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[1] Le 23 janvier 2004, monsieur Benoit Guilbault (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 7 janvier 2004 à la suite d’une révision administrative.
[2]
Par cette décision, la CSST confirme une décision rendue en
première instance le 12 septembre 2003 et déclare que le travailleur n’a pas
droit à l’application des dispositions de l’article
[3] L’audience s’est tenue à Gatineau le 27 avril 2004. Le travailleur est présent et représenté. CLSC - CH - CHSLD des Forestiers (l’employeur), quoique dûment convoqué, n’est pas présent à l’audience.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[4]
Le travailleur demande à la Commission des lésions
professionnelles d’infirmer la décision de la révision administrative rendue le
7 janvier 2004 et de déclarer qu’il a droit à l’application des dispositions de
l’article
L’AVIS DES MEMBRES
[5]
Conformément à l’article
[6]
Le membre issu des associations d’employeurs est d’avis que la
requête du travailleur doit être rejetée, puisqu’en aucun temps il n’a
manifesté l’intention de poursuivre le versement des prestations de retraite,
tel que prévu à l’article
[7]
Le membre issu des associations syndicales est d’avis
d’accueillir la requête en contestation, puisqu’il n’y a pas de délai prévu
dans la loi pour demander l’application de cette disposition, que le
travailleur a manifesté rapidement son intention de bénéficier des dispositions
de l’article
LES FAITS ET LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[8] Dans sa prise de décision, la Commission des lésions professionnelles a tenu compte de l’avis de ses membres et a étudié l’ensemble de la preuve documentaire qui apparaît au dossier ainsi que les documents déposés à l’audience.
[9] La Commission des lésions professionnelles s’est aussi instruite du témoignage du travailleur et a considéré son argumentation.
[10] La Commission des lésions professionnelles, en motivant sa décision, se réfère aux éléments de la preuve tant documentaire que testimoniale qu’elle considère pertinente à la détermination des questions en litige.
[11] Le travailleur a subi une lésion professionnelle le 20 mars 1987 qui a entraîné une atteinte permanente évaluée à 18,19 % et le diagnostic d’encéphalopathie a été reconnu comme une maladie professionnelle.
[12] Le 10 février 1996, le docteur Jean Chatelois, neuropsychologue, reconnaît que le travailleur conserve les limitations fonctionnelles suivantes :
2. Limitations fonctionnelles
Les limitations fonctionnelles au plan neuropsychologique se traduisent par une instabilité significative de l’attention avec une vulnérabilité nette à l’interférence qui est susceptible d’empêcher le travailleur de répondre aux exigences de n’importe quel emploi dans lequel les capacités attentionnelles doivent être utilisées.
À cause du trouble de mémoire que présente M. Guilbeault, il éprouverait de la difficulté à faire de nouveaux apprentissages impliquant la rétention de consignes multiples ou complexes, l’apprentissage de nouvelles matières ou informations propres à la spécialisation à l’intérieur d’un domaine (ex : mise à jour d’informations à partir de documents écrits, apprentissage de données techniques, formation continue par le biais de conférences, etc). Compte tenu de sa vulnérabilité à l’interférence au plan de l’attention, il serait sujet en plus à oublier facilement des détails, des consignes, dans différentes tâches même simples.
Le problème des douleurs chroniques, de fatigue, manque d’endurance, la vulnérabilité au stress, peuvent avoir des implications importantes au plan du fonctionnement cognitif et ainsi accentuer les symptômes et les déficits existants.
3. Aptitudes à un emploi
Comme tenu des données de l’évaluation neuropsychologique et des limitations fonctionnelles qui accompagnent, compte tenu des limitations qui ont été décrites au plan physique dans différents rapports d’expertise médicale, compte tenu particulièrement de l’hypersensibilité aux solvants et autres produits similaires qui a été mentionnée par le Dr Auger, le travailleur est non seulement dans l’incapacité d’effectuer un emploi de "pompiste" mais également il est à mon avis inapte à tout emploi à temps plein comme à temps partiel.
[13] Ces limitations fonctionnelles et l’opinion concernant la capacité d’emploi permettent de déclarer que le travailleur est inemployable et, en plus, il a des difficultés au niveau de la compréhension et des limitations même dans ses activités quotidiennes.
[14]
La preuve démontre aussi qu’une première demande a été
présentée le 18 octobre 1994, le travailleur ayant demandé à ce que les
dispositions de l’article
[15] Le travailleur, en vertu de sa convention collective, était exonéré du paiement des primes pour une période de deux ans. Selon lui, cette exonération de prime était valable tant qu’il était en invalidité et ce n’est qu’au cours des années 1993 et 1994 qu’il a été informé que son régime de retraite ne versait plus de cotisations, compte tenu des dispositions de la convention collective qui lui étaient applicables. La disposition de la convention collective est déposée au tribunal.
[16] Le 10 avril 1996, la CSST émet une décision reconnaissant qu’il est impossible de déterminer un emploi convenable pour le travailleur, celui-ci étant incapable d’exercer un emploi à plein temps, et en conséquence détermine qu’il a droit aux prestations jusqu’à l’âge de la retraite.
[17]
Le 23 janvier 2003, le travailleur demande de nouveau
l’application de l’article
93. Une personne atteinte d'une invalidité physique ou mentale grave et prolongée est considérée invalide aux fins de la présente section.
Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice.
Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement entraîner le décès ou durer indéfiniment.
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1985, c. 6, a. 93.
[18]
L’article
116. Le travailleur qui, en raison d'une lésion professionnelle, est atteint d'une invalidité visée dans l'article 93 a droit de continuer à participer au régime de retraite offert dans l'établissement où il travaillait au moment de sa lésion.
Dans ce cas, ce travailleur paie sa part des cotisations exigibles, s'il y a lieu, et la Commission assume celle de l'employeur, sauf pendant la période où ce dernier est tenu d'assumer sa part en vertu du paragraphe 2° du premier alinéa de l'article 235.
__________
1985, c. 6, a. 116.
[19]
Le travailleur a donc droit de continuer de bénéficier et de
participer au régime de retraite offert dans l’établissement où il travaillait
au moment de sa lésion. Le travailleur était un employé du Centre hospitalier
de Maniwaki et participait au régime de la Commission administrative des
régimes de retraite et d’assurances (CARRA) qui est maintenant devenu le Régime
de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics (RREGOP). Le
travailleur rencontre donc les dispositions de l’article
[20]
À l’audience, le travailleur a indiqué qu’il était disposé à
payer les cotisations exigibles pour son régime de retraite et qu’il demande à
ce que la CSST verse la partie qui reviendrait à l’employeur, tel que prévu aux
dispositions de l’article
[21]
La révision administrative, dans sa décision, quant à elle,
prévoit que le travailleur n’a pas droit au versement des cotisations pour les
années 1989 à 1997, au moment où il prend sa retraite à 60 ans, puisqu’il n’a
pas respecté les délais qui sont prévus aux articles
[22]
La révision administrative commet une erreur de droit
importante en se référant aux dispositions de l’article
[23]
Le travailleur est donc justifié de demander l’application de
l’article
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête en contestation de monsieur Benoit Guilbault;
INFIRME la décision rendue par la révision administrative de la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 7 janvier 2004;
DÉCLARE que le
travailleur a droit à l’application des dispositions de l’article
ORDONNE à la Commission de la santé et de la sécurité du travail d’envoyer un avis au régime de retraite de l’employeur, le Centre hospitalier Maniwaki, afin de l’aviser d’émettre un avis de cotisation pour que la Commission de la santé et de la sécurité du travail verse la part des cotisations à son régime de retraite pour la période de mars 1989 jusqu’au moment où il a décidé de prendre sa retraite, la Commission de la santé et de la sécurité du travail assumant la part de l’employeur et monsieur Benoit Guilbault, sa propre part.
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Simon Lemire |
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Commissaire |
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Monsieur Yves Sicotte |
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C.S.N. |
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Représentant de la partie requérante |
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