Murray Hall c. Procureure générale du Québec |
2019 QCCS 3664 |
(Chambre administrative) |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
QQUÉBEC |
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N° : |
200-17-028561-181 |
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DATE : |
Le 3 septembre 2019 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : |
L’HONORABLE |
MANON LAVOIE, j.c.s. |
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JANICK MURRAY HALL |
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Demandeur |
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PROCUREURE GÉNÉRALE DU QUÉBEC |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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TABLE DES MATIÈRES................................................................................................. 1
2........... LES QUESTIONS EN LITIGE
3........... LA POSITION DES PARTIES
4.1. La doctrine du caractère véritable et la doctrine des pouvoirs accessoires
4.2. La doctrine de l’exclusivité des compétences et la doctrine de la prépondérance fédérale
5.1. Est-ce que les articles 5 et 10 de la Loi provinciale ont validement été adoptés ?
5.1.1. Quel est le caractère véritable des dispositions contestées?
5.1.2. L’objet des dispositions
5.1.3. Les effets des dispositions
5.2.1. La compétence fédérale en matière criminelle.
5.2.2. La compétence provinciale en matière de santé et de sécurité de la population
5.3. Est-ce que les dispositions contestées sont suffisamment intégrées à la Loi provinciale ?
5.3.1. La validité de la Loi provinciale
5.3.2. La gravité de l’empiètement sur le champ de compétence fédérale en matière criminelle
6........... Subsidiairement, est-ce que les articles 5 et 10 de la Loi provinciale sont inopérants?
7........... La suspension de la déclaration d’inconstitutionnalité
[1] Le demandeur intente la présente action en son nom et celui de toutes les personnes qui, au Québec, sont ou peuvent être poursuivies du fait d’être en possession d’une plante de cannabis et subir ainsi les conséquences pénales découlant de la Loi encadrant le cannabis[1]. Dans le présent litige, le demandeur conteste la validité constitutionnelle des articles 5 et 10 de cette loi, qui prévoient les interdictions totales de possession de plantes et de culture de cannabis pour des fins personnelles, et demande de les déclarer ultra vires de la législature provinciale. Subsidiairement, il demande de déclarer inopérantes ces dispositions par l’application de la doctrine de la prépondérance fédérale.
[2] Le cannabis fait parler de lui et pour cause. Sa consommation fut interdite au Canada pendant près de 96 ans[2]. Ce n’est que depuis le 17 octobre 2018 qu’elle est maintenant permise par l’adoption du Projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois (« Loi fédérale »). Cette légalisation du cannabis marque un tournant important dans l’approche canadienne relative à cette substance et suscite de nombreuses craintes et réactions dans la société, et ce, dans différentes sphères.
[3] Au fil du temps, le Parlement fédéral a adopté une série de lois sur les stupéfiants, dont la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (« LRDS »)[3], loi actuellement en vigueur.
[4] La LRDS est une loi qui réglemente les substances pouvant altérer les processus cognitifs et causer des dommages à la santé ou à la société[4]. Dans son objectif de lutte contre les stupéfiants, la LRDS interdit diverses activités[5], et ce, en énonçant quatre types d'infractions : la possession de substances (article 4), le trafic de substances (article 5), l'importation et exportation de substances (article 6) ainsi que la production de substances (article 7). Le cannabis figurait à l’Annexe II de la LRDS et conséquemment, son usage était illégal au Canada.
[5] Le 21 juin 2018, le gouvernement fédéral édicte la Loi fédérale afin de permettre un accès légal au cannabis, de contrôler et de réglementer sa production, sa distribution et sa vente[6]. Entre autres, cette loi permet dorénavant de cultiver jusqu’à quatre plantes de cannabis à domicile :
« Possession
8 (1) Sauf autorisation prévue sous le régime de la présente loi :
[…]
e) il est interdit à tout individu d’avoir en sa possession plus de quatre plantes de cannabis qui sont ni en train de bourgeonner ni en train de fleurir;
[…]
Production
12 (4) Sauf autorisation prévue sous le régime de la présente loi, il est interdit à tout individu âgé de dix-huit ans ou plus de se livrer aux activités suivantes :
[…]
b) cultiver, multiplier ou récolter plus de quatre plantes de cannabis au même moment dans sa maison d’habitation, ou offrir de le faire. »
[6] En décriminalisant certains actes liés au cannabis, dont la possession et la culture de cannabis à des fins personnelles de quatre plants et moins, le Parlement fédéral a dû modifier la LRDS.
[7] Le 12 juin 2018, la législature québécoise adopte pour sa part le Projet de loi 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière. Comme son nom l’indique, ce projet de loi constitue la Société québécoise du cannabis (« SQDC »), une compagnie à fonds social, filiale de la Société des alcools du Québec, et édicte la Loi encadrant le cannabis (« Loi provinciale »).
[8] La Loi provinciale prévoit différentes mesures concernant la possession, la culture, l’usage, le transport, l’entreposage et la vente de cannabis sur le territoire du Québec. Plus spécifiquement, les articles 5 et 10 de la Loi provinciale interdisent complètement la possession de plantes de cannabis et la culture à des fins personnelles en ces termes :
« 5. Il est interdit d’avoir en sa possession une plante de cannabis.
[…]
10. Il est interdit de faire la culture de cannabis à des fins personnelles.
Cette interdiction de culture s’applique notamment à la plantation des graines et des plantes, la reproduction des plantes par boutures, la culture des plantes et la récolte de leur production. »[7]
[9] Aujourd’hui, le demandeur allègue qu’il fait face à une difficulté réelle d’application de la Loi provinciale puisque les articles 5 et 10 ont pour effet d’interdire ce que la Loi fédérale a autorisé, soit de posséder et de cultiver jusqu’à quatre plants de cannabis à domicile.
[10] Dans le cadre de sa demande introductive d’instance, le demandeur formule les questions constitutionnelles suivantes :
1- Les articles 5 et 10 de la Loi provinciale sont-ils un exercice valide de l’un des chefs de compétence des provinces selon la Loi constitutionnelle de 1867?
2- Les articles 5 et 10 de la Loi provinciale sont-ils inapplicables parce qu’ils représentent une entrave inacceptable au cœur de la compétence fédérale en matière de lois criminelles?
3- Les articles 5 et 10 de la Loi provinciale entrent-ils en conflit avec les sous-paragraphes 8(1) e) ou 12(4) b) de la Loi fédérale, et, partant, sont-ils inopérants en vertu du principe de la prépondérance des lois fédérales?
[11] Selon lui, les articles 5 et 10 de la Loi provinciale sont ultra vires des compétences des provinces, leur caractère véritable ne correspondant à aucun champ de compétence législative prévu à l’article 92 de la Loi constitutionnelle de 1867 (« L.C. 1867 »)[8].
[12] Il soumet que l’objet dominant des dispositions contestées est l’interdiction générale de la culture personnelle de cannabis pour des motifs de moralité publique et d’acceptabilité sociale, ce qui relève du pouvoir du Parlement fédéral en droit criminel[9].
[13] De plus, il ajoute qu’en prohibant un acte que le législateur fédéral voulait désormais permettre, le législateur provincial entrave de façon inacceptable la compétence exclusive du Parlement fédéral en matière criminelle[10]. Les articles 5 et 10 doivent également être déclarés inapplicables suivant la doctrine de l’exclusivité des compétences.
[14] À tout événement, il plaide que ces articles sont inopérants, car ils entrent en conflit avec les articles 8(1) e) et 12(4) b) de la Loi fédérale[11]. L’analyse de l’objet des dispositions fédérales démontrerait qu’elles ne visent pas simplement à interdire la culture à domicile de plus de quatre plantes de cannabis, mais bien de permettre aux Canadiens de cultiver du cannabis à des fins personnelles à l’intérieur des limites fixées. C’est à son avis ce que révèle l’historique législatif des articles 8 (1) e) et 12 (4) b) de cette loi et les interventions des élus gouvernementaux lors de l’adoption du Projet de loi C-45 édictant la Loi fédérale. Donc, les articles 5 et 10 de la Loi provinciale donnent lieu à un conflit d’intention, entraînant ainsi l’application de la doctrine de la prépondérance fédérale. Ils doivent alors être déclarés inopérants.
[15] La Procureure générale du Québec (« PGQ ») soutient que les dispositions en litige constituent un exercice valide de la compétence provinciale sur la propriété et les droits civils (par. 92 (13) L.C. 1867) et les matières de nature purement locale ou privée dans la province (par. 92 (16) L.C. 1867)[12].
[16] Selon elle, le caractère véritable des dispositions contestées est de protéger la santé et la sécurité de la population par le contrôle de la qualité et de l’accès au cannabis tout en évitant sa banalisation, particulièrement chez les jeunes[13]. Les interdictions posées par les articles 5 et 10 de la Loi provinciale ne sont alors que des moyens choisis par le législateur afin d’atteindre l’objectif principal de la loi, qui est aussi d’assurer la protection de la santé et la sécurité des Québécois[14].
[17] Ainsi, ces dispositions sont constitutionnellement valides, car intra vires des compétences provinciales. Selon la PGQ, l’encadrement de la portion de l’activité que le Parlement fédéral a décriminalisée relève des compétences provinciales.
[18] De plus, la PGQ plaide que le Tribunal ne devrait pas recourir à la doctrine de l’exclusivité des compétences pour trancher le présent litige, considérant que la compétence du Parlement fédéral en droit criminel est imprécise et se prête moins à l’application de cette doctrine[15].
[19] Finalement, la PGQ soutient que les dispositions contestées sont opérantes, car elles n’entrent aucunement en conflit avec les objectifs de la Loi fédérale, celle-ci n’ayant pas pour objet de conférer un droit positif aux Canadiens de cultiver du cannabis à des fins personnelles. Les articles 5 et 10 de la Loi provinciale contribueraient plutôt à la réalisation des objectifs de la Loi fédérale[16].
[20] Précisons d’entrée de jeu que le Tribunal n’est pas appelé à se prononcer sur l’opportunité ou l’efficacité des mesures législatives adoptées. En effet, comme le rappelle la Cour suprême dans le Renvoi relatif à la Loi anti-inflation :
« La réponse à cet argument est simple et c’est celle qu’ont toujours donnée les tribunaux, savoir que la sagesse, l’opportunité ou les chances de succès d’une politique exprimée dans une loi ne sont pas sujettes à examen judiciaire. »[17]
[21] Ainsi, bien que le Tribunal ait accepté en preuve le rapport d’un chimiste présenté par l’expert du demandeur[18], ce rapport n’est pas pertinent pour trancher le présent débat[19]. Il n’est alors ni nécessaire ni utile de passer en revue les conclusions de ce rapport appuyant la thèse du demandeur sur la non-dangerosité des plants de cannabis. La conclusion voulant qu’un certain nombre de plants ne soit pas potentiellement dangereux dans une maison d’habitation porte sur l’opportunité de légiférer. Une fois la prémisse de constitutionnalité des articles 5 et 10 de la Loi provinciale posée et démontrée, il n’est pas du ressort du Tribunal de décider du nombre de plantes qu’il aurait été préférable d’autoriser eu égard à leur potentiel de dangerosité dans une maison d’habitation.
[22] Dans sa demande introductive d’instance telle que formulée, le demandeur s’en prend précisément aux dispositions 5 et 10 de la Loi provinciale en vigueur. Sa conclusion principale est ainsi rédigée :
« DÉCLARER nuls, invalides et inopérants les articles 5 et 10 de la Loi sur l’encadrement du cannabis;
OU, SUBSIDIAIREMENT,
DÉCLARER inopérants les articles 5 et 10 de la Loi sur l’encadrement du cannabis; »[20]
[23] Comme il y a une présomption de constitutionnalité des lois, le fardeau de preuve de démontrer le caractère ultra vires, inopérant ou inapplicable des dispositions en litige appartient alors à celui qui soulève l’inconstitutionnalité, soit au demandeur.
[24] Enfin, comme les lois sont présumées constitutionnelles, elles doivent être interprétées, dans la mesure du possible, de manière à favoriser une application concurrente de celles-ci[21].
[25] La démarche de la validité constitutionnelle d’une législation est bien établie. Suivant l’analyse du caractère véritable, le tribunal doit tout d’abord déterminer la matière sur laquelle la législation porte essentiellement et, par la suite, rattacher cette matière à un ou plusieurs des champs de compétences prévus à la L.C. 1867. Si le caractère véritable de la législation contestée peut se rattacher à une matière relevant de la compétence de la législature qui l’a adopté, les tribunaux la déclareront intra vires. Dans le cas contraire, la constatation de cette atteinte au partage des pouvoirs entraînera l’invalidité de la loi[22].
[26] Toutefois, puisque le demandeur conteste uniquement la validité de certaines dispositions, il faut examiner avant tout leur validité avant de s’attarder à celle de la Loi provinciale dans son ensemble. Suivant la doctrine des pouvoirs accessoires, une disposition invalide, de par son caractère véritable, ne sera sauvegardée que si elle est suffisamment intégrée à une loi valide. Cela repose sur le fait qu’un certain chevauchement est inévitable dans notre système de droit constitutionnel et, conséquemment, notre droit reconnaît à chaque ordre de gouvernement un « droit d’empiéter »[23].
[27] La Cour suprême, dans General Motors of Canada Ltd[24], présente la démarche à suivre dans les circonstances. Dans un premier temps, il faut déterminer si les dispositions contestées empiètent sur une compétence fédérale. Cela exige de procéder à l’analyse du caractère véritable des articles 5 et 10 de la Loi provinciale et si celui-ci relève du Parlement fédéral, il faudra conclure à un empiètement. La seconde étape est l’examen de la validité de la loi dans laquelle les dispositions s’insèrent. Enfin, la dernière étape consiste à évaluer le rapport entre les dispositions et la loi valide. La question à répondre est alors de déterminer si les articles 5 et 10 sont suffisamment intégrés à la Loi provinciale.
[28] Pour ce faire, il faudra évaluer l’étendue du débordement afin d’établir le critère adéquat à appliquer. En effet, un critère distinct est retenu selon la sévérité de l’empiètement causé par les articles 5 et 10 de la Loi québécoise sur la compétence fédérale. Pour un empiètement grave, on appliquera le critère de nécessité, alors que pour un empiètement léger, on appliquera le critère du lien rationnel et fonctionnel[25]. Si les dispositions contestées ne satisfont pas au degré d’intégration requis, elles devront être déclarées invalides.
[29] La doctrine de l’exclusivité des compétences fait référence au « contenu essentiel » des sujets énumérés aux articles 91 et 92 L.C. 1867. Ce « contenu essentiel » correspond au contenu minimum élémentaire irréductible de la compétence législative visée qui échappe à l’application de la législation édictée par l’autre ordre de gouvernement, et ce, afin de garantir la réalisation efficace de l’objectif pour lequel la compétence a été attribuée[26]. Cette doctrine doit être appliquée par les tribunaux avec retenue et être limitée aux situations déjà traitées dans la jurisprudence, entre autres, car il est difficile de définir le « contenu essentiel » d’une compétence législative[27].
[30] Le Tribunal n’élaborera pas davantage sur cette doctrine, considérant que le demandeur a précisé lors de l’audience ne pas vouloir s’y attarder. De plus, les tribunaux se sont montrés réticents à appliquer cette doctrine, qui se prête d’ailleurs moins devant une compétence législative aussi imprécise que le droit criminel[28].
[31] Ainsi, il est préférable de décider de la présente affaire en appliquant principalement les doctrines du caractère véritable, des pouvoirs accessoires et, au besoin, de la prépondérance fédérale[29].
[32] La doctrine de la prépondérance fédérale sera employée si le Tribunal en vient à la conclusion que les articles 5 et 10 de la Loi provinciale, bien que valides, entrent en conflit avec la Loi fédérale. Les dispositions de la Loi provinciale seront alors déclarées inopérantes dans la mesure de l’incompatibilité, la législation fédérale devant primer sur la législation provinciale[30].
[33] Une fois établi le cadre d’analyse applicable au contrôle de la constitutionnalité des dispositions législatives en cause du point de vue du partage des compétences, il ne reste qu’à en faire l’analyse.
[34] Cette première étape, appelée l’étape de la qualification, consiste à identifier l’objectif dominant des dispositions contestées par l’examen de leur objet et de leurs effets[31].
[35] Afin de déterminer l’objet des dispositions contestées, le Tribunal peut recourir à la preuve intrinsèque et la preuve extrinsèque[32].
[36] La preuve intrinsèque comprend, notamment, le texte des articles contestés, les dispositions énonçant les objectifs de la loi et sa structure générale[33]. Dans la preuve extrinsèque, les débats parlementaires et l’historique législatif peuvent être considérés[34].
[37] D’emblée, il convient de reproduire l’article 1 de la Loi provinciale, qui expose les objectifs suivants :
« 1. La présente loi a pour objet de prévenir et de réduire les méfaits du cannabis afin de protéger la santé et la sécurité de la population, particulièrement celles des jeunes. Elle a aussi pour objet d’assurer la préservation de l’intégrité du marché du cannabis.
À ces fins, elle encadre notamment la possession, la culture, l’usage, la vente et la promotion du cannabis.
La présente loi lie l’État. »
[Le Tribunal souligne]
[38] La PGQ soutient que le libellé de la Loi provinciale démontre que l’objet de celle-ci est avant tout la protection de la santé et de la sécurité de la population. Selon elle, toutes les dispositions de cette loi visent à atteindre ces objectifs.
[39] Certes, plusieurs dispositions de la Loi provinciale vont dans ce sens. Par exemple, la Loi provinciale prévoit la vente exclusive de cannabis par la SQDC (art. 25), ce canal exclusif permettant ainsi d’informer le consommateur sur les risques que présente le cannabis pour la santé (art. 31 al. 2, 41, et 57 al. 2), de contrôler la localisation des points de vente (art. 27 et 33) et de fournir un produit dont la qualité est contrôlée (art. 29 et 44). La Loi provinciale prévoit aussi le contrôle des endroits propres à l’usage du cannabis afin de protéger le public contre la fumée secondaire et, par le fait même, de lutter contre la banalisation du geste de fumer (art. 11 à 21).
[40] De plus, une lecture de l’ensemble des débats parlementaires portant sur la Loi provinciale témoigne de la concordance des préoccupations des membres de l’Assemblée nationale avec les objectifs exprimés dans le texte de la Loi provinciale[35].
[41] Concernant plus particulièrement les discussions ayant mené à l’adoption des articles 5 et 10, il appert que leur objet est d’interdire la possession d’une plante de cannabis et la culture de cannabis à des fins personnelles afin d’éviter la banalisation de sa consommation, de contrôler son accessibilité et sa qualité ainsi que de le légaliser progressivement. Ces dispositions ont également pour objet de prévenir et de réduire les méfaits du cannabis. Ultimement, ces articles visent effectivement à minimiser les risques pour la santé et la sécurité des Québécois liés à la consommation du cannabis[36].
[42] Les articles 5 et 10 sont étroitement liés. L’article 5, qui interdit la possession d’une plante de cannabis, a été adopté pour compléter l’article 10. Considérant que la culture personnelle de cannabis sera interdite, nul ne devrait alors avoir à sa disposition une plante de cannabis[37].
[43] Le Tribunal tient à souligner qu’il a été question du fait que les articles 5 et 10 de la Loi provinciale tentent de contrer les effets de la nouvelle législation fédérale légalisant la consommation de cannabis. Le 6 juin 2018, en vue des dernières étapes menant à l’adoption de la version finale du projet de loi 157, madame Lucie Charlebois conclut :
« Ce projet de loi positionne et prépare le Québec à l'entrée en vigueur prochaine de la légalisation du cannabis, imposée, il faut se le dire, là, Mme la Présidente, unilatéralement par le gouvernement fédéral. Je veux que les citoyens comprennent bien, là, que ce n'est pas le gouvernement du Québec puis ce n'est pas les députés de l'opposition puis ce n'est pas personne ici, à Québec, qui ont demandé ça. Ça s'est ramassé dans notre agenda suite à une décision du gouvernement fédéral. Alors, on s'est activés avec des échéanciers extrêmement courts et un degré d'incertitude élevé quant aux intentions fédérales. Dire que c'était un réel défi, c'est peu dire, Mme la Présidente. Le but ultime, le même pour nous depuis le départ, était d'offrir le meilleur encadrement possible à cette substance sur notre territoire, compte tenu des enjeux qu'elle comporte. Et, je tiens à le répéter, Mme la Présidente, le cannabis n'est pas une substance banale et inoffensive. Je dis aux jeunes : Ce n'est pas génial de fumer du cannabis.
Notre action se doit d'être réfléchie et ferme. Nous avons la volonté d'offrir le meilleur à la population québécoise, et c'est le fruit d'un travail sérieux et rigoureux qui me permet d'être devant vous aujourd'hui et devant le Québec avec cette version finale du projet de loi n° 157. Les mesures proposées ont pour objectif de prévenir et réduire les méfaits du cannabis afin de protéger — c'est toujours ça qu'on a eu comme objectif en tête, tout le monde autour de la commission — protéger la santé et la sécurité de la population, particulièrement les jeunes. Elles visent aussi à préserver l'intégrité du marché légal du cannabis. Elles servent à lutter contre la banalisation de la substance, notamment chez les adolescents et les jeunes adultes de même que chez les personnes les plus vulnérables de notre société.
Cette substance, je le répète à nouveau, comporte d'importants risques pour la santé et la sécurité du public, et nous nous devons de mettre en place un encadrement rigoureux à cet égard, nous l'affirmons depuis le début, et c'est notre priorité, c'est la priorité de l'ensemble des parlementaires, Mme la Présidente. Il y a eu peu de place à l'erreur, parce qu'il en va de la santé des Québécois, particulièrement celle de nos jeunes et des générations futures. En ce sens, énormément de gens, dont les experts, nous ont recommandé un encadrement strict dès le départ, qui pourrait évoluer dans le futur en fonction de la situation. »[38]
[Le Tribunal souligne]
[44] De fait, les articles 5 et 10 ne viennent pas restreindre ce qui a été autorisé par le Parlement fédéral, soit de posséder et de cultiver jusqu’à 4 plantes de cannabis, mais posent une interdiction totale.
[45] Cela laisserait donc entendre que la province cherchait en réalité à pallier l’abrogation des anciennes dispositions rendant la culture personnelle et la possession de plante de cannabis criminelles.
[46] De plus, il se dégage des débats parlementaires une désapprobation générale relativement à la pratique que constitue la consommation de cannabis. Le Tribunal est donc d’avis que les dispositions en cause ont été adoptées afin de réprimer la production personnelle de cannabis, et ce, afin de restreindre l’accessibilité à ce produit et de renforcer son contrôle. Au final, on veut éviter une hausse de sa consommation, particulièrement chez les jeunes.
[47] Enfin, à plusieurs occasions, la possibilité d’une contestation constitutionnelle avait été envisagée[39], révélant ainsi un certain doute quant à la validité constitutionnelle entourant les articles 5 et 10 de la Loi provinciale.
[48] Aux fins de l’analyse du caractère véritable, tant les effets de nature juridique que pratique doivent être considérés afin de confirmer l’objectif législatif identifié[40].
[49] Selon le Tribunal, l’application des articles 5 et 10 a pour conséquence pratique d’une part, d’empêcher les citoyens de posséder et de cultiver des plantes de cannabis à des fins personnelles et d’autre part, d’obliger les consommateurs à s’approvisionner en cannabis auprès de la SQDC.
[50] Quant aux conséquences juridiques, les dispositions provinciales ont pour effet, tout d’abord, de prohiber la possession d’une plante de cannabis et la culture personnelle de cannabis ainsi que d’imposer des sanctions pénales en cas de contravention. Elles entraînent aussi des conséquences de nature pénale à des actes qui étaient autrefois criminalisés par une loi fédérale, soit la LRDS. Enfin, elles bloquent complètement la fenêtre que permettait dorénavant le Parlement fédéral en matière de possession de quatre plantes de cannabis et de leur culture dans les maisons d’habitation[41].
[51] En somme, l’analyse de l’objet et des effets des dispositions amène le Tribunal à conclure que le caractère véritable des articles 5 et 10 de la Loi provinciale est d’établir une interdiction complète de la culture personnelle de cannabis, car elle est de nature à nuire à la santé et la sécurité publique.
[52] La deuxième étape de l’analyse du caractère véritable, appelée celle de la classification, consiste à déterminer si les dispositions relèvent du chef de compétence qui est invoquée pour en soutenir la validité[42].
[53] Lorsqu’on qualifie le champ de compétence dans lequel les dispositions contestées se situent, il faut s’en tenir au domaine qu’elles visent essentiellement, soit l’objectif dominant[43]. En effet, de simples effets accessoires ne rendent pas inconstitutionnelle une loi par ailleurs intra vires. La doctrine du caractère véritable repose sur la reconnaissance de l’impossibilité pratique qu’une législature puisse exercer efficacement sa compétence sur un sujet sans que son intervention touche incidemment à des matières relevant de la compétence de l’autre ordre de gouvernement[44].
[54] Pour les motifs qui suivent, le Tribunal est d’avis que les dispositions contestées relèvent du pouvoir fédéral de légiférer en droit criminel, considérant que l’objet et l’effet principal du régime provincial sur la possession et la culture de plante de cannabis constituent une interdiction absolue d’une pratique qui est de nature à saper des valeurs morales et à créer des maux pour la santé et la sécurité publique. Par conséquent, le législateur provincial a cherché à réprimer une activité dorénavant licite et ultimement, à renforcer le droit criminel.
[55] Le paragraphe 91 (27) L.C. 1867 confère une compétence exclusive au Parlement fédéral en matière de droit criminel substantiel de même que sur la procédure criminelle. Le paragraphe 92 (15) L.C. 1867, quant à lui, confère une compétence exclusive aux législatures provinciales d’infliger des punitions par voie d’amendes, de peines ou d’emprisonnement en vue de faire respecter une loi provinciale valide[45].
[56] La compétence pénale provinciale prévue au paragraphe 92 (15) L.C. 1867 énonce les types de peines dans le but de faire respecter une législation qui tire sa validité constitutionnelle d’un autre champ de compétence provinciale[46].
[57] Ceci dit, les provinces ne peuvent toutefois pas s’ingérer dans les sphères criminelles en essayant de renforcer, de compléter ou de remplacer le droit criminel ou de remédier à ce qu’elles considèrent comme des défauts ou des failles[47].
[58] Dans l’arrêt R. c. Malmo-Levine, la Cour suprême indique que pour qu’une loi puisse être considérée comme relevant du droit criminel, elle doit comporter les trois éléments suivants : un objet valide de droit criminel assorti d’une interdiction et d’une sanction[48].
[59] Conformément à l’Affaire de la margarine, le droit criminel vise notamment à préserver la paix, l’ordre, la sécurité, la santé et la moralité publique[49], et ce, en réprimant un mal ou une conduite jugée nuisible, indésirable ou préjudiciable[50].
[60] L’arrêt Morgentaler, quant à lui, souligne que « [l’interdiction] d’un acte dans l’intérêt moral public était et reste l’une des fins classiques du droit criminel »[51]. Ainsi, malgré les pouvoirs provinciaux étendus en matière d’établissement de santé, il a été jugé que la loi provinciale qui interdit les avortements sauf en milieu hospitalier constituait une loi de nature criminelle. Cette dernière visait en fait à supprimer ce qui était perçu comme un mal social, soit les cliniques d’avortement.
[61] Par analogie, comment peut-on alors prétendre que les dispositions contestées interdisant la culture de cannabis, sauf dans des endroits autorisés par la SQDC, ne sont pas de nature criminelle? Pour le Tribunal, il est clair que les articles 5 et 10 de la Loi provinciale tentent de s’attaquer à un mal touchant la santé et la sécurité publique, soit aux effets potentiellement nocifs pour la santé de la consommation de cannabis. Il s’agit de son objectif dominant.
[62] D’ailleurs, les trois caractéristiques d’une loi criminelle sont ici présentes. En l’occurrence, les objectifs d’éviter les méfaits et la banalisation de la consommation du cannabis, de prévention et celui de la légalisation progressive s’apparentent aux objectifs légitimes de droit criminel. Les articles 5 et 10 de la Loi provinciale sont explicitement des interdictions totales à la possession de plante de cannabis et à la culture de cannabis à des fins personnelles. Enfin, les dispositions en cause imposent une sanction en cas d’infraction, soit une amende de 250 à 500 $.
[63] Dans la présente affaire, il s’avère utile de comparer les dispositions contestées avec les interdictions d’autrefois, car « [on] peut inférer de la similitude avec les termes du Code criminel que la province a empiété sur le domaine de droit criminel; plus la reproduction est exacte, plus on doit en conclure que c’est là l’objet principal de la loi »[52].
[64] Considérant que le cannabis figurait à l’Annexe II de la LRDS[53], l’ancienne disposition de cette loi qui interdisait toute culture de cannabis non thérapeutique se lit comme suit :
« Production de substance
7 (1) Sauf dans les cas autorisés aux termes des règlements, la production de toute substance inscrite aux annexes I, II, III, IV ou V est interdite. »[54]
[Le Tribunal souligne]
[65] La production est définie dans la LRDS comme incluant la culture d’une substance visée à l’Annexe II[55].
[66] Quant à la possession, elle était prohibée selon les termes suivants :
« Possession de substances
4 (1) Sauf dans les cas autorisés aux termes des règlements, la possession de toute substance inscrite aux annexes I, II ou III est interdite. »[56]
[Le Tribunal souligne]
[67] Les nouvelles dispositions de la Loi fédérale visant à décriminaliser, à l’intérieur des limites fixées, la culture de cannabis à des fins personnelles dans une maison d’habitation ainsi que sa possession se lit comme suit :
« Possession
8 (1) Sauf autorisation prévue sous le régime de la présente loi :
[…]
e) il est interdit à tout individu d’avoir en sa possession plus de quatre plantes de cannabis qui sont ni en train de bourgeonner ni en train de fleurir;
[…]
Production
12 (4) Sauf autorisation prévue sous le régime de la présente loi, il est interdit à tout individu âgé de dix-huit ans ou plus de se livrer aux activités suivantes :
[…]
b) cultiver, multiplier ou récolter plus de quatre plantes de cannabis au même moment dans sa maison d’habitation, ou offrir de le faire. » [57]
[Le Tribunal souligne]
[68] Aujourd’hui, les dispositions contestées reprennent essentiellement les mêmes libellés :
« 5. Il est interdit d’avoir en sa possession une plante de cannabis.
Quiconque contrevient aux dispositions du premier alinéa commet une infraction et est passible d’une amende de 250 $ à 750 $. En cas de récidive, ces montants sont portés au double.
[…]
10. Il est interdit de faire la culture de cannabis à des fins personnelles.
Cette interdiction de culture s’applique notamment à la plantation des graines et des plantes, la reproduction des plantes par boutures, la culture des plantes et la récolte de leur production. »[58]
[Le Tribunal souligne]
[69] La simple comparaison de ces dispositions démontre à quel point les dispositions contestées sont similaires aux dispositions fédérales et conséquemment, prouve que l’effet des dispositions provinciales est un retour en arrière, comme si la nouvelle Loi fédérale visant l’accessibilité et la légalisation du cannabis n’avait jamais existé.
[70] Il faut considérer la LRDS comme un exercice du pouvoir fédéral en matière de droit criminel[59]. La décriminalisation de certains actes liés au cannabis doit également être considérée comme relevant de la compétence fédérale en droit criminel. De ce fait, la section de la Loi fédérale comprenant les articles 8 et 12 s’intitule « Activités criminelles ». À ce sujet, Jean-Marc Fournier, ministre sortant responsable des Relations canadiennes et de la Francophonie canadienne et leader parlementaire du gouvernement du Québec indique que la décriminalisation de la culture à domicile relève de la compétence fédérale en matière criminelle en ces termes :
« La décriminalisation de la production du cannabis à domicile, lorsque le nombre de plants est inférieur ou égal à quatre, est une conséquence de l’exercice par le Parlement fédéral de sa compétence législative en matière de droit criminel, prescrivant dorénavant que constitue un crime la production de cinq plans ou plus à domicile. »[60]
[71] La PGQ indique qu’il faut éviter de confondre l’objet véritable de la loi avec les moyens choisis pour le réaliser. Selon elle, l’objet des dispositions en cause n’est pas l’interdiction de la culture personnelle de cannabis parce qu’elle est moralement réprouvable, mais bien parce qu’elle est nécessaire à l’encadrement de la consommation du cannabis prévue par la Loi provinciale, et ce, afin de protéger la santé et la sécurité de la population. Ainsi, les interdictions mises en place par les articles 5 et 10 de la Loi provinciale constituent un moyen permettant au gouvernement du Québec d’atteindre les objectifs poursuivis par la loi, basant cet argument sur les arrêts Global Securities et Ward[61].
[72] Le Tribunal ne partage pas cette opinion. Il y a d’ailleurs lieu de distinguer ces arrêts de la présente affaire.
[73] Dans l’arrêt Global Securities[62], il était question de la validité constitutionnelle d’une disposition de la Securities Act, qui permettait à la Commission des valeurs mobilières de la Colombie-Britannique de remettre des éléments de preuve à un organisme de réglementation étranger. Selon l’intimée, cette disposition avait alors nécessairement pour objectif d’aider à appliquer des lois étrangères, ce qui relève de la compétence du Parlement fédéral. La Cour suprême était en désaccord avec cet argument, qui confond l’objet de la disposition avec les moyens choisis pour atteindre cet objectif. La preuve présentée soutenait plutôt que l’article en cause avait pour objet d’appliquer la loi provinciale sur les valeurs mobilières. La disposition en cause était donc intra vires des pouvoirs de la province en vertu du paragraphe 92(13) L.C. 1867.
[74] Dans l’arrêt Ward[63], rendu quelques années plus tard, il s’agissait de la contestation constitutionnelle d’une disposition d’un règlement fédéral interdisant la vente, l'échange ou le troc des jeunes phoques du Groenland et des jeunes phoques à capuchon. Dans ses motifs, la Cour suprême rejeta l’argument de l’appelant selon lequel une interdiction de vente porte nécessairement, de par son caractère véritable, sur la compétence provinciale de la réglementation de la vente. Encore une fois, cela revient à confondre l’objet de cette disposition, soit de réglementer la pêche au phoque en éliminant la chasse commerciale au blanchon et au jeune à dos bleu, avec les moyens choisis pour réaliser cet objet. Il n’y avait pas non plus de preuve que le Parlement fédéral tentait en réalité de réglementer le marché local du commerce du phoque et des produits du phoque.
[75] En l’espèce, ce n’est pas uniquement l’interdiction de possession et de culture de plantes de cannabis qui amène le Tribunal à conclure que les articles visés se rattachent à la compétence fédérale en droit criminel. Dans le présent cas, la preuve intrinsèque et extrinsèque ainsi que l’examen des effets des dispositions contestées permettent de soutenir que le caractère dominant des articles 5 et 10 relève du paragraphe 91(27) L.C.1867.
[76] Par conséquent, les interdictions posées par les articles 5 et 10 ne sont pas des moyens, mais bien l’objet même de ces dispositions.
[77] Pour légiférer en matière de possession de plantes et de culture de cannabis à des fins personnelles, la PGQ soulève la compétence provinciale en matière de santé et de sécurité de la population. Selon elle, l’encadrement du cannabis comporte un double aspect permettant à la fois au Parlement fédéral et aux législatures provinciales de légiférer sur le même sujet et de mettre en place des régimes complémentaires. Ainsi, elle soutient que l’encadrement de la portion de l’activité que le Parlement fédéral a décriminalisée relève des compétences provinciales[64].
[78] Quant au demandeur, celui-ci soulève que la réglementation des drogues, des médicaments et des produits dangereux a de tout temps relevé du domaine du droit criminel. À cet effet, il cite plusieurs jurisprudences[65].
[79] D’emblée, le point de vue selon lequel la compétence générale en matière de santé appartient aux provinces s'impose et n'est pas sérieusement contesté. Le domaine de la santé n’a pas fait l’objet d’une attribution spécifique dans la L.C. de 1867. S’agissant d’une compétence partagée, ce sont toutefois les provinces qui, en première ligne, interviennent dans le domaine de la santé[66].
[80] Cependant, bien que la compétence provinciale en matière de santé et sécurité de la population soit vaste, elle n’est pas illimitée. Le provincial doit respecter la compétence fédérale en matière de droit criminel[67].
[81] Ici, le Parlement fédéral a décidé d’opter pour la réglementation du cannabis plutôt que la prohibition, étant manifestement plus efficace pour restreindre la consommation de ces produits par les mineurs. La législation fédérale permet cependant aux provinces d’adopter le même genre de réglementation afin, entre autres, de restreindre la consommation de cannabis par les mineurs[68]. Les provinces peuvent alors adopter des mesures législatives et réglementaires qui couvrent les aspects provinciaux de la décriminalisation. Toutefois, cela ne saurait inclure une prohibition générale.
[82] Pour justifier un tel empiètement sur les compétences fédérales, la PGQ allègue la théorie du double aspect en indiquant que la compétence provinciale sur la santé publique, en ce qui concerne l’aspect sanitaire de la réglementation des drogues et des autres substances psychoactives, a été maintes fois reconnue par les tribunaux. Elle base une grande partie de cet argument sur les arrêts Schneider et Rio Hotel Ltd[69].
[83] En principe, la doctrine du double aspect s’applique lorsqu’une loi traite d’un sujet ayant un aspect provincial et fédéral[70], et lorsqu’il n’y a pas de contraste marqué entre l’importance relative des caractéristiques fédérales et des caractéristiques provinciales d’un sujet particulier[71].
[84] Le sujet des drogues en général a effectivement un volet provincial et un volet fédéral. Toutefois, la théorie du double aspect ne peut recevoir application dans la présente affaire puisque le caractère véritable des articles 5 et 10 se rattache uniquement à la compétence fédérale en matière criminelle. Le sujet dominant de ces dispositions, soit l’interdiction complète de la culture personnelle de cannabis et la possession de plante afin de préserver la santé de la population, ne comporte pas à la fois une facette provinciale comme cela était le cas dans les arrêts Schneider et Rio Hotel Ltd.
[85] Dans l’arrêt Schneider, le caractère véritable de l’Heroin Treatment Act est le traitement médical des héroïnomanes et relève de la compétence générale de la province en matière de santé, traitant les personnes déclarées dépendantes à l’égard des stupéfiants comme des personnes malades et non comme des criminels. Cet arrêt est venu énoncer le pouvoir des provinces de légiférer concernant les conséquences de l’usage de stupéfiants[72]. Or, les articles 5 et 10 de la Loi provinciale ne s’inscrivent pas dans cette situation.
[86] Dans l’arrêt Rio Hotel Ltd, la Cour suprême a reconnu la validité d’une loi du Nouveau-Brunswick autorisant la province à interdire les spectacles de nudité dans le cadre d’un régime de licence d’alcool. S’appuyant sur les propos du juge Estey, la PGQ soutient, à l’instar de l’alcool, que les provinces ont compétence relativement à la production, la distribution et la consommation de cannabis[73]. Certes, mais en choisissant d’interdire de façon absolue la possession de plantes de cannabis et sa culture à des fins personnelles, la province a perdu sa compétence.
[87] Il est évident qu’au-delà de zéro plant, il aurait été envisageable que la province puisse légiférer, soit au niveau de la santé ou de la sécurité, mais considérant les interdictions absolues qui ne visent aucun endroit en particulier ni même une catégorie de personnes, et les motifs justifiant ces interdictions, il est impossible de motiver les dispositions contestées aux dépens de la santé et la sécurité de la population.
[88] De plus, de la manière dont la PGQ plaide sa compétence en matière de santé, celle-ci serait d’une portée tellement vaste qu’elle permettrait d’adopter tous les genres de mesures souhaitées, en invoquant simplement que cela est fait au nom de la santé. D’ailleurs, lors des audiences, devant le questionnement du Tribunal, la PGQ a affirmé que la province aurait pu, si elle le désirait, interdire la possession de cannabis. Il s’agit essentiellement d’un choix politique. Compte tenu de l’importance de cet échange, le Tribunal reprend le verbatim de cet extrait :
« Le Tribunal : Parce que vous auriez… Pourquoi vous avez pas interdit à ce moment-là, là? On sait que le cannabis est dangereux, pourquoi qu’on n’a pas interdit la possession de cannabis tout simplement? Avec les objectifs de santé et de sécurité louables que vous m’exposez.
Me Patricia Blair : St’un choix politique tout comme le Québec. Ce qu’on vous soumet c’est que chacun fait ses choix politiques, en autant qu’ils sont valides constitutionnellement dans le champ de compétence. Pourquoi quatre? L’explication tentée par mon confrère, je n’en ai pas de meilleure. C’est que… Vous avez vu nous là dans les débats tantôt qu’est-ce qu’on a dit, nous on veut se protéger fak nous on décide que c’est zéro, c’est juste ça, rien de plus compliqué. »[74]
[Le Tribunal souligne]
[89] En conclusion, une telle affirmation renforce la position du Tribunal sur l’importance de bien partager la compétence de chacun des gouvernements. Il s’agit d’un cas flagrant où la Loi provinciale interdit ce que la Loi fédérale permet.
[90] Par conséquent, l’interdiction absolue de possession et de culture de plante de cannabis à des fins personnelles pour la santé et la sécurité publique, de par son caractère véritable, est une législation de la nature d’une loi criminelle. Ces dispositions contestées de la Loi provinciale sont donc ultra vires. Compte tenu de cette conclusion, ces dispositions empiètent sur la compétence fédérale en matière criminelle. Conséquemment, elles seront sauvegardées suivant la doctrine des pouvoirs accessoires à condition qu’elles soient suffisamment intégrées à la Loi provinciale.
[91] La validité de la Loi provinciale dans son ensemble n’est pas ici contestée, le débat entre les parties n’ayant porté que sur les articles 5 et 10 de cette loi. Suivant la présomption de constitutionnalité des lois, la Loi provinciale est présumée constituer un exercice valide des pouvoirs de la législature provinciale[75]. Le Tribunal est également d’avis que la Loi provinciale, qui encadre notamment l’usage, la vente et la promotion du cannabis, constitue une loi constitutionnellement valide. En effet, la province peut établir un tel régime de réglementation en vertu de ses champs de compétences prévus aux paragraphes 92(13) et 92(16) L.C. 1867.
[92] Afin de déterminer le degré d’intégration requis permettant de reconnaître la validité des articles 5 et 10 de la Loi provinciale, il faut établir la sévérité de l’empiètement causée par ces dispositions.
[93] À ce sujet, la Cour suprême a énoncé une série de facteurs à considérer dans l’évaluation du débordement, lesquels peuvent se résumer ainsi :
« (1) [L]a portée des chefs de compétence en jeu (un empiètement sur un titre de compétence large étant moins grave); (2) la nature de la disposition contestée (sa nature réparatrice, notamment, rendant l’empiètement moins grave); et (3) l’intervention antérieure de l’ordre de gouvernement à l’origine de la disposition qui empiète (laquelle rendant aussi l’empiétement moins grave). » [76]
[94] Cette liste de facteurs n’est pas exhaustive et la gravité de l’empiètement dépendra au final des faits en cause[77].
[95] En l’espèce, le Tribunal considère que les articles 5 et 10 de la Loi provinciale empiètent de façon importante sur la compétence fédérale en matière criminelle. Conséquemment, ces dispositions doivent avoir un rapport de nécessité avec la Loi provinciale.
[96] Il est vrai que la portée des chefs de compétence en jeu devrait amener le Tribunal à conclure à un empiétement moins grave, considérant que la compétence fédérale en droit criminel[78] ainsi que la compétence provinciale sur la propriété et les droits civils (par. 92(13) L.C. 1867) et les matières de nature purement locale ou privée (par. 92(16) L.C. 1867)[79] sont vastes.
[97] Toutefois, ce qui est déterminant dans la présente affaire est la nature des articles 5 et 10 de la Loi provinciale. Selon l’ancienne juge en chef McLachlin dans le Renvoi relatif à la Loi sur la procréation assistée, « [l]a nature de la disposition contestée s’entend également de l’intention de remplacer une disposition adoptée par l’autre ordre de gouvernement ou de seulement la compléter. L’empiétement est moins grave lorsque la disposition contestée est sensée cohabiter avec la disposition adoptée par l’autre ordre de gouvernement »[80]. Ici, les articles 5 et 10 de la Loi provinciale tentent de remplacer les articles 8 et 12 de la Loi fédérale plutôt que de les compléter.
[98] L’examen du caractère véritable des articles 5 et 10 de la Loi provinciale a mis en lumière l’ampleur du débordement sur la compétence du Parlement fédéral en vertu du paragraphe 91 (27) L.C. 1867. L’examen de l’objet de ces dispositions révèle que les dispositions constituent une « législation déguisée ». Quant à l’examen de ses effets, celui-ci montre que les articles 5 et 10 entravent l’objectif des articles 8 (1) e) et 12 (4) b) de la Loi fédérale, lesquels ont été adoptés par le Parlement fédéral en vertu de son pouvoir en droit criminel. On ne peut donc conclure qu’il est question d’un empiètement minime.
[99] Il serait possible de prétendre que les articles 5 et 10 ont un lien rationnel et fonctionnel avec les objectifs poursuivis par la Loi provinciale. Cependant, les interdictions générales établies par ces dispositions ne sont pas absolument nécessaires. En effet, imposer une restriction plus sévère que la Loi fédérale relativement à la possession et la culture personnelle de plantes de cannabis, au lieu de prohiber, auraient permis d’atteindre les objectifs de protection de la santé et de la sécurité publique sans empiéter illégalement sur le pouvoir fédéral.
[100] Par conséquent, puisque les articles 5 et 10 ne satisfont pas au degré d’intégration requise, ils doivent être déclarés ultra vires des compétences provinciales.
[101] Compte tenu de la conclusion du Tribunal quant à l’invalidité des articles 5 et 10 de la Loi provinciale, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur l’argument du demandeur portant sur le principe de la prépondérance des lois fédérales.
[102] La PGQ demande au Tribunal, dans le cas où les articles 5 et 10 de la Loi provinciale soient déclarés constitutionnellement invalides, de suspendre temporairement l’effet de la déclaration d’invalidité afin de donner au législateur québécois l’occasion de remédier au problème.
[103] En l’espèce, le Tribunal considère qu’il ne serait pas approprié de suspendre la déclaration d’invalidité. Suivant l’arrêt Schachter, il ne faut avoir recours à la suspension de la déclaration d’invalidité que si l’invalidité posait un danger pour le public, menaçait la primauté du droit ou privait de prestations des personnes admissibles sans profiter à la personne dont les droits ont été violés[81].
[104] De plus, la Cour suprême précise que le but de la suspension de la déclaration d’invalidité est d’éviter un « vide juridique » ou un « chaos » avant que le Parlement ou la législature en cause ne puisse remplacer les dispositions inconstitutionnelles.
[105] Par conséquent, le Tribunal n’est pas d’avis que l’invalidité des articles 5 et 10 de la Loi provinciale cause un danger pour le public ou menace la primauté du droit. Le jugement qui est rendu ne créer pas de vide juridique, et ce, en raison de la présence des articles 8 (1) e) et 12 (4) b) de la Loi fédérale. En effet, ce sont ces articles qui, dorénavant, régissent la possession et la culture de plantes de cannabis à des fins personnelles.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[106] ACCUEILLE la Demande introductive d’instance modifiée en jugement déclaratoire de nullité des articles 5 et 10 de la Loi encadrant le cannabis du demandeur datée du 21 janvier 2019, et ce, conformément au premier alinéa de l’article 529 du Code de procédure civile;
[107] DÉCLARE les articles 5 et 10 de la Loi encadrant le cannabis, L.C. 2018, c. 6, constitutionnellement invalides;
[108] LE TOUT, sans frais de justice.
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__________________________________ MANON LAVOIE, j.c.s. |
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Me Julien Fortier Saraïlis avocats |
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Avocats du demandeur |
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Me Patricia Blair Me Marc-Olivier Doré Lavoie Rousseau |
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Avocats de la défenderesse |
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Date d’audience : |
Les 3 et 4 juin 2019 |
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[1] RLRQ, c. C-5.3.
[2] Robin MACKAY, Karin PHILLIPS et Marlisa TIEDEMANN, Résumé législatif du Projet de loi 45 : Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois, 19 mai 2017 (révisé le 5 juillet 2018), p. 4.
[3] Loi réglementant certaines drogues et autres substances, L.C. 1996, c. 19 (« LRDS »).
[4] R. MACKAY, K. PHILLIPS et M. TIEDEMANN, préc., note 2, p. 3.
[5] Id.
[6] Id., p. 5.
[7] Loi encadrant le cannabis, RLRQ, c. C-5.3.
[8] Loi constitutionnelle de 1867 (R.-U.), 30 & 31 Vict., c. 3, reproduite dans L.R.C. 1985, annexe II, n°5.
[9] Demande introductive d’instance du demandeur, par. 33, 41 et 42 (« DII »).
[10] DII, par. 43.
[11] Argumentation du demandeur, par. 27.
[12] Argumentation de la Procureure générale du Québec, par. 11.
[13] Id., par. 24.
[14] Id., par. 45.
[15] Id., par. 108.
[16] Id., par. 88 et 101.
[17] Renvoi : Loi anti-inflation [1976] 2 R.C.S. 373, p. 424 et 425; R. c. Comeau, 2018 CSC 15, par. 83; Renvoi relatif à la Loi sur les armes à feu (Can.), 2000 CSC 31, par. 18 et 57; C-B. c. Imperial Tobacco Canada Ltée [2005] 2 R.C.S. 473, par. 52.
[18] Procès-verbal d’audience du 3 juin 2019, p. 2.
[19] Id.
[20] DII, p. 10.
[21] Renvoi relatif à la Loi sur les armes à feu (Can.), préc., note 17, par. 66.
[22] Banque canadienne de l’Ouest c. Alberta, 2007 CSC 22, par. 25-32.
[23] Québec (Procureur général) c. Lacombe, 2010 CSC 38, par. 32 et 35 ; Henri BRUN, Guy TREMBLAY et Eugénie BROUILLET, Droit constitutionnel, 6e éd., Éditions Yvon Blais, 2014, par. VI-2.45 et VI-2.49.
[24] General Motors of Canada Ltd. c. City National Leasing, [1989] 1 SCR 641, p. 666-669.
[25] Québec (Procureur général) c. Lacombe, 2010 CSC 38
[26] Banque canadienne de l’Ouest c. Alberta, préc., note 22, par. 33.
[27] Id., par. 77; Québec (Procureur général) c. Canadian Owners and Pilots Association, 2010 CSC 39, par. 26 (« Québec c. COPA »).
[28] Banque canadienne de l’Ouest c. Alberta, préc., note 22, par. 43.
[29] Id., par. 77; Law Society of British Columbia c. Mangat, [2001] 3 R.C.S. 113.
[30] Banque canadienne de l’Ouest c. Alberta, préc., note 22, par. 69.
[31] Québec c. COPA, préc., note 27, par. 17.
[32] Id., par. 18.
[33] Banque canadienne de l’Ouest c. Alberta, préc., note 22; Renvoi relatif à la Loi sur les valeurs mobilières, 2011 CSC 66, par. 64.
[34] Danson c. Ontario (Procureur général), [1990] 2 R.C.S. 1086.
[35] Voir notamment Québec, Assemblée nationale, Journal des débats, 1re sess., 41e légis., 7 février 2018, 11h30 (Madame Charlebois); Québec, Assemblée nationale, Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux, 1re sess. 41e légis., 13 février 2018, « Étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière », 15h40 à 15h50 (M Jolin-Barrette et M Sylvain Pagé); Québec, Assemblée nationale, Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux, 1re sess. 41e légis., 16 mars 2018, « Étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière », 11h40 (Mme Charlebois) et 12h00 (M. Sylvain Pagé et Mme Charlebois),
[36] Québec, Assemblée nationale, Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux, 1re sess. 41e légis., 21 mars 2018, « Étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière », 15h30 (M. Jolin-Barrette). Voir aussi Québec, Assemblée nationale, Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux, 1re sess. 41e légis., 27 mars 2018, « Étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière », 10h30 (M. Jolin-Barrette).
[37] Québec, Assemblée nationale, Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux, 1re sess. 41e légis., 20 mars 2018, « Étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière », 19h40 et 19h50 (Mme Charlebois).
[38] Québec, Assemblée nationale, Journal des débats, 1re sess. 41e légis., 6 juin 2018, 11h27 et 11h30 (Mme Charlebois).
[39] Québec, Assemblée nationale, Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux, 1re sess. 41e légis., 21 mars 2018, « Étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière », 15h30 à 16h00; Québec, Assemblée nationale, Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux, 1re sess. 41e légis., 27 mars 2018, « Étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière », 10h00 à 10h39.
[40] H. BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 23, par. VI 2.30; Québec c. COPA, préc., note 27, par. 18; Renvoi relatif à la Loi sur l’assurance-emploi (Can.), art. 22 et 23, [2005] 2 R.C.S. 669, p. 679; Renvoi relatif à la Loi sur les valeurs mobilières, préc., note 33, par. 64.
[41] Québec, Assemblée nationale, Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux, 1re sess. 41e légis., 21 mars 2018, « Étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière », 17h20 (Mme Lavoie).
[42] H. BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 23, par. VI-2.26.
[43] Id., par. VI- 2.33 et VI- 2.34. Voir notamment Global Securities Corp. c. Colombie-Britannique (Securities Commission), [2000] 1 R.C.S. 494; Banque canadienne de l’Ouest c. Alberta, préc., note 22, p. 28.
[44] H. BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 23, par. VI- 2.33 à VI- 2.36.
[45] Gérald-A. BEAUDOIN, La Constitution du Canada : institutions, partage des pouvoirs, droits et libertés, 3e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2004, p. 713.
[46] H. BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 23, par. VI-2.158 et VI-2.159.
[47] R. c. Morgentaler, [1993] 3 R.C.S. 463, p. 498
[48] R. c. Malmo-Levine, [2003] 3 R.C.S. 571, p. 619.
[49] Reference re Validity of Section 5 (a) Dairy Industry Act, 1948 CanLII 2 (SCC), p. 50.
[50] Id., p. 49; RJR Macdonald c. Canada (Procureur Général), [1995] 3 R.C.S. 199, par. 30; Renvoi relatif à la Loi sur la procréation assistée, 2010 CSC 61, par. 233 (les juges Lebel et Deschamps).
[51] R. c. Morgentaler, préc., note 47, p. 504 et 505.
[52] Id., p. 498.
[53] LRDS, Annexe II, art. 1 (abrogé).
[54] Id., art. 7(1).
[55] Id., art. 2 (1).
[56] Id., art. 4 (1).
[57] Loi sur le cannabis, L.C. 2018, c. 16, art. 8 et 12.
[58] Loi encadrant le cannabis, préc., note 1, art. 5 et 10.
[59] R. c. Malmo-Levine, préc., note 48, par. 77; Canada (Procureur général) c. PHS Community Services Society, 2011 CSC 44, par. 52.
[60] Pièce P-6.6. : Délibération du 25 avril 2018, p. 2.
[61] Argumentation de la Procureure générale du Québec, par. 43-45.
[62] Global Securities Corp. c. Colombie-Britannique (Securities Commission), préc., note 43, par. 37.
[63] Ward c. Canada (Procureur général), [2002] 1 R.C.S. 569, par. 25.
[64] Argumentation de la Procureure générale du Québec, par. 46-63.
[65] Dans son plan d’argumentation (par. 5), le demandeur réfère à RJR Macdonald c. Canada (Procureur Général), préc., note 50, par. 39-43 et Standard Sausage Cp. c. Lee, [1933] 4 D.L.R. 501 complétée par [1934] 1 D.L.R. 706 (BCCA).
[66] Chaoulli c. Québec (Procureur général), 2005 CSC 35, par. 16-24; Mazzei c. Colombie-Britannique (Directeur des Adult Forensic Psychiatric Services), 2006 CSC 7, par. 31-36.
[67] Schneider c. R. (Colombie-Britannique), [1982] 2 R.C.S. 112.
[68] Canada, Débats de la Chambre des communes, 1re sess., 42e légis., 7 juin 2017, « Initiatives ministérielles. Loi sur le cannabis », p. 1555 (Mme Salma Zahid).
[69] Schneider c. R. (Colombie-Britannique), préc., note 67; Rio Hotel Ltd. c. Nouveau-Brunswick (Commission des licences et permis d'alcool), [1987] 2 R.C.S. 59.
[70] H. BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 23, par. VI-2.41 et VI- 2.42; Hodge c. La Reine, (18883-84) 9 A.C. 117, p. 130; Rio Hotel c. Nouveau Brunswick (Commission des licences et permis d’alcool), préc., note 69, p. 65; Renvoi relatif à la Loi sur les valeurs mobilières, préc., note 33, par. 66.; Banque canadienne de l’Ouest c. Alberta, préc., note 22, p. 28.
[71] H. BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 23, par. VI-2.42,
[72] Schneider c. R. (Colombie-Britannique), préc., note 67, p. 130.
[73] Augmentation de la Procureure générale du Québec, par. 52-53 citant Rio Hotel Ltd. c. Nouveau-Brunswick (Commission des licences et permis d'alcool), préc., note 69, par. 41.
[74] Audience du 4 juin 2019, 12h00.
[75] H. BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 23, par. IV.48 - IV.58.
[76] Id., par. VI-2.54, se référant à General Motors of Canada Ltd. c. City National Leasing, préc., note 24, p. 671-674 et au Renvoi relatif à la Loi sur la procréation assistée, préc., note 50, par. 128-132 (juge en chef McLachlin).
[77] Renvoi relatif à la Loi sur la procréation assistée, préc., note 50, par. 132 (juge en chef McLachlin).
[78] Scowby c. Glendinning, [1986] 2 RCS 226, 238; RJR-MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), préc., note 50, par.28.
[79] Renvoi relatif à la Loi sur la procréation assistée, préc., note 50, par. 134 (juge en chef McLachlin).
[80] Id., par. 130.
[81] Schachter c. Canada, [1992] 2 R.C.S. 679, p. 716 et 719.
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