Décision

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Modèle de décision CLP - juillet 2015

Maheux et Gypses de Beauce (fermé)

2016 QCTAT 1328

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL

(Division de la santé et de la sécurité du travail)

 

 

Région :

Chaudière-Appalaches

 

Dossier :

586286-03B-1510

 

Dossier CNESST :

129301412

 

Lévis,

le 29 février 2016

______________________________________________________________________

 

DEVANT LE JUGE ADMINISTRATIF :

Claude Lavigne

______________________________________________________________________

 

 

 

Marcel Maheux

 

Partie demanderesse

 

 

 

et

 

 

 

Les Gypses de Beauce (Fermé)

 

Partie mise en cause

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 1er octobre 2015, monsieur Marcel Maheux (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste la décision rendue le 20 août 2015 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 3 juillet 2015. Elle déclare que le calcul de l’indemnité de remplacement du revenu est conforme à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi). Elle déclare que l’indemnité de remplacement du revenu ne doit pas être modifiée lors de la révision du 22 juillet 2015 et finalement déclare que le travailleur recevra des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à l’âge de 68 ans. Cependant, à compter de son 65e anniversaire de naissance, cette indemnité de remplacement du revenu diminuera progressivement à raison de 25 % la première année, de 50 % l’année suivante et de 75 % la dernière année.

[3]           Le 1er janvier 2016, la Loi instituant le Tribunal administratif du travail[2] (la LITAT) est entrée en vigueur. Cette loi crée le Tribunal administratif du travail qui assume les compétences de la Commission des relations du travail et de la Commission des lésions professionnelles. En vertu de l’article 261 de cette loi, toute affaire pendante devant la Commission des relations du travail ou devant la Commission des lésions professionnelles est continuée devant la division compétente du Tribunal administratif du travail.

[4]           De plus, depuis le 1er janvier 2016, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (la Commission) assume les compétences autrefois dévolues à la CSST.

[5]           Audience tenue le 29 janvier 2016 à St-Joseph-de-Beauce en présence du travailleur. Les Gypses de Beauce (l’employeur) est par ailleurs fermé.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[6]           Le travailleur demande au Tribunal administratif du travail de déclarer qu’il a droit de recevoir des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à son décès.

LES FAITS

[7]           Pour une grande partie des faits ayant donné lieu au présent litige, le Tribunal administratif du travail s’en remet à ceux que rapporte la Commission des lésions professionnelles dans sa décision rendue le 15 juin 2009, décision par laquelle elle déclare que l’emploi de téléphoniste en télémarketing ne constitue pas un emploi convenable pour le travailleur et qu’il a toujours droit aux prestations.

[8]           Le dossier du travailleur est donc retourné à la CSST pour traitement approprié.

[9]           Le 23 juillet 2010, la CSST écrit au travailleur pour l’informer qu’il ne peut reprendre son travail et qu’elle lui détermine l’emploi de préposé au service à la clientèle comme convenable avec capacité pour lui de l’exercer à compter du 27 juillet 2010.

[10]        Par cette même décision, la CSST dispose également du revenu annuel estimé de cet emploi de 19 813,20 $. Étant en recherche d’emploi, elle l’informe que les indemnités de remplacement du revenu se poursuivront jusqu’à ce qu’il occupe cet emploi ou au plus tard jusqu’au 27 juillet 2011. Après cette date, elles seront réduites, décision que le travailleur porte en révision le 2 août 2010.

[11]        Le 25 novembre 2010, la CSST, à la suite d’une révision administrative, confirme sa décision rendue le 23 juillet 2010, dernière décision que le travailleur conteste à la Commission des lésions professionnelles le 13 décembre 2010.

[12]        Dans le cadre d’un processus de conciliation, le travailleur, le 26 août 2011, se désiste de sa contestation. À cette occasion, il signe une transaction par laquelle la CSST s’engage à revoir la capacité du travailleur en terme d’heures à exercer cet emploi de préposé au service à la clientèle.

[13]        Dans le cadre d’une démarche de la CSST pour réviser les indemnités de remplacement du revenu que reçoit le travailleur, elle l’informe, le 3 juillet 2015, que comme il est sans emploi, ses indemnités de remplacement du revenu ne seront pas modifiées. Ainsi, il recevra des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge de 68 ans, indemnités qui seront toutefois réduites à compter de son 65e anniversaire, décision que le travailleur porte en révision le 31 juillet 2015.

[14]        Le 20 août 2015, la CSST, à la suite d’une révision administrative, confirme sa décision rendue le 3 juillet 2015, dernière décision que le travailleur conteste à la Commission des lésions professionnelles le 1er octobre 2015.

[15]        À l’audience, le travailleur dépose la copie de la transaction intervenue avec la CSST, transaction qui est par ailleurs déjà colligée à son dossier. Le travailleur livre également témoignage.

[16]        De ce témoignage, le Tribunal administratif du travail retient que le travailleur n’accepte pas que la CSST diminue ses indemnités de remplacement du revenu à compter de son 65e anniversaire, du moins il prétend que c’est contraire à l’entente intervenue entre eux le 26 août 2011 voulant qu’il reçoive des indemnités de remplacements de revenu jusqu’à son décès.

[17]        Après que le tribunal ait fait remarquer au travailleur qu’il n’y avait pas dans cette transaction de paragraphe confirmant ses dires, soit que la CSST allait continuer de lui verser des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à son décès, le travailleur soumet que c’est ce qu’il avait compris.

[18]        Par la suite, le tribunal précise au travailleur que cette diminution de ses indemnités de remplacement du revenu se fonde sur l’application de l’article 56 de la loi.

[19]        En terminant, le travailleur parle alors de discrimination fondée sur l’âge et demande à ce que l’article 56 de la loi ne lui soit pas applicable.

LES MOTIFS

[20]        Le Tribunal administratif du travail doit déterminer si le travailleur a droit de recevoir ses pleines indemnités de remplacement du revenu après la date de son 65e anniversaire de naissance.

[21]        La loi prévoit, à l’article 56, l’obligation pour la CSST de réduire les indemnités de remplacement du revenu que reçoit un travailleur à compter du 65e anniversaire de naissance.

56.  L'indemnité de remplacement du revenu est réduite de 25 % à compter du soixante-cinquième anniversaire de naissance du travailleur, de 50 % à compter de la deuxième année et de 75 % à compter de la troisième année suivant cette date.

 

Cependant, l'indemnité de remplacement du revenu du travailleur qui est victime d'une lésion professionnelle alors qu'il est âgé d'au moins 64 ans est réduite de 25 % à compter de la deuxième année suivant la date du début de son incapacité, de 50 % à compter de la troisième année et de 75 % à compter de la quatrième année suivant cette date.

__________

1985, c. 6, a. 56.

 

 

[22]        Dans le dossier à l’étude, le travailleur prétend que lors de la transaction intervenue entre lui et la CSST, le 26 août 2011, qu’il a été convenu qu’il recevrait ses indemnités de remplacement du revenu jusqu’à la fin de ses jours.

[23]        Dans un premier temps, le Tribunal administratif du travail a pris soin de relire l’entente en question avec le travailleur et a été à même de constater qu’il n’y avait aucune disposition à cet effet.

[24]        Sensibilisé de cette constatation, le travailleur soumet que c’est l’interprétation qu’il en faisait.

[25]        Dans un dernier temps, le travailleur parle de discrimination en raison de l’âge et demande à ce que l’article 56 de la loi ne lui soit pas applicable.

[26]        Sur ce volet, le tribunal rappelle que si c’était de l’intention du travailleur de contester la validité de l’article 56 de la loi sur lequel se fonde la CSST pour éventuellement réduire ses indemnités de remplacement du revenu à compter de son 65e anniversaire de naissance, il aurait dû au préalable en informer le procureur général, ce qui n’a pas été fait en l’instance.

[27]        Au surplus, le Tribunal administratif du travail informe le travailleur que pareille démarche a déjà été entreprise dans le passé et a donné lieu à une décision de la Cour d’appel du Québec dans l’affaire Côté et CSST[3]. À cette occasion, la Cour d’appel a confirmé la validité constitutionnelle de l’article 56 de la loi et a ajouté que même si l’article 56 contient une disposition fondée sur l’âge, celle-ci n’était pas pour autant discriminatoire.

[28]         Par la suite, la Commission des lésions professionnelles, par déférence pour la Cour d’appel dans la cause précitée, s’est ralliée à cette interprétation donnée par la Cour d’appel et  l’actuel tribunal ne voit pas en quoi il pourrait en être autrement aujourd’hui.

[29]        Dès lors, le Tribunal administratif du travail doit reconnaître comme étant fondée la décision rendue le 20 août 2015 par la CSST, à la suite d’une révision administrative.

 

 

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL :

REJETTE la contestation de monsieur Marcel Maheux, le travailleur, introduite le 1er octobre 2015;

CONFIRME la décision rendue le 20 août 2015 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que l’indemnité de remplacement du revenu ne doit pas être modifiée lors de la révision du 22 juillet 2015 puisque le travailleur n’exerçait aucun emploi à ce moment;

DÉCLARE que le travailleur recevra des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à l’âge de 68 ans. Cependant, à compter de son 65e anniversaire de naissance, cette indemnité de remplacement du revenu diminuera progressivement à raison de 25 % la première année, de 50 % l’année suivante et de 75 % la dernière année.

 

 

__________________________________

 

Claude Lavigne

 

 

 

M. Marcel Maheux

Pour lui-même

 

Date de la dernière audience :      29 janvier 2016

 



[1]           RLRQ, c. A-3.001.

[2]          RLRQ, c. T-15.1.

[3]           2012 Q.C.C.A. 1146.

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