Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Québec

QUÉBEC, le 29 janvier 2001

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIERS :

130934-31-0002

143629-31-0007

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Pierre Simard, avocat

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉ DES MEMBRES :

Serge Martin,

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Pierre Banville,

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIERS CSST :

108932757-1

108932757-2

AUDIENCE TENUE LE :

26 octobre 2000

 

 

 

 

108932757-3

 

 

 

108932757-4

À :

Québec

 

108932757-5

 

 

 

108932757-6

_______________________________________________________

 

108932757-7

 

 

 

108932757-8

 

 

 

108932757-9

MICHEL MERCIER

 

108932757-10

 

 

 

108932757-11

 

 

 

108932757-12

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LES CONTRÔLES A.C. INC.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

Et

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ

DU TRAVAIL

Direction régionale - Québec-Nord

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTERVENANTE

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 31 janvier et le 10 juillet 2000, monsieur Michel Mercier, le travailleur, dépose à la Commission des lésions professionnelles deux requêtes par lesquelles il conteste les décisions émises par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), respectivement le 20 décembre 1999 et le 6 juin 2000 suite à une révision administrative.

[2]               Comme ces décisions émises par la révision administrative portent sur plusieurs demandes de révision, la Commission des lésions professionnelles résumera, à partir des numéros de dossier de la révision administrative, chacun des sujets abordés.

[3]               Ainsi, à la décision du 20 décembre 1999, on dispose des numéros de dossier 108932757-00001 à 108932757-00006.

[4]               Dans le dossier 108932757-00001 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision introduite le 1er mars 1999 à l’encontre d’une décision émise par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 18 février 1999, décision à l’effet de refuser de reconsidérer une décision initiale du 17 décembre 1998 fixant le montant du salaire brut retenu aux fins d’établir le montant de l’indemnité de remplacement du revenu auquel le travailleur a droit.  La révision administrative conclut que cette contestation est devenue sans objet suite à la reconsidération survenue le 30 mars 1999 et modifiant le salaire annuel retenu aux fins d’établir le montant de l’indemnité de remplacement du revenu du travailleur, en l’occurrence la décision portait le revenu de 24 962,88 $ à 29 959,66 $.

[5]               Dans le dossier 108932757-00002 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision introduite le 4 juin 1999 par le travailleur à l’encontre d’une décision rendue par la CSST le 7 mai 1999.  Elle confirme cette décision et déclare que le travailleur n’a pas le droit au versement d’une allocation d’aide personnelle à domicile.

[6]               Dans le dossier 108932757-00003 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision du 26 avril 1999 introduite par le travailleur à l’encontre d’une décision émise par la CSST le 25 mars 1999.  Elle confirme la décision initiale et déclare que le travailleur ne peut bénéficier des dispositions de l’article 116 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

[7]               Dans le dossier 108932757-00004 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision introduite le 26 avril 1999 par le travailleur à l’encontre d’une décision émise par la CSST le 25 mars 1999.  Elle maintient la décision contestée et déclare que le travailleur n’a pas le droit de recevoir d’intérêts sur les sommes qui lui furent avancées par la Commission de la construction du Québec (la CCQ) alors qu’il est en attente de décision finale, soit l’admissibilité de sa réclamation.  En conséquence, en application de la loi, le travailleur a le droit de recevoir uniquement des intérêts pouvant exister sur la différence entre l’indemnité que doit payer rétroactivement la CSST et les sommes d’argent reçues par le travailleur et avancées par la CCQ.

[8]               Dans le dossier 108932757-0005 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision introduite le 22 novembre 1999 par le travailleur à l’encontre d’une décision initiale émise par la CSST le 29 octobre 1999.  Elle confirme la décision initiale et conclut que le travailleur n’a pas le droit d’obtenir le remboursement des frais d’achat du médicament appelé Viagra, la consommation de ce médicament n’étant pas rattachée à sa lésion professionnelle.

[9]               Dans le dossier 108932757-00006 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision introduite le 22 novembre 1999 par le travailleur à l’encontre d’une décision émise par la CSST le 22 octobre 1999.  Elle confirme la décision initiale et déclare que le travailleur n’a pas le droit d’obtenir le remboursement d’acquisition de bois de chauffage.

[10]           Par sa décision du 6 juin 2000, la CSST dispose des numéros de dossier 108932757-00007 jusqu’à 108932757-00012.

[11]           Dans le dossier 108932757-00007 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision introduite le 22 décembre 1999 par le travailleur à l’encontre d’une décision émise par la CSST le 3 septembre 1999.  Elle déclare irrecevable la demande de révision introduite tardivement par le travailleur, celui-ci n’ayant soumis aucun motif raisonnable permettant de le relever des conséquences de ce retard.

[12]           Dans le dossier 108932757-00008 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision introduite le 22 décembre 1999 par le travailleur à l’encontre d’une décision émise par la CSST le 2 décembre 1999.  Elle confirme cette décision et déclare que le travailleur n’a pas le droit d’obtenir les frais encourus lors de son déménagement, le 22 juin 1999.

[13]           Dans le dossier 108932757-00009 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision introduite le 24 février 2000 par le travailleur à l’encontre d’une décision émise par la CSST le 13 janvier 2000.  Elle déclare irrecevable la demande de révision comme étant produite tardivement, le travailleur n’ayant fait valoir aucun motif raisonnable permettant de le relever des conséquences de son retard à agir dans les délais impartis par la loi.

[14]           Dans le dossier 108932757-00010 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision introduite le 24 février 2000 par le travailleur à l’encontre d’une décision émise par la CSST le 4 février 2000.  Elle confirme la décision contestée et déclare que le travailleur n’a pas subi de rechute, récidive ou aggravation, le 28 décembre 1999 de sa lésion professionnelle initiale du 13 octobre 1994.

[15]           Dans le dossier 108932757-00011 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision introduite le 29 février 2000 par le travailleur à l’encontre d’une décision émise le 10 février 2000 par la CSST.   Elle confirme la décision, décision à l’effet de reconsidérer la décision émise le 4 février 2000 afin de corriger une erreur relative à la date de l’événement initial, en l’occurrence, modifier le 13 octobre 1999 par le 13 octobre 1994.

[16]           Dans le dossier 108932757-00012 :

La révision administrative dispose d’une demande de révision introduite le 24 février 2000 par le travailleur à l’encontre d’une décision émise par la CSST le 10 février 2000.  Elle confirme la décision contestée et déclare que le travailleur n’a pas le droit d’obtenir le remboursement des frais de ramonage de la cheminée de son domicile.

[17]           Une audience fut dûment tenue devant la Commission des lésions professionnelles, siégeant à Québec, le 26 octobre 2000.  Le travailleur ainsi que la CSST étaient présents et représentés.  Pour sa part, l’employeur, Les Contrôles A.C. inc., ne s’est pas présenté à cette audience.

 

L'OBJET DES CONTESTATIONS

[18]           Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer les décisions contestées et de déclarer :

-                     dossier 108932757-00001 :

Qu’effectivement, la révision administrative n’avait pas à se prononcer sur ce sujet, celui-ci étant réglé suite de la reconsidération survenue dans le cadre des rencontres entre le travailleur et les agents de la CSST, le tout conformément aux décisions émises ultérieurement.

 

-                     dossier 108932757-00002 :

Que le travailleur a le droit d’obtenir, rétroactivement au 13 octobre 1994, de l’aide personnelle à domicile, celui-ci étant incapable de prendre soin de lui-même et d’effectuer sans aide les tâches domestiques qu’il effectuerait normalement si ce n’est de sa lésion professionnelle.

 

-                     dossier 108932757-00003 :

Que le travailleur est invalide au sens de l’article 93 de la loi et, qu’en conséquence, il doit bénéficier des dispositions de l’article 116 de la loi, en l’occurrence le droit de continuer à participer à son régime de retraite.

 

-                     dossier 108932757-00004 :

Qu’en application de l’article 364, le travailleur a le droit d’obtenir l’entier remboursement des intérêts dus sur les indemnités qui lui avaient d’abord été refusées et qui lui sont accordées, rétroactivement, suite à la décision émise par la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d’appel), le tout à la date de sa réclamation.

 

-                     dossier 108932757-00005 :

Que le travailleur, en application des articles 188 et 189 de la loi a le droit d’obtenir le remboursement des coûts d’acquisition du médicament Viagra.

 

 

-                     dossier 108932757-00006 :

Que le travailleur chauffe principalement son domicile au bois et, qu’en conséquence, il a le droit d’obtenir le remboursement des frais d’acquisition du bois de chauffage.

 

-                     dossier 108932757-00007 :

Que le travailleur a fait valoir des motifs raisonnables permettant d’excuser son retard à agir et, qu’en conséquence, sur le fond du litige, il a le droit d’obtenir le remboursement des coûts d’acquisition des médicaments Rhovane, Diovan et Novo-Veramil SR.

 

-                     dossier 108932757-00008 :

Que le travailleur a le droit d’obtenir le remboursement des coûts reliés à son déménagement dans son nouveau domicile, en date du 22 juin 1999.

 

-                     dossier 108932757-00009 :

Que le travailleur a fait valoir des motifs raisonnables permettant d’excuser son retard à agir et de déclarer, sur le fond du litige, que celui-ci a le droit d’obtenir le remboursement des frais d’entretien de son domicile, en l’occurrence le déneigement de ses toitures.

 

-                     dossier 108932757-00010 :

Que le travailleur a bien subi une rechute, récidive ou aggravation de sa lésion professionnelle initiale du 13 octobre 1994, le tout en date du 28 décembre 1999 entraînant une entorse dorsale ainsi qu’un infarctus du myocarde.

 

-                     dossier 108932757-00011 :

Que la date de la lésion professionnelle initiale est bien le 19 octobre 1994.

 

-                     dossier 108932757-00012 :

Que le travailleur a le droit d’obtenir le remboursement des frais d’entretien de son domicile portant sur les frais de ramonage de sa cheminée.

 

 

LES FAITS

[19]           Des documents produits au dossier ainsi que de la preuve testimoniale administrée lors de l’audience, la Commission des lésions professionnelles résumera les éléments pertinents à notre litige.

[20]           Lors de cette audience, la Commission des lésions professionnelles a entendu le travailleur et reçu les argumentations des représentants du travailleur ainsi que de la CSST.

[21]           Le travailleur est électricien commercial et industriel chez l’employeur.  Il travaille dans le domaine de la construction.

[22]           Le 30 janvier 1995, le travailleur signe le formulaire «Réclamation du travailleur» et complète, le 31 janvier 1995, une annexe à sa réclamation pour maladie professionnelle due à des mouvements répétitifs.  À cette annexe, le travailleur explique qu’à partir du mois de juin 1994, de façon intermittente, il a commencé à ressentir de la douleur à la hanche droite, douleur irradiant tout le long du membre inférieur droit.

[23]           À cette époque, il attribue l’apparition de cette douleur à la fatigue occasionnée par le port régulier, sur sa hanche droit, de son sac d’outils d’électricien pesant de 10 à 15 livres.  Il consultait une première fois le docteur Guy April, le 30 septembre 1994.  Suite à la prise de clichés radiographiques, le docteur April l’informait que ceux-ci n’avaient révélé aucune anomalie.  En conséquence, le travailleur poursuit ses activités professionnelles.

[24]           Toujours au formulaire précité, le travailleur ajoute que vers la deuxième semaine du mois d’octobre 1994, alors qu’il est dans une échelle, il a subi une quasi-chute lorsque son membre inférieur droit s’est dérobé.  Cet incident le laisse craintif quant à la fiabilité de son membre inférieur droit.

[25]           En conséquence, bénéficiant d’une période de relâche, il reconsulte le docteur April le ou vers le 22 novembre 1994.

[26]           Ce médecin décide de soumettre le travailleur à une série d’examens dont une tomodensitométrie à la colonne lombaire, le 8 décembre 1994 ainsi qu’une scintigraphie osseuse fait à la même date.

[27]           La tomodensitométrie de la colonne lombaire révèle que le travailleur présente une discopathie dégénérative en L4-L5 avec bombement circonférenciel du disque, greffée sur un petit canal congénital, le tout entraînant un début de sténose du canal spinal.

[28]           D’autre part, le travailleur était référé au docteur Yves Brault, physiatre, qui émet un rapport médical le 24 janvier 1995.  Tenant compte de son examen clinique objectif et des examens radiologiques, ce médecin émet des diagnostics de discarthrose L4-L5 avec forte probabilité d’hernie discale ainsi qu’une bursite trochantérienne droite.

[29]           Soulignons que pendant cette période le travailleur n’avait pas encore été appelé au travail par son employeur.

[30]           Dès lors, lorsque celui-ci contacte le travailleur, ce dernier l’informe de la situation ce qui entraîne l’introduction de la réclamation du travailleur.

[31]           Pour sa part, le docteur April, le 25 janvier 1995, émet un diagnostic de dégénérescence discale L4-L5 avec protrusion du disque entraînant une sténose du canal spinal.  Il indique à son attestation médicale «maladie professionnelle».

[32]           Le 15 février 1995, la CSST émet une décision rejetant la réclamation du travailleur comme n’étant pas une maladie professionnelle.

[33]           Le 8 mars 1995, le travailleur introduit une demande de révision de la décision du 15 février 1995.

[34]           En date du 4 juillet 1995, le travailleur signe un document issu de la CCQ portant le titre «Avance d’indemnité sans intérêt» dans lequel il est entendu :

«J’autorise par la présente la Commission de la santé et de la sécurité du travail à verser directement à la Commission de la construction du Québec, ou à tout autre organisme désigné par la Commission de la construction du Québec, toute indemnité payable de remplacement du revenu qui me serait dues jusqu’à ce que les avances qui me sont consenties par la Commission de la construction du Québec aient été remboursées au complet.

Aussi, dans le cadre du programme d’avance d’indemnité sans intérêt et, en regard de la réclamation pour l’accident de travail visé dans la rubrique : (identification), j’autorise la Commission de la santé et de la sécurité du travail et la Commission de la construction du Québec à échanger les renseignements et les documents concernant A) les périodes où des prestations d’indemnité de remplacement du revenu ont été versées par la Commission de la santé et de la sécurité du travail et B) les périodes couvertes ainsi que les sommes versées par la Commission de la construction du Québec en application de ce programme d’avance d’indemnité.

 

Je m’engage en outre à rembourser moi-même toute portion de ces avances qui ne serait pas remboursée par la Commission de la santé et de la sécurité du travail si ladite Commission omet de rembourser la Commission de la construction du Québec suite à une décision rendue en ma faveur.

Je fait cette déclaration solennelle, la croyant consciencieusement vraie et sachant qu’elle a la même valeur et le même effet que si elle était sous serment en vertu de la Loi de la preuve du Canada.»

 

 

 

[35]           Au dossier on retrouve une lettre datée du 24 août 1995 originant de la CCQ et adressée à la CSST dans laquelle il est fait mention que pour la période du 6 mars 1995 au 26 août de la même année, on a avancé une somme de 8 750 $ au travailleur.

[36]           Par la suite, la CCQ envoie des états de compte à la CSST pour toutes les périodes supplémentaires d’indemnité versée au travailleur.

[37]           Par ailleurs, un rapport de résonance magnétique effectué le 9 août 1995 permet d’établir que le travailleur présente une hernie discale centro-latérale droite en L4-L5 qui vient légèrement comprimer la racine de L5 droite.  On note aussi une discopathie dégénérative multi-étagée de L1 à L5.

[38]           Dans ce contexte, le docteur Yves Brault, à son rapport du 15 novembre 1995 conclut que le travailleur présente une hernie discale centro-latérale droite L4-L5 pour laquelle on doit procéder à une intervention chirurgicale.  Il ajoute que la condition du travailleur est due soit à tous les efforts qu’il doit effectuer dans l’exécution de ses fonctions d’électricien, soit à l’événement précis survenu à la mi-octobre 1994, alors que le travailleur a perdu pied dans une échelle.

[39]           Le 23 novembre 1995, le Bureau de révision de la CSST entendait le travailleur et procédait à évaluer de nouveau l’admissibilité de la réclamation en tenant compte des éléments de preuve rapportés aux présentes.  Le Bureau de révision émettait sa décision le 18 décembre 1995 aussi bien sur les notions de maladie professionnelle que d’accident du travail.  Il concluait que le travailleur n’était pas victime d’une lésion professionnelle et que les conditions de dégénérescence discale et de hernie discale résultait d’une condition personnelle et non rattachable au travail.

[40]           Le 17 mai 1996, le travailleur signe une nouvelle réclamation du travailleur dans laquelle il allègue qu’il est victime, à partir du 7 mai 1997, d’une rechute, récidive ou aggravation de sa hernie discale L4-L5 droite.

[41]           La CSST émettait une décision le 27 mai 1996 dans laquelle elle rejette cette nouvelle réclamation du travailleur au motif que la réclamation initiale du travailleur n’a pas été reconnue comme lésion professionnelle.  Cette décision de la CSST est portée en révision tel qu’en fait foi la demande de révision du 31 mai 1996.

[42]           Pour sa part, la CCQ avise la CSST en date du 17 juillet 1996 qu’elle a avancé une somme de 13 020 $ au travailleur pour la période du 6 mars 1995 au 20 novembre de la même année.

[43]           Le 24 juillet 1996, le docteur Brault émet une attestation médicale dans laquelle il indique que le travailleur fut opéré, le 7 février 1996, pour une discoïdectomie L4-L5 droite.  Suite à cette opération, le travailleur a présenté une courte période d’amélioration de sa symptomatologie.  En effet, ces symptômes sont réapparus rapidement, le travailleur présentant des épisodes d’«embarrure lombaire».

[44]           Le docteur Brault souligne qu’une tomodensitométrie lombaire faite le 7 mai 1996 a révélé, en L4-L5, une fibrose périneurale entraînant une déformation du sac dural.  Toujours à ce rapport médical, il souligne que le travailleur se plaint de difficulté d’érection, de douleur constante.  Son examen clinique objectif démontre des pertes d’amplitude articulaire avec légères atteintes sensitives au territoire de la racine L3.  Il présente un Lasègue.  Dans ce contexte, ce médecin émet des diagnostics de radiculopathie résiduelle L5 post-discoïdectomie ainsi que de fibrose périneurale.

[45]           Par la suite, toujours pour les mêmes diagnostics, le docteur Brault assume le suivi médical du travailleur.

[46]           Ainsi, le 7 janvier 1997, il souligne que le travailleur est dépressif et qu’il présente toujours la même symptomatologie pour laquelle son médecin généraliste le réfère en physiothérapie et ajoute que celui-ci n’est pas en mesure de reprendre son travail.  Ce suivi médical se poursuit tout au long de l’année 1997 ainsi que le début de l’année 1998 tel qu’il appert des attestations médicales produites au dossier.

[47]           Ainsi, à l’attestation du 30 janvier 1998, on constate que le travailleur offre toujours la même plainte subjective de douleur constante à la région lombaire avec difficulté à la mobilisation.  Soulignons que le docteur Brault le suit toujours pour les deux diagnostics énoncés précédemment.

[48]           Par ailleurs, la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d’appel) émettait une première décision, en date du 18 août 1996, dans le contexte de la contestation introduite par le travailleur auprès de cet organisme suite à l’émission de la décision du Bureau de révision du 18 décembre 1995.  La Commission d’appel confirme la décision du Bureau de révision pour les mêmes motifs.

[49]           La Commission d’appel était saisie d’une requête présentée en vertu de l’article 406 de la loi.  Elle émet sa décision le 11 février 1997.  Elle conclut que la requête en révision est recevable sur deux questions en litige, en l’occurrence décider si le diagnostic de bursite du grand trochanter est en relation avec une lésion professionnelle et, en second lieu, de l’existence d’un accident du travail au mois d’octobre 1994.  En conséquence, on ordonne une reconvocation des parties devant la Commission d’appel.

[50]           La Commission d’appel émettait une troisième décision, le 20 janvier 1998.  Cette décision porte sur la reconnaissance d’une lésion professionnelle en date du 7 mai 1996, dans le contexte de la réclamation introduite par le travailleur pour rechute, récidive ou aggravation à cette date.  Or, la Commission d’appel, à son dispositif, confirme la décision rendue par le Bureau de révision le 18 décembre 1995 ainsi qu’une décision émise par la CSST le 15 février 1995.  De plus, on déclare que le travailleur ne fut pas victime d’une lésion professionnelle le 13 octobre 1994 ni le 30 janvier 1995.  Finalement, elle constate que le seul diagnostic compatible avec la plainte du travailleur est celui de hernie discale L4-L5 et d’une discopathie dégénérative multi-étagée.

[51]           Une nouvelle requête en révision pour cause, selon l’article 406, est introduite devant la Commission des lésions professionnelles qui se saisit du litige le 23 juin 1998.  La Commission des lésions professionnelles émettait sa décision le 11 août 1998.  À cette décision, on conclut dans un premier temps, que la décision du 20 janvier 1998 a bien disposé du premier sujet sur lequel elle devait se prononcer, en l’occurrence la reconnaissance ou non de la bursite du grand trochanter comme étant une lésion professionnelle.

[52]           Par ailleurs, sur le second sujet, elle conclut qu’effectivement le commissaire dans sa décision du 20 janvier 1998 n’a pas étudié la réclamation en fonction d’une possible relation entre un diagnostic de hernie discale attribuable à un accident du travail survenu en octobre 1994.  En conséquence, elle accueille en partie la requête en révision et ordonne la reconvocation des parties pour finalement disposer de la notion d’accident du travail à la mi-octobre 1994 dans le contexte d’une hernie discale.

[53]           La Commission des lésions professionnelles émettait une décision, le 3 décembre 1998, sur ce sujet ainsi que sur le refus de la réclamation pour rechute, récidive ou aggravation qui se serait manifestée le 7 mai 1993.  La Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur a bien subi une lésion professionnelle le 13 octobre 1994 ayant entraîné l’apparition de sa hernie discale pour laquelle il fut traité ultérieurement.  De plus, on ajoute, qu’en l’absence de consolidation de la lésion professionnelle initiale, il faut considérer la réclamation du 7 mai 1996 comme étant une poursuite de l’incapacité du travailleur acquise suite à l’événement du 13 octobre 1994 et toujours pour une symptomatologie se rattachant à sa lésion professionnelle.

[54]           Au niveau médical, le docteur Brault poursuit toujours son suivi médical tel qu’il appert des rapports produits au dossier.

[55]           Ce médecin, le 1er février 1999, émet un rapport final d’évaluation dans lequel il consolide la lésion à cette date et soumet une évaluation de l’atteinte permanente ainsi que des limitations fonctionnelles.  À ce rapport, à la plainte subjective, il souligne que le travailleur présente une faiblesse ainsi qu’une fatiguabilité plus marquée du membre inférieur droit que gauche.  On souligne que le genou droit cède aisément et qu’il doit se méfier de la descente dans les escaliers.  De plus, lorsqu’il gravit des escaliers, il doit se méfier de ne pas accrocher son membre inférieur droit, celui-ci ne pouvant se soulever aussi haut qu’espéré.

[56]           Toujours à ce rapport, le travailleur présente des douleurs constantes avec sciatalgie aux deux membres inférieurs ayant des effets importants sur son mode de vie.  Le travailleur ne peut tolérer de position stationnaire (assis-debout) pour plus d’une heure, il devait s’étendre deux à trois fois par jour.  Le travailleur ajoute qu’il ne peut faire aucun effort, même pas de pouvoir manipuler des sacs d’épicerie.  Par la suite, le docteur Brault décrit son examen clinique objectif ainsi que les résultats des dernières radiographies où l’on peut noter des modifications cicatricielles au niveau L4-L5 avec une petite hernie discale centro-latérale droite.

[57]           En conséquence, il émet les limitations fonctionnelles suivantes :

«-         éviter de soulever, porter, pousser de façon répétitive ou fréquente des charges dépassant 5 kilogrammes;

-          éviter la marche de longue durée;

-          éviter la même posture qu’il soit debout ou assis plus de 30 à 60 minutes;

-          éviter de travailler dans des positions instables surtout celles qui exigent une demi-flexion antérieure du tronc;

-          éviter d’effectuer des mouvements répétitifs des membres inférieurs;

-          éviter les mouvements répétitifs ou fréquents de flexion, d’extension de torsion même de la colonne lombaire même de faible amplitude.»

 

 

[58]           Ce médecin ajoute que le travailleur présente une lombosciatalgie sévère malgré la discoïdectomie effectuée.  Il implique principalement un phénomène de fibrose périneurale en L4-L5.

[59]           Il ajoute que le travailleur a besoin d’une aide familiale à domicile, recommande l’acquisition d’un TENS ainsi que d’une évaluation des capacités professionnelles du travailleur au Centre François-Charon afin de décider des possibilités réelles de retour sur le marché du travail.

[60]           Finalement, cette évaluation se complète par l’octroi d’un déficit anatomo-physiologique de 16 % avec un pourcentage de douleurs et perte de jouissance de la vie de 3.4 %.

[61]           Le 25 février 1999, la CSST émettait une décision dans laquelle elle reconnaissait que le travailleur présentait un taux d’atteinte permanente de 19.20 %.

[62]           La CSST confie à madame Hélène Martin, ergothérapeute, mandat de procéder à l’évaluation des besoins particuliers du travailleur en relation avec son autonomie.  Madame Martin complète un premier rapport le 20 avril 1999.  À ce rapport, elle prend en considération un diagnostic de lombosciatalgie bilatérale et d’un état post-discoïdectomie L4-L5 droite.

[63]           Lors de cette évaluation, le travailleur est marié et a quatre filles.  Il informe madame Martin qu’il déménagera dans un avenir rapproché.  Quant au lieu qu’il habite, il s’agit d’une maison dont il est locataire.  On accède à la maison par un escalier de six marches sans main courante.  La chambre à coucher est au deuxième étage, les escaliers n’ayant aucune main courante.  Des photographies sont annexées à ce rapport.

[64]           D’autre part, à l’évaluation des besoins en aide personnelle, elle note que le travailleur déclare que sa demande d’aide personnelle à domicile vise des périodes où il ne peut faire certain geste du quotidien sans aide.  Ces périodes de crise aiguë se produisent de cinq à six fois annuellement.  Or, l’évaluation de madame Martin se fait alors que le travailleur n’est pas en crise.  Dans ce contexte, elle constate que le travailleur peut se lever et se coucher sans aide.  Cette activité serait facilitée si son lit était surélevé de quelques pouces.

[65]           On constate que le travailleur peut se laver seul mais qu’il a besoin de surveillance constante lorsqu’il est dans la douche.  On recommande l’installation d’un tapis antidérapant ainsi que de deux barres d’appui.  Quant à l’habillage et le déshabillage, elle lui fournit un bâton d’habillage et un enfile bas, de plus elle fournit un chausse pied, ces équipements devant permettre au travailleur de réaliser ses activités avec plus de facilité.

[66]           Pour les soins vésicaux et soins intestinaux, elle constate que le siège de toilette est trop bas et recommande donc l’ajout d’un siège surélevé avec un bras d’appui.

[67]           Quant à la préparation des repas, elle note qu’avant la lésion professionnelle le travailleur faisait son déjeuner et son lunch pour le travail.  Son épouse faisait la préparation des repas pour la famille.  Dans ce contexte, elle conclut que les limitations fonctionnelles reconnues par le docteur Brault n’empêchent pas le travailleur de réaliser ses deux activités.

[68]           Pour le ménage léger, elle indique qu’antérieurement à sa lésion professionnelle le travailleur n’effectuait pas cette activité.  Plutôt, le travailleur participait au ménage lourd et, qu’en conséquence, il ne peut plus exécuter ce type de travail.  Enfin, il ne faisait pas le lavage du linge avant sa lésion professionnelle et que, par ailleurs, il peut toujours se déplacer pour l’approvisionnement.  En conclusion, elle ajoute :

«(...)

Par expérience, «la présence de fibrose périneurale, modification cicatricielle, en L4-L5 tel que démontré à la TDM lombaire du 31 août 98» présente chez monsieur Mercier, extrait du rapport du docteur Brault, se traite avec succès si nous utilisons un programme d’exercices personnalisés.

(...)»

 

 

 

[69]           D’autre part, nous retrouvons une grille d’évaluation des besoins d’aide personnelle à domicile complétée le 19 avril 1999.

[70]           Ce rapport de madame Martin est complété par un rapport annexe, le 7 mai 1999 auquel la Commission des lésions professionnelles réfère le lecteur.

[71]           Au niveau médical, le travailleur revoyait le docteur Brault le 31 mai 1999.  À ce rapport, le travailleur déclare au docteur Brault qu’il présente toujours des douleurs constantes qui, lors des crises pouvant durer plusieurs jours, le rend totalement incapable de fonctionner.

[72]           Son examen clinique objectif reflète les constats antérieurs en ce que le travailleur présente une boiterie au membre inférieur droit avec des limitations d’amplitude articulaires au niveau lombaire.  À sa section «Recommandations», le docteur Brault prend connaissance du rapport complété par madame Martin.  Il conclut que cette dernière émet des opinions «pour le moins surprenantes».  En effet, concernant la fibrose périneurale, ce médecin ajoute :

«(...)

 

J’aimerais beaucoup connaître de la part de madame Martin, quels son ses exercices personnalisés, car en ce qui me concerne, médecin spécialiste depuis 25 ans, nous avons extrêmement de difficulté à corriger les modifications de fibrose périneurale.  D’ailleurs, la littérature médicale est très éloquente à ce sujet : les chances de succès sont très pauvres de l’ordre d’à peine 8-13 %.  D’autant plus que du point de vue chirurgical, on ne recommande nullement de reprendre ou de faire révision chirurgicale car le succès est encore aussi pauvre.

 

En ce qui nous concerne, il y a certes mauvaise perception du travailleur et probablement du dossier médical.  D’autant plus, tel que je le mentionne à l’item diagnostic, nous avons en L4 L5 une récidive d’hernie discale centro-latérale droite qui vient d’autant plus ajouter un élément douloureux et certes très inconfortable chez ce travailleur.

 

(...)»

 

 

 

[73]           Encore une fois, le docteur Brault réitère que l’on doit procéder à une évaluation du travailleur sur une période de trois à cinq jours au Centre François Charon.  Il ajoute que le travailleur est en invalidité totale à tout travail rémunérateur pour le moment.

[74]           Le docteur Brault, le 4 octobre 1999, réévalue le travailleur.  Au point A), il énonce la médication que prend le travailleur dont le médicament Diovan, médicament anti-hypertenseur.  Sur celui-ci, il note que cette médication s’est vue obligatoire devant les contraintes non seulement physiques mais aussi psychologiques face à aux symptômes douloureux présentés par le travailleur, symptômes qui auraient enclenché une hypertension artérielle.

[75]           Au point B) de son évaluation, il souligne que le travailleur présente des problèmes sexuels, en l’occurrence l’absence d’érection, depuis qu’il a présenté ses problèmes de lombo-sciatalgie et ceci malgré l’opération subie.  Il ajoute :

«On sait que cette problématique est très documentée dans la littérature médicale et qu’elle fait partie intégrante des complications d’un problème lombo-sciatalgique et même s’il y a eu décompression chirurgicale.  D’autre plus qu’ici, nous sommes en présence d’une fibrose périneurale qui touche à la fois L5 et qui peut même toucher un peu tout le canal rachidien.  À mon avis cette complainte est définitivement inter reliée aux problèmes lombaires.»

 

 

[76]           En conséquence, ce médecin prescrit la prise de Viagra, le tout justifié sur la base de l’accident du travail et des conséquences de la lésion professionnelle.  Finalement, il note que le travailleur sera évalué, très bientôt, au Centre François Charon.

[77]           D’autre part, au dossier de la Commission des lésions professionnelles on retrouve différents documents portant sur l’évaluation des montants d’indemnité de remplacement du revenu payable rétroactivement au travailleur le tout avec intérêts.

[78]           À ces documents s’ajoutent des demandes introduites par la représentant du travailleur portant sur la révision de son revenu brut, sur le remboursement des intérêts rattachables au paiement rétroactif d’indemnité de remplacement du revenu, sur l’application de l’article 116 de la loi, sur le remboursement des coûts des médicaments Rhovane, Diovan, Novo-Veramil SR et Viagra, sur le remboursement des coûts de déménagement engagés par le travailleur, le 22 juin 1999 au montant de 672,89 $, sur la location d’une aide personnelle à domicile rétroactivement à la date d’arrêt de travail de novembre 1994, sur le remboursement du prix d’acquisition du bois de chauffage, sur le remboursement du déneigement du stationnement, sur l’entretien du domicile et plus particulièrement, le déneigement de la toiture, les frais de ramonage de la cheminée ainsi que des demandes, factures, soumissions, le tout produit au dossier.

[79]           La Commission des lésions professionnelles réfère le lecteur aux argumentations produites par la représentante du travailleur sur ce sujet et décrivant l’ensemble des demandes ainsi que les sources législatives auxquelles elle se réfère.

[80]           D’autre part, le 28 décembre 1999, le travailleur subissait une chute à l’extérieur de son domicile.  En effet, il déclare qu’en descendant l’escalier, la jambe droite s’est dérobée et qu’il a fait une chute sur le côté droit.  Comme il ne pouvait plus bouger, sa conjointe a appelé immédiatement l’ambulance pour le transporter au centre hospitalier.  Lors de l’audience, il précise qu’on l’a gardé toute la nuit pour le retourner à son domicile, le lendemain.

[81]           Or, le travailleur allègue que le ou vers le 30 décembre 1999, de retour chez lui, alors qu’il regarde le foyer, il tente de se lever et fait un infarctus du myocarde pour lequel on a dû le transporter de nouveau à l’hôpital.  Il ajoute que les médecins lui auraient dit que son infarctus était dû à la chute du 28 décembre 1999.  Le travailleur rappelle qu’il prenait du Diovan, en l’occurrence des médicaments pour contrôler sa tension artérielle. 

[82]           Lors de l’audience, le travailleur produit l’ensemble des rapports médicaux concernant ses incidents, rapports qui par ailleurs étaient déjà produits au dossier.

[83]           Aux notes médicales du 28 décembre 1999, on constate que le travailleur a rapporté effectivement la chute qu’il a fait dans les marches.  Le travailleur est très anxieux et présente une hypersensibilité pan-corporelle.  Il se plaint de douleurs cervicales, dorsales, à la hanche droite et jusqu’aux orteils.

[84]           Aux notes du 29 décembre 1999, on rapporte que le travailleur a passé une bonne nuit et qu’il est cliniquement amélioré.  Des radiographies de la colonne cervicale et dorsale se révèlent sans particularité.  On retient donc un diagnostic d’entorse dorsale et prescrit une médication appropriée.

[85]           Or, aux notes de l’urgence du 30 décembre 1999, on constate que le travailleur est hospitalisé de nouveau présentant des irradiations de douleurs au bras gauche avec des malaises épigastriques.

[86]           Le travailleur produit sa réclamation pour rechute, récidive ou aggravation survenue le 28 décembre 1999, réclamation qui est rejetée le 4 février 2000 en ce que l’on ne reconnaît pas de lien entre l’entorse dorsale et la lésion professionnelle initiale.

[87]           Lors de l’audience, la Commission des lésions professionnelles, avec l’assistance de la représentante du travailleur ainsi que de la CSST, a revu l’ensemble des réclamations du travailleur tout en interrogeant celui-ci.

[88]           Quant à l’aide personnelle à domicile, le travailleur souligne qu’avant sa lésion professionnelle, il vivait avec sa conjointe et ses trois enfants.  Tous deux travaillaient à plein temps.  En conséquence, il souligne qu’il partageait généralement les tâches domestiques.  Il ajoute que sa conjointe n’avait pas de permis de conduire.  Or, suite à son arrêt de travail en novembre 1994, le travailleur déclare qu’il fut en crise aiguë présentant des douleurs constantes ainsi que des embarrures l’empêchant de participer aux tâches domestiques qu’il effectuait auparavant.  Bien plus, sa conjointe aurait dû quitter le travail pour pouvoir s’occuper de lui.

[89]           Or, en 1996, sa conjointe l’a quitté pour une période d’approximativement six mois.  Il avait la garde de ses enfants et il s’est donc retrouvé seul et sans aide.  Dans ce contexte, bénéficiant de l’aide de sa famille ainsi que d’un soutien à la famille dispensé par le C.L.S.C., il a pu demeurer à domicile.  Sur ce sujet, il produit, sous la cote T-1, les relevés du C.L.S.C. de Portneuf démontrant une assistance du mois de novembre 1996 au mois de mars 1997.  D’ailleurs, à ce document, on note l’assistance du frère du travailleur.

[90]           D’autre part, suite à son intervention chirurgicale, le travailleur ne pouvait s’occuper adéquatement de lui-même.

[91]           Le travailleur ajoute que pendant toute cette période, et suite à son intervention chirurgicale, il présente des périodes de crise aiguë cinq à six fois par année l’empêchant de vaquer à quelques occupations que ce soit pendant des périodes de une à trois semaines.

[92]           Il soutient que lors de l’évaluation faite par madame Martin, il n’était pas en crise aiguë et que ce n’est que dans les meilleures circonstances qu’il peut prendre généralement soin de lui-même, le tout avec difficulté.  En conséquence, sa réclamation vise la période initiale et par la suite les périodes de crise aiguë sans que l’on puisse en faire une nomenclature exacte et définie.

[93]           Quant à sa rechute, récidive ou aggravation, le travailleur soutient qu’elle résulte des conséquences de sa lésion professionnelle.  En effet, la chute qu’il a fait le 28 décembre 1999 résulte de la dérobade de son genou droit, situation qui s’était déjà produite antérieurement et qui est notée, par le docteur Brault, dès 1996 et par la suite dans chacun de ses rapports médicaux.

[94]           Il ajoute que l’infarctus du myocarde est due à sa chute et, qu’en conséquence, sa réclamation visait aussi ce diagnostic.

[95]           Quant aux demandes de révision déclarées irrecevables comme étant hors des délais, le travailleur souligne qu’il y a eu confusion entre l’agent de la CSST et lui-même.  Il souligne qu’on lui avait recommandé d’obtenir du docteur Brault une recommandation médicale pour la prise des médicaments en question avant de contester les décisions initiales émises par la CSST.

[96]           Le travailleur souligne qu’il a bien déclaré qu’il avait toujours eu l’intention de contester ces décisions.  Sur ce sujet, il réfère la Commission des lésions professionnelles aux notes évolutives de ce dossier complétées par les agents de la CSST à l’automne 1999.  Tel qu’il appert des notes du 27 septembre 1999, l’agente Francine Giroux prend acte que le travailleur n’est pas d’accord avec le refus de rembourser le coût des médicaments pour la haute tension artérielle ainsi que les médicaments antidépressifs.  De plus, le travailleur demande à ce qu’il soit remboursé pour l’achat de Viagra.

[97]           En conséquence, l’agente note que toute demande de remboursement de médicaments non reliés directement au traitement de la lésion professionnelle doit être accompagnée par un rapport médical expliquant la pertinence du médicament.

[98]           D’ailleurs, le 13 octobre 1999,on constate que suite à la réception du rapport médical du docteur Brault du 4 octobre 1999, rapport dans lequel ce médecin parle des différents médicaments que doit prendre le travailleur, le tout fut soumis au bureau médical de la CSST.  On parle donc des médicaments Diovan, Xanax, Himoval, Élavil, Novo-Veramil SR et Rhovane.  Or, on note que le Rhovane, le Diovan et le Novo-Veramil SR furent refusés par la décision du 3 septembre 1999.

[99]           Finalement, la note de service du 29 octobre 1999 indique que l’on doit informer le travailleur du refus de remboursement des coûts d’achat des médicaments en question dont le Viagra.  Or, on doit constater que le 29 octobre 1999, la décision émise ne visait que le Viagra.

[100]       Toujours le 1er novembre 1999, on note qu’on avise le travailleur qu’on est à étudier sa demande pour les médicaments Viagra et tous les autres prescrits par son médecin traitant.

[101]       Dès réception de cette décision, le travailleur introduit sa contestation.  En conséquence, il souligne qu’il fut induit en erreur par le comportement de la CSST puisqu’il croyait que celle-ci avait suspendu sa décision sur ce sujet et que ses droits de contestation étaient préservés.

[102]       Quant à la seconde décision déclarée irrecevable par la révision administrative, en l’occurrence celle portant sur le déneigement du domicile émise le 13 janvier 2000, la représentante du travailleur souligne que le léger retard à introduire la demande de révision est due uniquement à un manque d’attention de sa part ce qu’il ne saurait porter préjudice au droit de son client.

[103]       Le travailleur ajoute, sur le fond de sa réclamation, que ses médicaments sont prescrits, eut égard aux conséquences des douleurs permanentes qu’il présente, douleurs l’empêchant de dormir et provoquant une hypertension artérielle comme souligné par le docteur Brault à ces rapports médicaux.  Il s’agit de médicaments prescrits par des médecins traitant.  Plus spécifiquement, le Rhovane l’aide à dormir alors de le Diovan et le Novo-Veramil SR sont prescrits pour sa tension artérielle.  Finalement, quant au Viagra, il réfère la Commission des lésions professionnelles au rapport du docteur Brault sur ce sujet, rapport confirmé par un rapport médical du 26 mai 2000 produit sous la cote T-5.

[104]       Quant à l’entretien du domicile visant aussi bien le déneigement des toitures, le ramonage de la cheminée et l’acquisition du bois, on soutient que le travailleur ne peut plus exécuter ces tâches suite aux limitations fonctionnelles résultant de sa lésion professionnelle.

[105]       Plus spécifiquement, quant au bois de chauffage, le travailleur allègue que sa maison est équipée pour être chauffée au bois et qu’en tout état de cause le chauffage électrique en est un d’appoint.  En conséquence, ayant déjà été bûcheron pendant cinq ans, il soutient que s’il était en forme il aurait fait venir son bois en longueur et le couperait lui-même ce qui réduirait le coût d’acquisition de ce bois.  Il soutient que l’achat d’une corde de bois non coupée coûte 20 $ versus 55 $ pour une corde de bois déjà coupée et fendue.

[106]       En conséquence, le travailleur veut seulement la différence entre ces deux montants, différence qui serait due à l’activité humaine qu’il ne peut plus exercer suite à sa lésion professionnelle.

[107]       Quant au ramonage, le travailleur soutient qu’il s’agit d’une opération très facile à faire et qu’il détient tout le matériel pour exécuter lui-même ce ramonage.  D’ailleurs, il a déjà fait cette tâche dans le passé.  En conséquence, il souligne qu’il a le droit d’obtenir le remboursement des coûts de cette activité d’entretien.

[108]       Quant au déneigement de la toiture, le travailleur se réfère à ses limitations fonctionnelles pour bien démontrer qu’il est incapable de pouvoir effectuer cette tâche, tâche qui consiste à de l’entretien du domicile conformément à la loi.

[109]       D’autre part, le travailleur réitère ses argumentations sur le régime de retraite ainsi que les questions d’intérêt applicable pour les paiements rétroactifs d’indemnité de remplacement du revenu.

[110]       Finalement, quant au coût de déménagement, le travailleur soutient que conformément aux politiques de la CSST il est en droit de réclamer les coûts de ce déménagement.  En effet, il déclare que la maison qu’il habitait auparavant en était une qui était sous bail de moins de trois ans.  De plus, cette maison n’était absolument pas adaptée à sa condition se référant plus spécifiquement aux arguments soulevés par sa représentante aux argumentations écrites dans ce dossier.

[111]       En conséquence, lorsque l’on a payé ses indemnités de remplacement du revenu rétroactives, le travailleur a décidé de se porter acquéreur d’une maison mieux adaptée à sa condition.  Antérieurement à son déménagement, il s’est adressé à la CSST afin d’obtenir un engagement de celle-ci de payer les coûts de son déménagement.  Il a fait faire des soumissions et soumis le tout à la CSST.  En conséquence, il allègue qu’il a le droit d’obtenir le remboursement des coûts inhérents à ce poste.

[112]       En conséquence, voilà donc l’essentiel des faits et des arguments soumis par le travailleur au soutien de ses nombreuses réclamations.  La Commission des lésions professionnelles souligne qu’elle a tenté de résumer les faits pertinents à notre litige en prenant en considération qu’il s’agit d’un dossier d’au-delà de 600 pages et, qu’en conséquence, elle réfère le lecteur pour toute information supplémentaire à ce dossier.

 

L'AVIS DES MEMBRES

[113]       Les membres issus des associations d’employeurs et syndicales sont unanimes pour recommander à la Commission des lésions professionnelles :

-                     de déclarer que le travailleur a fait valoir des motifs raisonnables permettant d’excuser son retard à agir dans les dossiers 108932757-00007 et 108932757-00009;

-                     de déclarer que le travailleur a le droit de recevoir de l’aide personnelle à domicile rétroactive;

-                     de déclarer que le travailleur ne peut bénéficier des dispositions de l’article 116 de la loi;

-                     de déclarer que le travailleur ne peut recevoir l’intérêt sur les sommes d’indemnité de remplacement du revenu avancées par la CCQ;

-                     de déclarer que le travailleur a le droit d’obtenir le remboursement des coûts d’achat des médicaments Rhovane et Viagra seulement, ceux-ci étant prescrits dans le cadre des conséquences de sa lésion professionnelle;

-                     de déclarer que le travailleur a le droit d’obtenir le remboursement de ses coûts de déménagement du 22 juin 1999;

-                     de déclarer que le travailleur a le droit d’obtenir le remboursement des frais qu’il engage pour faire exécuter les travaux d’entretien de son domicile dont le déneigement de la toiture, le ramonage de la cheminée et les coûts de main-d’oeuvre reliés à la coupe de son bois de chauffage en longueur utilisable;

-                     de déclarer que le travailleur a subi une rechute, récidive ou aggravation de sa lésion professionnelle du 14 octobre 1994, en date du 28 décembre 1999, entraînant uniquement une entorse dorsale;

-                     de déclarer que l’infarctus du myocarde subi par le travailleur n’est pas rattachable à sa lésion professionnelle;

-                     de constater que les décisions émises dans les dossiers 108932757-00001 et 00011 sont bien fondées.

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[114]       La Commission des lésions professionnelles disposera donc des différents litiges qui furent soumis à son attention en regroupant les sujets relevant des mêmes dispositions législatives.

[115]       Dans les dossiers 108932757-00007 et 108932757-00009; Hors délai

En premier lieu, il convient de disposer des déclarations d’irrecevabilité contenues à la décision de la révision administrative du 6 juin 2000 et portant sur les décisions du 3 septembre 1999 et du 13 janvier 2000, en l’occurrence les dossiers 108932757-00007 et 108932757-00009.

[116]       Les dispositions législatives pertinents à l’étude de cette problématique se retrouvent aux articles 358 et 352 de la loi.  Ces articles se lisent comme suit :

358. Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission en vertu de la présente loi peut, dans les 30 jours de sa notification, en demander la révision.

 

Cependant, une personne ne peut demander la révision d'une question d'ordre médical sur laquelle la Commission est liée en vertu de l'article 224 ou d'une décision que la Commission a rendue en vertu de la section III du chapitre VII, ni demander la révision du refus de la Commission de reconsidérer sa décision en vertu du premier alinéa de l'article 365.

 

Une personne ne peut demander la révision de l'acceptation ou du refus de la Commission de conclure une entente prévue à l'article 284.2.

________

1985, c. 6, a. 358; 1992, c. 11, a. 31; 1996, c. 70, a. 40; 1997, c. 27, a. 14.

 

 

352. La Commission prolonge un délai que la présente loi accorde pour l'exercice d'un droit ou relève une personne des conséquences de son défaut de le respecter, lorsque la personne démontre un motif raisonnable pour expliquer son retard.

________

1985, c. 6, a. 352.

 

 

 

[117]       Tel qu’il appert de ces articles, toute personne qui se croit lésée par une décision rendue par la CSST peut en demander la révision dans les 30 jours de la notification de la décision en litige.

[118]       En l’occurrence, l’article 358 stipule un délai de déchéance qui, à défaut d’être respecté, entraîne la déchéance du droit d’obtenir une révision d’une décision émise par la CSST.  D’autre part, l’article 352 apporte un adoucissement, une atténuation des conséquences de l’écoulement de ce délai de déchéance en ce qu’il prévoit qu’il peut être soit prolongé, soit écarté si l’on démontre que la personne qui est en défaut de le respecter a des motifs raisonnables pour expliquer son retard à agir.

[119]       Bien que la loi ne définisse pas ce qu’est un motif raisonnable, la Commission des lésions professionnelles rappelle que ce critère fut interprété à de multiples reprises aussi bien par la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d’appel) que la Commission des lésions professionnelles ainsi que les tribunaux de droit commun[2].

[120]       L’analyse du motif raisonnable permet de considérer un ensemble de facteurs susceptibles d’indiquer à partir des faits, des démarches, des comportements, de la conjoncture et des circonstances si une personne a un motif non farfelu, crédible et qui fait preuve de bon sens, de mesure et de réflexion.

[121]       Dans les circonstances, il ne fait aucun doute que le travailleur avait l’intention de contester la décision du 3 septembre 1999 portant sur le refus de remboursement de ses médicaments.  Cette intention est manifeste à la simple lecture des notes évolutives de l’agente d’indemnisation.  Au-delà de cette intention, la Commission des lésions professionnelles constate que le travailleur était justifié de conclure que l’on a suspendu l’écoulement des délais de révision puisque, à tout escient, on lui a fait valoir que cette décision pourrait être modifiée suite à la production de rapports médicaux justifiant la prise de ces médicaments, le tout dans le contexte de sa lésion professionnelle.

[122]       Bien qu’une telle déclaration puisse s’interpréter dans le contexte d’une reconsidération, il n’en demeure que la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur fut induit en erreur sur l’écoulement du délai de révision.  D’ailleurs, la situation fut corrigée dès que la CSST l’a informé du maintien de ces décisions suite à la production du rapport médical du docteur Brault, le 4 octobre 1999.  Le travailleur a agi immédiatement et sans délai.

[123]       Il en résulte donc, pour cette première contestation, que la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur a fait valoir un motif raisonnable d’excuse à son retard à agir dans les délais impartis par la loi.

[124]       Quant à la seconde décision émise le 13 janvier 2000, la Commission des lésions professionnelles prend acte de l’admission de la représentante du travailleur à l’effet que ce retard est dû à sa seule négligence.  Dans les circonstances, il convient de ne pas sanctionner le travailleur pour l’erreur de sa représentante, celle-ci ayant toujours fait diligence dans ses contacts avec son représentant[3].

[125]       Pour ces motifs, la Commission des lésions professionnelles constate donc que le travailleur a fait valoir un motif raisonnable d’excuse à la production de sa demande de révision tardive.

[126]       Dès lors, la Commission des lésions professionnelles se prononcera sur le fond de tous les litiges soumis à son attention.

[127]       Dans le dossier 108932757-00002 :

Quant à l’aide personnelle à domicile, il s’agit d’un programme de réadaptation sociale disponible pour un travailleur qui a subi une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique.  L’ouverture à ce droit dépend de conditions, de prérequis relatifs à l’état du travailleur et à la date de naissance du droit pour ce qui est de toute demande rétroactive.

[128]       Dans l’affaire Symone Brouty et Voyages Symone Brouty[4], la Commission des lésions professionnelles a eu à se prononcer sur le sujet :

«(...)

 

En second lieu, est-ce que la travailleuse a le droit de recevoir de l’aide personnelle à domicile?

 

Sur ce sujet, les articles 145 , 152 et 158 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles portent sur le sujet :

 

145. Le travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit, dans la mesure prévue par le présent chapitre, à la réadaptation que requiert son état en vue de sa réinsertion sociale et professionnelle.

________

1985, c. 6, a. 145.

 

 

152. Un programme de réadaptation sociale peut comprendre notamment :

 

  des services professionnels d'intervention psychosociale;

  la mise en oeuvre de moyens pour procurer au travailleur un domicile et un véhicule adaptés à sa capacité résiduelle;

  le paiement de frais d'aide personnelle à domicile;

  le remboursement de frais de garde d'enfants;

  le remboursement du coût des travaux d'entretien courant du domicile.

________

1985, c. 6, a. 152.

 

 

158. L'aide personnelle à domicile peut être accordée à un travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, est incapable de prendre soin de lui - même et d'effectuer sans aide les tâches domestiques qu'il effectuerait normalement, si cette aide s'avère nécessaire à son maintien ou à son retour à domicile.

________

1985, c. 6, a. 158.

 

L’aide personnelle à domicile est une mesure qui est stipulée dans le cadre de la réadaptation sociale d’un travailleur victime d’une lésion professionnelle, le tout tel qu’il appert du chapitre IV, section I, du droit à la réadaptation.  Ainsi donc, un travailleur qui, en raison d’une lésion professionnelle, subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit à la réadaptation que requiert son état dans le but de sa réinsertion sociale et professionnelle.

 

À première vue, il semble ainsi qu’en l’absence de preuve de l’existence d’une atteinte permanente chez la travailleuse, celle-ci ne pourra bénéficier des mesures de réadaptation sociale et professionnelle prévues à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

 

Comme le rapporte les auteurs B. Cliche et M. Gravel, à leur traité «Les accidents du travail et les maladies professionnelles»1, une atteinte permanente peut se définir :

 

«Une atteinte permanente est une perte ou une anomalie irréversible d’une structure ou d’une fonction physique, physiologique ou anatomique en raison d’une lésion professionnelle.»2

________________

1  Éditions Yvon Blais; B. Cliche et Martine Clavel, p. 424 et ss.

2  Lalonde et Corporation Québec [1988] C.A.L.P., 37 suivi : C.A.L.P. 72 (révision pour cause rejetée); [199] C.A.L.P. 1396 (C.S.) (requête en révision judiciaire accueillie).

 

 

Cette condition d’ouverture du droit à la réadaptation, fut acceptée par la Cour supérieure à l’occasion de l’affaire Nova P.B. inc. c. C.A.L.P. et Dansereau3 où le juge Pierre Tessier énonçait :

 

«L’article 145 dit que pour avoir droit à la réadaptation, le travailleur doit subir une atteinte permanente.  En l’absence de cet élément essentiel, le droit s’avère inexistant et ne peut revivre par l’interprétation d’autres dispositions qui n’ont pas la même portée que celle de l’article 145.  L’esprit de la loi exprimé à l’article 1 se manifeste à l’article 145 quant au droit à la réadaptation.»

_______________

3  [1993] C.AL.P. 327 (C.S.)

 

 

Dans l’affaire Villeneuve et Centre Hospitalier Vézina ltée4, tout en reconnaissant l’importance du critère dégagé plus haut, on soulignait toutefois que l’attribution ou non d’un taux d’atteinte permanente ne constituait pas un élément déterminant quant à la reconnaissance d’un droit à la réadaptation.  En effet, on précise la distinction à faire entre l’établissement d’un pourcentage de déficit anatomo-physiologique pour fin d’indemnisation et l’existence d’une atteinte permanente.  Cette position, moins restrictive, fut confirmée dans l’affaire Jolin-Gagnon et Hôpital Marie-Clavet5 tout en précisant que le pourcentage d’incapacité attribué en fonction d’une atteinte permanente ne déterminait pas le droit à la réadaptation.

_________________

4  [1988] C.A.L.P. 494 .

5  [1989] C.A.L.P. 319 .

 

 

Cette évolution de la jurisprudence sur le sujet c’est complétée par l’induction de l’existence d’une atteinte permanente lorsque la preuve établie la présence de limitations fonctionnelles6.  La notion de limitation fonctionnelle se définit comme suit :

 

«(...) une limite permanente aux structures ou fonctions atteintes par rapport à ce qui est considéré normal sur le plan psychique, physiologique ou anatomique.»

__________________

6  Morel et Centre Routier inc. [1988] C.A.L.P. 523 .

 

 

En résumé, les auteurs Cliche et Gravel précités concluent :

 

«(...) l’état du droit est actuellement claire à l’effet qu’il est nécessaire qu’un travailleur subisse une atteinte permanente afin qu’il puisse bénéficier des mesures de réadaptation prévues à la Loi.  Il est aussi reconnu qu’une atteinte permanente puisse exister malgré l’absence d’un taux d’incapacité sur le Règlement sur le barème des dommages corporels, soit lorsque l’on constate la présence de limitations fonctionnelles permanentes chez le travailleur.»

 

La Commission des lésions professionnelles partage cette conclusion et convient qu’il est nécessaire de pouvoir identifier l’existence d’une atteinte permanente ou de limitations fonctionnelles chez la travailleuse pour disposer de sa demande d’aide personnelle à domicile.

 

Par ailleurs, intrinsèquement lié à cette question, se soulève la question relative à l’époque où l’on peut établir l’existence d’une atteinte permanente tel que défini plus haut.  Est-ce au moment de la survenance de la lésion professionnelle ?  À la date de la réclamation ?  À la date de consolidation de la lésion professionnelle ou de l’évaluation finale ?  En effet, pour que la travailleuse puisse avoir accès aux mesures de réadaptation prévues au chapitre IV, section I, une atteinte permanente doit exister.

 

Sur ce sujet, la Commission des lésions professionnelles constate qu’il existe peu ou pas de précédent jurisprudentiel disposant de cette question spécifique.  En effet, dans l’affaire Colette et Corporation Municipale de St-Calix7, on disposait d’une contestation portant sur le droit à l’aide personnelle à domicile (droit à la réadaptation) du travailleur pour une période antérieure à la consolidation de sa lésion et à la production d’un rapport final sur l’existence d’une atteinte permanente.  La commissaire rejette la demande au motif d’absence d’atteinte permanente en prenant en considération l’ensemble de la preuve.  En aucun moment la commissaire ne réfère à une date, époque ou événement permettant d’établir l’existence d’une atteinte permanente.

______________

7  C.A.L.P., 33100-63-9110, 19-05-1993; Francine Dion-Drapeau, commissaire.

 

 

De même, dans Ministère de l’éducation et Goulet8, on étudie ce problème bien que la demande d’aide personnelle à domicile visait une période d’incapacité totale temporaire, c’est à dire avant consolidation.  La commissaire Beaudoin applique les conclusions de l’affaire Nova P.B. inc. énoncé par le juge Tessier et conclut, qu’en absence d’atteinte permanente on ne peut reconnaître le droit à la réadaptation ainsi que l’application de l’article 184 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

______________

8  30349-03-9107; 94-01-17, Marie Beaudoin, commissaire (révision pour cause).

 

 

Plus près du présent cas se situe l’affaire Ronald Gentleman et Hôpital Général et Mortimor B. Davis9.  Dans ce cas, le travailleur victime d’une lésion professionnelle le 1er novembre 1989 voit ses lésions consolidées le 15 février 1991 avec une atteinte permanente de 4.4 %.  Le 10 septembre 1991, son médecin recommande des limitations fonctionnelles entraînant l’admissibilité du travailleur à la réadaptation en date du 23 octobre 1991.  De fait, le travailleur engage une aide personnelle à domicile à partir du mois de janvier 1993.  Le travailleur réclame rétroactivement le remboursement de ses frais d’aide personnelle à domicile à partir du 23 octobre 1991.  Le commissaire conclut :

 

«La Commission des lésions professionnelles estime donc, qu’à partir de la décision du 23 octobre 1991, reconnaissant le droit à la réadaptation, le travailleur acquiert aussi le droit à la réadaptation sociale, de sorte que, considérant les limitations fonctionnelles reconnues et aussi les diagnostics, notamment la fibromyosite et fbromyalgie connues comme incapacitants, la CSST aurait dû procéder à e moment là à l’évaluation des besoins à la réadaptation sociale du travailleur, et à l’évaluation du besoin d’aide à domicile.»

_______________

9  N1D 91424-60C-9709; 12-11-98, J.-David Kushner, commissaire.

 

 

Par ailleurs, le travailleur ayant encouru des coûts à ce poste à partir du mois de janvier 1993, le commissaire déclare que le travailleur a le droit d’obtenir le remboursement de ses frais du mois de janvier 1993 jusqu’au 12 décembre 1996, selon les tarifs légaux.

 

Finalement, les cas de Francine Charron c. C.H.S.L.D.10 et de R. Ferrier et Win-Sir Textiles inc.11 complètent cette revue de la jurisprudence.

________________

10  114870-64-9904, 27-07-99, Yolande Lemire, commissaire.

11  116590-73-9905, 11-11-99, Yves Ostiguy, commissaire.

 

 

Dans la première de ces causes, la commissaire Lemire dispose d’une demande d’aide à domicile et d’entretien du domicile introduites par la travailleuse antérieurement à la date de consolidation de sa lésion professionnelle.  S’inspirant des décisions de Boudrier et Sécuribec inc.12 et de Colette et Corporation Municipale de St-Calixte, la commissaire conclut :

 

«Pour que le droit à la réadaptation s’ouvre, il faut que la lésion soit consolidée.»

_______________

12  09306-60-8809, 01-08-90, J.M. Duranceau, commissaire.

 

 

Or, rappelons que ces cas portaient tout particulièrement sur la notion d’existence d’une atteinte permanente dans le cadre de lésion pas nécessairement consolidée.  Plutôt on s’attardait à déterminer si la preuve permettait d’établir l’existence ou non d’une atteinte permanente indifféremment de la consolidation de la lésion; c'est-à-dire la prévisibilité de l’atteinte permanente.

 

Dans la seconde affaire, le commissaire Ostiguy, s’inspirant des arrêts Francine Charron et Ronald Gentleman précités, énonce :

 

«Quant à la rétroactivité des frais exigés pour aide personnelle à domicile, des décisions de la Commission des lésions professionnelles nous incitent à croit que la réadaptation sociale, physique ou professionnelle ne peut être déterminée avant que ne soit décrétée l’existence d’une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique.»

 

Dès lors, à notre humble avis, la question demeure ouverte quant à fixer une date où l’on peut établir l’existence d’une atteinte permanente produisant des effets sur la capacité d’un individu à prendre soin de lui-même et d’effectuer ses tâches domestiques, le tout afin d’éviter son institutionnalisation et permettre son retour à domicile.

 

En effet, le législateur n’a pas explicitement prévu à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles le moment où l’on peut conclure à l’existence d’une atteinte permanente.  Par ailleurs, rappelons que les règles d’interprétation d’une législation enseignent que les dispositions d’une loi doivent se lire les unes en relation avec les autres afin de conserver l’intégrité et la cohérence d’une législation.

 

Plusieurs articles de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles inscrit au chapitre III, section II de la loi et portant sur l’indemnité des dommages corporels nous aide à mieux circonscrire la notion d’atteinte permanente, plus particulièrement sa date d’apparition, son existence.

 

À l’article 88 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, le législateur énonce :

 

88.          La Commission établit le montant de l'indemnité pour dommages corporels dès que les séquelles de la lésion professionnelle sont médicalement déterminées.

 

Lorsqu'il est médicalement impossible de déterminer toutes les séquelles de la lésion deux ans après sa manifestation, la Commission estime le montant minimum de cette indemnité d'après les séquelles qu'il est médicalement possible de déterminer à ce moment.

 

Elle fait ensuite les ajustements requis à la hausse dès que possible.

________

1985, c. 6, a. 88.

 

Évidemment, l’article 88 s’inscrit dans le cadre du «droit à une indemnité pour dommages corporels», ce qui est distinct de la naissance d’une atteinte permanente.

 

Par ailleurs, cet article nous semble disposer implicitement de la notion de consolidation quant à la naissance de l’atteinte permanente.  En effet, bien que suite à la guérison ou à la stabilisation d’une lésion professionnelle, à la suite de laquelle aucune amélioration de l’état de santé du travailleur victime de cette lésion n’est prévisible, on puisse conclure que l’état de santé résiduelle du travailleur soit de nature «permanente», il n’en demeure que le critère permettant l’évaluation de cette atteinte sera la «possibilité d’établir médicalement» une atteinte permanente indifféremment de la consolidation de la lésion.

 

Cette notion de «médicalement possible» s’attache, s’arrime donc avec une reconnaissance implicite que l’atteinte permanente «est incluse» dans l’état général de santé d’une victime de lésion professionnelle.  En d’autres mots, suite à la lésion professionnelle, généralement des dommages physiques et/ou psychologiques sont produits et démontrés par l’existence d’une symptomatologie produisant des effets sur la capacité de la victime.  Ces dommages vont évolué selon les traitements dispensés ainsi que la capacité de «guérison» de l’individu.  Ils incluent donc aussi  bien les atteintes temporaires que les atteintes permanentes ce qui créé une difficulté évidente de pouvoir les distinguer, les évaluer.  Or, cette difficulté d’évaluation ne fait pas obstacle à l’existence d’une atteinte permanente.  Plutôt, elle retarde l’évaluation de l’atteinte permanente jusqu’au moment où il devient médicalement possible de la départager des atteintes temporaires.  L’article 88 dispose de cette difficulté et prévoit, qu’à la limite, le droit de recevoir une indemnité pour une atteinte permanente pourra exister même en l’absence d’une consolidation de la lésion professionnelle.

 

En effet, même s’il demeure impossible de déterminer les séquelles de la lésion deux ans après sa manifestation, on estime un montant minimal de cette indemnité qui est, par ailleurs, médicalement prévisible.  Dès lors, en tenant compte de la définition du terme «consolidation» de l’article 2 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, l’on conçoit que l’alinéa 2 de l’article 88 de cette loi dispose d’un cas se produisant normalement avant la consolidation de la lésion :

 

« consolidation » : la guérison ou la stabilisation d'une lésion professionnelle à la suite de laquelle aucune amélioration de l'état de santé du travailleur victime de cette lésion n'est prévisible ;

 

D’ailleurs, l’article 83 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles sanctionne le concept réaliste que l’atteinte permanente résulte «ab initio» (dès le début), de la lésion professionnelle :

 

83.          Le travailleur victime d'une lésion professionnelle qui subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit, pour chaque accident du travail ou maladie professionnelle pour lequel il réclame à la Commission, à une indemnité pour dommages corporels qui tient compte du déficit anatomo‑physiologique et du préjudice esthétique qui résultent de cette atteinte et des douleurs et de la perte de jouissance de la vie qui résultent de ce déficit ou de ce préjudice.

________

1985, c. 6, a. 83.

 

De la même façon, l’article 91 alinéa 2 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles dispose d’un droit à recevoir une indemnité pour dommages corporels avant consolidation de la lésion professionnelle.  Cet article énonce :

 

91.          L'indemnité pour dommages corporels n'est pas payable en cas de décès du travailleur.

 

Cependant, si le travailleur décède d'une cause étrangère à sa lésion professionnelle et qu'à la date de son décès, il était médicalement possible de déterminer une séquelle de sa lésion, la Commission estime le montant de l'indemnité qu'elle aurait probablement accordée et en verse un tiers au conjoint du travailleur et l'excédent, à parts égales, aux enfants qui sont considérés personnes à charge.

 

En l'absence de l'un ou de l'autre, la Commission verse le montant de cette indemnité au conjoint ou aux enfants qui sont considérés personnes à charge, selon le cas.

________

1985, c. 6, a. 91.

 

Encore une fois, le législateur retient la notion de «médicalement possible» de déterminer une séquelle à la lésion professionnelle pour attribuer, reconnaître un «droit» à recevoir une indemnité pour dommages corporels.

 

D’ailleurs, la commissaire Ginette Godin, dans la cause de C.S.S.T. et Société Asbestos Limitée et Delphis Byrnes (Succession)13 disposait de l’application de l’article 91 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.  Accessoirement à son litige, elle souligne la portée de l’article 90 qui énonce :

 

90.          La Commission paie au travailleur des intérêts sur le montant de l'indemnité pour dommages corporels à compter de la date de la réclamation faite pour la lésion professionnelle qui a causé l'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique du travailleur.

 

Le taux de ces intérêts est déterminé suivant les règles établies par règlement. Ces intérêts sont capitalisés quotidiennement et font partie de l'indemnité.

________

1985, c. 6, a. 90; 1993, c. 5, a. 2.

______________

13  53232-03-9308, 06-02-95, Ginette Godin, commissaire.

 

 

La commissaire écrit :

 

«Selon cet article, la Commission est tenue de payer des intérêts sur le montant de l’indemnité pour dommages corporels dû à un travailleur rétroactivement à la date où ce travailleur a produit sa réclamation.  C’est dire que le droit à une indemnité pour dommages corporels a une existence juridique rétroactive à la date de production d’une réclamation pour lésion professionnelle occasionnant lesdits dommages.»

 

En conséquence, la Commission des lésions professionnelles conclut que l’existence ou non d’une atteinte permanente est directement tributaire de la lésion professionnelle, de ces conséquences sur l’état de santé de la victime.  Que par ailleurs, cette existence de l’atteinte permanente se trouve confondue avec les atteintes temporaires jusqu’au moment où il devient «médicalement possible» de la préciser en tout ou en partie et donc d’évaluer les conséquences de cette atteinte permanente sur la réinsertion sociale et professionnelle de la victime.  Le droit à la réadaptation physique, sociale ou professionnelle d’une victime de lésion professionnelle s’ouvre donc à cette date et non à la date de «consolidation» de la lésion professionnelle, permettant ainsi une intervention précoce et immédiate sur les conséquences d’une lésion professionnelle pour la victime en tenant compte des approches thérapeutiques actives dispensées par les services de santé.  On permet ainsi le maintien à domicile de la victime pendant sa période de rééducation et de réadaptation ainsi que sa réinsertion physique, sociale et professionnelle.

 

Quant à l’application de l’article 158 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, la prépondérance de preuve doit révéler que le travailleur est incapable de prendre soin de lui-même et d’effectuer sans aide les tâches domestiques qu’il effectuait avant sa lésion professionnelle.

 

(...)»

 

 

 

 

[129]       Quant au contenu du programme, le législateur québécois énonce le principe directeur visant les mesures de réadaptation sociale à l’article 151 :

151. La réadaptation sociale a pour but d'aider le travailleur à surmonter dans la mesure du possible les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle, à s'adapter à la nouvelle situation qui découle de sa lésion et à redevenir autonome dans l'accomplissement de ses activités habituelles.

________

1985, c. 6, a. 151.

 

 

 

[130]       Évidemment, l’article 151 se lit toujours en conjonction avec l’article 1 de la loi et vise donc à aider le travailleur à surmonter les conséquences personnelles et sociales de sa lésion professionnelle, à s’adapter à sa nouvelle situation et à redevenir autonome dans l’accomplissement des activités habituelles.  En tout état de cause, ces dispositions tentent de faire disparaître si non d’amenuiser les conséquences d’une lésion professionnelle.

[131]       Plus spécifiquement, les articles 158 à 163 inclusivement ont décrit le programme d’aide personnelle à domicile.  L’article 158 énonce :

158. L'aide personnelle à domicile peut être accordée à un travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, est incapable de prendre soin de lui‑même et d'effectuer sans aide les tâches domestiques qu'il effectuerait normalement, si cette aide s'avère nécessaire à son maintien ou à son retour à domicile.

________

1985, c. 6, a. 158.

 

 

 

[132]       Conformément à cette disposition législative, on constate que l’article 158 vise deux réalités bien particulières se réconciliant dans un même objectif.  En effet, généralement, avant une lésion professionnelle, la victime est capable de prendre soin d’elle-même et d’effectuer seule des activités inhérentes à sa nature humaine.  Ici on parle de la capacité de se mobiliser (lever, asseoir, coucher), de satisfaire à son hygiène physique ainsi qu’à ses besoins naturels.  Il s’agit de l’autonomie de l’individu.

[133]       Cet individu, dans un cadre domestique, peut ou non effectuer certaines tâches requises à son domicile.  L’ensemble de la capacité d’exécuter ces tâches qu’il exécutait normalement est lié avec la capacité de prendre soin de lui-même et détermine la capacité générale de la victime à pouvoir maintenir un domicile autonome.  À défaut de pouvoir satisfaire à ses besoins essentiels, il en résulterait que la victime devrait être soit institutionnalisé, soit qu’elle devrait recevoir une assistance à domicile, totale ou partielle lui permettant de maintenir son autonomie.

[134]       En second lieu, un accident du travail peut requérir une «surveillance» pour maintenir un domicile autonome.  Cette situation se produit lorsque l’on constate une altération des fonctions cérébrales supérieures.

[135]       En conséquence, pour pouvoir bénéficier des dispositions de l’article 158 et obtenir un dédommagement pour les frais d’engagement d’une personne, il faut pouvoir démontrer, par une prépondérance de preuve, les conditions prévues à l’article 158.

[136]       Dans les circonstances, la Commission des lésions professionnelles constate que la preuve qui lui fut administrée est à deux niveaux.

[137]       En tout premier lieu, il faut bien reconnaître que le travailleur s’est vu accordé des limitations fonctionnelles importantes par ces médecins traitant, tout particulièrement, par le docteur Brault à son évaluation finale du 1er février 1999.  Ainsi, le travailleur ne peut manipuler des poids de plus de cinq kilogrammes, il doit éviter la marche de longue durée ni même maintenir une posture, soit assise ou debout pour plus de 30 ou 60 minutes à la fois.  Il doit éviter les positions instables surtout celles exigeant une demi flexion antérieure du tronc.  De plus, il doit éviter les mouvements répétitifs des membres inférieurs ainsi que tout mouvement répétitif ou fréquent de flexion, d’extension, de torsion de la colonne lombaire même à de faible amplitude.

[138]       Rappelons que ces limitations fonctionnelles sont accordées au travailleur dans le contexte où il a subi une discoïdectomie n’ayant pas donné les résultats escomptés.  Bien plus, dans les mois qui ont suivi son opération, suite à un examen radiologique, on était en mesure d’indiquer que le travailleur présentait une fibrose périneurale importante au niveau L4-L5 et même, en dernière analyse, une possibilité de récidive d’hernie discale.

[139]       Dans ce contexte, bien que le pourcentage d’atteinte permanente du travailleur ne soit pas de 100 %, il n’en demeure que son état fonctionnel est grandement réduit et ceci depuis son arrêt de travail survenu en novembre 1994 suite à l’accident du travail reconnu par la Commission des lésions professionnelles dans les décisions précités.

[140]       Une lecture attentive des descriptions des plaintes subjectives du travailleur ainsi que des examens cliniques objectifs pratiqués par le docteur Brault démontrent que l’état du travailleur est relativement stable si ce n’est qu’il présente, occasionnellement, des périodes d’exacerbation de sa symptomatologie depuis cette époque.

[141]       D’ailleurs, sur ce second sujet, la Commission des lésions professionnelles a noté que le travailleur semble distingué l’état de sa capacité résiduelle selon qu’il est en crise aiguë ou non.  Ainsi, lorsqu’il n’est pas en crise aiguë, sa capacité résiduelle à s’occuper de lui-même et d’exécuter les tâches domestiques qu’il exécutait avant sa lésion professionnelle est bien différente.

[142]       Il en demeure que l’évaluation produite par madame Martin le fut dans le cadre où le travailleur n’était pas en crise aiguë et qu’il présentait, quand même, des difficultés à effectuer certaines tâches de nature personnelle.

[143]       D’autre part, la preuve administrée démontre que le travailleur a reçu de l’assistance de la part de sa famille tout particulièrement pendant la période de séparation avec sa conjointe.  Il en résulte que, lorsque celle-ci est à domicile, elle est en mesure d’exécuter les tâches domestiques qu’elle exécutait auparavant.  De plus, elle fournit une assistance au travailleur lui permettant de maintenir son autonomie.  Or, cet effort de la conjointe du travailleur a des conséquences immédiates sur sa vie professionnelle ainsi que sur sa vie de couple.

[144]       Sur ce sujet, la Commission des lésions professionnelles croit que nul ne peut nier que tout événement réduisant la capacité fonctionnelle d’un individu à des effets pervers immédiats sur son autonomie ainsi que sur les rapports existant entre les membres de la «cellule familiale».  Tout particulièrement dans notre société moderne où les conjoints occupent chacun un emploi, on peut constater que la répartition des tâches domestiques est modifiée par l’incapacité d’un conjoint.  Cette incapacité provoque l’ajout de tâches nouvelles, d’une présence accrue, en regard du degré d’autonomie de la victime.  À notre humble avis, l’article 158 de la loi vise à amoindrir ces conséquences dans le cadre d’une lésion professionnelle le tout dans les limites prévues par la loi et ses règlements.

[145]       Finalement, la preuve administrée ne permet pas d’établir de façon bien spécifique les périodes où le travailleur fut en crise aiguë.  On parle de cinq à six fois par année pour des périodes de une à trois semaines.

[146]       Dans ce contexte, la Commission des lésions professionnelles doit en venir à la conclusion que l’état général du travailleur depuis l’introduction de sa réclamation, a nécessité une assistance pour permettre son maintien à domicile.

[147]       De façon plus spécifique, le travailleur a besoin d’une assistance partielle pour son hygiène corporelle, son alimentation et l’approvisionnement de son domicile.  Une fois complété la grille d’évaluation de l’aide personnelle à domicile, le travailleur doit se voir reconnaître un pointage de 6.5 sur cet aspect.

[148]       Ajoutons que conformément à la grille d’évaluation des besoins d’assistance personnelle et domestique adoptés selon les normes et barèmes régissant la CSST par règlement, le travailleur n’a pas besoin de surveillance.

[149]       Ce besoin d’assistance au domicile du travailleur existe depuis qu’il est affligé par son incapacité et plus spécifiquement, la date de sa réclamation, le travailleur n’étant plus disponible au travail à cette date eut égard à sa seule lésion professionnelle.  Il correspond au taux de base spécifié ci-après.

[150]       Pour les périodes de crise aiguë, le travailleur devra s’adresser à la CSST afin que l’on ajuste, selon la condition physique qu’il présentera à ce moment, son aide personnelle à domicile.

[151]       Quant aux périodes passées, elle convient d’accorder au travailleur un remboursement d’aide personnelle à domicile maximale pour la période où le travailleur a subi une séparation de sa conjointe et où il fut pris en charge par le système public, en l’occurrence le C.L.S.C.

[152]       Selon la documentation produite, cette aide débutera le 4 novembre 1996 et se terminera à la fin du mois de mars 1997, à un taux de 1 161 $ par mois en 1996 et de 1 178 $ par mois en 1997.

[153]       Pour les autres périodes de crise aiguë, la Commission des lésions professionnelles doit constater que la preuve offerte ne permet pas d’identifier ses périodes ni la capacité physique du travailleur à s’occuper de lui-même.

[154]       Le travailleur recevra un remboursement aux taux de base.  En prenant en considération le pointage établi de 6.5 et les tables réglementaires sur les montants d’aide, ce taux mensuel sera de 149 $ pour 1995; de 151 $ pour 1996; de 154 $ pour 1997; de 156 $ pour 1998; de 157 $ pour 1999; de 160 $ pour 2000 et de 164 $ pour 2001 (le tout à l’exclusion de la période du 4 novembre 1996 à la fin mars 1997).

[155]       Dans le dossier 108932757-00003 :

La Commission des lésions professionnelles doit décider si le travailleur peut bénéficier des dispositions de l’article 116 de loi.  Cet article stipule :

116. Le travailleur qui, en raison d'une lésion professionnelle, est atteint d'une invalidité visée dans l'article 93 a droit de continuer à participer au régime de retraite offert dans l'établissement où il travaillait au moment de sa lésion.

 

Dans ce cas, ce travailleur paie sa part des cotisations exigibles, s'il y a lieu, et la Commission assume celle de l'employeur, sauf pendant la période où ce dernier est tenu d'assumer sa part en vertu du paragraphe 2° du premier alinéa de l'article 235.

________

1985, c. 6, a. 116.

 

 

 

[156]       La Commission des lésions professionnelles a déjà eu à disposer d’un cas similaire à celui qu’on lui soumet, le tout dans l’affaire Sylvain Ouellet et Constructeur GPC inc. et CSST - Saguenay - Lac St-Jean[5].  À cette décision, l’on énonçait :

«(...)

 

L’article 116 s’inscrit à la section IV du chapitre III de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.  Le chapitre III porte sur les indemnités en générale qui sont prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

 

De façon spécifique, à la section IV intitulé «Autres indemnités», le législateur québécois a stipulé une série de dispositions aux articles 112 à 116, dispositions de nature générale et prévoyant spécifiquement le paiement d’indemnité ou le remboursement de frais non autrement compris dans les sections précédant la section IV.  Il s’agit donc d’indemnité particulière s’ajoutant à celle déjà prévue au section précédante lorsque les conditions d’application requises par les articles 112 à 116 sont satisfaites.

 

En tout état de cause il s’agit donc d’indemnité ayant une existence objective indépendante de toute autre indemnité prévue par une section ou un chapitre spécifique de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles si ce n’est de l’existence d’une lésion professionnelle.  En conséquence, ces prestations s’ajoutent à celles déjà prévues aux autres sections et dépendent des conditions spécifiques prévues à chacune de ces dispositions législatives visées à la section IV du chapitre III.

 

Or, l’article 116 prévoit de façon générale qu’un travailleur qui subit une lésion professionnelle entraînant une invalidité grave et prolongée a le droit de continuer à participer au régime de retraite offert dans l’établissement où il travaillait au moment de sa lésion.

 

Comme conditions d’application, ce premier paragraphe requiert :

 

-          que le travailleur soit victime d’une lésion professionnelle;

-          que cette lésion professionnelle entraîne une invalidité prévue à l’article 93 (grave et prolongée);

-          et que le travailleur continue à participer au régime de retraite offert dans l’établissement où il travaillait au moment de sa lésion.

 

Or, le second alinéa de l’article 116 ajoute que, pendant la période où l’employeur est tenu d’assumer sa part en vertu du second paragraphe du premier alinéa de l’article 235, la CSST sera dispensée de ce paiement.

 

Il en ressort donc que l’article 116 se trouve à être le prolongement des droits prévus à l’article 235 paragraphe 2° de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.  Cet article énonce :

 

235.        Le travailleur qui s'absente de son travail en raison de sa lésion professionnelle :

 

            continue d'accumuler de l'ancienneté au sens de la convention collective qui lui est applicable et du service continu au sens de cette convention et au sens de la Loi sur les normes du travail (chapitre N‑1.1);

            continue de participer aux régimes de retraite et d'assurances offerts dans l'établissement, pourvu qu'il paie sa part des cotisations exigibles, s'il y a lieu, auquel cas son employeur assume la sienne.

 

Le présent article s'applique au travailleur jusqu'à l'expiration du délai prévu par le paragraphe 1° ou 2°, selon le cas, du premier alinéa de l'article 240.

________

1985, c. 6, a. 235.

 

À l’article 235, dans le cadre du chapitre VII de la section I portant sur le «droit au retour au travail», le législateur québécois a prévu qu’un travailleur qui devait s’absenter de son travail suite à une lésion professionnelle pouvait continuer de participer au régime de retraite et d’assurance offert dans l’établissement, pourvu qu’il paie sa part de cotisation exigible, s’il y a lieu, auquel cas son employeur assume la sienne.

 

Ce droit particulier fait partie des droits reconnus au travailleur dans le cadre du droit au retour au travail et s’applique pendant la période prévue à l’article 240, selon le cas.  L’article 240 énonce :

 

240.        Les droits conférés par les articles 236 à 239 peuvent être exercés :

 

            dans l'année suivant le début de la période d'absence continue du travailleur en raison de sa lésion professionnelle, s'il occupait un emploi dans un établissement comptant 20 travailleurs ou moins au début de cette période; ou

            dans les deux ans suivant le début de la période d'absence continue du travailleur en raison de sa lésion professionnelle, s'il occupait un emploi dans un établissement comptant plus de 20 travailleurs au début de cette période.

 

Le retour au travail d'un travailleur à la suite d'un avis médical n'interrompt pas la période d'absence continue du travailleur si son état de santé relatif à sa lésion l'oblige à abandonner son travail dans la journée du retour.

________

1985, c. 6, a. 240.

 

À ce stade, il faut convenir que l’article 235 s’inscrit dans les nouvelles dispositions adoptées depuis le 19 août 1985 lors de l’adoption de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.  Il créé un nouveau droit accordé aux travailleurs du Québec, droit visant la réparation des conséquences d’une lésion professionnelle.

 

De façon spécifique, l’article 235 protège donc l’admissibilité des travailleurs, pendant leur période d’absence du travail dû à une lésion professionnelle au régime de retraite leur étant applicable.  Cet article, bien que ne comportant aucun délai d’application, suppose que le travailleur, suite à une lésion professionnelle, continue à participer à son régime de retraite tel que prévu à son contrat de travail ou à sa convention collective.

 

Or, l’article 234 stipule :

 

234.        La présente section s'applique au travailleur qui, à la date où il est victime d'une lésion professionnelle, est lié par un contrat de travail à durée indéterminée ou, dans le cas prévu par l'article 237, à durée déterminée.

 

Cependant, elle ne s'applique pas au travailleur visé dans la section II du présent chapitre, sauf en ce qui concerne l'article 243.

________

1985, c. 6, a. 234.

 

L’article 234 définit le domaine de l’application de la section I du chapitre VII.  Or, au second alinéa de l’article 234, le législateur québécois stipule que la section I du chapitre VII ne s’applique pas au travailleur visé dans la section II du chapitre VII, sauf en ce qui concerne l’article 243, article portant sur l’obligation faite à l’employeur de procéder à embaucher de nouveau un travailleur victime d’une lésion professionnelle lorsqu’il est en mesure d’exercer son emploi.

 

Cette exclusion de l’article 234 vise donc l’ensemble de la section I et réfère les travailleurs visés par l’article 247 au droit spécifiquement prévu à la section II du chapitre VII.  L’article 247 énonce :

 

247.        La présente section s'applique au travailleur qui est un salarié au sens de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main‑d'oeuvre dans l'industrie de la construction (chapitre R‑20) et qui travaille sur un chantier de construction.

________

1985, c. 6, a. 247; 1986, c. 89, a. 50.

 

À la section II, l’on ne retrouve aucune disposition similaire aux dispositions de l’article 235 au paragraphe 2°.

 

Il en résulte que les travailleurs visés par l’article 247 ne bénéficient pas du droit prévu à l’article 235 paragraphe 2° et, qu’en conséquence, pendant la période d’application de l’article 240, ils ne peuvent continuer à participer à leur régime de retraite et d’assurance offert dans l’établissement où ils travaillent (chantier de construction).

 

La lecture de l’ensemble de ces dispositions législatives pose donc un problème d’interprétation.  En effet, selon qu’un travailleur est un travailleur de la construction ou non, le législateur québécois a stipulé des droits et obligations différentes quant au contenu du droit au retour au travail ainsi que ces modalités d’application.

 

La Commission des lésions professionnelles constate qu’il existe un tel régime de retraite géré par la Commission de la Construction du Québec qui prévoit spécifiquement qu’un salarié invalide peut participer au régime de retraite.  En effet, l’article 8 du Règlement sur les régimes complémentaires des avantages sociaux dans l’industrie de la construction, R.-20, R. 14.01, précise :

 

20.          Peut participer au régime de retraite le salarié invalide au sens de la Loi sur les accidents du travail et des maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001) à qui cette loi permet de continuer à participer à ce régime.

 

Dès lors, les travailleurs de la construction ne bénéficient pas de la même couverture à l’intérieur du droit de retour au travail prévu à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

D’autre part, la Commission des lésions professionnelles constate que l’article 116 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles se situe dans le prolongement du paragraphe 2 de l’article 235 en étendant la couverture dont bénéficie le travailleur au-delà des périodes prévues aux paragraphes 1 et 2 de l’article 240.

 

Les deux articles prévoient spécifiquement qu’il s’agit d’une couverture facultative, conditionnelle au paiement par le travailleur de sa cotisation exigible.

 

Dans l’affaire Claude Beauregard et Abattoir St-Jean ltée1, le commissaire Guy Perreault ajoute :

 

«             (...)

 

                Bien que l’article 235 ne comporte pas expressément de délais au cours desquels un travailleur doit informer l’employeur de son désir de participer à un régime de retraite, la Commission d’appel est d’avis que cet article est suffisamment clair pour pouvoir conclure que le travailleur doit manifester son intention au début de son absence à la suite d’une lésion professionnelle ou, en tout cas, dans un délai raisonnable.  Les mots «Le travailleur qui s’absente de son travail en raison de sa lésion professionnelle [...] continue d’accumuler de l’ancienneté [...] pourvu qu’il paie sa part des cotisations exigibles [...]» sont très explicites à l’effet qu’on ne veut pas qu’il y ait de brisure, de rupture sur ces aspects au moment de la lésion professionnelle du travailleur ou de son absence du travail, et que ces bénéfices doivent s’appliquer dès ce moment.  Le législateur a utilisé d’autres termes quand il a mentionné à l’article 242 de la loi, d’autres avantages qui s’appliquent plus tard, soit lorsque le travailleur réintègre son emploi.

 

                Le fait qu’un travailleur ne contribue pas ou n’informe pas rapidement l’employeur de son désir de contribuer à l’effet évidemment opposé, comme le souligne l’employeur, c'est-à-dire qu’il indique que le travailleur ne veut plus continuer de participer à ces régimes.

 

                D’autre part, la Commission d’appel considère que la référence à l’article 240 de la loi dans l’article 235 n’a aucune connotation de délais mais vise la période d’application de tels bénéfices, si le travailleur continue d’être absent et paie ses contributions.

 

                (...)»

            ______________

            1  [1991] CALP 282 à 287.

 

Il en résulte que dans les cas où l’article 235 s’applique, le travailleur doit aviser dans un délai raisonnable son employeur qu’il désire continuer à participer à son régime de retraite et offrir le paiement de sa cotisation exigible.  À défaut de se faire, l’employeur n’a pas à offrir de payer sa cotisation puisque, à tout escient, le travailleur est présumé avoir choisi d’interrompre ses participations à son régime de retraite.

 

Comme par ailleurs l’article 116 se trouve à être un prolongement de l’article 235 et que dans son texte le législateur a employé des termes similaires, tels celui de «continuer à participer au régime de retraite offert», il faut bien conclure que les mêmes règles demeurent applicables et, qu’en conséquence, un travailleur qui veut bénéficier des dispositions de l’article 116 doit aviser, dans un délai raisonnable, la CSST qu’il désire toujours contribuer à son régime de retraite et offrir les cotisations exigibles, le tout à la fin de la période prévue à l’article 240 dans lequel se retrouve le travailleur eut égard au nombre d’employés dans l’entreprise.

 

À défaut de ce faire, dans un délai raisonnable, la Commission des lésions professionnelles doit conclure qu’un travailleur visé par les dispositions de l’article 235 se retrouve dans une situation de hors délai.

 

(...)»

 

 

 

[157]       Conformément à la preuve administrée devant la Commission des lésions professionnelles, le travailleur a cessé de travailler en novembre 1994.

[158]       D’autre part, le travailleur est un travailleur de la construction, en l’occurrence un électricien travaillant dans le domaine de la construction résidentielle et commerciale.  Dès lors, comme rapporté à la décision précédente, le travailleur ne peut bénéficier des dispositions des articles 235 et 116 de la loi étant exclu spécifiquement de l’application de ces dispositions par l’article 234 alinéa 2.  En effet, le travailleur est un travailleur visé par l’article 247 de la loi.

[159]       D’ailleurs, comme noté à la décision précitée, cette exclusion des travailleurs de la construction à l’application des articles 235 et 116 se retrouve dans le texte même de l’article 116 lorsque celui-ci réfère à la notion d’établissement.  En effet, conformément à la définition de cette expression contenue à l’article 2 de la loi ainsi qu’à la Loi sur la santé et la sécurité du travail[6], il faut bien conclure que le terme «établissement» exclu spécifiquement un chantier de construction.

[160]       Au-delà de l’application de ces dispositions, la Commission des lésions professionnelles ajoute que dans les cas où l’on procède à l’application de l’article 235 et 116, il est requis que le travailleur doit manifester à son employeur son intention, au début de son absence, de continuer à contribuer à son régime de retraite.  À défaut de ce faire, dans un délai raisonnable, le travailleur sera exclu de la possibilité de pouvoir bénéficier des dispositions de l’article 235 à moins qu’il démontre qu’il avait des motifs raisonnables permettant d’excuser son retard à agir.

[161]       Finalement, la Commission des lésions professionnelles souligne bien que le travailleur ne puisse bénéficier des dispositions de la loi sur le sujet, il n’en demeure qui lui est toujours loisible de vérifier s’il n’a pas accès à des dispositions équivalentes en application du Règlement sur les régimes complémentaires des avantages sociaux dans l’industrie de la construction.

[162]       Pour ces motifs, la Commission des lésions professionnelles doit donc conclure que le travailleur ne peut bénéficier des dispositions de l’article 116 de la loi.

[163]       Dans le dossier 108932757-00004; Intérêts

Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’ordonner à la CSST de lui payer des intérêts, le tout en application de l’article 364 de la loi, en l’occurrence des intérêts pour les indemnités de remplacement du revenu qui sont dues au travailleur, rétroactivement à la date de sa réclamation.

[164]       Pour pouvoir disposer de la demande spécifique du travailleur, tout particulièrement des intérêts qu’il allègue lui être dus en regard des avances effectués par la CCQ du 6 mars 1995 au 20 novembre 1995, pour une somme de 13 020 $, la Commission des lésions professionnelles doit prendre en considération les dispositions des articles 126 et 364 de la loi.

[165]       En effet, comme on l’a vu dans la section des faits, le travailleur signait le ou vers le 4 juillet 1995 une entente avec la CCQ intitulé «Avance d’indemnité sans intérêt» dans laquelle il autorisait la CSST à verser directement à la CCQ toute indemnité payable de remplacement du revenu qui lui serait due jusqu’à concurrence de l’avance qui lui était consenti par la CCQ, le tout dans le cas où sa réclamation à la CSST serait reconnue.  Ajoutons que cette somme ne porte pas d’intérêt selon le document précité.

[166]       Suite à la signature de ce document, une somme totale de 13 020 $ fut avancée au travailleur, somme qui plus tard sera au centre du débat opposant la CSST et le travailleur dans le cadre du litige actuel.

[167]       Les articles 126 et 364 énoncent :

126. La Commission peut prélever sur une indemnité de remplacement du revenu et rembourser à l'employeur l'équivalent de ce qu'il paie au travailleur à compter du quinzième jour complet d'incapacité sous forme d'allocation ou d'indemnité, à moins que ce paiement ne soit fait pour combler la différence entre le salaire du travailleur et le montant de l'indemnité à laquelle il a droit.

________

1985, c. 6, a. 126.

 

 

364. Si une décision rendue par la Commission, à la suite d'une demande faite en vertu de l'article 358, ou par la Commission des lésions professionnelles reconnaît à un bénéficiaire le droit à une indemnité qui lui avait d'abord été refusée, ou augmente le montant d'une indemnité, la Commission lui paie des intérêts à compter de la date de la réclamation.

 

Le taux de ces intérêts est déterminé suivant les règles établies par règlement. Ces intérêts se capitalisent quotidiennement et font partie de l'indemnité.

________

1985, c. 6, a. 364; 1993, c. 5, a. 20; 1997, c. 27, a. 20; 1996, c. 70, a. 42.

[168]       Ainsi, quant au paiement des indemnités de remplacement du revenu, en principe général, l’article 124 prévoit que la CSST verse au travailleur l’indemnité de remplacement du revenu à laquelle il a droit à compter de la quinzième journée complète suivant le début de son incapacité à exercer son emploi.

[169]       Pour sa part, l’employeur, en application de l’article 60 de la loi doit verser à son travailleur, pour les 14 premiers jours d’incapacité, 90 % de son salaire net pour chaque jour ou partie de jour où le travailleur aurait normalement travaillé.

[170]       Or, les dispositions de l’article 126 stipulent expressément, de façon exceptionnelle, que la CSST peut prélever sur une indemnité de remplacement du revenu due au travailleur et remboursée à l’employeur l’équivalent de ce qu’il a payé à son travailleur à compter du quinzième jour d’incapacité, le tout sous forme d’allocation ou d’indemnité.  Effectivement, le travailleur en signant le document du 4 juillet 1995 a pu bénéficier, pour la période indiquée, d’avances par son employeur spécifiquement payé à titre de remplacement de son indemnité de remplacement du revenu.  Bien plus, ce document prévoit le remboursement direct à la CCQ des sommes avancées dans le cadre où le travailleur se verrait déclarer admissible à recevoir ses prestations, ce qui est le cas aux présentes.

[171]       D’ailleurs, l’article 126 fut interprété par la Commission d’appel dans les dossiers de Prud’Homme et Centre de réadaptation Lucie Bruneau ainsi que Proteau[7] et ETI Energy Transportation inc.[8].

[172]       Les sommes avancées par l’employeur constituent l’indemnité de remplacement du revenu tel que prévu par la loi[9].  Dès lors, dans un tel contexte, si l’on versait l’indemnité de remplacement du revenu au travailleur il recevrait une double indemnité ayant déjà été compensée par son employeur pour cette période.

[173]       D’autre part, le travailleur ayant déjà reçu son indemnité de remplacement du revenu, on comprendra que le paiement effectué par l’employeur aux lieux et place de la CSST, à cette époque, n’entraîne pas d’intérêt, la somme ayant été versée et perçue.  Dès lors, ce montant de 13 020 $ échappe donc, pour le travailleur, à l’indemnité qui lui est payable en vertu de l’article 364 de la loi et n’entraîne pas le paiement d’un intérêt, à moins que l’on établisse l’existence d’un «reliquat» résultant d’une différence entre les montants avancés par la CCQ et le montant d’indemnité de remplacement du revenu versée par la CSST pour cette période.

[174]       La Commission des lésions professionnelles réfère le lecteur aux causes Riverin et CSST,[10] Dupuis et Hôpital Hôtel-Dieu de Montréal[11], Moreau et Atlas Asbestos co. ltée[12] ainsi que Hamel et Autobus Saint-Hubert 1983 inc[13], Sweeney et Jardin de la Rive[14].

[175]       De plus, la Commission des lésions professionnelles ajoute que le taux d’intérêt prévu à l’article 364 était expressément stipulé à son alinéa 2 en ce qu’il est déterminé suivant les règles établies par règlement.

[176]       Par ces motifs, la Commission des lésions professionnelles doit donc conclure que le travailleur n’a pas le droit d’obtenir le remboursement des intérêts sur un montant de 13 020 $ qui lui fut avancé par la CCQ.

[177]       Dans le dossier 108932757-00005; Médicaments

Quant aux médicaments visés par les réclamations du travailleur, la Commission des lésions professionnelles souligne que les dispositions des articles 188 et suivants s’appliquent aux demandes du travailleur.  Plus spécifiquement, les articles 188 et 189 édictent :

188. Le travailleur victime d'une lésion professionnelle a droit à l'assistance médicale que requiert son état en raison de cette lésion.

________

1985, c. 6, a. 188.

 

 

189. L'assistance médicale consiste en ce qui suit :

 

  les services de professionnels de la santé;

  les soins ou les traitements fournis par un établissement visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S‑4.2) ou la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris (chapitre S‑5);

  les médicaments et autres produits pharmaceutiques;

  les prothèses et orthèses au sens de la Loi sur la protection de la santé publique (chapitre P‑35), prescrites par un professionnel de la santé et disponibles chez un fournisseur agréé par la Régie de l'assurance‑maladie du Québec ou, s'il s'agit d'un fournisseur qui n'est pas établi au Québec, reconnu par la Commission;

  les soins, les traitements, les aides techniques et les frais non visés aux paragraphes 1° à 4° que la Commission détermine par règlement, lequel peut prévoir les cas, conditions et limites monétaires des paiements qui peuvent être effectués ainsi que les autorisations préalables auxquelles ces paiements peuvent être assujettis.

________

1985, c. 6, a. 189; 1992, c. 11, a. 8; 1994, c. 23, a. 23.

 

 

 

[178]       Comme il appert des dispositions générales de l’article 188, le travailleur a le droit d’obtenir l’assistance médicale que requiert son état en raison de sa lésion professionnelle.  Dès lors, l’assistance médicale est assujettie à deux conditions :

-                     le travailleur doit être victime d’une lésion professionnelle; et

-                     l’assistance médicale prescrite doit être requise par son état de santé en raison de sa lésion professionnelle.

[179]       D’autre part, en application de l’article 189 alinéa 3, l’assistance médicale porte sur les médicaments et autres produits pharmaceutiques que doit obtenir le travailleur dans le contexte des deux conditions fixées conformément à l’article 188 de la loi.

[180]       D’ailleurs, sur ce sujet, la Commission des lésions professionnelles tient à souligner que bien qu’un médicament puisse être prescrit par le médecin traitant du travailleur, il n’en demeure que la seule prescription en soi-même n’entraîne pas l’établissement d’une relation, d’un lien de causalité entre l’état de santé du travailleur pour lequel on prend ce médicament et les conséquences de sa lésion professionnelle.

[181]       Plutôt, il faut établir, par une prépondérance de preuve, que le médicament prescrit l’est pour une condition résultant directement de la lésion professionnelle et non pas pour des conditions personnelles n’ayant aucun facteur de rattachement avec la lésion professionnelle.

[182]       Dans les circonstances actuelles, la prépondérance de preuve a établi que le médicament Rhovane est un hypnotique permettant au travailleur de pouvoir dormir plus aisément eut égard aux phénomènes douloureux résiduels qu’il présente en permanence.  En conséquence, cette prescription tend à pallier à une conséquence directe de la lésion professionnelle et est donc rattachable à celle-ci.

[183]       Quant aux médicaments Diovan et Novo-Veramil SR, il s’agit de médicaments prescrits au travailleur eut égard à son hypertension artérielle.  Bien que le docteur Brault, à son rapport du 4 octobre 1989, semble indiquer que la prescription de ses médications résulterait des contraintes physiques et psychologiques résultant des symptômes douloureux, le tout enclenchant un phénomène d’hypertension, la Commission des lésions professionnelles doit constater que cette affirmation n’est nullement soutenue par une argumentation se fondant sur la doctrine médicale ou factuelle.

[184]       En effet, bien que le travailleur présente un syndrome douloureux résiduel, rien n’indique que ce syndrome puisse entraîner une augmentation de la tension artérielle du travailleur sur une période de temps soutenue.  Ici, il ne s’agit pas d’une condition résultant d’un état de choc traumatique mais plutôt d’une condition permanente affectant le travailleur sur une période de temps prolongée.  D’autre part, d’aucune façon on a reconnu que le travailleur subissait des atteintes psychologiques, dans ce dossier, suite à sa lésion professionnelle.

[185]       En conséquence, la Commission des lésions professionnelles confirme la décision de la CSST sur le refus de rembourser l’acquisition de ces médicaments.

[186]       Finalement, quant au Viagra, la Commission des lésions professionnelles constate que la prépondérance de preuve constituée de l’avis émis par le docteur Brault à ses rapports médicaux ainsi que l’avis émis au rapport médical du 26 mai 2000 sont suffisants pour permettre de rattacher la prise de ce médicament aux conséquences qu’a entraîné la lésion professionnelle subie par le travailleur.  En effet, cette prépondérance de preuve démontre que les problèmes sexuels (érection) sont bien documentés dans la littérature médicale comme l’énonce le docteur Brault et rattachables à la hernie discale, au traitement subi et aux conditions résiduelles diagnostiquées.

[187]       En conséquence, la Commission des lésions professionnelles accueille en partie la demande du travailleur et ordonne le remboursement du coût d’acquisition des médicaments Rhovane et Viagra.

[188]       Dans le dossier 108932757-00008;

Qu’en est-il du droit du travailleur d’obtenir le remboursement de ses frais de déménagement survenu le ou vers le 22 juin 1999 ?

[189]       Comme on l’a vu précédemment à la présente décision, le travailleur a le droit de recevoir la réadaptation que requiert son état.  Plus spécifiquement, les articles 153 et 154 stipulent expressément :

153. L'adaptation du domicile d'un travailleur peut être faite si :

 

  le travailleur a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique;

  cette adaptation est nécessaire et constitue la solution appropriée pour permettre au travailleur d'entrer et de sortir de façon autonome de son domicile et d'avoir accès, de façon autonome, aux biens et commodités de son domicile; et

  le travailleur s'engage à y demeurer au moins trois ans.

 

Lorsque le travailleur est locataire, il doit fournir à la Commission copie d'un bail d'une durée minimale de trois ans.

________

1985, c. 6, a. 153.

 

 

154. Lorsque le domicile d'un travailleur visé dans l'article 153 ne peut être adapté à sa capacité résiduelle, ce travailleur peut être remboursé des frais qu'il engage, jusqu'à concurrence de 3 000 $, pour déménager dans un nouveau domicile adapté à sa capacité résiduelle ou qui peut l'être.

 

À cette fin, le travailleur doit fournir à la Commission au moins deux estimations détaillées dont la teneur est conforme à ce qu'elle exige.

________

1985, c. 6, a. 154.

 

 

 

[190]       Ces dispositions font partie de la réadaptation sociale qui, comme on l’a vu, visent à permettre au travailleur de surmonter les conséquences d’une lésion professionnelle et à pouvoir s’adapter à sa nouvelle situation tout en retrouvant un maximum d’autonomie.

[191]       Plus spécifiquement, quant à l’application des articles 153 et 154, on constate qu’il existe certaines conditions.  En effet, quant à l’article 153, on stipule expressément que l’adaptation du domicile peut être fait si :

-                     le travailleur subit une atteinte permanente grave à son intégrité physique;

-                     l’adaptation est nécessaire du fait de la lésion professionnelle;

-                     l’adaptation constitue la solution appropriée pour permettre au travailleur d’entrer dans son domicile et d’en sortir de façon autonome et d’utiliser les biens et commodités de ce dernier;

-                     le travailleur s’engage à habiter au mois à trois ans à son domicile.

[192]       Résiduellement, cet article stipule que si le travailleur est locataire, il doit fournir à la CSST un bail d’une durée minimale de trois ans.

[193]       Or, conformément à la preuve offerte à la Commission des lésions professionnelles, le travailleur, avant son déménagement, ne bénéficiait pas d’un bail d’une durée de trois ans.  Plutôt, il s’agissait d’une location au mois.

[194]       En second lieu, comme on peut le voir du rapport préparé par madame Hélène Martin, au mois d’avril 1999, la résidence qu’occupait le travailleur était peu adaptée à sa condition résiduelle, tout particulièrement aux limitations fonctionnelles importantes affectant le travailleur.

[195]       Certains adaptations étaient proposées mais il en demeure, conformément à la preuve offerte lors de l’audience, preuve se fondant aussi bien sur les photographies déposées devant la Commission des lésions professionnelles que sur le témoignage du travailleur, que les lieux habités étaient peu ou pas adaptables à l’état résiduel du travailleur suite à sa lésion professionnelle.

[196]       D’ailleurs, sur ce sujet, la Commission des lésions professionnelles considère qu’en prenant en considération le taux d’incapacité du travailleur ainsi que ses limitations fonctionnelles, il faut bien reconnaître que celui-ci est affecté par une atteinte permanente grave à son intégrité physique.  Conformément au diagnostic résiduel posé par le docteur Brault, médecin traitant, on constate que le travailleur semble bien présenter un syndrome cicatriciel important au niveau L4-L5 produisant des effets constants au niveau de la capacité résiduelle du travailleur.  Bien plus, on semble indiquer que le travailleur présenterait même une récidive d’hernie discale à ce niveau.

[197]       Dès lors, la Commission des lésions professionnelles conclut, pour les raisons précitées, que le travailleur ne pouvait maintenir son domicile dans les lieux qu’il occupait habituellement et que le déménagement du travailleur était requis en application de l’article 154 de la loi.  En effet, cet article prévoit que lorsque le domicile du travailleur ne peut être adapté à sa condition résiduelle celui-ci peut être remboursé, jusqu’à concurrence de 3 000 $, des frais qu’il engage pour déménager dans un nouveau domicile adaptable à sa capacité résiduelle.

[198]       Dans le présent cas, le travailleur est devenu propriétaire de son nouveau domicile ce qui assure la permanence des adaptations du domicile.

[199]       Sur ce sujet, la Commission des lésions professionnelles constate que le travailleur a obtenu une estimation et a soumis sa demande préalablement à son déménagement.  Dans un tel cas, la Commission des lésions professionnelles croit donc que le travailleur est en droit d’obtenir le remboursement des montants qu’il a engagés pour déménager dans son nouveau domicile, le tout en application de l’article 154 de la loi.

[200]       Dans les dossiers 108932757-00006, 00009 et 00012; Entretien du domicile

Toujours dans le contexte de la réadaptation sociale du travailleur, l’article 165 de la loi stipule :

165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui‑même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.

________

1985, c. 6, a. 165.

 

 

 

[201]       Tel qu’il appert de cette disposition législative, le travailleur a le droit d’obtenir le remboursement des frais qu’il engage, jusqu’à concurrence d’un montant fixé par l’article 165, pour faire exécuter des travaux, travaux qu’il aurait pu effectuer lui-même si ce n’est de sa lésion professionnelle pour s’assurer de l’entretien courant de son domicile.

[202]       La rédaction de l’article 165 est claire et non équivoque.  Elle se situe dans le cadre général de l’objectif requis par les articles 151 et 145 de la loi.  Il en résulte donc que tous les travaux d’entretien, c'est-à-dire des travaux qui n’entraînent pas une plus-value pour le domicile et qui sont requis pour maintenir le bon fonctionnement de celui-ci sont couverts par cet article.

[203]       Dans les circonstances, la preuve offerte à la Commission des lésions professionnelles permet de conclure que le travailleur aurait effectivement lui-même effectué le déneigement de ses toitures, le ramonage de la cheminée ainsi que la coupe de son bois de chauffage de quatre pieds en bûches de dimension acceptable par son système de combustion lente.

[204]       De façon plus spécifique, la Commission des lésions professionnelles précise qu’il ne s’agit pas du coût d’acquisition du bois mais plutôt de la main-d’oeuvre requise pour couper le bois en mesure utilisable.

[205]       Il est bien évident que les limitations fonctionnelles reconnues au travailleur dans le cadre de sa lésion professionnelle l’empêchent de pouvoir exécuter ses tâches, tâches qu’il aurait exécuté lui-même aussi bien si l’on prend en considération ses expériences antérieures de travail que l’équipement qu’il possède.  Comme on l’a vu dans les pages précédentes, la Commission des lésions professionnelles a déjà conclut que le travailleur présentait une atteinte permanente grave et, qu’en conséquence, il satisfait donc aux conditions requises par l’article 165 pour obtenir les remboursements demandés.

[206]       Dans le dossier 108932757-00010; Récidive

Finalement, qu’en est-il de la rechute, récidive ou aggravation alléguée comme étant survenue le 28 décembre 1999 ?

[207]       À l’article 2 de la loi, le législateur québécois n’a pas défini les termes de «rechute, récidive ou aggravation». 

[208]       Conformément à la jurisprudence unanime sur le sujet[15] et des définitions usuelles des dictionnaires médicaux, ces expressions signifient une reprise évolutive, une réapparition, une recrudescence ou une aggravation d’une lésion professionnelle reconnue ainsi que de ses conséquences.

[209]       De telles définitions impliquent donc que les examens cliniques objectifs pratiqués par les professionnels de la santé démontrent une modification, un changement, une détérioration de l’état de santé du travailleur par comparaison avec l’état résiduel qu’il présentait lors de la consolidation de sa lésion professionnelle.

[210]       En effet, à l’article 2, on définit le terme «consolidation» de la façon suivante :

« consolidation » : la guérison ou la stabilisation d'une lésion professionnelle à la suite de laquelle aucune amélioration de l'état de santé du travailleur victime de cette lésion n'est prévisible ;

 

 

 

[211]       Il en résulte donc que lorsque l’on a consolidé la lésion professionnelle initiale, les professionnels de la santé ont porté un constat établissant soit la guérison ou la stabilisation de cette lésion à la suite de laquelle aucune amélioration de l’état de santé du travailleur n’était prévisible.  Ce constat a des conséquences administratives puisque, à partir de cette date, l’on doit déterminer si le travailleur est en mesure de reprendre son emploi préaccidentel et, à défaut, un emploi approprié à sa condition.  Ainsi donc, s’enclenche le processus de réadaptation sociale dans les cas requis ainsi que les processus menant à la fin ou réduction des paiements d’indemnité de remplacement du revenu.

[212]       D’ailleurs, à partir de cette date, les traitements médicaux ne sont plus requis si ce n’est dans le cadre de maintenir la capacité résiduelle du travailleur.

[213]       En second lieu, au centre de la notion de «rechute, récidive ou aggravation», se retrouve la nécessaire relation qui doit exister entre la lésion professionnelle initiale, ses conséquences médicales et la lésion pour laquelle le travailleur est traitée subséquemment lors de la rechute, récidive ou aggravation alléguée.  Il s’agit d’une relation de cause à effet qui maintient donc le lien indemnisable entre la lésion professionnelle initiale et les conséquences ultérieures d’une telle lésion, conséquences ayant un effet sur la capacité du travailleur à vaquer à ses occupations professionnelles.

[214]       Afin de mieux cerner cette relation, la jurisprudence de la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d’appel) ainsi que de la Commission des lésions professionnelles a dégagé un certain nombre de paramètres[16].  Sans avoir la prétention d’en faire une liste exhaustive, rappelons les principaux :

-                     existence ou non d’une condition préexistante à la lésion professionnelle initiale;

-                     gravité de la lésion professionnelle initiale, diagnostic et site de lésions reconnues;

-                     existence d’une atteinte permanente ou de limitations fonctionnelles à la date de consolidation de la lésion professionnelle initiale;

-                     description de l’état résiduel du travailleur lors de la consolidation de la lésion professionnelle initiale;

-                     durée de la période intermédiaire entre la consolidation de la lésion professionnelle initiale et l’apparition de la rechute, récidive ou aggravation alléguée;

-                     suivi médical pendant cette période intermédiaire;

-                     absence de tout autre fait accidentel causal non relié à la lésion professionnelle ayant une influence déterminante sur l’apparition de la symptomatologie traitée lors de la rechute, récidive ou aggravation alléguée;

-                     identité des sites et/ou des diagnostics entre la lésion professionnelle initiale et la lésion pour laquelle le travailleur est traité lors de la rechute, récidive ou aggravation;

-                     compatibilité médicale entre la lésion professionnelle initiale et la lésion pour laquelle le travailleur est traité lors de la rechute, récidive ou aggravation.

 

 

[215]       En conséquence, il appartiendra au travailleur de démontrer par une prépondérance de preuve cette relation entre la lésion professionnelle d’origine et la lésion traitée lors de la rechute, récidive ou aggravation.  Une telle relation ne peut être présumée et se fonde sur une preuve de nature médicale.  Le seul témoignage du travailleur est insuffisant pour établir cette relation de nature médicale.

[216]       La prépondérance de preuve offerte à la Commission des lésions professionnelles lui permet de conclure que la chute qu’a fait le travailleur, le 28 décembre 1999, dans les marches extérieures de son domicile résulte des conséquences directes de sa lésion professionnelle.

[217]       En effet, tout au long de la lecture des différents rapports médicaux de ce dossier, il est constaté que le travailleur s’est toujours plaint de dérobade du genou droit le tout en regard de la lombosciatalgie résiduelle qu’il présente.  D’ailleurs, cette crainte du travailleur est bien documentée par les rapports médicaux des médecins traitant et tout particulièrement par les rapports de suivi médical émis par le docteur Yves Brault.

[218]       D’autre part, la disposition des lieux, plus spécifiquement de l’escalier dont il est question fut tout particulièrement étudiés par madame Nathalie Perreault à son rapport du 23 février 2000, le tout dans l’objectif de pouvoir recommander des modifications spécifiques à être apportées par l’installation d’une main courante.

[219]       La Commission des lésions professionnelles tient à souligner que la crédibilité du travailleur est demeurée pleine et entière et, qu’en tout état de cause, rien de lui permettrait de douter des déclarations de celui-ci.  Le travailleur présente une boiterie au membre inférieur droit, une faiblesse acquise qui, selon ses déclarations, s’est manifestée par une dérobade du genou droit lors de la chute survenue le 28 décembre 1999.

[220]       Il en résulte donc que la cause directe et immédiate de la chute du travailleur est rattachable directement aux conséquences de sa lésion professionnelle.

[221]       D’autre part, suite à cette chute, la prépondérance de preuve permet d’établir que le travailleur a subi uniquement une entorse dorsale, seul diagnostic retenu par les médecins qui ont eu à évaluer sa condition, les 28 et 29 décembre 1999.

[222]       Quant à l’infarctus du myocarde, rien dans la preuve offerte à la Commission des lésions professionnelles ne permet d’établir un facteur de rattachement soit avec la lésion professionnelle de 1994, soit avec la chute du 28 décembre 1999.

[223]       Sur ce sujet, la Commission des lésions professionnelles souligne qu’il appartenait au travailleur de démontrer par une prépondérance de preuve qu’il existait un tel facteur de rattachement.  Ce facteur doit être établi par une preuve médicale prépondérante démontrant le lien de causalité entre l’infarctus du myocarde et les événements auxquels on veut bien les rattacher.  Une telle preuve ne fut pas offerte à la Commission des lésions professionnelles.  Plutôt, il s’agit d’allégations non soutenues par une preuve objective et prépondérante.

[224]       En conséquence, la Commission des lésions professionnelles ne peut mettre en relation l’infarctus du myocarde avec les lésions professionnelles du travailleur.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

 

ACCUEILLE, en partie, les requêtes introduites par monsieur Michel Mercier les 31 janvier et 10 juillet 2000;

CONSTATE qu’il n’existe pas de réel litige dans les dossiers 108932757-00001 et 108932757-00011;

 

Dans le dossier 108932757-00002 :

DÉCLARE que monsieur Michel Mercier a le droit de recevoir de l’aide personnelle à domicile pour les périodes et aux montants fixés à la présente décision.

 

Dans le dossier 108932757-00003 :

 

DÉCLARE que monsieur Michel Mercier ne peut bénéficier des dispositions de l’article 116 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

 

Dans le dossier 108932757-00004 :

DÉCLARE que monsieur Michel Mercier n’a pas le droit de recevoir les intérêts sur une somme de 13 020 $ qui lui fut avancée par la Commission de la construction du Québec pour la période du 6 mars 1995 au 20  novembre 1995.

 

Dans les dossiers 108932757-00005 et 108932757-00007 :

DÉCLARE que monsieur Michel Mercier a le droit d’obtenir le remboursement du coût d’achat seulement, des médicaments Rhovane et Viagra.

 

Dans les dossiers 108932757-00006, 108932757-00009 et 108932757-00012 :

DÉCLARE que monsieur Michel Mercier a le droit d’obtenir le remboursement des frais qu’il encourt pour l’entretien de son domicile, dans les limites prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

 

Dans le dossier 108932757-00008 :

DÉCLARE que monsieur Michel Mercier a le droit d’obtenir le remboursement des frais qu’il a encouru lors de son déménagement survenu au mois de juin 1999, le tout en application des articles 153 et 154 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

 

 

 

Dans le dossier 108932757-00010 :

DÉCLARE que monsieur Michel Mercier a subi une rechute, récidive ou aggravation, le 28 décembre 1999, de sa lésion professionnelle du 13 octobre 1994, entraînant une entorse dorsale;

DÉCLARE que l’infarctus du myocarde subi par monsieur Michel Mercier le ou vers le 30 décembre 1999 n’est pas relié à sa lésion professionnelle.

 

 

 

 

 

 

 

PIERRE SIMARD

 

Commissaire

 

 

 

 

 

PAULETTE GIROUX

10, rue Pleau

Pont-Rouge (Québec)

G0A 2X0

 

Représentante de la partie requérante

 

 

 

PANNETON LESSARD

Me Berthi Fillion

730, boulevard Charest Est

Québec (Québec)

G1K 7S6

 

Représentant de la partie intervenante

 

 

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           Purolator ltée et Langlois n° 87109-62-9703, 97-12-11, Rock Jolicoeur commissaire, (J9-11-06).

[3]           Cité de Dorval et Latreille [1995] CALP 1572 .

[4]           120748-31-9907 et 120749-31-9907, 15 juin 2000, Pierre Simard commissaire.

[5]           117232-02-9905, C.L.P., 20 septembre 2000, commissaire Pierre Simard.

[6]           L.R.Q, c. S-2.1.

[7]           [1993] CALP 1566 .

[8]           54730-62-9311, 95-08-23, commissaire Jean-Yves Desjardins.

[9]           Bouchard et Commission Scolaire Des Chûtes Montmorency, 19623-03-9006, 92-11-23, R. Ouellet (J4-24-               08).

[10]         [1996] CALP 1542 .

[11]         17743-62-9003, 93-03-08, L. McCutchon.

[12]         51934-60-9306, 95-03-16, B. Lemay (J7-03-23).

[13]         [1990] CALP .99.

[14]         54625-629204, 94-05-27, S. Dipasquala.

[15]         Salaisons Brochu inc. et Grenier, CALP 28997-03-9105, 18 juillet 1995, Marie Beaudoin; Lapointe et               Compagnie Minière Québec Cartier [1989] CALP 38 ; Morel et Le Centre Routier inc. [1989] CALP 1171 .

[16]         Doyon et Beauce Fibres de verre, CALP 40063-03-9206, 25 janvier 1996, Jean-Marc Dubois; Valiquette et                 Ministère des transports, 49243-64-9303, 4 septembre 1996, F. Dion-Drapeau.

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