 »[14].

[30] En ce qui concerne une atteinte au droit d’une personne à la sauvegarde de sa dignité, la Cour suprême du Canada, dans l’arrêt Law, a ainsi défini la notion de dignité :

La dignité humaine signifie qu’une personne ou un groupe ressent du respect et de l’estime de soi. Elle relève de l’intégrité physique et psychologique et de la prise en main personnelle. La dignité humaine est bafouée par le traitement injuste fondé sur des caractéristiques ou la situation personnelles qui n’ont rien à voir avec les besoins, les capacités ou les mérites de la personne.[15]

[31] L’interdiction de discriminer sur la base de l’origine ethnique ou nationale alléguée par monsieur Kerdougli est largement reconnue par le droit international.

[32] En effet, divers instruments de droit international tels que la Déclaration universelle des droits de l’Homme[16], la Déclaration sur la race et les préjugés raciaux[17] et la Convention concernant la discrimination en matière d’emploi et de profession[18], prohibent toute forme de discrimination raciale.

[33] De plus, le Canada a ratifié la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale[19], à laquelle le Québec s’est déclaré lié.

[26]       Ajoutons à ce qui précède que la Cour d'appel dans la décision Centre hospitalier régional de Trois-Rivières[20] précise la charge de la preuve qui incombe à un employeur ayant posé à un postulant une question liée à un motif énuméré à l’article 10 de la Charte :

[53] Les « aptitudes ou qualités », qualifiées aussi d'« exigences professionnelles réelles » ou d'« exigences professionnelles justifiées » doivent recevoir, en principe, une interprétation restrictive.

[…]

[67] En vertu de l’article 20 de la Charte il revient à l'employeur de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que les renseignements demandés établissent une distinction ou préférence par ailleurs fondée sur les aptitudes ou qualités requises par l'emploi. Une telle démonstration forcerait de conclure, le cas échéant, au caractère non discriminatoire de la distinction ou préférence.

                                                                                                  (Nos soulignements)

                                                                                                      (Références omises)

[27]        Enfin, dans l’affaire Panacci[21], le Tribunal rappelle les fondements de la Charte en lien avec la notion de dignité :

             [89] La dignité humaine apparaît ainsi comme « la pierre angulaire »[22] de la Charte. En d'autres termes, il s'agit d'une « valeur sous-jacente »[23] à l'ensemble des droits et libertés qui y sont consacrés.

             [90] Selon la Cour d'appel du Québec, « la dignité est le respect auquel a droit la personne pour elle-même, en tant qu’être humain et sujet de droit »[24]. La notion de dignité est étroitement liée à celle d'égalité : « Discriminer une personne, c'est porter atteinte au respect qu'elle mérite comme être humain »[25].

IV.        L’ANALYSE

1ère QUESTION :       Multibar a-t-elle compromis le droit de M. Kerdougli à un processus d’embauche exempt de discrimination en contravention avec les articles 4, 10 et 18.1 de la Charte en l’interrogeant sur son origine ethnique ou nationale?

[28]       En l’espèce, il n’y a pas lieu de faire une distinction entre le sens véritable de la question selon la formulation relatée par M. Kerdougli (« quelle est l’origine de votre nom? » ou « de quel pays venez-vous? ») ou ce que rapporte M. Rinfret (« quelle est l’origine de votre accent »). Dans tous les cas, la question vise à connaître une caractéristique personnelle de M. Kerdougli liée à son origine ethnique ou nationale, ce qui est proscrit par la Charte.

[29]       Les explications de M. Rinfret à cet égard sont des plus éloquentes en regard du renseignement qu’il requiert[26] :

Oui effectivement et je dois vous dire que lors des entrevues, ça arrive à quelques reprises où les gens tutoient et normalement j’essaie de découvrir est-ce que ça vient de la langue anglaise ou est-ce que ça vient encore une fois d’une façon de faire qui est selon moi pas acceptable? Et il m’est arrivé dans des cas où j’ai interviewé des candidats anglophones qui avaient de la difficulté et en comprenant soit leur langue maternelle ou d’où ils viennent par exemple des États-Unis ou de l’Ouest canadien, à ce moment-là je comprends que l’utilisation du vous est plus complexe effectivement. Quand des gens viennent d’endroits où le français est langue plus commune, à ce moment-là j’associe plus le tutoiement comme étant une façon de s’exprimer plutôt qu’une difficulté linguistique.

                                                                                                                 (Nos soulignements)

[30]       Le Tribunal conclut être en présence d’une preuve convaincante selon laquelle M. Kerdougli, pendant son entrevue d’embauche, a été requis de divulguer des renseignements sur un motif visé dans l'article 10 de la Charte; le tout, en contravention avec le premier volet de l’article 18.1 de la Charte.

[31]       Il incombe alors à Multibar de démontrer par prépondérance de preuve que la question posée concerne l’obtention de renseignements fondés sur les aptitudes ou les qualités requises par l’emploi.

[32]       En d’autres termes, Multibar doit démontrer que les renseignements sont recherchés « dans un but rationnellement lié à l'exécution du travail en cause et qu'ils sont raisonnablement nécessaires pour réaliser ce but légitime lié au travail »[27].

[33]       Le Tribunal ne remet pas en cause le fait que le tutoiement répétitif de la part d’un postulant ait pu agacer, voire irriter M. Rinfret. Par contre, que celui-ci choisisse de questionner M. Kedrougli sur son origine pour déterminer si ce mode d’expression était le résultat d’une méconnaissance du français de sa part ou d’un manque de respect laisse le Tribunal perplexe.

[34]       D’une part, M. Kerdougli vit au Québec depuis longtemps, ce qui apparaît clairement à son curriculum vitae. À l’audience, la maîtrise de son français est plus qu’adéquate. Son accent, bien que perceptible, n’est pas « très prononcé » comme l’affirme M. Rinfret et n’a aucune consonance anglophone.

[35]       D’autre part, le curriculum vitae de M. Kerdougli décrit ses études sur une période de dix ans, de 1994 à 2004, au sein d’institutions scolaires francophones de Montréal, soit l’école secondaire Édouard-Montpetit et le Cégep André Laurendeau.

[36]       Il apparaît alors difficile de retenir l’explication selon laquelle M. Rinfret cherchait simplement à savoir si le tutoiement était pour M. Kerdougli le résultat d’un emprunt à l’anglais.

[37]       Par ailleurs, même si le Tribunal devait retenir l’explication de M. Rinfret, celui-ci aurait dû traiter directement de cette préoccupation et de manière plus efficace avec le candidat. Point n’est besoin d’interroger M. Kerdougli sur une caractéristique qui lui est personnelle, que ce soit son pays d’origine,  l’origine de son nom ou de son accent pour ensuite en déduire s’il s’agit d’une méconnaissance du français ou d’un manque de respect.

[38]       Mais il y a plus.

[39]       Le courriel expédié par M. Rinfret à M. Kerdougli fait totalement échec à la défense tant il précise en des termes explicites sa motivation à l’avoir interrogé sur ses origines.

[40]       Dans ce document, M. Rinfret mentionne en toutes lettres avoir interrogé M. Kerdougli sur l’origine de son nom[28] par « simple curiosité faisant partie de l’apprentissage de qui est le candidat […] ».

[41]       Or, comme nous l’avons vu, la jurisprudence établit clairement que la simple curiosité est à la base irrecevable et ne saurait constituer un facteur d’atténuation ou une justification de l’atteinte au droit protégé à l’article 18.1 de la Charte.

[42]       À cela s’ajoutent les « valeurs, origine, chemin parcouru, etc.. ». Encore une fois, s’enquérir de l’origine d’un candidat pour évaluer son mérite constitue un comportement hautement répréhensible que la Charte cherche à réprimer et à prévenir.

[43]       Quant aux  « valeurs » du candidat, dans le contexte de l’ensemble des propos tenus par M. Rinfret dans son courriel, tout porte à croire qu’il se permette de les relier à l’origine de M. Kerdougli.

[44]       Bref, non seulement la défense échoue à établir que la question posée concerne les aptitudes ou qualités requises par l’emploi offert, mais elle se révèle accablante.

[45]       Le Tribunal conclut que Multibar a compromis le droit de M. Kerdougli à un processus d’embauche exempt de discrimination en contravention avec les articles 10 et 18.1 de la Charte en l’interrogeant sur son origine ethnique ou nationale.

[46]       Le Tribunal conclut, par le fait même, que M. Kerdougli a subi une atteinte discriminatoire à son droit à la sauvegarde de sa dignité fondée sur son origine ethnique ou nationale, en contravention des articles 4 et 10 de la Charte.

2e QUESTION :         Les sommes réclamées par M. Kerdougli pour dommages moraux et punitifs contre la défenderesse sont-elles justifiées?

A.        Les dommages moraux

[47]       Monsieur Kerdougli réclame à Multibar 250 000 $ pour dommages moraux à titre de réparation.

[48]        L’évaluation des dommages moraux est un exercice délicat comportant un aspect discrétionnaire important, néanmoins balisé par la jurisprudence.

[49]       Dans Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Commission scolaire de Montréal[29], la Cour d’appel écrit :

[63] L’exercice consistant à traduire le préjudice moral en dommages, c’est-à-dire en termes monétaires, est toujours délicat. Comme l’écrit le juge Vézina dans Calego International inc. c. Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, « [m]esurer le dommage moral et l’indemnité conséquente constitue une tâche délicate forcément discrétionnaire », presque arbitraire, serait-on tenté d’ajouter. Or, ce qui est vrai en matière de diffamation fondée sur un motif discriminatoire, comme c’était le cas dans Calego, ne l’est pas moins dans une affaire comme celle de l’espèce, surtout lorsque le préjudice allégué se rattache à la peine, l’angoisse, etc., et qu’il est donc principalement d’ordre affectif.

(Références omises)

[50]       Dans Bou Malhab c. Métromédia CMR Montréal inc.[30], la Cour d’appel mentionne :

[63] Que le préjudice moral soit plus difficile à cerner ne diminue en rien la blessure qu'il constitue. J'irais même jusqu'à dire que parce qu'il est non apparent, le préjudice moral est d'autant plus pernicieux. Il affecte l'être humain dans son for intérieur, dans les ramifications de sa nature intime et détruit la sérénité à laquelle il aspire, il s'attaque à sa dignité et laisse l'individu ébranlé, seul à combattre les effets d'un mal qu'il porte en lui plutôt que sur sa personne ou sur ses biens.

[51]        Dans l’arrêt St-Ferdinand[31], la Cour suprême indique que l’évaluation des dommages moraux comporte à la fois un volet objectif et à la fois un volet subjectif. Elle écrit :

[67] On peut par ailleurs envisager une partie du préjudice extrapatrimonial dans sa matérialité, en insistant sur son caractère visible et tangible. Cette analyse n’exclut pas la notion subjective du préjudice moral. En fait, elle s’y ajoute. Son aspect essentiel, c’est la reconnaissance de l’existence d’un préjudice extrapatrimonial objectif et indépendant de la souffrance ou de la perte de jouissance de la vie ressentie par la victime. Dans cette perspective, le préjudice est constitué non seulement de la perception que la victime a de son état, mais aussi de cet état lui-même. En d'autres termes, il ne suffit pas d'indemniser la victime pour les conséquences patrimoniales et la douleur morale et physique qui résultent de la blessure. Il faut aussi l'indemniser pour la perte objective d'un membre ou d'une faculté, en fonction des « manifestations extérieures des faits générateurs de souffrance ». 

                                                                                            (Soulignements reproduits)

[52]       M. Kerdougli décrit le préjudice qu’il a subi comme suit :

Ø  Déstabilisation pendant l’entrevue faisant en sorte qu’il n’a pas été en mesure de faire valoir sa candidature au meilleur de ses capacités;

Ø  Crainte d’un refus d’embauche discriminatoire en raison de son origine ethnique ou nationale;

À ce sujet, M. Kerdougli mentionne avoir postulé à plusieurs reprises afin d’occuper un emploi relevant de ses compétences et de son expérience de travail. Avec dépit et découragement, il précise que dans tous les cas où il a été questionné sur son origine ethnique ou nationale, sa candidature a été écartée.

Ø  Sentiment d’exclusion de la société canadienne et québécoise;

Ø  Humiliation;

Ø  Perte de son estime personnelle.

[53]       Le Tribunal retient entièrement le témoignage sincère et crédible de M. Kerdougli. La charge émotive qui accompagne ses propos est congruente avec son récit. Il s’exprime sans réticence en décrivant les faits, ses perceptions et son vécu. Son contre-interrogatoire n’a pas permis d’identifier une cause sérieuse de reproche.

[54]       Encore à ce jour, M. Kerdougli doit composer avec les séquelles de son entrevue troublante.

[55]       Le fait que, de l’avis de M. Rinfret, la question reprochée ne semble pas avoir déstabilisé M. Kerdougli de manière significative pendant l’entrevue ne constitue pas une véritable preuve contraire.

[56]       D’une part, à l’instar du juge Nolet dans Kerdougli c. La Vie en rose inc.[32], le Tribunal est d’avis qu’il faille garder à l’esprit « que son but premier était d’obtenir l’emploi. En pareil cas, il est somme toute prévisible qu’il ne réagisse pas à une telle question illicite, car il ne veut pas nuire à ses chances d’obtenir l’emploi ».

[57]       D’autre part, M. Rinfret ne connaît pas suffisamment M. Kerdougli pour comparer la performance qu’il a rendue en entrevue avec celle qu’il aurait pu rendre en pleine possession de ses moyens.

[58]       À cette dimension subjective du préjudice, le Tribunal entend maintenant traiter de son volet objectif.

[59]       La question illicite dans le contexte particulier de l’affaire à l’étude était en elle-même offensante et pouvait faire craindre à tout postulant la prise en compte par Multibar de son origine ethnique ou nationale pour évaluer sa candidature.

[60]       Au surplus, M. Kerdougli en est à une énième expérience malheureuse, ayant été interrogé à de multiples reprises lors d’une entrevue d’embauche sur son origine ethnique ou nationale. De ce fait, M. Kerdougli a subi « un préjudice extrapatrimonial objectif qui va au-delà de son inconfort, de son malaise et qui accentue l’atteinte à sa dignité »[33].

[61]       Tenant compte de ce qui précède, en se ralliant entièrement à l’analyse du Tribunal dans les récentes décisions Kerdougli c. La Vie en Rose inc.[34] et Kerdougli c. GE Renewable Energy Canada Inc. (Alstom réseau Canada Inc.)[35] et les paramètres qu’elles énoncent, le Tribunal entend accorder une compensation  de 5 000 $ à titre de réparation pour les dommages moraux subis par M. Kerdougli dans la présente affaire.

B.           Les dommages punitifs

[62]       M. Kerdougli réclame à Multibar le versement d’une somme de 250 000 $ à titre de dommages punitifs.

[63]       Aux termes de l’article 49 de la Charte, il est nécessaire de démontrer le caractère illicite et intentionnel de l’atteinte à un droit pour justifier l’attribution de dommages punitifs.

[64]       Selon les principes établis par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt St-Ferdinand[36], il y a atteinte illicite donnant ouverture à l’octroi de dommages punitifs lorsque :

[121] […] l’auteur de l’atteinte illicite a un état d’esprit qui dénote un désir, une volonté de causer les conséquences de sa conduite fautive ou encore s’il agit en toute connaissance des conséquences, immédiates et naturelles ou au moins extrêmement probables, que cette conduite engendrera. Ce critère est moins strict que l'intention particulière, mais dépasse, toutefois, la simple négligence. Ainsi, l’insouciance dont fait preuve un individu quant aux conséquences de ses actes fautifs, si déréglée et téméraire soit-elle, ne satisfera pas, à elle seule, à ce critère.

[65]       Ainsi, deux situations sont énoncées. La première vise l’auteur d’une atteinte illicite qui cherche de manière intentionnelle à causer les conséquences qui en découlent.

[66]       La deuxième situation comporte un seuil moins élevé permettant l’attribution de dommages punitifs à la victime d’une atteinte illicite. Il suffit de démontrer que son auteur connaissait les conséquences immédiates, naturelles ou extrêmement probables que l’atteinte illicite engendrerait. Ce seuil excède toutefois la négligence et l’insouciance, même lorsque téméraire et déréglée.

[67]       C’est cette deuxième situation qui engage ici la responsabilité du défendeur, le Tribunal étant convaincu en l’espèce que la conduite reprochée « dénote non seulement une insouciance déréglée, mais encore, un comportement extrêmement dommageable »[37] dont l’auteur ne pouvait que connaître les conséquences immédiates, naturelles ou extrêmement probables.

[68]       Dans Kerdougli c. La Vie en Rose inc.[38], la question portant sur l’origine du nom de M. Kerdougli est posée au moment où sont abordées les activités internationales de La Vie en Rose. De l’avis du Tribunal, cela ne changeait rien au fait que cette question contrevient à l’article 18.1 de la Charte, particulièrement lorsque ce thème n’est pas élaboré davantage en entrevue.

[69]       Dans Kerdougli c. GE Renewable Energy Canada Inc. (Alstom réseau Canada Inc.)[39], la question relative à l’origine du nom de M. Kerdougli est posée lors d’un échange informel qui a précédé l’entrevue en présence de tous les membres du comité de sélection afin de mettre à l’aise le candidat. Le Tribunal conclut que la question porte sur un motif interdit de discrimination et qu’il n’y a pas lieu de faire une distinction entre un échange informel impliquant un candidat et un membre du comité de sélection et l’entrevue formelle devant tous les membres du comité de sélection, chacune de ces étapes faisant partie du processus d’embauche.

[70]       Dans ces deux décisions, le Tribunal rejette la demande d’octroi de dommages punitifs au motif que la preuve ne permettait pas de conclure que la question sur l’origine ethnique ou nationale avait été posée en toute connaissance des conséquences immédiates, naturelles ou extrêmement probables qu’elle pouvait engendrer ou avec l’intention de contrevenir sciemment aux dispositions de la Charte.

[71]       Toutefois, et sans remettre en question leurs fondements, il y a lieu de distinguer l’affaire à l’étude de ces deux décisions.

[72]       L’existence de la discrimination sur le marché de l’emploi est un fait notoire et malheureusement trop présent dans la société canadienne et québécoise[40]. De nombreuses études, si ce ne sont toutes, convergent vers ce constat, notamment celle de la Commission effectuée en 2012. Celle-ci documente l’existence et l’ampleur de ce phénomène qui se manifeste indépendamment que le poste à combler vise une main-d’œuvre qualifiée ou non[41].

[73]       La protection édictée à l’article 18.1 de la Charte vise à endiguer ce phénomène en amont, en prohibant la recherche de certaines catégories d’informations pendant le processus d’embauche.

[74]       Dans ce contexte, le courriel par lequel M. Rinfret informe M. Kerdougli qu’il l’a interrogé sur l’origine de son nom par « simple curiosité faisant partie de l’apprentissage de qui est le candidat (valeurs, origine, chemin parcouru, etc.. ) » met en évidence et de manière tellement flagrante un motif de discrimination prohibé par la Charte qu’il laisse le Tribunal pantois.

[75]       S’enquérir de l’origine ethnique ou nationale d’un candidat pour évaluer son mérite constitue une atteinte illicite à un droit fondamental et un comportement hautement répréhensible qu’un dirigeant de Multibar, en sa qualité de directeur senior à la logistique et au service à la clientèle, ne peut ignorer.

[76]       Une telle conduite ouvre grand la porte à la prise en compte de préjugés ou stéréotypes pouvant être associés à l’origine ethnique ou nationale de M. Kerdougli. Elle engendre ainsi un préjudice allant au-delà du caractère déjà offensant pour une personne d’être interrogée sur son origine ethnique ou nationale, qu’elle soit issue de l’immigration de première ou de deuxième génération.

[77]       Le Tribunal est convaincu que M. Rinfret, en sa qualité de dirigeant de Multibar, ne pouvait qu’avoir conscience que d’interroger de manière illicite un candidat sur son origine ethnique ou nationale lors de son entrevue d’embauche dans l’objectif avoué de mieux connaître l’individu et son parcours pouvait avoir de fortes répercussions auprès de M. Kerdougli.

[78]       Dans l’arrêt de Montigny c. Brossard (Succession)[42], la Cour suprême précise les objectifs que doivent atteindre les tribunaux en attribuant des dommages punitifs :

[47] […] L’octroi de […] dommages [punitifs] a pour but de marquer la désapprobation particulière dont la conduite visée fait l’objet. Il est rattaché à l’appréciation judiciaire d’une conduite, non à la mesure des indemnités destinées à réparer un préjudice réel, pécuniaire ou non. Comme l’exprime le juge Cory :

On peut accorder des dommages-intérêts punitifs lorsque la mauvaise conduite du défendeur est si malveillante, opprimante et abusive qu’elle choque le sens de dignité de la cour. Les dommages-intérêts punitifs n’ont aucun lien avec ce que le demandeur est fondé à recevoir au titre d’une compensation. Ils visent non pas à compenser le demandeur, mais à punir le défendeur. C’est le moyen par lequel le jury ou le juge exprime son outrage à l’égard du comportement inacceptable du défendeur.

[…]

[49] […] Par l’octroi de ces dommages, on cherche à punir l’auteur de l’acte illicite pour le caractère intentionnel de sa conduite et à le dissuader, de même que les membres de la société en général, de la répéter en faisant de sa condamnation un exemple. […]

[79]       La réprobation et la dissuasion générale et spécifique sont donc au cœur de l’exercice visant la détermination des dommages punitifs.

[80]    L’article 1621 du Code civil du Québec énumère les facteurs qui doivent être pris en compte dans l’évaluation des dommages punitifs :

1621. Lorsque la loi prévoit l’attribution de dommages-intérêts punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.

Ils s’apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.

[81]    Mentionnons enfin l'arrêt Richard c. Time Inc.[43], où la Cour suprême invite à la retenue afin que ne soit octroyée que la somme la moins élevée susceptible d’atteindre les objectifs précédemment énoncés :

[210] Lorsqu’un tribunal décide s’il accordera des dommages-intérêts punitifs, il doit mettre en corrélation les faits de l’affaire et les buts visés par ces dommages-intérêts et se demander en quoi, dans ce cas précis, leur attribution favoriserait la réalisation de ces objectifs. Il doit tenter de déterminer la somme la plus appropriée, c’est-à-dire la somme la moins élevée, mais qui permettrait d’atteindre ce but (Whiten, par. 71).

[82]       En l’espèce, par l’attribution de dommages punitifs, le Tribunal vise à exprimer sa réprobation en sanctionnant la conduite de Multibar, qui, par la voix d’un dirigeant de l’entreprise[44], a posé une question discriminatoire lors de l’entrevue d’embauche de M. Kerdougli. Le Tribunal vise également à dissuader les employeurs de manière générale à agir de la sorte.

[83]        Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, le Tribunal entend condamner Multibar au paiement de dommages punitifs d’une valeur de 1 000 $.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[84]    ACCUEILLE en partie la demande introductive d’instance;

[85]    CONDAMNE Les Aliments Multibar inc. à verser à M. Salim Kerdougli 5 000 $ à titre de dommages moraux, avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec, à compter de l’institution des procédures;

[86]       CONDAMNE Les Aliments Multibar inc. à verser à M. Salim Kerdougli 1 000 $ à titre de dommages punitifs, avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec, à compter de la date du jugement;

[87]    LE TOUT, avec les frais de justice.

 

 

__________________________________

MARIO GERVAIS,

Juge au Tribunal des droits de la personne

 

M. Salim Kerdougli, pour lui-même

Partie demanderesse

 

Me Alan Kulaga

CASAVANT MERCIER

Pour la partie défenderesse

 

Date d’audience :

9 février 2018

 



[1]     RLRQ, c. C-12.

[2]     Mouvement laïque québécois c. Saguenay (Ville), 2015 CSC 16, par. 57; Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys c. Gallardo, 2012 QCCA 908 ; Ménard c. Rivet, [1997] RJQ 2108, 1997 CanLII 9973 (QC CA) (demande pour autorisation d’appeler refusée, CSC, 19-03-1998, 26222).

[3]     Multibar a toutefois indiqué à l’enquêteur de la Commission que les deux autres candidats étaient  d’une autre origine. L’un était Belge et l’autre Marocain. Au final, le candidat d’origine belge a obtenu le poste. Pièce P-1, Résolution CP-722.6 de la Commission prise le 1er juin 2017. 

[4]     Kerdougli c. La Vie en Rose inc., 2018 QCTDP 8.

[5]     Kerdougli c. GE Renewable Energy Canada inc. (Alstom réseau Canada inc.), 2018 QCTDP 7.

[6]     Kerdougli c. La Vie en Rose inc., préc., note 4.

[7]     Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Coeur du Québec (SIIIACQ) c. Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, 2012 QCCA 1867, par. 63 (demande pour autorisation d’appeler refusée, CSC, 21-03-2013, 35130); Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (A.A.) c. Centre intégré de santé et de services sociaux des Laurentides (Centre de santé et de services sociaux de Thérèse-de-Blainville), 2017 QCTDP 2, par. 85; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Magasins Wal-Mart Canada inc., [2003] RJQ 1345, 2003 CanLII 24566 (QC TDP), par. 174, inf. en partie par 2005 QCCA 93; Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Transport en commun La Québécoise inc., 2002 CanLII 9226 (QC TDP), par. 29.

[8]     Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (A.A.) c. Centre intégré de santé et de services sociaux des Laurentides (Centre de santé et de services sociaux de Thérèse-de-Blainville), id., par. 88; Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Transport en commun La Québécoise inc., id., par. 29; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Magasins Wal-Mart Canada inc., id., par. 171.

[9]     Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (A.A.) c. Centre intégré de santé et de services sociaux des Laurentides (Centre de santé et de services sociaux de Thérèse-de-Blainville), préc., note 7, par. 87; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Magasins Wal-Mart Canada inc., préc., note 7, par. 173; Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Transport en commun La Québécoise inc., préc., note 7, par. 29; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Systématix Technologies de l’information inc., 2010 QCTDP 18, par. 112.

[10]    Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Coeur du Québec (SIIIACQ) c. Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, préc., note 7, par. 64.

[11]    Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (A.A.) c. Centre intégré de santé et de services sociaux des Laurentides (Centre de santé et de services sociaux de Thérèse-de-Blainville), préc., note 7, par. 90.

[12]    Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Coeur du Québec (SIIIACQ) c. Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, préc., note 7, par. 67.

[13]    Id., par. 68.

[14]    Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Systématix Technologies de l’information inc., préc., note 9, par. 114.

[15]    Law c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1999] 1 RCS  497, 1999 CanLII 675 (CSC), par. 53.

[16]    Déclaration universelle des droits de l'Homme, Rés. 217 A (III), Doc. off. A.G.N.U., 3e sess., suppl. nº13, p. 71, Doc. N.U. A/810, p. 7 (10 décembre 1948). 

[17]    UNESCO, Déclaration sur la race et les préjugés raciaux, Doc. N.U. E/CN.4sub.2/1982/2/Add.1 (27 novembre 1978).

[18]    Convention concernant la discrimination en matière d’emploi et de profession, 25 juin 1958, 362 RTNU 31 (ratifiée par le Canada le 26 novembre 1962).

[19]    Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, 7 mars 1966, 660 RTNU 195 (ratifiée par le Canada le 14 octobre 1970 et par le Québec le 10 mai 1978).

[20]    Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Cœur du Québec (SIIIACQ) c. Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, préc., note 7.

[21]    Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Panacci, 2013 QCTDP 28.

[22]    Commission des droits de la personne c. Coutu, [1995] RJQ 1628, p. 1651, 1995 CanLII 2537 (QC TDP). 

[23]    Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l’hôpital St-Ferdinand, [1996] 3 RCS 211, 1996 CanLII 172 (CSC), par. 100.

[24]    Calego International inc. c. Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, 2013 QCCA 924, par. 101.

[25]    Amselem c. Syndicat Northcrest, [2002] RJQ 906, 2002 CanLII 41115 (QC CA), par. 126, inf. pour d'autres motifs par 2004 CSC 47.

[26]    Transcription de l’audience du 9 février 2018, 11 h 20.

[27]    Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Coeur du Québec (SIIIACQ) c. Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, préc., note 7, par. 68.

[28]    Tels étant les termes de la question que lui pose M. Kerdougli et à laquelle M. Rinfret répond sans en nuancer la formulation.

[29]    Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Commission scolaire de Montréal, 2017 QCCA 286 (demande pour autorisation d’appeler refusée, CSC, 17-08-2017, 37538).

[30]    Bou Malhab c. Métromédia CMR Montréal inc., [2003] RJQ 1011, 2003 CanLII 47948 (QC CA).

[31]    Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l’hôpital St-Ferdinand, préc., note 24.

[32]    Kerdougli c. La Vie en rose inc., préc., note 4, par. 45.

[33]    Id., par. 57.

[34]    Id.

[35]    Kerdougli c. GE Renewable Energy Canada Inc. (Alstom réseau Canada Inc.), préc., note 5.

[36]    Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l’hôpital St-Ferdinand, préc., note 24.

[37]    Fortier c. Québec (Procureure générale), 2015 QCCA 1426, par. 105.

[38]    Kerdougli c. La Vie en Rose inc., préc., note 4.

[39]    Kerdougli c. GE Renewable Energy Canada Inc. (Alstom réseau Canada Inc.), préc., note 5.

[40]   Les tribunaux peuvent prendre connaissance d’office du fait qu’il existe des préjugés raciaux dans la société canadienne; voir notamment R. c. S. (R.D.), [1997] 3 RCS 484, 1997 CanLII 324 (CSC), par. 46.

[41]    Paul EID avec la collab. de Meisson AZZARIA et Marion QUÉRAT, « Mesurer la discrimination à l’embauche subie par les minorités racisées : résultats d’un ʺtestingʺ mené dans le grand Montréal », Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, 2012, en ligne : <http://www.cdpdj.qc.ca/publications/etude_testing_discrimination_emploi.pdf>.

[42]    de Montigny c. Brossard (Succession), 2010 CSC 51.

[43]    Richard c. Time Inc., 2012 CSC 8.

[44]    Bien que Multibar n’ait jamais plaidé en défense qu’elle ne pouvait être condamnée à des dommages punitifs pour la conduite de M. Rinfret, le Tribunal rappelle les enseignements de la Cour suprême dans les arrêts Béliveau St-Jacques c. Fédération des employées et employés de services publics inc., [1996] 2 RCS 345, 1996 CanLII 208 (CSC) et Gauthier c. Beaumont, [1998] 2 RCS 3, 1998 CanLII 788 (CSC) selon lesquels l’employeur peut être tenu à des dommages punitifs lorsque l’acte fautif émane d’un dirigeant de l’entreprise. La Cour d’appel condamne également un employeur à des dommages punitifs dans Fortier c. Québec (Procureure générale), préc., note 38 et Gaz métropolitain inc. c. Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, 2011 QCCA 1201 où la Cour d'appel confirme la condamnation de l'employeur au paiement de dommages punitifs de 10 000 $ à une employée tout en infirmant celle à l’encontre de six autres salariées. Enfin, les décisions suivantes du Tribunal retiennent la responsabilité de l’employeur au paiement de dommages punitifs : Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. 9209-9829 Québec inc., 2015 QCTDP 1; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Innvest Hotels GP II Ltd. (Boucherville Comfort Inn par Journey's End), 2013 QCTDP 31;  Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Commission scolaire des Hauts-Bois-de-l'Outaouais, 2010 QCTDP 4; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Systèmes de draînage Modernes inc., 2009 QCTDP 10.

 

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