Décision

Les décisions diffusées proviennent de tribunaux ou d'organismes indépendants de SOQUIJ et pourraient ne pas être accessibles aux personnes handicapées qui utilisent des technologies d'adaptation. Visitez la page Accessibilité pour en savoir plus.
Copier l'url dans le presse-papier
Le lien a été copié dans le presse-papier
Modèle de décision CLP - avril 2013

Lavoie et Entreprises de construction Gigari inc.

2014 QCCLP 3231

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Saguenay

2 juin 2014

 

Région :

Saguenay-Lac-Saint-Jean

 

Dossier :

533762-02-1402

 

Dossier CSST :

121329577

 

Commissaire :

Jean Grégoire, juge administratif

 

Membres :

Rodrigue Lemieux, associations d’employeurs

 

Alain Hunter, associations syndicales

______________________________________________________________________

 

 

 

Guy Lavoie

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Les entreprises de construction Gigari inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 10 février 2014, monsieur Guy Lavoie (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 28 janvier 2014 à la suite d'une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme une première décision qu’elle a rendue le 1er novembre 2013 et déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais d’entretien courant du domicile reliés au déneigement et à l’entretien du terrain.

[3]           Une audience s’est tenue le 7 avril 2014 à Saguenay en présence du travailleur et de sa représentante. Pour sa part, Les entreprises de construction Gigari inc. (l’employeur) n’étaient pas représentées lors de cette audience.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]           Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a droit au remboursement des frais de déneigement de l’entrée principale de sa résidence à compter de la période hivernale 2009-2010 y incluant, pour l’année 2013 - 2014, les frais reliés au déneigement des allées piétonnières.

[5]           D’autre part, le travailleur spécifie qu’il ne réclame plus le remboursement des frais reliés à la tonte de la pelouse.

L’AVIS DES MEMBRES

[6]           Le membre issu des associations d’employeurs ainsi que le membre issu des associations syndicales sont d’avis unanime que la requête du travailleur doit être partiellement accueillie.

[7]           Ils sont d’avis que la preuve prépondérante est à l’effet que la demande visant le remboursement des frais engagés pour les travaux de déneigement de l’entrée principale de son domicile à compter de la période hivernale 2010-2011, satisfait à toutes les conditions prévues à l’article 165 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi). En ce qui concerne les frais de déneigement pour la période hivernale 2009-2010, les membres estiment que la demande du travailleur est prescrite.

[8]           Finalement, les membres sont d’avis que le travailleur n’a pas droit à des sommes d’argent pour le déneigement des allées piétonnières de sa résidence pour la période hivernale 2013-2014, puisqu’il n’a pas engagé de frais pour ce service.

LES FAITS ET LES MOTIFS

[9]           La Commission des lésions professionnelles doit décider si le travailleur a droit au remboursement des frais reliés au déneigement de l’entrée principale de son domicile, et ce, à compter de la période hivernale 2009-2010, ainsi que ceux se rapportant au déneigement des allées piétonnières à compter de l’hiver 2013-2014.

[10]        L’article 145 de la loi prévoit qu’un travailleur victime d’une lésion professionnelle et qui demeure avec une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique a droit à la réadaptation que requiert son état :

145.  Le travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit, dans la mesure prévue par le présent chapitre, à la réadaptation que requiert son état en vue de sa réinsertion sociale et professionnelle.

__________

1985, c. 6, a. 145.

 

 

[11]        De façon plus spécifique, c’est l’article 165 de la loi qui prévoit les conditions requises pour qu’un travailleur ait droit au remboursement des frais reliés à l’entretien courant de son domicile ainsi que le montant[2] maximal auquel il peut avoir droit :

165.  Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.

__________

1985, c. 6, a. 165.

 

 

[12]        Relativement à la présence d’une atteinte permanente grave à l’intégrité physique dont il est fait référence à l’article 165 de la loi, la jurisprudence du tribunal a déjà spécifié que cette notion devait s’analyser en fonction de la capacité résiduelle du travailleur à effectuer les travaux visés par cette disposition. Cette interprétation se retrouve notamment dans l’affaire Allard et Plomberie Lyonnais inc.[3], où l’on peut lire que :

[16] La jurisprudence a défini le caractère grave de l’atteinte permanente en regard de la finalité de l’article 165 de la loi qui est l’exécution des travaux d’entretien courant du domicile3.  Ainsi, il s’agit d’évaluer si les limitations fonctionnelles du travailleur découlant de sa perte d’intégrité physique l’empêchent d’exécuter lui-même les travaux d’entretien réclamé.

__________

            3          Général Électrique du Canada Inc. et Nazir Mohammed Shaikh, 19395-62-9905, 23 octobre 1992, Francine Dion Drapeau, commissaire 

 

            [sic]

 

[13]        De plus, la jurisprudence a depuis longtemps reconnu que les travaux de déneigement des voies d’accès du domicile[4] représentent des travaux d’entretien courant du domicile au sens de l’article 165 de la loi.

[14]        Une fois ces balises juridiques établies, analysons maintenant la preuve dont dispose le tribunal dans le présent dossier.

[15]        Le 6 septembre 2001, le travailleur est victime d’un accident du travail lorsqu’il chute d’un toit d’une hauteur de quatorze pieds. Il subit alors une fracture du calcanéum droit.

[16]        Le 7 septembre 2001, le chirurgien orthopédiste François Lefebvre procède à la réduction ouverte avec fixation interne par plaque et vis de cette fracture au calcanéum.

[17]        Le 27 mars 2002, un rapport final est complété par le docteur Lefebvre sur lequel il indique que la lésion est consolidée avec séquelles permanentes et limitations fonctionnelles.

[18]        Le 9 mai 2002, le docteur Lefebvre procède à l’évaluation des séquelles permanentes que conserve le travailleur. Dans son rapport signé le 13 mai 2002, le médecin écrit ce qui suit relativement à la condition du talon droit :

[…]

 

Actuellement, il accuse toujours une douleur persistante, quoiqu’il s’améliore lentement. Il boite toujours et accuse une difficulté importante à la marche, surtout sur des terrains accidentés. Il n’a pas de douleur nocturne. Il n’a toujours pas repris son travail.

 

[…]

 

[sic]

 

 

[19]        Un déficit anatomophysiologique de 3 % (code 107342) ainsi qu’un préjudice esthétique de 1 % (code 224402) sont par la suite reconnus au travailleur par le docteur Lefebvre. De plus, les limitations fonctionnelles suivantes sont recommandées :

[…]

 

En raison du type de fracture et de la forte probabilité de l’installation d’une arthrose post-traumatique au dépend de l’articulation sous-astragalienne, des limitations fonctionnelles s’imposent. Il devrait éviter la marche ainsi que la station debout prolongée, plus particulièrement sur terrains accidentés. Pour ce qui est des échelles et des échafaudages, il devrait les éviter, au moins temporairement.

 

[sic]

 

 

[20]        Le 7 juin 2006, la CSST détermine que le travailleur est maintenant capable d’occuper l’emploi convenable d’estimateur de dommages.

[21]        Le 12 septembre 2012, le docteur Donald Boulianne pose le diagnostic d’arthralgie à la cheville droite. Il souligne que le travailleur présente une boiterie par moment et l’utilisation d’une canne lui est alors recommandée.

[22]        Le 4 janvier 2013, la CSST déclare, à la suite d'une révision administrative, que le travailleur n’a pas subi une récidive, rechute ou aggravation, et ce, au motif qu’il n’y a pas de détérioration objective de sa condition douloureuse à la cheville droite.

[23]        Le 1er octobre 2013, le travailleur fait parvenir une lettre à la CSST par laquelle il demande le remboursement des frais d’entretien de son domicile, notamment ceux se rapportant au déneigement de l’entrée principale pour les périodes hivernales 2009-2010 à 2012-2013. De plus, il ajoute une soumission pour le déneigement des allées piétonnières pour la saison hivernale 2013-2014.

[24]        Le 1er novembre 2013, la CSST refuse au travailleur le remboursement des frais réclamés pour les travaux d’entretien courant de sa résidence.

[25]        Le 28 janvier 2014, à la suite d'une révision administrative, la CSST confirme que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais réclamés pour le déneigement et l’entretien du terrain, telle la tonte du gazon.

[26]        Le 10 février 2014, le travailleur dépose à la Commission des lésions professionnelles, une requête par laquelle il conteste la décision rendue par la CSST le 28 janvier 2014, d’où le présent litige.

[27]        Lors de l’audience, le tribunal a entendu le témoignage du travailleur. Ce dernier confirme être propriétaire d’une résidence à Jonquière depuis l’année 1998.

[28]        Il explique qu’avant l’accident du travail subi en 2001, il effectuait lui-même, à l’aide d’une petite souffleuse, le déneigement des voies d’accès de son domicile, y incluant les allées piétonnières. Il ajoute que suite à l’invalidité découlant de cet événement, ce sont ses enfants qui se sont occupés des travaux de déneigement de sa résidence. Il souligne cependant qu’à compter de la période hivernale 2009-2010, il a dû engager un entrepreneur pour s’occuper de cette tâche, ses enfants n’y habitant plus. Quant aux allées piétonnières, le travailleur admet avoir continué de les entretenir lui-même, mais avec difficulté. À ce propos, il affirme s’être souvent fait mal au pied droit en déblayant celles-ci, sa cheville droite se renversant facilement et lui occasionnant des chutes.

[29]        Par ailleurs, le travailleur confirme occuper, depuis 2007, un emploi d’évaluateur immobilier, emploi impliquant des visites d’immeubles afin d’en évaluer la valeur marchande. Il mentionne que lors de son premier emploi dans cette fonction, il pouvait avoir jusqu’à cinq visites par jour à effectuer. Depuis 2012, il occupe un nouvel emploi d’évaluateur immobilier lui demandant moins d’heures de travail hebdomadaire ainsi que seulement trois à quatre visites d’immeubles par semaine.

[30]        Il complète son témoignage en soulignant que le contrat apparaissant à son dossier pour le déneigement des allées piétonnières, pour l’hiver 2013-2014, est en fait une soumission et admet ne pas avoir engagé les frais de 776,08 $ y apparaissant.

[31]        De ces éléments de preuve documentaire et testimoniale, le tribunal estime que la requête du travailleur doit être accueillie, mais seulement en ce qui concerne les frais reliés au déneigement de l’entrée principale de sa résidence pour les périodes hivernales 2010-2011 à 2012-2013.

[32]        Tout d’abord, le tribunal estime que la preuve permet de considérer que le travailleur conserve, à la suite de sa lésion professionnelle du 6 septembre 2001, une atteinte permanente grave au sens de l’article 165 de la loi.

[33]        En effet, outre la présence d’un déficit anatomophysiologique de 3 %, le travailleur demeure avec des limitations fonctionnelles lui demandant d’éviter la marche ou la station debout prolongée, particulièrement sur des terrains accidentés. Dans son rapport d’évaluation médicale du 13 mai 2002, le docteur Lefebvre soulignait d’ailleurs que le travailleur présentait une boiterie et une difficulté « importante » à la marche, surtout sur des terrains accidentés. Or, de l’avis du tribunal, le déneigement de l’entrée principale d’une résidence ainsi que des voies d’accès piétonnières impliquent de la marche prolongée sur des terrains accidentés, contrevenant ainsi à l’une des limitations fonctionnelles émises par le docteur Lefebvre.

[34]        Cette conclusion se justifie d’autant plus que selon le témoignage du travailleur, ce dernier a subi plusieurs chutes en déneigeant les allées piétonnières de sa résidence, puisque sa cheville droite se renverse facilement. Qui plus est, bien qu’une récidive, rechute ou aggravation ait été refusée en 2012 par la CSST, l’attestation médicale du docteur Boulianne complétée en 2012, est à l’effet que le travailleur présente encore, à l’occasion, une boiterie et qu’il doit utiliser une canne pour se déplacer. Sa condition de santé l’a d’ailleurs amené à changer d’emploi en 2012, afin de réduire la fréquence des visites d’immeubles qu’il devait alors effectuer dans le cadre de son emploi convenable.

[35]        D’autre part, le témoignage non contredit du travailleur est à l’effet qu’avant l’accident du travail de 2001, il effectuait lui-même le déneigement des voies d’accès de sa résidence. Bien qu’après sa lésion professionnelle, ce sont ses enfants qui s’occupaient de cette tâche, il en demeure néanmoins, selon la preuve au dossier, que n’eût été sa lésion professionnelle, le travailleur effectuerait aujourd’hui lui-même ce type de travaux.

[36]        Qui plus est, le tribunal tient à rappeler que la jurisprudence a déjà souligné qu’en vertu de l’article 165 de la loi, un travailleur n’a pas démontré qu’il effectuait lui-même les travaux d’entretien avant sa lésion professionnelle, mais plutôt qu’il « effectuerait » lui-même les travaux en cause n’eût été sa lésion professionnelle. Ce raisonnement se retrouve notamment dans l’affaire Bacon et General Motors du Canada ltée et CSST[5], où l’on peut lire que :

[77] La prochaine condition à remplir est que les travaux d’entretien réclamés soient des travaux que le travailleur « effectuerait normalement lui-même si ce n’était de sa lésion ». D’entrée de jeu, le tribunal remarque que la CSST et certaines décisions du présent tribunal semblent remplacer le verbe « effectuerait » par « effectuait » en référant systématiquement au vécu prélésionnel du travailleur au niveau des travaux d’entretien courant du domicile. Le tribunal note que le législateur a plutôt utilisé le verbe « effectuer » au conditionnel et non pas à l’imparfait. Le tribunal estime donc qu’il doit plutôt rechercher dans la preuve les éléments démontrant ce qui se serait passé dans l’éventualité où le travailleur ne s’était pas blessé et non pas systématiquement et uniquement ce qu’il faisait auparavant. Bien entendu, le vécu passé du travailleur pourra être garant de l’avenir et constituer une preuve très importante pour démontrer qu’il n’aurait pas effectué lui-même certains travaux. Cependant, si un travailleur peut démontrer par une preuve prépondérante que, bien qu’il n’effectuait pas lui-même les travaux d’entretien courant avant sa lésion il les aurait effectués après cette lésion, ceci lui permettra d’obtenir les bénéfices prévus par la Loi.

 

[78] Cette interprétation a d’ailleurs été adoptée par le commissaire Pierre Simard dans l’affaire Huard et Huard13. Dans cette affaire, un travailleur avait acquis une résidence après la survenance de sa lésion professionnelle de sorte qu’avant cette lésion, il n’effectuait pas lui-même la tonte du gazon. En se procurant cette résidence, le travailleur constate qu’il est incapable de procéder lui-même à la tonte du gazon et il demande à la CSST le remboursement des frais encourus à cet effet, ce que la CSST refuse prétextant qu’il n’effectuait pas lui-même cette tâche auparavant n’ayant pas de gazon à couper. La Commission des lésions professionnelles décide dans cette affaire que lorsqu’elle interprète le terme « effectuerait normalement lui-même », la CSST en révision administrative ajoute à cette condition qui emploie le conditionnel, une seconde condition à savoir que le travailleur devait lui-même accomplir les travaux antérieurement à sa lésion professionnelle. Selon la Commission des lésions professionnelles, donner un tel sens à l’article 165 en réduit considérablement la portée, ce qui est inacceptable. Le test constitue donc plutôt de vérifier si le travailleur, dans l’hypothèse où il n’aurait pas subi de lésion professionnelle, effectuerait lui-même les  travaux. Le présent tribunal se rallie totalement


 

à cette position qui est conforme à l’objectif ultime de la Loi tel qu’énoncé à son article 1, soit la réparation des lésions professionnelles ainsi que des conséquences qu’elles entraînent pour les bénéficiaires.

________________

13        Déjà citée.

 

[sic]

 

 

[37]        Le soussigné partage entièrement le raisonnement contenu dans cette affaire et conclut que n’eussent été les conséquences de sa lésion professionnelle, le travailleur « effectuerait » lui-même le déneigement des voies d’accès de sa résidence.

[38]        La Commission des lésions professionnelles conclut donc que le travailleur a droit au remboursement des frais encourus pour le déneigement de l’entrée principale de sa résidence pour les périodes hivernales 2010-2011 à 2012-2013.

[39]        En ce qui concerne les frais de déneigement de l’entrée principale pour la période hivernale 2009-2010, le tribunal estime que le travailleur n’y a pas droit, puisque sa réclamation est prescrite.

[40]        En effet, bien que la loi ne prévoie aucun délai pour produire une demande de remboursement de frais visés au chapitre IV de la loi portant sur la réadaptation, plusieurs décisions[6] du tribunal appliquent, à titre supplétif, la prescription de trois ans prévue à l’article 2925 du Code civil du Québec[7], disposition qui se lit comme suit :

2925. L'action qui tend à faire valoir un droit personnel ou un droit réel mobilier et dont le délai de prescription n'est pas autrement fixé se prescrit par trois ans.

_________________

1991, c. 64, a. 2925.

 

 

[41]        L’application de ce délai de trois ans prévue à l’article 2925 du Code civil du Québec[8], à une demande visant le remboursement rétroactif de frais pouvant être couverts par la CSST en vertu des dispositions portant sur la réadaptation, a été confirmée dans une décision de la Cour supérieure dans l’affaire Sinclair[9], où l’on peut lire que :

[26] Le tribunal souligne que le droit d'obtenir le remboursement de frais d'aide personnelle apparaît au chapitre IV de la Loi qui s'intitule RÉADAPTATION. Cette possibilité de remboursement se situe dans un chapitre distinct de celui du droit à obtenir des indemnités qui se trouvent au chapitre III de la L.A.T.M.P.  La demande d'aide personnelle constitue un recours autonome en vertu de l'article 158 de la L.A.T.M.P.

 

[27] De par sa nature, la demande d'aide à la réadaptation s'inscrit normalement de façon concomitante à la réclamation d'indemnités de remplacement du revenu ainsi que les autres indemnités octroyées par la loi. Toutefois, en l'absence d'une disposition claire dans la L.A.T.M.P. quant au délai pour produire une demande découlant du chapitre III de la L.A.T.M.P., il est raisonnable pour la C.L.P. d'appliquer à titre supplétif la prescription de trois ans édictée à l'article 2925 C.c.Q.

 

[sic]

 

 

[42]        Malgré que les décisions précédemment citées, dont celle de la Cour supérieure, portent sur des demandes reliées à de l’aide personnelle à domicile, le soussigné considère, à l’instar de l’affaire Pouliot et Coopérative forestière du Nord-Ouest et CSST[10], que le raisonnement retenu dans ces décisions doit être appliqué dans le cas d’une demande rétroactive de remboursement de frais d’entretien courant du domicile visé à l’article 165 de la loi, puisqu’il s’agit d’une problématique de même nature.

[43]        En l’espèce, la preuve révèle que c’est seulement le 1er octobre 2013 que le travailleur adresse à la CSST une demande visant à obtenir le remboursement de frais reliés à des travaux d’entretien courant de son domicile pour les années 2009-2010 à 2012-2013. C’est ainsi qu’en appliquant le délai de prescription de trois ans à compter du 1er octobre 2013, force est de conclure que la demande du travailleur est prescrite pour les travaux de déneigement effectués durant la saison hivernale 2009-2010.

[44]        Finalement, la Commission des lésions professionnelles estime que le travailleur n’a pas droit au paiement de la somme de 776,08 $ pour le déneigement des allées piétonnières pour la période hivernale 2013-2014. En effet, bien que la preuve prépondérante démontre que le travailleur est incapable d’effectuer lui-même cette tâche de manière sécuritaire, le tribunal retient que selon le témoignage du travailleur, il n’a pas engagé ces frais.

[45]        Le tribunal rappelle que pour avoir droit au remboursement de frais pour des travaux d’entretien courant du domicile prévu à l’article 165 de la loi, ceux-ci doivent avoir été réellement déboursés par le travailleur, ce que la preuve ne démontre pas pour les frais reliés au déneigement des allées piétonnières.

[46]        La requête du travailleur est donc partiellement accueillie.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE en partie la requête de monsieur Guy Lavoie, le travailleur;

MODIFIE la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 28 janvier 2014 à la suite d'une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement des frais de déneigement pour l’entrée principale de son domicile pour les périodes hivernales 2010-2011, 2011-2012 et 2012-2013 jusqu’à concurrence du montant maximal prévu à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles pour chacune de ces années.

 

 

 

 

Jean Grégoire

 

 

 

 

Mme Martine Duchesne

Représentante de la partie requérante

 



[1]          RLRQ, c. A-3.001.

[2]           Pour l’année 2009, le montant maximal pouvant être réclamé pour des travaux d’entretien courant du domicile était de 2 836 $; pour l’année 2010, le montant maximal était de 2 847 $; pour l’année 2011, le montant maximal était de 2 895 $; pour l’année 2012, le montant maximal était de 2 976 $ et finalement, pour l’année 2013, le montant maximal était de 3 030 $.

[3]           C.L.P. 141253-04B-0006, 11 décembre 2000, H. Thériault.

[4]           Voir notamment Lévesque et Mines Northgate inc., [1990] C.A.L.P. 683 et plus récemment, l’affaire Gauthier et Services Yott ltée (F), 2011 QCCLP 2859.

[5]           C.L.P. 226939-04-0402, 17 novembre 2004, J.-F. Clément.

[6]           Voir notamment l’affaire Charron et Marché André Martel inc., [2010] C.L.P. 219, révision rejetée sur une autre question, 2011 QCCLP 5854.

[7]          RLRQ, c. C-1991.

[8]           Id.

[9]           Sinclair c. Commission des lésions professionnelles, 2011 QCCS 3637.

[10]         2013 QCCLP 4546.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.