Audesse et Ministère de la Sécurité publique |
2017 QCCFP 19 |
COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DOSSIER Nos : 1301735 et 1301740 |
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DATE : |
14 juin 2017 |
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DEVANT LA JUGE ADMINISTRATIVE : |
Me Nour Salah |
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KARINE AUDESSE |
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Appelante |
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Et |
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MINISTÈRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE |
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Intimé |
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DÉCISION |
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(Article 33, Loi sur la fonction publique, RLRQ, c. F-3.1.1) |
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[1] L’appelante, Mme Karine Audesse, a déposé deux appels devant la Commission de la fonction publique. Elle conteste, en vertu de l’article 33 de la Loi sur la fonction publique[1] (la Loi), son relevé provisoire de fonctions et son congédiement disciplinaire.
[2] Le ministère de la Sécurité publique (le Ministère) soutient l’avoir congédiée puisque, pendant une période de 18 mois, elle a falsifié délibérément le système de gestion des horaires pour une durée totale de 80 heures, en effaçant des congés dont elle avait déjà bénéficié.
[3] En agissant ainsi, le Ministère affirme qu’elle a irrémédiablement rompu le lien de confiance qui les unissait. Il estime que ces actions sont d’autant plus inacceptables en raison des fonctions d’encadrement de Mme Audesse auprès du personnel d’agents
de la paix. En effet, elle occupe un poste de chef d’unité à l’Établissement de détention de Québec (l’Établissement).
[4] Mme Audesse ne conteste pas les faits, mais invoque des problèmes personnels et médicaux qui ont obstrué son jugement ne lui permettant pas de comprendre la gravité de ses actions.
Les faits
[5] Mme Audesse a travaillé douze ans à l’Établissement en tant qu’agente des services correctionnels avant d’être nommée chef d’unité en novembre 2015. Elle aurait normalement obtenu sa titularisation à la fin de son stage probatoire au mois de novembre 2017.
[6] Le 8 novembre 2016, Mme Chantal Casavant, la directrice adjointe intérimaire de l’Établissement et supérieure immédiate de Mme Audesse, a été informée que celle-ci aurait apporté des modifications irrégulières dans le système de gestion des horaires, S-PRO.
[7] C’est dans ce système que l’on retrouve l’ensemble des postes occupés par les agents et les chefs d’unité ainsi que leurs horaires et leurs quarts de travail. Les chefs d’unité y ont librement accès et peuvent y inscrire, pour eux et pour les agents sous leur supervision, les vacances, les congés en temps compensé, les heures supplémentaires, etc.
[8] S-PRO est accessible, avec une connexion Internet, à partir de leurs postes de travail et même de l’extérieur de l’Établissement. Il conserve en mémoire les données saisies et le nom des personnes qui les ont effectuées.
[9] Le 9 novembre 2016, un communiqué du Ministère est transmis par courriel à l’ensemble des chefs d’unité de l’Établissement :
[…] Je vous informe, par la présente, que vous ne devez plus faire d’entrées de données dans S-PRO lorsqu’il s’agit de modifier votre propre horaire de travail (absence, heures supplémentaires, changement d’horaire ou autre). […] vous devez vous adresser à la gestion des horaires, en privilégiant le courrier électronique. […]
[10] Le 10 novembre 2016, d’autres irrégularités sont décelées dans les absences de Mme Audesse. Il semble qu’elle inscrit des congés en vacances ou en temps compensé dans S-PRO, en bénéficie, puis les efface du système rapidement.
[11] Les 10 et 11 novembre 2016, des démarches plus sérieuses sont entreprises afin de vérifier l’étendue des falsifications. L’ensemble des rapports de supervision de Mme Audesse et des autres chefs d’unité avec qui elle était censée travailler ont été analysés. Le Ministère veut notamment vérifier si le nom de Mme Audesse y était mentionné, afin de prouver qu’elle a bel et bien travaillé ces jours-là.
[12] Entre temps, toujours durant la journée du vendredi 11 novembre 2016, M. Christian Thibeault, directeur des services correctionnels de l’Établissement a également été avisé de la situation. Il en informe sa supérieure, Mme Élaine Raza, la directrice générale adjointe au programme à la sécurité et à l’administration dans l’Est-du-Québec.
[13] Les recherches effectuées valident que Mme Audesse est absente de l’Établissement les jours en question. De plus, d’autres jours sont venus s’ajouter à la liste de ses absences.
[14] Ces preuves de falsifications en main, M. Thibeault communique avec le Service des relations professionnelles et de la santé et sécurité du Ministère pour obtenir des conseils sur la marche à suivre dans un tel cas. M. Benoît Huard conseiller en relations professionnelles lui dit qu’il en parlera avec son équipe et qu’il lui donnera une réponse lundi en matinée. M. Thibeault préfère attendre ses conseils avant d’intervenir auprès de Mme Audesse.
Le relevé provisoire du 14 novembre 2016
[15] Lundi matin, le 14 novembre 2016, M. Jason Charest, conseiller en relations professionnelles au sein du même service conseille à M. Thibeault de relever provisoirement de ses fonctions Mme Audesse compte tenu de la gravité des faits qui lui sont reprochés. M. Thibeault entérine cette décision. Un modèle de lettre lui est envoyé. Il prend le temps de préparer une version finale et convoque Mme Audesse à son bureau pour 14 h 30. Mme Casavant assiste également à cette rencontre.
[16] En arrivant, Mme Audesse est informée que plusieurs irrégularités ont été identifiées dans S-PRO concernant son horaire de travail et ses absences et qu’elle est relevée provisoirement de ses fonctions. Mme Audesse prétend, pour sa part, que lors de cette rencontre peu d’informations lui ont été données quant aux raisons justifiant le relevé provisoire et que ni son horaire de travail ni ses absences n’ont été mentionnés.
[17] Mme Audesse est déconfite, surprise et fortement ébranlée. On lui annonce qu’elle pourra s’exprimer bientôt dans une rencontre d’équité procédurale où tous les détails lui seront transmis et expliqués. Au moment de partir, Mme Casavant, inquiète de la voir dans cet état, la suit. Elle lui conseille de contacter le Programme d’aide aux employés ou encore la Fraternité des cadres agents de la paix des services correctionnels du Québec, et lui demande si elle veut être accompagnée à son domicile. Mme Audesse lui répond qu’elle se sent fragile et qu’elle a peut-être modifié une fois son horaire, mais qu’elle souhaitait remettre ses heures plus tard.
[18] Mme Audesse ne comprend pas ce qu’elle a bien pu faire pour mériter un relevé provisoire. Elle essaie, sans succès, de se remémorer si elle a commis des erreurs lors de sa dernière soirée de travail. Un de ses collègues, M. Carl Coulombe, la contacte et lui apprend que M. Thibeault vient d’informer ses collègues de travail de son relevé provisoire et que tout le monde se demande ce qu’elle a fait. Elle l’ignore elle-même.
[19] M. Coulombe la rejoint chez elle pour la réconforter et en apprendre plus sur les raisons de son relevé. Mme Audesse ne pouvant toujours pas lui répondre, il lui parle un peu plus durement et la « bombarde » de questions. Enfin, elle comprend que c’est à cause des absences qu’elle a effacées dans S-PRO qu’elle a été relevée provisoirement.
[20] Mme Audesse contacte M. Marco Cayouette de la Fraternité et lui demande de la représenter lors de la prochaine rencontre d’équité procédurale. Ce dernier prétend que, les 14 et 15 novembre 2016, Mme Audesse est encore sous le choc et qu’il ignore encore les raisons de son relevé provisoire.
[21] Le 23 novembre 2016, il prépare Mme Audesse pour sa rencontre d’équité procédurale et c’est à ce moment qu’elle admet avoir fait des modifications à son avantage dans S-PRO. Émotive, elle lui raconte l’ensemble de ses problèmes : sa vie conjugale difficile, sa santé fragile, ses maux de dos, ses lésions précancéreuses et ses nombreux rendez-vous médicaux. Elle s’est laissée envahir par ses problèmes et elle était inconsciente de la gravité des actes commis.
[22] M. Cayouette est surpris. C’est la première fois qu’il en entend parler. M. Coulombe qui accompagnait Mme Audesse, connaissait déjà quelques détails puisque cette dernière lui avait fait quelques confidences en juin 2016, mais il en apprend beaucoup plus lors de cette rencontre.
[23] Les problèmes de Mme Audesse sont aussi rapportés durant le court témoignage de sa mère, qui a affirmé qu’elle s’inquiétait pour sa fille depuis les deux dernières années. Elle avait noté des signes d’impatience, d’anxiété et que sa concentration était affectée.
La rencontre d’équité procédurale du 25 novembre 2016
[24] À la rencontre d’équité procédurale sont présents Mme Audesse, M. Cayouette, Mme Christine Bouchard, directrice des services intérimaires au secteur détention et Mme Casavant. Cette dernière explique l’objet de la rencontre : après une enquête interne, le Ministère a conclu que Mme Audesse avait falsifié pour un total de 86 heures et 30 minutes[2] et à dix reprises les entrées dans S-PRO afin d’effacer plusieurs jours de congé qu’elle avait déjà pris. Ce stratagème s’est déroulé du 7 mai 2015 au 14 novembre 2016, soit durant 18 mois.
[25] D’emblée, Mme Audesse admet avoir modifié à son avantage ses absences dans S-PRO pour garder sa banque de congés intacte et continuer d’être payée. Elle avait besoin de garder ses vacances en cas de difficultés maritales et afin de pouvoir être présente auprès de ses enfants.
[26] Mme Audesse indique qu’elle ne voulait pas voler du temps, son but était de garder le plus de vacances possible dans sa banque avec l’intention de tout rembourser plus tard en faisant des heures supplémentaires. Elle regrette le tout.
[27] Elle explique aussi sa méthode qui consistait à inscrire son nom dans le livre des vacances afin de garantir son congé auprès des autres chefs d’unités, elle remplissait alors son absence dans S-PRO et en bénéficiait. Quelques jours plus tard, elle effaçait ce congé comme si elle ne l’avait jamais pris.
[28] Mme Casavant est surprise de ses aveux puisqu’elle avait tout nié lors du relevé provisoire. Elle lui précise que les preuves recueillies sont nombreuses, car lors de leur dernière rencontre, elle semblait ne pas comprendre ce qui lui était reproché. Mme Audesse indique qu’elle était sous le choc et que si on lui avait précisé certaines dates, elle s’en serait souvenue.
[29] Elle propose aussi de rembourser les sommes d’argent que le Ministère lui a versées pour ses heures non effectuées. D’ailleurs, depuis cette proposition Mme Audesse s’est exécutée et son employeur a été remboursé.
[30] Mme Casavant lui présente un tableau intitulé Résumé des événements expliquant les dix falsifications et les preuves colligées pour chacune.
[31] Mme Audesse ne voulait ni les examiner, ni les commenter. Elle avait honte et trouvait inutile qu’on lui expose l’ensemble des faits déjà avoués. De plus, elle ne se souvenait pas totalement des dates puisqu’elle ne tenait pas de registre de ses absences. Mme Casavant insiste et lui présente la preuve recueillie. En voici un aperçu :
· Lors du 1er événement en date du 8 mai 2015 : elle a pris une journée de vacances de huit heures et trente minutes et le 15 mai 2015 elle a été effacée.
· Lors du 2e événement en date du 4 juillet 2015 : elle a bénéficié d’un échange de quart de travail de douze heures avec le Ministère, mais ce temps n’a pas été remis et le 8 janvier 2016 il a été effacé.
· Le 3e événement n’est pas rapporté, car le Ministère n’a pas été en mesure de colliger des preuves.
· Lors du 4e événement en date du 24 septembre 2015 : elle a bénéficié d’une demi-journée de congé en temps compensé qui est effacée le 25 septembre 2015.
· Lors du 5e événement en date du 18 décembre 2015 : elle a bénéficié d’une journée de congé en temps compensé de huit heures et trente minutes qui est effacée du système le 20 décembre 2015.
· Lors du 6e événement en date du 23 mai 2016 : elle a bénéficié d’une journée de congé en temps compensé de huit heures et trente minutes qui est effacée du système le 25 mai 2016.
· Lors du 7e événement en date du 17 juin 2016 : elle a bénéficié d’une journée de congé en temps compensé de huit heures et trente minutes qui est effacée le 23 juin 2016.
· Lors du 8e événement le 6 août 2016, elle a bénéficié d’une journée de vacances qui est effacée le 9 août 2016 (modification effectuée chez elle).
· Lors du 9e événement le 7 août 2016 : elle a bénéficié d’une journée de vacances de douze heures qui est effacée le 9 août 2016 (modification effectuée chez elle).
· Lors du 10e événement le 25 octobre 2016 : elle a bénéficié d’une journée de vacances de huit heures et trente minutes qui est effacée le 29 octobre 2016.
[32] Mme Audesse pense que si elle avait eu du temps compensé elle n’aurait sûrement pas effacé ses absences. Elle indique à Mme Casavant qu’elle dispose de 14 ou 16 jours[3] de vacances en banque et aucune heure accumulée en temps compensé.
[33] Pour justifier ses actions, elle a écrit une lettre où elle relate ses problèmes et explique pourquoi le Ministère devrait lui accorder une deuxième chance. Mme Audesse la lit durant la rencontre. En voici quelques extraits :
Je dois vous avouer que depuis un bon bout de temps, j’ai plusieurs préoccupations qui occupent ma tête et qui font en sorte que j’ai souvent la tête ailleurs. […] J’ai des problèmes de santé qui semblent s’accumuler et ils me préoccupent. Ces ennuis de santé interfèrent dans ma vie de couple. […] J’avais des douleurs au dos […] mon médecin, il m’a annoncé que je faisais de l’arthrose dans le bas du dos. […] j’ai reçu un message sur ma boîte vocale du médecin spécialiste qui me disait qu’il avait reçu mes résultats, et que j’avais des cellules anormales, que je devais passer une colposcopie. […] Quelque temps après, j’ai reçu le résultat de la biopsie, les doutes du médecin étaient confirmés, cellules précancéreuses de haut grade. J’ai finalement eu mon rendez-vous plusieurs semaines après et ils ont enlevé ce qu’ils devaient enlever. J’aurai un suivi tous les six mois. […] Tout ce que j’avais en tête c’était de continuer à livrer la marchandise au travail, car je savais que j’étais en probation et je ne voulais pas nuire à ma carrière. […]
Je suis relevée de mes fonctions temporairement […] Malgré la faute commise, mon insouciance, je veux que vous teniez compte de mes qualités en tant que gestionnaire et en tant que personne. Ça fait plus de 14 ½ ans que je travaille à l’établissement. J’ai un dossier [disciplinaire] vierge. Je suis reconnue comme une bonne chef d’unité par mes collègues et supérieurs.
[…] J’aurais aimé recevoir des avertissements, un téléphone ou un courriel pour m’informer qu’il y avait un problème dans mon horaire afin de sonner une alarme afin de ne pas m’engouffrer dans mes problèmes et perdre votre confiance. […] Dû au changement des procédures concernant nos modifications dans S-PRO de nos horaires, il est impossible que je recommence la faute. Je reconnais avoir été insouciante, distraite et que je dois réparer l’erreur que j’ai faite. Donnez-moi la chance de vous redonner confiance. […] La rétrogradation serait une mesure abusive et disproportionnée à mon avis due à l’excellence de mon dossier [ses évaluations]. Si vous considérez que je mérite une sanction disciplinaire, je vais l’accepter […]
L’analyse de la sanction
[34] À la suite de cette rencontre, Mme Casavant prépare une analyse pour M. Thibeault. Elle constate plusieurs contradictions dans les affirmations de Mme Audesse, notamment :
· Elle prétend agir de la sorte pour ne pas perdre ses vacances pourtant elle a effacé également des congés en heures compensées accumulées.
· Elle avance que si elle avait des congés en heures compensées accumulés, elle les aurait utilisés. Pourquoi alors n’a-t-elle pas utilisé les 16 jours de vacances qu’elle avait encore en banque?
· Elle veut remettre le temps, mais elle ne le prend pas en note.
· Depuis un an et demi, elle n’a remboursé aucune heure.
[35] Même si elle croit que Mme Audesse a réellement éprouvé des difficultés cela ne justifie pas, selon elle, ce genre de falsifications. Dans ses conclusions, elle estime que celle-ci a fait preuve de tromperie et qu’elle n’a jamais eu l’intention de remettre les congés pris. De plus, elle a tenté de cacher son comportement lors de la première rencontre et elle aurait sûrement continué ses falsifications, n’eût été leur intervention. Elle recommande la prise de mesures sévères.
[36] M. Thibeault lit l’analyse de Mme Casavant et constate aussi avec surprise que Mme Audesse a avoué ses falsifications. Il est également surpris de lire qu’elle a des problèmes personnels et une santé fragile.
[37] M. Thibeault étudie le dossier et discute avec les services professionnels du Ministère. Il communique aussi avec sa supérieure et ils conviennent de se rencontrer pour échanger une fois leurs décisions prises.
Le congédiement
[38] Son analyse effectuée, M. Thibeault propose le congédiement de Mme Audesse. Il appuie sa décision sur les facteurs suivants : la gravité de ses gestes, l’abus de confiance, le fait qu’elle est en stage probatoire, son statut de cadre, c’est une agente de la paix en vertu de l’article 5 de la Loi sur le système correctionnel au Québec[4] et ses graves manquements aux règles d’éthique qui régissent la fonction publique, notamment l’obligation de loyauté et d’honnêteté, alors qu’elle a suivi une formation les abordant.
[39] Sa supérieure en arrive à la même conclusion. Cette mesure est appropriée en raison de la gravité des faits reprochés. Aussi, elle considère que les problèmes personnels de Mme Audesse ne justifient pas le vol et que sa lettre d’explications est insuffisante.
[40] L’ensemble des événements est présenté au sous-ministre associé du Ministère qui à son tour analyse le dossier et partage la recommandation de congédier Mme Audesse.
[41] Le 16 décembre 2016, une lettre recommandée est acheminée à Mme Audesse afin de la congédier et de lui en expliquer les raisons.
Les problèmes médicaux et personnels de Mme Audesse
[42] Mme Audesse a justifié ses falsifications dans S-PRO par l’instabilité de son état d’esprit causée par ses problèmes médicaux et personnels. Durant l’audience, elle les a expliqués et son dossier médical a aussi été déposé en preuve.
[43] En 2016, Mme Audesse consulte un médecin à deux reprises en lien avec les événements de ce dossier, soit les 1er et 28 décembre : durant son relevé provisoire et après son congédiement. Essentiellement, le médecin note plusieurs symptômes de dépression et lui prescrit des médicaments. Mme Audesse n’a pas d’idées suicidaires.
[44] Aussi, plus tôt en 2016, Mme Audesse a plusieurs rendez-vous médicaux et elle obtient des résultats issus des protocoles d’imageries. Ces derniers déterminent que Mme Audesse souffre d’une légère arthrose au dos.
[45] En février 2015, un prélèvement cytologique est effectué sur Mme Audesse afin de dépister un cancer du col utérin, le compte-rendu d’examen est négatif : « il n’y a pas d’évidence de lésion intraépithéliale ou de malignité ». Un prélèvement a été refait 12 mois plus tard, tel que recommandé et le compte-rendu d’examen est toujours négatif. Aussi, le 13 mars, une imagerie médicale lombaire est effectuée pour ses douleurs au dos. En 2014, le dossier médical mentionne toujours quelques rendez-vous avec des observations médicales sur sa santé.
[46] En 2013, Mme Audesse est traitée pour des problèmes médicaux liés à une tendinite de la coiffe des rotateurs et des paresthésies au niveau des deux mains.
LES ARGUMENTATIONS
L’argumentation du Ministère
[47] Le Ministère indique que la Commission doit répondre à la question suivante : est-ce que l’employeur a réussi à prouver, selon la balance des probabilités, la faute reprochée dans la lettre de congédiement? Le cas échéant, la Commission devra se demander si la sanction imposée est appropriée.
[48] Le Ministère ajoute s’être acquitté du fardeau de la preuve. Mme Audesse a fraudé et volé son employeur, c’est une faute grave. En effet, elle admet aussi avoir falsifié à neuf reprises ses absences. En agissant de la sorte, elle a irrémédiablement rompu le lien de confiance qui l’unissait à son employeur.
[49] Il indique que la décision de congédier Mme Audesse a été longuement mûrie et réfléchie. En effet, Mme Audesse a pu s’exprimer lors de la rencontre d’équité procédurale. Par la suite, Mme Casavant a préparé un exposé de cette rencontre qui a été transmis à M. Thibeault et à sa supérieure. Avant d’en arriver à cette décision, une analyse sérieuse des facteurs aggravants et atténuants a été effectuée. C’est alors que la sanction appropriée a été imposée.
[50] Il ajoute que le principe de la gradation des sanctions ne s’applique pas au cas de Mme Audesse, puisque c’est une cadre. En effet, dans le cas d'une offense grave, l'employeur n’est pas obligé d’appliquer le principe de la gradation des sanctions avant de procéder à un congédiement disciplinaire. La décision Savard[5] est citée à ce sujet.
[51] Le Ministère présente les six facteurs aggravants qui s’appliquent :
1. la gravité de la faute commise par Mme Audesse qui a irrémédiablement rompu le lien de confiance avec son employeur;
2. le fait que Mme Audesse était en stage probatoire. Comment le Ministère pourrait-il lui refaire confiance alors qu’elle se devait d’avoir un comportement et une attitude exemplaires? Quelques décisions sont déposées concernant l’abus de confiance lors de stages probatoires[6];
3. le statut de cadre de Mme Audesse, elle représente l’employeur auprès du public et des détenus;
4. la préméditation et la répétitivité des actes malhonnêtes commis;
5. le fait qu’elle a contrevenu aux règles d’éthique de la fonction publique québécoise;
6. son attitude lors de la rencontre concernant le relevé provisoire avec Mme Casavant et M. Thibeault, alors qu’elle feint de ne pas comprendre ce qui lui est reproché, ce qui est étonnant puisque M. Thibeault lui avait dit qu’il y avait des problèmes dans « son » horaire.
[52] Finalement, le Ministère allègue que le comportement de Mme Audesse durant l’audience diffère de celui adopté lors de la rencontre d’équité procédurale. En effet, l’ensemble des falsifications avait été admis durant cette rencontre, mais lors de l’audience ces aveux sont nuancés.
[53] Le Ministère soutient que le fardeau de prouver ses problèmes personnels repose sur Mme Audesse. Or, elle échoue à le faire.
[54] Pour ce qui est du dossier médical, rien de particulier n’y est inscrit. Mme Audesse semble avoir des rendez-vous annuels pour les années 2013 à 2015. Certes, à partir de 2016 elle consulte plus souvent. Mais il est possible de lire certains des problèmes rapportés, soit ses maux de dos, mais pour le reste, il est impossible de déchiffrer l’écriture du médecin. Lors de sa consultation à une clinique après son relevé provisoire, il est indiqué que Mme Audesse ne présente « aucune idée suicidaire et aucun risque ».
[55] Pour ce qui est des cellules précancéreuses dont a parlé Mme Audesse, le Ministère indique qu’aucun rapport d’examen clinique n’a été présenté. De plus, les résultats de ses prélèvements cytologiques indiquent que le col est normal et que les résultats sont négatifs. Mme Audesse a parlé d’une colposcopie subie; or aucun examen médical ne traite des résultats dans les documents qu’elle soumet.
[56] Le Ministère insiste alors sur deux témoignages opposés. M. Coulombe indique que les problèmes de Mme Audesse commencent en juin 2016, soit après le début de la fraude, tandis que la mère de Mme Audesse a observé des problèmes chez sa fille depuis au moins deux ans.
[57] Ainsi, si le témoignage de M. Coulombe est juste, les problèmes de Mme Audesse ont débuté après la fraude. Si c’est sa mère qui a raison, ses problèmes ne se reflètent pas dans ses évaluations ni dans le dossier médical.
[58] Quant aux changements apportés aux procédures de saisies dans S-PRO, le système est identique. Il a simplement été demandé aux chefs d’unité de ne plus saisir eux-mêmes leurs absences. Donc, à moins de surveiller constamment Mme Audesse, rien n’indique qu’elle ne pourrait pas recommencer à frauder.
[59] Plusieurs décisions[7] sont déposées à la Commission par le Ministère.
[60] En s’appuyant sur les facteurs aggravants qui entourent le comportement de Mme Audesse, le Ministère estime que la sanction imposée n’est pas démesurée et qu’elle tient compte de la gravité de sa faute.
L’argumentation de Mme Karine Audesse
[61] Mme Audesse commence en rappelant qu’elle a d’emblée admis avoir modifié délibérément son horaire dans S-PRO pour un total de 80 heures. Son relevé provisoire a été annoncé plusieurs jours après la découverte des faits reprochés et elle a cru que les erreurs dont on lui parlait avaient été commises dans son dernier quart de travail. De plus, elle était en état de choc et ébranlée durant cette rencontre c’est pour cela qu’elle ne comprenait pas ce qu’on lui reprochait.
[62] Ainsi, elle prétend ne pas avoir menti lors de l’annonce de son relevé provisoire, elle n’avait pas suffisamment d’informations quant aux raisons de ce relevé. Elle ajoute qu’elle a fait des admissions dès qu’elle a compris ce dont elle était accusée. Lors de la rencontre d’équité procédurale, elle a reconnu ses fautes, et ce, sans avoir vu les preuves. Elle a collaboré et son intention première était de rembourser les heures dont elle avait bénéficié.
[63] Mme Audesse ajoute qu’elle avait si peur de vivre une séparation que cela a miné son jugement. Elle ajoute qu’en écrivant sa lettre elle souhaitait expliquer son état d’esprit et le contexte dans lequel les falsifications ont été commises. Elle déplore que ses regrets n’aient pas été considérés comme un facteur atténuant durant le processus.
[64] De plus, elle est d’avis que ses problèmes médicaux l’ont affectée et qu’elle n’a pas besoin, contrairement à ce que prétend le Ministère, de les corroborer par une preuve d’expertise médicale, car ce n’est pas toujours le cas dans la jurisprudence.
[65] Mme Audesse estime qu’il est faux de prétendre que le lien de confiance entre elle et son employeur est définitivement rompu puisque le Ministère a attendu plusieurs jours avant de la relever de ses fonctions. En effet, le Ministère l’a laissée effectuer tous ses quarts de travail entre la découverte des faits et son relevé provisoire
[66] Elle estime que le Ministère a également fait une erreur, car il ne vérifiait pas le système régulièrement. S’il l’avait fait, jamais elle n’aurait pu falsifier ses absences aussi souvent. De plus, le communiqué que le Ministère a envoyé un interdisant aux employés de saisir eux-mêmes leurs absences dans le système S-PRO évite le risque de récidive. Aussi, la possibilité de la replacer dans une autre fonction administrative au sein du Ministère ou d’un autre ministère n’a jamais été analysée.
[67] Elle invoque également d’autres facteurs atténuants dont le Ministère aurait dû tenir compte dans l’évaluation de la sanction : l’absence d’intention de voler du temps, sa culpabilité et sa honte, c’est une erreur de jugement et non une fraude, l’absence d’appropriation d’une somme d’argent, elle ne cherchait pas à s’enrichir, ses gestes témoignent davantage d’un désarroi que d’une ruse malveillante, l’absence de manœuvres frauduleuses et l’absence de risque de récidive.
[68] Selon elle, le Ministère aurait dû appliquer le principe de la gradation des sanctions et tenir compte de son dossier disciplinaire vierge et de ses évaluations positives pour lui imposer une peine mieux adaptée. Elle propose une suspension de quatre, six mois ou même d’un an sans salaire et dépose plusieurs décisions[8].
[69] En conclusion, Mme Audesse souhaite que son employeur lui fasse confiance à nouveau, car elle a eu sa leçon.
le droit
[70] C’est l’article 33 de la Loi qui prévoit la compétence de la Commission en matière de mesures administrative et disciplinaire à l’égard des fonctionnaires qui ne sont pas régis par une convention collective :
33. À moins qu'une convention collective de travail n'attribue en ces matières une compétence à une autre instance, un fonctionnaire peut interjeter appel devant la Commission de la fonction publique de la décision l'informant : [...]
3° de son congédiement; [...]
5° qu'il est relevé provisoirement de ses fonctions. [...]
[71] L’article 16 énonce la possibilité pour l’employeur de sanctionner une contravention aux normes d’éthique et de discipline de la fonction publique :
16. Le fonctionnaire qui contrevient aux normes d'éthique et de discipline est passible d'une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu'au congédiement selon la nature et la gravité de la faute.
[72] L’article 22 édicte que l’employeur peut, dans les seules situations qui y sont prévues, relever provisoirement un fonctionnaire :
22. Tout fonctionnaire peut, conformément aux exigences prescrites par règlement, être relevé provisoirement de ses fonctions afin de permettre à l'autorité compétente de prendre une décision appropriée dans le cas d'une situation urgente nécessitant une intervention rapide ou dans un cas présumé de faute grave, qu'il s'agisse d'un manquement à une norme d'éthique ou de discipline, ou d'une infraction criminelle ou pénale.
[73] Le rôle de la Commission en matière disciplinaire n’est pas de substituer à la sanction celle qu’elle aurait imposée si elle avait été à la place de l’employeur. Elle doit plutôt vérifier si la faute commise par Mme Audesse a été prouvée par le Ministère et le cas échéant, elle doit apprécier la justesse de la sanction qui a été imposée en tenant compte de l'ensemble des circonstances.
[74] Chaque cas est différent et seule une analyse rigoureuse du contexte et des faits entourant la faute permet d’y répondre. Ainsi, en matière de vol ou de faute grave, le congédiement est maintenu si la relation employeur-employé a été suffisamment altérée pour rompre le lien de confiance.
[75] La jurisprudence énonce plusieurs critères qui doivent être soupesés par la Commission afin d’en arriver à une conclusion, soit la gravité de la faute, la nature du travail de l’employé et le degré de surveillance, la préméditation des actes, le comportement lorsque confronté par l’employeur et finalement les regrets exprimés.
[76] Voici comment l’arbitre Ginette Gosselin[9] explique ces critères en reprenant la décision Syndicat des travailleurs et travailleuses en communication et en électricité du Canada et Bell Canada [10]:
En matière de vol, pour déterminer si le congédiement doit être maintenu ou modifié en suspension, le tribunal d’arbitrage doit demander, à partir de critères objectifs, si le lien de confiance nécessaire à la poursuite de l’emploi du salarié a été détruit. Cette appréciation doit se faire à la lueur des faits de chaque affaire. Si l’arbitre en vient à la conclusion que le lien de confiance a été rompu, des facteurs extrinsèques, telle l’ancienneté, ont moins de poids. On pourrait même dire que plus un employé a d’ancienneté plus il devait être à même de donner l’exemple et d’apprécier le caractère sérieux du geste répréhensible qu’il a posé […] Un premier critère est la considération de la nature du travail qu’accomplit l’employé et le degré de surveillance auquel il est soumis […]
Un autre élément important dans l’appréciation du maintien du lien de confiance est la préméditation du geste posé. L’employé a-t-il subtilisé l’objet suite à une étourderie momentanée et irréfléchie ou a-t-il planifié son vol? […] Est également important dans l’appréciation objective du maintien du lien de confiance le comportement de l’employé envers son employeur lorsqu’il est confronté avec le fait qu’il a volé. A-t-il, dès les premiers instants, été franc et honnête et a-t-il communiqué à son employeur, par ses gestes et son attitude, qu’il était repentant?
[77] Cette approche a d’ailleurs été confirmée dans l’arrêt McKinley[11], cité par Mme Audesse, dans lequel la Cour suprême du Canada a statué qu’un acte de malhonnêteté ne menait pas inévitablement à un congédiement :
Pour les motifs qui précèdent, je préconise un cadre analytique qui traite chaque cas comme un cas d’espèce et qui tient compte de la nature et de la gravité de la malhonnêteté pour déterminer si elle est conciliable avec la relation employeur-employé. Une telle approche réduit le risque qu’un employé soit pénalisé indûment par l’application stricte d’une règle catégorique qui assimile toutes les formes de malhonnêteté à un motif valable de congédiement. En même temps, cette approche soulignerait à juste titre que la malhonnêteté qui touche au cœur même de la relation employeur-employé peut constituer un motif valable de congédiement
[78] Dans le cas présent, les faits ne sont pas contestés. Mme Audesse a admis sa faute lors de la rencontre d’équité procédurale et à l’audience.
[79] La Commission constate que Mme Audesse a falsifié, pendant une période qui s’est échelonnée sur dix-huit mois, délibérément et de manière répétée les entrées qu’elle effectuait dans S-PRO afin de conserver sa banque de vacances intacte. Elle a fraudé son employeur pour un total de 80 heures.
[80] La Commission considère que la faute commise par Mme Audesse est d’une gravité telle qu’elle a irrémédiablement rompu le lien de confiance nécessaire au maintien de son emploi au Ministère. Son congédiement est donc la sanction appropriée et il doit être maintenu.
[81] Pour en arriver à cette conclusion, la Commission retient l’intégralité des facteurs aggravants soumis par le Ministère et un facteur atténuant présenté par Mme Audesse : son dossier disciplinaire vierge. Or, ce facteur à lui seul ne permet pas de contrebalancer la gravité de sa faute et d’annuler son congédiement.
[82] Avant de présenter l’ensemble des circonstances et des facteurs qui mènent la Commission à maintenir le congédiement de Mme Audesse, il est important de dire que le Ministère a agi de manière réfléchie tout au long du processus. En effet, il a pris le temps d’analyser l’ensemble de la situation entourant le comportement de Mme Audesse. De plus, plusieurs personnes ont été consultées, et ce, à plusieurs niveaux de hiérarchie.
[83] Aussi, il est évident pour la Commission que ce n’est pas sur le Ministère que pèse l’obligation d’avertir Mme Audesse de ne pas commettre d’actes illégaux. Toute personne raisonnable sait que frauder son employeur est une attitude répréhensible. De plus, dès que le Ministère se rend compte des falsifications, elle est rapidement rencontrée et relevée provisoirement de ses fonctions.
[84] La Commission souhaite aussi mentionner, et même si cela n’a pas été abordé lors de l’audience, que le Ministère a respecté les prescriptions de l’article 22 de la Loi en relevant provisoirement de ses fonctions Mme Audesse. En effet, il y est prévu que tout fonctionnaire peut être relevé provisoirement de ses fonctions afin de permettre à l’autorité compétente de compléter son enquête, dans le cas d'une situation urgente nécessitant une intervention rapide ou dans un cas présumé de faute grave, qu'il s'agisse d'un manquement à une norme d'éthique ou de discipline, ou d'une infraction criminelle ou pénale.
[85] Cela étant dit, le premier facteur aggravant considéré par la Commission est la gravité de la faute commise. La Commission y voit un geste malhonnête : un manque d’intégrité et de loyauté. Mme Audesse a profité de son accès privilégié à S-PRO afin d’obtenir un bienfait personnel, soit 80 heures de vacances additionnelles.
[86] Elle a été payée et elle a conservé ses jours de vacances. La Commission juge cette faute d’autant plus grave que Mme Audesse travaille dans un établissement de détention comme chef d’unité, c’est une agente de la paix. À ce titre, ses actions ne sont pas dignes de ses fonctions. Mme Audesse doit pouvoir donner l’exemple aux agents et aux personnes incarcérées que l’on tente de réhabiliter, elle doit avoir un comportement irréprochable. Son devoir est d’encourager la participation des détenus « aux activités ayant pour but de favoriser l’apprentissage de valeurs et de comportements socialement acceptables[12] ». Or, comment le pourrait-elle alors que ses comportements sont inacceptables?
[87] Le deuxième facteur aggravant dont la Commission a tenu compte est le fait que Mme Audesse était en stage probatoire. De ce fait, il est reconnu par la jurisprudence[13] que l’employeur bénéficie durant cette période d’une grande marge de manœuvre pour évaluer son employé. Ainsi, voici comment est décrit le but de la période probatoire dans la décision Bélanger[14] :
La période d’essai permet d'évaluer les aptitudes professionnelles d’un salarié afin de vérifier qu’il est en mesure d’accomplir la fonction qui lui est confiée. Cette période sert aussi de baromètre pour mesurer les relations interpersonnelles d’un salarié avec ses pairs et ses supérieurs.
Par ailleurs, il est bien reconnu que, durant une période d’essai, l’employeur possède une grande marge de manœuvre pour décider de mettre fin à l’emploi d’un salarié.
[88] La Commission estime que l’attitude de Mme Audesse durant son stage probatoire se devait d’être exemplaire et elle ne l’a pas été.
[89] Le troisième facteur aggravant analysé par la Commission est le statut de cadre de Mme Audesse. D’emblée de par ses fonctions de chef d’unité Mme Audesse faisait l’objet d’une surveillance moins directe et accrue de la part du Ministère. Ce dernier avait, en plus, une très grande confiance en elle puisqu’elle avait un dossier disciplinaire vierge.
[90] La Commission juge que Mme Audesse a abusé de la grande confiance que son employeur avait placée en elle. Cette confiance est d’autant plus nécessaire dans un établissement de détention où l’honnêteté constitue une valeur prédominante. Mme Audesse a failli à ses devoirs en agissant de la sorte.
[91] Lorsqu’un cadre manque à ses devoirs, il ne suffit pas « de considérer la mesure disciplinaire comme adéquate uniquement sous l'angle de ce qui serait nécessaire pour le corriger. Il faut aussi tenir compte des craintes raisonnables que l'employeur peut désormais entretenir à l'égard de ce cadre et qui compromettent alors irrémédiablement le lien de confiance essentiel au maintien de l'emploi »[15].
[92] Ainsi, le comportement de Mme Audesse sera toujours une source de doute pour le Ministère. Il ne peut la surveiller continuellement. Si celle-ci est indigne de confiance pour effectuer un geste aussi banal que de noter ses absences dans S-PRO, comment le Ministère peut-il lui faire confiance pour des tâches sensibles ou complexes qui demandent du jugement et du discernement?[16]
[93] De plus, la Commission est d’avis que le principe de progression des sanctions invoqué par Mme Audesse ne s’applique pas dans le cas présent. En effet, de par son statut de cadre, elle dispose d’une grande autonomie dans la réalisation de ses activités, mais en contrepartie, les obligations envers son employeur sont plus lourdes que celles d’un employé sans fonction de gestion. Donc, dans son cas, la « discipline corrective progressive n’est pas réaliste »[17].
[94] Toujours à ce sujet, la Commission des relations de travail indique dans la décision ArcelorMittal [18] que : « le principe de la progression des sanctions ne saurait s’appliquer dans les circonstances parce que le statut de cadre du plaignant lui impose un comportement exemplaire et des obligations plus lourdes de loyauté, de diligence et de coopération avec la direction ».
[95] En ce qui concerne la préméditation, la Commission juge qu’elle est démontrée par la durée et la fréquence des actes perpétrés.
[96] Mme Audesse avait mis au point un stratagème. Son modus operandi était simple. Selon son propre témoignage, les modifications étaient toujours effectuées dans les jours suivant son absence de sorte que le Ministère ne s’en rende pas compte et ne lui demande pas son permis d’absence. À deux reprises, la modification est même faite de l’extérieur de l’Établissement.
[97] Ces gestes sont délibérés et calculés, ils ne sont pas le fruit du hasard. La Commission est en désaccord avec Mme Audesse lorsqu’elle indique que son intention n’était pas de voler du temps et que ses gestes représentent davantage son désarroi qu’une ruse malveillante.
[98] Mme Audesse avait la possibilité de mettre fin à ses manœuvres frauduleuses, et même de se dénoncer. Elle ne l’a pas fait. La Commission ne croit pas non plus qu’elle souhaitait remettre le temps volé : la preuve ne le démontre pas. Elle a eu 18 mois pour se dénoncer et elle ne l’a pas fait ce qui laisse croire à la Commission qu’elle n’aurait pas cessée d’elle-même son comportement fautif.
[99] La Commission ajoute que les aveux et les regrets de Mme Audesse lors de la rencontre d’équité sont tardifs, car elle aurait pu les faire lors de son relevé provisoire. Ainsi, ils ne peuvent être considérés comme des facteurs atténuants.
[100] Les faits de ce dossier ressemblent à ceux de la décision ArcelorMittal[19], où l’employeur congédie un cadre à cause des actes commis, soit du vol de temps :
[…] Le congédiement est justifié parce que le plaignant commet délibérément un acte malhonnête, il ment par omission à répétition et il émet un aveu tardif de son retard seulement. Il sait qu’il est assujetti à un code d’éthique qui exige un haut niveau de probité comme cadre. Il sait aussi qu’il a rompu le lien de confiance avec son directeur.
[101] Le cinquième facteur aggravant concerne la contravention aux règles d’éthique dans la fonction publique québécoise. Or, en tant que cadre, Mme Audesse doit les avoir intégrés à son comportement et doit les faire appliquer par les agents sous son autorité.
[102] Les règles enfreintes par Mme Audesse sont abordées régulièrement dans l’Établissement et sont même inscrites dans ses attentes, sans oublier les formations données à ce sujet par M. Thibeault et auxquelles elle a assisté.
[103] Plus précisément, Mme Audesse a contrevenu aux articles 4 et 5 de la Loi qui prévoient que :
4. […] Il exerce ces attributions conformément aux normes d’éthique et de discipline prévues à la présente loi ou dans un règlement adopté conformément à celle-ci.
5. Le fonctionnaire est tenu d’office d’être loyal et de porter allégeance à l’autorité constituée.
Il doit exercer ses fonctions dans l’intérêt public, au mieux de sa compétence, avec honnêteté et impartialité et il est tenu de traiter le public avec égards et diligence.
[104] Elle a bafoué l’obligation de loyauté et d’allégeance à l’autorité constituée[20] qui prévoit que le fonctionnaire doit défendre « les intérêts de son employeur et évite de lui causer du tort, par exemple en utilisant un langage ou un comportement inapproprié ».
[105] Elle a aussi failli à l’obligation d’agir avec honnêteté, ce qui requiert de « ne pas être impliqué dans un vol, une fraude ou une situation d’abus de confiance. » [21]
[106] Dans la décision Association des cadres de l’UM, l’arbitre estime que pour évaluer les conséquences d’une transgression du devoir de loyauté, « il faut prendre en compte différents facteurs tels la fonction occupée et l’ensemble des circonstances dans laquelle elle a été commise »[22]. Or, la Commission insiste encore sur le statut de cadre de Mme Audesse. L’obligation de loyauté est plus importante puisqu’elle représente l’autorité auprès des agents.
[107] Le sixième facteur aggravant est que Mme Audesse a feint l’incompréhension lors de son relevé provisoire. Elle présente une autre version et allègue que M. Thibeault ne lui a jamais dit qu’il y avait des problèmes dans « son » horaire. La Commission estime la version de l’employeur plus crédible, car il est peu probable qu’une personne qui fraude son employeur depuis 18 mois et qui est relevée provisoirement de ses fonctions n’en saisisse pas les motifs.
[108] À l’audience, Mme Audesse a expliqué ses actes par ses problèmes médicaux et personnels. Selon elle, c’est un facteur atténuant de taille dont l’employeur aurait dû tenir compte. Ainsi, puisque cela constitue un pan important de sa défense, la Commission tient à expliquer pourquoi elle le rejette.
[109] Il appartient à Mme Audesse de faire la preuve que, lors des falsifications, elle était dans état tel qu’elle n’avait plus conscience de la gravité de ses actes.
[110] Ainsi, même si la Commission croit que Mme Audesse a réellement éprouvé des problèmes médicaux et personnels, elle considère qu’ils ne l’ont pas affectée au point d’altérer son jugement et de la pousser à frauder son employeur. Aucune preuve probante n’a été présentée en ce sens.
[111] Lors de l’audience, Mme Audesse a entretenu la Commission de ses problèmes personnels et de son état de santé : son couple, ses maux de dos, la présence de cellules précancéreuses et ses rendez-vous médicaux. Elle écrit dans sa lettre :
[…] Je devais passer une colposcopie. […] Quelque temps après, j’ai reçu le résultat de la biopsie, les doutes du médecin étaient confirmés, cellules précancéreuses de haut grade. J’ai finalement eu mon rendez-vous plusieurs semaines après et ils ont enlevé ce qu’ils devaient enlever. J’aurai un suivi tous les six mois. […]
[112] Or, à la lecture du dossier médical, la Commission constate que certains renseignements ne correspondent pas. Les résultats de ses biopsies semblent être négatifs : « il n’y a pas d’évidence de lésion intraépithéliale ou de malignité ». Il est possible que les cellules précancéreuses « de haut grade » qu’elle mentionne soient apparues plus tard, mais la Commission n’est pas en mesure de le constater de manière probante, car elle ne dispose pas d'autre analyse ou document sur le sujet. Par ailleurs, même si la preuve avait démontré des cellules précancéreuses, la Commission aurait tout de même conclu que ce diagnostic ne justifie pas le vol de temps commis.
[113] En effet, il n’est pas suffisant de convaincre la Commission de la présence de problèmes, il faut aussi démontrer leur lien de causalité avec la faute commise. C’est ce qu’indique la décision Syndicat des employé-e-s de techniques professionnelles et de bureau d’Hydro-Québec, section locale 2000[23]:
L’existence de problèmes personnels d’importance avait été prouvée chez le plaignant, il aurait fallu, encore ici, démontrer l’existence d’un lien de cause à effet entre les problèmes du plaignant et ses comportements fautifs pour pouvoir conclure à des circonstances atténuantes qui auraient pu être de nature à éviter son congédiement. Tel n’a pas été le cas et le Tribunal ne peut retenir - parce que la preuve n’en a pas été faite - l’existence de problèmes personnels particuliers qui auraient affecté le plaignant et auraient constitué un facteur atténuant la gravité des gestes posés.
[114] La juge Verdon, dans la décision Lynch[24] ne retient pas non plus la condition médicale d’un cadre comme facteur atténuant vu l’absence de lien de causalité :
Lynch prétend que son comportement évasif et défensif lors des rencontres est dû, d’une part, à sa condition médicale et l’effet de sa médication. Or, il n’existe aucune preuve que cela affecte son jugement ou ses facultés.
[115] Aussi, il a été démontré que Mme Audesse n’a pas utilisé les 80 heures de congé falsifiées pour consulter son médecin ou parce qu’elle était malade.
[116] La Commission croit plutôt, tel que l’avance le Ministère, qu’il est douteux que Mme Audesse soit affectée par ses problèmes quand il s’agit de falsifier ses horaires alors que ceux-ci n’influent guère sur sa performance au travail. En l’espèce, falsifier ses horaires exige une certaine ingéniosité et un contrôle de soi, ce qui est corroboré par ses évaluations de rendement durant la période concernée :
Elle est d’humeur égale et fait preuve de civisme dans ses comportements, elle semble appréciée de ses collègues […] Elle est très proactive et prends les initiatives appropriées et nécessaires au besoin […] Madame a su s’adapter à ses nouvelles fonctions de gestionnaire […] elle arrive toujours à garder le contrôle de la situation […]
[117] La Commission a analysé les décisions présentées par Mme Audesse et ne les considère pas pertinentes. Mme Audesse est une cadre qui occupe un poste de chef d’unité dans un établissement de détention. Or, la quasi-totalité des décisions qu’elle soumet traite d’employés dont le niveau de responsabilité, d’autonomie et de prise de décision est faible : peintre[25], cuisinier dans un hôpital[26], comptable[27], préposé à l’entretien[28] et opérateur de machines[29].
[118] La Commission distingue également la décision Syndicat de la fonction publique du Québec[30] puisque l’employé, même s’il était enquêteur en matières frauduleuses, avait un « classement d’agent d’aide socioéconomique », donc il n’était pas « un représentant de l’ordre et de la loi » et il n’était pas davantage un cadre. De plus, ses absences sans autorisation se sont échelonnées sur une courte période et, finalement, le salarié s’absentait pour régler de nombreux problèmes personnels.
[119] La dernière décision soumise, Sûreté du Québec et Association des policiers provinciaux[31] concerne un policier qui a été congédié pour avoir volé une équerre dans une quincaillerie. La Commission l’écarte aussi, même si elle convient que la nature et la probité du poste s’apparentent à celui occupé par Mme Audesse.
[120] Dans cette affaire, une preuve a été faite par plusieurs expertises médicales. Le décideur a estimé que le policier avait de nombreux problèmes personnels : la reprise possible du deuxième cancer de son épouse, une dépression majeure, etc. Le policier avait un diagnostic de trouble d’ajustement et son vol était le seul moyen qu’il avait trouvé pour se sortir de l’angoisse qu’il vivait et de se retrouver au repos.
[121] Finalement, la Commission répète que son rôle n'est pas de se substituer à l'employeur et de se demander « s'il aurait pu faire preuve de plus de clémence et de compassion »[32]. Elle doit simplement vérifier si, eu égard à l'ensemble des circonstances, la sanction était disproportionnée ou injuste.
[122] Conséquemment, la Commission juge que la faute commise par Mme Audesse est un acte d’une telle gravité que le congédiement est justifié.
POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE :
REJETTE les appels de Mme Karine Audesse.
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Original signé par :
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__________________________________ Nour Salah, juge administrative |
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Me Christine Beaulieu |
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Procureure de Mme Karine Audesse Appelante |
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Me Micheline Tanguay |
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Procureure du ministère de la Sécurité publique |
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Intimé
Lieu des audiences : Québec |
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Dates d’audience : 15 février, 4, 6 et 12 avril 2017 |
[1] RLRQ, c. F-3.1.1
[2] Ce total a été ramené à 80 heures par le Ministère.
[3] Sa fiche indique 16 jours de vacances.
[4] RLRQ, c. S-40.1
[5] Préc., note 6.
[6] C.T.C.U.M. et Fraternité des chauffeurs d'autobus, opérateurs de métro et employés des services connexes au transport de la CUM, section locale 1983 (SCFP), (T.A., 1985-10-09), AZ- 5142139; Bélanger et Vitre-Art CAB (1988) inc., 2014 QCCRT 0103; Vanasse et Québec (Ministère de la Sécurité publique), 2011 QCCRT 0204.
[7] Lynch et Société des casinos du Québec inc., 2006 QCCRT 0241; Collin et ArcelorMittal Montréal inc., 2009 QCCRT 0514; Bell Canada et Association canadienne des employés en télécommunication, AZ-50208257; Syndicat des travailleuses et travailleurs de Loto-Québec et Loto-Québec, AZ-92142028; Syndicat des employées et employés de techniques professionnelles et de bureau d'Hydro-Québec, section locale 2000 (SCFP/FTQ) et Hydro-Québec- section relève de compteurs - région Le Noroît (Maxim Pelletier), AZ-50918779; Québec (Ville de) et Syndicat des employés manuels de fa Ville de Québec, section locale 1638 (SCFP) (Luc Demeule), AZ-51006187; Côté et Québec (Ministère du Revenu), AZ-50566856; Currie et Namur (Municipalité de), 2016 QCTAT 6914; Association des cadres de l'Université de Montréal (APCUM) et Université de Montréal (Richard Brunet), AZ-51007668; Savard et Hydro-Québec, 2003 QCCRT 0376; Hahndorff et Restaurant & Délicatesse Gerry's inc., 2015 QCCRT 0353; Mommaerts et Élopak Canada inc., 2011 QCCRT 0375; Syndicat des employé-e-s de métiers d'Hydro-Québec, section locale 1500, SCFP et Hydro- Québec (Mario Émond), 2016 QCTA 119; Syndicat des employées et employés de l'usine de transformation de la volaille de Ste-Rosalie (CSN) et Olymel, s.e.c. (Établissement de Ste-Rosalie) (G.L.), AZ-50352813; Bell Canada et Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier (SCFP) (Unifor) (François Meloche), 2015 QCTA 269; Commission scolaire Vallée-des-Tisserands et Syndicat de l'enseignement de Champlain (F.R.), 2014 QCTA 612; Syndicat des travailleurs et travailleuses du Centre jeunesse de Montréal (CSN) et Centre jeunesse de Montréal (Stéphane Leprohon), 2016 QCTA 1019; Hydro-Québec et Syndicat des employées et employés de techniques professionnelles et de bureau d'Hydro-Québec, section locale 2000 (S.C.F.P.), AZ-99142087.
[8] McKinley c. B.C., [2001] 2 R.C.S. 161; Syndicat du personnel de soutien de la Commission scolaire des Patriotes (C.S.N.) c. Commission scolaire des Patriotes, 1997 CanLII 10268; CSSS Gatineau et STT de la santé de Gatineau - CSN, 2015 CanLII 5540; Centre de santé et de service sociaux du Haut-Saint-Maurice et Syndicat des travailleuses et travailleurs du CSSS de la Saint-Maurice, 2014 QCTA 370; Aluminerie de Bécancour et Syndicat des employés de l’Aluminerie de Bécancour (Syndicat des métallos, section locale 7900), D.T.E. 2011T-105; Syndicat de la fonction publique du Québec et Québec (Ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale), D.T.E. 2003T-557; Syndicat catholique des ouvriers du textile de Magog Inc., section locale 10 et Difco Tissus de performance Inc., D.T.E. 99T-1021; Sûreté du Québec et Association des policiers provinciaux du Québec, D.T.E. 2000T-839.
[9] Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301 et ville de Montréal, SOQUIJ AZ-50329951.
[10]Syndicat des travailleurs et travailleuses en communication et en électricité du Canada et Bell Canada, D.T.E. 92T-572.
[11] Préc., note 8, par 57.
[12] Article 4 de la Loi sur le système correctionnel du Québec.
[13] Préc., note 6.
[14] Ibid., par 25 et 26.
[15] Savard et Hydro-Québec, préc., note 7, par 113.
[16] Association des cadres de l'Université de Montréal (APCUM) et Université de Montréal (Richard Brunet), (T.A., 2013-10-02), AZ-51007668.
[17] Savard et Hydro-Québec, préc., note 7, par 112.
[18] Ibid., par 78.
[19] Ibid., par 76-77.
[20] MINISTÈRE DU CONSEIL EXÉCUTIF, l’éthique dans la fonction publique, 2003, Bibliothèque nationale du Québec, 2003, p. 8. QUÉBEC,
[21] Ibid., p.11.
[22] Préc., note 16, par 146.
[23] Préc., note 7, p. 36.
[24] Préc., note 7, par 95.
[25] Syndicat du personnel de soutien de la Commission scolaire des Patriotes (C.S.N.) c. Commission scolaire des Patriotes préc., note 8.
[26] CSSS Gatineau et STT de la santé de Gatineau, préc, note 8.
[27] Centre de santé et de service sociaux du Haut-Saint-Maurice et Syndicat des travailleuses et travailleurs du CSSS de la Saint-Maurice, préc., note 8.
[28] Aluminerie de Bécancour et Syndicat des employés de l’Aluminerie de Bécancour (Syndicat des métallos, section locale 7900), préc., note 8.
[29] Syndicat de la fonction publique du Québec et Québec (Ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale, préc., note 8.
[30] Syndicat catholique des ouvriers du textile de Magog Inc., section locale 10 et Difco Tissus de performance Inc., préc., note 8.
[31] Sûreté du Québec et Association des policiers provinciaux du Québec, préc., note 8.
[32] Bell Canada et Association canadienne des employés en télécommunication, (T.A., 2003-11-17), AZ-50208257, par 87.
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