Couture c. 9165-0119 Québec inc. |
2016 QCCQ 13096 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
BEDFORD |
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LOCALITÉ DE |
GRANBY |
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« Chambre civile » |
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N° : |
460-32-007923-161 |
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DATE : |
9 novembre 2016 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
MARTIN TÉTREAULT, J.C.Q. |
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ROBERT COUTURE |
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Demandeur |
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c. |
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9165-0119 QUÉBEC INC. |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Le demandeur, M. Robert Couture (« M. Couture »), poursuit la défenderesse, 9165-0119 Québec inc. (« 9165 »), en raison des problèmes qu’il a éprouvés avec son système de chauffage suite à l’installation d’une thermopompe par la défenderesse en octobre 2015.
[2] 9165 conteste ce recours en invoquant que les travaux correctifs ont été exécutés sans qu’elle en soit avisée. Elle conteste également les sommes réclamées.
QUESTIONS EN LITIGE :
[3] 1. 9165 doit-elle payer les sommes réclamées par M. Couture?
[4] 2. Si oui, quel est le montant dû?
ANALYSE
CONTEXTE FACTUEL
[5] 9165 est une entreprise œuvrant dans le domaine de la vente, du service et de la réparation de thermopompes et de systèmes de climatisation.
[6] Son principal actionnaire et dirigeant est M. Robert Beauvais (« M. Beauvais »).
[7] À la fin septembre 2015, M. Couture demande des soumissions de deux entrepreneurs pour changer la thermopompe à son domicile.
[8] Sans aller vérifier le système en place, 9165 soumet un prix avant taxes de 6 179$ pour la fourniture et l’installation d’une thermopompe.
[9] Comme le prix de 9165 était moins cher que celui de l’autre soumissionnaire, M. Couture retient les services de celle-ci.
[10] À la mi-octobre 2015, la thermopompe est installée. M. Couture paie le reliquat dû le 26 octobre sans soulever quelque grief que ce soit.
[11] Au début novembre, M. Couture et sa conjointe constatent que la fournaise au mazout ne fonctionne plus.
[12] Ils contactent alors M. Beauvais qui se rend rapidement sur place pour vérifier la source du problème.
[13] Selon M. Beauvais, le protectorelais de la fournaise au mazout serait brûlé. Il procède donc au remplacement de celui-ci, sans frais.
[14] Dans les jours qui suivent, constatant que la problématique n’est pas réglée, M. Couture contacte M. Beauvais qui revient faire des vérifications et changer à nouveau le protectorelais le 26 novembre, toujours sans frais. Le même scénario se reproduit les 4 et 9 décembre suivants.
[15] À la mi-décembre, comme le système de chauffage ne fonctionne toujours pas, M. Couture contacte une autre entreprise de climatisation (Roy Climatisation) pour résoudre le problème.
[16] Le technicien soulève alors quatre points possibles de défectuosité du système :
1. Thermostat non configuré;
2. Ajustement incorrect de la charge de gaz;
3. Branchement incorrect de la fournaise à l’huile;
4. Connexions inappropriées du transfert sur le système biénergie.
[17] Le technicien suggère donc de procéder à des vérifications plus approfondies pour régler la problématique.
[18] Après avoir obtenu le rapport du technicien, M. Couture contacte M. Beauvais afin qu’il vienne réparer le système.
[19] Le 18 ou le 19 décembre, M. Gervais revient sur place et procède à divers travaux, dont le remplacement du protectorelais et l’installation d’un autre relais. Il accepte également de payer la facture de Roy Climatisation pour la vérification du système.
[20] Le lendemain, le système est toujours défectueux.
[21] Le 21 décembre, M. Couture envoie une mise en demeure à 9165 afin de réclamer le remboursement des frais encourus et l’enlèvement du système installé.
[22] Le 6 janvier 2016, les parties se rencontrent à la résidence de M. Couture afin de permettre à M. Beauvais de faire examiner le système par son expert et tenter de régler le conflit.
[23] Lors de sa visite, cet expert, M. Mario Larochelle, conclut que la fournaise de M. Couture est normale et fonctionne très bien. Il constate toutefois que le « transformeur » du brûleur à l’huile chauffe, mais considère que ceci est causé par l’usure de la fournaise, alors âgée de 19 ans.
[24] M. Larochelle reste environ une heure sur place puis il quitte les lieux. M. Beauvais et son fils demeurent encore pendant quelque temps pour tenter de régler le problème. Ils quittent en fin d’avant-midi, non sans que M. Gervais offre une somme de 100$ à M. Couture pour l’achat d’un transformateur, ce que M. Couture refuse.
[25] Comme le problème n’est toujours pas réglé, M. Couture fait appel à Climatisation Duplessis pour le résoudre.
[26] Le 7 janvier, Climatisation Duplessis se rend chez M. Couture et procède au remplacement du thermostat et du relais biénergie tout en effectuant certains réglages pour s’assurer du fonctionnement du système.
[27] Après cette intervention, le système fonctionne normalement.
LE DROIT
[28] Le contrat par lequel un commerçant vend une thermopompe à une personne physique en y incluant l’installation est un contrat de consommation régi par la Loi sur la protection du consommateur (« LPC »)[1].
[29] Bien que selon une certaine jurisprudence, le contrat pour la vente et l’installation d’une thermopompe a pu être qualifié de contrat mixte de vente de biens mobiliers destinés à être ultérieurement incorporés à un immeuble et de fourniture de service[2], depuis l’entrée en vigueur du Code civil du Québec (« C.c.Q. »), ce contrat devrait être qualifié de contrat de vente et non d’entreprise ou de services si l’ouvrage ou le service n’est qu’un accessoire par rapport à la valeur des biens fournis[3].
[30] Selon l’article 37 LPC, le bien qui fait l’objet d’un contrat de vente doit être tel qu’il puisse servir à l’usage auquel il est normalement destiné.
[31] L’article 1726 C.c.Q. prévoit que le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rend impropre à l’usage auquel on le destine ou qui diminue tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné un si haut prix, s’il les avait connus.
[32] Dans le cas de vente par un vendeur professionnel, l’existence d’un vice au moment de la vente est présumée lorsque le mauvais fonctionnement du bien ou sa détérioration survient prématurément par rapport à des biens identiques ou de même espèce[4].
[33] Le vendeur professionnel doit connaître la compatibilité du produit vendu et installé[5].
[34] Par ailleurs, outre les conditions prévues à l’article 1726 C.c.Q., la loi impose à l’acheteur l’obligation de dénoncer :
« 1739. L’acheteur qui constate que le bien est atteint d’un vice doit, par écrit, le dénoncer au vendeur dans un délai raisonnable depuis sa découverte. Ce délai commence à courir, lorsque le vice apparaît graduellement, du jour où l’acheteur a pu en soupçonner la gravité et l’étendue.
Le vendeur ne peut se prévaloir d’une dénonciation tardive de l’acheteur s’il connaissait ou ne pouvait ignorer le vice. »
[35] Cette obligation de dénonciation avant d’exécuter des travaux est une condition de fond du recours[6]. Toutefois, il existe trois exemptions à l’obligation de dénoncer avant le début des travaux : 1) cas d’urgence, 2) répudiation par le vendeur de sa responsabilité, ou 3) renonciation à se prévaloir du défaut de préavis[7].
[36] Malgré le texte de l’article 1739 C.c.Q., les tribunaux ont reconnu que l’absence de dénonciation écrite n’était pas nécessairement fatale au recours de l’acheteur[8]. Ce n’est que lorsque l’absence de dénonciation a privé le vendeur de la possibilité de vérifier l’existence, la gravité du vice et de la réparer que ce dernier pourra se prévaloir de ce moyen de défense[9].
[37] Enfin, comme les dispositions relatives à la garantie légale de qualité ont été adoptées principalement afin de protéger l’acheteur, les conséquences du défaut de dénonciation dans un délai raisonnable doivent correspondre à un préjudice réel pour le vendeur, et non à un simple préjudice de droit, afin de pouvoir justifier l’irrecevabilité du recours intenté par l’acheteur[10].
APPLICATION DU DROIT EN L’ESPÈCE
1. Quant à la responsabilité de 9165
[38] Il ne fait aucun doute que 9165 est un vendeur professionnel au sens de l’article 1729 C.c.Q. En effet, elle s’affiche comme une entreprise œuvrant dans le domaine de la vente, du service et la réparation de thermopompes et de climatisations.
[39] 9165 est également un commerçant au sens de la LPC.
[40] Les témoignages de M. Couture et de sa conjointe confirment que le système de chauffage, qui fonctionnait normalement avant l’installation de la thermopompe en octobre 2015, a commencé à éprouver des problèmes dès le mois de novembre, soit quelques semaines à peine après l’installation de ladite thermopompe.
[41] Tant M. Couture que M. Gervais ont confirmé que ce dernier a fait plusieurs interventions sur le système de chauffage entre les mois de novembre 2015 et janvier 2016. M. Gervais a changé le protectorelais à cinq reprises sans jamais réclamer quelque somme que ce soit à M. Couture ni soulever l’absence de responsabilité de 9165 à l’égard des problèmes constatés.
[42] Qui plus est, M. Beauvais a même accepté de payer la facture au montant de 356.42$ de Roy Climatisation pour la vérification des installations faite le 14 décembre 2015. Bien que M. Beauvais ait remis un chèque pour ladite somme, un arrêt de paiement a été émis quelques jours plus tard, soit après qu’il ait reçu une mise en demeure de M. Couture.
[43] Par ailleurs, le rapport de Climatisation Duplessis déposé sous P-7 et le témoignage de M. Couture confirment que, suite à l’intervention de janvier 2016, le système de chauffage n’a plus été problématique.
[44] Ces preuves permettent de douter du bien-fondé du témoignage de M. Larochelle à l’effet que seul l’âge du transformateur sur la fournaise était à l’origine du problème.
[45] Dans ces circonstances, le Tribunal considère que 9165 a contrevenu à ses obligations à titre de commerçant et vendeur professionnel, et ce, tant en vertu de la LPC que du C.c.Q.
[46] Quant à l’absence d’avis avant de faire effectuer les réparations, ce moyen ne peut être retenu.
[47] En effet, la preuve démontre que 9165 a été avisée à plusieurs reprises de l’existence d’un problème avec le système.
[48] M. Beauvais s’est rendu au domicile de M. Couture à cinq reprises après l’installation de la thermopompe pour tenter de corriger les problèmes constatés. À chaque fois les interventions se sont avérées infructueuses.
[49] À la dernière visite du 6 janvier 2016, aucune intervention efficace ne sera faite. Au contraire, l’expert retenu par 9165 conclut que le système fonctionne « très bien »[11]. Il suggère cependant de remplacer le « transformeur » de la fournaise qui a 19 ans.
[50] Le Tribunal considère que 9165 a pu vérifier l’existence et la gravité du vice affectant le système avant que des réparations n’y soient effectuées.
[51] Au surplus, M. Couture pouvait déduire de l’attitude de M. Beauvais, de son fils et de l’expert lors de la rencontre du 6 janvier 2016 qu’aucune autre intervention ne serait faite sur le système. Dès lors, aucune mise en demeure additionnelle n’était nécessaire[12].
[52] Enfin, aucune preuve de préjudice n’a été faite par 9165 relativement à l’absence de mise en demeure additionnelle avant l’exécution des travaux[13].
2. Évaluation des sommes dues
[53] M. Couture réclame un montant de 3 569.07$.
[54] De cette somme, M. Couture n’a pu fournir de preuve adéquate, notamment de factures, relativement aux frais suivants :
1. Frais de mise en demeure : 20$;
2. Relais de protection fournis : 100$;
3. Frais de déplacement : 50$.
[55] Le Tribunal ne peut donc accorder ces montants.
[56] M. Couture réclame également 650$ qui correspondrait à une subvention que 9165 aurait omis de lui offrir avant l’installation de la thermopompe. Encore une fois, aucune preuve n’a été soumise au Tribunal pour justifier l’octroi de ce montant. Cette partie de la demande est par conséquent rejetée.
[57] Quant aux demandes de M. Couture relatives au remboursement de 356.42$ pour les frais de vérification de Roy Climatisation et ceux 1212.65$ de Climatisation Duplessis pour corriger le problème affectant le système de chauffage, elles doivent être accordées. En effet, outre l’engagement de 9165 quant au remboursement de la somme de 356.42$, ces montants sont directement en lien avec le défaut de 9165 de remplir ses obligations.
[58] Quant à la somme de 1500$ pour inconfort, perte de jouissance et inquiétude, le Tribunal usant de sa discrétion en la matière[14], accorde une somme de 500$ considérant notamment les nombreuses démarches que M. Couture a dû effectuer ainsi que les problèmes de chauffage qu’il a éprouvés de novembre 2015 à janvier 2016.
[59] En résumé, le Tribunal conclut que les montants dus à M. Couture s’élèvent à 2 069.07$.
[60] PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[61] ACCUEILLE en partie la demande.
[62] CONDAMNE 9165-0119 Québec inc. à payer à M. Robert Couture la somme de 2 069.07$ avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter du 17 février 2016, date de notification de la mise en demeure.
[63] AVEC LES FRAIS JUDICIAIRES en faveur de M. Robert Couture.
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__________________________________ Martin Tétreault, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
11 juillet 2016 |
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[1] RLRQ, c. P-40.1; Systèmes Techno-Pompes inc. c. La Manna, 1993 CanLII 4388, p. 11 (C.A.).
[2] Id., p. 10; Systèmes Techno-pompes inc. c. Tremblay, 2006 QCCA 987, par. 27.
[3] Art. 2103 C.c.Q.; Vincent KARIM, Contrats d’entreprise (Ouvrages mobiliers et immobiliers : construction et rénovation), contrat de prestation de services et l’hypothèque légale, 2e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2011, par. 412.
[4] Art. 1729 C.c.Q.
[5] Dubé c. Boulevard du Pare-brise inc. (Docteur du Pare-brise), 2010 QCCQ 3269, par. 11.
[6] Facchini c. Coppola, 2013 QCCA 197, par. 42.
[7] Id., par. 47.
[8] Riendeau c. Guy Brière Courtier d'assurances inc., 2012 QCCS 6071, par. 122 à 124 (confirmé en appel : 2014 QCCA 1809).
[9] Id., par. 124.
[10] Claude Joyal inc. c. CNH Canada Ltd., 2014 QCCA 588, par. 35 (demande d’autorisation de pourvoi à la CSC rejeté : 2014 CanLII 38978 (CSC)).
[11] Voir rapport D-5.
[12] Facchini c. Coppola, 2013 QCCA 197, par. 47.
[13] Claude Joyal inc. c. CNH Canada Ltd., 2014 QCCA 588, par. 35.
[14] Ostiguy c. Goyer, 2012 QCCA 2130, par. 6.
AVIS :
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