Laflamme portes & fenêtres inc. et Fournier |
2014 QCCLP 1715 |
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Dossier 512144-03B-1305
[1] Le 27 mai 2013, Laflamme Portes & Fenêtres inc. (l'employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 21 mai 2013 à la suite d'une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST constate l’absence de consensus du comité de santé et de sécurité de l’employeur concernant la détermination d’une assignation au poste de quincaillerie, comme il a été consigné dans le compte rendu de la réunion du 6 mai 2013. La CSST déclare que l'assignation proposée par l’employeur et acceptée par médecin traitant ne satisfait pas aux conditions prévues à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi). En conséquence, monsieur Sacha Fournier (le travailleur) n’a pas à effectuer l’assignation.
Dossier 521625-03B-1309
[3] Le 12 septembre 2013, l'employeur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 30 juillet 2013 à la suite d'une révision administrative.
[4] Par cette décision, la CSST confirme celle qu'elle a initialement rendue le 16 mai 2013 et déclare que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 1er mai 2013 dont le diagnostic étant des phlyctènes aux deux pieds et déclare que le travailleur a droit a des indemnités de remplacement du revenu.
[5] L'audience s'est tenue le 21 octobre 2013, à Lévis. L’employeur et le travailleur étaient représentés. Le tribunal a demandé le dépôt de documents émanant, notamment du comité de santé et de sécurité de l’entreprise, et, le 16 décembre 2013, le dossier a été complété et mis en délibéré à la suite de la réception des argumentations des parties.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
Dossier 512144-03B-1305
[6] L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles de conclure que l’assignation proposée au travailleur était conforme aux dispositions de la loi.
Dossier 521625-03B-1309
[7] En regard de ce dossier, l'employeur ne soumet aucun commentaire, laissant le tout à l’appréciation du tribunal.
LES FAITS
[8] Le tribunal a reçu des témoignages et a pris connaissance de la preuve documentaire. Les éléments suivants sont retenus.
[9] En résumé, il s’agit d’une blessure que le travailleur s’est infligé en portant des bottes de sécurité mal ajustées et qui sont fournies par l’employeur. Il y a eu consultation médicale et un arrêt du travail régulier fut prescrit. Par contre, le médecin traitant était d’accord pour que le travailleur effectue l’assignation proposée par l’employeur. Le travailleur l’a refusé. Le litige est alors soumis au comité de santé et de sécurité conjoint de l'entreprise qui ne peut s’entendre, d’où l’intervention de la CSST.
[10] Madame Lambert était coordonnatrice des ressources humaines chez l’employeur et à l’emploi jusqu’au 2 septembre 2013. Elle témoigne des faits suivants. À titre de coordonnatrice, en plus des tâches de gestion qui lui étaient attribuées, elle gérait les cas particuliers en santé et sécurité, dont celui du travailleur.
[11] L’employeur fournit les équipements de sécurité, notamment les chaussures de sécurité comme les bottes utilisées par le travailleur. Le comité de santé et de sécurité paritaire a entériné une procédure concernant le port de chaussures de sécurité, puisque l’employeur exige ce type de protection dans l’usine pour tous ceux qui s’y présentent.
[12] Un coût maximum de 125 $ pour l’acquisition ou le remplacement des chaussures de sécurité est assumé par l’employeur, le tout selon les modalités prévues à la convention collective.
[13] L’employeur et le syndicat se sont entendus pour que l’achat ou le remplacement des chaussures de sécurité se fasse par l’intermédiaire d’un fournisseur qui se déplace à l’entreprise avec plusieurs modèles de chaussures dans un camion.
[14] Selon les modalités prévues à la procédure, le travailleur syndiqué a droit à un remplacement de chaussures aux douze mois, sous réserve que celles-ci soient détériorées. Sinon, le travailleur les conserve jusqu’au moment jugé opportun.
[15] Lorsque le remplacement est nécessaire, le travailleur se présente au camion du fournisseur et choisit ses bottes. Il a droit à un maximum de 125 $ par année.
[16] L’employeur offre aussi une protection amovible, un couvre-chaussure caoutchouté muni d’un protecteur en acier à son extrémité. Ce protecteur est utilisé principalement par les visiteurs ainsi que par les travailleurs lorsqu’ils oublient leurs chaussures de sécurité. Cette mesure est temporaire puisqu’ils doivent se présenter le lendemain avec leurs chaussures.
[17] Le travailleur a changé ses bottes le 25 mars 2013, selon les dispositions de la convention collective. Madame Lambert a été avisée le 15 avril suivant, par le contremaître du travailleur, que ce dernier avait des ampoules aux pieds et demandait de changer ses bottes neuves.
[18] Le 16 avril 2013, madame Lambert communique avec la CSST afin de soumettre à un inspecteur le problème lié au fait que le travailleur avait reçu des bottes neuves, il y a trois semaines, et qu’il demandait de les échanger. Elle déclare que l’inspecteur lui aurait dit que l’employeur s’était acquitté de ses obligations et que le montant de 125$ octroyé pour des bottes de sécurité était raisonnable. À la suite de ces renseignements, elle décide de ne pas remplacer les bottes de sécurité du travailleur.
[19] Madame Lambert est absente du travail du 24 avril au 10 mai 2013. Par contre, le 9 mai 2013, elle reçoit un appel de sa consœur de travail aux ressources humaines qui l’avise qu’un événement a été déclaré par le travailleur le 1er mai 2013 en rapport avec des blessures aux pieds. Celui-ci refuse d’effectuer l’assignation et veut exercer un droit de refus puisque sa lésion est consolidée et que ses bottes n’ont pas été remplacées, ce qui risque de le blesser de nouveau.
[20] La CSST est impliquée dans le dossier. L'inspecteur de garde décide de ne pas se déplacer puisqu’il n’y a pas de danger immédiat. Il est convenu que le travailleur retournera chez lui payé par l’employeur.
[21] Le 13 mai 2013, elle discute avec le président du syndicat et ils s’entendent pour que le travailleur se présente chez un cordonnier afin de faire réparer ses bottes. Madame Lambert avait préalablement communiqué avec le cordonnier qui lui avait mentionné pouvoir effectuer certaines réparations comme les agrandir ou poser une semelle pour les rétrécir. De plus, elle s’entend avec celui - ci, advenant le cas où la réparation serait impossible, d’offrir au travailleur un choix de trois modèles de chaussures de sécurité.
[22] Le travailleur se présente avec son contremaître chez le cordonnier qui constate qu’il est impossible de procéder à une réparation. Madame Lambert rapporte que le travailleur a essayé les modèles suggérés et qu’aucun d’eux ne lui convenait.
[23] De retour au travail, alors que le travailleur n’a toujours pas de bottes de sécurité, madame Lambert communique avec le président du syndicat, monsieur Bernard. Il est convenu que le travailleur effectuera l’assignation temporaire au poste de quincaillerie en portant la protection amovible, et ce, pour son quart de travail du soir. Dans les faits, il ne s’agit pas d’occuper une assignation temporaire, mais bien d’effectuer le travail régulier au poste de quincaillerie, car la lésion professionnelle est consolidée.
[24] Par contre, avant que sa lésion soit consolidée, le travailleur avait refusé et contesté cette assignation alléguant que le protecteur amovible n’était pas sécuritaire.
[25] Le 14 mai 2013, madame Lambert communique de nouveau avec l’inspecteur de la CSST qui l’informe que l’employeur a respecté les dispositions de la Loi sur la santé et la sécurité du travail[2] (la LSST) et que, si le travailleur ne veut pas porter les chaussures de sécurité proposées, l’employeur peut le retourner chez lui sans rémunération.
[26] Cette information est transmise au travailleur et les parties conviennent que ce dernier se rendra chez le cordonnier pour choisir une paire de bottes de sécurité.
[27] Concernant l’assignation, celle-ci est octroyée lorsque le médecin traitant remplit le formulaire fourni par l’employeur et l’autorise. Dans le cas du travailleur, il a été assigné à des tâches de quincaillerie dans l’usine, tâches s’effectuant quelques fois à la salle à manger.
[28] Ce type d’assignation a déjà été contesté, mais dans le cadre de mises à pied.
[29] En contre-interrogatoire, madame Lambert précise :
· Le montant de 125 $ a été jugé raisonnable par la CSST;
· Le travailleur est chef d’équipe dans le département de peinture. Le travail de bureau proposé est indiqué sur le formulaire dans le but de maintenir le lien d’emploi;
· Le formulaire d’assignation a été développé par le comité de santé et sécurité avec l’aide du médecin responsable de l’entreprise;
· L’assignation proposée consistait à insérer des vis dans des sacs. Le travail s’effectuait en position assise, à un poste prévu à cette fin dans l’usine ou à la cafétéria où les bottes de sécurité ne sont pas nécessaires;
· Le port de bottes de sécurité ou du protecteur amovible est obligatoire dans l’usine;
· Lorsque l’assignation a été proposée, elle était au courant que les nouvelles bottes blessaient le travailleur;
· L’emploi à la quincaillerie existe dans l’entreprise à titre de poste de travail sans qu’un travailleur y soit affecté à plein temps. Ce travail est considéré comme étant des travaux légers et le poste est situé au milieu de l’usine, où est effectuée la production. Par contre, lorsque la situation le demande, notamment lorsqu’il y a des déplacements avec béquilles, le travail s’effectue à la cafétéria, car il est interdit de se déplacer avec des béquilles dans l'entreprise;
· Concernant l’assignation, elle mentionne qu’il y a eu révision de la procédure avec le médecin d’entreprise et le comité de santé et de sécurité. Le tribunal a demandé la production des procès-verbaux afférents.
[30] À la suite des commentaires recueillis, le tribunal a aussi demandé un complément d’information concernant les chaussures de sécurité utilisées dans l’entreprise ainsi que la fiche signalétique de la protection amovible.
[31] Le travailleur témoigne des faits suivants :
· Après le port des nouvelles bottes durant deux semaines, il avise son contremaître que celles-ci lui blessent les pieds. Il a des ampoules aux talons;
· Il a remis ces bottes à son contremaître afin que celui-ci s’informe auprès des ressources humaines s’il peut les échanger. Dans l’attente d’une réponse, durant les deux semaines qui ont suivi, il a porté de vieilles bottes qu’il avait chez lui. Il a été avisé de que ces bottes ne seraient pas remplacées et le contremaître lui a remis ses bottes neuves qui devront être portées de nouveau. Le 1er mai 2013, il a des ampoules aux pieds et communique avec un inspecteur de la CSST. Ce dernier l’avise qu’il devrait consulter un médecin, ce qu’il fait par la suite;
· Le travail en assignation consistait à mettre de la quincaillerie dans des sacs. Le seul quart de travail effectué à ce poste l’a été le 13 mai 2013. À ce moment, il portait des espadrilles avec la protection amovible;
· Le travailleur conteste l’assignation, car il considère que les travaux proposés sont, soit inexistants, soit ne correspondent pas à ses capacités.
[32] En contre-interrogatoire, le travailleur précise les points suivants :
· Le travail consistant à mettre des vis dans des sacs n’est pas valorisant et il considère qu’il pourrait faire mieux avec ses compétences;
· Le lieu où s’effectue ce travail se situe dans un corridor dans un endroit isolé;
· Il a déjà exécuté ce travail en assignation durant quelques semaines, mais sans pour autant le contester avant 2005;
· Lorsqu’il a échangé ses bottes, il a demandé au fournisseur la pointure numéro 8, comme celle indiquée dans ses vieilles bottes. Il les a essayées et portées par la suite. Il mentionne que la personne responsable de ce magasin roulant ne le conseille pas dans le choix de chaussures de sécurité;
· Lors de la première visite chez le cordonnier, ce dernier lui a indiqué que ses bottes étaient trop grandes et qu’il ne pouvait les réparer puisqu’elles étaient munies d’une semelle à l’intérieur. Parmi les chaussures offertes, il n’y avait qu’un seul modèle de bottes, les autres étant, soit un soulier, soit un bottillon. La botte essayée ne lui convenait pas. Par contre, lors de la deuxième visite, le 13 mai 2013, il y avait un autre modèle de bottes qui lui convenait et qu’il a choisi.
[33] Le tribunal a reçu le témoignage de monsieur Bernard, président du syndicat. Les renseignements suivants ont été recueillis :
· Il est président depuis plus de dix ans et occupe une fonction syndicale depuis 27 ans;
· Il siège au comité de santé et de sécurité depuis 25 ans;
· Le formulaire d’assignation a été présenté au comité, mais n’a pas fait l’objet d’une résolution commune. Il en va de même pour la révision de la procédure d’assignation;
· C’est madame Toussaint, infirmière au CLSC, qui a présenté le formulaire d’assignation au comité;
· Les bottes de sécurité sont obligatoires dans l’entreprise. La protection amovible n’est pas reconnue comme équipement de sécurité conforme à la norme CSA et à celle de la CSST par le comité de santé et de sécurité et ne peut être utilisée par les travailleurs en usine. Cette protection amovible est autorisée pour les visiteurs circulant dans les corridors.
[34] Le dossier administratif contient les renseignements pertinents suivants :
· Le rapport médical initial du 1er mai 2013 fait référence à des phlyctènes aux pieds. Le médecin recommande de nouvelles bottes avec un meilleur ajustement. De plus, il prescrit une assignation pour une semaine;
· Le 2 mai 2013, le travailleur conteste son assignation en ces termes :
La présente est pour vous aviser que je conteste l’assignation temporaire demandé par mon employeur en date du 01/05/2013, et l’approbation du médecin.
Je conteste cette assignation temporaire pour les raisons suivantes : L'équipement de sécurité personnelle fournie par mon employeur n’est pas ajusté à ma pointure, celle-ci m’a blessé les pieds, le médecin a conseillé de changer cette équipement de sécurité, le port de cet équipement de sécurité est obligatoire dans l’usine et au poste de travaux léger (assignation temporaire) qui se situe dans l’usine de fabrication. [sic]
[…]
· Le 6 mai 2013, le comité de santé et de sécurité a discuté de la contestation du travailleur relativement à l’assignation temporaire. La docteure Lavoie, médecin responsable du programme de santé dans l’entreprise, a été consultée et, à son avis, l’assignation proposée est conforme à la loi;
· Un rapport médical final consolidant la lésion est produit par le médecin traitant le 8 mai 2013;
· La CSST rend une décision le 21 mai 2013 en concluant que l’assignation proposée est non conforme. Plus précisément, le réviseur écrit :
[…]
Après examen de la preuve médicale et factuelle au dossier, la Commission, en révision, doit adhérer aux arguments des représentants du travailleur. Le port de claques par-dessus les souliers, dans l’usine, comporterait un risque de blessure pour le travailleur et la cafétéria n’est effectivement pas un lieu de travail. De plus, obliger le travailleur à faire des tâches manuelles à la cafétéria l’isolerait de ses collègues et irait à l’encontre de l’objectif de favoriser sa réadaptation.
[…]
· Le dossier indique qu’une plainte en vertu de l’article 32 de la LSST a été déposée, mais l’objet ne fait pas partie du litige actuel devant le tribunal.
L’ARGUMENTATION DES PARTIES
[35] L’employeur, dans son argumentation déposée le 28 novembre 2013, avise le tribunal que les documents demandés n’ont pu être retracés et transmet les renseignements suivants :
· Il n’existe pas de fiche signalétique concernant la protection amovible utilisée en entreprise. Par contre, le fournisseur de cet équipement déclare qu’une certification à la norme CSA a été demandée;
· Concernant les procès-verbaux du comité de santé et de sécurité au travail relativement à l’assignation temporaire, ceux-ci n’existent pas.
[36] Quant au fond du litige, l’employeur soumet :
· L’assignation proposée ne comporte pas de danger pour la santé, la sécurité et l’intégrité du travailleur étant donné sa lésion;
· L’assignation proposée est favorable à la réadaptation du travailleur;
· L’assignation n’a pas à tenir compte des aspirations professionnelles du travailleur. Il s’agit de savoir s’il peut physiquement accomplir la tâche manuelle demandée;
· L’article 179 de la loi n’exige pas que le caractère professionnel de la lésion soit reconnu par la CSST pour que l’employeur assigne un travailleur à des travaux légers.
[37] Concernant le dossier portant sur l’admissibilité, l’employeur, comme il a été annoncé lors de l’audience, s’en remet à la décision du tribunal.
[38] Quant au représentant du travailleur, il écrit à son argumentation ce qui suit :
Voici notre réplique à l’argumentation écrite soumise par Me Rancourt dans le dossier mentionné en objet.
1. Contrairement à ce que Me Rancourt prétend à partir du paragraphe 29 et suivant de son argumentaire, nous considérons que, pour que l’article 179 s’applique, il faut que la lésion ait été reconnue comme étant une lésion professionnelle et ce de façon définitive par une des instances compétentes prévue à la Loi.
2. L’article 179 se lit comme suit :
Travail temporaire :
- L’employeur d’un travailleur victime d’une lésion professionnelle peut assigner temporairement un travail à ce dernier, en attendant qu’il redevienne capable d’exercer son emploi ou devienne capable d’exercer un emploi convenable, même si sa lésion n’est pas consolidée, si le médecin qui a charge du travailleur croit que :
1° le travailleur est raisonnablement en mesure d’accomplir ce travail;
2° ce travail ne comporte pas de danger pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique du travailleur compte tenu de sa lésion; et
3° ce travail est favorable à la réadaptation du travailleur.
3. Dans le préambule, on y retrouve « d’un travailleur victime d’une lésion professionnelle ».
Au Chapitre I, Section Il, on retrouve l’interprétation du terme « lésion professionnelle » :
"Une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l’occasion d’un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l’aggravation".
Donc, en appliquant cette définition à l’article 179, pour être victime d’une lésion professionnelle, il faut que la CSST ou la CLP ait décidé de la question.
4. Dans le préambule de l’article 179, on retrouve aussi « même si sa lésion n’est pas consolidée ».
Toujours au Chapitre I, Section Il, on retrouve l’interprétation du terme « consolidation »
"la guérison ou la stabilisation d’une lésion professionnelle à la suite de laquelle aucune amélioration de l’état de santé du travailleur victime de cette lésion n’est prévisible".
À sa lecture, on constate que la consolidation ou non s’applique uniquement à une lésion professionnelle reconnue comme telle.
5. À mon humble avis, lorsque le législateur utilise l’expression « sa lésion n’est pas consolidée », celui-ci entendait une lésion professionnelle qui a fait l’objet d’une décision d’acceptation de la CSST ou la CLP.
6. Il ne faut non plus oublier que l’article 179 n’est pas écrit n’importe où dans la Loi. L’article 179 est écrit au Chapitre IV - Réadaptation.
7. II faut considérer l’article 179 comme une mesure de réadaptation et c’est ce que prévoit l’alinéa 3 du texte.
8. L’article 145 stipule que pour bénéficier de la réadaptation, il faut avoir été reconnu victime d’une lésion professionnelle et avoir subi une atteinte permanente.
9. Dans ses arguments Me Rancourt vous cite l’article 190
- L’employeur doit immédiatement donner les premiers secours à un travailleur victime d’une lésion professionnelle dans son établissement et, s’il y a lieu, le faire transporter dans un établissement de santé, chez un professionnel de la santé ou à la résidence du travailleur, selon que le requiert son état.
Je soumets que dans le texte, il y a aussi « dans son établissement ».
Il me semble assez clair que ce travailleur a été victime d’une lésion professionnelle car dans un tel cas, l’article 28 trouve toute son application.
10. Ensuite, Me Rancourt vous cite l’article 60.
Cependant, il semble oublier l’article 44 de la Loi.
- Le travailleur victime d’une lésion professionnelle a droit à une indemnité de remplacement du revenu s’il devient incapable d’exercer son emploi en raison de cette lésion.
11. Donc, nous savons tous que pour avoir droit à une IRR, il faut que la lésion professionnelle soit acceptée comme telle par la CSST ou la CLP.
12. Si il est établi que le travailleur n’est pas victime d’une lésion professionnelle, alors il doit rembourser la somme qu’il a reçue en vertu de l’application de l’article 60 et il n’aura pas droit à une IRR.
Encore une fois, au risque de me répéter, c’est la CSST ou la CLP qui décide qui est victime d’une lésion professionnelle et qui ne l’est pas.
13. En résumé pour bénéficier de prestations ou de réadaptation, il faut être victime d’une lésion professionnelle reconnue comme telle.
14. Le législateur est réputé ne pas avoir écrit pour ne rien dire et à mon avis la façon correcte d’appliquer l’article 179 est celle que je vous soumets.
De plus, cette application viendrait corriger un non-sens juridique, une incohérence.
En effet, comment un employeur peut-il proposer une assignation temporaire alors qu’il conteste le fait que son travailleur ait été victime d’une lésion professionnelle? Poser la question c’est y répondre.
15. Conséquemment, si l’employeur prétend que le travailleur n’a pas été victime d’une lésion professionnelle, alors il se disqualifie lui-même d’appliquer l’article 179.
Pour tous ces motifs, je vous demande de déclarer que l’assignation temporaire proposée par l’employeur est illégale et non-conforme à l’article 179 de la Loi et aussi je vous demande de rejeter la contestation de l’employeur. [sic]
[…]
L’AVIS DES MEMBRES
Dossier 512144-03B-1305
[39] Les membres issus des associations d’employeurs et des associations syndicales, après avoir été consultés sur les questions en litige, sont d'avis de rejeter la requête de l'employeur aux motifs suivants.
[40] D’une part, ils considèrent que l’assignation temporaire proposée est située à un poste dans l’usine. C’est ce que révèle le témoignage de madame Lambert.
[41] D’autre part, ils sont d’avis que, pour effectuer ce travail, le travailleur devait bénéficier de chaussures de protection conformes à la réglementation et approuvées par le comité de santé et de sécurité. Or, les couvre-chaussures n’ont pas obtenu cette approbation.
[42] Enfin, ils considèrent que l’argumentaire du représentant du travailleur, à savoir que l’assignation temporaire ne pouvait être proposée qu’à la reconnaissance d’une lésion professionnelle à la suite d’une décision finale, ne peut être retenu, et ce, pour les motifs apparaissant à la décision.
Dossier 521625-03B-1309
[43] Concernant la question d’admissibilité de la réclamation du travailleur, les membres considèrent que la prépondérance de la preuve démontre que ce dernier a subi une lésion professionnelle le 1er mai 2013. En effet, c’est à la suite du port d’un équipement de sécurité, dans le cadre du travail chez l’employeur, que le travailleur s’est blessé. Il y a eu consultation médicale et le diagnostic posé est compatible avec le port de chaussures de protection mal ajustées.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[44] Après examen et audition et après avoir reçu l'avis des membres, la Commission des lésions professionnelles rend la décision suivante.
Dossier 512144-03B-1305
[45] Le tribunal doit décider si l'assignation temporaire au poste à la quincaillerie proposée est conforme à la loi qui prévoit :
179. L'employeur d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle peut assigner temporairement un travail à ce dernier, en attendant qu'il redevienne capable d'exercer son emploi ou devienne capable d'exercer un emploi convenable, même si sa lésion n'est pas consolidée, si le médecin qui a charge du travailleur croit que :
1° le travailleur est raisonnablement en mesure d'accomplir ce travail;
2° ce travail ne comporte pas de danger pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique du travailleur compte tenu de sa lésion; et
3° ce travail est favorable à la réadaptation du travailleur.
Si le travailleur n'est pas d'accord avec le médecin, il peut se prévaloir de la procédure prévue par les articles 37 à 37.3 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (chapitre S-2.1), mais dans ce cas, il n'est pas tenu de faire le travail que lui assigne son employeur tant que le rapport du médecin n'est pas confirmé par une décision finale.
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1985, c. 6, a. 179.
[46] La LSST prévoit à l’article 51, les dispositions suivantes :
Les obligations de l’employeur
51. L'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l'intégrité physique du travailleur. Il doit notamment :
1° s'assurer que les établissements sur lesquels il a autorité sont équipés et aménagés de façon à assurer la protection du travailleur;
2° désigner des membres de son personnel chargés des questions de santé et de sécurité et en afficher les noms dans des endroits visibles et facilement accessibles au travailleur;
3° s'assurer que l'organisation du travail et les méthodes et techniques utilisées pour l'accomplir sont sécuritaires et ne portent pas atteinte à la santé du travailleur;
4° contrôler la tenue des lieux de travail, fournir des installations sanitaires, l'eau potable, un éclairage, une aération et un chauffage convenable et faire en sorte que les repas pris sur les lieux de travail soient consommés dans des conditions hygiéniques;
5° utiliser les méthodes et techniques visant à identifier, contrôler et éliminer les risques pouvant affecter la santé et la sécurité du travailleur;
6° prendre les mesures de sécurité contre l'incendie prescrites par règlement;
7° fournir un matériel sécuritaire et assurer son maintien en bon état;
8° s'assurer que l'émission d'un contaminant ou l'utilisation d'une matière dangereuse ne porte atteinte à la santé ou à la sécurité de quiconque sur un lieu de travail;
9° informer adéquatement le travailleur sur les risques reliés à son travail et lui assurer la formation, l'entraînement et la supervision appropriés afin de faire en sorte que le travailleur ait l'habileté et les connaissances requises pour accomplir de façon sécuritaire le travail qui lui est confié;
10° afficher, dans des endroits visibles et facilement accessibles aux travailleurs, les informations qui leur sont transmises par la Commission, l'agence et le médecin responsable, et mettre ces informations à la disposition des travailleurs, du comité de santé et de sécurité et de l'association accréditée;
11° fournir gratuitement au travailleur tous les moyens et équipements de protection individuels choisis par le comité de santé et de sécurité conformément au paragraphe 4° de l'article 78 ou, le cas échéant, les moyens et équipements de protection individuels ou collectifs déterminés par règlement et s'assurer que le travailleur, à l'occasion de son travail, utilise ces moyens et équipements;
12° permettre aux travailleurs de se soumettre aux examens de santé en cours d'emploi exigés pour l'application de la présente loi et des règlements;
13° communiquer aux travailleurs, au comité de santé et de sécurité, à l'association accréditée, au directeur de santé publique et à la Commission, la liste des matières dangereuses utilisées dans l'établissement et des contaminants qui peuvent y être émis;
14° collaborer avec le comité de santé et de sécurité ou, le cas échéant, avec le comité de chantier ainsi qu'avec toute personne chargée de l'application de la présente loi et des règlements et leur fournir tous les renseignements nécessaires;
15° mettre à la disposition du comité de santé et de sécurité les équipements, les locaux et le personnel clérical nécessaires à l'accomplissement de leurs fonctions.
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1979, c. 63, a. 51; 1992, c. 21, a. 303; 2001, c. 60, a. 167; 2005, c. 32, a. 308.
[47] Le 11e paragraphe de cet article prévoit que les équipements de sécurité fournis par l'employeur doivent faire l’objet d’une approbation de la part du comité de santé et de sécurité dans l'entreprise, comité dont les fonctions sont les suivantes :
78. Les fonctions du comité de santé et de sécurité sont :
1° de choisir conformément à l'article 118 le médecin responsable des services de santé dans l'établissement.
2° d'approuver le programme de santé élaboré par le médecin responsable en vertu de l'article 112;
3° d'établir, au sein du programme de prévention, les programmes de formation et d'information en matière de santé et de sécurité du travail;
4° de choisir les moyens et équipements de protection individuels qui, tout en étant conformes aux règlements, sont les mieux adaptés aux besoins des travailleurs de l'établissement;
5° de prendre connaissance des autres éléments du programme de prévention et de faire des recommandations à l'employeur;
6° de participer à l'identification et à l'évaluation des risques reliés aux postes de travail et au travail exécuté par les travailleurs de même qu'à l'identification des contaminants et des matières dangereuses présents dans les postes de travail aux fins de l'article 52;
7° de tenir des registres des accidents du travail, des maladies professionnelles et des événements qui auraient pu en causer;
8° de transmettre à la Commission les informations que celle-ci requiert et un rapport annuel d'activités conformément aux règlements;
9° de recevoir copie des avis d'accidents et d'enquêter sur les événements qui ont causé ou qui auraient été susceptibles de causer un accident du travail ou une maladie professionnelle et soumettre les recommandations appropriées à l'employeur et à la Commission;
10° de recevoir les suggestions et les plaintes des travailleurs, de l'association accréditée et de l'employeur relatives à la santé et à la sécurité du travail, les prendre en considération, les conserver et y répondre;
11° de recevoir et d'étudier les rapports d'inspections effectuées dans l'établissement;
12° de recevoir et d'étudier les informations statistiques produites par le médecin responsable, l'agence et la Commission;
13° d'accomplir toute autre tâche que l'employeur et les travailleurs ou leur association accréditée lui confient en vertu d'une convention.
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1979, c. 63, a. 78; 1992, c. 21, a. 304; 2005, c. 32, a. 308.
[48] De la preuve administrée, le tribunal retient comme avérés les éléments suivants :
· Selon le témoignage de madame Lambert, le travail proposé à titre d’assignation est un poste de travail régulier;
· L’assignation proposée ne comprenait pas de tâches cléricales dans le bureau, mais correspondait à un poste en quincaillerie dont la tâche du travailleur qui l’occupe est de classer des vis dans des sacs;
· Le port de chaussures de sécurité est obligatoire dans l’usine. C’est que révèle la « Procédure pour chaussures de sécurité »:
RÈGLEMENT
· Le port de chaussures de sécurité est obligatoire dans l’usine (article 18.09 A de la présente convention collective)
· Le poste de travail en assignation en quincaillerie est situé dans l’usine;
· Ce travail en assignation peut se faire à l’intérieur de la cafétéria;
· La protection amovible n’est pas homologuée par la norme de sécurité CSA;
· La protection amovible n’a pas fait l’objet d’une approbation conjointe de la part des membres du comité de santé et de sécurité de l’entreprise.
[49] La prépondérance de la preuve amène le tribunal à conclure que l’assignation proposée n'était pas conforme, et ce, pour les motifs suivants.
[50] Premièrement, l’article 179 de la loi, 2e alinéa, prévoit que l’assignation ne doit pas « comporter de danger pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique du travailleur ». Il faut donc que ce travail puisse être effectué, selon les règles de sécurité. Or, il appert que les conditions d’exécution de l’assignation ne comportaient pas ces garanties de sécurité, notamment au niveau de la protection amovible.
[51] Deuxièmement, un des éléments nécessaires à la sécurité et à l’intégrité physique du travailleur est la protection résultant du port de chaussures de sécurité. En effet, il est démontré que ces chaussures sont obligatoires dans l’usine. Il faut donc conclure qu’il y a des dangers, dans l’usine, pouvant affecter la sécurité et l’intégrité physique du travailleur puisque les chaussures de sécurité sont obligatoires.
[52] Troisièmement, l’employeur soumet que la protection amovible respecte les normes de sécurité nécessaires pour que le travailleur puisse effectuer sans danger l’assignation proposée. À ce sujet, le tribunal n’est pas en accord avec cette allégation.
[53] D’une part, le port de chaussures de sécurité conformes aux exigences de la LSST étant nécessaire pour toutes personnes travaillant dans l’usine, il va de soi que le travailleur devait en porter pour effectuer son assignation.
[54] D’autre part, pour que des équipements de sécurité soient reconnus comme conformes à cette loi, ils doivent être approuvés par le comité de santé et de sécurité de l'entreprise. C’est ce que prévoient les articles 51 et 78 de la LSST. Or, la protection amovible n’a pas été approuvée par le comité de santé et de sécurité de l'entreprise.
[55] Quatrièmement, le tribunal retient que le poste de quincaillerie existe à un endroit précis dans l’entreprise et fait partie des opérations normales de l’entreprise. Ce n’est pas un poste qui se retrouve à la cafétéria. Tout comme l’a décidé la CSST, la cafétéria n’est pas « un lieu de travail. De plus, obliger le travailleur à faire des tâches manuelles à la cafétéria l’isolerait de ses collègues et irait à l’encontre de l’objectif de favoriser sa réadaptation ».
[56] Cinquièmement, le tribunal ne retient pas l'argument du travailleur selon lequel « il pourrait faire mieux avec ses compétences », ceci n’étant pas un critère se retrouvant à l’article 179 de la loi. De plus, le travailleur avait déjà démontré sa capacité à faire cette assignation temporaire par le passé.
[57] Enfin, il est évident que les relations de travail sont une composante des litiges soumis. À cet effet, le tribunal retient du témoigne de madame Lambert que celle-ci croit utile de communiquer avec la CSST, dès que le problème du remplacement des bottes de sécurité est soulevé, alors que dans une situation de travail normal, c’est à l’interne que le tout se règle.
[58] Fait surprenant, un inspecteur aurait mentionné à l'employeur que ses obligations légales étaient remplies alors qu’il aurait été informé que le travailleur se blessait en continuant de porter un équipement de protection inadéquat. Le tribunal en doute.
[59] De plus, il en va de même pour le comportement du travailleur qui communique avec la CSST afin de connaître la procédure relativement au remplacement de ses bottes neuves. L’entreprise possède un comité de santé et de sécurité et c’est avec lui que les intervenants auraient dû chercher une solution, pour ne pas dire la solution, à ce litige, et de s’adresser à des ressources extérieures qu’en dernier recours.
[60] Enfin, le représentant du travailleur soumet une argumentation qui peut se résumer comme suit : tant qu’une lésion professionnelle n’est pas reconnue par la CSST ou la Commission des lésions professionnelles, aucune assignation ne peut être proposée par l’employeur.
[61] À ce sujet, le tribunal est en désaccord pour les motifs suivants.
[62] Premièrement, la loi prévoit une présomption qu’il y a lésion professionnelle lorsqu’un travailleur allègue s’être blessé au travail. Ainsi, l’employeur doit continuer à verser la rémunération que le travailleur devait percevoir n’eut été l’accident du travail, et ce, pour les 14 premiers jours. À ce moment, il n’y a eu aucune décision reconnaissant la lésion professionnelle, mais, puisque la bonne foi est présumée, la lésion professionnelle l’est elle aussi.
[63] Deuxièmement, dans le même ordre d’idée concernant la présomption, la loi prévoit que la CSST peut verser des indemnités de remplacement du revenu même si elle ne détient pas tous les renseignements pour rendre une décision sur la reconnaissance de la lésion professionnelle. Ainsi :
129. La Commission peut, si elle le croit à propos dans l'intérêt du bénéficiaire ou dans le cas d'un besoin pressant du bénéficiaire, verser une indemnité de remplacement du revenu avant de rendre sa décision sur le droit à cette indemnité si elle est d'avis que la demande apparaît fondée à sa face même.
Si par la suite la Commission rejette la demande ou l'accepte en partie, elle ne peut recouvrer les montants versés en trop de la personne qui les a reçus, sauf si cette personne :
1° a obtenu ces montants par mauvaise foi; ou
2° a droit au bénéfice d'un autre régime public d'indemnisation en raison de la blessure ou de la maladie pour laquelle elle a reçu ces montants.
Dans le cas du paragraphe 2°, la Commission ne peut recouvrer les montants versés en trop que jusqu'à concurrence du montant auquel a droit cette personne en vertu d'un autre régime public d'indemnisation.
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1985, c. 6, a. 129.
[64] Troisièmement, s’il faut attendre que la lésion professionnelle soit acceptée par une instance avant de permettre l’application des dispositions de la loi, qu’adviendrait-il des indemnités de remplacement du revenu qui doivent être versées au travailleur, lors de contestations? Il serait aberrent qu’une victime d’un accident du travail doive attendre la fin d’un litige portant sur l’admissibilité d’une lésion professionnelle puisque le temps écoulé peut se traduire en années, dans certains cas, lorsque le débat se déplace devant les cours supérieures.
[65] Il est donc clair que les dispositions de la loi sont applicables même lorsque la lésion professionnelle n’a pas fait l’objet d’une décision écrite de la part de la CSST concernant la reconnaissance de ladite lésion.
[66] Quant au commentaire du représentant du travailleur selon lequel l’assignation temporaire est au chapitre de la réadaptation, que le droit à la réadaptation s’applique seulement lorsque la lésion a été consolidée et qu’il en a résulté une atteinte permanente, comme le prévoit l’article 145 de la loi, les commentaires suivants sont requis.
[67] L’assignation temporaire n’est pas une mesure de réadaptation encadrée par l’article 145 de la loi qui prévoit :
145. Le travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit, dans la mesure prévue par le présent chapitre, à la réadaptation que requiert son état en vue de sa réinsertion sociale et professionnelle.
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1985, c. 6, a. 145.
[notre soulignement]
[68] Le tribunal tient à souligner que le législateur a pris soin d’y indiquer qu’une assignation pouvait être proposée à une victime présumée d’une lésion professionnelle même si sa lésion n’est pas consolidée, ce qui a pour conséquence que l’assignation temporaire n’est pas régie par l’article 145 de la loi puisqu’il ne peut y avoir une détermination de l’atteinte permanente si la lésion professionnelle n’est pas consolidée.
[69] De plus, le fait qu’une atteinte permanente soit déterminée ou non ne constitue pas un critère d’application pour l’assignation temporaire puisqu’il existe des cas où la lésion professionnelle est consolidée et que le travailleur est en assignation temporaire jusqu’à la détermination d’un emploi convenable.
[70] En résumé, le législateur a décidé qu’il était avantageux, dans le cadre d’un processus global de réadaptation, tant pour l’employeur que pour le travailleur, de permettre à ce dernier de continuer de travailler dans son milieu de travail à effectuer des tâches adaptées en considérant sa lésion professionnelle. Ce processus est encadré par le médecin traitant ainsi que par le mécanisme de contestation prévu à la loi ainsi qu’à la LSST.
Dossier 521625-03B-1309
[71] Le tribunal doit décider si le travailleur a subi une lésion professionnelle le 1er mai 2013. Pour ce faire, il y a lieu de se référer à la loi qui prévoit :
2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :
« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation.
« accident du travail » : un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle;
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1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.
28. Une blessure qui arrive sur les lieux du travail alors que le travailleur est à son travail est présumée une lésion professionnelle.
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1985, c. 6, a. 28.
[72] Dans le cas soumis, la prépondérance de la preuve démontre que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 1er mai 2013, et ce, pour les motifs suivants.
[73] Premièrement, il n’est pas contesté que le port de l’équipement de sécurité, constitué de bottes de travail, est responsable de la lésion aux pieds.
[74] Deuxièmement, cet équipement a été porté dans le cadre d’une obligation de l’employeur et de la réglementation en vigueur alors que le travailleur faisait son travail.
[75] Enfin, le diagnostic retenu par le médecin traitant est compatible avec le port de chaussures mal adaptées aux pieds du travailleur, d’autant plus qu’il indique au premier rapport médical la recommandation de bottes mieux ajustées.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
Dossier 512144-03B-1305
REJETTE la requête de Laflamme Portes & Fenêtres inc., l'employeur;
CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 21 mai 2013 à la suite d'une révision administrative;
DÉCLARE que l'assignation temporaire de travail au poste de quincaillerie proposée par l’employeur et le médecin traitant ne répond pas aux conditions prévues à la Loi sur les accidents du travail et des maladies professionnelles, notamment en ce qui concerne la sécurité et de l’intégrité physique du travailleur;
DÉCLARE que monsieur Sacha Fournier, le travailleur, n’avait pas à effectuer l’assignation temporaire de travail proposée.
Dossier 521625-03B-1309
REJETTE la requête de Laflamme Portes et Fenêtres inc., l’employeur;
CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 30 juillet 2013 à la suite d'une révision administrative;
DÉCLARE que monsieur Sacha Fournier, le travailleur, a subi une lésion professionnelle le 1er mai 2013 diagnostiquée comme étant des phlyctènes aux deux pieds;
DÉCLARE que le travailleur a droit aux prestations prévues à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
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Robert Deraiche |
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Me Gilles Rancourt |
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NORTON ROSE FULLBRIGHT CANADA |
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Représentant de la partie requérante |
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M. Gordon Ringuette |
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SYNDICAT DES MÉTALLOS |
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Représentant de la partie intéressée |
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.