A.B. c. Société du 400e anniversaire de Québec |
2009 QCCAI 175 |
Commission d’accès à
l’information du Québec
Dossier : 08 13 71
Date : Le 7 août 2009
Commissaire : Me Jean Chartier
A… B…
Demandeur
c.
SOCIÉTÉ DU 400E ANNIVERSAIRE
DE QUÉBEC
DEMANDE DE RÉVISION en matière d’accès en vertu de l’article
[1] Le 9 juin 2008, le demandeur transmet par courriel la demande d’accès suivante :
« En accord avec la loi d’accès a l’information, je voudrais pouvoir consulter, dans les meilleurs délais possibles, les documents de votre organisme relatifs à la rémunération des artistes principaux en vedette pour le 400e, notamment Céline Dion pour son spectacle sur les plaines. »
[sic]
[2] Le 20 juin 2008, l’organisme (la Société du 400e) avise le demandeur qu’il n’est pas soumis à la Loi sur l’accès. Elle refuse de lui communiquer les renseignements relatifs à la rémunération des artistes principaux.
[3] Le 15 juillet 2008, le demandeur transmet à la Commission d’accès à l’information (la Commission) une demande de révision de la décision de l’organisme.
AUDIENCE
[4] Le 8 juin 2009, une audience est tenue à Québec en présence des parties.
PREUVE DE L’ORGANISME
Françoise Boudreau
[5] Elle est la directrice générale de la Société du 400e depuis le 1er novembre 2008 et, à ce titre, elle est responsable des demandes d’information. Elle reconnaît la réponse transmise au demandeur le 20 juin 2008 et maintient que la Société du 400e n’est pas assujettie à la Loi sur l’accès. Elle dépose, à l’appui de son témoignage, une copie des lettres patentes de la Société du 400e (pièce O-1) délivrées le 14 décembre 1999. Ces lettres patentes démontrent que la Société du 400e a été créée en vertu de la Partie III de la Loi sur les compagnies[2].
[6] Elle dépose également le règlement de la Société du 400e (pièce O-2). Elle attire l’attention de la Commission sur les dispositions qui traitent de la composition du conseil d’administration et du statut des membres de la corporation.
[7] Elle dépose enfin un document intitulé « Budget global des revenus et des dépenses pour les exercices financiers du 1er mars 2005 au 31 mars 2009 » (pièce O-3).
[8] Selon le témoin, les lettres patentes et les règlements ne confèrent aucun droit à la Ville de Québec ou au gouvernement du Québec pour la nomination d’un administrateur sur le conseil de la Société du 400e. De plus, cette dernière n’a aucune obligation de recruter les membres de son personnel et de les rémunérer conformément à la Loi sur la fonction publique[3]. Enfin, elle rappelle que la Société du 400e a été créée en vertu de la Partie III de la Loi sur les compagnies et qu’elle est une société sans but lucratif.
[9] Elle ajoute que la Société du 400e est toujours en activité et que les employés qui demeurent en fonction sont occupés à établir le bilan final de la Société du 400e en vue de sa dissolution prochaine.
[10] Contre-interrogée par le demandeur, elle explique que les différents niveaux de gouvernements (municipal, provincial et fédéral) ont identifié un représentant pour agir à titre de « commissaire ». Ces personnes ne faisaient pas partie du conseil d’administration de la Société du 400e et avaient uniquement pour fonction d’assurer un lien entre leur gouvernement respectif et la Société du 400e. La Ville de Québec était représentée par une employée, Mme Annie Brassard, qui a succédé à M. Serge Allen, également employé de la Ville de Québec.
PREUVE DU DEMANDEUR
[11] Selon le demandeur, le dépôt de la pièce O-3 (budget global des revenus et dépenses) démontre que la Société du 400e était subventionnée par les fonds publics. Selon le demandeur, cet apport de fonds publics est suffisant pour en faire un organisme public au sens de la Loi sur l’accès. En conséquence, tout citoyen qui le demande devrait obtenir les informations et les documents visés par sa demande d’accès. Si la Commission conclut que la Société du 400e n’est pas un organisme public soumis à la Loi sur l’accès, les citoyens ne pourront jamais savoir si les fonds publics investis dans cette société ont été bien gérés.
[12] Selon le demandeur, le maire actuel de la Ville de Québec et les deux personnes qui l’ont précédé dans cette fonction étaient les véritables décideurs et sont intervenus dans toutes les décisions importantes de la Société du 400e.
REPRÉSENTATIONS
[13]
Le procureur de
la Société du 400e soumet que sa cliente n’est pas assujettie à la
Loi sur l’accès puisqu’elle ne rencontre pas les conditions d’application
prévues à cette loi pour être considérée comme un « organisme
public ». Il réfère la Commission aux articles
[14] En conséquence, le demandeur n’a pas de droit formel à obtenir les informations qu’il réclame. Selon le procureur, la Commission a déjà décidé[4] que le fardeau de prouver l’assujettissement de la Société du 400e à la Loi sur l’accès reposait sur le demandeur, ce qu’il n’a pas fait.
DÉCISION
[15]
La Société du
400e est-elle assujettie à la Loi sur l’accès ? L’article
1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers.
Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents : écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre.
[16]
Par ailleurs,
l’article
3. Sont des organismes publics : le gouvernement, le Conseil exécutif, le Conseil du trésor, les ministères, les organismes gouvernementaux, les organismes municipaux, les organismes scolaires et les établissements de santé ou de services sociaux.
Sont assimilés à des organismes publics, aux fins de la présente loi: le lieutenant-gouverneur, l'Assemblée nationale, un organisme dont celle-ci nomme les membres et une personne qu'elle désigne pour exercer une fonction en relevant, avec le personnel qu'elle dirige.
Les organismes publics ne comprennent pas les tribunaux au sens de la Loi sur les tribunaux judiciaires (chapitre T-16).
[17]
Les articles
4. Les organismes gouvernementaux comprennent les organismes non visés dans les articles 5 à 7, dont le gouvernement ou un ministre nomme la majorité des membres, dont la loi ordonne que le personnel soit nommé suivant la Loi sur la fonction publique (chapitre F-3.1.1) ou dont le fonds social fait partie du domaine de l'État.
Aux fins de la présente loi, le curateur public est assimilé à un organisme gouvernemental, dans la mesure où il détient des documents autres que ceux visés par l'article 2.2.
Est assimilée à un organisme gouvernemental, aux fins de la présente loi, une personne nommée par le gouvernement ou par un ministre, avec le personnel qu'elle dirige, dans le cadre des fonctions qui lui sont attribuées par la loi, le gouvernement ou le ministre.
5. Les organismes municipaux comprennent :
1° une municipalité, une communauté métropolitaine, une régie intermunicipale, une société de transport en commun et l'Administration régionale Kativik;
2° tout organisme que la loi déclare mandataire ou agent d'une municipalité et tout organisme dont le conseil d'administration est formé majoritairement de membres du conseil d'une municipalité;
2.1° tout organisme dont le conseil d'administration est formé d'au moins un élu municipal siégeant à ce titre et dont une municipalité ou une communauté métropolitaine adopte ou approuve le budget ou contribue à plus de la moitié du financement;
3° une société d'économie mixte constituée conformément à la Loi sur les sociétés d'économie mixte dans le secteur municipal (chapitre S-25.01) et un organisme analogue constitué conformément à une loi d'intérêt privé, notamment les personnes morales constituées en vertu des chapitres 56, 61 et 69 des lois de 1994, du chapitre 84 des lois de 1995 et du chapitre 47 des lois de 2004.
Sont assimilés à des organismes municipaux, aux fins de la présente loi: un centre local de développement et une conférence régionale des élus visés respectivement par la Loi sur le ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation (chapitre M-30.01) et par la Loi sur le ministère des Affaires municipales et des Régions (chapitre M-22.1).
Toutefois, l'Union des municipalités du Québec et la Fédération québécoise des municipalités locales et régionales ne sont pas des organismes municipaux.
[18] La preuve démontre que la Société du 400e a été formée par lettres patentes du 14 décembre 1999 en vertu de la Partie III de la Loi sur les compagnies (pièce O-1).
[19] La preuve démontre qu’aucun des administrateurs n’a été nommé par le gouvernement ou un ministre.
[20] Le règlement de la Société du 400e (pièce O-2) ne contient aucune disposition qui réserve au gouvernement ou à un ministre le droit d’en nommer les membres.
[21] La preuve démontre que le personnel de la Société du 400e n’est pas nommé suivant la Loi sur la fonction publique.
[22] La preuve démontre que la Société du 400e ne comptait aucun élu de la Ville de Québec sur son conseil d’administration et, à aucun moment, la Ville de Québec n’en approuvait le budget ou ne contribuait à plus de la moitié de son financement. Bien au contraire, la pièce O-3 démontre que sur un total de 103 700 000 $ de revenus ou de subventions, la Ville de Québec a contribué pour 5 000 000 $.
[23] Le demandeur n’a prouvé aucun fait et n’a déposé aucun document démontrant que la Société du 400e est assujettie à la Loi sur l’accès.
[24] Dans l’affaire Syndicat de la fonction publique du Québec c. Société Parc-Auto du Québec[5], la commissaire Boissinot écrit :
« Je suis d’avis que le fardeau de prouver l’assujettissement de la Société à la Loi reposait en grande partie sur les épaules du demandeur qui l’alléguait automatiquement en formulant sa demande de révision. Le demandeur n’a pas relevé ce fardeau. Le demandeur ne peut rester sur ses positions et s’en remettre à la décision de la Commission sans d’aucune façon participer au débat qu’il a lui-même provoqué. »
[25]
La preuve
démontre qu’aucun des critères prévus aux articles
[26] Qu’il s’agisse du financement de la Société du 400e, de la composition du conseil d’administration ou de la rémunération du personnel rien ne démontre l’assujettissement de la Société du 400e à la Loi sur l’accès.
[27] En conséquence, la preuve ne permet pas au soussigné de conclure que la Société du 400e est un organisme public au sens de la Loi sur l’accès.
POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION :
[28] DÉCLARE que la Société du 400e anniversaire de Québec n’est pas assujettie à la Loi sur l’accès;
[29] DÉCLARE irrecevable la demande de révision;
[30] FERME le dossier.
JEAN CHARTIER
Commissaire
Me David Blair
Heenan Blaikie Aubut
Avocats de la Société du 400e
[1] L.R.Q., c. A-2.1, la Loi sur l’accès.
[2] L.R.Q., c. C-38.
[3] L.R.Q., c. F-3.1.1.
[4] Syndicat de la fonction publique du Québec c. Société Parc-Auto du Québec, C.A.I. no 01 09 25, c. Boissonnot, 19 avril 2002; Hélène Cloutier c. Ministère de l’Environnement, C.A.I. no 01 08 39, c. Laporte, 17 juillet 2002; Daniel Rock c. Fonds d’indemnisation des services financiers, C.A.I. no 01 06 95, c. Stoddard, 16 janvier 2002; Nicolas St-Pierre c. Société de la Vallée de l’Aluminium, C.A.I. no 02 14 12, c. Boissinot, 7 août 2003; Réjean Lemoine c. Institut Canadien du Québec, C.A.I. no 94 16 80, c. Boissinot, 16 octobre 1995; Organisation des usagers de la réserve Saint-Maurice c. Corporation de développement durable de Mékinac, C.A.I. no 03 05 82, c. Boissnot, 22 juillet 2005.
[5] Note 4.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.