Décision

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Gagné c. Chartrand

2010 QCCQ 9074

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

« Chambre civile »

N° :

500-32-116301-096

 

 

DATE :

 15 octobre 2010

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

DANIEL DORTÉLUS

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claudette gagné

Demanderesse

c.

debbie chartrand

Défenderesse

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JUGEMENT

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[1]           La Demanderesse réclame à la Défenderesse la somme de 2 733,68 $ à titre de dommages pour frais de vétérinaires, frais d'expertise, frais pour une intervention chirurgicale et autres résultant des blessures et traumatismes subis par sa chienne « Baby Lucy » un caniche miniature qui a été attaqué, le 31 août 2007, par la chienne de la Défenderesse, un Cocker Spaniel, nommée « Magic ».

[2]           La Défenderesse conteste la réclamation, elle nie que sa chienne ait attaqué ou causé des blessures à Baby Lucy. Selon la Défenderesse, la luxation du genou droit pour laquelle Baby Lucy a été opérée, deux mois après l'incident, est reliée à une condition préexistante qui affecte la race des caniches miniatures.

[3]           Il appartient à la Demanderesse de prouver que Magic a attaqué Baby Lucy, que les dommages réclamés résultent de l'attaque.

[4]           La preuve présentée est insuffisante pour établir que la luxation du genou droit, pour laquelle Baby Lucy a été traitée et opérée, a été causée par Magic.

[5]           Malgré la sympathie que peut susciter la situation de Baby Lucy, en regard de la fâcheuse situation dans laquelle elle s'était retrouvée, la demande doit être rejetée.

1.         les faits

1.1       Preuve en demande

[6]           Le 29 août 2007, la Demanderesse est assise sur un banc, dans un parc aménagé pour des chiens, à Ville LaSalle.

[7]           Son petit caniche, Baby Lucy, se trouve en dessous du banc quand la chienne de la Défenderesse arrive. Elle commence par fixer les yeux sur Baby Lucy, ensuite elle l'agresse violemment.

[8]           Monsieur Brian Frost intervient pour éloigner Magic de Baby Lucy.

[9]           Dans la déclaration écrite de M. Frost, produite par la Demanderesse pour valoir témoignage, il est indiqué :

« […]

When she put Lucy down, Lucy went under the bench and then, Magic the other dog which was beside me, almost went and attacked Baby Lucy which we heard her scream. And I put my knee on Magic and pulled her off of Baby Lucy we looked fast at her I didn't see much […] »

[10]        Le 2 septembre 2007, la Demanderesse amène Baby Lucy chez le vétérinaire.

[11]        Dans son rapport, le vétérinaire, Dr Luc Léger, mentionne sous la rubrique anamnèse :

« Distension synoviale au genou droit. Luxation patellaire médiale droite. »

[12]        Il indique, sous la section interprétation clinique :

« Luxation patellaire droite d'origine traumatique »

[13]        La reconstruction chirurgicale au genou droit fait partie du plan de traitement.

[14]        Le 30 novembre 2007, le Dr Léger procède à la chirurgie de reconstruction du genou droit sur Baby Lucy qui est hospitalisée durant 24 heures.

[15]        La Demanderesse a défrayé le coût de l'opération au montant de 907,29 $.

[16]        Après l'opération, elle doit garder Baby Lucy dans une cage durant un mois, le temps nécessaire pour sa réhabilitation.

[17]        Le 18 mars 2009, la Demanderesse transmet une mise en demeure à la Défenderesse lui réclamant la somme de 2 733,68 $ pour frais de vétérinaire, frais d'expertise, frais sur l'opération, médication douleur, frais pour achat de cage.

[18]        La Demanderesse affirme que Baby Lucy n'avait aucun problème avec son genou droit, ce n'est qu'après l'incident impliquant la chienne, Magic, qu'elle a commencé à boiter.

1.2       Preuve en défense

[19]        Le 29 août 2007, vers 6 h 30, la Défenderesse et trois autres personnes promènent leurs chiens, un Austria Sheppard, un Berger Allemand et un Cocker Spaniel.

[20]        Soudainement, les trois chiens se sont précipités vers le banc où est assise la Demanderesse. Les chiens ont approché la chienne miniature de la Demanderesse qui se trouvait par terre pour la « renifler ».

[21]        La Défenderesse affirme avoir pris Baby Lucy dans ses bras pour la cajoler. Dès qu'elle la remet par terre, elle part en courant vers la Demanderesse. Elle ne boitait pas.

[22]        Dans les trois semaines suivant l'incident, Baby Lucy courait dans le parc et jouait avec d'autres petits chiens.

[23]        La Défenderesse nie que sa chienne, Magic, ait agressé Baby Lucy ou qu'il lui ait causé la luxation de son genou droit.

[24]        Elle soulève qu'il s'est écoulé cinq jours entre la date de l'incident et la visite chez le vétérinaire.

[25]        Elle produit la documentation, tirée de Wikipédia, pour soutenir que la luxation du genou est une condition génétique à laquelle est prédisposée la race de caniches miniatures.

« Most cases of patellar luxation are medial and this is frequently a congenital problem in toy and miniature breed dogs. Breeds showing a predisposition for medial patellar luxation include miniature and toy Poodles, […] 

Rarely, it can be caused by some form of blunt trauma, but most frequently, it is a developmental congenital defect. In congenital cases, it is frequently bilateral. The condition can also be inherited through genetics. »

[26]        La Défenderesse souligne qu'en date du 17 mai 2008, le rapport du vétérinaire indique une luxation patellaire gauche, grade 1.


2.         analyse et motifs

[27]        Le fardeau de la preuve appartient à la Demanderesse.

[28]        En effet, en vertu des dispositions prévues aux articles 2803 et 2804 du Code civil du Québec[1] (« C.c.Q. »), afin de réussir dans son recours, la Demanderesse doit démontrer, par une preuve prépondérante que :

1.         La chienne, Magic, de la Défenderesse a attaqué sa chienne, Baby Lucy, et que des dommages, en l'occurrence, la luxation de son genou droit résulte de cette attaque;

2.         Les montants réclamés sont reliés aux dommages en question.

[29]        Il est en preuve qu'il y a eu une altercation entre trois chiens et Baby Lucy dans le parc. C'est ce que le Tribunal retient des témoignages de la Défenderesse et de la déposition écrite de M. Frost, ce dernier indique que Magic « almost went and attacked Baby Lucy ».

[30]        Il s'est écoulé cinq jours entre l'incident et le constat par le vétérinaire de la luxation du genou de Baby Lucy.

[31]        Il n'est pas invraisemblable que cette luxation ne soit pas causée lors de l'altercation, qu'elle résulte d'autre cause, notamment de la prédisposition génétique dont fait état de la documentation produite par la Défenderesse.

[32]        La preuve de la Demanderesse, qui est contredite par la Défenderesse, est insuffisante pour retenir la responsabilité de celle-ci et donner ouverture à l'application de l'article 1466 C.c.Q.[2] voulant que le propriétaire d'un animal est tenu de réparer les préjudices que l'animal a causés.

[33]        Pour ces motifs, la demande doit être rejetée.

[34]        POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[35]        Rejette la demande.

 

 

__________________________________

DANIEL DORTÉLUS, J.C.Q.

 

Date d’audience :

4 octobre 2010

 



[1]     Code civil du Québec, L.Q., 1991, c. 64. art. 2803 et 2804.

[2]     Précité, note 1, art. 1466.

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