Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Yamaska

LONGUEUIL, le 21 février 2001

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

126936-62B-9911-R

DEVANT LA COMMISSAIRE :

Me Ginette Godin

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

M. Jean-Marie Jodoin

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Mme Lucy Mousseau

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

113782544

AUDIENCE TENUE LE :

8 novembre 2000

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER BR :

62774692

À :

Saint-Hyacinthe

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE PRÉSENTÉE EN VERTU DE L'ARTICLE 429 .56 DE LA LOI SUR LES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET LES MALADIES PROFESSIONNELLES (L.R.Q., chapitre A-3.001)

 

 

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GROUPE DE CONSTRUCTION NATIONAL STATE INC.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

YVES PARÉ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 6 juin 2000, Groupe de Construction National State inc. (l’employeur), dépose auprès de la Commission des lésions professionnelles une requête en révocation à l’encontre d’une décision de la Commission des lésions professionnelles rendue le 10 mai 2000.

[2]               La décision attaquée par la requête de l’employeur déclare que la surdité de monsieur Yves Paré (le travailleur) est d’origine professionnelle et qu’elle engendre une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique de l’ordre de 6,90 %.

L'OBJET DE LA REQUÊTE

[3]               L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles de révoquer sa décision du 10 mai 2000 car toutes les parties ayant un intérêt dans la cause n’ont pas été entendues et que cette décision est entachée d’un vice de fond ou de procédure de nature à l’invalider.

[4]               Le travailleur, bien que dûment convoqué, est absent à l’audience de la requête.

LES FAITS

[5]               En 1997, le travailleur alors âgé de 62 ans, produit une réclamation à la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) alléguant être victime d’une surdité d’origine professionnelle.

[6]               Il joint à sa réclamation un rapport d’évaluation audiologique du 12 août 1997 effectué par madame L. Graham-Lalande, audiologiste. Ce rapport décrit l’histoire professionnelle du travailleur comme suit :

[…]

 

«Monsieur a travaillé dans le bruit pendant plus de 40 ans et il est retraité depuis un an.

 

Le bénéficiaire a travaillé pendant 7 ans pour la compagnie Petro-Canada à titre de tuyauteur à raison de 40 heures par semaine et 200 heures de temps supplémentaire par année.

 

Le bénéficiaire a travaillé pendant 15 ans pour la compagnie Union Carbide de montréal à titre de fabricateur à raison de 40 heures par semaine. Il a porté des protecteurs auriculaires pendant 10 ans.

 

Le bénéficiaire a travaillé pendant 10 ans pour le contracteur Eddy Bernier à titre de tuyauteur à raison de 40 heures par semaine.

 

Le bénéficiaire a travaillé pendant 1 ans pour la compagnie Consolidated Textile de St - Hyacinthe à titre de journalier à raison de 40 heures par semaine.

 

Le bénéficiaire a travaillé pendant 3 ans pour la compagnie Plomberie de Beloeil à titre de tuyauteur à raison de 40 heures par semaine.

 

Le bénéficiaire a travaillé pendant 2 ans pour la compagnie Angel and son à Montréal à titre de tuyauteur à raison de 40 heures par semaine.» (sic)

 

[…]

 

 

[7]               Le 11 mars 1998, la CSST rend trois décisions par lesquelles elle accepte la réclamation du travailleur, fixe à 6,90 % l'atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique résultant de cette lésion professionnelle et impute au dossier de l’employeur la totalité des coûts engendrés par cette lésion professionnelle.

[8]               L’employeur conteste ces trois décisions.

[9]               Le 21 octobre 1999, la CSST agissant en révision administrative confirme les décisions de la CSST et l’employeur conteste cette décision auprès de la Commission des lésions professionnelles.

[10]           Le 7 avril 2000, la Commission des lésions professionnelles écrit à l’employeur pour lui mentionner qu’une audience aura lieu le 28 avril 2000 laquelle ne portera que sur l’admissibilité de la réclamation du travailleur et qu’une audience ultérieure aura lieu en ce qui concerne la contestation de l’employeur sur sa demande de partage de l’imputation des coûts reliés à la lésion professionnelle du travailleur.

[11]           Après avoir tenu une audience le 28 avril 2000, à laquelle furent convoqués l’employeur et le travailleur, la Commission des lésions professionnelles rend la décision attaquée par la présente requête.

[12]           Dans cette décision, le décideur initial relate que le travailleur a exercé un emploi de tuyauteur plombier chez l’employeur de 1971 à 1996.

[13]           Il est également question d’un rapport d’évaluation médicale du docteur P. Wurtele qui précise que le travailleur fut exposé à des bruits de type industriel depuis 1959 et qu’il souffre de surdité depuis de nombreuses années. À cet effet, le docteur Wurtele se réfère à un audiogramme fait en 1972.

[14]           Le décideur initial conclut à surdité d’origine professionnelle en se basant sur le fait que l’atteinte auditive du travailleur est compatible à une exposition à des bruits excessifs attribuables à son travail de tuyauteur. Il écarte l’âge du travailleur comme cause de cette surdité sur la base du fait que la surdité de ce dernier perdure depuis de nombreuses années.

L'ARGUMENTATION DES PARTIES

[15]           L’employeur allègue qu’il y a lieu de révoquer la décision du 10 mai 2000 car le travailleur a exercé un travail de tuyauteur chez d’autres employeurs et que ces employeurs ne furent jamais convoqués pour contrer les prétentions du travailleur à l’effet que sa surdité est d’origine professionnelle.

L'AVIS DES MEMBRES

[16]           Les membres issus des associations syndicales et des associations d’employeurs sont d’avis d’accueillir la requête de l’employeur pour les motifs que tous les employeurs ayant un intérêt dans le présent litige ne furent pas convoqués.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[17]           La Commission des lésions professionnelles doit déterminer s’il y a lieu de révoquer sa décision du 10 mai 2000.

[18]           L’article 429.56 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles [L.R.Q., chapitre A-3.001] (la Loi) se lit ainsi :

429.56. La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :

 

  lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;

  lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;

  lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.

 

Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.

________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[19]           À la lecture de la décision attaquée, il est facile de constater que la surdité du travailleur a débuté il y a plusieurs années et que l’histoire professionnelle du travailleur à titre de tuyauteur englobe d’autres employeurs que le requérant.

[20]           À cet effet, la soussignée s’en remet à l’histoire professionnelle du travailleur relatée le 12 août 1997 par madame Graham-Lalande, audiologiste, et au rapport d’évaluation médicale du docteur Wurtele auxquels fait référence la décision faisant l’objet de la présente requête.

[21]           Le décideur initial est très clair à l’effet qu’il attribue au travail général de tuyauteur la surdité du travailleur sans égard à son seul emploi chez l’employeur et il écarte l’âge du travailleur pour expliquer cette surdité en mentionnant que cette dernière existe depuis plusieurs années.

[22]           Pour en venir à un tel constat, le décideur initial s’en remet à l’opinion du docteur Wurtele, lequel fait état d’un audiogramme effectué en 1972.

[23]           Or, en 1972, le début du travail chez l’employeur était relativement récent.

[24]           Il est donc possible que d’autres employeurs que celui convoqué à l’audience de la cause ayant précédé la décision attaquée soient imputables des coûts de la lésion du travailleur.

[25]           Puisque l’employeur a contesté la décision de la CSST rendue en révision administrative, lui imputant la totalité des coûts engendrés par la lésion du travailleur, les employeurs antérieurs du travailleur pourraient avoir à assumer une partie de l’imputation de ces coûts sans avoir eu l’opportunité de faire valoir leur droit quant à l’admissibilité de la réclamation du travailleur. Une telle possibilité est envisageable en vertu de l’article 328 de la Loi qui se lit comme suit :

328. Dans le cas d'une maladie professionnelle, la Commission impute le coût des prestations à l'employeur pour qui le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer cette maladie.

.{Travail pour plus d'un employeur.}.

  Si le travailleur a exercé un tel travail pour plus d'un employeur, la Commission impute le coût des prestations à tous les employeurs pour qui le travailleur a exercé ce travail, proportionnellement à la durée de ce travail pour chacun de ces employeurs et à l'importance du danger que présentait ce travail chez chacun de ces employeurs par rapport à la maladie professionnelle du travailleur.

.{Répartition d'une imputation.}.

  Lorsque l'imputation à un employeur pour qui le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer sa maladie professionnelle n'est pas possible en raison de la disparition de cet employeur ou lorsque cette imputation aurait pour effet d'obérer injustement cet employeur, la Commission impute le coût des prestations imputable à cet employeur aux employeurs d'une, de plusieurs ou de toutes les unités ou à la réserve prévue par le paragraphe 2  de l'article 312.

________

1985, c. 6, a. 328.

 

 

[26]           La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles est une loi d’ordre public et il incombe à la Commission des lésions professionnelles en tant que tribunal de s’assurer du respect des règles de justice naturelle, notamment de l’obligation de convoquer toutes les parties ayant un intérêt dans un litige, obligation consignée à l’article 429.13 de la Loi dont la teneur est la suivante :

429.13. Avant de rendre une décision, la Commission des lésions professionnelles permet aux parties de se faire entendre.

________

1997, c. 27, a. 24.

 

[27]           Il y a donc eu transgression de ces règles et la Commission des lésions professionnelles révoque sa décision en vertu du troisième alinéa du premier paragraphe de l’article 429.56 précité car le défaut de convoquer toutes les parties intéressées à un litige constitue un vice de procédure de nature à invalider la décision.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête de l’employeur, Groupe de Construction National State inc.;

RÉVOQUE la décision de la Commission des lésions professionnelles rendue le 10 mai 2000;

ORDONNE la tenue d’une nouvelle audience, à laquelle seront convoquées toutes les parties impliquées dans le présent litige.

 

 

 

 

Me Ginette Godin

 

Commissaire

 

 

 

 

 

Leblanc Lalonde et associés, avocats

(Me Michel Lalonde)

7400, boul. Les Galeries d’Anjou

Bureau 205

Ville d’Anjou (Québec)

H1M 3M2

 

Représentant de la partie requérante

 

 

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