Bétit c. Samsung électronique du Canada inc. |
2014 QCCQ 1860 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
ARTHABASKA |
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LOCALITÉ DE |
VICTORIAVILLE |
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« Chambre civile » |
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N° : |
415-32-006130-135 |
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DATE : |
13 mars 2014 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
PIERRE LABBÉ, J.C.Q. |
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GEORGES BÉTIT, |
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Demandeur |
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c. |
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SAMSUNG ÉLECTRONIQUE DU CANADA INC., |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Le demandeur réclame à la défenderesse 3 897,96 $ parce que le téléviseur de marque Samsung acheté en 2009 a cessé de fonctionner après trois ans et demi d’usage.
[2] La somme réclamée se détaille de la façon suivante :
§ Remboursement du prix d’achat du téléviseur : 2 857,96 $
§ Frais de poste recommandée : 20 $
§ Frais de déplacement : 20 $
§ Perte de jouissance du téléviseur : 500 $
§ Ennuis et inconvénients : 500 $.
[3] La défenderesse conteste la demande, invoquant l’expiration de la garantie contractuelle de deux ans.
[4] Le Tribunal retient de la preuve les faits pertinents suivants.
[5] Le 20 septembre 2009, le demandeur a acheté au magasin Costco de Trois-Rivières un téléviseur de marque Samsung avec écran de 58 pouces au prix de 2 857,96 $ taxes incluses (P-1).
[6] Le 1er avril 2013, le téléviseur a cessé soudainement de fonctionner, c’est-à-dire qu’il n’y avait plus d’image. Dans sa déclaration pour valoir témoignage, Madeleine Royer, conjointe du demandeur, explique en détail ce qui est survenu. Il n’y avait plus d’image ni de son et il y avait une odeur de brûlé.
[7] Le 3 avril 2013, le demandeur a communiqué avec le service à la clientèle de la défenderesse. On lui a répondu que la garantie contractuelle était terminée et qu’on ne pouvait rien faire pour lui. Il devait s’occuper de faire réparer le téléviseur à ses frais.
[8] Le demandeur a communiqué avec un technicien de Victoriaville, André Pellerin. Ce dernier a changé un fusible le 6 avril 2013, mais cela n’a apporté aucun résultat. Il a apporté le téléviseur à son atelier. Il a examiné l’appareil et a conclu que c’est l’écran qui était défectueux. Son évaluation des réparations du 12 avril 2013 (P-2) totalise 2 529,43 $, dont 1 899,99 $ pour l’écran plasma. Monsieur Pellerin a témoigné sur son évaluation.
[9] Le demandeur a communiqué à nouveau avec le service à la clientèle de la défenderesse. Il a parlé à un monsieur Riss. Il lui a fait part de l’estimation pour les réparations. Ce dernier a réaffirmé le refus de la défenderesse de payer pour les réparations.
[10] Le demandeur s’est alors débarrassé du téléviseur au début du mois de mai en l’envoyant au magasin Costco à Trois-Rivières. Ce dernier l’a ensuite transmis à une école de Trois-Rivières où des téléviseurs usagés servent pour l’apprentissage des étudiants.
[11] Le demandeur a ensuite communiqué avec l’Office de la protection du consommateur.
[12] Le 22 mai 2013, le demandeur a envoyé une mise en demeure à la défenderesse (P-3) accompagnée d’une photocopie de l’évaluation de monsieur Pellerin. Il réclamait alors le remboursement du prix d’achat du téléviseur, soit 2 857,96 $ en faisant état des démarches qu’il avait effectuées jusqu’à ce jour.
[13] Par lettre du 3 juin 2013 (P-4), la défenderesse a nié responsabilité. Il est utile de reproduire le deuxième paragraphe de cette lettre :
À Samsung, nous respectons la garantie légale. Cependant dans votre situation particulière monsieur Betit, nous pourrons réparer votre produit sous garantie pour pièces Seulement et vous serez donc responsable de payer pour la main d’œuvre. Par conséquent, nous avons le regret de vous informer que nous ne pourrons pas faire suite à votre demande de remboursement. [Reproduit tel quel]
[14] Le 22 juin 2013 (P-5), le demandeur a écrit à nouveau à la demanderesse. Il rappelle dans cette lettre que monsieur Riss lui a mentionné que la défenderesse ne pouvait rien faire pour lui et en conséquence, qu’il s’est débarrassé du téléviseur. Il fait une offre, à savoir d’acheter un nouveau téléviseur Samsung et que la défenderesse applique le crédit qu’elle voulait lui faire pour les pièces sur le prix de ce nouveau téléviseur.
[15] Par lettre du 18 juillet 2013 (P-6), la défenderesse a répondu qu’elle ne pouvait accepter son offre.
[16] Monsieur Gélineau, technicien, a témoigné pour la défenderesse. Il a affirmé qu’André Pellerin n’est pas un centre spécialisé accrédité par Samsung et que le demandeur aurait dû s’adresser à un tel centre qui est Hébert électronique à Victoriaville. À ce centre, les pièces coûtent 30 % moins cher que chez monsieur Pellerin. Il a précisé que le coût des pièces pour Samsung est de 600 $.
[17] Monsieur Gélineau a aussi mentionné que la durée de vie d’un tel téléviseur est de cinq ans, selon le marché.
[18] En contre-preuve, le demandeur a précisé que le vendeur, en 2009, lui a mentionné qu’un tel téléviseur avait une durée de vie fonctionnelle d’environ 10 ans. Il a aussi mentionné que jamais Samsung ne lui a dit qu’il pouvait s’adresser au magasin Hébert électronique.
[19] Pour sa part, André Pellerin a témoigné que le coût des pièces mentionnées à son évaluation est celui pour des pièces Samsung.
ANALYSE
[20] La vente du téléviseur en 2009 est couverte par la Loi sur la protection du consommateur[1]. Le demandeur invoque l’article 38 de cette Loi qui prévoit une garantie de durée raisonnable :
38. Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d'utilisation du bien.
[21] En vertu de l’article 54 L.p.c. le consommateur peut exercer le recours directement contre le fabricant :
54. Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d'exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur une obligation résultant de l'article 37, 38 ou 39.
Un recours contre le fabricant fondé sur une obligation résultant de l'article 37 ou 38 peut être exercé par un consommateur acquéreur subséquent du bien.
[22] Enfin, l’article 272 de cette Loi énumère les recours possibles pour le consommateur :
272. Si le commerçant ou le fabricant manque à une obligation que lui impose la présente loi, un règlement ou un engagement volontaire souscrit en vertu de l'article 314 ou dont l'application a été étendue par un décret pris en vertu de l'article 315.1, le consommateur, sous réserve des autres recours prévus par la présente loi, peut demander, selon le cas:
a) l'exécution de l'obligation;
b) l'autorisation de la faire exécuter aux frais du commerçant ou du fabricant;
c) la réduction de son obligation;
d) la résiliation du contrat;
e) la résolution du contrat; ou
f) la nullité du contrat,
sans préjudice de sa demande en dommages-intérêts dans tous les cas. Il peut également demander des dommages-intérêts punitifs.
[23] Le demandeur utilisait le téléviseur à raison de trois heures par jour environ. Rien dans la preuve n’indique qu’il en a fait un usage excessif. Le prix payé était élevé. La durée de vie normale est d’environ 10 ans.
[24] Le téléviseur n’a fonctionné que trois ans et demi.
[25] La preuve amène le Tribunal à la conclusion que le téléviseur n’a pas fonctionné pendant une durée raisonnable considérant les critères prévus à l’article 38 L.p.c. Cette garantie s’applique et donne ouverture aux recours prévus à l’article 272 L.p.c.
[26] Le refus mentionné dans les lettres de la défenderesse de respecter cette garantie légale constitue une intention claire de ne pas donner suite à la réclamation du demandeur, ce qui constitue une mise en demeure de plein droit au sens de l’article 1597 du Code civil du Québec :
1597. Le débiteur est en demeure de plein droit, par le seul effet de la loi, lorsque l'obligation ne pouvait être exécutée utilement que dans un certain temps qu'il a laissé s'écouler ou qu'il ne l'a pas exécutée immédiatement alors qu'il y avait urgence.
Il est également en demeure de plein droit lorsqu'il a manqué à une obligation de ne pas faire, ou qu'il a, par sa faute, rendu impossible l'exécution en nature de l'obligation; il l'est encore lorsqu'il a clairement manifesté au créancier son intention de ne pas exécuter l'obligation ou, s'il s'agit d'une obligation à exécution successive, qu'il refuse ou néglige de l'exécuter de manière répétée.
[Soulignements ajoutés]
[27] Dans ces circonstances, le demandeur pouvait donc disposer du téléviseur sans nuire à ses recours.
[28] Le demandeur n’a pas droit au remboursement du prix de vente, car il ne demande pas la résolution de celle-ci. Il ne peut de toute façon la demander, car il ne possède plus le téléviseur. Le coût des réparations ne peut non plus lui être accordé, pour le même motif. Le recours approprié en vertu de l’article 272 L.p.c. est la réduction de son obligation relative au prix, que le Tribunal fixe à 1 000 $.
[29] La preuve révèle que le demandeur n’a pas subi de perte de jouissance réelle de la télévision puisqu’il avait un second téléviseur à la maison.
[30] Les frais de poste ne peuvent être accordés en l’absence de preuve documentaire.
[31] L’article 272 L.p.c. permet au Tribunal d’accorder également des dommages, dommages que le Tribunal fixe à 200 $ pour les ennuis et inconvénients, notamment les démarches, que la situation a causés au demandeur.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[32] ACCUEILLE en partie la demande;
[33] CONDAMNE la défenderesse à payer au demandeur la somme de 1 200 $, avec intérêts au taux légal, majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 22 mai 2013;
[34] CONDAMNE la défenderesse à payer au demandeur les frais judiciaires de 136 $.
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__________________________________ PIERRE LABBÉ, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
25 février 2014 |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.