Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Joliette

5 février 2004

 

Région :

Lanaudière

 

Dossier :

183367-63-0205-2

 

Dossier CSST :

119869824

 

Commissaire :

Me Diane Besse

 

Membres :

M. Alain Allaire, associations d’employeurs

 

Mme Giselle Rivet, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

André Perreault

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Malo Transport (1971) inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 1er mai 2002, monsieur André Perreault (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) le 16 avril 2002, à la suite d’une révision administrative.

[2]                Par cette décision, la CSST rejette dans un premier temps trois contestations logées par Malo Transport (1971) inc. (l’employeur).

[3]                La CSST confirme la décision rendue initialement le 9 octobre 2001 quant à l’absence d’emploi convenable disponible chez l’employeur et à la poursuite du versement de l’indemnité de remplacement du revenu au plus tard jusqu’au 2 octobre 2002.

[4]                La CSST confirme de plus la décision rendue le 20 novembre 2001 refusant de reconsidérer celle du 9 octobre 2001 en l’absence de faits nouveaux et déclare sans effet la décision du 23 août 2001 puisqu’elle a été remplacée par celle du 12 décembre 2001 suite à un avis rendu par le membre du Bureau d’évaluation médicale.

[5]                Finalement, par sa décision du 16 avril 2002, la révision administrative de la CSST conclut que la demande de révision logée par le travailleur le 12 mars 2002 à l’encontre de la décision rendue le 9 octobre 2001 est irrecevable parce que soumise hors délai. La CSST ajoute que le travailleur avait contesté cette décision le 2 novembre 2001 mais qu’il s’est désisté le 15 novembre 2001.

[6]                Le 18 août 2003, la Commission des lésions professionnelles a tenu une audience en présence du travailleur qui était représenté. L’employeur était absent bien que dûment convoqué.

 

REMARQUE PRÉLIMINAIRE

[7]                Le 30 janvier 2003, les parties étaient convoquées devant la Commission des lésions professionnelles puisqu’elles avaient toutes deux contesté la décision rendue par la CSST le 16 avril 2002 à la suite d’une révision administrative. Ces requêtes avaient généré l’ouverture du dossier numéro 183408-63-0205 pour l’employeur et 183367-63-0205 pour le travailleur. À l’audience du 30 janvier 2003, le travailleur, son procureur et le représentant de l’employeur étaient présents.

[8]                Lors de cette audience, le procureur du travailleur a questionné la recevabilité des demandes de révision formulées par l’employeur à l’encontre des décisions rendues initialement par la CSST les 9 octobre et 20 novembre 2001 et l’employeur s’est désisté de sa contestation de la décision rendue initialement le 23 août 2001.

[9]                Avec l’accord du tribunal, les parties ont convenu que l’audience du 30 janvier 2003 ne porterait que sur la question préliminaire, que les représentants procéderaient par argumentation et que l’audience sur le fond aurait lieu le 18 août 2003.

[10]           Dans une décision[1] rendue le 29 mai 2003, la commissaire soussignée accueillait le moyen préliminaire soulevé par le représentant du travailleur et déclarait irrecevables les demandes de révision soumises par l’employeur à l’encontre des décisions rendues par la CSST le 9 octobre et le 20 novembre 2001.

[11]           Dans ces circonstances, l’audience du 18 août 2003 ne visait que la requête soumise par le travailleur.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[12]           Dans sa requête transmise à la Commission des lésions professionnelles le 1er mai 2002, le procureur du travailleur indique qu’il conteste la décision relative à l’irrecevabilité de la demande de révision logée par son client.

[13]           Dans une lettre adressée au tribunal le 7 octobre 2002, il reprend ce motif de contestation et précise qu’il désire également contester la décision rejetant la contestation de l’employeur relativement à la décision rendue initialement le 9 octobre 2001.

[14]           À l’audience, le procureur du travailleur soumet avoir contesté la décision rendue par la révision administrative dans le délai prévu à la loi et qu’en conséquence, le tribunal est valablement saisi de la question de la détermination de l’emploi convenable.

[15]           Subsidiairement, il soumet que le travailleur a démontré un motif valable permettant de le relever du défaut d’avoir soumis sa demande de révision dans le délai prévu à la loi.

[16]           Il invoque que le désistement signé par le travailleur le 15 novembre 2001 de la demande de révision qu’il avait logée le 2 novembre 2001 à l’encontre de la décision rendue par la CSST le 9 octobre 2001 traitant de l’emploi convenable a été fait en contrepartie d’un engagement de la CSST qui n’a pas été respecté.

[17]           Il soumet que la CSST aurait laissé entendre au travailleur que la décision déterminant l’emploi convenable pourrait être modifiée si, suite aux mesures de support en recherche d’emploi, il était démontré qu’il était incapable d’occuper l’emploi de chauffeur de camion sans manutention.

[18]           Dans les circonstances du présent dossier, les mesures de support en recherche d’emploi s’étant avérées inefficaces, le travailleur a constaté qu’il ne pouvait occuper cet emploi et avec les informations nouvelles dont elle disposait, la CSST aurait dû modifier le plan individuel de réadaptation et déterminer un autre emploi convenable.

 

LES FAITS

[19]           Après avoir pris connaissance du dossier, des documents additionnels déposés dans le cadre de l’audience et entendu les témoignages du travailleur et de madame Andrée Godin, conseillère en orientation, la Commission des lésions professionnelles retient les éléments suivants.

[20]           Monsieur Perreault a occupé des emplois de boucher de 1985 à 1997 chez divers employeurs.

[21]           La CSST a accepté la réclamation du travailleur pour une maladie professionnelle qui s’est manifestée le 30 juillet 1997 alors qu’il occupait les fonctions de désosseur de viande chez Salaison Trahan inc., entreprise qui a cessé ses activités en 1998. Cette réclamation a généré l’ouverture du dossier CSST portant le numéro 113288807 et, dans une décision rendue le 26 novembre 1999, la révision administrative de la CSST précise que le diagnostic d’épicondylite bilatérale a été retenu, que cette lésion est consolidée le 6 juillet 1998 sans déficit anatomo-physiologique mais avec les limitations fonctionnelles suivantes : « éviter tout emploi nécessitant des mouvements de dorsiflexion répétés des poignets ou des mouvements de supination ou pronation de manière répétée des avant-bras ».

[22]           La CSST a par la suite accepté une récidive, rechute ou aggravation qui s’est manifestée le 7 août 1998 et, le 21 janvier 1999, un relâchement de l’épicondylien gauche était pratiqué. Cette lésion a été consolidée le 15 mars 1999 sans déficit anatomo-physiologique mais avec les limitations fonctionnelles suivantes décrites par le docteur Guy Le Bouthillier, chirurgien-orthopédiste, dans son rapport d’évaluation du 15 mars 1999 :

Le patient aurait comme limitations fonctionnelles d’éviter les mouvements répétitifs en dorsiflexion et en prosupination au niveau de l’avant-bras gauche, d’éviter de forcer contre des grosses résistances avec une dorsiflexion du poignet gauche.

 

 

 

[23]           Suite à la consolidation de cette lésion, la CSST a déterminé l’emploi convenable de chauffeur de camions lourds de classe I et autorisé une formation de 15 heures au Centre de formation Cabano Kingsway. Le travailleur a complété et réussi cette formation de même que les examens de la Société d’assurance automobile du Québec qui lui a octroyé un permis de conduire de classe I. Dans sa décision du 26 novembre 1999, la révision administrative de la CSST a conclu que le travailleur était capable d’occuper cet emploi à compter du 15 mars 1999, décision qui est devenue finale.

[24]           Suite à cette décision, le travailleur a fait la livraison de viande pendant environ six mois mais la CSST a reconnu que cet emploi ne respectait pas ses limitations fonctionnelles parce qu’il devait tirer sur des palettes.

[25]           À compter du mois de mars 2000, le travailleur devient camionneur chez l’employeur où il conduit des camions de vrac (roches, sable, engrais, charbon, etc.). Il considère que c’était un emploi exigeant physiquement, particulièrement lorsqu’il installait les toiles sur la marchandise en tirant sur les cordes, manipulait la manivelle pour élever ou descendre la remorque, s’agrippait des deux mains pour atteindre les poignées pour grimper dans la remorque et lorsqu’il devait replacer des palettes de marchandise qui avaient bougé pendant le transport.

[26]           Il conduisait aussi des camions citernes et le plus difficile était de dévisser les couvercles et tirer sur les boyaux de 5 pouces de diamètre et 8 pieds de longueur installés sur le dessus du camion. Il avait de plus de la difficulté pendant les déplacements compte tenu des nombreux changements de vitesse et de la position à bout de bras pour tenir le volant qui vibrait.

[27]           Le 4 décembre 2000, le travailleur s’inflige une tendinite de l’épaule droite en exécutant ce travail. La révision administrative de la CSST accepte cette réclamation, décision qui est confirmée par la Commission des lésions professionnelles[2] le 28 novembre 2001.

[28]           Dans son rapport d’évaluation médicale signé le 16 août 2001, le docteur Guy Le Bouthillier évalue à 3 % le déficit anatomo-physiologique résultant de cette lésion et décrit comme suit la condition de son patient :

Actuellement, le patient dit avoir toujours un peu la même douleur. Il dit que ses douleurs sont nettement pires lorsqu’il a les bras au-dessus des épaules, lorsqu’il doit maintenir les bras devant lui à 90° pendant de longues heures, surtout lorsqu’il y a une vibration au niveau des membres inférieurs lorsqu’il conduit et lorsqu’il doit forcer pour mettre en tension les toiles et faire des manipulations forcées avec son membre supérieur droit.

 

 

[29]           Le docteur Le Bouthillier décrit des limitations fonctionnelles qui sont reprises par le docteur David Wiltshire, orthopédiste, dans un avis signé le 5 décembre 2001 à titre de membre du Bureau d’évaluation médicale. Les limitations fonctionnelles à respecter sont les suivantes :

Le travailleur doit éviter :

 

Des mouvements répétitifs du membre supérieur droit,

 

De travailler avec le membre supérieur droit plus haut que la hauteur des épaules,

 

De travailler avec le membre supérieur droit à la hauteur de l’épaule au plus haut de façon statique,

 

De lever des charges de plus de 40 lb.

 

 

 

[30]           Suite à la réception du rapport d’évaluation médicale signé par le docteur Le Bouthillier, le dossier est pris en charge par monsieur Claude Gouger, conseiller en réadaptation à la CSST qui confie à monsieur Claude Bougie, ergothérapeute, le mandat d’analyser la capacité de travail de monsieur Perreault en tenant compte des limitations fonctionnelles retenues.

[31]           Le 28 août 2001, le travailleur rencontre monsieur Gouger et des explications lui sont données sur le processus de réadaptation. Monsieur Gouger note que le travailleur est inquiet et regrette l’emploi convenable de chauffeur de camion qui a été retenu antérieurement parce qu’il n’apprécie pas les longues heures de travail et considère qu’il s’agit d’un travail exigeant compte tenu de sa condition physique.

[32]           Le 11 septembre 2001, une visite du poste de travail est effectuée en présence des personnes suivantes : monsieur André Perreault, monsieur Alain Beaudry, représentant de l’employeur, monsieur Claude Bougie, ergothérapeute mandaté par la CSST, et monsieur Claude Gouger, conseiller en réadaptation. À ses notes, monsieur Gouger précise que le but de la rencontre est de valider les gestuelles de travail en regard des limitations fonctionnelles afin de statuer sur la capacité du travailleur à refaire son emploi.

[33]           Après une revue des tâches, tous les participants conviennent que les gestuelles autres que la conduite ne respectent pas les limitations fonctionnelles retenues et que le travail ne peut être adapté ou modifié. Monsieur Gouger ajoute que l’employeur affirme ne pas avoir d’autres activités de camionnage respectant les limitations fonctionnelles du travailleur. Il ajoute que les postes de mécanicien et commis aux pièces dans l’entreprise ne respectent pas les limitations fonctionnelles et qu’aucun poste de répartiteur ou de commis n’est disponible.

[34]           Il est donc convenu que le travailleur ne peut refaire son emploi de chauffeur, qu’il n’y a aucun autre emploi disponible dans l’entreprise et qu’il faudra procéder à une évaluation des possibilités professionnelles.

[35]           À son rapport d’évaluation, monsieur Bougie émet les commentaires et recommandations suivantes :

Nous retenons que le travail de camionneur n’implique pas de mouvements répétitifs avec le membre supérieur droit, que ce travail n’implique pas de manutentions de charges de plus de 40 livres. Toutefois, nous avons pu observer que pour atteindre et actionner la manivelle et pour fixer les sangles, le travailleur devait effectuer des mouvements au-dessus des épaules. Pour ces motifs, nous devons considérer que l’emploi de chauffeur de camion pour la livraison de produits en vrac ou en citerne ne respecte pas les limitations fonctionnelles de M. Perreault.

 

En regard d’un emploi de chauffeur de camion, nous constatons que le travailleur utilise ses deux membres supérieurs pour atteindre les barres d’appui pour accéder au camion, que la conduite du camion peut s’effectuer en utilisant les deux membres supérieurs en conservant une amplitude sous les 70° de flexion antérieure ou d’abduction, que le positionnement du bras de vitesse, utilisé avec le membre supérieur droit, permet d’utiliser le membre supérieur en conservant l’épaule en adduction ou légère abduction. L’emploi de chauffeur de camion seulement permet de respecter les limitations fonctionnelles de M. Perreault. Les facteurs de risques sont principalement reliés aux tâches de chargement et de déchargement du contenu.

 

 

 

[36]           Le 3 octobre 2001, le travailleur rencontre le conseiller en réadaptation afin de prendre connaissance du rapport de monsieur Bougie et d’en évaluer les conséquences.

[37]           Aux notes évolutives, monsieur Gouger mentionne que monsieur Perreault reconnaît que la conduite de camion respecte ses limitations fonctionnelles et l’on fait référence au transport de conteneurs, copeaux de bois, citernes de produits liquides et toute autre marchandise sur palette transportée dans une boîte fermée.

[38]           Le conseiller ajoute que le travailleur convient qu’il s’agit d’un emploi convenable qu’il est capable d’occuper et que le revenu qu’il pourrait tirer de cet emploi est équivalent à celui qu’il recevait lors de sa lésion. Le conseiller mentionne que le travailleur contestera cette décision si nécessaire et informera la CSST lorsqu’il occupera un emploi.

[39]           Dans une décision rendue le 9 octobre 2001, la CSST détermine l’emploi convenable que le travailleur est capable d’occuper. Le premier paragraphe de cette décision se lit comme suit :

Comme nous en avions convenu, nous avons entrepris des démarches auprès de votre employeur. Ces démarches nous ont permis de conclure que vous ne pouvez pas refaire votre emploi de chauffeur de camion à cause des diverses manutentions requises, et qu’il n’y a pas d’autre emploi disponible chez votre employeur. Tel que nous en avons discuté lors de nos rencontres, nous désirons vous informer qu’après avoir analysé les conséquences de votre lésion professionnelle du 4 décembre 2000, nous considérons que vous êtes capable, à compter du 3 octobre 2001, d’occuper un emploi convenable de chauffeur de camion sans manutention. Cet emploi vous rapportera un revenu équivalent à votre emploi pré-lésionnel.

 

 

 

[40]           Les notes évolutives du 23 octobre 2001 réfèrent à un appel téléphonique de l’employeur qui demande à rencontrer le conseiller en réadaptation parce qu’il aurait peut-être un emploi convenable à offrir au travailleur. Une rencontre est prévue le 7 novembre 2001.

[41]           Le 24 octobre 2001, le conseiller en réadaptation rencontre le travailleur. Le but de cette rencontre est de faire le suivi sur la recherche d’emploi et de regarder la possibilité d’un emploi convenable chez l’employeur.

[42]           À cette date, le travailleur n’occupe aucun emploi et il a axé ses recherches dans d’autres secteurs d’activité que le transport. Le conseiller en réadaptation indique qu’avant de mettre en place une mesure de support pour trouver un emploi de chauffeur de camion, il veut d’abord discuter d’une autre possibilité, soit un emploi convenable chez l’employeur où est survenue la lésion. Le travailleur se dit ouvert à une telle solution.

[43]           Dans une lettre transmise à la CSST le 2 novembre 2001, le travailleur conteste la décision rendue le 9 octobre 2001 dans les termes suivants :

Motifs de la contestation :

 

Je suis en désaccord, avec la décision rendu, Le 9 oct. 2001. De la manière que cela a été écrit, (Capacité de réintégrer un poste de camionneur, cependant sans manutention.) Si on fait le tour de l’industrie du transport, il n’a pratiquement pas d’emploi sans manutention, où même très peu d’emploi, qui respecte mes limitation et je me sens restreint dans ma recherche d’emploi. [sic]

 

 

[44]           Le 7 novembre 2001, une rencontre a lieu chez l’employeur à laquelle participent messieurs Alain Beaudry et Gérald Corneau, représentants de l’employeur, et le conseiller en réadaptation de la CSST. Le but de cette rencontre est d’analyser la proposition d’emploi faite par l’employeur, soit celui de chauffeur de camion-citerne. Le conseiller en réadaptation note que cet emploi avait été analysé lors de l’évaluation précédente et qu’il ne respectait pas les limitations fonctionnelles du travailleur en ce qui a trait aux manoeuvres exigées pour débloquer le tuyau d’évacuation. L’employeur affirme qu’il existe une nouvelle technique qui permettrait au travailleur d’exécuter cet emploi et il est convenu qu’un complément d’analyse sera demandé à monsieur Bougie qui avait fait la première évaluation.

[45]           Aux notes évolutives du 8 novembre 2001, le conseiller en réadaptation réfère entre autres à la contestation du travailleur relativement à sa capacité d’exercer l’emploi convenable retenu. Le conseiller mentionne que le travailleur est en désaccord avec le libellé « chauffeur sans manutention » et qu’il souhaiterait des exemples d’emploi. Le travailleur confirme ne pas avoir effectué de recherches d’emploi dans ce secteur d’activité mais avoir plutôt tenté d’obtenir d’autres types d’emploi. Il est convenu qu’une rencontre aura lieu après la finalisation de l’étude de l’offre d’emploi proposée par l’employeur afin de résoudre cette problématique.

[46]           Le 12 novembre 2001, une rencontre a lieu chez l’employeur à laquelle participent le travailleur, les représentants de l’employeur et le conseiller en réadaptation. Le but de cette rencontre est d’analyser l’offre d’emploi de chauffeur de camion-citerne.

[47]           À cette occasion, l’employeur précise qu’il ne peut offrir de travail régulier en transport local seulement sur des quarts de jour parce qu’il doit respecter l’ancienneté des autres chauffeurs et il pourrait être affecté à des trajets aux États-Unis, ce que le travailleur refuse. Le travailleur indique qu’il a un problème d’assoupissement au volant lorsqu’il conduit la nuit et qu’il veut revenir à son domicile le soir parce qu’il a de jeunes enfants.

[48]           Le conseiller en réadaptation informe les parties que la CSST étudiera l’emploi offert afin de déterminer s’il y a lieu de reconsidérer la décision rendue le 9 octobre 2001 traitant de l’emploi convenable.

[49]           Le 12 novembre 2001, l’employeur transmet au conseiller en réadaptation de la CSST une offre d’emploi adapté pour le travailleur reprenant les modalités discutées lors de la rencontre.

[50]           Le 14 novembre 2001, le conseiller en réadaptation analyse cette proposition de l’employeur en regard de la définition d’un emploi convenable édictée à l’article 2 de la loi qui se lit comme suit :

« emploi convenable » : un emploi approprié qui permet au travailleur victime d'une lésion professionnelle d'utiliser sa capacité résiduelle et ses qualifications professionnelles, qui présente une possibilité raisonnable d'embauche et dont les conditions d'exercice ne comportent pas de danger pour la santé, la sécurité ou l'intégrité physique du travailleur compte tenu de sa lésion.

 

 

[51]           Le conseiller en réadaptation rappelle que l’emploi de camionneur que le travailleur occupait chez l’employeur lors de son accident du travail de décembre 2000 était déjà un emploi convenable déterminé suite à la consolidation d’une autre lésion professionnelle.

[52]           Il précise que dans le cadre de la formation qui avait été autorisée pour le rendre capable d’exercer cet emploi convenable, la partie du programme traitant du transport aux États-Unis avait été retirée et l’emploi convenable retenu était celui de chauffeur de camion local seulement. Il ajoute que le travailleur est unilingue francophone et qu’il n’a jamais accepté de faire du transport autre que local.

[53]           L’employeur, pour sa part, confirme que lorsqu’un voyage est disponible, les chauffeurs sont contactés selon leur ancienneté; si un chauffeur refuse cette affectation, il s’expose à des sanctions administratives pouvant aller jusqu’au congédiement.

[54]           Après analyse de ces éléments, le conseiller en réadaptation conclut que le poste proposé par l’employeur ne constitue pas un emploi convenable pour le travailleur parce qu’il ne respecte pas la réalité de celui-ci et ses caractéristiques personnelles.

[55]           Aux notes évolutives de la CSST du 15 novembre 2001, le conseiller en réadaptation indique avoir téléphoné au travailleur, lui avoir expliqué la décision relativement à l’emploi offert par l’employeur et il ajoute que monsieur Perreault sera référé à un organisme spécialisé pour supporter sa recherche d’emploi.

[56]           Dans une lettre transmise à la CSST le 15 novembre 2001, le travailleur mentionne que suite aux explications reçues et à la mesure de support en recherche d’emploi qui a été mise en place, il se désiste de la contestation qu’il avait logée le 2 novembre 2001 à l’encontre de la décision de la CSST du 9 octobre 2001 concernant sa capacité d’occuper l’emploi convenable de chauffeur sans manutention.

 

[57]           Le travailleur explique que le conseiller en réadaptation a communiqué avec lui par téléphone pour lui offrir de l’aide à la recherche d’emploi en lui expliquant que si cette démarche montrait que le bassin d’emplois ne lui était pas favorable, il changerait sa décision.

[58]           Le travailleur affirme qu’avant d’autoriser cette aide à la recherche d’emploi, le conseiller en réadaptation a exigé qu’il se désiste de sa contestation. Il lui a alors demandé de lui donner des exemples d’emplois de chauffeur sans manutention qu’il pourrait occuper et le conseiller en réadaptation lui a dit de discuter de cette question avec madame Nathalie Guillemette qui lui ferait des suggestions d’emplois et le mettrait en contact avec des personnes susceptibles de lui trouver cet emploi. Le travailleur affirme s’être désisté de sa demande de révision suite à l’engagement pris par monsieur Gouger de revoir le plan individuel de réadaptation si les démarches étaient infructueuses.

[59]           Aux notes évolutives du 16 janvier 2001, monsieur Gouger note avoir communiqué avec madame Guillemette du Centre de formation Rive-Nord, un organisme spécialisé dans la formation et le placement dans le domaine du transport. Monsieur Gouger demande l’identification d’emplois de chauffeur qui respectent les limitations fonctionnelles retenues et tiennent compte du fait que le travailleur veut revenir à son domicile chaque soir et de la protection de la capacité de gains.

[60]           Le 20 novembre 2001, madame Guillemette présente une soumission à la CSST prévoyant le plan de formation suivant :

Recherche dynamique d’emploi :                         18 heures

Évaluation routière :                                      3 heures

Mise en page du curriculum vitae

 

 

[61]           Dans une lettre datée du 20 novembre 2001, la CSST réfère le travailleur à madame Guillemette pour l’aider dans sa recherche d’emploi.

[62]           Le 10 décembre 2001, le travailleur rencontre le conseiller en réadaptation qui note qu’il a réussi son évaluation pratique. Il mentionne avoir revu avec le travailleur les réalités du domaine du transport quant aux besoins et aux distances et note que celui-ci préférerait un emploi moins rémunérateur mais plus près de chez lui et qu’il s’informera pour un poste de contremaître dans un abattoir de porc; le conseiller en réadaptation note qu’il est convenu de discuter de cette option lorsque le travailleur aura obtenu les informations afin de valider si les tâches sont compatibles avec ses limitations fonctionnelles.

[63]           Le 26 décembre 2001, le conseiller en réadaptation note que le travailleur rencontrera madame Guillemette le 18 janvier 2002 pour analyser le type d’emplois de camionneur à postuler et débuter sa recherche active d’emploi.

[64]           À compter du mois de janvier 2002, le travailleur, avec l’aide de madame Guillemette, rédige son curriculum vitae et des projets de lettres destinées à d’éventuels employeurs. Le travailleur affirme qu’il avait dit au conseiller en réadaptation qu’il était en mesure d’effectuer ces démarches seul mais qu’on lui a demandé de se fier à madame Guillemette qui avait de nombreux contacts dans ce secteur d’activité.

[65]           Le 4 février 2002, le conseiller en réadaptation note que le travailleur rencontrera monsieur Claude Guillemette du Centre de formation Rive-Nord pour l’aider à cibler le type d’entreprise ou d’activité de camionnage pouvant répondre à ses besoins et respecter ses limitations fonctionnelles; il prévoit rencontrer le travailleur et monsieur Guillemette par la suite. Le conseiller note de plus que le travailleur a eu quelques entrevues pour d’autres types d’emplois mais sans succès; il lui rappelle que la mesure de support en recherche d’emploi vise à l’aider à trouver un emploi de camionneur et s’il n’est pas intéressé à cet emploi, il doit le dire immédiatement. Le travailleur lui dit que bien qu’il souhaiterait un autre emploi que celui de camionneur, il fera une recherche d’emploi honnête au printemps.

[66]           Le 7 février 2002, le conseiller en réadaptation rencontre le travailleur et monsieur Claude Guillemette, spécialiste en formation et placement en camionnage. À ses notes, le conseiller indique que monsieur Guillemette convient, après avoir revu les limitations fonctionnelles, que le travailleur ne peut effectuer certains emplois de camionneur comme par exemple son emploi d’origine. Il ajoute que suite aux informations obtenues de monsieur Guillemette, le travailleur peut occuper plusieurs types d’emplois dans les transports dont les suivants :

-          chauffeur d’autobus, autant urbain que scolaire

-          chauffeur de camion dont : dry box, citerne de produits liquides sauf l’huile à chauffage, vrac sur camions 10 ou 12 roues, toute marchandise sur palette transportée dans une boîte fermée, toute marchandise sur palette sur plate-forme ne demandant pas l’installation de toile, toute marchandise dans une boîte fermée principalement manipulée par des équipements et autres emplois que M. Guillemette identifierait au cours de sa recherche.

 

 

[67]           Le conseiller conclut en indiquant que M. Guillemette effectuera certains contacts et référera le travailleur pour des emplois respectant ses limitations fonctionnelles. Il ajoute que le travailleur est satisfait et est disponible pour des entrevues.

[68]           Le travailleur affirme que lors de cette rencontre, le conseiller en réadaptation donnait des exemples d’emplois que le travailleur pourrait occuper et monsieur Guillemette disait que cela ne respectait pas les limitations fonctionnelles entre autres parce que le transport local exige toujours de la manutention. Monsieur Guillemette considérait qu’il était incapable de travailler sur un camion de style « dry box » et le conseiller en réadaptation a alors monté le ton et monsieur Guillemette n’a plus rien dit. Après discussion, il a été convenu que seul l’emploi de chauffeur d’autobus urbain respectait les limitations fonctionnelles, l’emploi de chauffeur d’autobus scolaire ayant été écarté à cause du mécanisme d’ouverture des portes.

[69]           Le conseiller a alors demandé à monsieur Guillemette de lui trouver un emploi de chauffeur d’autobus urbain et ajouté qu’il changerait sa décision.

[70]           Aux notes évolutives du 15 février 2002, le conseiller en réadaptation inscrit que monsieur Guillemette a référé le travailleur pour un emploi de chauffeur en transport urbain.

[71]           À ses notes du 20 février 2002, le conseiller note que le travailleur a fait une demande d’emploi à Autobus Gaudreault mais qu’il n’a pas de nouvelles. En ce qui a trait à la recherche d’emploi pour un poste de camionneur, le travailleur l’informe que monsieur Guillemette lui a dit qu’après vérification, les compagnies embauchent directement les chauffeurs de camion citerne et qu’il devait entreprendre ses démarches lui-même. Pour les autres postes, le travailleur attendra en mars et avril pour ses démarches parce que c’est la période de pointe dans ce secteur. Le conseiller le réfère à divers emplois affichés et le travailleur affirme qu’il les contactera même s’il préférerait occuper un autre genre d’emploi à cause des conditions de travail dans ce secteur d’activité. Le travailleur lui dit qu’il ne croit pas être en mesure de se trouver un emploi de camionneur qui respecte ses limitations fonctionnelles, qu’il désire prendre un peu de recul et qu’il le contactera à nouveau au terme de sa réflexion.

[72]           Le 20 février 2002, le conseiller en réadaptation demande à monsieur Guillemette de suspendre la rédaction de son rapport.

[73]           Le 12 mars 2002, le travailleur écrit à la CSST et conteste la décision déterminant l’emploi convenable de camionneur sans manutention. Dans cette lettre, le travailleur réfère à la rencontre du 7 février 2002 à laquelle participaient le conseiller en réadaptation et monsieur Guillemette qui a alors indiqué que la conduite d’un semi-remorque fermé exige l’ouverture et la fermeture des portes plusieurs fois par jour avec les bras au-dessus des épaules, monter et descendre fréquemment et déplacer des objets parfois très lourds, ce qui ne respecte pas ses limitations fonctionnelles. Il conclut qu’il est peu probable qu’il puisse se trouver un emploi dans le secteur du transport et demande que la décision soit révisée.

[74]           À l’audience, le travailleur explique qu’il a décidé de contester la décision sur l’emploi convenable après qu’il ait, à la demande de monsieur Guillemette, soumis sa candidature pour un poste de chauffeur disponible et que deux semaines plus tard, il n’avait pas eu nouvelles.

[75]           Le 5 avril 2002, le conseiller en réadaptation téléphone au travailleur pour obtenir des explications sur sa contestation. À ses notes, il mentionne qu’après réflexion, le travailleur a contacté un avocat qui lui a affirmé qu’aucun emploi de chauffeur de camion respecte ses limitations fonctionnelles. Le travailleur ajoute que peu importe le support que pourrait lui apporter la CSST pour se trouver un emploi dans le secteur du transport, il veut être orienté dans un secteur d’activité plus sédentaire.

[76]           Le travailleur explique que lors de cette conversation téléphonique, le conseiller en réadaptation était mécontent de la contestation qu’il venait de recevoir. Le travailleur affirme lui avoir demandé de rendre une décision retenant l’emploi convenable de chauffeur d’autobus, ce que le conseiller a refusé parce qu’il n’avait pas reçu de nouvelles relativement à cette demande d’emploi.

[77]           Le travailleur affirme avoir téléphoné à plusieurs reprises à monsieur Guillemette qui ne lui retournait pas ses appels. Il a alors demandé à Me André Laporte de le représenter.

[78]           Aux notes évolutives du 9 avril 2002, le conseiller en réadaptation rapporte une conversation avec monsieur Guillemette qui confirme que le travailleur a fait une demande d’emploi comme chauffeur d’autobus mais qu’il n’était pas intéressé aux postes de camionneur ciblés et apportait continuellement des objections comme la difficulté à ouvrir et fermer les portes des remorques qui sont environ à la hauteur des épaules. Il ajoute que le travailleur n’a pas communiqué avec monsieur Guillemette depuis février 2002.

[79]           Le conseiller demande à monsieur Guillemette de lui transmettre un rapport précisant les types d’emplois que le travailleur est capable d’occuper dans le secteur du camionnage.

[80]           Le 30 avril 2002, Me Laporte écrit au conseiller en réadaptation et demande qu’une décision soit rendue reconnaissant les modifications apportées au plan de réadaptation et de déterminer un nouvel emploi convenable pour les raisons suivantes :

Suite à une discussion avec monsieur Perreault, nous constatons que vous avez modifié le plan de réadaptation adapté en octobre 2001. En effet, suite aux rencontres que vous avez eues avec monsieur Guillemette de l’agence au Boulot, ce formateur vous a informé qu’il était impossible que monsieur Perreault puisse occuper un emploi de chauffeur de camion sans manutention.

 

Vous avez donc orienté la réadaptation dans d’autres domaines suite à la connaissance de ces nouveaux faits.

 

 

 

[81]           Me Laporte affirme ne pas avoir reçu de réponse à ce courrier. Toutefois, suite à une demande de complément de dossier adressée à la CSST, un projet de lettre non signé et non daté semble lui être adressé puisqu’on réfère à la lettre du 30 avril 2002 en précisant que l’agence au Boulot a identifié plusieurs emplois de chauffeur de camion sans manutention convenant au travailleur. Aucune modification du plan de réadaptation n’a été apportée, une demande d’emploi ayant été acheminée à une entreprise de transport urbain qui offrait un poste de chauffeur, le travailleur ayant manifesté son intérêt pour cet emploi.

 

[82]           Le 2 mai 2002, le conseiller en réadaptation note qu’il attendra le rapport de monsieur Guillemette avant de contacter Me Laporte.

[83]           Le 3 mai 2002, le conseiller en réadaptation rapporte une conversation avec monsieur Guillemette qui affirme n’avoir jamais dit au travailleur qu’il ne pouvait occuper un emploi de chauffeur de camion et ne jamais lui avoir suggéré de modifier son orientation professionnelle. Il indique que son rapport sera acheminé avant lundi.

[84]           Le 5 mai 2002, monsieur Guillemette signe son rapport d’intervention qu’il adresse au conseiller en orientation.

[85]           Le travailleur et le procureur ont pris connaissance de ce document au moment de l’audience après qu’une demande de complément de dossier ait été faite à la CSST.

[86]           Dans ce document, monsieur Guillemette confirme avoir rencontré le travailleur à plusieurs reprises. Il considère qu’il a toutes les qualités requises pour la conduite d’un camion, qu’il a pu constater que lors de la vérification du camion et d’un test de conduite du véhicule sur la route qui a duré plusieurs heures qu’il était en plein contrôle de la situation et exécutait sans peine tous les gestes nécessaires à la bonne sécurité du poids lourd, qu’il était très à l’aise au volant et ne manifestait aucun geste d’impatience ou de fatigue. Monsieur Guillemette considère que les ouvertures suivantes s’offrent au travailleur :

Chauffeur de camion à boîte basculante 10 12 ou 18 roues et plus

Chauffeur de camion style dry box, tous les formats

Chauffeur de camion pour livraison sur palettes

Chauffeur de camion pour bétonnière

Chauffeur de camion pour livraison de petits colis

 

 

 

[87]           Le 21 mai 2002, le conseiller en réadaptation note avoir reçu le rapport de monsieur Guillemette et considère que le travailleur peut occuper les emplois qui y sont énumérés. Le travailleur affirme que monsieur Guillemette avait dit que la conduite d’un camion de style « dry box » ne respectait pas ses limitations fonctionnelles. Quant aux camions à boîte basculante, c’est précisément le type de camion qu’il conduisait lorsqu’il s’est blessé et après évaluation, il a avait été convenu qu’il ne pouvait reprendre cet emploi.

[88]           En ce qui a trait à l’essai routier auquel fait référence monsieur Guillemette, le travailleur affirme que cet exercice n’a duré tout au plus que 45 minutes. Il explique que le camion se trouvait dans la cour chez monsieur Guillemette. Celui-ci a ouvert le capot, constaté qu’il y avait de l’huile qui coulait et qu’il devrait le conduire au garage. Le travailleur confirme avoir conduit en direction de Ste-Anne-des-Plaines jusqu’à un viaduc et ils sont revenus chez monsieur Guillemette qui lui a dit qu’il avait réussi avec une note de 80 %.

[89]           Le 22 mai 2002, le conseiller en réadaptation rapporte une conversation téléphonique avec Me Laporte et mentionne que celui-ci considère que le fait que le travailleur ait été invité à postuler pour un emploi de chauffeur d’autobus urbain constitue une modification du plan individualisé de réadaptation qui doit être constatée par écrit. Il est convenu qu’ils en discuteront plus amplement dans quelques jours. Le conseiller fait alors le calcul de l’indemnité réduite de remplacement du revenu à laquelle le travailleur aurait droit en retenant un taux horaire de 14 $ comme chauffeur d’autobus.

[90]           Après le 22 mai 2002, on ne retrouve aucune note évolutive du conseiller en réadaptation.

[91]           Dans une lettre signée le 7 août 2002 adressée au conseiller en réadaptation, Me Laporte réitère sa demande de décision modifiant le plan individualisé de réadaptation. Aucune suite ne semble avoir été donnée à cette demande.

[92]           Le travailleur affirme que suite à la décision du 9 octobre 2001 déterminant l’emploi convenable de camionneur sans manutention, il a entrepris des démarches en relation avec cet emploi et il a été confronté aux difficultés suivantes : plusieurs de ces emplois exigeaient la manipulation de poids, une disponibilité de nuit, une bonne forme physique et la connaissance de l’anglais, toutes choses qui ne correspondent aucunement à son profil.

[93]           Au soutien de ses prétentions, le travailleur a déposé une compilation de centaines d’offres d’emplois de camionneur affichées en 2002 et 2003, certaines disponibles dans la région de Lanaudière et il en a commenté quelques unes.

[94]           On retrouve au dossier une description du poste de chauffeur de camion sous le code 7411-002 de la Classification nationale des professions en date du 17 janvier 2001. Les extraits suivants de ce document sont utiles à la compréhension du dossier :

DÉFINITION

 

Employé ou employée des services des transports routiers dont le métier est de conduire, de façon sécuritaire et professionnelle, un camion de tonnage moyen sur les routes locales ou sur de longues distances, conformément à un itinéraire établi, en vue d’assurer un service de transport et de livraison de marchandises efficace et conforme aux horaires établis.

 

 

PRINCIPALES TÂCHES

 

-     Avant le départ, vérifie les freins, les pneus, les phares, les avertisseurs sonores, le système de climatisation ou de réfrigération.

-     Reçoit d’un répartiteur une feuille de route où sont inscrits les endroits où il devra laisser ou prendre de la marchandise.

-     Conduit le camion à destination, soit seul, soit en équipe de deux personnes, en respectant les règlements de sécurité et de la circulation.

-     Manoeuvre le camion pour le ranger aux quais de chargement ou de déchargement.

-     Arrime la cargaison sur le camion avec des câbles, des chaînes, des crochets et des brides.

-     S’assure que la charge est disposée de façon à ce que l’espace disponible soit utilisé au maximum, qu’elle est bien arrimée et que le poids est réparti uniformément.

-     Prépare des reçus pour le chargement embarqué ou livré.

-     Encaisse le paiement des marchandises ou des matériaux.

-     Ravitaille le camion en carburant et exécute des réparations d’urgence au besoin telles que changement de pneus, d’ampoules, de fusibles et de bougies.

-     Note l’information sur les cargaisons, les distances parcourues, la consommation d’essence, etc.

 

 

[95]           Les exigences physiques de cet emploi sont les suivantes : être capable de rester assis durant de longues périodes, coordonner les mouvements des membres supérieurs et inférieurs, soulever des poids de 5 à 10 kg et avoir de bons réflexes. Les perspectives d’emploi pour la région de Lanaudière sont qualifiées de restreintes.

[96]           Madame Andrée Godin, conseillère en orientation, a témoigné à l’audience et commenté le rapport d’expertise qu’elle a effectué à l’automne 2002 à la demande du représentant du travailleur. Dans le cadre de ce mandat, madame Godin devait évaluer la capacité du travailleur à occuper un poste de camionneur sans manutention et vérifier si cet emploi présentait une possibilité raisonnable d’embauche pour monsieur Perreault.

[97]           Pour rédiger son expertise, elle a pris connaissance du dossier CSST, analysé la description du poste dans le document Repères, rencontré monsieur Perreault qui lui a apporté son cartable de recherche d’emplois, consulté le Guichet emploi du Centre local d’emploi et les offres d’emploi publiées dans les journaux, rencontré deux personnes ayant occupé l’emploi de camionneur, consulté un physiothérapeute et contacté des employeurs de la région. Les extraits suivants de l’expertise de madame Godin sont pertinents à la solution du présent litige :

Le marché du travail :

 

[…]

 

Les exigences habituelles pour occuper un emploi de conducteur sont de posséder le permis de conduire en fonction du type de camions (numéro de classe), de connaître le français et de posséder un anglais de base.

 

Cependant, pour plusieurs postes les employeurs ont des exigences plus élevées, par exemple, le fait d’être bilingue, d’avoir travaillé au niveau du transport en vrac ou dans le transport de matières dangereuses, d’être en bonne santé physique, d’être en mesure de remettre un rapport d’antécédents criminels et/ou un dossier de conduite de la Société d’assurance automobile du Québec, d’avoir de l’expérience sur un type de camion en particulier, ou enfin de posséder des connaissances de base en mécanique.

 

[…]

 

Selon les postes, on exige entre 1 à 5 ans d’expérience de travail et parfois ces années d’expérience doivent être toutes avec un type de véhicule en particulier.

 

[…]

 

 

Commentaires recueillis en milieu de travail :

 

Nos conversations avec un ancien chauffeur de camion nous ont permis de valider les informations que nous avions recueillies de Repères et de nos lectures d’une centaine d’offres d’emploi.

 

Ainsi, nous pouvons confirmer que les informations concernant les exigences générales et spécifiques, les horaires de travail, le salaire et l’expérience reflètent bien la réalité. De plus, selon cette personne, il est évident q’à un moment ou un autre, le conducteur ou chauffeur de camion aura à forcer même si, en principe, il n’a pas à s’occuper du chargement ou du déchargement du camion. Il semblerait que cela peut être à la suite d’une crevaison, d’un bris, pour ajuster la toile ou une sangle, ou tout simplement parce qu’il s’est enlisé dans un chantier en construction.

 

[…]

 

Nous avons également communiqué avec différents employeurs de la région. La grande majorité nous ont dit que jamais ils n’engageraient un conducteur souffrant de tendinite à cause soit des tâches du poste, de la douleur causée par la conduite sur une longue période ou à cause des risques d’absences répétées.

 

[...]

 

 

COMMENTAIRES

 

Lorsque nous avons pris connaissance de ce dossier, un élément important nous a étonnés. En effet, malgré que la conduite d’un véhicule est la tâche la plus importante d’un conducteur de camion, cette tâche passe plutôt inaperçue dans les descriptions produites. C’est le cas, entre autres, de l’évaluation réalisée par monsieur Claude Bougie, ergothérapeute, datant du 11 septembre 2001.

 

En effet, dans son rapport, monsieur Bougie mentionne que le chauffeur doit se rendre chez le client sans pour autant s’arrêter au fait que la distance entre l’endroit où il doit charger et celui où il doit décharger peut être grande. Ainsi, il ne fait nullement mention du niveau de la position des bras lors de la conduite, du fait que cette position soit statique, des mouvements que le conducteur doit faire lors du changement de vitesses et enfin des vibrations lors de la conduite.

 

[…]

 

Monsieur Perreault, tout comme je vous l’ai mentionné plus haut, ne fait pas exception et devient souffrant lorsqu’il conduit. À ce sujet, nous vous rappelons que le Dr. Le Bouthillier en avait fait mention dans son rapport du 16 août 2001, rapport produit avant celui du Dr. Bougie.

 

[sic]

 

 

[98]           Madame Godin reconnaît qu’il y a beaucoup de postes de camionneur offerts et selon les témoignages recueillis, le chauffeur de camion peut être appelé à participer au chargement et au déchargement de la cargaison. En tenant compte de l’ensemble des caractéristiques de monsieur Perreault, aucun ne respectait intégralement son profil et c’est pour cette raison qu’elle conclut à l’absence de possibilité raisonnable d’embauche. Madame Godin rappelle que le travailleur a des limitations fonctionnelles suite à une épicondylite opérée au coude gauche et une tendinite de l’épaule droite, ce qui, selon elle, constitue un problème important lorsqu’on envisage un poste de camionneur et diminue d’autant les possibilités d’embauche.

 

L’AVIS DES MEMBRES

[99]           La membre issue des associations syndicales est d’avis que la requête du travailleur devrait être accueillie. Ce membre considère que dans les circonstances du présent dossier, le travailleur a démontré par preuve prépondérante que les discussions qui ont eu lieu avec le conseiller en réadaptation suite à sa contestation de la décision relative à l’emploi convenable et les promesses faites par le conseiller en réadaptation expliquent que le travailleur se soit désisté de sa contestation de la décision rendue concernant l’emploi convenable déterminé initialement.

[100]       Par ailleurs, lorsque le travailleur a réalisé que les démarches entreprises ne permettaient pas d’en arriver à une solution dans son dossier, il a alors contesté en mars 2002 la décision du 9 octobre 2001 déterminant l’emploi convenable et dans le contexte particulier du présent dossier, il y a un motif raisonnable permettant d’expliquer le retard à contester dans la mesure où les attentes qui avaient été à l’origine du désistement n’ont pas été rencontrées.

[101]       En ce qui a trait au fond du litige, ce membre considère que l’emploi de chauffeur de camion sans manutention n’est pas un emploi convenable que le travailleur était capable d’occuper. En effet, cet emploi ne respectait pas les limitations fonctionnelles du travailleur et, dans ces circonstances, un nouvel emploi convenable devrait être déterminé.

[102]       Le membre issu des associations d’employeurs est d’avis que la requête du travailleur devrait être rejetée. Ce membre considère qu’il est manifeste que le travailleur ne veut pas être camionneur et ce peu importe ce que le conseiller en réadaptation a pu lui proposer pour l’inciter à se désister.

[103]       Ce membre considère que le travailleur n’a pas fait de réelles recherches d’emplois si ce n’est pour démontrer qu’il était incapable d’occuper cet emploi. Dans ces circonstances, le travailleur n’a pas démontré de motif raisonnable de le relever du défaut d’avoir soumis sa réclamation dans le délai prévu à la loi.

[104]       Concernant le fond du litige, ce membre considère que les limitations fonctionnelles et la capacité résiduelle du travailleur lui permettent d’occuper l’emploi de chauffeur de camion sans manutention. Il retient de plus que ce poste existe, que les postes sont offerts et que le travailleur est capable d’occuper cet emploi compte tenu de son expérience. Il ajoute que comme le travailleur n’a pas de motivation pour obtenir ce genre de poste, il aurait été préférable de l’orienter vers un autre secteur d’activité.

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[105]       La Commission des lésions professionnelles doit d’abord se prononcer sur la recevabilité de la requête soumise par le travailleur.

[106]       Dans un premier temps, le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de se saisir de la totalité de la question de la détermination de l’emploi convenable faite par la CSST le 9 octobre 2001 et ce, dans la mesure où il a contesté dans le délai prévu à la loi la décision rendue par la révision administrative le 16 avril 2002 dans le contexte d’une contestation logée par l’employeur.

[107]       La Commission des lésions professionnelles tient à rappeler que l’employeur ne contestait pas l’emploi convenable de camionneur sans manipulation déterminé par la CSST et la capacité du travailleur à l’occuper mais plutôt la mention au début de cette décision qu’il n’y avait pas d’emploi disponible dans l’entreprise.

[108]       Dans sa décision du 16 avril 2002, la révision administrative a rejeté cette prétention de l’employeur et la commissaire soussignée a, dans une décision rendue le 29 mai 2003 à laquelle il est fait référence plus haut, accueilli le moyen préliminaire soulevé par le représentant du travailleur et déclaré irrecevable la requête déposée par l’employeur à l’encontre de cette décision.

[109]       Dans ce contexte, bien que la requête du travailleur à l’encontre de la décision rendue par la révision administrative du 16 avril 2002 ait été déposée dans le délai prévu à la loi, la Commission des lésions professionnelles considère que le litige dont disposait la révision administrative de la CSST ne concernait nullement la question de l’emploi convenable que le travailleur était capable d’occuper et qu’en conséquence, le tribunal n’est pas valablement saisi de cette question par la requête déposée par le travailleur.

[110]       La Commission des lésions professionnelles doit maintenant analyser la recevabilité de la demande de révision logée par le travailleur le 12 mars 2002 à l’encontre de la décision rendue le 9 octobre 2001 déterminant l’emploi convenable.

[111]       Le tribunal retient que le travailleur a contesté, le 2 novembre 2001, la décision rendue par la CSST le 9 octobre 2001 déterminant l’emploi convenable de camionneur sans manutention et sa capacité de l’occuper. Or, le travailleur s’est désisté de cette contestation le 15 novembre 2001.

[112]       La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si la preuve démontre un motif raisonnable expliquant la contestation tardive logée par le travailleur le 12 mars 2002 à l’encontre de la décision rendue par la CSST le 9 octobre 2001. Plus précisément, le tribunal devra analyser les circonstances entourant le désistement signé par le travailleur le 15 novembre 2001.

[113]       Le tribunal retient que dès les premières rencontres avec le conseiller en réadaptation, le travailleur avait exprimé des réserves sur sa capacité à occuper un emploi de camionneur et c’est dans ce contexte qu’il a formellement contesté cette décision le 2 novembre 2001.

[114]       Par ailleurs, avant même que le travailleur demande la révision de la décision du 9 octobre 2001, les notes évolutives font état de discussions pour un éventuel retour au travail chez l’employeur dans un poste adapté et le travailleur avise le conseiller en réadaptation qu’il se cherche un emploi dans un autre secteur d’activité.

[115]       Le tribunal constate que le traitement du dossier en réadaptation est pour le moins inhabituel puisque suite à la détermination de l’emploi convenable, il y a eu de nombreuses communications, discussions et rencontres avec le conseiller en réadaptation concernant le type d’emploi que le travailleur serait capable d’occuper, communications qui se sont poursuivies après que la CSST ait reçu la demande de révision logée par le travailleur le 2 novembre 2001.

[116]       Le travailleur affirme que le conseiller en réadaptation a exigé qu’il se désiste de sa demande de révision avant d’autoriser des mesures de support en recherche d’emploi en ajoutant qu’il pourrait modifier sa décision si cette aide n’était pas concluante. On ne retrouve aucune telle mention aux notes évolutives rédigées par le conseiller en réadaptation si ce n’est la mention, en date du 15 novembre 2001, que le travailleur sera référé à un organisme spécialisé pour supporter sa recherche d’emploi, ce qui est fait à compter du mois de janvier 2002.

[117]       Entre le 15 novembre 2001, date de la signature du désistement, et le 12 mars 2002, date à laquelle le travailleur demande pour la deuxième fois la révision de la décision déterminant l’emploi convenable, il y a eu plusieurs communications entre le travailleur et le conseiller en réadaptation au cours desquelles le choix de cet emploi convenable a été questionné par le travailleur. Toutefois, le tribunal considère que pendant cette période, le travailleur a participé activement aux mesures de recherche d’emploi autorisées par la CSST qui lui avait demandé de faire confiance au personnel de l’organisme auquel il avait été référé compte tenu de leur expérience et de leurs contacts dans le milieu du transport.

[118]       Le tribunal constate de plus que pendant cette période, le travailleur a informé le conseiller en réadaptation de son intérêt pour des emplois dans d’autres secteurs d’activité, entre autres le 10 décembre 2001 où il envisage un poste de contremaître dans un abattoir de porcs et où le conseiller note que cette option sera discutée lorsque le travailleur aura obtenu des précisions sur la nature du travail.

[119]       Le conseiller en réadaptation a aussi acquiescé aux démarches entreprises en février 2002 en vue de l’obtention d’un poste de chauffeur d’autobus urbain proposé par l’organisme auquel le travailleur avait été référé.

[120]       Dans ce contexte, la Commission des lésions professionnelles conclut qu’il est vraisemblable et plausible, même en prenant pour acquis que le conseiller en réadaptation ne l’ait pas exprimé aussi clairement que ce que le travailleur prétend, que celui-ci ait compris de toutes ces interventions que la question de l’emploi convenable était toujours en discussion et que la décision du 9 octobre 2001 n’avait pas de caractère définitif.

[121]       Le tribunal croit utile de revenir sur la rencontre du 7 février 2002 en présence du travailleur, du conseiller en réadaptation et de monsieur Guillemette, personne ressource au Centre de formation Rive-Nord.

[122]       Le travailleur affirme que monsieur Guillemette a alors clairement exprimé qu’il ne pouvait occuper un emploi de camionneur en raison de ses limitations fonctionnelles, que le conseiller en réadaptation a monté le ton de sorte que monsieur Guillemette n’est plus intervenu et qu’à la fin de la rencontre, seul l’emploi de chauffeur d’autobus urbain avait été retenu.

[123]       Les notes évolutives du conseiller en réadaptation, suite à la rencontre du 7 février 2002, ne font pas état du climat de celle-ci mais mentionnent que le travailleur est capable d’occuper l’emploi de chauffeur d’autobus urbain et certains emplois de camionneur.

[124]       À ses notes du 20 février 2002, le conseiller en réadaptation mentionne avoir demandé à monsieur Guillemette de suspendre la rédaction de son rapport. Sans présumer des motifs à l’origine de cette requête du conseiller en réadaptation qui ne donne aucune indication de ce qui justifie une telle demande, le tribunal considère que la séquence est troublante compte tenu des détails apportés par le travailleur relativement à la rencontre du 7 février 2002.

[125]       La Commission des lésions professionnelles, après une analyse attentive de la preuve tant documentaire que testimoniale, conclut que le travailleur a soumis un motif raisonnable expliquant son retard à soumettre la demande de révision de la décision statuant sur l’emploi convenable.

 

[126]       Pour conclure ainsi, le tribunal retient la confusion quant au caractère définitif de la décision statuant sur l’emploi convenable, les circonstances entourant le désistement du travailleur de la contestation qu’il avait dans un premier temps valablement logée et les démarches entreprises entre le mois de novembre 2001 et la rencontre du 7 février 2002.

[127]       La Commission des lésions professionnelles doit maintenant déterminer si l’emploi de camionneur sans manutention retenu par la CSST constitue un emploi convenable tel que défini à l’article 2 de la loi.

[128]       La Commission des lésions professionnelles retient tout d’abord que le travailleur conserve des limitations fonctionnelles impliquant les deux membres supérieurs en relation avec deux lésions professionnelles survenues chez des employeurs différents.

[129]       Selon la preuve documentaire au dossier, lors de l’analyse faite par la CSST de la capacité de travail de monsieur Perreault en regard d’un emploi de camionneur, aucune référence n’est faite aux limitations fonctionnelles reconnues en regard de l’épicondylite gauche.

[130]       Au moment d’évaluer la capacité de travail de monsieur Perreault, la CSST devait tenir compte des limitations fonctionnelles suivantes décrites par le docteur Le Bouthillier dans ses expertises du 15 mars 1999 référant à une épicondylite gauche et du 16 août 2001 pour la tendinite de l’épaule droite :

Éviter les mouvements répétitifs en dorsiflexion et en prosupination au niveau de l’avant-bras gauche

 

Éviter de forcer contre des grosses résistances avec une dorsiflexion du poignet gauche

 

 

Éviter les mouvements répétitifs du membre supérieur droit

 

Éviter de travailler avec le membre supérieur droit plus haut que la hauteur des épaules

 

Éviter de travailler avec le membre supérieur droit à la hauteur de l’épaule au plus haut de façon statique

 

Éviter de lever des charges de plus de 40 lb.

 

 

 

[131]       La Commission des lésions professionnelles considère qu’un emploi de camionneur dont la tâche principale est de conduire un véhicule pendant de longues heures implique une position statique des membres supérieurs pour tenir le volant, ce qui est incompatible avec la condition physique réelle du travailleur et les limitations fonctionnelles retenues.

 

[132]       De plus, selon le témoignage du travailleur et l’information recueillie par madame Godin, l’emploi de camionneur est susceptible d’entraîner la manipulation de poids puisque ces personnes sont invitées à participer activement au chargement et au déchargement de la marchandise.

[133]       À cet égard, le tribunal retient que la description de tâches d’un camionneur rapportée plus haut prévoit spécifiquement que celui-ci doit, entres autres, s’assurer « que la charge est disposée de façon à ce que l’espace disponible soit utilisé au maximum, qu’elle est bien arrimée et que le poids est réparti uniformément », ce qui implique la manipulation de marchandise.

[134]       Le tribunal considère de plus que la preuve prépondérante démontre que l’emploi de camionneur sans manutention ne présente pas de possibilité raisonnable d’embauche pour le travailleur. Plus précisément, le tribunal retient que les possibilités d’emploi dans la région sont qualifiées de restreintes et que selon le témoignage de madame Godin, les employeurs contactés ont affirmé qu’ils n’embaucheraient pas une personne affligée d’une tendinite compte tenu de la nature de l’emploi.

[135]       Le tribunal a pris connaissance des offres d’emploi pour des postes de camionneur et constate que certains exigent spécifiquement une bonne forme physique, un intérêt pour le travail physique et la capacité de manipuler des poids variés. La condition du travailleur, qui a subi des lésions aux deux membres supérieurs pour lesquelles des limitations fonctionnelles ont été reconnues, est incompatible avec les exigences d’un tel emploi.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête de monsieur André Perreault, le travailleur;

INFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 16 avril 2002, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE recevable la demande de révision logée par le travailleur le 12 mars 2002 à l’encontre de la décision rendue par la CSST le 9 octobre 2001;

DÉCLARE que l’emploi de camionneur sans manutention n’est pas un emploi convenable pour le travailleur;

RETOURNE le dossier à la CSST pour qu’elle détermine un emploi convenable que le travailleur est capable d’occuper; et

 

DÉCLARE que le travailleur a droit aux prestations et indemnités prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles jusqu’à ce qu’une décision soit rendue sur sa capacité de travail.

 

 

__________________________________

 

DIANE BESSE

 

Commissaire

 

 

 

 

Me André Laporte

Laporte et Laporte

Représentant de la partie requérante

 

 

M. Gérald Corneau

GCO Santé et Sécurité inc.

Représentant de la partie intéressée

 



[1]          C.L.P. 183408-63-0205, 29 mai 2003, D. Besse.

[2]          Malo Transport (1971) inc. et André Perreault, C.L.P. 161227-63-0105, 28 novembre 2001, R. - M. Pelletier.

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