Décision

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                              COMMISSION D'APPEL EN MATIÈRE DE LÉSIONS
                              PROFESSIONNELLES

     QUÉBEC                   MONTRÉAL, le 23 août 1988

     DISTRICT D'APPEL         DEVANT LE COMMISSAIRE:   Réal Brassard
     DE MONTRÉAL

     RÉGION:  MONTÉRÉGIE      AUDITION TENUE LE:       12 janvier 1988
     DOSSIER: 01962-62-8701

     DOSSIER CSST: 9371 783   À:                       Montréal
     DOSSIER B.R. : 527-62

                              CENTRE HOSPITALIER DOUGLAS
                              6875, boul. LaSalle
                              Verdun (Québec)
                              H4H 1R3

                                                       PARTIE
     APPELANTE

                              et

                              M. ANDREW PHILLIPS
                              5655, rue Elie, # 301
                              St-Hubert (Québec)
                              J3Y 6P3

                                                       PARTIE
     INTÉRESSÉE

     01962-62-8701                                    2/

                                     D É C I S I O N

     Le 27 janvier 1987, le Centre hospitalier Douglas,

     l'appelante, en appelle d'une décision unanime du

     bureau de révision de la région de la Montérégie

     rendue le 18 décembre 1986.
     

Par cette décision, le bureau de révision infirme une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la Commission) et déclare que la Commission ne pouvait suspendre pour la période du 19 juin 1986 au 18 juillet 1986, en vertu de l'article 142, paragraphe 20, alinéa b), de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001) le paiement de l'indemnité de remplacement du revenu que recevait monsieur Andrew Phillips (le travailleur), partie intéressée au présent appel.

OBJET DE L'APPEL L'appelante demande à la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d'appel) d'infirmer la décision du bureau de 01962-62-8701 3/ révision et de déclarer que la Commission pouvait suspendre le paiement de l'indemnité de remplace- ment du revenu.

OBJECTION A LA PREUVE Le travailleur s'objecte à toute preuve visant à contredire l'avis du médecin qui a charge, le docteur Peterson, qui, le 13 novembre 1986 a produit un rapport médical indiquant que son voyage à l'étranger n'a pas retardé sa guérison. Le travailleur soutient que dans la mesure où il s'agit d'une question d'ordre médical qui n'a pas été contestée suivant la procédure d'arbitrage médical, l'avis du médecin qui a charge ne peut être remis en question dans le cadre du présent appel. Cet avis, soutient-il, lie la Commission, le bureau de révision et la Commission d'appel.

La Commission d'appel a réservé sa décision sur cette objection à la preuve formulée par le tra- vailleur et entend maintenant en disposer dans le cadre de sa décision sur le mérite de l'appel.

01962-62-8701 4/ LES FAITS Le 17 mars 1986, alors qu'il est à son travail chez l'appelante, le travailleur s'inflige une entorse lombaire. Il fait une réclamation pour lésion professionnelle auprès de la Commission, qui reconnaît l'origine professionnelle de la lésion du travailleur le 30 avril 1986.

La Commission accepte donc de payer au travailleur une indemnité de remplacement du revenu pendant la période où il est incapable d'exercer son emploi en raison de cette lésion.

Le 15 avril 1986, le travailleur commence à rece- voir des traitements de physiothérapie en raison de sa lésion professionnelle. Pendant la période de traitements, étant toujours incapable d'exercer son emploi, la Commission lui verse l'indemnité de remplacement du revenu.

Le 24 juillet 1986, la Commission demande au médecin qui a charge du travailleur, le docteur Peterson, de compléter un rapport d'évaluation 01962-62-8701 5/ médicale sommaire, en lui posant, notamment, la question suivante: «Vous avez arrêté les traitements de physio le 18-06-86 pour repos et investi- gation et vous nous informez qu'il part à l'étranger jusqu'au 18-07-86. Est-ce que ça retarde la guérison? Expliquez.» Le 2 août 1986, le médecin qui a charge du travail- leur répond de la façon suivante à la question ci-haut citée.

«Les traitements de physiothérapie ont été arrêtés parce que le patient partait à l'étranger. Ils n'ont pas été arrêtés pour investigation. Son départ pour l'étranger retarde évidemment son traite- ment et sa guérison».

A la suite de cet avis du médecin qui a charge, la Commission rend la décision suivante le 9 septembre 1986.

«Nous désirons vous informer que les indemnités de remplacement du revenu que nous vous versons sont suspendues pour la période du 19 juin 1986 au 18 juillet 1986 parce que selon votre médecin traitant vous avez posé un acte qui a retardé votre guérison.

01962-62-8701 6/ En conséquence, aucune indemnité ne sera versée pour cette période».

Le 25 septembre 1986, le travailleur conteste cette décision en ces termes: «In answer to your letter dated September 9, 1986, please be informed I am contes- ting the CSST's decision not to accept my claim on the basis that you consider I had acted in a way to slow down my recovery.

I am also contesting the decision to require me to reimburse my employer the amount of $ 1,168.23 for benefits you claim I received for the period between June 19, 1986 to July 18, 1986».

Cette contestation est transmise au bureau de révision de la région de la Montérégie. Ce dernier entend les parties le 29 novembre 1986.

Lors de l'audience devant le bureau de révision, le travailleur a déposé en preuve un billet médical rédigé par son médecin, le docteur Peterson. Ce billet médical se lit ainsi: «Ceci est une rectification du rapport que j'ai fait à la CSST le 2 août 1986 (évaluation médicale sommaire). Par erreur, j'ai marqué que le patient (Andrew Phillips) devait continuer les 01962-62-8701 7/ traitements de physiothérapie après son départ pour l'étranger le 18/6/86, alors qu'en fait, ses traitements étaient déjà terminés au moment de son départ 1e 18/6/86. Donc, contrairement à ce que j'ai écrit dans mon rapport du 2/8/86, le départ pour l'étranger de M. Phillips n'a probablement pas retardé sa guérison».

(sic) Le bureau de révision rend sa décision le 18 décembre 1986. Cette décision se lit comme suit: «Pour que l'article 142 trouve son application, il faut que le travailleur n'ai aucun motif valable pour poser un acte qui, selon le médecin qui en a charge, empêche ou retarde sa guérison.

Dans les circonstances, le médecin traitant du travailleur a fourni des explications détaillées sur ce qu'il entendait dire dans son évaluation médicale fournie à la Commission le 2 août 1986; ces explications sont jugées valables par le Bureau de révision paritaire. D'ailleurs, le propre médecin de l'employeur corrobore l'approche de ce médecin à l'effet que les traitements de physiothérapie étant terminés et les tests étant à venir, le voyage à l'étran- ger n'a pu ni empêcher ni retarder la guérison de ce travailleur.

Quant aux motifs invoqués par le travail- leur pour effectuer son voyage, le Bureau de révision paritaire estime qu'il s'agit là d'une raison sérieuse et que cette raison resituée dans le contexte qui existait au mois de juin 1986, permet de comprendre pourquoi le médecin traitant avait permis à ce travailleur d'effectuer le voyage à l'étranger sans y mettre de restrictions.

01962-62-8701 8/ POUR TOUS CES MOTIFS, le Bureau de révision paritaire modifie la décision rendue le 9 septembre 1986 et déclare l'annulation de la suspension décrétée par cette décision, le travailleur ayant droit de recevoir des indemnités de remplacement du revenu pour la période du 19 juin au 18 juillet 1986».

C'est cette décision qui est l'objet du présent appel.

A l'audience devant la Commission d'appel, le travailleur confirme s'être rendu à l'extérieur du pays, soit à Trinidad, entre le 19 juin 1986 et le 18 juillet 1986. Il dit avoir reçu, un mois aupa- ravant, une lettre de sa belle-mère lui rapportant un problème d'ordre familial qu'il devait régler.

Il affirme avoir reçu une autre lettre, 15 jours avant son départ, de la même personne, lui men- tionnant qu'il devait absolument se rendre à Trinidad pour régler le problème familial. Il dit avoir fait le voyage avec l'approbation de son médecin, qu'il a avisé un jour avant son départ.

Quant aux motifs précis qui justifiait sa présence à Trinidad, le travailleur mentionne qu'il s'agis- sait d'un transfert de propriété: sa belle-mère 01962-62-8701 9/ voulait transférer à son nom une propriété qu'elle avait. Elle lui a mentionné que depuis l'accession à l'indépendance de Trinidad et Tobago, il fallait une longue période de temps pour effectuer un tel transfert à un étranger comme lui, qui est mainte- nant un citoyen canadien. Il affirme que sa belle-mère lui a mentionné qu'il courait la chance de perdre toute possibilité de transfert s'il ne se rendait pas à Trinidad en juin ou en juillet.

Questionné à ce sujet, le travailleur mentionne qu'il ne sait pas pourquoi il lui fallait être à Trinidad absolument durant cette période.

Questionné sur les circonstances qui ont amené l'émission de l'avis du docteur Peterson, le 19 novembre 1986, le travailleur affirme que le docteur Peterson l'a simplement appelé pour lui remettre ce rapport sans rien lui dire à ce propos.

ARGUMENTATION DES PARTIES L'appelante soumet que la décision du bureau de révision ne tient pas compte de la chronologie des événements en s'appuyant sur l'avis du 13 novembre 1986, du médecin qui a charge du travailleur, le 01962-62-8701 10/ docteur Peterson. De toute évidence, souligne-t- elle, l'avis du 13 novembre 1986 est un avis produit à l'occasion de l'audience devant le bureau de révision, dans le but d'appuyer la contestation du travailleur.

Elle soumet que l'avis du médecin qui a charge, qui est à l'origine de la décision de la Commission est bien celui du 2 août 1986, avis par lequel le méde- cin qui a charge indique que le voyage à l'étranger retarde évidemment la guérison. L'appelante souligne que le docteur Peterson est affirmatif dans son avis du 2 août 1986 et qu'il l'est moins dans son avis du 13 novembre 1986, dans lequel il utilise l'expression «n'a probablement pas retardé sa guérison». Il faut donc, selon elle, prendre avec réserve l'avis du 11 novembre 1986.

Quant aux motifs du voyage à Trinidad, l'appelante soumet qu'il s'agissait de motifs personnels d'une part, et que d'autre part, le travailleur ne peut prétendre à une situation d'urgence quand il est en preuve que le voyage en question a été planifié un mois d'avance.

01962-62-8701 11/ L'appelante soumet qu'un tel voyage fait en sorte que l'on perd le contrôle sur le travailleur alors que lors d'un tel voyage, il peut compromettre sa guérison. Elle souligne qu'à l'époque, on soupçon- nait l'existence d'une hernie discale et qu'un tel voyage rend impossible de prouver qu'il n'y a pas eu aggravation de l'état de santé du travailleur lors de ce voyage. C'est pourquoi, soutient-elle, il faut des raisons sérieuses pour permettre au travailleur de poser un tel geste.

Quant à l'absence d'une contestation du rapport du docteur Peterson, daté du 13 novembre 1986, l'appe- lante soumet que ce rapport n'est pas un véritable rapport médical requis par la loi, que ce rapport a été déposé devant le bureau de révision au soutien de la contestation du travailleur, pour renverser l'opinion médicale du 2 août 1986, qu'il ne s'agit pas d'un rapport médical qu'elle pouvait contester en vertu de l'article 212 de la Loi sur les acci- dents du travail et les maladies professionnelles.

Le travailleur soumet qu'il est allé à Trinidad pour régler des problèmes personnels importants qu'il ne pouvait régler à partir du Canada. Il 01962-62-8701 12/ souligne que ses traitements de physiothérapie étaient terminés lorsqu'il a entrepris le voyage: il n'a reçu aucun autre traitement une fois revenu de voyage. C'est d'ailleurs ce fait, dit-il, qui a fait en sorte que le docteur Peterson est revenu sur son avis, le 13 novembre 1986. Il soumet qu'il ne doit pas subir de préjudice en raison d'une erreur de son médecin.

Quant aux motifs de son voyage, le travailleur soutient qu'il s'agissait d'une affaire très importante et il souligne que sa belle-mère lui a dit par téléphone et lui a confirmé par lettre qu'il lui fallait absolument se rendre à Trinidad, sinon il risquait de perdre sa propriété.

Concernant l'objection à la preuve qu'il a formulée, il soumet qu'en vertu de l'article 142, paragraphe 20, alinéa b), la question d'ordre médical doit être contestée suivant la procédure d'arbitrage que constitue l'avis du docteur Peterson, le 13 novembre 1986. Il soumet que le rapport du docteur Peterson n'a pas été contesté par l'employeur. Il soutient que, dans les circonstances, ce rapport du médecin qui a charge 01962-62-8701 13/ lie la Commission et les autres instances décisionnelles. Toute preuve visant à contredire ce rapport médical, soutient-il, est donc irrece- vable.

MOTIFS DE LA DÉCISION Dans la présente affaire, la Commission d'appel doit décider si la Commission pouvait suspendre pour la période du 19 juin 1986 au 18 juillet 1986 le versement de l'indemnité de remplacement du revenu que recevait le travailleur pour une lésion professionnelle subie le 17 mars 1986. C'est en vertu de l'article 142, paragraphe 20, sous-para- graphe b) de la Loi sur les accidents du travail- leur et les maladies professionnelles que la Commission a suspendu le versement de l'indemnité de remplacement du revenu. Cet article se lit ainsi: 142. La Commission peut réduire ou suspendre le paiement d'une indemnité: (...) 20 si le travailleur, sans raison valable: (...) 01962-62-8701 14/ b) pose un acte qui, selon le médecin qui en a charge ou, s'il y a contes- tation, selon l'arbitre, empêche ou retarde sa guérison; (...).

Il s'infère du texte de cet article de la loi que trois conditions doivent être présentes pour permettre à la Commission de réduire ou suspendre le paiement d'une indemnité prévue à la loi: 1- le travailleur doit poser un acte susceptible d'empêcher ou retarder sa guérison; 2- le médecin qui a charge ou, le cas échéant, l'arbitre doit être d'avis que cet acte empêche ou retarde la guérison; 3- le travailleur ne doit pas avoir de raison valable pour poser un tel acte.

En l'instance, l'acte reproché au travailleur est un voyage d'un mois à Trinidad. Dans la mesure où ce voyage a été effectué alors que le travailleur recevait des soins de physiothérapie et qu'aucun rapport au dossier émanant de la Clinique de la physiothérapie n'indique que ces soins étaient terminés le 18 juillet 1986, on peut raisonnable- ment penser que cet acte était susceptible de 01962-62-8701 15/ retarder la guérison. La première condition de l'article 142 est donc rencontrée en l'espèce.

Concernant la deuxième condition à l'application de l'article 142, c'est sur la foi du rapport daté du 2 août 1986 émanant du docteur Peterson, médecin qui avait charge du travailleur qu'a été rendue la décision de la Commission. Dans ce rapport émis à la demande de la Commission, le docteur Peterson affirme que le voyage à l'étranger retarde la guérison et déclare que les traitements de physiothérapie n'ont pas été suspendus pour inves- tigation mais bien parce que le travailleur partait pour l'étranger.

Le même médecin a cependant émis une opinion contraire le 11 novembre 1986 et c'est sur ce nouvel avis que le travailleur fait reposer ses prétentions à l'effet que l'article 142 ne peut s'appliquer puisque le médecin qui a charge n'est pas d'avis que le voyage a retardé sa guérison. A l'audience, le travailleur a d'ailleurs soumis une objection à la preuve visant à empêcher l'appelante de contredire cet avis du docteur Peterson au motif que l'appelante ne pouvait que contester un tel 01962-62-8701 16/ avis que par le biais de l'arbitrage médical, tel qu'il ressort à la lecture même de l'article de loi en question.

En effet, constate la Commission d'appel, le paragraphe b) de l'article 142 réfère à la procé- dure d'arbitrage médical parce que l'acte dont il est question est susceptible d'affecter la période de consolidation de la lésion et doit être pris en considération pour fixer ou justifier une date de consolidation, l'un des éléments de l'article 212, si un tel acte est justifié. La Commission d'appel note d'ailleurs la même référence à l'arbitrage médical lorsque le travailleur omet ou refuse de se soumettre à un traitement médical reconnu que son médecin estime nécessaire: il s'agit là, bien sûr, de la nature et de la nécessité des traitements, un sujet prévu au troisième paragraphe de l'article 212, et donc une question d'ordre médical qui doit être traitée suivant la procédure prévue à l'arti- cle 212 ou 214 s'il y a contestation. Sur ces questions, la Commission est liée par l'avis du médecin qui a charge ou, le cas échéant, par l'avis de l'arbitre aux fins de rendre sa décision, conformément à l'article 224 de la loi.

01962-62-8701 17/ Compte tenu qu'elle doit maintenant déterminer si le médecin qui a charge du travailleur était d'avis que le voyage retardait la guérison, la Commission d'appel entend maintenant disposer de l'objection formulée, et déterminer lequel des avis du docteur Peterson doit être retenu comme étant l'avis du médecin qui a charge aux fins de l'application en l'instance de l'article 142.

De la preuve, la Commission d'appel retient d'abord que c'est sur l'avis du docteur Peterson du 2 août 1986 que la Commission a décidé de suspendre le paiement de l'indemnité. La Commission d'appel constate en outre que l'avis du docteur Peterson, daté du 13 novembre 1986, a été produit après la décision de la Commission, devant le bureau de révision dans le cadre de la contestation du travailleur devant cette instance.

L'avis du 13 novembre 1986 est un avis d'ordre médical par lequel le docteur Peterson rectifie son avis du 2 août 1986. Or, il s'infère du sous-para- graphe b) du paragraphe 20 de l'article 142 de la loi que l'avis du médecin qui a charge du travail- leur, s'il est contesté, doit l'être devant un arbitre et non devant le bureau de révision.

01962-62-8701 18/ Lequel de l'avis du 2 août 1986 ou de l'avis du 13 novembre 1986 constitue l'avis du médecin qui a charge aux termes de la loi? Dans l'affaire Claude Beauvais et Société de Radio-Télévision du Québec (01153-62-8610, 23 novembre 1987, M. le commissaire Bertrand Roy) où s'est posée la même question dans des circonstances similaires. Dans cette affaire, le médecin qui a charge avait posé un diagnostic médical qui n'avait pas été contesté par l'employeur; à l'occasion d'un appel devant la Commission d'appel portant sur l'existence ou non d'une lésion d'origine profes- sionnelle, le travailleur avait déposé devant la Commission d'appel une lettre de rectification du même médecin, qui modifiait son diagnostic initial.

La Commission d'appel s'est alors posé la question à savoir lequel des deux avis médicaux du médecin qui a charge devait être pris en considération. La Commission d'appel s'est alors exprimé ainsi: «Le travailleur a soumis une attestation médicale, celle du 7 mars 1986 du docteur Desaulniers, au soutient de son alléga- tion qu'il a subi une «blessure». Or, cette attestation médicale mentionne un 01962-62-8701 19/ diagnostic de tendinite qui n'a d'ailleurs pas été contesté par l'em- ployeur. En vertu de l'article 224 de la loi, la Commission est donc liée par ce diagnostic non «contesté».

Le travailleur a cependant déposé devant la Commission d'appel une lettre de rectification du docteur Desaulniers datée du 19 novembre 1986. Cette rectification n'a manifestement pas été signifiée à la Commission (ou à l'employeur) conformément à la procédure d'évaluation médicale prévue à la loi aux articles 199 et suivants. La Commission d'appel ne peut considérer que ce document du 19 novembre 1986 constitue une attestation au sens de l'article 199 et, par conséquent, comme la Commission elle demeure liée par le diagnostic de tendinite du 7 mars 1986.

Il eut été possible pour le travailleur de demander, selon l'article 365, à la Commission de reconsidérer sa décision du 22 avril 1986 en soumettant à la Commission la rectification très importante du docteur Desaulniers. Or, il ne l'a fait ni avant, ni après la demande de révision».

En l'espèce, comme dans l'affaire ci-haut citée, l'avis du docteur Peterson daté du 13 novembre 1986 ne constitue une attestation liant la Commission comme le bureau de révision et la Commission d'appel demeure liée par l'avis du 2 août 1986 en vertu du premier alinéa de l'article 224. Dans les circonstances, l'objection à toute preuve à l'encontre de l'avis du docteur Peterson en date du 01962-62-8701 20/ 13 novembre 1986 devient sans objet puisque cet avis du docteur Peterson ne peut être pris en considération.

Cependant, le travailleur pourrait requérir de son médecin qu'il dépose à la Commission un rapport médical conformément aux articles 199 et suivants de la loi, un rapport qui reprendrait son avis du 13 novembre 1986. Un tel rapport lierait la Commission de sorte que le travailleur pourrait requérir de celle-ci qu'elle lui verse son indem- nité rétroactivement à la date où elle a suspendu le paiement puisque le motif qui a justifié sa décision n'existerait plus. Bien sûr, l'employeur ou la Commission pourrait se prévaloir de l'article 212 ou 214 de la loi pour contester le rapport du médecin qui a charge.

En l'instance, le 2 août 1986, le médecin qui avait charge du travailleur était d'avis que le voyage à l'étranger avait retardé la guérison de la lésion professionnelle. La deuxième condition à l'application de l'article 142 est donc remplie.

01962-62-8701 21/ Il reste maintenant à déterminer si le travailleur avait une raison valable pour effectuer ce voyage malgré l'avis du médecin qui a charge à l'effet qu'un tel voyage retardait sa guérison.

Le travailleur dit qu'il lui fallait absolument se rendre à Trinidad pour une affaire de transfert de propriété. Le voyage a été planifié un mois d'avance, de sorte que la Commission d'appel ne peut conclure qu'il s'agissait bien d'une urgence.

Par ailleurs, le travailleur n'a pas été en mesure de justifier pourquoi il devait absolument se rendre à Trinidad durant a période concernée et non à une autre période. Il n'a pas non plus donné d'explications sur ce pourquoi il risquait de perdre sa propriété s'il ne se rendait pas à Trinidad à cette période précise, sinon une vague allusion à l'accession à l'indépendance de Trinidad et Tobago.

Dans les circonstances, la Commission d'appel considère que le travailleur ne lui a pas démontré ni l'urgence de se rendre à Trinidad à l'époque 01962-62-8701 22/ concerné ni la nécessité de se rendre à cet endroit pour conclure le transfert de propriété, qui aurait pu se faire par courrier, ni la nécessité d'effec- tuer le transfert à la période précise à laquelle il a été fait. De plus, la Commission d'appel ne croit pas le travailleur quand il affirme qu'il risquait de perdre sa propriété si la transaction ne se faisait pas à l'époque précise où elle a été faite. D'autre part, la preuve de l'existence de cette transaction n'a pas été faite; la preuve présentée repose exclusivement sur le témoignage du travailleur, alors qu'il aurait été facile d'en faire la preuve par le dépôt des documents légaux de cette transaction. La Commission d'appel accorde peu de crédibilité au témoignage du tra- vailleur, parce que celui-ci, à l'audience, a été plutôt évasif sur la question et son témoignage est peu convainquant sur les motifs réels du voyage effectué. La durée d'un mois de ce voyage, par exemple, est inexplicable pour justifier la trans- action en question.

Pour ces motifs, la Commission d'appel conclut que le travailleur n'avait pas de raison valable pour effectuer le voyage à Trinidad, un voyage qui, de 01962-62-8701 23/ l'avis du médecin qui en avait charge, retardait sa guérison. La Commission d'appel considère en conséquence que la Commission pouvait se prévaloir du pouvoir discrétionnaire qui lui est dévolu à l'article 142 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles pour suspendre pendant la période concernée le paiement de l'indemnité de remplacement du revenu que recevait le travailleur en raison de sa lésion professionnelle.

POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION D'APPEL EN MATIÈRE DE LÉSIONS PROFESSIONNELLES ACCUEILLE l'appel; INFIRME la décision rendue le 18 décembre 1986 par le bureau de révision de la région de la Montérégie; et 01962-62-8701 24/ DÉCLARE que la Commission pouvait suspendre le paiement de l'indemnité de remplacement du revenu de monsieur Andrew Phillips pour la période du 19 juin 1986 au 18 juillet 1986.

Réal Brassard Commissaire Monette Barakett & Ass.

(Me Michel J. Duranleau) Place du Canada, bureau 2100 Montréal (Québec) H3B 2R8 Représentant de la partie appelante Trudel Nadeau & Ass.

(Me Suzanne Handman) 300, rue Léo-Parizeau, bureau 2500 Montréal (Québec) H2W 2N1 Représentant de la partie intéressée

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