Décision

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R. c. Roussy

 

JB 0733

 

 

 

 
Infractions à caractère sexuel à l’endroit d’une mineure; analyse des faits et d’une preuve documentaire.

2016 QCCQ 15007

COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

LOCALITÉ DE

MONTRÉAL

« Chambre criminelle et pénale »

N° :

500-01-054581-118

500-01-099252-139

500-01-100588-133

 

 

DATE :

6 décembre 2016

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

 MADAME LA JUGE

DOMINIQUE B. JOLY, C. Q.

 

______________________________________________________________________

 

SA MAJESTE LA REINE

Poursuivante

c.

Maxime ROUSSY

Accusé

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

Ordonnance rendue en vertu de l’article 486.4 du Code criminel interdisant la publication ou la diffusion de quelque façon que ce soit de tout renseignement permettant d’établir l’identité de la plaignante, des deux témoins civils ayant témoigné les 23 et 24 mars ainsi que le 12 avril 2016 et les personnes innocentes non impliquées dans la cause et dont les blogues ont été visités par l’une ou l’autre des parties. Plusieurs documents ont été mis sous scellés car présentant des caractéristiques de pornographie juvénile.

 

______________________________________________________________________

 

 

 

DÉNONCIATION

[1]           M. Roussy est accusé de plusieurs infractions à caractère sexuel, soit leurre, contacts sexuels, incitation à des contacts sexuels, agressions sexuelles, agressions sexuelles armées, possession et production de pornographie juvénile; le tout commis entre le 4 juillet 2006 et le 5 mars 2011.

[2]           Il est aussi accusé de trois bris d’engagement par l’envoi à la plaignante de deux mises en demeure non signées et ne provenant pas d’un bureau d’avocat ainsi que par l’envoi d’un courriel en utilisant l’identité d’une tierce personne fictive.

[3]           L’accusé est un auteur de livres jeunesse.

[4]           Selon la version de la plaignante, à l’âge de 11 ans, démontrant un intérêt marqué pour la lecture et l’écriture, elle rencontre en 2005 au Salon du livre de Montréal, l’écrivain Maxime Roussy lors d’une séance d’autographes. Elle communique aussi avec lui sur le forum de sa série littéraire Pakkal et en parallèle, sur MSN où elle peut lui parler de façon plus privée. D’autres jeunes, selon la plaignante, font de même.

[5]           En 2005 et 2006, sur le forum, elle discute davantage de livres tandis que sur MSN, les sujets sont divers : livres, école et relations familiales.

[6]           Vers janvier 2007, l’accusé lui aurait demandé à la blague sur MSN si elle était pubère. C’est le seul événement détonnant.

[7]           En novembre 2007, alors qu’elle est âgée de 13 ans, elle se rend une deuxième fois, au Salon du livre de Montréal. Elle lui demande de lui dédicacer deux livres qu’elle a achetés. Un de ces livres a été écrit par l’accusé pour un public adulte.

[8]           Il y a par la suite, changement significatif sur MSN quant aux propos tenus par l’accusé. Il lui dit d’abord qu’elle est très jolie et beaucoup plus mature que les autres. Il lui pose des questions sur ses seins, lui écrit des scénarios érotiques, des choses qu’il aimerait lui faire, qu’il lui propose de faire. Lorsqu’il lui écrit des scénarios, il y aurait de sa part, selon ses dires, masturbation.

[9]           Étant amoureuse de lui depuis longtemps, elle est très heureuse de constater qu’il démontre de l’intérêt à son endroit. Elle lui fait alors croire que tout ce qu’il lui écrit l’excite.

[10]        Il y a au fil du temps escalade, soit échanges de sites pornographiques. Des rencontres sont ensuite organisées dans le but d’avoir des contacts sexuels et des relations sexuelles. Les échanges deviennent plus « hardcore » selon les termes utilisés par la plaignante. Au fur et à mesure des rencontres, ceci s’intensifie. Elle parle de BDSM et explique qu’il s’agit de pratiques sexuelles faisant intervenir le bondage, la discipline, la domination et la soumission sadomasochiste. Elle spécifie que M. Roussy est de type dominant.

[11]        Au total, dix rencontres auraient eu lieu : La première à 14 ans, soit le 21 novembre 2008 où ont lieu les premiers contacts sexuels; la deuxième, le lendemain, où il y aurait eu relation sexuelle et la dernière à 16 ans, soit le 19 novembre 2010, moment où la relation tire à sa fin, où la plaignante vit des choses difficiles qui l’avaient amenée peu de temps auparavant, à une deuxième entrée en pédopsychiatrie.

[12]        Lors de certaines rencontres, il y a utilisation d’objets lors des relations sexuelles d’où l’accusation d’agressions sexuelles armées.

[13]        Durant toute la période en cause, la plaignante conserve les conversations qui ont lieu sur MSN en les enregistrant sur son ordinateur, dans un document appelé « historique ».

[14]        Lorsqu’elle communique avec lui à travers des sites de « chats », elle conserve le tout en prenant des captures d’écran. Pour ce faire, elle doit télécharger sur son ordinateur, un logiciel qui le permet. Une fois qu’elle actionne la fonction « imprime-écran », les captures se font automatiquement tant qu’elle ne décide pas de désactiver cette fonction.

[15]        Au fil du temps, elle utilise la touche couper-coller des fichiers de son ordinateur et les transfère sur une clé USB; ceci afin de tout conserver, d’avoir un souvenir qu’elle peut relire. Elle fait aussi un double sur une deuxième clé, pour plus d’assurance.

[16]        Elle transfère finalement le tout sur une clé de plus grosse capacité (16 G) et continue d’enregistrer directement sur cette clé par la suite.

[17]        Lorsque la plaignante porte plainte, en mars 2011, cette clé est remise aux policiers ainsi que son journal intime qu’elle tient depuis son jeune âge.

[18]        Le consentement de la plaignante n’est pas en cause. Tous les chefs autorisés concernent des actes commis avant que la plaignante soit en âge de consentir.

[19]        On retrouve la preuve relative aux chefs de leurre, de possession et production de pornographie juvénile sur les copies conservées des « chats » et des échanges MSN.

[20]        Quelques fragments de courriels à connotation sexuelle sont retrouvés dans l’ordinateur Toshiba de l’accusé. Ils sont pour la plupart, échangés après que la plaignante ait atteint l’âge de 16 ans.

[21]        Les rencontres sont corroborées par des factures de motels ou d’hôtels, des relevés cellulaires, des relevés de cartes de crédit, des reçus de stationnement, des copies de billets d’autobus, des dédicaces de livres, un manuscrit dédicacé et son enveloppe, des cadeaux supposément remis par l’accusé et un témoin civil.

[22]        Aucun des objets utilisés par l’accusé lors de relations sexuelles avec la plaignante n’a été retrouvé sauf une poignée de contrôle de température d’une douche de motel que la plaignante décrit comme s’enlevant facilement. Les policiers se sont rendus audit motel et ont effectivement pu corroborer ce fait. Des photos ont été prises.

[23]        Lors du témoignage de la plaignante, elle se sert, à l’occasion, de son journal intime pour retrouver une date ou autre détail.

[24]        Une preuve limitée de faits similaires a aussi été mise en preuve. Elle permet de contrer une preuve de fabrication particulièrement quant à la façon de procéder de l’accusé au début de la relation.

La défense :

[25]        M. Roussy n’a pas témoigné. Il présente en preuve, un expert en informatique judiciaire, soit M. Gilles Létourneau.

[26]        Ce dernier a reçu du procureur de M. Roussy un disque dur USB appartenant à l’accusé qui semble-t-il, n’avait pas été saisi lors de la perquisition effectuée chez lui par les policiers.

[27]        Son mandat est entre autres, d’analyser ce disque dur et en extraire les fichiers PDF sur lesquels on peut voir des imprime-écrans de sessions de clavardage entre unangequipleure@hotmail.com et f—.c————-@hotmail.com.

[28]        Ces imprime-écrans sont au nombre de huit. Ils sont très incriminants pour la plaignante puisqu’ils démontrent l’accusé sous un angle fort positif devant les demandes inappropriées d’une jeune fille.

[29]        Le Tribunal résume ces documents: Cette jeune fille avoue faire des choses horribles. Si elle s’écoutait, elle en ferait des pires. Elle perd la tête et est dangereuse. Elle est jalouse et accuse M. Roussy de coucher avec des lectrices de ses livres. Elle lui dit qu’il laisse des traces sur son blogue. « Travaille le peu d’intelligence que tu as, tu vas peut-être comprendre. Les noms de motels, les chambres. Ça pourrait te jouer des tours. » Elle lui dit qu’il lui a déjà laissé utiliser son ordinateur pendant des heures. Elle insinue qu’elle a peut-être installé un « keylogger » sur l’ordinateur de l’accusé et qu’elle reçoit, chaque jour, un rapport par courriel de tous ses faits et gestes sans qu’il ne s’en rende compte. Avec le « keylogger », elle peut aussi prendre le contrôle à distance de son ordinateur.

[30]        Elle fait ensuite référence à un film dont il lui a parlé. Elle mentionne: « Fight Club was the beginning, now it’s moved out of the basement, it’s called Project Mayhem. »

[31]        Elle lui dit qu’elle est sur le point de le détruire. Elle n’a qu’à dire qu’il l’a agressée sexuellement. Ils ont passé du temps ensemble. Ce sera sa parole contre la sienne et ses nombreuses preuves. Elle ajoute que si elle s’y prend de la bonne manière, ça va être un jeu d’enfant.

[32]        La thèse de la défense est alors claire : Il ne s’est rien passé entre l’accusé et la plaignante. Cette dernière a des problèmes psychologiques et psychiatriques. Toute cette histoire est pure invention.

[33]        Suite à la lecture de ces sessions de clavardage, l’expert doit expliquer la provenance de ces fichiers PDF, vérifier si certains sujets discutés durant ces sessions étaient possibles et vérifier si ces fichiers existaient avant la perquisition.

[34]        Le contre-interrogatoire de la plaignante va dans le même sens. Il tend à démontrer qu’avant de remettre sa clé USB aux policiers, elle aurait effacé beaucoup de documents, la plupart en lien avec l’accusé. La plaignante avait une obsession par rapport à tout ce qui touchait M. Roussy, c.-à-d., sa famille (femme, enfants, neveu), des amis et une voisine qui aurait démontré un trop fort intérêt envers l’accusé.

[35]        Le contre-interrogatoire est finalement utilisé pour démontrer que la plaignante peut avoir fabriqué de la preuve, par exemple, en effaçant des documents qui démontrent qu’elle est allée sur un site de vente de chandails; chandail qui lui aurait pourtant été offert par M. Roussy quelques jours auparavant ou des documents qui démontrent qu’elle est allée voir les horaires des parties de hockeys télévisées qu’elle aurait soi-disant regardées avec l’accusé à l’hôtel.

QUESTIONS EN LITIGE

[36]        La défense, compte tenu de l’ensemble de la preuve, soulève-t-elle un doute raisonnable relativement à chacun des chefs d’accusation? Le Tribunal donne-t-il le bénéfice du doute raisonnable à l’accusé parce qu’il ne peut trancher avec certitude la preuve conflictuelle présentée?[1]

[37]        Si non, la poursuivante a-t-elle fait la preuve hors de tout doute raisonnable pour chacun des chefs autorisés?

ANALYSE

[38]        L’article 31.1 de la Loi sur la preuve au Canada se lit ainsi : « Il incombe à la personne qui cherche à faire admettre en preuve un document électronique d’établir son authenticité au moyen d’éléments de preuve permettant de conclure que le document est bien ce qu’il paraît être.

[39]        Dès le début du procès, relativement aux documents produits par la poursuivante, la défense admet qu’ils remplissent les conditions d’admissibilité de l’article 31.1 de la Loi sur la preuve.

[40]        Quant aux huit documents à être produits par la défense, ils ont fait l’objet d’un voir-dire. La poursuivante admet à la fin dudit voir-dire qu’ils remplissent les conditions d’admissibilité de la Loi sur la preuve.

[41]        Les parties soumettent qu’il appartiendra au juge du procès d’évaluer la force probante de ces éléments de preuve.

[42]        Relativement aux huit documents produits par la défense, un sommaire apparaît au haut des documents, résumant le contexte des échanges qui suivent. M. Roussy n’a pas témoigné. Il s’agit d’un ajout fait par ce dernier. Cet ajout n’est pas admissible en preuve. Le Tribunal n’en tiendra pas compte.

[43]        L’expert Létourneau témoigne avoir demandé à M. Roussy via son avocate quelle méthode il avait utilisée pour fabriquer les documents PDF sur lesquels on peut voir les sessions de clavardage eBuddy. On lui a alors répondu que l’accusé faisait une capture d’écran du texte de la session, pour ensuite la coller dans un document texte via OpenOffice. Ce document était ensuite converti en format PDF.

[44]        Suivant ses analyses et son expérience, il conclut que c’est effectivement la méthode qui a été utilisée. C’est une méthode très répandue qu’il utilise lui-même depuis toujours. (réf : page 8 de son rapport).

[45]        Il ajoute qu’il a regardé de plus près les PDF de M. Roussy et a constaté que ces images ne pouvaient avoir été modifiées. Si un texte avait été ajouté dessus, la différence de pixels aurait été évidente. L’expert fait une démonstration en salle de cour; démonstration qu’on retrouve dans son rapport. Il reconnaît qu’il n’a pas essayé de retrouver la même police de caractère pour imiter ceux déjà en place puisque le but n’était que de démontrer la différence de pixels. (réf : p. 15 de son rapport)

[46]        L’expert a aussi extrait le numéro de série électronique du disque dur de M. Roussy et a alors pu constater que ce disque avait été branché dans les trois ordinateurs et ce, avant qu’ils ne soient saisis.

[47]        Ceci permet de croire que les chats existaient avant la perquisition ou encore avant la dénonciation.

[48]        Lors de ses recherches sur le disque USB, l’expert retrouve plusieurs copies effacées de ces fichiers PDF, à l’exception de huit d’entre eux qui étaient  cryptés. Il a pu les ouvrir en obtenant le mot de passe via l’accusé. Il y a au total 107 références à des fichiers PDF pour le même répertoire sur le disque, mais il n’en a retenu que seize, soit les huit cryptés qui étaient non effacés et leur huit correspondant effacés mais non cryptés. Pour le bénéfice de la poursuivante, il a mis à la fin de son rapport, la liste des 107 références aux fichiers PDF du disque de M. Roussy.

[49]        On peut voir que les dates de création et de modification diffèrent parfois entre les fichiers cryptés et effacés. Cela indique qu’ils n’ont pas été cryptés en même temps que leur création. Ce n’est pas inhabituel. La journée où on encrypte, on ne change pas le contenu mais le véhicule ou le contenant. La date va changer le « Hash Value ». L’empreinte numérique va changer. Ils ne peuvent pas avoir la même signature.

[50]        Les dates d’accès quant aux fichiers cryptés ne sont pas fiables puisque la dernière date d’accès est le 23 août 2012. La seule chose qu’il peut déduire de ce fait, c’est que le disque dur a été branché à cette date. (réf p.22 de son rapport)

[51]        Il est en preuve que le disque a été remis à l’expert le 24 août 2012. Le Tribunal considère donc qu’il n’est pas surprenant que le disque ait été branché la veille de la remise.

[52]        Lorsque l’expert compare les huit fichiers PDF effacés et les huit cryptés, il conclut qu’ils sont identiques.

[53]        Il imprime un extrait de chacun des seize fichiers PDF accompagnés de leurs métadonnées respectives. Il constate sur ceux effacés des différences, par exemple dans l’heure de la création entre le MAC time et les métadonnées et des différences dans les applications qui ont servi à créer le PDF.

[54]        Il remarque aussi que pour les huit fichiers cryptés, ce n’est pas la même application qui a servi à créer les PDF, soit PDF creator alors qu’à l’origine, le document était en format OpenOffice (Writer). De plus, pour les fichiers cryptés 1, 2, 3 et 4, il y a une différence de quelques secondes dans la création entre le MAC time et les métadonnées tandis que pour les fichiers cryptés 5, 6, 7 et 8, il y a une différence de deux heures dans la création entre le MAC time et les métadonnées.

[55]        Pour ce qui est des différences de temps de deux secondes, l’expert dit pouvoir conclure que le PDF a été créé à ce moment. Il n’explique pas l’autre différence de temps.

[56]        Pour ce qui est des applications, il constate que toutes les dates des Mac time et des métadonnées sont antérieures à la perquisition. Le nom de l’auteur est Maxime Roussy et il y a au moins quatre programmes impliqués dans le processus de création des documents PDF, soit PDFill : Free PDF Writer and Tools; PlotSoftPDFill 9.0; PDF Creator et OpenOffice Writer.

[57]        PDEill : Free PDF Writer and Tools est une version différente du logiciel PlotSoftPDFill 9.0. . Le premier PDF créé avec cette version est le fichier effacé #4 daté du 22 juillet 2010. L’expert confirme que cette version était sortie au moment de la création dudit PDF.

[58]        L’expert a aussi effectué des recherches pour voir si un ou des logiciels utilisés lors de la création des PDF existaient sur l’ordinateur de M. Roussy saisi lors de la perquisition. Il a retrouvé le répertoire d’installation du logiciel PDFill et Open Office, soit deux des logiciels retracés dans les métadonnées des PDF contenant les sessions eBuddy

[59]        Finalement, il a recherché dans ce même ordinateur saisi, un document PDF et a trouvé tout comme dans les PDF avec les sessions eBuddy, un PDF créé avec le même logiciel c.-à-d. PDFill : Free PDF Writer and Tools. (pages 24 à 42 du rapport)

[60]        Tout ceci semble démontrer que ces huit fichiers existaient bel et bien avant la perquisition; ce qui donne une certaine valeur auxdits documents.

[61]        De plus, l’expert a pris des mots utilisés par la plaignante dans les huit chats cryptés et a vérifié si on les retrouvait dans son ordinateur. Il veut ainsi éprouver la vraisemblance des propos.

[62]        Par exemple, un des mots utilisés est « keylogger ». L’expert constate qu’en 2009, la plaignante recherchait sur Google les termes « spybot » et « ad ware » qui sont des logiciels spécialisées dans « la détection » de logiciels espions comme les keyloggers.

[63]        Pour le mot spécifique « keylogger », il a retrouvé 681 occurrences dans 75 fichiers; pour le mot clé « logmein », 241 occurrences trouvés dans 72 fichiers et 100 occurrences dans cinq fichiers pour le mot clé « Teamviewer »; l’expert précisant que les deux derniers termes sont des programmes de contrôle à distance.

[64]        Comme il est possible que des librairies intégrées aux logiciels de détection installés par la plaignante aient été détectées, l’expert va plus loin dans ses recherches et conclut avoir trouvé des traces du logiciel Spy Lantern qui le dirigent vers des restants de bases de registre de Windows; bases de données où la plupart des logiciels doivent s’inscrire pour fonctionner.

[65]        Il est donc fortement probable que le ledit logiciel ait été installé sur l’ordinateur de la plaignante. Il ajoute qu’il a vérifié si ce logiciel existait en 2009 et en a trouvé la trace dans les archives de Wayback machine pour la période d’avril 2009.

[66]        À la lecture d’un extrait du site web de Spydex, Spy Lantern, on peut constater que ce keylogger surveille tous les aspects d’un utilisateur et peut enregistrer les frappes au clavier, mots de passe, courriels, chats, etc. Il est invisible. Le site web montre comment exclure Spy Lantern de la détection de l’antivirus; ce qui le rend invisible à l’antivirus. (p.46, 47, 48 du rapport)

[67]        Il a fait la même recherche sur l’ordinateur Toshiba de M. Roussy. Il a retrouvé des occurrences pour des logiciels de contrôle à distance mais les résultats pointent surtout vers des librairies de logiciels de « détection » et ne semblent pas indiquer que des logiciels de contrôle à distance aient existé sur le disque de l’accusé. Il n’y a pas assez d’occurrences pour le confirmer. (p.49 de son rapport) Il spécifie lors de son témoignage, que des traces existent mais elles sont clairement insuffisantes pour conclure que l’accusé a installé un keylogger.

[68]        Après la conversation eBuddy du 27 février 2011, soit le chat #8 crypté, dans laquelle la plaignante fait référence au keylogger, l’expert constate que M. Roussy a utilisé trois logiciels différents de « détection ». Il  lui semble donc que l’accusé  voulait vérifier la véracité des propos de la plaignante, ce qui tend à démontrer que la conversation a vraiment eu lieu.

[69]        Il ajoute que dans les huit chats cryptés, la plaignante fait référence au fait qu’elle pourrait tuer son père. On retrouve ce même genre de discours dans la clé rouge de la plaignante. Il en est de même relativement au mot « G… » le nom de sa psychiatre dont elle parle dans le chat crypté #6 et qu’on retrouve sur la clé de la plaignante.

[70]        L’utilisation, de ces mêmes mots ou expressions, tend encore une fois, à lui confirmer l’authenticité de ces huit chats.

[71]        D’un point de vue technologique, l’expert doit toutefois admettre que pour être utilisables, les keyloggers doivent être installés dans les ordinateurs de deux parties et il a déjà témoigné que les traces retrouvées sur l’ordinateur de l’accusé sont  clairement insuffisantes pour conclure qu’il a installé un keylogger.

[72]        En contre-interrogatoire, il mentionne qu’il ne sait pas si le disque dur remis par l’accusé était sur les lieux de la perquisition.

[73]        Il confirme n’avoir trouvé aucune trace de l’origine des huit chats remis par M. Roussy. Il n’a rien trouvé ni sur l’ordinateur de M. Roussy ni sur celui de la plaignante ni sur sa clé USB. Selon l’expert, il s’agit « d’un match nul ».

[74]        Sur le chat #2 crypté, on retrouve le nom de Maxime unangequipleure@hotmail.com à l’endroit où normalement on devrait voir apparaître le nom de la personne à qui on parle. L’expert de la poursuivante trouvait ceci inhabituel.

[75]        Confronté à cette affirmation, M. Létourneau répond que l’expert judiciaire n’est pas là pour émettre une hypothèse. Si un expert n’est pas capable de le démontrer, il ne doit pas en parler.

[76]        Il mentionne aussi que bien qu’on retrouve sur ce même document en haut à gauche, le mot « buddies », ça ne veut pas dire que ça a été créé par eBoddy. Lorsqu’il lui est demandé d’expliquer davantage, il n’a rien d’autre à ajouter; « eBuddy » n’existe plus. Il ne peut pas faire de vérification.

[77]        La poursuivante revient sur les 107 références effacées et dont il a reproduit la liste à la fin de son rapport.

[78]        Les 107 références sont la même chose que les huit chats effacés et les huit chats cryptés avec des modifications quant aux métadonnées.

[79]        Ce sont tous des traces ou des échos du même nom mais pas toujours les mêmes dates. Il les a retrouvées dans le répertoire « nouveau dossier »; endroit que M. Roussy (via son avocate) a ciblé pour son expertise.

[80]        Il reconnaît qu’il y a, dans ces 107 fichiers, des choses qui n’ont pas de sens. C’est chinois. C’est quelque chose que l’expert ne voit pas tous les jours. Il émet l’hypothèse que le disque a peut-être été corrompu quelque part. Il ne peut tirer aucune conclusion relativement à ces 107 références.

[81]        Il admet aussi que la première chose à laquelle il a pensé en les voyant, c’est qu’il y a peut-être eu falsification. Toutefois, toutes les erreurs se retrouvent avant la date d’arrestation. Pourquoi aurait-on voulu falsifier avant cette date?

[82]        C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il s’est assuré que tous les convertisseurs PDF utilisés existaient avant l’arrestation.

[83]        S’il y avait eu utilisation d’un convertisseur PDF qui n’existait pas avant l’arrestation, ceci voudrait dire qu’il y a eu falsification.

[84]        A-t-il vérifié si ces 107 fichiers existaient ailleurs dans un chemin autre, sur le disque dur? La réponse est non. Il n’a pas non plus vérifié si d’autres seraient encore existants c.-à-d. « live » ailleurs sur le disque dur.

[85]        Il explique qu’il ne l’a pas fait car lorsqu’on lui remet le disque dur, on lui explique que les documents à analyser sont dans le répertoire « nouveau dossier ». Il se limite donc à cela.

[86]        La poursuivante lui suggère que les documents existent effectivement ailleurs et lui donne le chemin pour s’y rendre. L’expert s’assure de prendre les précautions appropriées, et fait ensuite l’exercice en salle de cour.

[87]        Il retrouve l’équivalent du chat # 5 crypté. Ce fichier ne semble pas avoir été fait sur le même ordinateur. L’auteur est Néoman tandis que sur le chat crypté qu’il a utilisé, c’est Maxime Roussy.

[88]        Le logiciel qui a créé ce fichier c’est « PDFcreator, version 1.2.1 » tandis que sur celui crypté c’est « PDF creator ».

[89]        Cette version 1.2.1, l’expert ne l’a pas retrouvée sur l’ordinateur Toshiba de M. Roussy. Ce fichier a été créé et modifié à la même date et à la même heure, soit le 29 novembre 2010 22h07 mais la version PDF creator, version 1.2.1. a été mise en marché le 18 mai 2011, soit après la date inscrite au document trouvé ailleurs sur le disque.

[90]        M. Roussy a donc utilisé un programme pour convertir un document PDF en 2010 en se servant d’un programme qui n’a existé qu’à compter de 2011.

[91]        L’expert précise que s’il avait vu ça avant, les conclusions de son rapport auraient été différentes. Il constate que même la signature est différente. À l’époque de son analyse, il ne s’en était pas soucié.

[92]        Il admet que ces fichiers ont été modifiés, ensuite enregistrés pour être changés dans les métadonnées pour donner les PDF (sauvegardés à nouveau ou modifiés), qu’on a protégés c.-à-d. ceux qu’on lui a remis.

[93]        Il ajoute que ça ne veut pas dire qu’ils n’ont jamais existé mais au niveau des métadonnées et la version du logiciel, ça ne  « match » plus.

[94]        La poursuivante parlant de ces huit chats, utilise le terme falsifié. La défense s’objecte à l’emploi de ce terme. L’expert reprend qu’il est incontestable que les dates ont été falsifiées et l’emploi du terme falsifié est approprié. Il semble aussi évident que la conversation a été créée après l’arrestation de M. Roussy car le logiciel n’existait pas à cette date.

[95]        Il est à noter que ces documents ont été remis à l’expert bien après l’arrestation de l’accusé (24 août 2012/27 avril 2011).

[96]        L’expert ajoute qu’au moment où il a fait son expertise, il y a des dates qu’il avait trouvées agaçantes. Il ne pouvait alors dire s’il s’agissait d’une erreur. Il réfère à la liste des 107 fichiers ajoutés à la fin de son rapport.

[97]        Il a été demandé à l’expert pourquoi une personne voudrait changer la date de modification ou de création si ce n’est pour faire croire qu’ils ont existé avant? L’expert n’a évidemment pas répondu à cette question. Selon lui, seule cette personne pourrait témoigner de ses intentions.

[98]        Alors que la poursuivante montre à l’expert Létourneau, une grande quantité de captures d’écran retrouvées sur la clé de la plaignante, ce dernier affirme qu’il est presque impossible de les modifier. Ce serait plus facile de construire un document de toutes pièces et ensuite de faire un imprime-écran.

[99]        Il y a révision des huit nouveaux chats trouvés (contre-preuve 1 à 8). On retrouve, aux chats 1, 4, 5, 6, 7, et 8, dans l’espace « titre », la mention : « 3. rtf » (l’équivalent d’un .doc). Il n’y a rien d’inscrit au même endroit sur les huit chats cryptés. Le titre est souvent le document d’origine. On y retrouve « Document 3.rtf ». Il est donc issu d’un document 3.rtf. Le document « rtf » sert de véhicule temporaire d’origine.

[100]     Le Tribunal conclut que tout porte à croire que M. Roussy est parti d’un document d’origine et s’en est servi comme gabarit pour bâtir les autres; et même que M. Roussy a fait 107 essais avant d’obtenir le résultat escompté.

[101]     Les huit chats utilisés par la défense ne suffisent pas à soulever un doute raisonnable permettant d’acquitter l’accusé.

[102]     Les conclusions du rapport écrit de l’expert ont d’ailleurs été modifiées verbalement à la fin de son contre-interrogatoire.

[103]     Les conclusions ne sont pas toutes en lien avec ces huit chats falsifiés. Elles parlent entre autres, des possibilités de modifier des fichiers de clavardage XML et HTLM et de corriger la date de modification par la suite. Elles touchent aussi aux fichiers que la plaignante aurait effacés sur son disque avant sa remise aux policiers. Bref, les autres conclusions de son rapport sont pertinentes.

[104]     Le Tribunal entend s’y attarder mais considère le faire lors de l’analyse du témoignage de la plaignante, des copies des échanges qui auraient eu lieu sur MSN ainsi que des copies des chats.

[105]     La plaignante porte plainte le 11 mars 2011 soit près de quatre mois après leur dernière rencontre à l’hôtel Hilton de Montréal et une journée avant le début des auditions par l’accusé, des candidates aux capsules télévisées de sa série Le blogue de Namasté.

[106]     La plaignante mentionne que le 20 novembre 2010, M. Roussy lui envoie un message pour changer l’heure de rencontre au Salon du livre de Montréal mais qu’elle quitte avant d’en prendre connaissance. Cette partie de son témoignage est corroborée par le courriel (P-104) en question. 

[107]     La policière Peggy Paradis dit qu’à partir du courriel —o.c————-@hotmail.com, elle a vérifié les courriels en provenance de M. Roussy. Entre le 13 décembre 2008 et le 8 février 2011, il y a 22 courriels de Maxime Roussy (P-132) qu’elle a cotés de « b » à « w ». Ce courriel (P-104) est un de ceux-là. Elle peut affirmer, à cause de l’adresse IP et de la demande faite à la compagnie Qitx relativement à cette adresse et cette heure, que l’hôtel Hilton, 900 rue de la Gauchetière Ouest, Montréal, est l’utilisateur. Il s’agit du système d’accès internet des 400 chambres, banquets et du système WIFI de cet hôtel.

[108]     La plaignante arrive donc au Salon du livre alors que M. Roussy ne l’attend pas. Il lui dit qu’il est fatigué. Elle peut tout de même le suivre à l’Hôtel mais il fera une sieste.

[109]     Durant cette soirée, elle dit qu’elle réalise que la famille de M. Roussy est très présente dans sa vie. Il parle avec sa conjointe au téléphone et l’appelle « Babe, mon amour, etc. ». Il parle avec ses trois filles sur la « webcam » et parle aussi au téléphone à son autre fille qui demeure à Montréal.

[110]     Elle se rend alors compte que l’accusé ne larguera pas tout pour elle et que cette relation ne va nulle part. Lorsqu’il dort, son cellulaire « flash » souvent. Il lui dit plus tard qu’il s’agit de sa conjointe. Elle est un peu fâchée et quitte ce soir-là, sans qu’il y ait de relation sexuelle entre eux.

[111]     Ceci est aussi corroboré par un autre courriel du 20 novembre 2010, 23 :46 :20 (P-105) vérifié par la même policière Peggy Paradis. On y retrouve de la part de Maxime Roussy : « Ça va? »

[112]     Dans les jours qui suivent, il tente d’entrer en contact avec elle. Ils recommencent à se parler sur MSN en décembre 2010, soit un mois plus tard.

[113]     Ceci est également corroboré de la même façon. Le 25 novembre 2010 (P-107), de la part de M. Roussy : « Can we still be friends? » Le 20 décembre 2010 (P-127), de la part de la plaignante : « (…) J’aimerais cependant discuter avec toi. Sur MSN, tantôt, vers 16h30. Évidemment, je ne m’attendais pas à ce que tu y sois. Il me semble tout de même que ça pourrait être constructif. » L’accusé répond le 21 décembre : « Désolé, je viens de lire ton message. Un autre rendez-vous? »

[114]     Si elle décide de porter plainte le 11 mars 2011, c’est que lors d’une des dernières conversations MSN, il l’informe qu’il choisira l’actrice qui tiendra le rôle principal entre autres, pour sa beauté mais aussi pour la grosseur de ses seins.

[115]     Elle réalise alors qu’elle n’est peut-être pas une exception dans la vie de l’accusé et qu’il pourrait faire la même chose avec d’autres adolescentes.

[116]     Le Tribunal ne retient pas cette version des faits. Selon les échanges qu’elle a mis en preuve, il appert que quelques jours avant qu’elle porte plainte, la plaignante insiste auprès de l’accusé (P-114 ; 4 mars 2011) pour qu’il trouve un moment pour la rencontrer; même très rapidement. Elle est prête à élaborer un plan. Elle sait qu’il vient à Montréal pour des auditons, relatives aux capsules télévisées de sa série Le blogue de Namasté. Il sera avec sa famille.

[117]     L’accusé est à cette période, très occupé. Le 10 mars, la veille de la plainte, il lui dit finalement que ça n’augure pas bien. Il sera disponible trop tard pour elle. Elle propose d’aller le rencontrer pour qu’ils se voient dans les toilettes. Bien que ceci soit dit un peu à la blague, la plaignante démontre une certaine insistance ou déception face au fait qu’il est possible qu’elle ne puisse pas le voir.

[118]     Ils discutent ensuite de la façon dont sera choisie l’interprète de Nam. Elle lui suggère pour sa beauté. Il lui répond pour la grosseur de ses seins en ajoutant ‘’Naaaaaan’’; ce qui apparaît clairement une blague, comme il y en a souvent dans les échanges déposés. Il ajoute qu’on a une idée à quoi ressemble Nam. C’est plus la manière dont elle s’exprime. Si elle capte le deuxième degré.

[119]     La plaignante réagit en le disant « pédo ». Elle ajoute qu’il est « in deep shit ». Il lui répond qu’il niaisait. Elle termine en disant qu’il est un manipulateur. Qu’il est dans la merde (P-116)

[120]     Contre-interrogée sur la date de sa plainte, la plaignante dit ne pas s’en souvenir, ni se souvenir s’ils pouvaient ou non se rencontrer le jour des auditions; ce qui est vraiment surprenant puisque c’est le lendemain que l’accusé doit commencer ses auditions. C’était un moment vraiment important dans sa vie et c’est d’ailleurs pour cette raison qu’il n’a pas le temps de la rencontrer.

[121]     S’ajoute à cela, le fait qu’au début de sa rencontre avec sa psychiatre, la plaignante en dise le plus grand bien. Elle fantasme même sexuellement sur elle (P-101; 16 octobre 2010). Lorsqu’elle considère sa psychiatre inadéquate, le ton change. Elle dira « G… c’est une osti de salope dépourvue de toute forme d’intelligence. » Lorsqu’il lui est demandé pourquoi elle est descendue si rapidement dans son estime, la plaignante explique qu’elle l’a trahie. Tout le monde la poignarde dans le dos. (D-35; 7 mars 2011).

[122]     À cette époque, la plaignante ne va vraiment pas bien, elle est hospitalisée sans son consentement. Elle ne fait plus confiance à personne. Le 10 mars 2011, elle est fâchée. C’est clairement pour cette raison qu’elle porte plainte. Elle est fragile émotionnellement. Elle est capable de mentir et d’inventer.

[123]     Le Tribunal se doit d’être particulièrement attentif à la preuve soumise et ne retiendra que ce qui est clairement corroboré.

[124]     Le Tribunal est fort conscient que si le consentement n’est pas en cause dans les crimes commis, c’est que le législateur tient à protéger les adolescentes qui du seul fait de leur âge, sont vulnérables.

[125]     Le Tribunal est également conscient que la loi veut empêcher tout adulte de profiter des adolescentes quel que soit leur état physique ou psychologique.

[126]     En interrogatoire principal, la plaignante fait un résumé des faits. Elle lit pendant plusieurs jours les documents produits en preuve prouvant les chefs de pornographie juvénile et de leurre. Elle décrit les dix rencontres et ce que l’accusé et elle ont alors fait. On constate dans les échanges produits, des retours sur ce qui a été fait lors des rencontres ou ce qui serait  fait dans le futur. La plaignante en parle et spécifie ce qu’il faut en comprendre.

[127]     Tout au long de cet interrogatoire en chef, la plaignante est d’un grand calme et semble tout à fait détachée par rapport aux événements qu’elle décrit. Elle est en plein contrôle de la situation. Elle ne semble jamais fatiguée ou prise au dépourvu.

[128]      Elle est à l’aise de poser des questions pour mieux comprendre avant de répondre.

[129]     Elle peut expliquer pourquoi elle a écrit telle ligne et que M. Roussy a répondu de cette façon. Elle explique les émoticones utilisés.

[130]     Lorsqu’elle ne se rappelle pas d’un détail, son journal est utilisé pour se rafraîchir la mémoire.

[131]     Lorsqu’elle décrit sa première relation sexuelle, son attitude surprend quelque peu. Elle dit, en s’adressant au juge : « (…) En fait, là, on a une relation sexuelle complète. Puis je veux préciser que, quand on a une relation sexuelle complète, il y a toujours cinq constantes. Donc, si jamais j’oublie d’en mentionner une, vous pouvez quand même prendre pour acquis que c’était ça. » (p. 36 n.s. 9 mars 2016)

[132]     La plaignante est une personne très intelligente. L’intelligence fait l’objet de plusieurs discussions dans les échanges déposés. Elle s’intéresse aux métiers qui demandent de l’intelligence, aux personnes qui le sont, aux phrases dites qui sont articulées, etc. Elle se dit première de classe. La période des examens, c’est celle qu’elle préfère. (Ce dernier élément est retrouvé dans un des échanges écrits déposés).

[133]     En contre-interrogatoire, elle est aussi en mesure de reprendre l’avocate en défense pour s’assurer de bien comprendre ou encore lui dire de la laisser répondre car elle n’a pas terminé sa phrase ou son explication.

[134]     Lorsque par contre, la défense lui demande de décrire le déroulement de la première relation sexuelle, en donnant la chronologie des cinq constantes dont elle a fait mention, elle en est incapable. Elle ne peut que dire qu’elles sont toujours présentes.

[135]     Il est vrai que les événements ont eu lieu fin novembre 2008 mais la première relation sexuelle est tout de même un événement marquant.

[136]     Si ces cinq constantes sont devenues un rituel, il est possible que pour les autres relations, elle ne sache pas exactement. Quant à la première relation sexuelle, c’est par contre quelque peu surprenant qu’elle dise ne pas s’en rappeler.

[137]     Elle indique qu’elle a bu un peu de vin rouge, qu’ils ont regardé le dictionnaire illustré des fantasmes et des perversions sur le lit et ensuite ne peut dire s’il la déshabille peu à peu ou au complet ou même ce qui se passe par la suite. Elle ne peut fournir aucune chronologie des événements. Elle ne se rappelle même pas s’ils ont pris des pauses pour discuter du futur. Elle se rappelle par contre qu’il y a eu un début de sodomie après qu’elle le lui ait demandé et qu’il lui a donné des claques sur les fesses. Ensuite, ils ont passé à autre chose mais ne se rappelle pas quoi.

[138]     Elle ne peut non plus, donner quelque détail que ce soit, sur la façon dont elle était habillée. Il semble toutefois, suite à un ré-interrogatoire, que ceci est écrit dans son journal intime.

[139]     Elle ne se rappelle également pas ce qu’elle fait en arrivant chez elle. Elle sait que ses parents n’étaient pas contents de l’heure à laquelle elle est arrivée et croit qu’elle est ensuite allée écrire son journal. Elle n’a toutefois pas de souvenir précis de ce moment.

[140]     La plaignante est une personne très organisée. On le voit entre autres, lors de la classification de sa clé USB remise aux policiers. Elle est perfectionniste. On le voit aussi lorsqu’elle corrige les fautes commises par elle ou M. Roussy lors des échanges. Elle s’intéresse aux détails.

[141]     Il est donc quelque peu surprenant qu’après avoir pris la peine de faire une mise en garde au tribunal pour que rien ne soit oublié, elle ne puisse donner plus de détails relativement à sa première relation sexuelle.

[142]     Il en est de même lorsque l’accusé utilise des objets lors de relations sexuelles. Il y a des événements qu’on peut qualifier de forts. La plaignante ne peut en donner la séquence même lorsqu’ils sont utilisés pour la première fois. Ceci vu la personnalité de la plaignante, suscite des interrogations.

[143]     La plaignante reconnait qu’avant de remettre la clé USB aux policiers, elle a effacé quelques dizaines de fichiers qui n’étaient pas pertinents pour les policiers car non en lien direct avec les accusations portées.

[144]     L’expert de la poursuivante a reçu comme mandat de rechercher les fichiers effacés de la clé USB. Il a trouvé dix fichiers effacés lisibles et 184 images lisibles dans la partie non utilisée de la clé.

[145]     L’expert de la défense a trouvé 880 images et fichiers effacés et mentionne que certains d’entre eux sont fort pertinents pour la défense.

[146]     Lors du témoignage de l’expert Létourneau, ce dernier mentionne avoir pourtant utilisé le même logiciel que l’expert de la poursuivante. Il ajoute qu’il a fait une copie « forensic ». De là, il ramasse tout, même les espaces vides. Il précise que ces espaces, il les veut car c’est là qu’on retrouve les fichiers effacés.

[147]     Ceci explique peut-être la différence quant à la quantité de fichiers et d’images trouvés par les experts.

[148]     Quoi qu’il en soit, la plaignante a été contre-interrogée avec des fichiers et des images retrouvés.

[149]     Sur un certain nombre de ces documents ou images, on constate qu’il y a des notes qu’elle a écrites dans l’espace réservé à l’adresse internet (l’URL). Elle peut aussi avoir surligné certains passages. Elle prend ensuite une capture d’écran et conserve le tout dans sa clé.

[150]     À titre d’exemple, sa sœur lui écrit. Elle parle de la relation tendue à la maison avec le père. (Ce dernier, selon la preuve, aurait été violent avec la plaignante.) La plaignante écrit : « Pour une fois, un courriel qui a eu plus d’importance que ceux de M. Je t’aime X. » (D- 43) ‘’M’’ représente Maxime. Un autre exemple : on voit sur YouTube, un vidéo du groupe Oasis, la chanson Whatever. La plaignante a écrit : « Lui parler. Être bien. Le mois d’août commence comme juillet, finalement ». (D-44).

[151]     Un autre encore : un blogue où elle va. Il y a la photo d’un bas de manteau et un texte en dessous. La plaignante a surligné un extrait de ce que la personne qui tient le blogue a écrit, soit « Et que je pourrais te blâmer, m’illusionner, me causer le plus grand des chagrins. Au fond, je suis qui pour être déçu à tout bout de champ. » Elle inscrit dans l’espace du haut : « Me le répéter, me le répéter, me le répéter. Parce que je tombe et ça a pas d’allure. Que ces phrases sont tellement justes. » (D-46) Finalement, le surlignement suivant : « Just remember I care when nobody else gave a fuck » et la phrase inscrite par la plaignante : « Je vais m’en souvenir M » (D-55) Elle explique en salle de cour qu’elle percevait à cette époque que Maxime se préoccupait d’elle alors que personne d’autre ne le faisait.

[152]     Elle dit aussi être allée régulièrement sur le blogue « Impunities » sur lequel on retrouve des images et des pensées d’une personne inconnue. Plusieurs captures d’écran de ce site ont été effacées (D-63 - 9 pages). À la page un, est surligné : « This is how I feel today » et on voit une scène plutôt chaotique. Page 2 : Une image d’une chambre d’hôpital avec un texte « Désolée, j’ai préféré te voir explosé que sans vie, moi aussi! et merci pour ta lettre, faisait longtemps que je n’avais pas vue ton écriture tremblante me chuchoter ses secrets. » La plaignante réfère au fait que ça faisait longtemps qu’elle n’avait pas chaté avec l’accusé (pour la main tremblante) et qu’elle préférait qu’ils se chicanent que de ne pas avoir de souvenirs de lui. (pour la première partie) Page 3 : « Il y a encore ton odeur dans mes cheveux. Je veux te sentir encore … », etc. Les images sont pour la plupart dures ou fortes. La plaignante explique que c’était les textes qui l’intéressaient, non les images. Ces textes qu’elle conservait lui faisaient penser d’une manière ou d’une autre à sa relation avec l’accusé.

[153]     Le Tribunal n’est pas surpris qu’aux yeux de la plaignante, ces phrases, fichiers et images n’ont pas de pertinence pour les policiers bien qu’ils soient toujours en lien avec l’accusé.

[154]     Par contre, d’autres fichiers et images permettent de constater que la plaignante est très jalouse et est très intéressée par tout ce qui touche l’entourage de l’accusé. Lorsqu’elle croit qu’une personne démontre un intérêt trop marqué pour l’accusé ou encore que l’accusé démontre un intérêt pour quelqu’un d’autre, elle n’hésite pas à créer un nouveau compte et utiliser un pseudonyme pour entrer en contact avec cette personne et vérifier de plus près ses craintes.

[155]     Quelques exemples : Elle prend plusieurs captures d’écran d’un blogue qu’une voisine de Maxime Roussy tient. Cette dernière parle des livres de l’écrivain et semble très impressionnée par son travail. Elle utilise des phrases tel : « Il est si proche de moi que je pourrais le saluer avec ma lampe de poche, la nuit. »

[156]     En cour, la plaignante avoue qu’elle est jalouse. Plusieurs commentaires apparaissent sur les captures d’écran tel : « Merde, merde, merde. Don’t get upset, don’t make a fool of yourself. » « My god. Je vais mourir, sérieusement. » « Encore! Reviens-en ! »« Je vais tu la tuer ou je vais tu pas la tuer? Hum ! », etc. Elle est aussi entrée sous un faux nom (François), sur le blogue de cette voisine pour lui poser des questions et se rassurer (D-64; 13 imprimés).

[157]     Elle va sur le blogue de la conjointe de l’accusé, s’intéresse à tout ce qu’elle dit sur lui. Elle surligne sur le blogue d’une amie de l’accusé, soit C. M., la phrase où elle dit que ce dernier est son meilleur ami (D-53).

[158]     La plaignante a aussi effacé beaucoup de photos de famille de l’accusé qu’elle prend sur le blogue de la conjointe de ce dernier. On peut y voir lui et ses filles à différents moments et à différents endroits. Quelques fois on ne voit que ses filles. Sur l’une d’elles où on voit un enfant sur un lit, elle explique qu’elle a pris une capture d’écran de cette photo car il est clair que l’enfant est sur le lit de ses parents. La plaignante voit donc la chambre dans laquelle M. Roussy et sa conjointe couche d’où l’intérêt alors de prendre une capture d’écran.

[159]     Il est curieux de constater que lorsque la question lui a été posée au tout début du contre-interrogatoire, à savoir si elle a regardé des photos de famille de l’accusé sur le blogue de sa conjointe, elle réponde oui mais qu’elle n’a jamais gardé sur son ordinateur ces photos ni ne les a transférées. Elle dira même : « Bien, comment je pourrais les supprimer si je les ai pas sauvegardées? » (p.214 n.s. 29 mars 2016).

[160]     On voit aussi qu’elle s’intéresse aux allées et venues de Maxime Roussy. On retrouve des captures d’écran de la vue qu’il dit avoir d’un hôtel ou motel où il est resté lors d’un Salon du livre, des sites où on indique à quelle école il est et à quel moment pour donner une conférence, ou encore d’une découpure de journal dans lequel on parle d’une intervention qu’il a faite pour dénoncer la loi du silence adopté par des dirigeants d’une école où un jeune homme aurait subi du harcèlement et serait par la suite disparu (D-58), etc. Il y en a beaucoup.

[161]     Il y a aussi création de nouveaux comptes pour parler à Maxime sous une autre identité afin de vérifier s’il l’a bloqué ou s’il s’agit simplement d’un « bug » sur l’ordinateur qui l’empêche de lui répondre. Elle va aussi vérifier  par exemple, la dernière fois qu’il s’est rendu sur son site « Pakkal ».

[162]     Il y a des captures d’écran de « Google map » qui donne la distance entre la maison de Maxime Roussy et celle de la plaignante. 

[163]     Tout ceci démontre sa passion envers M. Roussy, voire son obsession. C’est possible qu’elle ait effacé ces documents pensant qu’ils n’ont pas de lien direct avec les accusations. Par contre, ces fichiers sont effectivement fort pertinents pour la défense et ne sont pas au nombre de quelques dizaines.

[164]     La plaignante reconnait que tout ce qui a été transféré sur sa clé a un lien direct ou indirect avec l’accusé. Elle n’a transféré cependant que ce qui a un lien avec l’accusé.

[165]     La défense lui a montré environ 113 des 880 fichiers ou images trouvés par l’un ou l’autre des experts. À une exception près, ils peuvent tous être classifiés dans un des exemples donnés plus haut.

[166]     Deux documents méritent  une attention particulière. Le Tribunal en a déjà parlé au début de son jugement. Dans le récit de la plaignante relativement aux relations sexuelles avec l’accusé, elle mentionne que lors du 7e événement, le 10 avril 2010, alors qu’elle va seule au Salon du livre de Québec, ils ont regardé une partie de hockey au motel. C’est un élément qui est inscrit dans son journal intime.

[167]      La défense lui demande : « Si vous l’avez inscrit dans votre journal intime le lendemain, pourquoi la nécessité d’aller consulter l’horaire des Canadiens à un moment donné? » La plaignante répond : « Quand ça, j’ai consulté l‘horaire des canadiens? » (p.242 n.s. du 11 avril 2016)

[168]     On lui montre une capture d’écran effacée de sa clé, d’un horaire des émissions télévisées sur lequel la plaignante a surligné « SAM 10 AVR 2010 MAPLE LEAFS CANADIENS 19h00 » (D-65). Elle répond alors : « Oui. Bien, je peux répondre à votre question. Donc, la nécessité d’aller consulter l’horaire des Canadiens, c’était, dans le fond, pas parce que je le connaissais pas mais parce que c’était comme un souvenir pour moi. Donc, j’avais déjà expliqué que les captures d’écran, c’était comme un peu les souvenirs également. (p. 243 n.s. 11 avril 2016)

[169]     Elle ajoute avoir effacé ce document car il n’a pas de lien avec l’accusé. Elle n’avait écouté cette partie de hockey que quelques minutes avec lui.

[170]     Le deuxième document : La plaignante, en interrogatoire en chef, parle d’un t-shirt que l’accusé aurait porté lors de ce même Salon du livre; t-shirt qu’il lui aurait remis au moment où elle le quitte le lendemain matin du 7e événement avant qu’elle ne reparte chez elle. Au moment de la plainte, elle a toujours ce t-shirt. Les policiers ne jugent pas pertinent de le prendre pour analyse. Elle dit avoir aussi parlé de ce t-shirt dans son journal intime.

[171]     La défense lui demande alors pourquoi la semaine suivant l’événement a-t-elle besoin d’aller sur le site Ebay pour commander ledit t-shirt? La plaignante ne se rappelle pas spécifiquement du document effacé (D-66) mais se rappelle qu’elle avait demandé à Maxime sur quel site il avait commandé le t-shirt. C’est dans ses conversations MSN.

[172]     Elle est donc allée sur ce site par curiosité. Elle voulait savoir combien il coûtait. (p.247 n.s. du 11 avril 2011) C’est aussi un peu un souvenir. Elle se rappelle que l’accusé lui a donné le nom du site sur MSN car on peut voir que l’onglet est ouvert. Le Tribunal constate que dans le bas de la capture d’écran, il y a trois icônes MSN sur la barre des tâches. Il est donc possible qu’elle était effectivement en communication avec quelqu’un au moment où elle fait cette recherche.

[173]     Le t-shirt n’ayant pas fait l’objet d’analyse, on ne saura jamais s’il a ou non été porté par l’accusé avant de lui être remis ou si elle l’a acheté pour se fabriquer de la preuve. Il en est de même de l’horaire télé relative à la partie de hockey.

[174]     Tout repose sur la crédibilité de la plaignante et les deux experts ont mentionné qu’il est facile de modifier des séances de clavardage; l’expert en défense précisant « et ce, sans erreur de date apparente ». (page 58 de son rapport)

[175]     L’expert Létourneau mentionne aussi qu’il est possible de modifier un chat « live » mais il faudrait alors travailler très fort. Il dit qu’il « doit » y avoir une façon de faire mais admet qu’il ne sait pas comment. Il ajoute que tous les jours, il sort de nouveaux logiciels  mais ne dit pas qu’il en existait  de 2006 en 2011. Il  reconnaît finalement que c’est très difficile, voire impossible.

[176]     Il est également presque impossible de modifier une capture d’écran.

[177]     Ces informations sont importantes puisque la plaignante mentionne avoir procédé de deux façons. Le Tribunal en a parlé plus haut.

[178]     Pour ce qui est des conversations MSN, elle les conserve en les enregistrant sur son ordinateur dans un document appelé « historique ». Plus tard, elle utilise la fonction « couper-coller » pour les transférer sur une clé USB.

[179]     Selon les deux experts, il serait assez facile, avant de les transférer sur la clé, de modifier ces échanges situés dans le fichier historique.

[180]     Lorsqu’elle communique à travers des sites de « chats », la plaignante ne peut procéder de cette façon. Elle a donc téléchargé sur son ordinateur, un logiciel qui permet, en actionnant la fonction « imprime-écran », de prendre automatiquement les captures d’écran des conversations tant qu’elle ne désactive pas cette fonction.

[181]     Il est alors presque impossible de les modifier avant de les transférer. Selon l’expert Létourneau, il serait plus facile de construire de toutes pièces un document et de faire par la suite une capture d’écran. Le Tribunal est convaincu que c’est ce que M. Roussy a tenté de faire avec les huit chats évalués par son expert. Rappelons qu’il s’est fait prendre alors qu’il n’avait que huit faux chats à construire.

[182]     La quantité de captures d’écran soumise par la poursuivante est impressionnante. Les chances qu’aucune anomalie ne soit détectée sont faibles. L’expert Létourneau après en avoir constaté la quantité, en arrive aussi à cette conclusion.

[183]     L’ordinateur de la plaignante a été vérifié par les deux experts, aucun n’a pu conclure à modification ou falsification. Aucun n’a trouvé de traces de modification.

[184]     L’expert Bronsard mentionne avoir aussi vérifié les courriels et les captures d’écran des MSN. Il n’a trouvé aucune anomalie. L’expert Létourneau n’a pas fait l’exercice.

[185]     L’expert Létourneau, dans son rapport, attire toutefois l’attention du Tribunal sur une capture d’écran effacée par la plaignante (p.63 de son rapport).

[186]     Il explique d’abord que lorsqu’une personne veut modifier une session de clavardage, la date de modification du fichier XML indique la date de modification. Il faut donc corriger la date. Pour ce faire, il suffit de cliquer sur l’horloge en bas de l’écran à droite pour ouvrir l’utilitaire et appuyer sur le bouton « changer la date et l’heure » pour choisir la date et l’heure du fichier avant sa modification.

[187]     En quelques secondes, le fichier retrouve sa date d’origine. Il est impossible de retrouver ce changement de date dans le fichier lui-même. Il pourrait être possible de retracer un changement de date dans l’ordinateur. Dans le présent cas toutefois, l’expert dit que pour ce faire, il aurait eu besoin de l’ordinateur source, d’analyser l’ordinateur de la plaignante dans les premiers jours du dépôt de sa plainte non pas des années plus tard.

[188]     Sur l’image effacée retrouvée dans la clé USB de la plaignante, on voit au bas, à droite, l’horloge qui identifie l’heure et la date. L’expert demande alors pourquoi la plaignante aurait pris une capture d’écran de ces informations si ce n’est que pour se rappeler de l’heure et la date avant sa modification?

[189]     Il parle de toute une coïncidence puisqu’elle doit elle-même amener l’horloge, prendre une capture d’écran et l’effacer par la suite.

[190]     La poursuivante le ramène à la page 62 de son rapport où il indique « Correction de la date ». On y voit une horloge mais il y a juste au bas à droite de celle-ci, un espace où c’est inscrit « change date and time. » Sur celui retrouvé dans le disque de la plaignante, cet espace avec cette mention, n’existe pas. Elle lui montre ensuite plusieurs documents plutôt inoffensifs fournis par la défense sur lesquels on voit l’horloge (dont D-22, D-49, D-56, D-61).

[191]     L’expert indique alors qu’il semble que la plaignante ait utilisé cette façon de faire pour figer le temps dans l’espace.

[192]     Le contre-interrogatoire démontre à quel point il est important pour la plaignante de conserver tout souvenir pouvant figer ses états d’âme ponctuels. L’image effacée (D-30) retenue par l’expert comme incriminante pour la plaignante devient dès lors moins pertinente.

[193]     Lors du procès, relativement à l’arrivée massive de fichiers le 14 août 2010, sur la clé USB de 16 G remise aux policiers, les deux experts concluent que c’est tout à fait possible que la plaignante ait transféré le contenu des deux clés USB de 4 G sur la clé rouge. Par la suite, il y aurait eu des enregistrements directs et la clé aurait continué d’être utilisée jusqu’en février 2011. Rien ne semble anormal dans cette façon de faire d’où la correction de la onzième conclusion de l’expert de la défense.

[194]     Il ne dirait plus que ça prend des connaissances élevées pour être capable de déplacer des fichiers XML et HTLM tout en maintenant leurs apparences. Il explique que ça prend tout de même quelqu’un d’habile. Lorsque la poursuivante lui suggère des connaissances de base. Il répond un peu plus que ça.

[195]     Quant à la conclusion huit, il ne dirait plus que les deux utilisaient eBuddy comme l’indiquent les traces dans leurs ordinateurs. Il enlèverait le mot « utilisaient » puisqu’il n’y a que des traces.

[196]     L’expert de la poursuivante a pu retracer sur le disque dur du portable Toshiba de l’accusé, des fragments d’échanges réguliers de courriels entre le suspect et la plaignante ainsi que des fragments d’échanges à connotation sexuelle (P-140).

[197]     La personne qui contrôle l’ordinateur ne peut pas savoir que c’est dans son ordinateur à moins d’avoir des outils d’expert pour aller voir. Il dit que ça ne peut, de plus, avoir été créé de l’extérieur. Il n’a retrouvé aucun keylogger, aucun contrôleur d’écran, aucun virus sur le Toshiba de l’accusé.

[198]     Ces courriels toujours de l’avis de l’expert Bronsard présentent une certaine suite logique.

[199]     M. Bronsard en produit quelques-uns (P-141) datés du 25 août 2010 au 6 février 2011 dans lesquels on peut voir qu’il s’agit d’échanges entre l’accusé et la plaignante. On y retrouve que le bain tourbillon est un indispensable. On parle du désir de la plaignante d’avoir un enfant de l’accusé; la signature de « Maxx, », de jalousie (à la blague), « T’es pas UNE femme, t’es LA Femme. Nuance. » « Sextoooo. Quand vas-tu avoir le temps? » Il semble que s’il porte une moustache, elle ne veut plus jamais qu’il l’approche. Elle va établir un périmètre de sécurité. Et le viol n’est pas une option. Absolument pas! Il y a aussi utilisation de mots explicitement sexuels tout en discutant de faits quotidiens (entrée à l’hôpital demain, la plaignante a quand même lu 75 pages de Agoramania; « qu’est-ce que ça te dérange que je ne lise pas tes livres? », l’école, l’agoraphobie, il est soutien de famille et doit subvenir aux besoins de quatre enfants et de sa blonde.).

[200]     Sur ceux non répertoriés à connotation sexuelle par M. Bronsard, on en retrouve, (P-141) datés du 1er septembre 2010 au 16 novembre 2010 (la plaignante a donc seize ans). Il y a des phrases à connotation sexuelle mais moins explicites que les premières. Par exemple, la plaignante et l’accusé se donnent rendez-vous après l’école. Elle essaiera de « dealer » pour pouvoir entrer vers 23 h 30. Elle lui demande quand il repart. Il parle de la prendre en photos avec tout plein de sucreries, crème glacée molle, dure, trempée dans le chocolat. Il en a l’eau à la bouche. Elle lui suggère d’emprunter la MacBook de sa blonde une fois qu’elle sera couchée et ils pourront se donner rendez-vous vers minuit. Il lui dit : « aucune épilation à compter d’aujourd’hui sauf les jambes. » Il lui dit désolé pour hier soir, il a fallu que je me déconnecte rapidement. Je t’aime et j’ai très hâte de te revoir. Mxm. ». « Mon hospitalisation m’a clairement changée. » « Tu pourras tant que tu le voudras m’accabler de tous les mots de la Terre. Mais jamais celui de ne pas t’aimer sincèrement. »   « Vendredi, je serai disponible à partir de 17 h. Toi? Pas d’auto? Ah, bon… Comment on va se rendre à l’Hôtel? (on est alors en novembre 2010). « T’as reçu les billets d’avion pour lundi prochain? » « Je peux être un tantinet jaloux et vouloir que tu ailles voir ailleurs. »

[201]     Y a-t-il d’autres éléments corroboratifs?

[202]     Le 17 novembre 2005, la plaignante se rend au Salon du livre de Montréal, y rencontre l’écrivain Maxime Roussy lors d’une séance d’autographes. Il lui signe une dédicace sur un des livres de la série Pakkal « Les Larmes de Zipacna »: « ÀZ, La super graphiste ! Maxi ». La plaignante a alors onze ans.

[203]     Le 17 novembre 2007, elle se rend pour une deuxième fois au Salon du Livre de Montréal pour rencontrer Maxime Roussy. Elle a alors 13 ans 4 mois.

[204]     Elle apporte deux livres (P-15) qu’elle a elle-même achetés pour les lui faire dédicacer, soit « Circus Galacticus » dont l’histoire n’a pas été mise en preuve mais dont la page couverture permet de conclure qu’il s’agit d’un livre jeunesse. Selon un échange produit en preuve par la plaignante (P-44 page 7) elle ne l’a toujours pas lu en date du 15 mai 2008. La dédicace : « 17/11107 ÀZ, Enfin je t’ai revu! Maxime ». 

[205]     Elle apporte aussi « Du sang sur la chair d’une pomme » sur lequel la plaignante a été contre-interrogée. La dédicace : « 17/11/07 AZ, Une fille intelligente et fascinante. Continue d’être ce que tu es. Maxime ».

[206]     Du contre-interrogatoire, le Tribunal retient que ce dernier livre s’adresse à un public adulte. On suit une jeune fille de 15 ans à travers ses histoires de sexe. Il s’agit de scènes assez explicites. Il est aussi question de drogues et de trucs un peu violents selon ce qu’en dit la plaignante.

[207]     Dans un des chats produits en preuve, la plaignante demande à l’accusé s’il a fait tout ce qui est écrit dans ce livre (P-30; 29 février 2008; page3 sous scellé). Elle lui précise « OK, l’affaire du fusil dans le cul? » (P-30 page 11; sous scellé)

[208]     Que M. Roussy ait reçu ou non cet envoi ou encore ait participé ou non à ces échanges, la preuve révèle qu’à l’âge de 13 ans, la plaignante ayant lu ce livre, se présente au Salon du livre de Montréal pour demander à M. Roussy de le lui dédicacer.

[209]     Selon son témoignage, elle ne s’intéresse pas à la série Namasté qu’il écrit à titre d’auteur jeunesse. Elle n’a pas non plus lu « Circus Galacticus », aussi un livre pour adolescents ou préadolescents.

[210]     Dans un échange du 3 mars 2011 (D-35 page 4), écrit quelques jours avant la plainte, la plaignante dit ne pas pouvoir ouvrir un lien que l’accusé lui envoie au moment dudit message parce que sa psychiatre a demandé à ses parents d’installer un contrôle parental sur son ordinateur.

[211]     Elle explique alors qu’il s’agit d’une très longue histoire, à cause de Tocs sexuels. Elle aurait fait du cybersexe avec des inconnus. Ceci aurait duré pendant deux semaines avant qu’elle ne soit hospitalisée. Elle faisait cela il y a trois ans, avant le début de sa relation avec l’accusé. Ça faisait trois ans qu’elle n’en avait pas fait. C’était d’ordre compulsif, ce n’était pas volontaire. Elle avait rendez-vous avec certains d’entre eux. Elle parle de chats de BDSM, de vieux cochons qui voulaient la dominer. Si elle n’avait pas été hospitalisée, ce serait allé plus loin.

[212]     Le Tribunal retient cet échange. La plaignante le reconnaît et n’est pas à l’aise avec cette période. Il reflète une partie de sa vie avant sa rencontre avec l’accusé.

[213]     Le Tribunal conclut qu’au moment où elle se rend au Salon du Livre de 2007, elle va rencontrer l’homme qui a écrit « Du sang sur la chair d’une pomme » et non l’auteur jeunesse.

[214]     Le 15 décembre 2007, elle écrit dans son journal intime (D-36), « Je commence à aller sur des sites de tchat début novembre parce que je suis attirée par les hommes plus vieux et, sur les tchats, on ne se préoccupe pas de l’âge; il y a plein d’éphébophiles. Je commence à en parler à Max le 12 novembre… que je vais là-dessus et qu’il y a plein de pervers-éphébophiles là-dessus. »

[215]     À treize ans, la plaignante contrairement à la plupart des jeunes de son âge, est très informée sur le sexe, la violence et les relations sado-maso.

[216]     La preuve de faits similaires a été retenue pour une partie seulement, soit pour les chefs de leurre et de contacts ou incitations à des contacts sexuels.

[217]     L’accusé rencontre Y au Salon du livre de l’Outaouais en mars 2016. Elle est alors âgée de 16 ans. Pour les deux jeunes femmes, il se passe approximativement un ou deux mois entre le premier contact significatif et les échanges MSN relativement à leur âge et à la légalité de leur situation, leur beauté, leur maturité, leur intelligence, la description de leur corps, la demande de ce qu’elles pensent des poils féminins et des goûts spécifiques de l’accusé quant auxdits poils pubiens, la demande de photo ainsi que le renforcement positif quant à leurs complexes physiques. L’utilisation du terme « cyprine » est constatée dans les échanges avec chacune, qui en cherche la définition.

[218]     L’accusé envoie aux deux, des fleurs via des émoticones . Les heures de conversations sont similaires. Il y a d’abord discussion sur un possible rendez-vous dans un endroit public.

[219]     C’est dès le prochain Salon du livre pour chacune des adolescentes qu’une rencontre est fixée et qu’elles vont dans un motel. Pour la plaignante, le prochain Salon du livre est en novembre 2008, pour Y c’est en mars 2007.

[220]     Quant à la situation de dominant de la part de l’accusé ou de sado, c’est pour les deux, très peu de temps après la première rencontre qu’il en est question, bien que ce soit un peu à la blague pour Y mais avec une assurance certaine de la part de l’accusé.

[221]     Sans reprendre tout ce qui a déjà été dit dans le jugement sur l’admissibilité de la preuve de faits similaires, les deux jeunes filles sont d’abord impressionnées par le titre d’écrivain de l’accusé. Elles aiment toutes deux la lecture. Il y a proximité temporelle.

[222]     Y a mentionné ne pas connaître la plaignante et le Tribunal la croit.

[223]     De plus, à aucun endroit, on ne retrouve de traces démontrant que la plaignante ait cherché à connaître Y et le Tribunal est convaincu que si la plaignante s’était doutée de la relation entre Y et l’accusé, elle aurait cherché à en savoir plus.

[224]     La coïncidence est trop grande pour conclure que la plaignante a inventé ces échanges. Le Tribunal la croit.

[225]     Les experts ont déjà reconnu l’existence d’échanges entre l’accusé et la plaignante.

[226]     Le Tribunal conclut à l’existence du changement dans les échanges en décembre 2007 et à l’envoie de photos par la plaignante de ses seins, à l’accusé et ce, à la demande de ce dernier.

[227]     On retrouve cette demande de photo par l’accusé à la plaignante dès le début des échanges (P-23; 3 janvier 2008). Dans ces mêmes conversations, en réponse à cette demande, elle lui demande qu’il s’exhibe sur la Webcam; ce qu’il refuse. La photo de la plaignante a été déposée en preuve (P139; 27 et 28 octobre 2008) et également une photo du torse nu de l’accusé (P-144). L’expert Bronsard a retracé le chemin de la photo du torse nu ainsi que la conversation en lien avec cette photo. Il explique qu’il y a eu en réalité deux photos enregistrées et envoyées.

[228]     Une première a été enregistrée et envoyée le 5 octobre 2008 à 1h17. Cette photo a été envoyée de Pacal9enlibrairie vers le pseudonyme F—. Une dizaine de minutes plus tard, une deuxième photo a été prise plus claire cette fois, et envoyée. (1h29 min45s) L’expert a retrouvé l’extrait MSN. La conversation tourne autour des photos. Par exemple, avant l’envoi de la deuxième photo, la plaignante dit : « Et ouvrir la lumière, ça ne te tentait pas? » Là, Pacal répond : « Attends » et il envoie une autre photo avec plus de lumière. (n.s. 14 avril 2016 pages 140 et ss).

[229]     On retrouve dans ces échanges beaucoup plus par contre, que ce qu’allégué par Y. Le Tribunal y reviendra plus tard.

[230]     Dans certains échanges, soit avant le Salon du livre de Québec d’avril 2009, (événement # 4) on retrouve les préparatifs de cette rencontre. On constate, entre autres, qu’un plan est mis en place pour faire boire Z, le copain qui accompagnera la plaignante et qui doit normalement partager sa chambre avec elle.

[231]     Ce copain a témoigné. Son témoignage est crédible et ne se veut pas une copie conforme du témoignage de la plaignante. Lorsqu’il ne se rappelle pas, il le dit et n’en est pas mal à l’aise.

[232]     Il se rappelle que Maxime Roussy est allé les chercher au terminus d’autobus tel que prévu. Il a ensuite fait un arrêt à la S.A.Q. pour acheter du Southern Comfort. Ce n’était pas convenu d’avance. Il a proposé d’aller prendre de l’alcool pour boire en soirée. C’est Maxime qui a versé les verres. Il y a d’abord eu commande de pizzas. Les trois sont autour de l’ordinateur de l’accusé et écoutent des vidéos. À l’occasion, l’accusé se lève et va préparer les verres (alcool et jus). Il ne voit pas les quantités versées par l’accusé. Il ne se rappelle pas si l’accusé a bu mais se rappelle qu’il leur apporte des verres.

[233]     Il a peu de souvenir du reste de la soirée et croit que c’est à cause de sa consommation d’alcool. Ses souvenirs vont à peu près jusqu’à 21h ou 22heures. Un de ses derniers souvenirs est qu’il est sur son lit dans la chambre qu’il partage avec Z, alors que la plaignante et l’accusé sont étendus sur le lit de la plaignante.

[234]     Il se réveille le lendemain pour aller vomir dans la salle de bains de la chambre de l’accusé. Il ne se rappelle pas qui se trouvait dans la chambre de l’accusé à ce moment. La porte de la salle de bain de sa chambre étant fermée, il s’est tout de suite dirigé vers la salle de bain de la chambre de l’accusé. La porte communicante est alors ouverte.

[235]     Il précise que la plaignante n’est pas dans son lit lorsqu’il s’est réveillé.

[236]     Quand il ressort de la salle de bains, ils sont tous les deux à la sortie de la salle de bains, près de la porte communicante, dans la chambre de l’accusé. Ils s’assurent qu’il va bien.

[237]     Il ne se rappelle pas s’il a été malade à d’autres occasions ce soir-là ni s’il est sorti en soirée avant de revenir s’endormir. Il dit toutefois que ce n’est pas son style de faire quelque chose de non-sécuritaire comme celle-là.

[238]     Il s’est réveillé avec un mal de tête et un certain malaise. Il ne croit pas qu’il ait su d’avance que les chambres seraient communicantes.

[239]     Il se rappelle aussi une autre rencontre au Salon du livre de novembre 2009 (événement #5). Il est au restaurant Mikes avec son copain de l’époque, Maxime Roussy et la plaignante. La facture du restaurant Mikes (P-7) a été déposée en preuve.

[240]     Maxime Roussy et la plaignante font des blagues de sexe. Z participait un peu; son copain pas du tout. Il se rappelle que la plaignante a dit à l’accusé qu’ils pourraient aller dans la voiture pour avoir du sexe.

[241]     En contre-interrogatoire, il ajoute qu’il s’est posé la question sur une possible histoire sexuelle entre eux mais n’a jamais osé poser la question. L’accusé et la plaignante étaient assez proches. Ils faisaient assez souvent des blagues de nature sexuelle mais c’est la première fois que la plaignante en faisait qui concernait l’accusé et elle-même.

[242]     La plaignante lui posait beaucoup de questions sur l’accusé. Il considérait cet intérêt excessif ou prononcé. Il ne savait pas que la plaignante avait utilisé d’autres noms sur des sites pour obtenir plus d’information sur l’accusé.

[243]     À l’époque faisant l’objet des présentes, le témoin dit qu’il avait l’habitude de chater avec la plaignante. Il le faisait à travers le forum de discussion et aussi via MSN. Il se confiait beaucoup à elle mais elle, pas beaucoup. Les contacts ont cessé alors qu’il a seize ans et ce, jusqu’à ses dix-huit ans parce qu’il n’allait plus sur le forum de Pakkal. Ils ont repris contact par la suite alors qu’il a fait une dépression nerveuse et que Z lui a révélé être allée en psychiatrie.

[244]     Le Tribunal croit que les échanges (P-70 à P-73) en vue de la préparation du voyage sont réels, non inventés de toutes pièces, ni modifiés. Il est clair que le témoin a été manipulé, et ce, dans le but que l’accusé et la plaignante puissent avoir un moment d’intimité. Les échanges qui suivent ce voyage et qui touchent à l’intoxication du témoin ne font que confirmer ce qui s’est effectivement passé. Ils sont aussi plausibles.

[245]     Dans un de ces échanges, l’accusé s’informe pour savoir si ses parents sont au courant de sa présence. Il lui dit qu’il lui envoie une confirmation de la réservation de la chambre par courriel. Il est alors 17h27 :46. Il s’en va alors souper et se reparleront en soirée. À 20h27, ils se parlent à nouveau. La plaignante confirme la réception du courriel. Elle lui dit que ça semble pas mal censuré. Il lui répond que c’était plutôt professionnel.

[246]     Le courriel est produit (P-73). Il a été envoyé à 17h42 :39 Une annexe G-1 est produit avec ce dernier courriel. La policière Peggy Paradis a vérifié ce courriel. Elle a l’adresse IP et s’est adressée cette fois à Vidéotron, avec l’heure et la date. L’utilisateur est Maxime Roussy, l’adresse est la sienne ainsi que le numéro de téléphone. Le mandataire est M.-E  M, sa conjointe.

[247]     Il en est de même de la pièce P-72, un courriel envoyé à 16h52 :24, plus grivois relativement à la réservation. On peut lire : « Pas de problème. Motel Sodomie. Chambre 69. Tu veux que je leur parle pour les convaincre que tu vas loger quelque part (mais pas dormir)? La policière Paradis confirme pour les mêmes raisons qu’il s’agit aussi d’un courriel envoyé par Maxime Roussy.

[248]     Sur les échanges qui ont lieu un an plus tard relativement au prochain Salon du livre de 2010 auquel Z ne participera pas, on retrouve l’allusion au plan élaboré contre Z en 2009. On y dit qu’il n’y aura pas besoin de saouler quelqu’un; ce qui donne une certaine crédibilité à cet échange et à la préparation entre la plaignante et l’accusé de la prochaine rencontre au Salon du Livre de Québec de 2010.

[249]     Dans un des fragments de courriels (P-141 du 5 octobre 2010) que l’expert Bronsard a tiré de l’ordinateur de l’accusé, il y a une allusion au bain tourbillon : «  (…) Bon, j’avoue les bains tourbillons, c’est indispensable. Ta faute ! (…) » Il semble donc qu’elle réfère à une expérience passée et il y a effectivement eu un bain tourbillon en avril 2010 au Motel Bonaparte de Québec (événement #7). Ils en avaient aussi parlé dans les échanges préparatoires.

[250]     Dans un des échanges du 16 octobre 2010, donc peu de temps avant le dernier événement à l’hôtel Hilton, Maxime dit : « Pas. De. Bain. Tourbillon. Désolé. Je suis logé au hilton. » Cet échange a lieu quelques jours après le fragment décrit plus haut. Le bain tourbillon semble une plaisanterie récurrente entre eux. Ça donne de la valeur aux échanges.

[251]     Les billets d’autobus, le relevé téléphonique, la facture de l’hôtel Bonaparte avec l’inscription du numéro de chambre, le relevé de Visa (P-7) de l’accusé constatant un achat au Dépanneur Couche-tard le lendemain matin de l’événement # 7 ainsi que le relevé Rogers (P-6 A) qui corrobore l’appel deZ avec le cellulaire de Maxime pour appeler chez elle, donnent tous du poids au témoignage de la plaignante qui n’aurait pu donner autant de détails si elle n’avait pas été avec l’accusé à l’Hôtel Bonaparte en avril 2010

[252]     Des vingt-deux courriels dont la policière Paradis a pu obtenir une confirmation de Vidéotron, on en retrouve peu sinon un seul autre, où il y aurait conversation à connotation sexuelle. Il s’agit du courriel daté du 1er mars 2009 (P-69) : La plaignante demande  « Tu viens à Montréal quand? Ça commence à être long … ». Réponse le 2 mars : « Et ton secondaire 4…? (bonhomme sourire avec clin d’œil) » Réponse deZ : « T’es pas jaloux pour vrai ? Seigneur, t’as aucune raison de l’être : je l’aime pas et on n’a pas encore couché ensemble, alors. Qu’est-ce qu’il y a Max? »  Réponse de Maxime : « Mais non, je te taquinais, voyons. »

[253]     Certains échanges ajoutent à cela ou précisent l’existence de rencontres entre la plaignante et l’accusé. Une conversation du 21 novembre 2008 a été déposée en preuve par la défense pour démontrer que la plaignante peut copier-coller un écrit de quelqu’un d’autre pendant qu’elle chate avec l’accusé; ce qui peut prouver qu’elle peut facilement ajouter ce qu’elle veut sur un échange. Il s’agit d’une conversation du 21 novembre 2008, le soir après le premier événement.

[254]     La plaignante a « copié-collé » une conversation de son copain Z pour la montrer à l’accusé et en discuter avec lui. Z écrit un poème mais en même temps dit à la plaignante qu’il l’a vue partir tantôt avec Max. Elle demande à l’accusé «J’lui dis quoi? »  Il répond «La vérité! » Et ajoute « Dis-lui qu’il y avait des caméras partout » + un émoticone bonhomme grimace. La plaignante ajoute alors « Et là où il n’y en avait pas, y avait un monsieur. »

[255]     Ceci corrobore la description que fait la plaignante de ce qui s’est passé à l’allée et/ou retour de leur rencontre dans le stationnement de la Place Bonaventure (1er événement).

[256]     De plus, lors de cette première rencontre, les attouchements faits ressemblent beaucoup à ceux faits à Y lors de son premier contact sexuel avec l’accusé.

[257]     Si la plaignante veut inventer une histoire pour faire du mal à l’accusé, ceci ne peut arriver que vers la fin de leur relation.

[258]      Le Tribunal ne croit donc pas que la fiche de contraception orale d’urgence remplie le 23 novembre 2008, soit le lendemain de la première relation sexuelle alléguée, fait partie d’un plan dirigé contre l’accusé. À cette époque, la plaignante a 14 ans. Elle connaît le nom du motel, le numéro de chambre, la marque de l’auto utilisée pour s’y rendre. La facture du motel est déposée en preuve et on y retrouve la marque de l’auto. Finalement, elle va le lendemain à la pharmacie pour cette contraception qui est également produite en preuve.

[259]      L’événement #2 est prouvé.

[260]     Les témoignages de Y et de X ainsi que les documents décrits plus haut permettent de conclure que les échanges déposés et expliqués par la plaignante ont réellement eu lieu sans modification. Il y a preuve de leurre, contacts ou incitations à des contacts sexuels (événements #1,#2, #4, #5 et # 7) et agressions sexuelles (événements #1, #2, #4, # 5 et #7) entre juillet 2006 et le 21 novembre 2009.

[261]     Qu’en est-il des autres échanges déposés et des autres événements relatés?

[262]     À titre de corroboration, le comportement post délictuel de l’accusé est retenu. Bien qu’il n’ait pas témoigné, les huit chats falsifiés remis à son expert parlent d’eux-mêmes. M. Roussy a agi d’une manière compatible avec le comportement d‘une personne coupable.

[263]     Il est aussi en preuve (de par les admissions P-1) que M. Roussy a loué des chambres au Motel Métro situé au 9925 Lajeunesse , à Montréal pour les nuits du 22 au 24 novembre 2008 (événements # 1 et # 2), du 8 au 9 février 2009 (événement #3), du 22 au 23 novembre 2009 (événement # 6), du 2 au 3 juin 2010 (événement # 8) ainsi que la journée du 28 juin 2010 (événement # 9).

[264]     Sur les factures (P-2), on retrouve entre autres, des détails relatifs au véhicule utilisé par Roussy.

[265]     Pour l’événement #3, la facture dit « civic ». La plaignante parle d’une civic blanche. Pour l’événement #6, il n’y a aucune description sur la facture tandis que pour l’événement #8, est inscrit rouge G5. La plaignante parle d’une Pontiac rouge. Pour l’événement #9, est inscrit Caliber Blanc. La plaignante précise Dodge Caliber blanc.

[266]     Au Motel Bonaparte (événement # 7), la plaignante parle d’un véhicule Mazda 3 gris.

[267]     La plaignante n’a pas vu ces factures mais peut donner la description des véhicules et le numéro de la chambre de motel pour chaque événement.

[268]     En contre-interrogatoire, on a présenté à la plaignante plusieurs documents effacés. Bien qu’on ait mis en preuve qu’elle surveillait beaucoup M. Roussy, aucune preuve ou indice ne sont apportés qui démontreraient que M. Roussy a fourni sur ses blogues ou ailleurs, à quelque moment que ce soit, ces détails. Z qui a été contre-interrogé sur ce qu’on retrouvait sur les blogues de M. Roussy, mentionne qu’on retrouvait de l’information et des photos concernant ses visites dans les Salons du livre.

[269]     Une photo déposée par la défense, montre la vue que l’accusé avait de sa chambre, en région, lors d’un Salon du livre. Oui, quelqu’un ayant fait une recherche aurait pu trouver l’endroit. Mais la preuve ne révèle aucunement que c’était dans les habitudes de M. Roussy de présenter ce genre de photos.

[270]     Relativement à l’événement #9, la plaignante dit qu’ils ne sont pas restés longtemps à la chambre, M. Roussy devant quitter. Il est intéressant de noter que sur la facture du motel (P-2) on voit inscrit un montant de 32$ plutôt que 62$ qu’il avait déjà payé pour une chambre au même motel lorsqu’il y était demeuré une nuit.

[271]     La plaignante a quinze ans à l’époque. Elle ne conduit pas, n’a pas d’auto. Cette particularité corrobore sa version des faits à savoir qu’elle était bel et bien présente à cet endroit le 28 juin 2010.

[272]     La plaignante dit qu’une poignée de douche a été utilisée lors de la relation sexuelle. Selon ses dires, cette poignée a été enlevée facilement de la douche par l’accusé.

[273]     Les policiers se sont rendus au motel en question. Ils corroborent cette information. Ils ont pris une photo de l’objet (P-3 A). C’est un objet en métal lisse, peu large et de quelques pouces. Le Tribunal est convaincu que la plaignante a eu une relation sexuelle à cet endroit à cette date avec l’accusé.

[274]     Pour l’événement # 3, la plaignante identifie l’auto, le motel et son numéro de porte. Un échange courriel (P-65) confirme l’heure de rendez-vous. C’est l’adresse mroussy@maximeroussy.com qui envoie à f—.c————-@hotmail.com. La policière Peggy Paradis confirme l’échange. Elle ne peut toutefois corroborer auprès de Rogers le nom au dossier de « mroussy » parce que cette compagnie ne détenait plus les données IP pour 2009. Le courriel passe toutefois par Microsoft. L’expert Bronsard a témoigné sur le fait que pour modifier un IP il faut pirater Microsoft et on parle d’un piratage de haut niveau. Le Tribunal retient le courriel P-65.

[275]     On constate aussi par ses achats (Shell et Rôtisserie St-Hubert) que l’accusé était à Montréal le 8 février 2009 (P-7 Visa). Il n’y était pas le jour précédent et le jour suivant. Il y a demande de contraception orale d’urgence en pharmacie le 10 février 2009. Encore une fois, le Tribunal ne croit pas en un plan de la part de la plaignante qui remonterait à ses 14 ans.

[276]     Pour l’événement # 6 : La rencontre a lieu au motel métro. La plaignante a le numéro de la chambre. La carte de crédit de l’accusé confirme qu’il a réservé la chambre en fin d’après-midi et qu’il a stationné son automobile au Gestiparc de la Gauchetière. Les heures correspondent aux détails fournis par la plaignante (suivant les ajustements appropriés à faire). S’ajoute un livre de Woody Allen « Destins tordus » offert par Maxime Roussy (P-17) qu’il dédicace ainsi : « 22/11/09 ÀZ, Un présent en souvenir du Salon du livre de Montréal 2009.Mxm »

[277]     Il y a aussi le 23 novembre 2009, un autre passage à la pharmacie pour une contraception orale d’urgence (P-12 B). Il y a un an qui sépare cet événement du dernier (événement #10 ; moment où elle quitte la chambre un peu fâchée)). C’est trop pour retenir qu’il y a une mauvaise intention cachée derrière çà. Le Tribunal retient cet élément de preuve.

[278]     L’événement #8 : La plaignante se rappelle du nom du motel, vérifie le numéro de la chambre dans son journal, mentionne que M. Roussy n’était pas à Montréal pour très longtemps. Elle connaît la marque du véhicule utilisé et dit qu’ils se sont arrêtés au dépanneur Couche-tard pour acheter du lait au chocolat; ce qui est corroboré par le compte Visa de l’accusé sur lequel il y a une transaction de 3.74$.

[279]     Certaines conversations, de par leur contenu, amènent le Tribunal à conclure qu’elles ne peuvent avoir été modifiées. À titre d’exemple, le 21 juin 2010, (D-25), la plaignante parle avec l’accusé du comportement de son père ainsi que de ce qu’elle ressent, sans sous-entendu sexuel entre eux. Il y a une discussion intéressante.

[280]     À la fin de cette conversation alors qu’il lui dit qu’il est en retard de 45 minutes pour son rendez-vous et qu’il doit quitter, il ajoute « Je t’aime », avec un émoticone de cœur. Ils se fixent dès lors un rendez-vous pour converser vers 22 h.

[281]     Cette attitude démontre le lien fort existant entre les deux alors que la plaignante a 15 ans. Le Tribunal croit la plaignante lorsqu’elle mentionne avoir dit à l’accusé qu’elle l’aimait et que ce dernier a répondu de la même façon; et ce, très tôt dans la relation. On peut d’ailleurs constater dans un échange du 30 mars 2009, soit juste avant la rencontre au Salon du livre de Québec (événement #4) qu’il lui dit qu’il l’aime et ajoute un émoticone de bec. La plaignante répond : « Faudrait pas que je me trahisse » avec un bonhomme sourire. Il lui dit « Tu ne t’en tireras pas comme ça. » Elle explique en interrogatoire qu’il faisait référence au fait qu’il ne voulait pas qu’elle tombe amoureuse de lui. Le Tribunal conclut que ça fait partie du leurre. Cette conversation est tout à fait crédible.

[282]     Le Tribunal est convaincu qu’il y a une romance entre les deux; qu’ils communiquent régulièrement ensemble, à toutes sortes d’heures, qu’ils sont suffisamment intimes pour aborder n’importe quel sujet, et ce, avant que la plaignante ait atteint l’âge de seize ans. Par la suite, le lien semble encore plus fort. La plaignante envisage la vie commune, des enfants, une maison à Outremont. Il semble même après la première rupture du 20 novembre 2010 et la réconciliation de décembre 2010 qu’il y a espoir de voir l’accusé quitter sa conjointe ou à tout le moins qu’il vienne vivre à Montréal.

[283]     La plaignante subit aussi à la même époque, une deuxième hospitalisation. C’est sérieux. L’accusé se montre alors aidant. Ils discutent davantage comme des adultes.

[284]     Pour que la thèse de la défense ait une certaine valeur, il faut démontrer que la plaignante a de très bonnes connaissances en informatique. Bien qu’elle se définisse à l’âge de 10 ans comme une « crack » de l’informatique, la preuve ne le révèle pas. Les experts reconnaissent qu’il est assez facile de créer un blog. Il en est de même pour un site web. Ils admettent que le transfert sur la clé rouge est quelque chose de courant, non inhabituelle. Certains échanges déposés démontrent que la plaignante demande conseil à l’accusé pour des choses passablement simples. (D-67) Même sur le site Web Master (D-3), elle indique qu’elle n’est pas très bonne dans les langages de programmation.

[285]     Elle se vante toutefois d’être une bonne graphiste et l’accusé en novembre 2005, lors de la première rencontre au Salon du livre, inscrit à titre de dédicace : « ÀZ, La super graphiste ! » Il est certain qu’à cette époque, il ne la connaît pas vraiment. Cette dédicace a peu de valeur.

[286]     Même si la plaignante était bonne en graphiste, ceci ne permet aucunement de conclure qu’elle est douée en informatique, et ce, suffisamment pour modifier des conversations sur une période de quatre années ou encore construire des échanges sans que personne ne le remarque.

[287]     Si on ajoute à cela les commentaires des experts; le fait que M. Roussy qui avant d’être écrivain, était technicien en informatique, n’a pu concevoir huit chats parfaits, il est de moins en moins probable avec la preuve objective déjà retenue qu’il y ait eu modification ou falsification.

[288]     La poursuivante ajoute que si la plaignante a tout inventé, il faut aussi qu’elle ait inventé ses journaux intimes qui débutent avant 2006. Elle doit aussi avoir pensé à prévoir des passages intercalés dans ses échanges, des pauses pour l’obtention de réponses, des corrections des fautes immédiates qui paraissent sur l’échange et qui démontrent son obsession pour le français écrit, des bugs informatiques au moment où ils se parlent, des moments où la ligne est morte et que les deux parties doivent composer avec des temps d’attente, des espaces temps, des envois de courriels ou de liens pornographiques en même temps qu’ils en parlent dans les échanges et ses états d’âme sur une très longue période.

[289]     Le Tribunal retient cette prétention.

[290]     Les experts ont parlé longuement de la « to do list » sur laquelle, en principe, les deux parties auraient travaillé. Elle mérite finalement peu d’attention; la preuve révélant qu’elle a bel et bien été envoyée à l’accusé mais aucun des experts ne peut dire qu’il l’a retournée. La preuve révèle qu’elle a à tout le moins été lue par ce dernier.

[291]     Le Tribunal ne reprendra pas chacun des échanges déposés pour les analyser scrupuleusement. La défense a eu l’opportunité de contre-interroger la plaignante et le Tribunal ne peut conclure à fabrication ou modification. La poursuivante a eu l’occasion de revenir sur plusieurs de ces échanges en plaidoirie et d’attirer l’attention du Tribunal sur plusieurs passages pour démontrer l’invraisemblance d’une fabrication ou modification.

[292]     Le Tribunal est convaincu hors de tout doute raisonnable qu’il y a eu des échanges entre l’accusé et la plaignante de 2006 à 2011; que ces échanges comportaient des liens réciproques de vidéos à caractère pornographique, des scénarios sexuels, l’utilisation de lettres espacées dans certains cas pour déjouer les mécanismes de censure des sites internet utilisés, la description détaillée de scènes sado masochistes, l’envoi d’une liste détaillée de séquences de jeux sexuels sado masochistes.

[293]     Le Tribunal est également convaincu de l’envoi des photos des seins dénudés de la plaignante à l’accusé, la description de ce qu’ils pourraient se faire sexuellement l’un à l’autre et l’existence de neuf rencontres lors desquelles il y a eu attouchements de part et d’autre et/ou relations sexuelles. Dans un cas, il y a eu utilisation d’une poignée de douche à titre d’objet sexuel.

[294]     Dans tous les autres cas, il n’y a pas corroboration quant aux objets utilisés. Le dictionnaire des fantasmes et perversions sexuels, n’a pas été retrouvé. S’agit-il d’un fantasme ou une réelle lecture a été faite lors de la première relation sexuelle? Il est certain qu’avant même de rencontrer l’accusé, la plaignante était intéressée par le sujet.

[295]     Le Tribunal est convaincu qu’il y a eu lors de certaines relations sexuelles, utilisation d’objets. Le Tribunal n’est toutefois pas convaincu qu’il y en a eu autant qu’elle le décrit lors d’une même relation sexuelle.

[296]     Pour ce qui est des chefs de bris d’engagement par l’envoi de deux mises en demeure non signées et ne provenant pas d’un bureau d’avocat, de la preuve recueillie, il n’y a que deux personnes qui peuvent les avoir envoyées, soit l’accusé ou sa conjointe.

[297]     Le chemin du document des mises en demeure s’est d’abord retrouvé dans « personnel » et ensuite dans « Maxence ». On voit ici une combinaison réaliste de Maxime etZ. Dans le contexte, il est clair que la seule personne ayant un intérêt et étant prête à agir de la sorte, c’est l’accusé Maxime Roussy.

[298]     Pour ce qui est du bris d’engagement par l’envoi d’un courriel en utilisant l’identité d’une tierce personne fictive, l’adresse courriel a été créée la veille de l’envoi; ce qui apparaît invraisemblable pour une journaliste de carrière. La compagnie utilisée est Anchorfree, une compagnie qui offre des adresses IP par location mensuelle afin d’offrir l’anonymat aux gens qui envoient des courriels. La policière Alieh a fait une demande pour obtenir des informations sur le client de cette adresse IP. Elle n’a pu obtenir l’information parce que la compagnie ne garde aucune information sur leurs clients. Par contre, elle a obtenu de Yahoo, le numéro de téléphone qui a été utilisé pour la création du compte. La personne qui ouvre le compte doit tout de même donner un numéro de téléphone ou une adresse courriel pour que la compagnie puisse confirmer avant d’ouvrir le compte qu’il s’agit bien de la bonne personne. On doit vraiment recevoir la validation pour l’activation. On ne peut donc inventer un numéro de téléphone. Ici, le numéro trouvé est celui de cellulaire de Maxime Roussy.

[299]     De plus, les informations se retrouvant dans ledit courriel sont très personnelles, dont le nom de sa psychiatre traitante que l’accusé connaît fort bien.

[300]     Le Tribunal est convaincu hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l’accusé.

[301]     POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

# 500-01-054581-118 :

[302]     CONDAMNE l’accusé sur les chefs 1,2, 3, 4, 5, 7, 8, 9, 10 et 11;

[303]     PRONONCE UN ARRÊT CONDITIONNEL sur le chef  6 vu la condamnation sur les chefs 4 et 5;

#500-01-099252-139 :

[304]     CONDAMNE l’accusé sur les deux chefs d’accusation;

#500-01-100588-133 :

[305]     CONDAMNE l’accusé sur le chef tel que porté.

 

 

 

 

 

Me Caroline DULONG

Procureure pour le DPCP

__________________________________

DOMINIQUE B. JOLY, J.C.Q

 

Me Valentina CORSETTI et Me Lara KWITKO

Procureures de l’accusé

 

Dates d’audience : 7, 8, 9, 10, 11, 18, 21, 23, 24, 29, 30, 31 mars; 1er, 11, 12, 13, 14,15 avril; 4 mai; 13, 14, 15, 16 juin et 26, 27, 28 octobre 2016.

 

 



[1]     R. c. Hogg, 2014 CSC 18 (21 février 2014).

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