RÉGION: |
LANAUDIÈRE |
CHICOUTIMI, LE 19 OCTOBRE 1999 |
|||
|
|||||
DOSSIER: |
Q-94190-63-9802-C |
DEVANT LE COMMISSAIRE: |
Me PIERRE SIMARD |
||
|
|
|
|||
|
ASSISTÉ DES MEMBRES : |
LORRAINE PATENAUDE |
|||
|
|
Associations d'employeurs
|
|||
|
|
GÉRALD DION |
|||
|
|
Associations syndicales |
|||
|
|
|
|||
|
|
|
|||
DOSSIER CSST |
110342532 |
AUDIENCE TENUE LE : |
5 AOÛT 1999 |
||
|
|||||
DOSSIER BRP : |
62434172 |
À : |
JOLIETTE
|
||
|
__________________________________________________
DÉCISION CORRIGÉE__________________________________________________
|
|
|||
|
ANDRÉE CHARBONNEAU
|
|
|||
|
|
|
|||
|
|
PARTIE REQUÉRANTE |
|||
|
ET |
|
|||
|
|
|
|||
|
ALIMENTS FLAMINGO (DIV. C.F.Q.) |
||||
|
|
PARTIE INTÉRESSÉE |
|||
|
|
||||
[1.] La Commission des lésions professionnelles a pris connaissance de la requête en rectification introduite par la CSST concernant le présent dossier.
[2.] Le représentant de la travailleuse Andrée Charbonneau a communiqué avec la Commission des lésions professionnelle et on reconnaît qu’une erreur d’écriture s’est glissée à la page 44 du paragraphe suivant :
« Déclare que le diagnostic de mésadaptation affective n’est pas sans relation avec la lésion professionnelle du 30 octobre 1995. »
[3.] Ce paragraphe aurait dû se lire de la façon suivante :
« Déclare que le diagnostic de mésadaptation affective n’est pas en relation avec la lésion professionnelle du 30 octobre 1995. »
[4.] Que les termes de l’article 429.55 énoncent :
429.55. La décision, l'ordre ou l'ordonnance entaché d'une erreur d'écriture ou de calcul ou de quelque autre erreur matérielle peut être rectifiée, sur dossier et sans autre formalité, par le commissaire qui l'a rendu.
Si le commissaire est empêché ou a cessé d'exercer ses fonctions, un autre commissaire désigné par le président peut rectifier la décision.
________
1997, c. 27, a. 24.
[5.] Effectivement, dans les circonstances, il s’agit d’une simple erreur d’écriture et qu’en conséquence la Commission des lésions professionnelles modifie et corrige l’erreur contenue au paragraphe précité de la décision du 19 octobre 1999 et concernant les parties précitées, dans le dossier de la Commission numéro Q-94190-63-9802 de telle façon que ce paragraphe doit se lire comme suit :
« Déclare que le diagnostic de mésadaptation affective n’est pas enrelation avec la lésion professionnelle du 30 octobre 1995. »
|
|
|
Me PIERRE SIMARD |
|
Commissaire |
|
|
DÉCISION
[1.] Le 3 février 1998, le représentant de madame Andrée Charbonneau (la travailleuse) transmet une déclaration d’appel à la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles (la Commission d’appel) à l’encontre d’une décision rendue le 6 janvier 1998 par le Bureau de révision de la région de Lanaudière.
[2.] Par cette décision unanime, le Bureau de révision maintient la décision rendue le 13 janvier 1997 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail et rejette la réclamation de madame Andrée Charbonneau pour une récidive, rechute ou aggravation de sa lésion professionnelle initiale du 30 octobre 1995, s’étant manifestée le 10 septembre 1996.
[3.] Bien que l’appel de madame Andrée Charbonneau ait été déposé à la Commission d’appel, la présente décision est rendue par la Commission des lésions professionnelles conformément à l’article 52 de la Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives, L.Q. 1997, c.27 entrée en vigueur le 1er avril 1998. En vertu de l’article 52 de cette loi, les affaires pendantes devant la Commission d’appel sont continuées et décidées devant la Commission des lésions professionnelles.
[4.] Une audition fut dûment convoquée et tenue devant la Commission des lésions professionnelles, siégeant à Joliette, le 5 août 1999. Les parties étaient présentes et représentées.
OBJET DU LITIGE
[5.] La travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision émise par le Bureau de révision en date du 6 janvier 1998 et de déclarer qu’elle fut victime d’une récidive, rechute ou aggravation de sa lésion professionnelle initiale du 30 octobre 1995, le tout en date du 10 septembre 1996. De façon plus spécifique, elle demande de reconnaître la relation entre l’événement du 30 octobre 1995, les lésions en résultant, et les diagnostics de syndrome du défilé thoracique bilatéral ainsi que de mésadaptation affective.
LA PREUVE
[6.] Lors de l’audience tenue devant la Commission des lésions professionnelles, furent entendus la travailleuse ainsi que les docteurs Gilles Tremblay et Marc Goulet. De plus, la Commission des lésions professionnelles a pris connaissance d’une décision émise par le commissaire Yves Tardif, dans le présent dossier, le tout en date du 18 novembre 1997. Cette décision a l’insigne avantage de résumer de façon extensive le contenu du dossier ainsi que le contenu de la preuve administrée devant la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles. En conséquence, dans un premier temps, la Commission des lésions professionnelles se réfère à la section des faits contenue à cette décision le tout tel que rapporté ci-après. La Commission des lésions professionnelles complétera la section des faits avec les éléments de preuve pertinents qui lui furent administrés lors de son audience.
« La travailleuse, emballeuse au service de l'employeur, la
Coopérative fédérée du Québec (Division Aliments Flamingo),
allègue la survenance d'un accident du travail le 30 octobre 1995
ainsi décrit au formulaire « Avis de l'employeur et demande de
remboursement » :
« *Je travaillais au lavage de boîtes vides de
plastique et à les empillées sur une palette de bois.
quand la palette est remplie, on vient la chercher à
l'aide d'un Chariot électrique. alors mon compagnon est
venu la chercher et une pile de boîtes a tombée sur
moi. » (sic)
Elle est examinée le jour même par le docteur Depelteau qui
diagnostique des contusions multiples au cou, au bassin et à la
hanche droite. Il recommande un arrêt de travail pour 10 jours.
Les notes hospitalières prises le jour même se lisent notamment
ainsi :
« Au travail, a reçu caisses empilées, s'est cognée
contre un comptoir et tombee par terre s'est cognée la
tête, n'a pas bougé avant l'arrivée des ambulanciers.
perte de conscience seulement léger étourdiss.
céphalée nausée vomm. ressent doul. cou, colonne
lombaire, hanche D, sp par ailleurs
(...)
doul palp colonne cervicale + lombaire
(...)
petit hématome au dessus crête iliaque D.»
Des radiographies de la colonne cervicale, de la colonne lombaire
et du bassin prises le même jour, une radiographie du poignet
gauche prise une semaine plus tard et une radiographie de la main
gauche prise le 15 novembre 1995 ne révèlent rien d'anormal sauf
pour une « Légère rotoscoliose lombaire à convexité gauche ». La
travailleuse commence à recevoir des traitements de
physiothérapie à partir du 17 novembre 1995. Le docteur Daoust
examine la travailleuse le 23 novembre 1995 et retient les
diagnostics de contusions multiples, de lombalgie et de
cervicalgie.
La Commission accepte la demande d'indemnisation de la
travailleuse le 30 novembre 1995 pour des contusions multiples.
Au cours des mois qui suivent, la travailleuse est vue
régulièrement par ses médecins, les docteurs Laporte, qui
retiennent les diagnostics de contusions multiples, d'entorse
lombaire et d'entorse cervicale. Le 31 janvier 1996, le docteur
Laporte met fin aux traitements de physiothérapie et
d'ostéopathie et ajoute : « Tentons chiro ». Il suggère de
continuer la chiropractie le 15 février 1996.
Entre-temps, le 30 janvier 1996, le physiothérapeute Morinville a
écrit au docteur Laporte :
« Nous avons vu cette patiente à 25 reprises depuis le
début des traitements le 16 novembre 1995. Les
modalités thérapeutiques employées sont les
enveloppements chauds, les ultrasons, les courants
diadynamiques, les mobilisations vertébrales douces, un
programme d'exercices d'assouplissement et le massage.
De façon subjective la patiente nous mentionne la
persistance de tensions au niveau de ses muscles des
trapèzes avec une certaine raideur du rachis cervical
et de la région lombaire. Elle nous mentionne des
élancements au niveau de son poignet gauche qui
semblent beaucoup moins importants avec la prise de
médication.
L'examen nous montre une posture avec une légère
scoliose lombaire. La mobilité articulaire du tronc
montre une flexion atteignant une distance doigt-sol de
6 pouces, les mouvements de latéro-flexion et de
rotation sont complets. Au niveau du cou on retrouve
une mobilité tout à fait dans les limites de la
normale. Le poignet gauche montre une douleur lors de
l'hyperflexion. La palpation est douloureuse en C1 C2
C3 gauches et une certaine sensibilité du côté droit.
On retrouve la transverse gauche de L5 et la sacro-
iliaque gauche douloureuses. On retrouve aussi une
sensibilité au niveau du grand os des os du carpe du
poignet gauche. La force de préhension de la main
gauche est de 5 kg. comparativement à la main droite
chez cette patiente droitière de 11.5 kg.
En général on note une mobilité articulaire du cou et
du tronc très satisfaisante, tensions musculaires
persistantes au niveau des trapèzes, et faiblesse de la
préhension de la main gauche. Nous sommes toujours
disposés à poursuivre la physiothérapie jusqu'à
consolidation de la condition. »
À la demande de l'employeur, la travailleuse est examinée le 1er
février 1996 par le docteur Goulet :
«Histoire subjective actuelle:
Madame Charbonneau se plaint de douleurs au niveau de
la nuque, douleurs qui irradient au niveau de ses
épaules et de ses bras. La symptomatologie est
particulièrement importante lorsqu'elle doit bouger ses
bras. La symptomatologie au niveau de la nuque se
manifeste lors des mouvements d'inclinaison latérale
gauche ou droite. Il n'existe pas de paresthésie au
niveau des membres supérieurs.
(...)
Examen objectif actuel:
(...)
Le rachis cervical démontre une amplitude articulaire
d'excellente qualité avec une flexion antérieure de 45o
et une extension à 50o. Le mouvement d'extension est
douloureux en fin de course. Les mouvements de rotation
droite et gauche sont de 75o et les inclinaisons
latérales sont de 30o. La patiente allègue des douleurs
le long du bord supérieur du trapèze gauche lors de
l'exécution de certains mouvements avec ses membres
supérieurs.
(...)
À l'examen des épaules, la patiente présente un léger
craquement sous-acromial non symptomatique. La
mobilisation active ne démontre aucune limitation avec
une antépulsion et une abduction à 180o. Les rotations
externes sont de 90o, les rotations internes sont de
60o. Les rétropulsions sont identiques à 35o Les
mouvements d'adduction sont de 30o. La patiente allègue
une douleur au niveau de son épaule gauche lors de ces
exercices. Les manoeuvres de Neer sont négatives et il
n'existe pas de signe de déchirure de la coiffe des
rotateurs.
Au niveau des coudes, la flexion est de 150o,
l'extension 0o, les mouvements de prosupination sont de
0 à 90o. Aucune pathologie n'est notée à ce niveau. Au
niveau des poignets, la flexion dorsale est de 70o, la
flexion palmaire est de 60o. La mensuration du poignet
droit est de 16 cm, le gauche de 15 cm. Il n'existe pas
d'épanchement intra-articulaire au niveau de
l'articulation radio-carpienne. Il n'existe pas de
signe de ténosynovite chronique ou aiguë au niveau des
tendons fléchisseurs ou extenseurs. La palpation de
l'apophyse styloïde du cubitus ou radiale n'est pas
douloureuse. Il n'existe pas de pathologie artérielle
ou veineuse au niveau des membres supérieurs.
(...)
À l'examen du rachis lombo-sacré, cette patiente
présente une flexion antérieure qui est de l'ordre de
70o, l'indice de Schober est de 14 /10 sans signe de
latéralisation. Les inclinaisons latérales droite et
gauche sont de 30o, il s'agit surtout du mouvement
d'extension qui est douloureux à la fin du mouvement à
30o. Il n'existe pas de spasme musculaire ou de signe
inflammatoire décelable cliniquement. La patiente
allègue des douleurs à la palpation de la crête iliaque
gauche. Les mouvements de rotation sont de 30o des deux
côtés. La palpation de la crête iliaque ne démontre de
séquelle d'hématome ou de contusion particulièrement au
niveau de la crête iliaque droite.
(...)
Discussion et conclusions:
Selon l'événement décrit, le diagnostic le plus
probable est celui de contusions multiples vis-à-vis
les régions douloureuses lors de l'événement. Les
contusions les plus probables sont au niveau du rachis
cervical et de son épaule gauche, de même qu'au niveau
de la région lombaire et de la région de la crête
iliaque droite. Elle a probablement présenté aussi une
entorse du poignet gauche.
L'examen actuel nous permet d'affirmer que malgré la
symptomatologie, il n'existe aucun déficit objectivable
au niveau de son axe spinal et de ses membres
supérieurs et inférieurs. En somme, nous considérons
que les contusions que cette patiente s'est infligées
doivent être considérées comme consolidées et nous
recommandons comme date de consolidation, la date
d'aujourd'hui, soit le 1er février 1996
Il n'existe pas de traitement particulier à recommander
suite à l'examen actuel et il n'existe pas de
restriction fonctionnelle ni de DAP à retenir suite à
l'événement du 30 octobre 1995. »
Le 14 février 1996, l'employeur demande à la Commission d'envoyer le dossier devant le Bureau d'évaluation médicale quant à la consolidation, aux traitements, à l'atteinte permanente et aux limitations fonctionnelles. L'évaluateur médical, le docteur Hébert, examine la travailleuse le 7 mars 1996 et signe son avis le 11 mars suivant :
« ÉTAT ACTUEL:
Madame Charbonneau n'a pas repris son travail.
Elle reçoit des traitements de chiropractie depuis le
31 janvier 1996 à raison de deux par semaine et
mentionne avoir reçu à date onze traitements. Elle se
dit "un peu améliorée".
La douleur la plus intense se situe au niveau du cou et
des trapèzes, plus marquée du côté droit. La douleur
est associée à des céphalées, à des troubles de
déglutition et des troubles de la vue. Il y a sensation
de "brique attachée aux trapèzes".
Les douleurs qu'elle a déjà ressenties aux membres
supérieurs sont maintenant disparues.
La douleur au bassin est située à la région fessière
supérieure bilatérale et est augmentée par la position
assise prolongée ou lorsque la patiente adopte la
position penchée.
Les chocs électriques qu'elle ressentait dans les
fesses sont maintenant disparus et il n'y a pas de
sciatalgie.
Il y a allégation de persistance de douleur à la masse
musculaire du pouce gauche de même qu'à la face
palmaire du poignet gauche.
EXAMEN OBJECTIF:
Madame Charbonneau mesure 5 pieds 1½ pouces et pèse 118
lbs. Elle est droitière.
L'examen de la colonne cervicale révèle que la flexion
antérieure se fait à 50o, l'extension à 50o. La
rotation de la colonne cervicale amène le menton
successivement à un centimètre des deux épaules et nous
n'avons pu mettre en évidence de spasmes musculaires
aux trapèzes ni lors des mouvements de la colonne
cervicale ni lorsque la patiente a maintenu ses deux
épaules en abduction à 90o contre contraction.
L'examen des deux épaules a démontré une abduction
normale et symétrique à 180o, une antépulsion normale
et symétrique à 180o, une rotation externe normale et
symétrique à 90o et une rotation interne normale et
symétrique à 40o.
L'examen neurologique des membres supérieurs nous a
démontré que les réflexes ostéo-tendineux étaient
normaux et que la sensibilité périphérique était
normale. Nous n'avons pu relever d'ankylose au niveau
des coudes. L'examen des deux poignets a révélé des
dorsiflexions similaires à 70o, des flexions palmaires
similaires à 60o. Il n'y avait pas d'altération dans
les mouvements de pronation et de supination. Au niveau
de la main gauche, nous n'avons noté aucune déformation
ni gonflement et les mouvements des doigts sont tous
complets. Il n'y a pas d'ankylose au niveau du pouce et
celui-ci touche facilement la base du cinquième doigt.
La circulation artérielle aux membres supérieurs est
normale et la manoeuvre d'Adson est négative.
L'examen de la colonne lombaire nous a permis de
constater que la patiente peut marcher sur la pointe
des pieds et sur les talons sans évidence de parésie
aux membres inférieurs.
La flexion antérieure du tronc se fait à 80o et amène
les mains à 20 cm du sol. La flexion latérale se fait à
plus de 30o de chaque côté et l'extension est normale à
30o. Nous n'avons pu relever de spasmes musculaires à
ce niveau.
En position assise, nous n'avons relevé aucun signe de
tripode.
En décubitus dorsal, nous n'avons relevé aucune douleur
à la pression du bassin. L'élévation des membres
inférieurs se fait à 80o avec une douleur lombaire de
chaque côté. La circonférence des deux cuisses est
symétrique à 45 cm et celle des mollets est égale à
33 cm.
L'examen des hanches démontre une flexion normale et
symétrique à 120o et une extension normale et complète
de chaque côté. L'abduction des deux hanches se fait à
45o et l'adduction des deux hanches se fait à 35o. La
rotation externe des deux hanches se fait à 45o et la
rotation interne des deux hanches se fait à 30o.
L'examen neurologique des membres inférieurs n'a pas
démontré d'altération dans la sensibilité périphérique
ni dans l'évaluation des réflexes ostéo-tendineux. »
Il conclut notamment ainsi :
« AVIS MOTIVÉ:
2- DATE OU PÉRIODE PRÉVISIBLE DE CONSOLIDATION DE LA LÉSION:
- Considérant que cette patiente a subi des
contusions multiples le 30 octobre 1995;
- Considérant que les contusions guérissent
généralement en six à huit semaines;
- Considérant que l'examen objectif du docteur
Goulet était normal le 2 février 1996;
- Considérant que l'examen objectif d'aujourd'hui
est normal;
Je retiens le 2 février 1996 comme date de
consolidation de la lésion. »
Il ajoute que les traitements ne sont plus nécessaires et que la
lésion professionnelle n'a entraîné ni atteinte permanente ni
limitation fonctionnelle.
La Commission entérine cet avis le 19 mars 1996, ajoutant qu'elle
cessera de défrayer les soins et traitements, que la travailleuse n'a pas le droit à une indemnité pour dommages corporels, qu'elle est capable d'exercer son emploi, que le versement de l'indemnité
de remplacement du revenu prend fin le 2 février 1996 et qu'elle ne demandera pas le remboursement de l'indemnité de remplacement du revenu de 2 231,88 $ versée entre le 2 février et le 14 mars 1996. La travailleuse conteste le 22 mars suivant.
Elle continue à être vue par le docteur Laporte qui, le 16 avril 1996, note une amélioration de 70 % et maintient les traitements de chiropractie.
Le 7 mai 1996, le physiothérapeute Dufour, de la clinique de réadaption GYMMED, écrit au docteur Laporte :
« La mobilité active rachidienne, telle que démontrée
cliniquement et par spinoscopie, nous démontre à la
région lombaire une extension, une flexion latérale
droite et une rotation droite complète et indolore. La
flexion antérieure est limitée à environ 70 % de la
course articulaire normale et reproduit la douleur de
consultation au niveau lombaire. La flexion latérale
gauche est limitée de façon importante à environ 50 %
de la course articulaire normale et reproduit la
douleur de consultation. La rotation gauche est également
douloureuse à environ 80 % de la course normale.
Au niveau du rachis cervical, la flexion antérieure est
complète et indolore de même que les rotations. Le
mouvement d'extension cervicale est indolore également,
mais on remarque une déviation latérale droite lors de
ce mouvement. Les flexions latérales droite et gauche
sont douloureuses et reproduisent une douleur à la
partie supérieure de la région cervicale, la flexion
latérale gauche étant plus limitée.
L'examen neurologique au niveau lombaire quant aux
réflexes, myotomes et dermatomes est tout à fait normal
tandis qu'au niveau cervical, on dénote une diminution
légère de 4/5 de la vivacité de réflexe bicipital (C6).
Les myotomes et les dermatomes sont normaux.
Le Straight Leg Raising est négatif bilatéralement.
L'analyse palpatoire des articulations sacro-iliaques
et ilio sacrées est tout à fait normale.
Les mouvements isométriques résistés au niveau cervical
nous démontrent une rotation droite et une flexion
antérieure légèrement douloureuses.
À la palpation, on dénote des spasmes musculaires
importants au niveau des scalènes antérieurs du côté
droit, des trapèzes supérieur du côté droit, de même
qu'à l'angulaire de l'omoplate du côté droit. Toute la
chaîne postérieure paravertébrale du côté droit semble
plus tendue et douloureuse à la palpation.
IMPRESSION CLINIQUE:
Il s'agit probablement d'une dysfonction mécanique
résiduelle consécutive à la persistance de spasmes
musculaires au niveau cervical et au niveau de la
musculature paravertébrale dorso-lombaire. Au niveau
articulaire, les patrons de mouvements sont inadéquats
par limitation myotensive.
Compte tenu des traitements donnés préalablement à la
cliente, il s'avère qu'une thérapie différente devrait
être apportée, soit non pas uniquement des
mobilisations, des traitements analgésiques et des
anti-inflammatoires, mais également du renforcement
musculaire spécifique afin de rééduquer la musculature
qui a perdu ses qualités originales quant à la
souplesse, la force, de mouvement. L'endurance et son
patron. » (sic)
Le 13 mai 1996, le docteur Laporte écrit que la travailleuse a
subi des traitements d'acupuncture du 29 mars au 12 avril 1996 et
qu'elle va chez GYMMED depuis le 23 avril 1996. Le 11 juin, il
suggère de continuer les traitements de physiothérapie. Il n'en
fait pas mention lors de l'examen du 10 juillet 1996.
La travailleuse allègue la survenance d'une aggravation le
10 septembre 1996 ainsi décrite au formulaire « Réclamation du
travailleur » :
« Aggravation 10-09-96
Continuité de l'événement 30-10-95 »
À l'appui de ses prétentions, elle soumet une attestation
médicale du docteur Laporte du même jour qui écrit :
« Entorse cervicale - contusion sacro (illisible)
complications:
- syndrome de la Traverse thoracique côté Gche >
Droit
Référée au Dr Paul Cartier
- Mesadaptation affective sévere Aggravation » (sic)
Une radiographie du 1er octobre 1996 se lit ainsi :
« POUMONS
PAS D'EVIDENCE DE PATHOLOGIE INTRA-THORACIQUE ACTIVE.
COLONNE CERVICALE (4 OU +)
EXAGERATION DE LA LORDOSE CERVICALE AVEC CONSERVATION DES ESPACES DISCAUX.
PAS D'EVIDENCE DE COTE CERVICALE, MAIS L'ON OBSERVE UNE EXOSTOSE TRIANGULAIRE POINTANT VERS LE HAUT A PARTIR DU BORD SUPERIEUR DU TIERS MOYEN DE L'ARC ANTERIEUR DE LA 1ERE COTE GAUCHE ET MESRANT 1 CM DE LONGUEUR PAR 7 MM DE DIAMETRE A SA BASE. »
Le 2 octobre 1996, le docteur Cartier écrit au docteur Laporte :
« J'ai examiné Madame Charbonneau pour un syndrome
douloureux cervico-brachial bilatéral, possiblement lié
à son accident.
Le diagnostic de syndrome du défilé thoracique est fort
probable. Elle aura un Doppler dynamique des membres
supérieurs et un nouvel E.M.G. puisque le premier fut
fait semble-t-il d'un seul côté. »
Le docteur Gilbert examine la travailleuse à la demande de
l'employeur le 8 novembre 1996 :
« Cette patiente aurait été victime d'un événement
traumatique survenu le 30 octobre 1995 alors qu'elle
aurait été écrasée sur une pile de caisses de plastique
dont le poids pouvait être environ 60 kilos.
La patiente a donné de la cuisse droite contre un
convoyeur qui se trouve situé à peu près au niveau de
la région trochantérienne et qui mesure environ deux
pieds et demi de largeur.
La patiente par la suite aurait donné de son épaule
droite contre le mur opposé et de l'autre côté du
convoyeur.
(...)
L'antéflexion céphalique se fait le menton à la
fourchette sternale, l'extension est de 60o, les
mouvements de rotation droite et gauche sont de 80o et
les mouvements de latéralité droite et gauche de 45o.
L'examen des deux membres supérieurs démontre que ceux-
ci sont égaux et la mensuration circonférentielle ne
m'a permis de cerner d'atrophie musculaire.
Sur le plan de la réalité fonctionnelle, l'examen des
articulations scapulo-thoraciques des deux épaules, des
coudes, des poignets et des doigts se doit d'être
qualifié de strictement normal.
(...)
DISCUSSION
(...)
Nous sommes en présence d'une patiente qui me rapporte
un fait accidentel pour le moins complexe au cours
duquel elle aurait donné de son épaule droite contre un
mur avec contre-coup au niveau de la colonne cervicale
et de la tête. Enfin elle serait tombée également au
sol entre un convoyeur et le mur.
Or, on a retenu pour cette patiente la réalité d'une histoire
traumatique; cependant, la lésion aurait été conso-
lidée à la suite d'une intervention par le docteur Marc
Goulet, chirurgien-orthopédiste, qui aurait vu et examiné
la patiente à la demande de la société Flamingo, le 2 février
1996, l'événement étant survenu le 30 octobre 1995.
Les conclusions du docteur Goulet sont intégralement
acceptées subséquemment par le docteur Pierre-Paul
Hébert.
Or, la patiente ne serait jamais retournée au travail à
cause d'un phénomène douloureux intéressant ses deux
membres supérieurs. Le docteur Sylvain Laporte obtient
une consultation auprès du docteur Cartier,
neurochirurgien et celui-ci confirme alors la réalité
d'un défilé thoracique bilatéral post-traumatique.
L'examen clinique auquel la patiente s'est soumise
aujourd'hui ne m'a pas permis d'identifier la réalité
d'une telle atteinte malgré les manifestations
subjectives qui se doivent de nous faire penser à une
compression neurovasculaire.
D'abord l'examen neurologique est normal et je serais
en droit de m'attendre à trouver une certaine atteinte
de la huitième ou septième racine cervicale, ce qui
n'est pas le cas. En effet, les dermatomes sont
intacts, les forces musculaires sont respectées et les
réflexes sont symétriques à tous les niveaux.
Bien sûr, on ne peut porter foi de façon absolue à la
recherche du signe d'Adson; cependant, je n'ai pas de
modification significative à la recherche de ce signe
me permettant de croire ainsi à une intégrité
vasculaire au niveau du défilé thoracique.
La patiente a passé un électromyogramme du membre
supérieur gauche qui se serait avéré normal et elle a
passé récemment un électromyogramme à l'Hôpital Notre-
Dame soit mardi le 5 novembre. Or, ce rapport fait état
d'un électromyogramme strictement normal.
À la lumière de tous ces faits et en tenant compte de
la normalité de mon examen clinique et de l'évaluation
de la colonne cervicale, je me dois de reconnaître
qu'en rapport avec l'événement décrit, il ne persiste
chez cette patiente aucun élément pathologie ou
séquelle me permettant me (sic) conclure à autre chose
qu'à un status musculo-squelettique strictement
normal. »
Le 13 janvier 1997, la Commission rejette la demande
d'indemnisation de la travailleuse pour l'aggravation du 10
septembre 1996 :
« Nous avons reçu les documents concernant la
réclamation pour une rechute, récidive ou aggravation
survenue le 10 septembre 1996. Nous vous informons que
nous ne pouvons accepter cette réclamation pour la
raison suivante :
- Il n'y a pas de lien entre les diagnostics de
syndrome du défilé thoracique bilatéral et de
mésadaptation affective sévère et l'événement du
30 octobre 1995.
Après l'étude de votre dossier, nous concluons
qu'il ne s'agit pas non plus d'un nouvel accident du
travail. »
La travailleuse conteste le 3 février suivant et le dossier est
maintenant devant le Bureau de révision.
Le docteur Cartier effectue une résection de la première côte
gauche de la travailleuse le 16 janvier 1997 pour un syndrome du
défilé thoracique gauche :
« Technique opératoire et constations:
Il s'agit d'une patiente qui fait un syndrome
douloureux cervico-brachial gauche avec une manoeuvre
d'Adson positive et avec également un engourdissement
de la main gauche et aussi de la céphalée. Selon la
malade, cette situation devient de moins en moins
tolérable et elle n'a pas répondu à la physiothérapie.
Nous procédons à l'opération par une incision parallèle
à la clavicule, en regard du chef claviculaire du
sterno-cléido-mastoidien gauche. Nous passons entre les
deux chefs de ce muscle pour atteindre le scalène
antérieur que nous sectionnons après avoir libéré le
nerf phrénique pour le rétracter du côté interne.
Ensuite, nous abordons la dissection de la première
côte, d'abord sous le plexus brachial et ensuite
jusqu'au niveau de la clavicule. A noter que nous avons
l'impression que le plexus est gêné ou comprimé par
cette première côte. Nous sectionnons la première côte
sous le plexus brachial et finalement, sous la
clavicule. Pendant cette manoeuvre, la plèvre n'a pas
été ouverte et nous avons maintenant l'impression que
le plexus brachial n'a plus de site de compression. »
La travailleuse est examinée le 24 mars 1997 par le docteur
Tremblay :
« La flexion antérieure amène le menton au
sternum, l'extension se complète mais est très
douloureuse surtout dans les 15 derniers degrés.
La rotation droite est limitée par une douleur
référée à l'épaule gauche et la rotation gauche se
complète.
Les inclinaisons latérales sont douloureuses mais
se complètent de chaque côté.
Au niveau des membres supérieurs, l'amplitude
active des deux épaules est symétrique.
Il en va de même pour l'amplitude des deux coudes
et la manoeuvre d'Adson est maintenant négative d'un
côté comme de l'autre.
De même, la manoeuvre d'hyper-abduction des deux
épaules avec rotation de la tête du côté contra-latéral
et extension avec inspiration profonde est négative
bilatéralement, les pouls demeurant facilement
palpables.
(...)
Au niveau lombaire, la lordose lombaire est préservée.
La flexion antérieure atteint facilement 80 degrés
et l'extension est à 30 degrés, les flexions latérales
sont à 30 degrés bilatéralement.
Les rotations sont de même présentes sans
restriction.
OPINION:
Cette patiente, le 30 octobre 1995, s'est infligée
une entorse cervicale avec entorse lombaire et il
semble aussi qu'elle ait eu une entorse du poignet
gauche.
Il y a plusieurs articles de la littérature
orthopédique qui reconnaissent une association entre le
syndrome du défilé thoracique et une entorse cervicale
ou lésion cervicale favorisant une certaine contraction
soutenue ou même un affaiblissement soutenu des muscles
cervicaux.
(...)
Etant donné qu'il y a eu persistance de symptômes
cervicaux et persistance de signes cliniques dans tous
les rapports de physiothérapie, nous maintenons qu'il y
a relation entre l'apparition du syndrome du défilé
thoracique gauche et l'accident initial qui a causé une
entorse cervicale.
A l'heure actuelle, la situation est consolidée et
nous ne prévoyons pas de nécessité de chirurgie pour le
côté droit puisque le test d'Adson est négatif mais
ceci est laissé à la discrétion du chirurgien traitant,
le docteur Cartier. »
Il évalue ainsi l'atteinte permanente et les limitations
fonctionnelles :
« Entorse cervicale avec séquelles fonctionnelles
objectivées, séquelle actuelle non latéralisée 2%, 203
513.
Atteinte des tissus mous du membre supérieur avec
séquelles fonctionnelles mais sans changement
radiologique, séquelle actuelle gauche 2%, 102 383.
Les limitations fonctionnelles en relation avec
cette atteinte permanente sont d'éviter tout mouvement
répétitif du rachis cervical et tout mouvement
répétitif du membre supérieur gauche et du membre
supérieur droit et d'éviter les positions soutenues
avec les deux bras à plus de 60 degrés d'abduction ou
60 degrés d'élévation antérieure.
A notre avis, cette patiente est apte à faire un
travail rémunérateur à temps plein respectant ces
limitations fonctionnelles mais nous croyons que le
travail de journalier dans l'abattage de poulets ne
respectait pas ces limitations fonctionnelles. »
La travailleuse est examinée de nouveau à la demande de
l'employeur le 3 juillet 1997 par le docteur Goulet :
« Examen objectif actuel
(...)
À l'inspection, les épaules par rapport au bassin sont
au niveau. La mobilité active ou passive du rachis
cervical est d'excellente qualité avec une flexion
antérieure à 45o et une extension de 50o. Les
mouvements de rotation droite et gauche sont de 70o,
les inclinaisons latérales sont de 30o.
Madame ressent des douleurs du côté droit lors des
inclinaisons latérales droites et lors des mouvements
de rotation gauche.
La mise en tension contre résistance ne montre aucune
faiblesse segmentaire au niveau du rachis cervical et
du rachis dorsal. À la palpation, on n'a pu démontrer
de spasme musculaire ou d'induration des tissus mous au
niveau du cou et du dos et de la région sus-
claviculaire droite ou gauche.
(...)
À l'examen vasculaire des membres supérieurs, il
n'existe pas de déficit objectivable. Les manoeuvres
d'Adson, l'hyperabduction des bras ne provoquent aucun
malaise ou paresthésie des membres supérieurs.
(...)
À l'examen des épaules, les amplitudes articulaires
sont comparables des deux côtés et la patiente présente
des craquements mais non douloureux au niveau des
espaces sous-acromiaux.
Les manoeuvres de Neer sont négatives et il n'existe
aucune douleur à la palpation des articulations
acromio-claviculaires. Les omoplates glissent bien sur
le thorax. L'antépulsion et l'abduction sont de 180o,
les rotations externes sont de 90o, les rotations
internes de 60o, les rétropulsions sont à 35o.
Au niveau des coudes, la flexion se rend à 150o,
l'extension est à 0o et les mouvements de prosupination
sont aussi identiques de 0o à 90o.
Au niveau des poignets, la flexion dorsale est de 0o à
70o, les flexions palmaires de 0o à 60o, les déviations
radiales sont de 25o, les déviations cubitales sont de
45o.
La motricité des doigts est très bien conservée. La
patiente ne présente aucun signe d'inflammation des
gaines tendineuses.
Discussion et conclusion
Après avoir révisé les différents dossiers
administratifs, questionné et examiné cette dame en
relation avec l'événement du 30 octobre 1995, je n'ai
aucune justification médicale pour modifier l'opinion
émise lors de l'évaluation de cette dame le 1er février
1996.
(...)
- DAP
Je ne peux reconnaître un DAP, tel que suggéré par
le docteur Gilles Tremblay, de l'ordre de 4%
devant un examen objectif normal. On a procédé à
une chirurgie chez cette patiente pour une
condition subjective. Diverses investigations
n'ont jamais démontré la présence d'une
compression vasculaire chez cette dame. C'est
pourquoi je n'ai aucun traitement à recommander en
relation avec le fait accidentel du 30 octobre
1995. Il n'existe aucune restriction fonctionnelle
ni de DAP. »
Le docteur Tremblay écrit à l'avocat de la travailleuse le 27
août 1997 :
« Nous avons pris connaissance de l'expertise réalisée
par le docteur Marc Goulet sur votre cliente.
Le docteur Goulet rapporte que le docteur Cartier a
fait une chirurgie sur des plaintes subjectives
seulement, mais il faut se rappeler que l'examen
clinique chez le docteur Cartier, démontra un signe de
compression du défilé thoracique positif.
De plus nous avons à l'examen physique une limitation
de la rotation droite et une limitation de
l'inclinaison latérale droite.
Nous avons aussi une atteinte des tissus mous dûe (sic)
à la chirurgie effectuée par le docteur Cartier qui
elle-même corrigeait un syndrome du défilé thoracique
engendré par l'entorse cervicale.
En conséquence l'opinion du docteur Goulet ne modifie
en rien les conclusions que nous avions exprimées dans
notre expertise et nous maintenons que cette patiente
présente des séquelles d'entorse cervicale avec
séquelle d'atteinte des tissus mous et que la chirurgie
pratiquée par le docteur Cartier est en relation avec
l'accident qui nous concerne et était nécessaire sur
une base d'examen objectif sans qu'il y ait de
démonstration de frein vasculaire à l'examen par
Doppler. »
À l'audience, la travailleuse donne des explications
additionnelles.
Elle explique ainsi qu'elle était en parfaite santé avant le
30 octobre 1995. À cette date, en effectuant un mouvement de
rotation vers la gauche, une pile d'une trentaine de contenants
en plastique vides d'une hauteur totale d'environ deux mètres et
pesant environ une soixantaine de kilos s'effondre sur l'épaule
gauche de la travailleuse qui est projetée vers l'arrière. Ce
faisant, elle heurte le coin d'un convoyeur avec sa cuisse droite
et le mur de béton avec sa tête et son épaule. Elle ressent
immédiatement des douleurs au cou, au bassin et à la main gauche
et est transportée à l'hôpital.
En novembre et décembre 1995, des engourdissements aux doigts
et dans les mains font leur apparition.
Lorsqu'elle est examinée par le docteur Goulet le 1er février
1996, elle ressentait de nombreuses douleurs, notamment aux
trapèzes, et avait des problèmes de santé qui l'empêchaient de
retourner à son travail. Décrivant celui-ci, elle explique
qu'elle ne pouvait travailler avec les bras au-dessus des
épaules, qu'elle ne pouvait effectuer une flexion avant et
qu'elle ne pouvait rester debout ou assise pendant longtemps.
Or, son travail exigeait qu'elle reste debout continuellement
pendant 8 heures.
La travailleuse a reçu 22 traitements de chiropractie entre le 31
janvier et le 22 avril 1996. Elle a alors connu une amélioration
au cou et au bas du dos. Référée par le docteur Laporte en
physiothérapie, elle recommence à recevoir des traitements à cet
effet entre le 29 avril et le mois de juin 1996. Ces traitements
ont été néfastes puisque l'amélioration qu'elle avait connue
grâce à la chiropractie a disparu en plus de provoquer des
engourdissements aux deux mains. Elle avait également des
douleurs au cou, au dos, aux trapèzes et aux bras et ressentait
des vertiges et des maux de tête.
C'est le docteur Laporte qui, pour la première fois, lui parle
d'un syndrome du défilé thoracique.
Depuis l'intervention chirurgicale effectuée par le docteur Cartier,
elle a connu une amélioration, ressentant moins de vertiges
et pouvant lever son bras gauche. Elle n'est jamais retournée au
travail puisqu'elle est incapable de ce faire. Elle explique les
travaux domestiques qu'elle est en mesure d'effectuer et
s'en tient alors au strict minimum.
Le docteur Goulet est un orthopédiste. Il explique tout d'abord
qu'il a interrogé la travailleuse le 1er février 1996 sur
l'existence de paresthésie, qui est l'équivalent d'un engourdissement,
et que la travailleuse a répondu par la négative.
Commentant l'affirmation du docteur Tremblay à l'effet que le
syndrome du défilé thoracique serait relié à la lésion
professionnelle, le docteur Goulet est d'avis que, si tel était
le cas, celui-ci se serait manifesté dans les semaines ou
quelques mois après la survenance de l'accident du travail et non
pas beaucoup plus tard comme en l'instance.
Quant aux examens objectifs, il affirme que tous les mouvements
étaient normaux même si la travailleuse alléguait la présence de
douleurs et que le syndrome du défilé thoracique est apparu plus
tard. À cet effet, il note que le protocole opératoire ne fait
pas état de la présence d'une atteinte des tissus mous alors que
le docteur Tremblay parle d'une telle atteinte.
Selon lui, tous les mouvements notés par les médecins
examinateurs étaient normaux. Ainsi, même s'il semble y avoir une
perte de 10 degrés d'inclinaison, cela ne signifie pas qu'une
personne a nécessairement une atteinte permanente puisqu'il faut
tenir compte de l'ensemble du tableau et de l'examen objectif tel
que les spasmes, la limitation des mouvements et l'atteinte des
tissus mous. Ainsi, ce n'est pas tout le monde qui peut effectuer
une flexion avant de 90o et une telle flexion de 70o pourrait
être normale chez plusieurs personnes.
En définitive, la travailleuse ne conserve aucune séquelle
résiduelle. » (sic)
[7.] Lors de l’audience madame Andrée Charbonneau déclare qu’elle était en parfaite condition physique dans les semaines précédent l’événement du 30 octobre 1995. Ainsi donc, la travailleuse ne présentait aucune symptomatologie.
[8.] Par la suite, la travailleuse décrit l’événement survenu le 30 octobre. De façon plus spécifique, lors de la chute des casiers, elle fut frappée par l’arrière, légèrement vers la gauche. L’impact précis se situerait au niveau des omoplates et des épaules. Lors de cette poussée la tête fut projetée vers l’arrière ce qui a entraîné une douleur immédiate au cou. La travailleuse ajoute que sous la force de l’impulsion, elle fut projetée vers l’avant. Elle ne se souvient pas si elle a accroché le coin du convoyeur ce qui serait possible vu qu’elle présentait des abrasions aux membres inférieurs. Quoi qu’il en soit, la travailleuse, projetée vers l’avant, vient frapper le mur adjacent. Lors de cet impact, son corps avait légèrement tourné vers la gauche de telle façon que la tête, l’épaule droite ainsi que la hanche droite frappent le mur. Suite à cet impact, la travailleuse s’écroule au sol.
[9.] Subséquemment, s’engagent les consultations médicales déjà décrites à la décision de la CALP précitée.
[10.] Quant à la symptomatologie initiale, la travailleuse se plaignait de douleurs cervicales, de douleurs au trapèze, de céphalées avec vertiges et étourdissements ainsi que de douleurs à la région lombaire et au poignet gauche. En décembre 1995, elle note la présence d’engourdissements aux membres supérieurs.
[11.] Lors de son examen médical devant le docteur Goulet, en février 1996, la travailleuse souligne qu’elle se plaignait d’engourdissements aux mains, tout particulièrement la nuit, et ceci de façon bilatérale. Elle indique que le docteur Goulet l’aurait interrogée à savoir si elle présentait des engourdissements aussi bien le jour et la nuit. Elle aurait répondu que ses engourdissements se présentaient uniquement la nuit ce qui implique pourquoi elle n’a pas rapporté le tout à son évaluation.
[12.] Malgré la consolidation de sa lésion la travailleuse déclare qu’elle ne fut pas en mesure de reprendre ses fonctions eu égard à sa symptomatologie résiduelle. Plus spécifiquement, elle invoque qu’elle présentait un phénomène de lourdeur au niveau des membres supérieurs l’empêchant d’exécuter son travail ainsi que la plupart de ses travaux domestiques. Dans ce contexte, elle a poursuivi ses visites médicales et reçu différents traitements dont elle a défrayé les coûts personnellement. Elle souligne de façon générale que lorsqu’elle cessait les traitements, ses symptômes progressaient, s’intensifiaient.
[13.] La travailleuse ajoute qu’à partir du mois de juin 1996, les engourdissements qu’elle présentait aux mains survenaient aussi bien de jour et de nuit. En conséquence elle soumet qu’elle a réattiré l’attention de ses médecins traitants, en l’occurrence le docteur Laporte sur le sujet.
[14.] D’ailleurs, au dossier on constate que le docteur Hélène Laporte réfère la travailleuse pour un « scan » cervical. Celui-ci se tient devant le docteur Cantin, le 23 août 1996 tel qu’il appert du rapport de scanographie cervicale avec infusion effectuée à l’Hôpital neurologique de Montréal. À ce rapport, le docteur Cantin souligne que le docteur Laporte demande une scanographie pour la raison suivante :
« Paresthésie du quatrième et cinquième doigts de la main droite. »
[15.] Par ailleurs, sa scanographie porte spécifiquement sur la détection d’une hernie discale au niveau cervical. Or, le rapport revient avec la mention d’absence d’anomalie significative.
[16.] Comme noté à la CALP par sa décision, le premier rapport qui pose un diagnostic de syndrome de la traverse thoracique fut émis par le docteur Sylvain Laporte, le 10 septembre 1996.
[17.] Donc, à partir de juin 1996, on peut constater que les médecins qui ont pris charge de la travailleuse ont entrepris une démarche se traduisant par différents types de tests et d’examens pour identifier les causes organiques sous-jacentes à sa symptomatologie résiduelle, et tout particulièrement à un phénomène d’engourdissement qu’elle présentait aux mains. D’ailleurs, la citation rapportée en début de section fait état de l’ensemble de ces démarches et des interventions des docteurs Laporte, Cartier et Tremblay.
[18.] De façon plus spécifique, la Commission des lésions professionnelles complète l’ensemble de l’histoire médicale du présent cas.
[19.] Ainsi donc, la travailleuse fut soumise à un examen électromyographique à l’Hôtel-Dieu de Montréal le 5 novembre 1996. Le docteur Jean-Marie Peyronnard émet la conclusion suivante :
« Les études de conduction nerveuses effectuées dans les membres supérieurs chez cette patiente se sont révélées tout à fait normales, notamment en ce qui concerne la fonction motrice et sensitive des nerfs cubitaux. L’électromyogramme des muscles abducteurs courts de l’auriculaire droit et gauche est également normal. Il n’y a donc aucun élément permettant d’affirmer l’existence d’une lésion structurale du système nerveux périphérique et on reste donc chez cette patiente avec le diagnostic clinique de paresthésie posturale des membres supérieurs fortement suggestive d’un défilé thoracique supérieur. »
[20.] Par ailleurs, un doppler artériel est effectué en date du 28 novembre 1996.
[21.] Le docteur Pierre Robillard conclut à son examen de la façon suivante :
« Étude des défilés thoraciques droit et gauche.
Les différentes manœuvres d’hyperabduction, d’abduction, d’Abson et limitaires ne provoquent pas de compression significative perceptible au doppler en regard des défilés thoraciques droit et gauche. »
[22.] Pour sa part, le docteur Cartier maintient son diagnostic et procède à opérer la travailleuse pour une résection de la première côte gauche, en date du 16 janvier 1997, tel qu’il appert du protocole opératoire précité.
[23.] Pour sa part, le docteur S. Laporte, en date du 19 mars 1997, signait une attestation médicale sur les formulaires CSST dans laquelle il indique :
« Syndrome costo-claviculaire gauche plus important qu’à droite. Opérer 97-01-16. Entorse cervicale, lombosciatalgie gauche. Mésadaptation affective sévère. Syndrome post-costectomie gauche. Évolution favorable. »
[24.] Le 24 mars 1997. À la demande du représentant légal de la travailleuse, celle-ci est évaluée par le docteur Gilles Roger Tremblay. Aux mentions déjà rapportées à la citation précitée de la CALP, la Commission des lésions professionnelles ajoute que le docteur Tremblay, à son examen physique, a noté que la travailleuse présentait une douleur, à la palpation, à la fosse sus-claviculaire droite. En conséquence de son examen, tenant compte des publications qu’il cite à son expertise, ce médecin conclut qu’il existe bien une relation entre le syndrome du défilé thoracique gauche que présente la travailleuse et l’entorse cervicale résultant de sa lésion professionnelle. Cette opinion tient compte, comme on peut le voir à la section de l’historique médical, de l’ensemble des examens effectués (électro, scan, doppler) ainsi que des trouvailles anatomiques telles l’exostose.
[25.] Par la suite, la travailleuse est toujours suivie par le docteur Sylvain Laporte eu égard à son syndrome du défilé thoracique bilatéral.
[26.] Le 11 septembre 1997, la travailleuse était réopérée par le docteur P. Cartier pour un syndrome du défilé thoracique droit. On procède à une résection de la première côte droite.
[27.] À ce protocole opératoire, ce médecin note :
« Nous savions par les examens antérieurs qu’il n’y avait pas de tunnel carpien à l’E.M.G. et qu’il y avait une compression extrinsèque au doppler dynamique de l’artère sous-clavière. »
[28.] Le 5 décembre 1997, le docteur Paul Cartier écrit une lettre dans laquelle il rapporte :
« Au questionnaire, plusieurs symptômes militaient en faveur d’un syndrome du défilé thoracique. Cependant, la manœuvre de « Adson » était plus loin positive et le doppler dynamique ne mettait pas en évidence une compression extrinsèque de l’artère sous-clavière.
La position de « hold up » qui consiste à mettre les membres supérieurs au-dessus des épaules, était franchement positive. En effet, madame Charbonneau ne pouvait maintenir les bras dans cette position plus d’une minute sans éprouver ou reproduire les mêmes symptômes qu’elle accusait. C’est un test que l’on considère comme très fiable, lorsqu’il s’agit d’un défilé thoracique, après avoir éliminé toutes les autres causes comme nous l’avons fait dans le cas présent. »
[29.] Par la suite, le docteur Paul Cartier explique pourquoi il a pris la décision d’opérer la travailleuse. Il poursuit en décrivant les résultats des opérations, en l’occurrence l’amélioration importante de l’état de la travailleuse. À la fin il conclut de la façon suivante :
« Il est certain que d’autres experts mettront en doute cette décision chirurgicale. Il est cependant reconnu par d’autres experts que l’entorse cervicale post-traumatique peut conduire après des semaines, des mois ou même des années à un syndrome du défilé thoracique.
On doit dans certains cas procéder par élimination comme nous l’avons fait ici. Finalement c’est le résultat qui compte. »
[30.] Pour sa part, le docteur Marc Goulet émettait une nouvelle opinion médicale en date du 9 décembre 1997. À ce document il énonce :
« Je ne peux reconnaître l’événement du 19 septembre 1996 comme étant une rechute de l’événement du 30 octobre 1995. En effet, les contusions traumatiques qui guérissent sans DAP et sans restriction fonctionnelle suite à un examen normal ne peuvent devenir symptomatique sans nouveau fait accidentel. De plus, l’histoire même de la symptomatologie de madame Charbonneau nous démontre que les paresthésies qui intéressaient les deux (2) mains, particulièrement les quatrième et cinquième doigts de chacune des mains, sont survenues durant la période estivale 1996. Il est inconcevable qu’une paresthésie se manifeste après tant de mois suite à une consolidation sans séquelle et sans DAP.
Il existe un consensus parmi les experts pour décrire l’évolution des entorses cervicales sans atteinte neurologique. On reconnaît que les atteintes des tissus mous guérissent dans un laps de temps qui ne dépasse pas quatre (4) à six (6) semaines. Il est à noter que le EMG qui a été réalisé le 7 novembre 1996 auprès de madame s’est avéré strictement normal, selon le docteur Jean-Marie Peyronnard. Le docteur Henri-Paul Lévesque, radiologiste, fait mention qu’au niveau du rachis cervical il existait une exagération de la lordose cervicale avec conservation des espaces discaux. Il n’existait pas d’évidence de côte cervicale mais on observait une exostose triangulaire pointant vers le haut à partir du bord supérieur du tiers moyen de l’arc antérieur de la première côte gauche mesurant 1 centimètre par 7 millimètres de diamètre, à sa base. Il est aussi intéressant de noter qu’en date du 23 avril 1996 madame Charbonneau avait été examinée par le docteur Jude Boivin, orthopédiste, à la requête de la compagnie Aetna Canada, ce dernier en arrivait à la même conclusion soit un examen physique strictement normal. »
[31.] En conséquence, ce médecin conclut qu’il n’existe aucune relation entre les chirurgies pratiquées par le docteur Cartier et la lésion professionnelle.
[32.] Lors de l’audition, le représentant de la travailleuse dépose le suivi médical de celle-ci effectué par les docteurs Boucher et Cartier jusqu’en 1998.
[33.] Une expertise effectuée par le docteur Benoit Cartier, chirurgien, datée du 19 mai 1999 est déposée au dossier.
[34.] À cette expertise ce médecin émet les commentaires généraux suivants :
« Je fais parvenir avec mon expertise deux chapitres parus dans ‘Vascular Surgery, édité by Robert B. Rutherford, chapitre 73, 3e édition, 1989’ et le ‘chapitre 69, 4e édition publié en 1995, écrit par Dr Donald J. Stonay et par Stephen W. K. Chang’.
Je vais donc appuyer mes commentaires sur ces deux chapitres. Pour débuter, je me réfère à la citation 73-2 qui dit ‘comme il n’y a pas de test diagnostique spécifique pour les patients porteurs de syndrome de défilé thoracique, seuls les chirurgiens qui traitent et opèrent de tels patients sont en mesure de bien évaluer le problème’.
Si on se rapporte aux données de la RAMPQ pour 94 et 95, 100 % des chirurgies pour exérèse de première côte ont été pratiquées par des chirurgiens généraux ou des chirurgiens en CCVT. Pour les exérèses de côte cervicale, plus de 75 % de ces chirurgies ont été faites par ces mêmes chirurgiens.
Le type neurologique de syndrome de défilé thoracique est le type le plus fréquent et correspond à environ 95 % de tous les patients avec syndrome de défilé thoracique (Citation 73-1, 69-1 et 69-2).
Bien que le syndrome de défilé thoracique peut survenir spontanément, dans plus de 70% des cas on note un traumatisme associé dans les mois précédant les symptômes : le traumatisme peut être direct par atteinte du plexus brachial ou par atteinte musculaire, ou indirect suite à des microtraumatismes chez les patients faisant des mouvements à répétition. Certains patients n’accuseront pas de symptôme immédiatement, mais vont les développer dans les mois suivant le traumatisme (Citations 69-4, 69-5, 69-6, 73-4, 73-5).
Dans le type neurologique de syndrome de défilé thoracique, il y a un type en relation avec une atteinte du plexus inférieur, soit C8-T1; à ce moment le patient accuse des engourdissements au niveau de la face interne du bras, des 4e et 5e doigts et une lourdeur au niveau de la région de l’épaule et du cou avec des céphalées associées. (Citations 73-3 et 69-8). Ce sont exactement les symptômes que Madame Charbonneau présentait.
C’est vraiment à l’histoire et à l’identification des symptômes qu’on peut poser un diagnostic de syndrome de défilé thoracique. L’examen physique, de même que les tests d’investigation servent surtout à exclure tout autre diagnostic possible; plusieurs manœuvres à l’examen physique, comme la manœuvre d’Adson, d’Allen, sont peu spécifiques; leur variante de la normale est trop grande et peut inclure autant des patients asymptomatiques que des patients symptomatiques; il en est de même des examens comme EMG et tests de laboratoire non invasifs comme le Doppler; en effet des résultats normaux n’éliminent pas un syndrome de défilé thoracique, ces examens servant surtout à éliminer d’autres pathologies dont la hernie discale, le syndrome de tunnel carpien ou le syndrome de la gouttière cubitale. (Citations 73-6, 73-7, 73-8, 73-9, 73-10, 73-11, 73-12, 69-9, 69-10, 69-11, 69-12, 69-13, 69-14, 69-15, 69-16 et 69-17)
La radiographie de la colonne cervicale peut également être utile pour éliminer tout problème de côte surnuméraire ou côte cervicale.
Pour ce qui est du traitement, avant tout il doit être conservateur avec physiothérapie appropriée. S’il n’y a pas d’amélioration suite à des traitements de physiothérapie de 3-6 mois et que le patient demeure très handicapé par sa condition, une chirurgie de décompression par exérèse de côte cervicale ou de première côte peut à ce moment être envisagée. La décision doit être prise en collaboration avec le patient, tout en expliquant les risques potentiels soit : les risques de traumatisme nerveux ou artériel, tout en admettant qu’il n’est jamais certain d’avoir une amélioration des symptômes à 100 %. Plus les symptômes sont présents depuis plusieurs années, surtout plus de deux ans, moins les chances de succès sont bonnes. (Citations 69-3, 69-18, 69-19. 69-20 et 73-13).
Pour ce qui est du cas présent, lorsqu’on examine Madame Charbonneau, on remarque qu’elle n’a aucune douleur et aucune limitation en comparaison à sa condition médicale avant les chirurgies. Je pense que les résultats sont des concluants et montrent bien que Madame Charbonneau a présenté un syndrome de défilé thoracique, plus important à gauche qu’à droite, avec une amélioration complète suite aux chirurgies. »
[35.] Lors de l’audience, la travailleuse complète la preuve en soulignant que les opérations qu’elle a subi ont grandement amélioré son état de telle façon qu’elle reprenait le travail vers le mois d’avril 1998. Elle a bénéficié d’un retour au travail progressif qui lui a permis de reprendre son travail régulier.
[36.] Lors de l’audience la Commission des lésions professionnelles a entendu le docteur Gilles Tremblay comme expert de la travailleuse.
[37.] Dans un premier temps, le docteur Tremblay explique la symptomatologie recouverte par le syndrome du défilé thoracique. Plus spécifiquement on parle d’un phénomène d’engourdissement et de lourdeur des membres supérieurs.
[38.] En second lieu il explique les différentes causes d’un tel syndrome. Ces causes se rattachent à un étranglement, à une réduction de l'espace où passe l’artère sous-clavière et le système nerveux desservant les membres supérieurs. On parle de compression de type neurogénique ou vasculaire et, à la limite, mixte.
[39.] Quant aux causes spécifiques elles peuvent être de nature osseuse, musculaire ou dues aux tissus mous composant ce défilé. Il souligne qu’une blessure au muscle scalène peut en être la cause puisque ce muscle fait partie des composantes anatomiques du défilé. En conséquence, il ajoute qu’une entorse cervicale résultant d’un « cou de lapin » (wiplash) tel qu’a subi la travailleuse peut en être la cause. La littérature sur ce sujet est volumineuse.
[40.] Replacé dans le présent cas, il souligne que c’est exactement ce qui s’est passé dans le cas de madame Charbonneau. En effet, lors de l’événement, elle fut victime d’un « wiplash », ayant entraîné une entorse cervicale nécessitant des traitements sur une période de temps relativement longue puisqu’à tout escient, la travailleuse s’est toujours plainte d’une symptomatologie documentée médicalement, même après la consolidation de sa lésion, et jusqu’au moment où on a posé le diagnostic de syndrome du défilé thoracique.
[41.] Quoi qu’il en soit, le docteur Tremblay indique que la symptomatologie peut s’installer dans un délai plus ou moins long dépendamment des particularismes anatomiques de chacun des individus. Sur ce sujet, il réfère le lecteur à la volumineuse documentation médicale produite au dossier.
[42.] Quant à la relation avec l’entorse cervicale il enseigne que les muscles scalènes s’attachent sur les apophyses transverses cervicales et s’insèrent à la première côte. Ce muscle sert à stabiliser le cou et à en assurer la mobilité. Donc, lorsqu’on parle d’un spasme, d’une contraction continue du scalène on constate qu’il y a traction sur la première côte vers le haut et réduction donc de l’espace du défilé thoracique. Dans le cas actuel il souligne que c’est le phénomène que l’on a constaté, tout particulièrement lorsque le physiothérapeute Dufour, le 7 mai 1996, note des spasmes musculaires importants au niveau des scalènes antérieurs du côté droit.
[43.] Par la suite, le docteur Tremblay ajoute que le diagnostic de syndrome du défilé thoracique en est un qui se pose par exclusion, le tout tel que rapporté par le docteur Benoit Cartier, à son expertise du 19 mai 1999. Ainsi donc, l’ensemble des tests et des examens que l’on fait, des différentes manœuvres tentent d’exclure toute autre causalité à la symptomatologie notée pour enfin conclure qu’il s’agit d’un syndrome du défilé thoracique. Il souligne que dans le présent cas c’est ce qui fut fait en ce que l’on a effectué différents tests dont un scan cervical, un EMG, un examen Doppler ainsi que différentes manœuvres telle la manœuvre d’Adson.
[44.] Sur ce sujet, il souligne que la travailleuse ne présentait aucune côte cervicale surnuméraire et que la seule trouvaille est celle de l’exostose qui, notons-le, n’était présente que d’un seul côté alors que le syndrome est bilatéral.
[45.] Quoi qu’il en soi, il ajoute que la décision quant à une approche chirurgicale appartient au chirurgien dans le cadre noté par le docteur Cartier.
[46.] Finalement, il souligne que les résultats de ces opérations constituent la meilleure preuve qu’en tout état de cause, la travailleuse présentait un défilé thoracique, apparu après un traumatisme important impliquant une entorse cervicale sévère qui, constitue une cause reconnue de ce syndrome.
[47.] Quant à l’apparition de la symptomatologie, il souligne qu’il faut retenir les déclarations de la travailleuse qui se plaignait, dès le mois de décembre 1995 et, par la suite, de lourdeur aux épaules, de céphalées, et d’engourdissement aux membres supérieurs. Cette plainte suggestive de la travailleuse est documentée par les différents médecins qui ont eu à examiner la travailleuse. D’ailleurs, sur ce sujet, il souligne qu’il était difficile pour les docteurs Goulet et Gilbert de pouvoir retenir un tel diagnostic, à l’époque où ils ont effectué leurs examens (96) puisque ces médecins n’avaient pas encore les résultats des différents tests et examens pratiqués subséquemment, tests qui se situent dans le cadre d’un diagnostic posé par voie d’exclusion.
[48.] Il souligne que bien que les examens cliniques objectifs décrivaient une amplitude de mouvement normale en janvier et février 1996, il n’en demeure que la travailleuse demeurait avec une symptomatologie pour laquelle son médecin traitant a poursuivi la dispensation de différentes approches curatives dont des traitements de physiothérapie, de chiropractie ainsi que d’acupuncture. En dernière analyse, le docteur Tremblay conclut donc que le syndrome du défilé thoracique est relié à la lésion professionnelle subie par la travailleuse et qu’aucune condition personnelle ou préexistante n’explique l’apparition de ce syndrome.
[49.] Pour sa part, le docteur Goulet fut entendu à titre de témoin expert pour l’employeur.
[50.] Lors de l’audition, ce médecin reprend ses expertises médicales et précise, qu’en février 1996, la travailleuse présentait une plainte subjective importante bien que son examen clinique objectif ne démontrait aucune atteinte objectivable.
[51.] Ce médecin concluait que la travailleuse avait subi une contusion en soulignant la différence entre ce diagnostic et celui d’une entorse.
[52.] Par la suite, il ajoute que l’on a retenu un diagnostic d’entorse cervicale. Dans ce cadre, pour avoir des séquelles se traduisant par un syndrome du défilé thoracique on doit pouvoir identifier des séquelles de l’entorse cervicale soit par la perte de mouvement ou l’existence d’un spasme musculaire. Quant à lui, il souligne que son examen clinique ainsi que ceux des docteurs Gilbert et Hébert étaient négatifs. Dans ce contexte une atteinte du muscle scalène aurait dû se traduire par des signes observables.
[53.] Toujours dans le cadre d’une entorse cervicale, en se référant à la littérature précitée, il ajoute que normalement la symptomatologie devrait apparaître rapidement, dans les jours ou semaines suivant l’événement.
[54.] Encore une fois il note qu’il n’y a aucune symptomatologie contemporaine aux jours qui suivent l’événement.
[55.] Par ailleurs, il reconnaît qu’il n’existe aucun test reconnu pour établir de façon précise un diagnostic de syndrome du défilé thoracique.
[56.] Il ajoute que le chirurgien Cartier, à son protocole opératoire semble indiquer qu’il y a compression par la première côte puisqu’on note qu’elle comprime le plexus brachial. Dans ce contexte il conclut à une condition personnelle.
[57.] Soulignons que le docteur Goulet indique que le phénomène douloureux n’est pas un signe objectif en lui-même. Plutôt, l’examen clinique objectif doit démontrer une cause sous-jacente à cette douleur.
[58.] Par la suite, le docteur Goulet témoigne sur ce qui est un traumatisme direct ou non en précisant que le « wiplash » ne constitue pas, selon sa définition, un traumatisme direct du type d’une contusion.
[59.] Il ajoute, qu’à ce stade, il n’est pas encore convaincu que la travailleuse présentait un syndrome du défilé thoracique puisqu’à tout escient, l’opération qu’elle a subi et les résultats ne constituent pas une preuve scientifique.
[60.] Voilà donc l’essentiel du témoignage du docteur Goulet auquel s’ajoutent les opinions qu’il a émises par écrit à ce dossier.
[61.] Finalement, la Commission des lésions professionnelles permet le dépôt de l’expertise effectuée par le docteur Gilles Boivin, le 23 avril 1996, dans le cadre de la réclamation introduite par la travailleuse auprès des assureurs privés. Ce document constitue un document pertinent quant à l’examen clinique de la travailleuse et ceci, dans les seules limites de ce qui est pertinent à notre litige. On constate que cet examen ajoute peu à ce que la preuve a déjà révélé.
[62.] Voilà donc l’essentiel de la preuve offerte à la Commission des lésions professionnelles sur le sujet tout en prenant acte de la littérature déposée dans ce dossier.
ARGUMENTATION DES PARTIES
[63.] En résumé, la Commission des lésions professionnelles rappelle que le représentant de la travailleuse allègue que la prépondérance de preuve offerte dans ce dossier démontre qu’il existe une relation entre le diagnostic retenu par les médecins traitants de la travailleuse, en l’occurrence ceux de syndrome du défilé thoracique et de mésadaptation affective sévère et la lésion professionnelle du 30 octobre 1995. Sur ce sujet il fait une étude des différents critères retenus par la jurisprudence en soulignant que les déclarations de la travailleuse demeurent crédibles et que la preuve médicale scientifique fournie démontre une probabilité de relation.
[64.] Quant aux problèmes psychologiques soulevés par les rapports médicaux du docteur Laporte, aucune preuve pertinente n’est offerte sur ce sujet.
[65.] Pour sa part, les représentants de l’employeur allèguent qu’il appartenait au travailleur de démontrer par une prépondérance de preuve qu’il était victime d’une récidive, rechute ou aggravation. Quoi qu’il en soit, ils ajoutent que la lésion professionnelle de la travailleuse était consolidée dès février 1996 et qu’elle ne présentait, à ce moment, aucune atteinte objective. Qu’en tout état de cause, la symptomatologie attribuable à un défilé thoracique serait apparu plusieurs mois après la lésion professionnelle, suite à la consolidation de sa lésion. Par ailleurs, la preuve n’a pas démontré qu’il y avait eu atteinte des muscles scalènes ce qui, en dernière analyse, élimine les prétentions de la travailleuse.
AVIS DES MEMBRES
[66.] Les membres issus des associations patronales et syndicales sont unanimes pour recommander à la Commission des lésions professionnelles de reconnaître que la travailleuse fut bien victime d’une récidive, rechute ou aggravation de sa lésion professionnelle initiale, du 30 octobre 1995 en ce que seul le diagnostic de syndrome du défilé thoracique est en relation directe avec l’entorse cervicale subie par la travailleuse, le 30 octobre 1995.
[67.] En conséquence ils recommandent à la Commission des lésions professionnelles de permettre l’indemnisation de la travailleuse pour cette condition.
MOTIFS DE LA DÉCISION
[68.] La Commission des lésions professionnelles doit décider si la travailleuse fut victime d’une récidive, rechute ou aggravation de sa lésion professionnelle initiale du 30 octobre 1995, le tout dans le cadre de sa réclamation du 19 septembre 1996 où l’on parle d’un phénomène d’aggravation à partir du 10 septembre 1996.
[69.] À l’article 2 LATMP on définit la « lésion professionnelle » comme suit :
« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation ;
[70.] Le législateur québécois n’a pas défini les termes récidive, rechute ou aggravation utilisés à la définition de la notion de « lésion professionnelle » contenue à l’article 2 LATMP.
[71.] De façon générale, conformément aux définitions usuelles des dictionnaires médicaux ainsi que de la jurisprudence, ces termes décrivent une réapparition, une recrudescence, une détérioration d’une lésion ou une symptomatologie due à une lésion professionnelle. Au centre de la notion de récidive, rechute ou aggravation se retrouve la nécessaire relation qui doit exister entre la condition pour laquelle la travailleuse est traitée lors de la récidive, rechute ou aggravation et la lésion professionnelle initiale. Bien évidemment quant on emploie le terme lésion professionnelle initiale, on se réfère aussi bien à l’événement causal qu’aux lésions en résultant.
[72.] Afin de cerner l’établissement de cette relation, la jurisprudence de la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles confirmée par la Commission des lésions professionnelles a déterminé un certain nombre de critères dont la revue, l’étude permet de déterminer cette relation.
[73.] Plusieurs décisions de la Commission d’appel ont énuméré ces critères[1]. Ainsi l’on peut énumérer les différents critères retenus, sans prétendre qu’il s’agit d’une liste exhaustive :
1) La gravité de la lésion initiale et les diagnostics retenus
2) Existence d’une atteinte permanente et/ou de limitations fonctionnelles lors de la consolidation de la lésion professionnelle initiale.
3) La continuité de la symptomatologie suite à la consolidation de la lésion.
4) Le délai existant entre la consolidation de la lésion et l’apparition de la récidive, rechute ou aggravation.
5) L’existence ou non d’un suivi médical suite à la consolidation de la lésion.
6) La présence ou l’absence de condition personnelle.
7) L’identité des sites de lésion.
8) La compatibilité de la symptomatologie alléguée au moment de la rechute, récidive ou aggravation avec la nature de la lésion initiale.
9) L’absence de nouveau fait accidentel causal
[74.] Rappelons qu’aucun de ces paramètres n’est à lui seul décisif mais, pris ensembles, ils peuvent permettre de décider du bien-fondé d’une réclamation dans un contexte d’application de la prépondérance de la preuve.
[75.] De plus, le seul témoignage du travailleur est insuffisant pour établir les constatations de nature médicale parce qu’une preuve médicale est nécessaire pour établir une telle relation.
[76.] Une fois cela dit, qu’en est-il aux présentes?
[77.] Quant aux diagnostics posés suite à la lésion professionnelle du 30 octobre 1995, on doit constater qu’il s’agit des diagnostics retenus par les médecins qui ont pris charge de la travailleuse puisque, à tout escient, le Bureau d’évaluation médicale présidé par le docteur Pierre-Paul Hébert ne s’est pas prononcé sur ce sujet dans son avis motivé du 7 mars 1996. Bien que le docteur Hébert retienne dans ses considérants un diagnostic de contusion multiple il n’en demeure que le docteur Laporte avait posé des diagnostics d’entorse lombaire et cervicale ainsi que d’entorse à la main gauche.
[78.] En application de l’article 224 LATMP il faut donc conclure que ces diagnostics sont ceux de la lésion professionnelle initiale.
[79.] Par ailleurs, il ne fait aucun doute, à la lumière de la preuve que la travailleuse a subi un traumatisme important, brutal tel que décrit aux présentes. On parle d’une projection avec traumatisme direct lors de la chute des boîtes ainsi que lorsque la travailleuse frappe le mur et le sol. D’ailleurs, les lésions qui en ont résulté sont multiples et ont nécessité une approche thérapeutique reconnue par la Commission, jusqu’au mois de février 1996.
[80.] Or, pendant cette période, la travailleuse offrait une plainte subjective qui demeure, à notre sens, crédible puisque non contredite et cohérente à travers les différents écrits et déclarations offerts dans ce dossier. On parle de douleur cervicale, au trapèze, de céphalées, de sensation de lourdeur au niveau de l’épaule et des membres supérieurs.
[81.] Cette symptomatologie subjective s’installe de façon relativement contemporaine à la lésion professionnelle initiale puisqu’on parle du mois de décembre 1995. Pour s’en convaincre, la Commission des lésions professionnelles réfère le lecteur aux descriptions des plaintes subjectives offertes par le docteur Pierre-Paul Hébert et le docteur Marc Goulet, en février 1996.
[82.] En second lieu la travailleuse fut consolidée suite à l’exercice d’une contestation médicale conformément à la procédure de contestation médicale prévue à la loi le tout en date du 1er février 1996. Cette consolidation de la lésion se fait dans le cadre des diagnostics retenus à cette époque et se fondent strictement sur les examens cliniques objectifs qui, bien que démontrant la présence de douleur, n’établissaient aucune cause organique à ce moment. Ajoutons que les amplitudes articulaires étaient normales et qu’en conséquence, prenant en considération strictement ces éléments, on a conclu que la travailleuse était en mesure de reprendre ses fonctions.
[83.] Dès lors, il faut constater que la consolidation de la lésion se fait dans le cadre d’une entorse lombaire et cervicale ainsi que d’une entorse de la main gauche. Il s’agit d’une consolidation qui porte sur ces seules lésions; le tout a résulté dans une contestation dont a disposé le commissaire Yves Tardif, par un jugement émis le 18 novembre 1997, jugement amplement précité aux présentes. Rappelons que le commissaire Tardif a maintenu la décision soumise à sa compétence juridictionnelle en ce qu’il a consolidé la lésion pour le 1er février 1996, constatant que la travailleuse n’avait plus besoin de traitement et a terminé l’indemnité de remplacement du revenu puisque la travailleuse n’avait aucune atteinte permanente ni limitation fonctionnelle. Par ailleurs, le commissaire Tardif ne s’est nullement prononcé sur l’existence d’une récidive, rechute ou aggravation, en l’occurrence sur la notion de défilé thoracique qu’il réserve aux instances compétentes devant agir subséquemment.
[84.] La Commission des lésions professionnelles tient à indiquer, intrinsèquement, que cette décision contient ses propres limites sur les aspects juridictionnels dont elle dispose.
[85.] Par ailleurs, lors de cette consolidation, il faut bien comprendre que la travailleuse maintenait sa plainte subjective et que d’aucune façon elle ne s’était déclarée parfaitement guérie ou en mesure même de reprendre son emploi préaccidentel.
[86.] D’ailleurs, ces médecins traitants, en l’occurrence les docteurs Laporte ont maintenu l’arrêt de travail toujours dans le cadre de la symptomatologie dont se plaignait la travailleuse, le tout relié aux diagnostics qu’ils avaient retenus. Différentes approches thérapeutiques furent tentées tel qu’en fait foi le suivi médical dans ce dossier.
[87.] La travailleuse a engagé elle-même tous ses moyens dans la poursuite de ses traitements recherchant une amélioration thérapeutique à son état résiduel. Une telle démarche de la travailleuse devient un élément important à prendre en considération dans l’évaluation de sa crédibilité quant à la persistance d’une symptomatologie résiduelle.
[88.] D’ailleurs, sa symptomatologie est bien décrite par le physiothérapeute Bernard Dufour, dès le 7 mai 1996. Selon son examen, on retrouve la présence de syndrome douloureux à la mobilisation cervicale ainsi que la présence, à la palpation, de spasmes musculaires importants au niveau des scalènes antérieurs du côté droit, des trapèzes supérieurs du côté droit, de même qu’à l’angulaire de l’omoplate du côté droit.
[89.] Le suivi médical se poursuit donc, de façon continue jusqu’au moment où le docteur Laporte, eu égard aux plaintes subjectives de la travailleuse portant sur des engourdissements de plus en plus marqués aux membres supérieurs, entreprennent une série de tests afin de déterminer s’il n’existerait pas une cause sous-jacente à la symptomatologie subjective de la travailleuse.
[90.] Dès le mois de juin 1996, l’on entreprend cette démarche puisque la travailleuse est référée pour un « CT scan cervical » afin d’éliminer l’hernie discale cervicale.
[91.] Dès lors, la Commission des lésions professionnelles retient que la symptomatologie présentée par la travailleuse et résultant dans un diagnostic de syndrome du défilé thoracique était déjà présent avant même la consolidation de sa lésion professionnelle initiale et constituait un des éléments de sa plainte subjective. Seul le diagnostic n’avait pas été identifié à ce moment.
[92.] Par la suite, partant du principe de l’établissement d’un diagnostic par voie d’exclusion, les médecins traitants de la travailleuse ont retenu celui de syndrome de défilé thoracique.
[93.] La preuve sur ce sujet démontre, de façon prépondérante, que la travailleuse ne présentait aucune condition personnelle et préexistante avant sa lésion professionnelle du 30 octobre 1995. La travailleuse n’avait jamais souffert d’une telle symptomatologie et par ailleurs elle ne présente aucune côte cervicale surnuméraire. La seule annotation est celle de la présence d’un exostose qui, notons-le, existe du côté gauche bien que le syndrome du défilé thoracique soit bilatéral. Bien plus, la preuve sur ce sujet ne permet pas d’établir que la présence de cette exostose est directement causale du syndrome de défilé thoracique.
[94.] Par ailleurs, le diagnostic de syndrome du défilé thoracique fut posé par les médecins traitants de la travailleuse, diagnostic qui ne fut pas contesté et qui donc, lie la CSST comme la Commission des lésions professionnelles.
[95.] Bien que ce diagnostic n’apparaisse que le 10 septembre 1996, il recouvre une réalité préexistante pour laquelle la travailleuse fut traitée, de façon générale, après la consolidation de sa lésion professionnelle initiale.
[96.] Par ailleurs, les docteurs Cartier, Tremblay et Laporte se sont expliqués amplement, tel qu’il apparaît de la section des faits sur la causalité à retenir entre le syndrome du défilé thoracique présenté par madame Charbonneau et la lésion professionnelle initiale retenue, en l’occurrence la présence d’une entorse cervicale. Ces opinions se fondent sur l’absence d’une condition personnelle préexistante, sur l’ensemble des différents tests ayant mené à l’établissement du diagnostic, sur un délai d’apparition tout à fait compatible avec la littérature ainsi que sur la causalité intrinsèque notée par cette littérature entre une entorse cervicale, une fibrose du muscle scalène et la compression existant dans le défilé thoracique.
[97.] Au-delà des argumentations à savoir contusion versus entorse, traumatisme versus élongation, il convient de retenir qu’initialement la travailleuse a subi une entorse cervicale relativement importante ayant entraîné les phénomènes inflammatoires impliquant le muscle scalène tel que noté par les professionnels de la santé à ce dossier. Ce processus s’est maintenu après la consolidation de la lésion au mois de février 1996 tel que noté par le physiothérapeute Dufour.
[98.] Dans ce contexte, la Commission des lésions professionnelles conclut que la prépondérance de preuve médico-légale offerte par la travailleuse démontre qu’il existe bien une relation entre le syndrome du défilé thoracique bilatéral qu’elle a présenté et la lésion professionnelle initiale du 30 octobre 1995.
[99.] Bien plus, cette preuve médicale établit que cette lésion produisait déjà des effets, se traduisant par la plainte subjective de la travailleuse, lors de la consolidation de la lésion au 1er février 1996.
[100.] D’ailleurs, cette symptomatologie a disparu ou s’est réduite de façon significative qu’après les traitements effectués par le docteur Cartier, en l’occurrence les opérations portant sur l’exérèse de la première côte. Soulignons que ces traitements ont seuls produits une amélioration de l’état de la travailleuse ce qui semble être en soi-même un élément à prendre en considération dans l’appréciation de l’ensemble de ce dossier.
[101.] Il en résulte donc que la décision émise par la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles le 18 novembre 1997, sous la signature du commissaire Tardif porte strictement sur les lésions retenues à cette époque.
[102.] Vu la conclusion à laquelle parvient la Commission des lésions professionnelles, il convient de conclure qu’à ces diagnostics s’ajoute un diagnostic de syndrome du défilé thoracique sous-jacent. Syndrome qui produisait toujours une symptomatologie active et incapacitante qui donne droit à la travailleuse de recevoir les prestations prévues par la loi, du 1er février 1996 jusqu’à la consolidation finale de la lésion de défilé thoracique.
[103.] Quant au syndrome de mésadaptation affective sévère, la Commission des lésions professionnelles constate qu’il n’existe aucun élément de preuve démontrant que cette condition est soit directement reliée à sa lésion professionnelle et a entraîné un arrêt de travail. Dans ce contexte elle rejette la réclamation de la travailleuse sur ce diagnostic.
POUR TOUS CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la contestation introduite par la travailleuse, le 3 février 1998,
INFIRME la décision émise par le Bureau de révision, le 6 janvier 1998,
DÉCLARE que le syndrome du défilé thoracique bilatéral présenté par la travailleuse est en relation avec sa lésion professionnelle initiale du 30 octobre 1995.
DÉCLARE que le diagnostic de mésadaptation affective n’est pas sans relation avec la lésion professionnelle du 30 octobre 1995.
DÉCLARE que le syndrome du défilé thoracique bilatéral présenté par la travailleuse existait et produisait ses effets dès le mois de décembre 1995.
DÉCLARE que pour cette seule condition on devait poursuivre l’arrêt de travail de la travailleuse au-delà du 1er février 1996 jusqu’à la date de consolidation de cette lésion.
CONSTATE que la décision du 18 novembre 1997 portait strictement sur les diagnostics retenus à cette époque, en l’occurrence ceux d’entorse cervicale lombaire et d’entorse du poignet gauche et qu’en conséquence elle ne constitue pas une chose jugée sur l’existence d’un syndrome du défilé thoracique ainsi que ses conséquences.
DÉCLARE que la travailleuse a donc droit de recevoir les prestations prévues par la loi.
|
|
|
|
|
Commissaire |
|
|
|
|
|
|
|
|
M. ANDRÉ LAPORTELAPORTE & LAROUCHE Représentant de la partie requérante |
|
|
|
Me ANDRÉ C. GIROUX Représentante de la partie intéressée |
|
|
|
[1] Boivert et Halco Inc.(1995), CALP page 19.
Millette et Communauté urbaine de Montréal (1994), CALP 853
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.