Gabarit CSF

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-0902

 

DATE :

11 septembre 2012

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LE COMITÉ :

Me François Folot

Président

M. Allen Faguy Mackenzie

Membre

Mme Silvie Di Pietro

Membre

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Mme NATHALIE LELIÈVRE, ès qualités de syndique adjointe de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

Mme LUCIE ST-PIERRE, conseillère en plans de bourses d’études (numéro de certificat 131649 et numéro BDNI 1447781)

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

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CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ A PRONONCÉ L’ORDONNANCE SUIVANTE :

-           Ordonnance de non-divulgation, de non-publication, de non-diffusion du nom des consommateurs dont les noms sont mentionnés à la pièce P-4.

[1]           Le 21 juin 2012, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s'est réuni au siège social de la Chambre sis au 300, Léo-Pariseau, bureau 2600, Montréal, et a procédé à l'audition d'une plainte disciplinaire portée contre l'intimée ainsi libellée :

LA PLAINTE

« 1.      À Saint-Émile, le ou vers le 12 mai 2009, l’intimée n’a pas utilisé des méthodes loyales de concurrence et de sollicitation en ne communiquant pas à J.G., lors de sa présentation des plans de bourses d’études offerts par Consultants C.S.T. inc., des informations complètes et objectives concernant Gestion Universitas et/ou les fonds d’épargne études de Universitas, dévalorisant ou discréditant Gestion Universitas et les produits qu’il offre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 10 et 19 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (c. D-9.2, r.7.1). »

[2]           D’entrée de jeu, la plaignante, représentée par son procureur, demanda au comité l’autorisation d’amender l’unique chef d’accusation contenu à la plainte de façon à ce qu’à la sixième ligne soient biffés les mots « ou discréditant ». Elle réclama de plus l’autorisation d’y retrancher la référence à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2).

[3]           Sa demande d’amendement n’ayant fait l’objet d’aucune contestation, elle fut accordée par le comité de sorte que le chef d’accusation amendé sur lequel s’est penché le comité doit se lire comme suit :

« 1.      À Saint-Émile, le ou vers le 12 mai 2009, l’intimée n’a pas utilisé des méthodes loyales de concurrence et de sollicitation en ne communiquant pas à J.G., lors de sa présentation des plans de bourses d’études offerts par Consultants C.S.T. inc., des informations complètes et objectives concernant Gestion Universitas et/ou les fonds d’épargne études de Universitas, dévalorisant Gestion Universitas et les produits qu’il offre, contrevenant ainsi aux articles 10 et 19 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (c. D-9.2, r.7.1). »

[4]           L’intimée enregistra ensuite un plaidoyer de culpabilité à l’égard du chef d’accusation amendé.

[5]           Après l’enregistrement dudit plaidoyer, les parties présentèrent au comité leurs preuve et représentations respectives sur sanction.

PREUVE DES PARTIES

[6]           Alors que la plaignante produisit une preuve documentaire cotée P-1 à P-5, elle ne fit entendre aucun témoin.

[7]           Quant à l’intimée, elle fit entendre M. Sylvain Bibeau (M. Bibeau), directeur de succursale chez Consultants C.S.T. inc. (C.S.T.) et témoigna elle-même.

[8]           Les parties soumirent ensuite au comité leurs représentations sur sanction.

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[9]           Après avoir résumé les faits pertinents, la plaignante déclara au comité que les parties s’étaient entendues pour lui présenter des « recommandations communes » sur sanction.

[10]        La plaignante mentionna alors qu’elles avaient convenu, à la suite du plaidoyer de culpabilité de l’intimée, de proposer au comité d’imposer à cette dernière le paiement d’une amende de 2 000 $.

[11]        Elle ajouta que les parties s’étaient de plus accordées pour suggérer au comité qu’elle soit condamnée au paiement des déboursés.

[12]        Au soutien de sa proposition, la plaignante invoqua la gravité objective de la faute commise par l’intimée soulignant que celle-ci portait atteinte à la confiance du public envers la profession.

[13]        Elle ajouta que le comportement reproché à l’intimée était un comportement clairement prohibé, cette dernière ayant choisi de dévaloriser un compétiteur dans le but d’orienter le client vers le produit qu’elle lui offrait.

[14]        Elle concéda que l’infraction ne concernait qu’un seul client mais signala qu’en 2005 la syndique d’alors, Mme Léna Thibault, après avoir reçu une plainte relativement à un possible comportement semblable de la part de l’intimée, avait pris la peine, lors d’une conversation téléphonique, de rappeler à cette dernière ses devoirs déontologiques et l’avait avisée « De ne pas avoir recours à des méthodes de sollicitation déloyales et de ne pas dénigrer un compétiteur. »

[15]        Elle rappela enfin qu’au moment des événements reprochés l’intimée avait dix (10) ans d’expérience, ce qui rendait sa faute d’autant plus difficilement excusable.

[16]        Elle termina en citant à l’appui de la recommandation conjointe des parties les décisions antérieures du comité dans les affaires Murphy[1] et Girard[2] insistant dans ce dernier cas sur les similarités avec la présente affaire.

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉE

[17]        Le procureur de l’intimée débuta ses représentations en indiquant au comité que bien que la conversation téléphonique rapportée entre la syndique de l’époque, Mme Léna Thibault, et l’intimée concernait un événement en apparence semblable à celui qui est aujourd’hui reproché à cette dernière, rien ne permettait de conclure que le reproche qui lui était alors adressé était justifié, la syndique ayant alors jugé simplement nécessaire de lui rappeler ses devoirs déontologiques et n’ayant d’aucune façon statué sur sa culpabilité.

[18]        Puis après avoir rappelé le contexte particulier de la faute reprochée à l’intimée, il affirma que cette dernière éprouvait à l’égard de sa faute des regrets sincères.

[19]        Il souligna que lors de son témoignage sa cliente avait expliqué les circonstances entourant l’infraction et qu’il ressortait dudit témoignage un contexte particulier de conflits entre elle-même et son ex-employeur et/ou ses représentants.

[20]        Il signala le témoignage de M. Bibeau qui a témoigné à l’effet qu’à la suite de la plainte portée contre l’intimée les dirigeants de C.S.T. avaient pris des mesures correctives, notamment en imposant à cette dernière un suivi de ses dossiers.

[21]        Il résuma quelque peu la situation en indiquant que l’intimée avait reconnu sans équivoque sa faute, qu’un seul événement était en cause et qu’aucun gain ou perte financière n’en avait résulté pour qui que ce soit.

[22]        Il indiqua que sa cliente comprenait bien le caractère répréhensible de ses agissements pour ensuite ajouter qu’elle était soucieuse de respecter à l’avenir les règles de déontologie de la profession.

[23]        Il termina en indiquant qu’il réclamait au nom de sa cliente un délai de six (6) mois pour le paiement de l’amende qui lui serait imposée, cette dernière éprouvant actuellement des problèmes de santé qui ralentissaient son rythme professionnel.

[24]        En réponse à cette dernière demande, la plaignante répliqua simplement qu’elle s’en remettait à la discrétion du comité.

MOTIFS ET DISPOSITIF

[25]        L’intimée n’a aucun antécédent disciplinaire.

[26]        À la première occasion, elle a enregistré un plaidoyer de culpabilité à l’égard de l’unique chef d’accusation (amendé) porté contre elle.

[27]        Lors de son témoignage devant le comité, elle a clairement indiqué qu’elle regrettait ses gestes fautifs.

[28]        De ceux-ci, il n’est résulté aucun gain ou perte financière pour qui que ce soit.

[29]        À la suite des événements, son cabinet et/ou son employeur se sont occupés de lui prodiguer une formation additionnelle et ont exercé un suivi sur sa pratique pendant une année.

[30]        Néanmoins, les propos tenus par l’intimée constituent clairement un acte dérogatoire aux articles 10 et 19 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières.

[31]        Au plan de la sanction qui doit lui être imposée, les parties ont soumis au comité ce qui dans le langage courant des avocats est qualifié de « suggestions communes ».

[32]        Or, lorsque comme en l’espèce les parties s’entendent pour présenter au comité de telles recommandations, ce dernier doit faire preuve de beaucoup de prudence avant de s’en dissocier.

[33]        Dans l’arrêt Dougas[3], la Cour d’appel du Québec a clairement indiqué que lorsque les parties représentées par leur procureur à la suite de pourparlers sérieux en sont arrivées à s’entendre pour présenter au tribunal des recommandations conjointes, leurs suggestions ne devraient être écartées que si le tribunal les juge inappropriées, déraisonnables, contraires à l’intérêt public ou est d’avis qu’elles sont de nature à discréditer l’administration de la justice[4].

[34]        En l’espèce, après révision du dossier, des témoignages entendus et après considération des éléments tant objectifs que subjectifs qui lui ont été exposés, le comité ne croit pas qu’il serait justifié de refuser de souscrire à la recommandation conjointe des parties.

[35]        La sanction qu’elles ont suggérée apparaît respecter les paramètres jurisprudentiels applicables et, en l’absence d’une situation qui le justifierait de s’écarter de la recommandation conjointe des parties, le comité y donnera suite.

[36]        Par ailleurs, la demande de l’intimée pour que lui soit accordé un délai pour le paiement de l’amende, compte tenu des circonstances et des arguments évoqués, ne parait pas déraisonnable. Le comité accordera donc à l’intimée un délai de six (6) mois pour l’acquittement de l’amende.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité enregistré par l’intimée sous le chef d’accusation amendé contenu à la plainte;

DÉCLARE l’intimée coupable du chef d’accusation amendé contenu à la plainte;

ET PROCÉDANT SUR SANCTION :

Sous l’unique chef contenu à la plainte :

CONDAMNE l’intimée au paiement d’une amende de 2 000 $;

ACCORDE à l’intimée un délai de six (6) mois pour le paiement de ladite amende lequel devra cependant s’effectuer au moyen de versements mensuels, égaux et consécutifs débutant le trentième (30e) jour de la présente décision sous peine de déchéance du terme et sous peine de non-renouvellement de son certificat émis par l’Autorité des marchés financiers dans toutes les disciplines où il lui est permis d’agir;

CONDAMNE l’intimée au paiement des déboursés, y compris les frais d’enregistrement conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions, L.R.Q. chap. C-26.

 

 

(s) François Folot   ___________________

Me FRANÇOIS FOLOT, avocat

Président du comité de discipline

 

(s) Allen Faguy Mackenzie_____________

M. ALLEN FAGUY MACKENZIE

Membre du comité de discipline

 

(s) Silvie Di Pietro____________________

Mme SYLVIE DI PIETRO

Membre du comité de discipline

 

Me Claudine Lagacé

BÉLANGER LONGTIN

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Robert Delorme

DUFRESNE HÉBERT COMEAU INC.

Procureurs de la partie intimée

 

Date d’audience :

21 juin 2012

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1]     Comité de surveillance de l’Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec c. Alan Murphy, no 95-0203, 95-0651 et 96-0580, décision en date du 11 mars 1997.

[2]     Me Micheline Rioux c. Bruno Girard, CD00-0327, décision sur culpabilité en date du 4 janvier 2002 et sur sanction en date du 17 juin 2002.

[3]     R. c. Douglas, 2002, 162 C.C.C. (3rd, 37).

[4]     Ce principe a été reconnu en droit disciplinaire. Voir à cet effet Maurice Malouin c. Maryse Laliberté, dossier 760-07-000001-010, décision en date du 7 mars 2002; Mathieu c. Dentistes, 2004 QCTP 027 .

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