Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Lanaudière

JOLIETTE, le 6 août 2002

 

 

DOSSIER :

171610-63-0111

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Me Alain Archambault

 

 

DOSSIER CSST :

113284871

ASSISTÉ DES MEMBRES :

Francine Melanson

Associations d’employeurs

 

 

 

 

Richard Tremblay

Associations syndicales

 

 

 

 

ASSISTÉ DE L'ASSESSEUR :

Dr Michel Lesage

 

 

 

 

AUDIENCE TENUE LE :

24 avril 2002

 

 

 

 

À :

Joliette

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RONALD LALUMIÈRE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LES ENTREPRISES CLÉMENT ROBILLARD INC.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Commission de la santé et de la sécurité du travail - LANAUDIÈRE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTERVENANTE

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 1er novembre 2001, monsieur Ronald Lalumière (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête contestant la décision rendue le 25 octobre 2001 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d'une révision administrative.  La décision de la CSST, rendue le 25 octobre 2001, comprend deux volets.

[2]               Dans un premier volet, la CSST déclare irrecevable la contestation logée par le travailleur, le 8 juin 2001, à l’encontre de la décision qu’elle a rendue le 2 septembre 1999, et qui se lit ainsi :

Comme vous ne pouvez occuper votre emploi habituel, nous avons évalué avec vous si un autre emploi ailleurs sur le marché du travail pouvait convenir.  Ainsi, nous avons retenu comme emploi convenable celui de gestionnaire d’entreprise commerciale qui pourrait vous procurer un revenu annuel estimé à 21 150,00$.  Nous considérons que vous êtes capable d’exercer cet emploi à compter du 2 septembre 1999.

 

La Commission ayant autorisé une subvention de 50 000,00$ pour vous aider à démarrer votre entreprise, nous continuerons de vous verser des indemnités de remplacement du revenu pour une période de 6 mois, soit jusqu’au 1er mars 2000.  Par la suite, aucune indemnité de remplacement du revenu réduite ne vous sera versée puisque le revenu que vous pourriez gagner est équivalent ou supérieur à ce que vous gagniez au moment de votre lésion.

 

 

 

[3]               Dans un deuxième volet, la CSST maintient la décision qu’elle a rendue le 26 septembre 2001 et qui se lit ainsi :

Nous avons reçu les documents concernant la réclamation pour une rechute, récidive ou aggravation survenue le 03 mai 2001.  Nous vous informons que nous ne pouvons accepter cette réclamation pour les raisons suivantes :

 

-  Il n’y a pas de lien entre la lombalgie aigue L4-L5 gauche, sciatalgie gauche et l’entorse lombaire aigue. et l’événement du 15 juillet 1997.

 

Après l’étude de votre dossier, nous concluons qu’il ne s’agit pas non plus d’une autre catégorie de lésion professionnelles.

 

(sic)

 

 

 

[4]               Le travailleur est présent et représenté à l’audience tenue par la Commission des lésions professionnelles.  L’employeur, Les Entreprises Clément Robillard inc., bien que convoqué, n’est pas représenté.  La CSST, partie intervenante au dossier, est représentée.

 

L'OBJET DE LA REQUÊTE

[5]               Quant au premier aspect de la décision de la CSST du 25 octobre 2001, le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a demandé la révision de la décision de la CSST du 2 septembre 1999, conformément aux dispositions prévues à l’article 358 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).  En effet, il prétend qu’il a contesté la décision du 2 septembre 1999 dans les 30 jours de sa notification.

[6]               Vu que selon lui (le travailleur), il a contesté la décision de la CSST du 2 septembre 1999 conformément à la loi, le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de retourner le dossier à la CSST pour qu’elle enclenche le processus de révision quant à la détermination de la base salariale à être retenue pour ce qui est de l’emploi convenable de « gestionnaire d’entreprise ».

[7]               Pour ce qui est du deuxième aspect de la décision de la CSST du 25 octobre 2001, le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision de la CSST et de déclarer qu’il a été victime, le 3 mai 2001, d’une lésion professionnelle en raison d’une récidive, rechute ou aggravation de la lésion professionnelle du 15 juillet 1997 ou soit en raison d’un nouvel accident du travail.

 

L'AVIS DES MEMBRES

[8]               Pour ce qui est du délai de contestation de la décision de la CSST du 2 septembre 1999, le membre issu des associations syndicales et la membre issue des associations d’employeurs sont d’avis que, selon la preuve testimoniale et documentaire, le travailleur n’a pris connaissance de cette décision qu’au début de juin 2001 et qu’il a donc contesté la décision dans le délai prévu à l’article 358 de la loi.

[9]               Pour ce qui est de la lésion alléguée du 3 mai 2001, les deux membres sont d’avis qu’il ne peut s’agir d’une lésion professionnelle en raison d’une récidive, rechute ou aggravation de la lésion professionnelle du 15 juillet 1997.  Ils indiquent que la lésion professionnelle du 15 juillet 1997 fut consolidée sans atteinte permanente et sans limitation fonctionnelle et que, de plus, il y a un long silence médical de plus de 25 mois, entre la lésion professionnelle initiale et la lésion professionnelle alléguée du 3 mai 2001.

 

[10]           À savoir si le travailleur a subi une lésion professionnelle le 3 mai 2001, en raison d’un nouvel accident du travail, le membre issu des associations syndicales est d’avis, au départ, que le travailleur est un travailleur au sens de la loi.  Il est également d’avis que le travailleur a subi, le 3 mai 2001, un nouvel accident du travail.  Il soumet que même si le geste posé par le travailleur, le 3 mai 2001, peut paraître anodin, la Commission des lésions professionnelles se doit d’accueillir la requête par celui-ci étant donné que par présomption de faits, le tribunal peut statuer qu’il est survenu, le 3 mai 2001, un événement imprévu et soudain ayant occasionné une entorse lombaire.

[11]           La membre issue des associations d’employeurs est d’avis que même si le travailleur peut être qualifié comme travailleur au sens de la loi, l’événement bénin allégué par le travailleur, le 3 mai 2001, ne peut avoir occasionné une entorse lombaire, entorse qui fut comme telle diagnostiquée qu’un mois après la survenance de la lésion professionnelle alléguée.  Vu ce fait, elle est d’avis que la présomption prévue à l’article 28 de la loi ne peut trouver application dans le présent dossier.

[12]           Elle est aussi d’avis que dans le geste allégué par le travailleur, le 3 mai 2001, soit le simple fait de se pencher pour faire la vérification de l’état d’un véhicule, ne peut être qualifié d’événement imprévu et soudain au sens de l’article 2 de la loi.

 

LES FAITS ET LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[13]           La Commission des lésions professionnelles se doit de décider, dans le présent dossier, de deux sujets distincts.

[14]           Dans le premier sujet, la Commission des lésions professionnelles se doit de disposer de la question suivante:  le travailleur a-t-il contesté la décision de la CSST, du 2 septembre 1999, dans le délai prévu à l’article 358 de la loi ?  Et, dans l’affirmative, quelle en est la conséquence ?

[15]           Dans le deuxième sujet, la Commission des lésions professionnelles se doit de décider si le travailleur a été victime, le 3 mai 2001, d’une lésion professionnelle au sens de la loi.

[16]           Dans sa prise de décision, la Commission des lésions professionnelles a tenu compte de l’ensemble de la preuve documentaire au dossier, tant constituée avant l’audience que celle déposée lors de l’audience;  elle a tenu compte de l’argumentation des procureurs;  et de l’avis des membres.

[17]           Dans le présent dossier, la Commission des lésions professionnelles se réfère aux éléments qu’elle a retenus pour disposer des questions en litige ci-haut mentionnées.

[18]           Pour ce qui est du premier sujet, la Commission des lésions professionnelles se doit de répondre par l’affirmative à la question posée, à savoir si le travailleur a contesté la décision de la CSST, du 2 septembre 1999, dans le délai imparti à la loi.

[19]           L’article 358 de la loi stipule ce qui suit :

358.  Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission en vertu de la présente loi peut, dans les 30 jours de sa notification, en demander la révision.

 

Cependant, une personne ne peut demander la révision d'une question d'ordre médical sur laquelle la Commission est liée en vertu de l'article 224 ou d'une décision que la Commission a rendue en vertu de la section III du chapitre VII, ni demander la révision du refus de la Commission de reconsidérer sa décision en vertu du premier alinéa de l'article 365.

 

Une personne ne peut demander la révision de l'acceptation ou du refus de la Commission de conclure une entente prévue à l'article 284.2.

________

1985, c. 6, a. 358; 1992, c. 11, a. 31; 1996, c. 70, a. 40; 1997, c. 27, a. 14.

 

 

[20]           Il ressort de la jurisprudence[2] de la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles (la CALP) et de la Commission des lésions professionnelles que le délai de 30 jours prévu à l’article 358 de la loi courre à compter de la notification de la décision de la CSST dont on veut demander la révision.

[21]           La preuve documentaire et testimoniale démontre que le travailleur a déménagé en août 1999 et qu’il en a avisé la CSST, preuve en est le chèque de 50 000,00 $ qu’il a reçu de la CSST, mais la décision du 2 septembre 1999 fut expédiée à son ancienne adresse.

[22]           La preuve documentaire démontre de plus que dès le 2 décembre 1998, le procureur du travailleur demande à la CSST de lui faire parvenir « toutes décisions qui seront rendues ».  En effet, maître André Laporte, dans sa lettre adressée à la CSST le 2 décembre 1998, écrit ce qui suit :

Relativement au dossier mentionné en titre, nous tenons à vous informer que nous sommes les nouveaux procureurs de monsieur Ronald Lalumière dans son dossier d’accident du travail.

 

Ainsi, vous voudrez bien communiquer avec le soussigné, concernant toute rencontre relativement à sa réadaptation et de nous faire part de toutes décisions qui seront rendues par la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

 

 

[23]           Il ressort de l’audience tenue par la Commission des lésions professionnelles que même si le procureur du travailleur a demandé, spécifiquement, à la CSST de lui transmettre tous documents et toutes décisions concernant le travailleur, la CSST n’a pas tenu bon de le faire quant à la décision du 2 septembre 1999.

[24]           Dans l’affaire Landry et Empire Stevedoring Co. ltd[3], le commissaire écrit ce qui suit :

Enfin, la Commission d’appel partage l’opinion du procureur de l’employeur à l’effet qu’il serait souhaitable que la Commission adresse une copie de ses correspondances au procureur des parties lorsqu’elle sait qu’un tel procureur représente les intérêts d’un travailleur.

 

 

[25]           Le soussigné partage l’opinion du commissaire McCutcheon dans cette affaire.

[26]           Lors de son témoignage devant la Commission des lésions professionnelles, le travailleur déclare que ce n’est que le 7 juin 2001, lors d’une rencontre avec l’agent d’indemnisation de la CSST et son procureur, qu’ils ont pris connaissance de la décision de septembre 1999.

[27]           Vu ce qui précède, la Commission des lésions professionnelles est donc d’avis que le travailleur a contesté la décision rendue le 2 septembre 1999, par la CSST, dans le délai prescrit à l’article 358 de la loi.

[28]           Le travailleur ne contestant pas la subvention de 50 000,00 $ qu’il a reçue de la CSST pour le démarrage de son entreprise mais bien le salaire annuel estimé de cette entreprise, soit 21 500,00 $, la Commission des lésions professionnelles ne disposant pas de la preuve nécessaire à la détermination du salaire annuel estimé, elle se doit donc de retourner le dossier du travailleur à la CSST pour que cette dernière enclenche le processus de révision de la décision qu’elle a rendue le 2 septembre 1999, sur cet élément.

[29]           La Commission des lésions professionnelles se doit maintenant de décider si le travailleur a été victime, le 3 mai 2001, d’une lésion professionnelle au sens de la loi.

[30]           La notion de lésion professionnelle est ainsi décrite à l’article 2 de la loi :

2.  Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :

 

« lésion professionnelle » :  une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation.

________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1.

 

 

[31]           Le procureur du travailleur soumet, au départ, que son client a subi une lésion professionnelle le 3 mai 2001, en raison d’une récidive, rechute ou aggravation de sa lésion professionnelle initiale du 15 juillet 1997.

[32]           La lésion professionnelle du 15 juillet 1997 est ainsi décrite au formulaire « Réclamation du travailleur » complété le 29 juillet 1997 :

Je montais dans une échelle qui était fixée sur un tuyau.  L’échelle a glissé vers le bas et j’ai tombé d’environ une douzaine de pied sur le sol.  J’ai arrivé sur le talon gauche sur le dos et le poignet.  J’ai mal au cou, au dos, difficulté de la ... (illisible) et ne peut marcher sur mon pied gauche.  ... (illisible)

 

(sic)

 

 

 

[33]           Le dossier du travailleur est soumis au Bureau d’évaluation médicale (BEM).

[34]           Le 1er avril 1999, le docteur Fernand Duplantis, neurologue et membre du BEM, émet l’avis suivant :

DISCUSSION :

 

Ce réclamant a donc subi lors de l’événement du 15 juillet 1997 des contusions multiples avec entorse cervicale et lombaire ainsi qu’une fasciite plantaire gauche.  Il a reçu de multiples traitements de physiothérapie depuis ce temps et, malgré les traitements, il allègue toujours des douleurs cervicales de même que des douleurs au niveau du membre supérieur gauche et au niveau lombaire.  Il a reçu trois infiltrations de cortisone au niveau de la fasciite plantaire et il allègue toujours la persistance des douleurs à ce niveau.  Nous n’avons malheureusement le rapport de la dernière cartographie osseuse dont la première avait démontré des signes de fasciite plantaire.

 

Au point de vue neurologique, comme il semble y avoir un problème en ce qui concerne l’atrophie musculaire chez ce réclamant, j’ai donc mesuré les membres avec le plus de précision possible et je n’ai pu noter aucune atrophie musculaire quoique les docteurs Forget et Le Bouthillier fassent état que cette atrophie est visible à l’oeil nu.  Par ailleurs, je n’ai pu mettre en évidence aucune faiblesse musculaire ni déficit de la sensibilité.  L’examen clinique révèle cependant une limitation des mouvements du rachis cervical.  Au niveau lombaire, l’examen s’avère strictement normal.

 

 

AVIS MOTIVÉ :

 

 

1-     DIAGNOSTIC :

 

Le diagnostic est donc celui d’une entorse cervicale greffée sur une maladie discale dégénérative multi-étagée ainsi qu’une entorse lombaire résolue et une fasciite plantaire gauche.

 

 

 

2-     DATE OU PÉRIODE PRÉVISIBLE DE CONSOLIDATION DE LA LÉSION :

 

        La date de consolidation de la lésion est celle d’aujourd’hui, le 26 mars 1999.

 

 

3-     NATURE, NÉCESSITÉ, SUFFISANCE OU DURÉE DES SOINS OU TRAITEMENTS ADMINISTRÉS OU PRESCRITS :

 

Ce réclamant ne reçoit aucun autre traitement de physiothérapie depuis environ trois semaines et je ne crois que d’autres traitements soient jugés utiles en relation avec cet événement du 15 juillet 1997.

 

 

4-     EXISTENCE OU POURCENTAGE D’ATTEINTE PERMANENTE À L’INTÉGRITÉ PHYSIQUE DU TRAVAILLEUR :

 

        SÉQUELLES ACTUELLES :

 

        Code                     Description                                                                DAP %

 

        203 513                 Entorse cervicale avec séquelles fonctionnelles               2 %

        103 480                 Atteinte des tissus mous du membre inférieur                  1 %

 

Il n’y a pas de déficit anatomo-physiologique pour l’entorse lombaire puisque l’examen clinique actuel s’avère normal.

 

 

5-     EXISTENCE OU ÉVALUATION DES LIMITATIONS FONCTIONNELLES DU TRAVAILLEUR :

 

        Les limitations fonctionnelles s’établissent de la façon suivante :

 

        Éviter d’accomplir de façon répétitive ou fréquente des activités qui impliquent de :

 

        -   soulever, porter, pousser et tirer de façon répétitive ou fréquente des charges dépassant environ 15 kilos;

 

        -   effectuer des mouvements répétitifs ou fréquents de flexion, d’extension et de torsion de la colonne cervicale même de faible amplitude;

 

        -   ramper;

 

        -   subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale.

 

 

 

[35]           Le 12 avril 1999, la CSST rend une décision entérinant l’avis du membre du BEM du 1er avril 1999.  Cette décision n’ayant pas été contestée, elle lie donc les parties.

[36]           La lésion professionnelle du 15 juillet 1997 a donc causé une entorse cervicale et une entorse lombaire.

[37]           Il a subsisté, de l’entorse cervicale, une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles.  L’entorse lombaire fut, quant à elle, consolidée sans atteinte permanente et sans limitation fonctionnelle.

[38]           Le 3 février 1999, le docteur Bernard Séguin, neurologue, fait état d’un examen normal au niveau de la colonne lombo-sacrée, sauf pour une douleur en rotation.  Son examen se lit ainsi :

Au niveau de la colonne lombo-sacrée, on note que le patient a une démarche sans boiterie, qu’il a un bassin équilibré.  Il a une légère scoliose dorso-lombaire à long rayon de courbure et peu significative.  Il n’y a pas de spasme ni de contracture.  A la marche militaire sur place, on note des contractions alternées des masses musculaires.  Il n’y a pas de Trendelenbourg.

 

A la palpation, il y a cependant une sensibilité encore importante à la palpation simple de tout le rachis lombo-sacré.  Il y a des kystes ou tumeur des tissus mous, dans les tissus sous-cutanés en para-lombaire gauche jusque dans la région de l’hémithorax inférieur.

 

L’indice de Schoëber modifié est de 0-14-20.5.  La flexion se fait à 90 degrés, l’extension 30 degrés, flexions latérales droite et gauche 30 degrés et rotations droite et gauche 30 degrés.  La flexion est douloureuse, mais l’extension lui fait du bien.  Les rotations droite et gauche, curieusement, provoquent une douleur cervicale irradiant dans la fosse du sus-épineux bilatéralement.  Il n’y a pas d’accentuation de la douleur lombaire à cette manoeuvre.  Je n’ai pas d’explication étiopathogénique pour cette douleur à distance.

 

La marche talon/orteils est difficile à cause de la faciite (sic) plantaire, le patient disant ressentir des douleurs à la marche sur les talons.

 

En position assise, l’élévation de la jambe tendue se fait à 90 degrés sans Lasègue et sans Tripode.  Assis sur la table d’examen, le patient maintient hanches et rachis fléchis à 90 degrés, mais lorsque je lui demande de toucher à ses chevilles, il note une accentuation de la lombalgie.  Il n’y a pas de déficit moteur, pas de déficit sensitif périphérique.  Les réflexes ostéo-tendineux sont normaux.  Il n’y a pas de clonus et le cutané plantaire est en flexion.

 

En décubitus dorsal, le patient n’a toujours pas de Lasègue.  L’examen des hanches est sans particularité de même que les sacro-iliaques mises sous tension.

 

Le patient se tourne en décubitus ventral normalement et on note une extension à plus de 30 degrés non douloureuse.  L’hyperextension des hanches provoque une lombalgie tant du côté droit que du côté gauche, mais la flexion des genoux est sans particularité.  A l’examen du talon gauche, il y a une sensibilité à la pression vis-à-vis la protubérance calcanéenne inférieure ou plantaire et le patient accuse aussi des douleurs à la palpation des tissus mous au pourtour du talon.

 

 

 

[39]           Quant au docteur Guy Le Bouthillier, chirurgien-orthopédiste et spécialiste qu’a consulté le travailleur, à la demande de son procureur, il fait état d’un avis somme toute normal au niveau de la colonne lombo-sacrée dans son expertise du 5 mars 1999.  En effet, il indique :

Une douleur à la palpation de la sacro-iliaque gauche mais manoeuvre de Fabert légèrement douloureuse à gauche.  La manoeuvre de Lasègue est négative, la manoeuvre de Tripode est négative mais la manoeuvre de Straight leg raising positive à gauche ce qui amène une lombalgie lorsque nous faisons la flexion de la hanche gauche avec le genou en extension complète.

 

Les amplitudes articulaires des deux hanches sont normales avec une flexion à 130°, une extension à 0°, une rotation interne de 40° et une rotation externe de 60°.  Aucune douleur à la palpation du grand trochanter, aucune douleur à l’examen du genou, aucun épanchement intra-articulaire.  Les amplitudes articulaires des deux chevilles sont normales de même que l’articulation sous-astragalienne et de l’articulation midtarsienne.  L’examen neurologique et vasculaire des deux membres inférieurs est tout à fait normal.

 

 

 

[40]           Il est à noter que le docteur Le Bouthillier n’attribue aucun déficit anatomo-physiologique au niveau de la colonne lombo-sacrée.

[41]           Le travailleur, ayant fait une réclamation à la CSST alléguant avoir subi une lésion professionnelle, le 3 mai 2001, a le fardeau d’établir, par une preuve prépondérante, qu’il a été victime d’une lésion professionnelle au sens de la loi.

[42]           En l’espèce, le travailleur prétend que le fait de se pencher pour vérifier l’état d’un véhicule est responsable de sa lésion professionnelle.  Il déclare que le 3 mai 2001, il se devait de faire la vérification d’un véhicule automobile.  Pour ce faire, il s’est penché, un genou posé sur le sol, mais qu’étant donné sa condition cervicale, il a « dû se pencher plus loin » et qu’en se redressant, il a « ressenti comme un coup dans le dos » et il est alors tombé sur les fesses.

[43]           Le travailleur alléguant avoir subi une lésion professionnelle, le 3 mai 2001, il a le fardeau d’établir, par une preuve prépondérante, que le fait qu’il décrit, à savoir de se pencher pour vérifier l’état d’un véhicule automobile, le genou posé sur le sol, et que dû à sa condition cervicale, il a « dû se pencher plus loin » et qu’en se redressant, il a « ressenti comme un coup dans le dos » et il est alors tombé sur les fesses.

[44]           Au départ, la Commission des lésions professionnelles retient que la lésion professionnelle initiale du 15 juillet 1997 a impliqué le niveau cervical plus que le niveau lombaire.  En effet, l’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles, découlant de cette lésion professionnelle, sont au niveau cervical et non lombaire, la lésion lombaire ayant été consolidée sans atteinte permanente et sans limitation fonctionnelle.

[45]           La Commission des lésions professionnelles retient qu’il y a un silence médical et ce, quant à la pathologie lombaire, de plus de 25 mois entre la lésion initiale et la lésion alléguée par le travailleur, le 3 mai 2001.

[46]           La Commission des lésions professionnelles ne peut retenir l’opinion du docteur Forget lorsqu’elle déclare, dans son expertise du 30 octobre 2001 (pièce T-8), que le travailleur présente une aggravation de sa condition antérieure au niveau L4-L5.

[47]           Le simple fait d’affirmer une hypothèse voulant démontrer qu’il y a une relation entre une lésion professionnelle antérieure et une lésion postérieure n’est pas suffisant pour convaincre le tribunal qu’il y a bien une relation entre les deux événements.

[48]           Le tribunal est d’avis que l’on doit retrouver, dans une expertise médicale, des éléments objectifs et impartiaux démontrant qu’il y a un lien ou une relation entre une lésion professionnelle antérieure et une lésion que l’on qualifie de récidive, rechute ou aggravation.

[49]           Le simple fait pour un médecin d’affirmer que son expertise soit motivée, tant au niveau des faits qu’au niveau médical, n’est pas suffisant pour convaincre le tribunal qu’il y a une relation entre les deux pathologies.

[50]           La Commission des lésions professionnelles est donc d’avis que le travailleur n’a pas été victime, le 3 mai 2001, d’une lésion professionnelle en raison d’une récidive, rechute ou aggravation de la lésion professionnelle du 15 juillet 1997.

[51]           La Commission des lésions professionnelles se doit donc de décider si le travailleur a été victime, le 3 mai 2001, d’un accident du travail au sens de la loi.

[52]           Mais avant, la Commission des lésions professionnelles se doit de décider si le travailleur est un travailleur au sens de la loi lors de la lésion alléguée le 3 mai 2001.  En effet, lors de l’événement allégué du 3 mai 2001, le travailleur exécutait une activité reliée à son entreprise.  Le travailleur « propriétaire », bénéficiant d’une subvention de 50 000,00 $, a fondé la compagnie 9080-5581 Québec inc. (pièce T-6).

[53]           De l’avis du tribunal, le travailleur agissait à titre de travailleur de l’entreprise lorsque l’événement allégué du 3 mai 2001 est survenu.  Le travailleur recevait une rémunération de l’entreprise (pièce T-4) et il exécutait une activité reliée à la mission de l’entreprise.

[54]           La Commission des lésions professionnelles se réfère sur ces éléments aux affaires John McKenzie (Succession) et Rubans Offrey Canada inc.[4], Bureau et Poulin et Bureau inc.[5] et Goodfellow Lumber inc. et CSST[6], soit que le travailleur exécutait un travail relié à son entreprise contre rémunération et que ses fonctions d’administrateur, au sein de son entreprise, étaient marginales.

[55]           La notion d’accident du travail est ainsi défini à l’article 2 de la loi :

2.  Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :

 

« accident du travail » :  un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle.

 

 

[56]           En premier lieu, la Commission des lésions professionnelles doit examiner si le travailleur peut bénéficier de la présomption prévue à l’article 28 de la loi.

[57]           Trois conditions doivent être remplies pour donner ouverture à la présomption :

-          la survenance d’une blessure;

-          le fait que cette blessure survienne sur les lieux du travail; et

-          le fait que cette blessure survienne alors que le travailleur est à son travail.

 

 

[58]           Le 4 mai 2001, le travailleur consulte le docteur Baumier (nom plus ou moins lisible) qui pose un diagnostic de lombalgie aiguë à la région L4-L5 gauche avec sciatalgie.  Il prescrit des anti-inflammatoires et des traitements de physiothérapie.

[59]           Le 17 mai 2001, le docteur Forget indique, dans son rapport médical sous forme prescrite par la CSST, comme le docteur Baumier, que le travailleur présente un tableau de lombalgie à la région L4-L5 avec sciatalgie gauche.

[60]           Le 7 juin 2001, le docteur Forget pose un diagnostic d’entorse lombaire aiguë à la région L4-L5 gauche.

[61]           De l’avis de la Commission des lésions professionnelles, la présomption prévue à l’article 28 de la loi trouve ici application.

[62]           Le diagnostic de lombalgie aiguë à la région L4-L5 gauche avec sciatalgie peut être assimilable à un diagnostic de blessure.  Les docteurs Baumier et Forget font référence à un qualificatif d’aiguë et notent la présence d’une sciatalgie.  Il y a donc des signes cliniques qui peuvent être assimilables à des signes cliniques d’entorse même si les médecins posent un diagnostic de lombalgie.

[63]           La Commission des lésions professionnelles étant d’avis que le travailleur a subi une blessure le 3 mai 2001, elle est également d’avis que cette blessure est survenue sur les lieux du travail alors que le travailleur était à son travail.

[64]           Il n’y a eu aucune preuve démontrant, de façon prépondérante, que la blessure n’est pas survenue le 3 mai 2001, alors que le travailleur était sur les lieux du travail et qu’il exerçait son travail.  La présomption prévue à l’article 28 de la loi n’ayant pas été renversée, le travailleur a donc été victime, le 3 mai 2001, d’une lésion professionnelle au sens de la loi.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la requête présentée par le travailleur, monsieur Ronald Lalumière;

INFIRME la décision rendue le 25 octobre 2001 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail;

DÉCLARE que le travailleur, monsieur Ronald Lalumière, était dans le délai prescrit par l’article 358 de la loi lorsqu’il a demandé la révision de la décision de la CSST du 2 septembre 1999;

RETOURNE le dossier à la CSST pour qu’elle enclenche le processus de révision de la décision qu’elle a rendue le 2 septembre 1999, quant à la détermination du salaire annuel estimé de l’emploi convenable de « gestionnaire d’entreprise » attribué au travailleur, monsieur Ronald Lalumière; et

DÉCLARE que le travailleur, monsieur Ronald Lalumière, a été victime, le 3 mai 2001, d’une lésion professionnelle au sens de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

 

 

 

 

ALAIN ARCHAMBAULT

 

Commissaire

 

 

 

 

 

Me André Laporte

 

Représentant de la partie requérante

 

 

 

Me Myriam Sauviat

 

Représentante de la partie intervenante

 



[1]          L.R.Q., c. A-3.001

[2]          Bouchard et La Poulette grise inc., 71036-03-9507, 5 décembre 1995, C. Bérubé;  McAdam et Services d’achats Sandorco inc., 113863-63-9904, 25 octobre 2000, F. Dion-Drapeau

[3]          C.A.L.P. 20564-63-9007, 5 mars 1991, L. McCutcheon

[4]          [1995] C.A.L.P. 551

[5]          [1995] C.A.L.P. 1725

[6]          C.A.L.P. 64866-62-9412, 8 décembre 1997, J.-C. Danis

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