Décision

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Gabarit EDJ
   

JL0716


COUR SUPÉRIEURE
 
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

 

N° : 500-05-065381-012
   

 

DATE : 21 NOVEMBRE 2001

______________________________________________________________________
 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE : L'HONORABLE DENIS LÉVESQUE, J.C.S.

______________________________________________________________________
 
 
YVES LAURENT
Demandeur-requérant
et
LORÉTA LAURENT
Demanderesse
 
c.

BUANDERIE VILLERAY LIMITÉE
et
MICHÈLE RAYMOND-LAURENT
et
BENOIT LAURENT
Défendeurs-intimés

et

CLAUDE LAURENT
Mis en cause
______________________________________________________________________
 
RECTIFICATION DE JUGEMENT
______________________________________________________________________
 

1. VU l'article 475 du Code de procédure civile;

2. VU l'erreur constatée à la page 5 du jugement rendu le 15 novembre 2001, au paragraphe 21, où on aurait dû lire l'article 238 au lieu de l'article 234;

3. VU l'erreur constatée à la page 6, au paragraphe 22, où on aurait dû lire 2000-2001 au lieu de 2001-2002;

4. VU que le 15 décembre 2001 tombe un jour non juridique, tel qu'il appert du paragraphe 60;

5. VU le consentement à ce que jugement soit rendu sans présentation de requête;



6. POUR CES MOTIFS, LA COUR:

7. RECTIFIE le jugement rendu le 15 novembre 2001;

8. REMPLACE le numéro de l'article 234 par le numéro de l'article 238 au paragraphe 21 du jugement original;

9. REMPLACE 2001-2002 par 2000-2001 au paragraphe 22;

10. REMPLACE le paragraphe 60 du jugement par le suivant:

11. AJOURNE la requête en injonction interlocutoire en chambre 2.16, au 14 décembre 2001 pro forma.

12. LE TOUT SANS FRAIS.
 
  __________________________________
DENIS LÉVESQUE, J.C.S.

 

Me Chantal Perreault
PAQUETTE & GADLER
Pour le requérant
 
Me Marie-Josée Corriveau
JOLICOEUR, LACASSE, GEOFFRION
Pour les intimés
 
Date d'audience : 2 NOVEMBRE 2001




 

JL0716


COUR SUPÉRIEURE
 
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

 

N° : 500-05-065381-012
   

 

DATE : 15 NOVEMBRE 2001

______________________________________________________________________
 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE : L'HONORABLE DENIS LÉVESQUE, J.C.S.

______________________________________________________________________
 
 
YVES LAURENT
Demandeur-requérant
et
LORÉTA LAURENT
Demanderesse
 
c.

BUANDERIE VILLERAY LIMITÉE
et
MICHÈLE RAYMOND-LAURENT
et
BENOIT LAURENT
Défendeurs-intimés

et

CLAUDE LAURENT
Mis en cause
______________________________________________________________________
 
JUGEMENT
______________________________________________________________________
 

13. Durant le cours de la contestation qui n'est pas encore complètement liée sur une action en oppression et une action dérivée ou oblique, le demandeur Yves Laurent (le requérant) présente une requête pour ordonnance de sauvegarde par laquelle il demande:

  1. de suspendre la tenue des assemblées des administrateurs et des actionnaires de Buanderie Villeray Limitée (Buanderie);

  2. de déclarer que l'Inspecteur général des institutions financières du Québec est en droit de statuer sur une requête du demandeur malgré les procédures engagées dans le dossier (R-5);

  3. d'ordonner la suspension de la convocation de toute autre assemblée du conseil d'administration et d'actionnaires de Buanderie jusqu'à jugement final sur le recours principal.

14. Le requérant demande également d'ordonner au mis-en-cause de communiquer au demandeur les informations suivantes:

  1. la copie des chèques qui ont été émis par Buanderie depuis le 23 avril 2001;

  • une copie de tous les documents et lettres échangés relativement au règlement intervenu entre la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal;

  • une copie de tous les nouveaux contrats signés par Buanderie depuis le 1er janvier 2001 jusqu'à la date des procédures;

  • une liste de tous les nouveaux clients que Buanderie a pu acquérir depuis le 1er janvier 2001 avec une indication de ce qu'ils représentent en volume de travail et en argent;

  • une liste de tous les clients que Buanderie a perdus depuis le 1er janvier 2001 avec une indication de ce qu'ils représentent en volume de travail et en argent sur une base annuelle.

  • 1. Les faits


    15.
    Buanderie est une personne morale constituée sous l'empire de la Loi sur les compagnies (L.R.Q. c. C-38) (la Loi). Ses administrateurs sont à la date de la requête le requérant et les intimés Benoît Laurent et Michèle Raymond-Laurent. En tout temps pertinent à la présente cause, le requérant a été et est toujours actionnaire de Buanderie à raison de 33 1/3 % du capital-actions. Les autres actions de l'intimée Buanderie étaient et sont toujours détenues par les personnes ou entités suivantes: Succession de Guy Laurent, Michèle Raymond-Laurent et Benoît Laurent.

    16. Le 26 avril 2000, les actionnaires de Buanderie ont procédé à l'approbation des états financiers de Buanderie pour son exercice financier se terminant le 30 juin 1999 et ont résolu de ne pas nommer de vérificateurs des comptes pour elle pour la période s'étendant jusqu'à la prochaine assemblée annuelle des actionnaires.

    17. Depuis la résolution du 28 avril 2000 nommant Beaulieu Gagné Chiasson, c.a., vérificateurs pour l'exercice financier 1999-2000, l'assemblée annuelle n'a pas nommé pour les exercices financiers suivants depuis. Ces derniers experts comptables ont d'ailleurs préparé les états financiers pour cette période.

    18. Le 28 mai 2001, le requérant s'est adressé au Tribunal en vue d'obtenir sa protection contre des mesures oppressives et des abus de droit dont il ferait l'objet de la part des mis en cause et des intimés relativement à son implication à titre de dirigeant, administrateur et actionnaire de Buanderie. Alors qu'il était aussi directeur général de Buanderie, il a été congédié le 27 avril 2001.

    19. Le requérant, dans son action principale, cherche ultimement à protéger les intérêts de l'intimée Buanderie par des conclusions en destitution des administrateurs Benoît Laurent et Michèle Raymond-Laurent et leur remplacement par un administrateur indépendant afin que les décisions prises par le conseil d'administration soient dans le seul intérêt de Buanderie. Il demande aussi sa réintégration comme dirigeant et salarié et un montant équivalent à son salaire et des dommages-intérêts.

    20. Le 6 juillet 2001, la juge LeBel a rendu une ordonnance de sauvegarde pour valoir jusqu'au jugement final ordonnant à Buanderie de verser un montant de 6 000 $ par mois à titre d'avance à un actionnaire et acquitter les arrérages alors échus; maintenir l'usage d'une automobile incluant le coût de l'essence et des réparations; fournir tous les rapports mensuels le vingt-deuxième jour de chaque mois et maintenir la police d'assurance-vie qui était émise sur la vie du requérant.

    21. Le 17 août 2001, le requérant s'est adressé à l'Inspecteur général des institutions financières du Québec (l'Inspecteur) dans le but d'obtenir la nomination de vérificateurs indépendants pour Buanderie. Depuis cette date, aucune autre mesure n'a été engagée pour nommer un vérificateur indépendant sauf le projet de résolution envoyé par le requérant à ses coactionnaires, à laquelle ils n'ont pas donné de suite.

    22. Le 2 octobre 2001, la requérant a formulé une requête en inhabileté des avocats de Buanderie, dont le sort n'est pas encore réglé. De leur côté, les intimés, personnes physiques, ont fait une requête pour être autorités à plaider par écrit et ont demandé la suspension des procédures en injonction jusqu'à ce qu'il soit statué sur la requête en inhabilité.

    23. Le 11 octobre 2001, la défenderesse Michèle Laurent a fait signifier par huissier un avis de convocation d'une assemblée des actionnaires et des administrateurs pour le 25 octobre 2001. Les avocats du requérant ont répondu qu'à cause de la situation créée par les procédures judiciaires, cet avis de convocation devait être interprété plus comme une menace de l'évincer comme administrateur et dirigeant, tel qu'adopter des résolutions visant à ratifier des actes irréguliers sinon illégaux de l'administration actuelle, d'où la présente requête pour mesures de sauvegarde.

    24. Le 12 octobre 2001, l'honorable juge Macerola a accueilli la requête qui était non contestée, a autorisé les intimés personnes physiques à plaider par écrit, mais a réservé le droit du requérant de s'adresser à la Cour pour toute demande urgente. Le 20 octobre, ces mêmes intimés ont produit leur propre défense.

    25. Suite à la correspondance échangée avec le bureau de l'Inspecteur, l'intimé Raymond Laurent a fait parvenir au requérant deux avis de convocation pour une assemblée annuelle ou spéciale des actionnaires de Buanderie et une assemblée du conseil d'administration le 18 octobre 2001. L'exercice financier pour l'année 2000-2001 se terminait le 30 juin 2001.



    1. Le droit prima facie à l'une ou l'autre des mesures recherchées




    2.1 Généralités



    26. La position fondamentale des intimés repose sur la prémisse qu'il n'existe pas dans la Loi de recours en oppression ou pour abus de droit relativement au requérant à titre de dirigeant ou d'administrateur. Si jamais tel recours existe, ce n'est qu'en faveur des actionnaires en tant que tels, mais comme il n'y a pas de convention d'actionnaires, la règle de la majorité joue de telle sorte que le demandeur n'a pas de droit ni d'apparence de droit pour obtenir une injonction de la nature d'une mesure de sauvegarde (Règlements 13, 18, 34, 36 et 45).

    27. Il est vrai que la législation québécoise sur les compagnies ne contient pas de dispositions expresses sur le recours en oppression comme la législation fédérale. Toutefois, l'action dite dérivée du droit anglais a toujours fait partie de notre droit commun des compagnies et a évolué au fil des ans.

    28. Pour bien en saisir l'esprit, il faut rappeler que l'opprimé prétend que la majorité n'agit pour le bien de la compagnie et que s'il a raison c'est lui qui représente vraiment la compagnie dans ce cas-là. Dans cette perspective, les remèdes qui sont pour le mieux-être de la compagnie ou qui lui sont le moins dommageables peuvent être envisagés. Malgré le silence de la Loi, la règle de la majorité émise en 1843 dans l'arrêt Foss v. Harbottle(1)
    a été nuancée.

    29.
    C'est d'ailleurs dans cet esprit que la juge LeBel a déjà accordé plusieurs mesures rattachées au recours principal qui touchent le requérant non seulement dans ses relations juridiques en tant qu'actionnaire avec Buanderie et avec ses coactionnaires mais dans ses relations juridiques en tant qu'administrateur pour de l'information et même en tant que dirigeant et salarié de l'entreprise si l'on tient compte des ordonnances relatives à une indemnité mensuelle, la fourniture d'une automobile et le paiement d'assurances.

    30. Le problème des conflits entre les actionnaires, administrateurs et dirigeants se pose d'une façon particulièrement aiguë au niveau de la nomination des vérificateurs, de la ratification des actes de l'administration dans la situation actuelle et de l'élection des administrateurs lors de l'assemblée annuelle ou de celle qui en tient lieu.

    31. Dans notre Code civil, les recours qui se rattachent à l'obligation de loyauté et de la bonne foi et à la répression de l'abus de droit que l'on retrouve aux articles 6, 7, 322, 324, 329, 1375, 2138 et 2218 suffisent à soulever une question sérieuse au sens de l'arrêt American Cyananid Co v. Ethicon(2)
    et un droit douteux au sens de Kanetewat Société de développement de la Baie James c. Kanetewat(3).

    32.
    Quand on envisage les remèdes qui peuvent être utilisés pour l'application des articles des droits substantiels des articles du Code civil cités au paragraphe précédent par rapport au silence de la Loi elle-même sur l'action oblique ou dérivée, il est permis de recourir aux pouvoirs généraux des Cours supérieures au Canada dont l'article 33 du Code de procédure civile est en partie un rappel. Au plan purement processuel, les articles 2, 20 et 46 en sont l'expression.

    33. Comme les cours supérieures possèdent les pouvoirs de la Queen's Bench en Common Law et de la Chancery Court en equity en Angleterre, les principes d'Ebrahimi c. Westbourne Galleries Limited(4)
    sont applicables en l'instance indépendamment de la présence ou de l'absence d'un texte semblable à ceux que l'on retrouve aux articles 234 et ss de la Loi sur les sociétés par actions (L.R.C. c. C-44). Cet arrêt a donné lieu à la théorie de l'attente légitime des actionnaires qui a été retrenue par WELLING, B.(5) et par la professeure Raymonde Crête dans Les actionnaires minoritaires des compagnies québécoises: qu'en est-il de leurs recours en cas d'oppression?(6) et par la juge Rayle de notre Cour dans Krela c. OrthoSoft inc.(7). Dans une certaine mesure, l'arrêt de la Cour d'appel dans Martineau, Provencher & Associés c. Grace(8)

    2.2 La nomination des vérificateurs



    34. Les états financiers des années 1999-2000 et 2000-2001 n'ont pas encore été approuvés par les actionnaires, ni n'a-t-on nommé les vérificateurs pour l'année 2001-2002. Il en est de même pour la ratification des actes posés par les administrateurs.

    35. La nomination de vérificateurs indépendants est un des droits des actionnaires (113.1, 112.2, 123.97 et 123.100). Le requérant a déjà demandé à l'Inspecteur général des institutions financières du Québec d'en nommer un alléguant dans une requête spécialement formulée à cet effet qu'il n'y en a pas encore qui ont été nommés depuis la dernière assemblée annuelle des actionnaires qui a eu lieu le 28 février 2000.

    36. Par ailleurs, dans le cours de la présente requête, le requérant a soumis le nom d'un cabinet de comptables indépendants pour effectuer ce travail pour l'exercice financier 2001-2002. Aucune réponse positive n'a accueilli le projet de résolution soumis par le requérant. Le Tribunal ne peut donc entériner ce choix en l'absence de consentement des autres actionnaires.

    37. Il n'est pas nécessaire à ce stade-ci de la demande pour injonction finale de déclarer que l'Inspecteur est en droit de statuer mais il suffit de reconnaître que la Loi lui reconnaît ce pouvoir et que ce n'est que s'il n'exerce pas ce pouvoir ou qu'il l'exerce irrégulièrement ou illégalement que le Tribunal prononcera sur une demande d'annulation. Comme prima facie, l'Inspecteur a un motif de se pencher sur la requête qui est déposée devant lui, le Tribunal se contente de suspendre ce point de l'ordre du jour de l'assemblée générale convoquée pour le 25 octobre tant et aussi longtemps que l'Inspecteur ne se sera pas prononcé.

      2.3 La ratification des actes posés par les administrateurs et l'élection des administrateurs



    38. La ratification des actes posés par les administrateurs et les directeurs ou dirigeants de Buanderie n'est pas une exigence de la Loi. Il s'agit d'un usage reconnu en matière de droit des sociétés par actions et d'une pratique suivie dans le passé aux assemblées annuelles de Buanderie.

    39. Étant donné que dans le présent dossier, la conduite des administrateurs, des directeurs et dirigeants est sous examen par le Tribunal, notamment au chapitre des conflits entre administrateurs par le truchement d'un recours rattaché de la nature d'une action dérivée ou d'au moins une action personnelle basée sur une violation aux devoirs de loyauté et de bonne foi des administrateurs ou par le truchement d'un recours rattaché en oppression, il est préférable en ce moment qu'il n'y ait pas de vote ratifiant les actes de l'administration en place. Cette mesure s'impose d'autant plus que le mandat des avocats des intimés en tant qu'avocats de Buanderie fait l'objet d'une requête en inhabileté d'agir dont le sort n'a pas encore été réglé. Le fait que le mandat des avocats a été accordé par les administrateurs en place soulève bien la question de savoir si ce mandat pouvait être accordé et peut être ratifié en raison des procédures.

    40. Devant cette situation, on peut se demander s'il vaut la peine de tenir une assemblée annuelle des actionnaires même si en droit strict elle devrait être tenue doit y en avoir une (voir la Loi, art. 98.1 et Règlement no 34).

    41. Bien que l'assemblée des administrateurs qui précède l'assemblée annuelle soit utile, elle n'est pas requise par la Loi sauf que l'usage veut que les états financiers de l'année précédente soient approuvés par le conseil d'administration avant que ceux-ci soient par la suite soumis aux actionnaires. L'article 123.100 prévaut au cas de où il y a lieu de craindre pour la position des actionnaires.

    42. Tous les objets d'une telle assemblée entrent dans le champ de la contestation puisque l'élection à venir des administrateurs est aussi un des principaux éléments du recours en oppression du requérant.

    43. Rappelons que les administrateurs, les directeurs et agents ont agi dans les faits pour la compagnie depuis la rupture du contrat de travail du requérant sans qu'il y ait apparemment de préjudice pour la compagnie à l'endroit des tiers au plan purement légal sans pour autant minimiser le préjudice financier qui résulte de l'absence du requérant au travail et à la gestion. L'administration au jour le jour de Buanderie n'est pas paralysée selon la preuve. À première vue encore une fois, la doctrine de facto semble s'appliquer à ce stade-ci du déroulement des procédures(9)


    44.
    Le préjudice sérieux, l'urgence et la prépondérance des inconvénients favorisent le requérant à ce stade-ci en ce moment.

    3. Accès à la documentation


    45.
    La résolution relativement à la signature des chèques par laquelle le requérant devait tous les signer a été amendée pour permettre que deux des administrateurs pouvaient les signer. En pratique, cet amendement a eu pour résultat que le demandeur ne peut suivre les dépenses de Buanderie au jour le jour. Cela constitue un changement par rapport à la situation antérieure.

    46. Quant aux documents et lettres échangées relativement à la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal et aux contrats intervenus depuis le 3 janvier 2001, ils sont nécessaires à la préparation de la cause au fond.

    47. Une fois la défense produite, ce qui est le cas de Buanderie et des autres intimés, les intimés sont obligés de donner communication et de laisser prendre copie de tout écrit se rapportant à la demande par la combinaison des articles 398 et 402. Il n'y a aucun doute que les documents requis sont pertinents au litige. Cependant, le requérant ne peut obtenir plus que ce que la loi permet, c'est-à-dire en prendre communication et s'en faire lui-même des copies comme le prévoit le texte des articles 398 et 402 et des articles 106, 108.1 et 91.1 de la Loi.

    48. Les intimés ont consenti à fournir la liste des clients nouveaux depuis le 1er janvier 2001 avec une indication de ce qu'ils représentent en volume de travail et en argent sur une base annuelle. Il en est le même de la liste des clients perdus depuis le 1er janvier avec des indications de même nature. Il va sans dire que ces listes de documents sont aussi pertinentes à la préparation de la cause au fond.

    49. L'argument de la chose jugée du jugement de la juge LeBel, s'il avait une valeur avant la production de la défense, n'en a plus maintenant en raison de l'application des articles 398 et 402. L'information contenue dans les documents demandés devra rester confidentielle en raison du fait qu'ils ne font pas partie officiellement du dossier (C.p c. 398.1) et du fait qu'il ne serait pas séant, à ce stade-ci, que des concurrents et des tiers puissent prendre connaissance de ces informations. D'un autre côté, l'obligation de loyauté du requérant et des intimés est certainement mieux servie par la confidentialité(10)
    .

    50.
    Les ordonnances relatives à la documentation sont des ordonnances sui generis qui n'entrent pas dans le champ des ordonnances de sauvegarde comme telles.

    4. Sommaire des motifs


    51.
    Vu le conflit possible de mandat des avocats par rapport au bien-être du Buanderie qui représentent à la fois celle-ci et les autres intimés dans le cadre d'un recours de fond de la nature d'une action dérivée ou d'au moins un recours en oppression basé sur l'abus de droit et la mauvaise conduite en regard de l'obligation de loyauté;

    52. Vu que le requérant a raison de craindre que la conduite des intimés depuis le 27 avril 2000, tel que l'a constaté le juge LeBel, se perpétue sans le recours à la demande de sauvegarde et d'accès;

    53. Vu aussi que l'Inspecteur des institutions financières ne s'est pas prononcé;

    54. Vu que les conditions pour dresser les états financiers ne peuvent exister en ce moment et vu le jugement de la juge LeBel, il est séant de recourir à l'article 754.2 au plan d'un remède appuyé par le droit substantiel prima facie basé sur les articles 123.76, 123.100, 113.2 de la Loi pour émettre une ordonnance de sauvegarde supplémentaire;

    55. Vu que dans ce contexte, il existe un préjudice sérieux et que l'urgence de la prépondérance des inconvénients favorisent le requérant;

    56. PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:

    57. ACCUEILLE en partie la présente requête;

    58. ORDONNE aux parties défenderesses de communiquer les informations suivantes:

    1. LAISSER le requérant prendre connaissance et copie de la liste des chèques qui ont été émis par Buanderie Villeray Limitée depuis le 23 avril 2001;

    2. LAISSER au requérant prendre copie de tous les documents et lettres échangés relativement au règlement intervenu avec la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal;

    3. LAISSER prendre copie de tous les nouveaux contrats signés par Buanderie Villeray Limitée depuis le 1er janvier 2001 jusqu'à la date du présent jugement;

    59. DONNE ACTE que l'intimée Benoît Laurent s'est engagé à fournir une liste de tous les clients perdus de Buanderie Villeray Limitée depuis le 1er janvier 2001;

    60. ORDONNE aux parties défenderesses de donner une indication du volume en travail et en argent relativement à ces clients;

    61. CONSTATE que les intimés ont fourni une liste de tous les nouveaux clients de Buanderie Villeray Limitée avec une indication de ce qu'ils représentent en volume de travail et en argent, le tout sur une base annuelle, tel qu'en fait foi les paragraphes des défenses des intimés;

    62. DÉCLARE que les copies de chèques et de contrat ci-haut mentionnés et que ces dernières listes sont confidentielles même si elles ne font pas partie officiellement du dossier en ce moment et ORDONNE que ni le requérant ni les intimés ne dévoilent le contenu de ces listes dont copies devront être déposées sous pli cacheté dans le dossier de la Cour si elles doivent être mis au dossier de la Cour et dont le contenu ne pourra être révélé que sur autorisation du Tribunal;

    63. DONNE ACTE au requérant qui a demandé à l'Inspecteur général des institutions financières du Québec de statuer sur sa requête du demandeur produite comme pièce R-5 pendant le déroulement des procédures;

    64. SUSPEND la convocation des assemblées du conseil d'administration et des actionnaires de Buanderie Villeray Limitée du 18 octobre 2001 envoyée par la défenderesse Michèle Raymond prévue pour le 25 octobre 2001 à 19 h. 30 et 20 h. 30 jusqu'à ce que l'Inspecteur général prononce sur la requête R-5 et qu'avis soit donné au Tribunal de la décision de l'Inspecteur général des institutions financières du Québec;

    65. ORDONNE de suspendre la convocation et de tenir toute nouvelle assemblée du conseil d'administration et des actionnaires de la Buanderie Villeray Limitée visant la nomination de vérificateurs, d'administrateurs de cette compagnie jusqu'à ce que jugement ait été rendu dans la requête en injonction interlocutoire faisant suite à la présente demande de sauvegarde;

    66. ORDONNE qu'il en soit de même dans la ratification des actes des exercices financiers précédents.

    67. La présente mesure de sauvegarde sera en vigueur jusqu'au 15 décembre 2001 et pourra être renouvelée, soit sous forme de mesure de sauvegarde soit sous forme d'injonction interlocutoire conformément à l'article 757 du Code de procédure civile(11)
    ;

    68.
    PERMET la signification de la présente ordonnance en dehors des heures légales et même les jours non juridiques sous l'huis de la porte ou de la boîte aux lettres en cas d'absence des défendeurs;

    69. ORDONNE, pour autant que nécessaire, l'exécution provisoire de la présente ordonnance nonobstant appel;

    70. DISPENSE le requérant de produire un cautionnement.

    71. Le tout, dépens réservés jusqu'à l'issue sur l'action principale.

    72. AJOURNE la requête pour injonction interlocutoire en chambre 2.08 le 15 décembre 2001, à 9.00 de l'avant-midi.
     
      __________________________________
    DENIS LÉVESQUE, J.C.S.

     

    Me Chantal Perreault
    PAQUETTE & GADLER
    Pour le requérant
     
    Me Marie-Josée Corriveau
    JOLICOEUR, LACASSE, GEOFFRION
    Pour les intimés
     
    Date d'audience : 2 NOVEMBRE 2001


    Doctrine citée hors texte par les parties et consultées par la Cour


    ANTAKI Nabil N. et BOUCHARD, C., Droit et pratique de l'entreprise, Tome 1;

    BAUDOUIN, J.L., JOBIN, P.-G., Les obligations, 5e éd., Éd. Yvon Blais, 1998, pp. 346 et ss, 576 et ss;

    BAUDOUIN, RENAUD, Code civil du Québec annoté, Tome 1, 3e éd., Wilson & Lafleur 2000, p. 344;

    CRÊTE, R., Les actionnaires minoritaires des compagnies québécoises: qu'en est-il de leurs recours en cas d'oppression? 19e éd. 1991, Canadian Business Law Journal, pp. 48-85;

    LA RÉFORME DU CODE CIVIL, Personnes, successions, biens, Les Presses de l'Université Laval, p. 224;

    MARTEL, M. et MARTEL, P., Les aspects juridiques de la compagnie au Québec, vol. 1, Wilson & Lafleur, pp 11-1 - 11-18; 21-2 et 22-1 à 23-57; 23-44 et 23-48; 28-12 à 28-27; 30-1 à 30-14; 31-40;

    PAQUETTE, G., La protection des actionnaires soumis aux Lois du Québec - Où en sommes-nous rendus?, SERVICE DE LA FORMATION PERMANENTE BARREAU DU QUÉBEC, Développements récents en droit des actionnaires, 2000, 133-166;

    PETERSON, D. H., Shareholder remedies in Canada, Butterworths, pp. 9.7 - 18.47;



    Autorités citées hors texte par les parties et consultées par la Cour


    Aselford Martin Shopping Centres Ltd c. A.L. Raymond Ltée, [1990] R.J.Q. 1971 (C.S.), pp 1976-1977;

    Baril c. Industries Flexart Ltée, JB 2001-22735, pp 1-12 et 1-13;

    Houle c. Banque canadienne nationale, [1990] 3 R.C.S. 122 ;

    Boyle c. Commission scolaire English Montreal, REJB 2000-19940 ;

    Cartier c. Tessier, (C.S.) AZ-99021670 , J.E. 99-1350 ;

    Clavet c. Boulanger, ès qualités «Administratrice du Comité de retraite», REJB 1998-09284 ;

    Comité Concerned Citizens of Ayer's Cliff c. 9071-6812 Québec inc., REJB 2000-20728 ;

    D. (M) c. 2… Québec inc., AZ-99026434 , pp. 1-2 et 1-4;

    Doré c. Ville de Verdun, [1997] 2 R.C.S. 862 ;

    Fédération des caisses d'économie Desjardins du Québec c. Caisse d'économie des employés municipaux de Québec et al, REJB 2000-21614 (C.S.);

    Fédération des productions acéricoles du Québec c. Regroupement pour la commercialisation des produits de l'érable du Québec inc., AZ-01021788 , J.E. 2001-1444 ;

    Friesen c. Gimli & District Metis Assn. inc., CarswellMan 428, 120 Man. R. (2d) 226, 13 C.P.C. (4th) 26;

    Kruger inc. c. Kruger, (C.A.) 86-1124

    Lapierre c. Pelletier, (C.A.) 500-09-001385-921, AZ-94011258 ;

    Le Sporting Club du Sanctuaire inc. c. 2320-4365 Québec inc., [1989] R.D.J. 596 ;

    Marchand de tabac Burlington-on-White inc. c. Havana House Cigar & Tobaco Merchants Ltd., REJB 1997-02128 ;

    Miller c. Shustack, J.E. 99-1858 (C.S.);

    Sous-poste de camionnage en vrac Deux-Montagnes c. Construction Louisbourg Ltée, REJB 1997-09456 ;

    Standal's Patents Ltd. c. 160088 Canada inc., [1991] R.J.Q. 1996 , p. 2004;

    Thémax inc. c. Imax Corporation, REJB 2000-20866 ;

    Turmel c. 3092-4484 Québec inc., [1994] R.D.J. 530 ;

    Turmel c. 9002-7988 Québec inc., [1994] R.D.J. 530 (C.A.);

    Ville de l'Ancienne-Lorette c. CUQ, [1996] R.J.Q. 1345 , pp 1344-1353


    1.  (1843) 2 Hare 461, 67 E.R. 189.

    2.  [1975] A.C. 396.

    3.   [1975] C.A. 166 sp 185 et ss. Voir aussi Manitoba (Procureur général) c. Metropolitan Stores Ltd, [1987] 1 R.C.S. 110 .

    4.  [1973] AC 360.

    5.  Corporate Law in Canada, The governing principles,, 2e éd. Toronto, Butterworths, 1991, pp. 508-521.

    6.  19e éd. 1991. Canadian Business Law Journal, sp. 77 et 78.

    7.  AZ050084452.

    8.  J.E. 2001- 1787 (C.A.)., voir spécialement les paragraphes 171 et 172.

    9.  MARTEL, Précis de droit sur les compagnies au Québec, p.. 464 et 465.

    10.  Lac d'amiante du Québec Ltée c. 2858-0762 Québec inc., 2001 C.S.C. 51 .

    11.  Natrel inc. c. F. Benardimi inc., [1995] R.D.J. 383 (C.A.).

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