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JB 2820 |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
CHICOUTIMI |
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N° : |
150-17-000781-044 |
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DATE : |
9 juin 2004 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : |
L’HONORABLE J. ROGER BANFORD, J.C.S. exerçant en son bureau |
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9039-3463 QUÉBEC INC. personne morale légalement constituée, ayant sa principale place d’affaires au 300, boul. de la Grande-Baie Nord, La Baie, Québec, G7B 3K3 |
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Requérante |
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c. |
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LUC VAILLANCOURT exécutif, résidant et domicilié au 68, rue d’Anjou, Chicoutimi, Québec, G7H 6Z9 et LES MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION OLDCASTLE CANADA INC. personne morale légalement constituée, ayant sa principale place d’affaires au 8145, rue Bombardier, ville d’Anjou, Québec, H1J 1A5, faisant affaires au 8140, de ladite rue sous les nom et raison sociale de GROUPE PERMACON MONTRÉAL |
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Intimés |
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2532-9574 QUÉBEC INC. personne morale légalement constituée, ayant sa principale place d’affaires au 300, boul. de la Grande-Baie Nord, La Baie, Québec, G7B 3K3 |
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et |
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2532-9855 QUÉBEC INC. personne morale légalement constituée, ayant sa principale place d’affaires au 300, boul. de la Grande-Baie Nord, La Baie, Québec, G7B 3K3 |
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et |
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2959-6749 QUÉBEC INC. personne morale légalement constituée, ayant sa principale place d’affaires au 300, boul. de la Grande-Baie Nord, La Baie, Québec, G7B 3K3 |
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et |
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SOCIÉTÉ EN COMMANDITE SOCCRENT 2 société en commandite légalement constituée, ayant sa principale place d’affaires au 2455, rue Cantin, Jonquière, Québec, G7B 3K3 |
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Mises en cause |
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JUGEMENT sur requête pour l’émission provisoire d’une ordonnance d’injonction interlocutoire |
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[1] La requérante recherche l’émission provisoire d’une ordonnance d’injonction interlocutoire, en vue d’assurer le respect des clauses de non-concurrence et de confidentialité contenues à la convention entre actionnaires de la partie requérante.
[2]
Le fondement juridique de la procédure repose sur les articles
[3] Au stade provisoire, la procédure est soumise aux mêmes règles que l’injonction interlocutoire : l’apparence de droit, le préjudice sérieux ou irréparable et la balance des inconvénients. Toutefois, ces critères s’apprécient de façon plus stricte et plus rigoureuse qu’à l’étape de l’interlocutoire. En outre, l’ordonnance provisoire ne peut être accordée qu’en cas d’urgence immédiate et apparente, c’est-à-dire, dans les cas où :
[…] les droits des requérantes seront irrémédiablement perdus ou affectés sérieusement et que le préjudice subi ne sera pas compensable en argent, si on laisse écouler le délai nécessaire pour la présentation et l’audition de la demande d’injonction interlocutoire; c’est une mesure essentiellement temporaire et exceptionnelle pour éviter un mal évident, imminent et irréparable; s’il y a le moindre doute, la demande doit être rejetée.[1]
[4] En l’occurrence, la requérante invoque les engagements de non-concurrence et de confidentialité souscrits par les parties dans une convention entre actionnaires intervenue le 5 juin 1997 (R-1).
[5] La clause 12 de ce document comporte, en substance, un engagement à ne poser aucun acte qui soit de nature à faire concurrence à la compagnie ou ses filiales, pendant une période d’un an après la date de la disposition des actions par l’actionnaire, et vise tout le territoire desservi par la compagnie. En outre, la même disposition comporte l’engagement à la non-divulgation des affaires de nature confidentielle de la compagnie ou ses filiales ainsi qu’à ne pas utiliser telles informations pour une période de deux ans suivant le jour où l’actionnaire se départit de ses actions.
[6] À première vue, les engagements invoqués permettent de prétendre à l’existence d’un droit à l’ordonnance d’injonction recherchée. En effet, depuis peu, l’intimé occupe le poste de directeur général d’une division d’une entreprise concurrente de la requérante, soit l’intimée Groupe Permacon.
[7] Toutefois, l’affidavit de l’intimé Vaillancourt soulève de nombreuses questions quant à la légalité de la clause de non-concurrence, soit en raison de la portée temporelle ou territoriale qu’elle couvre.
[8] Ainsi, bien qu’il ait démissionné de ses fonctions auprès de la requérante le 29 novembre 2002, qu’il ait demandé le rachat de ses actions le 11 décembre 2002 selon les prescriptions de la convention entre actionnaires, qu’il ait soumis le litige à l’arbitrage le 5 mars 2003, qu’un jugement du 3 décembre 2003 fixe la date de rachat des actions au 30 novembre 2002, l’intimé demeure toujours le détenteur enregistré des actions.
[9] Dans ce contexte, se pose la question de la légalité du terme prévu à l’engagement souscrit, dans l’optique de la protection qu’accordent les tribunaux à la liberté fondamentale de chacun d’exercer une activité professionnelle qui lui est propre. En l’instance, la sentence arbitrale interlocutoire rendue le 3 décembre 2003 (pièce I-7), permet de soulever un doute sur le droit de la requérante à l’exécution de la clause de non-concurrence, puisque le Tribunal a conclu qu’un contrat de vente d’actions était intervenu entre les parties le 11 décembre 2002, donc il y a plus d’un an.
[10] En outre, en vertu du même principe de liberté de travail, se soulève la question de la légalité d’une clause restrictive du droit au travail dont la portée n’est pas spécifiquement définie sur le plan territorial.
[11] Le Tribunal n’a pas, à ce stade des procédures, à décider de ces questions. Il lui suffit de constater qu’elles soulèvent un doute raisonnable sur la qualité du droit à la non-concurrence invoquée. Quant à la clause de confidentialité, on doit constater que la procédure n’allègue aucun fait spécifique susceptible de démontrer que l’intimé a, ou s’apprête à divulguer ou utiliser des informations de nature confidentielle protégées par le contrat invoqué.
[12] Tout au plus, la requérante infère de la présence de l’intimé chez son concurrent qu’il contrevient à son engagement. Il est vrai que dans les jours précédant son intégration chez le groupe Permacon, l’intimé Vaillancourt a requis le bilan financier de la requérante.
[13] Toutefois, cette démarche peut tout simplement s’expliquer du fait qu’il a souscrit un important cautionnement en faveur de cette entreprise et qu’il détient, de ce fait, un intérêt légitime à l’information requise.
[14] En outre, monsieur Vaillancourt allègue avoir pris les dispositions pour respecter ses obligations, soit en démissionnant comme administrateur, en s’engageant à remettre à ses procureurs tous les dossiers concernant la requérante, qu’il pouvait détenir et en affirmant son intention de respecter ses engagements après avoir dénoncé sa nouvelle situation à la requérante. On peut présumer de sa bonne foi.
[15] Encore une fois, le soussigné n’a pas à décider de la portée de ces faits mais uniquement de constater qu’ils posent les jalons d’une sérieuse contestation des prétentions de la requérante.
[16] Dans ces circonstances, il faut retenir que la source du droit invoquée par la requérante ne lui confère pas un droit clair à l’ordonnance recherchée. Il nous faut donc être plus parcimonieux dans l’appréciation des autres critères d’application de la procédure.
[17] La Loi exige également que la requérante démontre que l’ordonnance recherchée est nécessaire pour empêcher que ne lui soit causé un préjudice sérieux ou irréparable. Il lui appartient de spécifier, dans sa procédure, les faits qui supportent ses prétentions à cet égard.
[18] Les allégations apparaissant à l’article 75, sous-paragraphes a) b) et c) de la requête, sont les seules portant sur le sujet. Il y est fait état que les parties à la convention ont reconnu, à l’avance et de façon formelle que, la contravention aux clauses de non-concurrence et de confidentialité, causerait un «tort irréparable» à la requérante. Cette dernière ajoute que l’intimé ne peut travailler chez un compétiteur sans faire abstraction des informations confidentielles qu’il détient et qu’en conséquence, l’activité de Vaillancourt, chez Permacon, pourrait être dévastatrice pour le groupe Alba, la requérante.
[19] Toutefois, rien dans la preuve ne précise de quelle manière les actes posés par l’intimé pourraient compromettre ceux de la requérante. On ne retrouve pas non plus, dans la procédure, d’éléments factuels qui pourraient soutenir les hypothèses relatives à la concurrence et à la divulgation d’informations.
[20] De plus, la présomption qu’on tire des allégations de la procédure paraît contrée par le fait que l’intimé a quitté l’entreprise depuis le 29 novembre 2002, qu’il a travaillé, depuis, et jusqu’à son intégration chez Permacon, dans un domaine totalement étranger à celui couvert par la requérante et que son occupation actuelle, auprès de Permacon, consiste à préparer la mise en marché d’un système de revêtement extérieur différent de celui de la requérante et qui, de toute façon, ne sera pas commercialisé avant plusieurs mois.
[21] En outre, même si les appréhensions de la requérante se concrétisaient, elle dispose de recours contre l’intimé, aux termes de la convention entre actionnaires. Ainsi, l’article 12.2 prescrit une pénalité de 100 000 $, au cas de contravention à l’engagement de non-concurrence et les articles 6.4 et 8 prévoient une réduction de 30% de la valeur des actions dans la même éventualité.
[22] Dans ce contexte, le soussigné estime que la requérante ne l’a pas convaincu qu’elle subira un préjudice irréparable si l’ordonnance qu’elle recherche n’est pas émise provisoirement.
[23] Cette dernière n’ayant pas entièrement satisfait aux principaux critères requis, l’ordonnance d’injonction interlocutoire ne devrait pas être émise provisoirement.
[24] À toutes fins utiles, le Tribunal ajoutera que, dans le contexte où le préjudice invoqué par la requérante n’est pas clairement établi, la balance des inconvénients favorise largement l’intimé qui se voit susceptible de perdre toutes sources de revenus pendant la durée de l’ordonnance provisoire. La chose devient encore plus évidente si l’on réfère aux autres recours dont dispose la requérante en cas de contravention à la clause de non-concurrence.
[25] Enfin, il apparaît évident dans les circonstances particulières de l’affaire, telles que rapportées plus haut, que la situation ne répond pas au critère d’urgence requis par la Loi.
[26] Les allégations de la requête reposent sur des hypothèses découlant de l’engagement de l’intimée Permacon. Cela ne suffit pas à expliquer que des droits seront irrémédiablement perdus par la requérante ou affectés sérieusement, si on laisse écouler le délai nécessaire pour la présentation et l’audition de la demande d’injonction interlocutoire.
[27] La mesure recherchée est trop exceptionnelle pour se satisfaire de simples situations hypothétiques, pour démontrer l’urgence d’agir avant que toutes les parties aient été en mesure de préparer leur dossier en vue d’une présentation complète de leur cause devant un Tribunal.
[28] Il appartiendra au juge saisi de la requête au stade interlocutoire, de disposer des questions litigieuses.
[29] En définitive, le Tribunal ne fera donc pas droit aux conclusions recherchées. Cependant, lors de l’audience, les intimés ont énoncé verbalement leur intention de s’engager, pendant l’instance, à n’échanger aucune information concernant les affaires de la requérante et de ses filiales. Il y a lieu de donner acte aux parties de cet engagement.
[30] En outre, les parties ont consenti à ce que l’audition de la requête pour injonction interlocutoire soit entendue à Québec, le 17 juin prochain, le tout pour des raisons administratives.
[31] Enfin, elles ont convenu d’un échéancier en vue de permettre l’audition de la cause dans les délais prévus.
[32] POUR CES MOTIFS, LE SOUSSIGNÉ AGISSANT EN SA QUALITÉ DE JUGE SIÉGEANT EN SON BUREAU :
[33] REJETTE la requête pour l’émission provisoire d’une ordonnance d’injonction interlocutoire;
[34] DONNE ACTE aux parties de l’engagement de l’intimé, Luc Vaillancourt, et de l’intimée, Les matériaux de construction Oldcastle Canada inc (Groupe Permacon), à l’effet de ne s’échanger aucun document de nature confidentielle concernant la requérante et ses filiales (Groupe produits Alba);
[35] FIXE l’audition de la requête pour ordonnance d’injonction interlocutoire au 17 juin 2004 en Cour supérieure, district de Québec, palais de justice de Québec, pour être entendue par l’Honorable Michèle Lacroix, j.c.s.;
[36] ORDONNE la signification du jugement aux intimés;
[37] DISPENSE les parties de la signification du jugement;
[38] DISPENSE les parties de fournir caution;
[39] ENTÉRINE l’échéancier signé par les parties le 8 juin 2004 et déposé en annexe au procès-verbal d’audience et ORDONNE aux parties de s'y conformer;
[40] LE TOUT frais à suivre.
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__________________________________ J. ROGER BANFORD, J.C.S. |
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Me Marc Watters |
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Gagné, Letarte |
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Procureurs de la requérante |
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Me Chantal Perrault - Me Guy Paquette |
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Paquette, Gadler |
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Procureurs de l’intimé |
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Me Simon-Pierre Hébert |
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McCarthy, Tétrault |
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Procureurs de l’intimée |
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Me Eleni Yiannakis |
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Fasken, Martineau |
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Procureurs des mises en cause |
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Me Gina Doucet Cain, Lamarre et ass. Procureurs de la mise en cause Société en commandite Soccrent 2
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Date d’audience : |
8 juin 2004 (en chambre) |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.