Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Montréal

20 décembre 2004

 

Région :

Montréal

 

Dossier :

205208-72-0303-2

 

Dossier CSST :

119964658

 

Commissaire :

Pauline Perron

 

Membres :

Michel R. Giroux, associations d’employeurs

 

France Morin, associations syndicales

______________________________________________________________________

 

 

Francesco Bévilacqua

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Boulevard Dodge Chrysler Jeep 2000 inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 31 mars 2003, monsieur Francesco Bévilacqua (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 13 mars 2003 par un conciliateur-décideur.

[2]                Par cette décision, la CSST déclare que la plainte du travailleur datée du 25 novembre 2002 est irrecevable parce qu’elle ne respecte pas le délai prévu à l’article 253 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, L.R.Q., ch A-3.001 (la Loi).

[3]                Le travailleur est présent et représenté lors de l’audience tenue par la Commission des lésions professionnelles le 15 décembre 2004. Boulevard Dodge Chrysler Jeep 2000 inc. (l’employeur) est représenté. La cause a été mise en délibéré à la date de l’audience.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]                Le travailleur demande de reconnaître que l’employeur doit verser la somme de 1 300 $ au Fond de solidarité de la fédération des travailleurs du Québec (le Fond F.T.Q.) à titre de régime de retraite pour la période du 14 mars 2001 au 31 décembre 2001.

LES FAITS

[5]                De la preuve testimoniale et documentaire présentée, la Commission des lésions professionnelles retient les éléments suivants.

[6]                La Commission des lésions professionnelles a rendu une première décision[1] dans cette affaire. Elle a déclaré la plainte déposée en vertu de l’article 32 de la Loi le 25 novembre 2002 par le travailleur comme étant recevable. Il y a lieu de rapporter les faits pertinents pour la question de fond qui y sont énoncés :

[6]     Le travailleur est à l’emploi depuis 48 ans chez le même employeur. Il a subi une lésion professionnelle le 4 mars 2001. [sic] (C’est le 14 mars 2001).

 

[7]     L’employeur n’a pas versé sa contribution dans le fond de pension du travailleur (Fond de solidarité des travailleurs du Québec, ci-après appelé Fond FTQ) pour la période du 14 mars au 31 décembre 2001.

 

[8]     En mars 2002, le travailleur, alors qu’il fait sa déclaration de revenus pour l’année 2001, constate que l’employeur n’a pas versé son entière contribution au Fond FTQ.

 

[9]     Le 19 juin 2002, l’employeur, sous la plume de monsieur Guy Caouette, transmet une lettre au travailleur concernant certaines informations demandées par ce dernier. Quant à la question en litige, il y est mentionné :

 

Les versements au Fond de solidarité pour la période de janvier à août 2001 sont de 665.57 $ et aucun versement additionnel ne sera fait puisque l’employé n’a pas contribué au fonds à partir du début de son incapacité jusqu’au 31 décembre 2001. [sic]

 

[10]     Le travailleur affirme qu’il y avait ici une erreur puisqu’il avait contribué non pas par prélèvement sur sa paie, puisqu’il n’en avait pas durant son absence au travail, mais par dépôt d’un chèque de 2 000 $.

 

[11]     Le travailleur explique qu’une semaine après la réception de la lettre du 19 juin, il a rencontré l’employeur. Il était alors seul. L’employeur lui a dit qu’il ne paiera pas sa contribution.

 


[12]     Le travailleur s’est procuré un exemplaire de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., ch A-3.001) (la Loi) et est retourné rencontrer l’employeur, une semaine plus tard, cette fois accompagné d’un représentant d’atelier, monsieur Gabriel Plante, pour lui expliquer l’obligation alléguée.

 

[13]     L’employeur a photocopié les articles pertinents concernant son obligation légale à verser les cotisations dans le fond de retraite et a indiqué qu’il consulterait son avocat.

 

 

[7]                Le travailleur a témoigné lors de l’audience. Il explique qu’il cotise à chaque année au maximum qu’il a droit à son régime d’épargne retraite. Son comptable l’avise du montant qu’il doit verser pour arriver au maximum à la fin de l’année. C’est dans ce contexte que le 18 janvier 2001, il a versé la somme de 2 059,54 $ au Fond F.T.Q pour l’année 2001. Le maximum pour l’année 2000 étant déjà atteint.

[8]                L’employeur reconnaît que le travailleur a contribué de manière personnelle à son fond de pension pour l’année 2001 en déposant, le 18 janvier 2001, un montant de 2 059,54 $. Toutefois, selon le témoigne de monsieur Guy Caouette, vice-président des finances pour l’employeur, il s’agit d’une contribution personnelle qui n’a aucunement affaire avec la contribution obligatoire prévue à la convention collective. Celle-ci prévoit une contribution obligatoire de l’employé et de l’employeur. À chaque mois, l’employeur fait parvenir un chèque au Fond F.T.Q. pour sa contribution. Le nom et le montant prélevé pour le mois pour chaque employé sont inscrits. L’employeur transmet à l’association accréditée une copie de sa remise mensuelle.

[9]                Puisque le travailleur n’a pas contribué de manière régulière, monsieur Caouette considère qu’il n’avait pas à ouvrir sa comptabilité de l’année 2001 pour faire une contribution rétroactive lorsque le travailleur lui a demandé sa contribution au printemps 2002.

[10]           Il admet qu’il ne connaissait pas l’existence de l’article 235 de la Loi qui se lit comme suit :

235. Le travailleur qui s'absente de son travail en raison de sa lésion professionnelle:

 

1°     continue d'accumuler de l'ancienneté au sens de la convention collective qui lui est applicable et du service continu au sens de cette convention et au sens de la Loi sur les normes du travail (chapitre N-1.1);

 

2°     continue de participer aux régimes de retraite et d'assurances offerts dans l'établissement, pourvu qu'il paie sa part des cotisations exigibles, s'il y a lieu, auquel cas son employeur assume la sienne.

 

Le présent article s'applique au travailleur jusqu'à l'expiration du délai prévu par le paragraphe 1° ou 2°, selon le cas, du premier alinéa de l'article 240.

__________

1985, c. 6, a. 235.

 

 

[11]           Depuis qu’il connaît cette disposition, les employés peuvent continuer à participer au Fond F.T.Q. et il remet la contribution de l’employeur. Le travailleur en a bénéficié à compter de l'année 2002.

L’AVIS DES MEMBRES

[12]           Madame France Morin, membre issue des associations syndicales, est d’avis qu’étant donné que le travailleur ne savait pas qu’il devait verser une contribution sur une base régulière pour bénéficier de la contribution de l’employeur et que l’employeur ne l’a pas avisé de ce fait; qu’étant donné que cette pratique a été instaurée par la suite; qu’étant donné que le travailleur avait fait une contribution antérieurement; il y a lieu de lui faire bénéficier de la nouvelle politique de l’employeur.

[13]           Monsieur Michel R. Giroux, membre issu des associations d’employeurs, se questionne sur les raisons du traitement différent des contributions du travailleur pour les années 2001, 2002 et 2003. La principale raison semble être la fin de l’année 2001 de l’entreprise ce qui, à son avis, ne constitue pas un motif pour pénaliser le travailleur. Il donnerait donc raison au travailleur.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[14]           Il s’agit d’une plainte en vertu de l’article 32 de la Loi. Toutefois, le litige ne porte pas sur la question de déterminer s’il y a eu une sanction de la part de l’employeur, puisqu’il admet que, s’il doit verser la contribution, il y a eu sanction. L’employeur demande plutôt de déterminer s’il doit verser ou non la contribution.

[15]           La Loi est une loi d’ordre public et l’employeur doit l’observer. Dans le cas qui nous occupe, les faits que nous avons exposés démontrent clairement que la méconnaissance de l’article 235 de la Loi par l’employeur a pénalisé le travailleur. D’ailleurs, l’employeur admet que depuis qu’il a pris connaissance de cette disposition, il l’applique. Il permet aux travailleurs qui sont en arrêt du travail en vertu de la Loi de contribuer de manière régulière à leur régime de retraite et il dépose sa contribution. Le travailleur lui-même en a bénéficié par la suite. Toutefois, il refuse d’ouvrir ses livres rétroactivement pour la période en litige.

[16]           L’article 351 de la Loi permet de rendre des décisions suivant l’équité, d’après le mérite réel et la justice du cas :

351. La Commission rend ses décisions suivant l'équité, d'après le mérite réel et la justice du cas.

 


Elle peut, par tous les moyens légaux qu'elle juge les meilleurs, s'enquérir des matières qui lui sont attribuées.

__________

1985, c. 6, a. 351; 1997, c. 27, a. 13.

 

 

[17]           Dans le cas qui nous occupe, la Commission des lésions professionnelles considère que l’employeur ne présente pas de motifs valables pour justifier son refus de verser sa contribution. La preuve a démontré que si le travailleur avait été au courant de la disposition de l’article 235 de la Loi, il aurait contribué régulièrement au Fond F.T.Q. En effet, il s’assure chaque année de contribuer au maximum de ce qui lui est permis à un régime d’épargne retraite. C’est pourquoi, il avait déjà versé la somme de 2 059,54 $ pour contribuer au maximum de l’année 2001.

[18]           Dans ces circonstances, la Commission des lésions professionnelles considère, suivant l’équité, le mérite réel et la justice du cas, que l’employeur doit verser au travailleur la contribution de l’employeur prévue à la convention collective pour la période visée de mars à décembre 2001. Puisque la somme demandée, soit le montant de 1 300 $, n’a pas été contestée par l’employeur, il y a lieu de retenir ce montant.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête de monsieur Francesco Bévilacqua, le travailleur;

DÉCLARE que la plainte qu’il a déposée en vertu de l’article 32 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles est fondée;

DÉCLARE que Boulevard Dodge Chrysler Jeep 2000 inc., l’employeur, doit verser une contribution de 1 300 $ au Fond F.T.Q., au nom du travailleur.

 

 

 

__________________________________

 

Me Pauline Perron

 

Commissaire

 

 

 

 

M. Alain Rajotte

T.C.A. (LOCAL 698)

Représentant de la partie requérante

 

 

M. Vincent Rioux

A.E.I.A. INC.

Représentant de la partie intéressée

 



[1]          205208-72-0303, 31 octobre 2003, P. Perron.

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